Strange Dream and Cautious Nightmare
C'est con, mais c'est deux images dont j'arrive pas à me défaire. Je sais pas vraiment pourquoi. Non, c'est un mensonge. Je pense savoir pourquoi. C'est un motif qui me suit depuis que j'ai commencé à écrire, et depuis que j'ai commencé à créer de manière générale. Pire que ça, je pense que c'est un motif qui m'a suivi depuis que je suis toute petite, depuis que j'ai commencé à consommer de l'art, en fait. Ça me fait marrer, en réalité, de me dire que tout ce que je fais aujourd'hui c'est juste la continuité d'une obsession maladive qui ne m'a jamais quittée. Suffit de mêler à tout ça des convictions plus tardives, nées d'autres expériences et d'autres vies, puis on arrive à l'interprétation que j'en fais aujourd'hui.
C'est pas très intéressant. Enfin, ça l'est peut-être. Ça l'est pour moi, c'est tout ce qui compte. Le Rêve Etrange et le Prudent Cauchemar. S'il y en a un qui brille dans les flottements, les mystères et les peut-être, alors l'autre se repose dans le beau du vrai et ses défauts magnifiques. Si l'un est un phare au milieu du désert, guidant les fantômes de ses navires vers là où les océans sont partis, alors l'autre est un moulin en ruine au fond d'une plaine, que le vent laisse encore tourner pour qu'il chante ses berceuses à ceux qui viennent dormir là. Mais dans tous les cas, ça existe un peu partout et un peu nulle part, un peu tout le temps et un peu jamais. C'est un instant, une fulgurance de doute merveilleux, où on se demande si l'on est vraiment éveillé. Et ça, bah aussi bizarre que ça puisse paraître, c'est pour ça que je fais ce que je fais. Pour me prouver que ces moments existent, qu'ils ont existés et qu'ils le peuvent encore. Pour ça, et pour accomplir une promesse que j'ai faite il y a longtemps à un vieil ami.
Quand j'avais demandé à une amie australienne ce que les mots "Rêve" et "Cauchemar" lui évoquaient, c'est elle qui m'a répondue "A cautious nightmare". Et ça aussi, ça m'a marquée. Pour le coup, je ne saurais vraiment pas dire pourquoi. Surement parce que l'image est belle. Sortir le cauchemar de son idée de terreur et seulement en faire un message bienveillant. C'est peut-être encore moi qui vois la bienveillance partout. Si c'est le cas, alors très bien. Je refuse de vivre dans un monde d'horreur où l'être humain est un monstre par nature, je veux croire en la bonté innée du monde, aussi cliché, aussi naïf et aussi dangereux que cela puisse être. Seulement...seulement parce ça aussi, c'est un idéal pour lequel je me bas chaque jour. Tous les matins je me lève les pinceaux en mains pour peindre mon entourage. C'est important, je pense.
J'aimerais vraiment partager les mondes et les monstres qui m'accompagnent tous les jours. Je l'ai déjà fait par le passé, mais j'ai toujours l'insupportable impression que ça intéresse personne. C'est pas l'endroit pour ça, j'imagine. Mais je peux pas m'empêcher d'y penser et de sourire en coin à chaque fois. Parce que...parce que j'ai toujours énormément de mal à parler de moi pour de vrai, sans les métaphores tordues et les images qui ultimement ne parlent qu'à moi. En fait, je sais pas m'exprimer autrement. Je crois que c'est pour ça que j'ai à la fois si envie et si peur de montrer mon travail, parce qu'ils sont des mots beaucoup plus clairs et beaucoup plus vrais que ceux que j'emploie ce soir. Parce qu'ils mettent en lumière tous les trucs qui trottent là dans un coin d'ma tête. Un p'tit coin qui prend parfois beaucoup de place.
Ça doit être ça, aussi, qui me bloque de manière générale. J'ai des manuscrits à plus savoir quoi en foutre, des mondes et des histoires qui me paraissent plus vrais que la moitié des passants que je croise tous les jours en allant au travail, mais je n'ose jamais les laisser à la lumière du jour. C'est dommage, mais ça viendra. Le printemps aussi, il viendra. Chaque chose en son temps. Et si le cœur m'en dit, et s'il est des curieux qui veulent voir de tout ça, alors peut-être, peut-être qu'il viendra plus tôt.
D'ici là, je vais continuer de rêver, et je vais continuer de partir en quête de ceux que j'ai oublié.
Prendez soin de vous.
Article ajouté le Samedi 30 Octobre 2021 à 00h49 |
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