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Les Trois Mondes de Raidemo



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Informations

» Auteur : Raidemo - Voir le profil
» Créé le 07/12/2005 à 15:31
» Dernière mise à jour le 07/12/2005 à 15:31

» Mots-clés :   Absence d'humains   Absence de poké balls   Aventure   Présence de poké-humains

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Les trois empereurs (Ch. 3)
Chapitre 3 : L'Ogre des Abysses

La pluie semblait vouloir ne jamais s'arrêter. Elle frappait les immenses structures de métal sombre avec fracas, inondant les anciennes fondations de béton et d'acier. Le grincement des lourds bâtiments abandonnés aux assauts de cette eau meurtrière chevauchait la cité ; de longs râles aux consonances funestes semblaient s'échapper des tentacules métalliques qui entouraient le vieux port. Un dernier souffle de vie de ces temples industriels, antiquités d'un monde oublié.
Samekh laissa échapper un sifflement de dégoût à la vue de la vieille usine désaffectée qui surgissait du port, se découpant sur le ciel obscurci comme la carcasse d'une cathédrale aux murs carbonisés. L'humidité de l'air collait à sa peau délicate. Chacune des fines gouttes mourant sur son armure mauve semblait aussi lourde que le teint grisâtre qu'exhibaient les cieux. La femme aux mains fleuries fit claquer sa langue sur son palais. Aussitôt, les deux gardes repartirent. Leurs larges oreilles battaient vivement l'air pour se débarrasser du liquide qui coulait sur leur peau bleutée. Les deux dinosaures avançaient d'un pas lourd, luttant contre l'eau et la boue qui s'accrochaient rageusement à leurs membres postérieurs, ralentissant ainsi l'étrange cortège.

Belial se muait en silence vers l'empereur. Son corps reptilien se faufila derrière le trône de métal. Son visage plat aux yeux inexpressifs glissa contre la joue caoutchouteuse du souverain.
_ Samekh est à nos portes, siffla le serpent marin. Elle demande à vous voir à l'instant même, Seigneur.
L'empereur ne répondit pas. Sa mâchoire était figée sur un sourire éternel. Ses yeux ambrés glissèrent vers le conseiller qui baissa la tête dans une posture de soumission. Le monstre éclata de rire. Il fit signe à ses gardes d'ouvrir les portes du vieux hangar. Les grands alligators acquiescèrent en silence, leurs griffes imposantes se refermèrent sur les lourdes poignées, délivrant les plaques d'acier de leur verrou dans un grincement sinistre. La plante aux charmes empoisonnés entra, suivie de sa garde. Elle fixa un instant l'énorme monstre allongé sur son trône au milieu d'un banc de coussins. Le Laggron l'observait de son regard dérangé ; une folie insondable semblait ravager cet être au corps conséquent. Samekh observa plus longuement l'empereur. Son ventre élastique surplombait un pantalon de l'armée, retenu par une large ceinture de cuir et terminé par des bottes aux semelles épaisses. Un anneau doré s'échappait de ses narines, un autre brillait sur sa main droite. La veste kaki posée sur ses épaules laissait apparaître une grosse bande de cartouches barrant son torse massif.
La femme végétale s'avança finalement, bien décidée à ne rien laisser paraître du dégoût qu'elle éprouvait pour cet être. Elle s'inclina respectueusement, ses deux gardes en firent autant.
_ Seigneur Baal, commença-t-elle d'une voix sûre, je suis ici aujourd'hui pour vous proposer un marché qui devrait vous intéresser.
_ Che sais ce qui vous amène.
Le ton écrasant de l'empereur fit frémir Samekh. L'accent russe qu'il employait le forçait à détacher chacunes de ses syllabes, comme pour révéler une lourde prophétie. Le monstre fixa la femme qui semblait décontenancée. A nouveau, il laissa échapper un rire fort qui fit trembler les murs rongés par le temps et l'humidité.
_ Vous me faites une prRoposition au sujet de l'emperReuRr Asmo.
Samekh se redressa pour faire face au monstre. Le sourire de ce dernier s'élargit en contemplant la femme dont la taille accommodante ne déparait nullement ses courbes avantageuses.
_ C'est exact Seigneur, reprit-elle. Je vous offre la possibilité de porter un coup directement à l'empire du seigneur Asmo en permettant à vos troupes de traverser mes terres.
_ PourRquoi telle tRrahison ?
_ Nous ne pouvons plus accepter la manière dont nous traite l'empereur. Nous ne sommes que des pions dans les combats qu'il mène.
Les yeux du monstre quittèrent subitement leur folie pour s'emplir d'une intelligence bestiale. Samekh tressaillit en repensant aux nombreuses rumeurs qui courraient sur lui : une brutalité démoniaque tapie derrière un esprit clairvoyant et d'une ingéniosité animale. Un démon imprévisible qui n'hésiterait pas à décimer une espèce entière pour servir ses intérêts. Les êtres, mâles ou femelles, qui osaient s'opposer à lui finissaient dans la chambre royale pour son plus grand plaisir. Le lendemain, on ramassait les membres des cadavres éparpillés aux quatre coins de la pièce.
_ Peut-êtrRe emperReur tRrop occupé avec Rraces inférRieures pourR pouvoiRr perRdre son temps avec sujets.
Samekh voulut continuer mais le monstre la devança.
_ Peut-êtrRe aussi tRrop occupé à entRretenir esclaves pouRr contenter sujets.
Puis il se mit à rire à nouveau, suivi par tous les gardes présents et le conseiller reptilien. Bien sûr, les passe-temps dont Asmo était l'acteur n'avaient de secret pour personne. Samekh sentit le rouge lui monter au visage en saisissant l'allusion qu'avait glissé Baal. Il ne lui avait pas fallu longtemps pour comprendre les véritables intentions qui la poussaient à trahir l'empire des Plantes. Les deux dinosaures brandirent leurs épées pour répondre aux moqueries de l'empereur. La honte de la femme végétale fut vite remplacée par la colère ; ses pupilles noires se dilatèrent, laissant apparaître ses iris rouge-sang. Le souverain se tut aussitôt, son assemblée en fit de même.
_ Ce genre de détails ne vous regarde pas, souffla-t-elle sur un ton venimeux. Je vous offre la tête d'Asmo, contentez-vous de la mériter. Je ne vous demande qu'un tiers des territoires que vous obtiendrez.
_ PaRrdonnez, ma rReine. Che sais que che peux vous fairRe confiance. Femmes impitoyables suRr ce terRrain. EmperReur Asmo a joué à jeu dangerReux.
Samekh ne répondit pas. Elle se calma légèrement, sans pouvoir effacer le mépris qu'elle éprouvait pour le monstre. Ses yeux redevinrent d'un noir brillant.
_ Dans une semaine, reprit-elle, j'enverrais l'un de mes hommes qui conduira vos troupes jusqu'à son territoire.
_ Hum, si peu de temps ?
_ L'empereur est en plein conflit avec Zapan. C'est une occasion qu'il ne faut pas manquer.
Baal acquiesça. Son sourire ne laissait plus apparaître sa dentition. Son regard s'était perdu dans le vide tandis que son esprit traçait à toute allure les moindres détails de l'attaque du Premier Monde. Une fois de plus, l'idée d'une telle intelligence glaça le sang de la plante humanoïde. Baal ne perdrait pas ce combat, elle en était sûre.

Le grincement des portes leur parvint à nouveau, tandis qu'ils quittaient la cité inondée.
_ Altesse, nous ne devrions pas lui faire confiance, souffla l'un des deux monstres perceurs.
_ Il est certain que l'empereur Baal ne tiendra pas sa promesse, ajouta l'autre. Nous courons à notre perte en acceptant de lui faire confiance.
_ Je n'ai aucune confiance en lui, coupa Samekh. Je sais qu'il ne tiendra pas parole. Mais lorsqu'il aura détruit les armées d'Asmo, il sera alors à notre merci.
_ Vous pensez réellement que nos troupes auront la puissance nécessaire pour repousser un peuple élus ?
_ Nous ne serons pas seuls, continua Samekh en affichant un sourire. Zayin nous aidera, il ne peut rien me refuser. Avec son armée et la mienne, nous viendront à bout de Baal.
_ Espérons qu'il n'ait pas déjà prévu cette éventualité…
Samekh ne répondit pas.

_ Seigneur, vous ne comptez tout de même pas accepter l'offre de cette femelle, souffla le serpent dont les écailles dorsales s'étaient mises à frémir.
_ Bien sûRr que si. C'est une occasion qui ne se rReprRésenteRra pas, répondit l'empereur.
_ Il est vrai Seigneur, mais je crains que cette femme ne nous trahisse…
_ Elle cherRchera à se rRetouRrner contRre moi lorRsque j'aurRais vaincu Asmo. Il me suffirRa de garRder des tRroupes en RretrRait, derRrièrRe la frRontière.
Un sifflement abject s'échappa de la gueule du reptile.
_ Bien sûr mon Roi, vous avez tout prévu. Comment ai-je pu douter…
_ Efface ce souRrirRe hypocRrite Belial ! Che ne suis pas d'humeuRr à écouter tes flaterRries !
Le conseiller s'exécuta, reculant vivement devant la fureur du souverain. Son corps bleu avait soudain pâlit, faisant ressortir les contrastes de son armure azurée. Baal laissa échapper un soupir bruyant, dévoilant à présent une grimace de colère. Les gardes ne bougeaient plus, de peur de s'attirer les foudres de l'empereur. Ils étaient tous au garde-à-vous, leur visage terrifié invisibles sous leurs casques aux courbes agressives. Belial s'avança à nouveau vers le souverain, rampant à ses pieds et se trémoussant comme un ver.
_ Vous êtes soucieux mon Roi. Qui peut ainsi pousser craintes et incertitudes à souiller votre esprit ?
_ GabrRiel n'est pas rRevenue…
_ Le général Gabriel ne saurait tarder Votre Altesse. Son entrevue avec Sitael a du prendre fin il y a quelques heures déjà.
_ Il se passe… des choses, murmura l'empereur. Che sens,… un danger.
Belial fut surprit de voir la crainte apparaître dans les yeux du souverain. Son esprit maléfique semblait l'avoir quitté, comme s'il avait pu accueillir, ne serait-ce qu'un instant… un faible élan d'humanité.
Les portes s'ouvrirent soudain, un garde entra et se dirigea vers le trône. Il s'agenouilla face au roi.
_ Le général Gabriel vient d'arriver Seigneur. Elle demande si vous acceptez de la recevoir.
Le sourire de l'empereur réapparut aussitôt, la folie s'empara à nouveau de son regard.
_ Faites la entRrer, évidemment !
La garde salua et disparut dans l'ouverture des portes. Quelques instants plus tard, le petit poisson rose aux cornes de corail apparut à son tour.
_ GénérRal ! Vous rRevoilà enfin ! Che m'inquiétais pouRr vous !
_ Vous n'aviez pas à vous inquiéter Seigneur, entona la voix douce du soldat. La souveraine Sitael n'a jamais eut d'intention violente à l'égard de l'empire.
_ Sitael m'échappe, lâcha Baal dont le sourire semblait aussi fermement attaché à son visage qu'il ne l'avait été avant la visite de Samekh. Elle n'aime pas ma façon d'agiRr…
_ Mon Seigneur, le peuple des Remparts vit des moments difficiles. Sitael ne cherche qu'à protéger ses sujets.
_ Che suis là pouRr les pRrotéger ! PouRrquoi ne demande elle pas mon aide ?
Gabriel parut gênée.
_ Les siens manquent de ressources,… comme la plupart des nôtres étant donné les fortes pluies de ces derniers mois. Elles ont ravagé nos champs. Il reste assez de vivres chez le peuple des Glaces et ceux des Terres Brûlées, mais ils refusent de céder quoi que ce soit, craignant de se retrouver à leur tour dans le besoin… Des conflits sont à craindre.
_ Pas de conflits dans mon Rroyaume ! Il est vRrai que la famine nous guette, aussi serRait-il pRréférRable d'empiéter suRr le terRritoirRe des BrRûlants.
_ Mais,… Seigneur…
_ Suffit GénérRal. Nous ne pouvons pas attendRre que nos peuples soient divisés. Zapan est occupé paRr les aRrmées d'Asmo, ricana le souverain.
_ Mais,… Mon Roi, coupa le conseiller.
_ Che sais Belial. Nous n'attaqueRrons Enoch que dans une semaine,… si aucun autRre moyen ne se prRésente à nous, déclara l'empereur avec ironie. En attendant GénérRal, acceptez de rRester parRtager mon repas dés maintenant. Ce voyage a dut fatiguer vous.
Le poisson hésita, puis acquiesça. Baal semblait cacher quelque chose dont il voulait lui faire part, et elle se refusait à le laisser seul ruminer ses pensées néfastes, car elle savait qu'il n'en parlerait pas à ce fourbe de Belial. Gabriel fut installée à gauche de l'empereur, le conseiller à sa droite. Bien que les récoltes s'appauvrissent, le repas resta somptueux. Baal rejoignit ensuite sa chambre, accompagné de son général. Cette dernière sentit le malaise la gagner en entrant dans la pièce, sachant parfaitement les pratiques auxquelles s'y adonnait son souverain dans ses jours de folie. Elle ne laissa rien voir et s'installa dans un fauteuil en face de l'empereur. Celui-ci resta debout, il paraissait réfléchir. Il prit finalement la parole.
_ Samekh est venue nous rRendRre visite quelques temps avant votRre arRrivée.
_ Samekh, s'exclama Gabriel, étonnée. Cette femme est sous les ordres d'Asmo…
_ Elle me pRropose de peRrmettRre à mon arRmée de passer suRr ses terRres pour combattrRe Asmo. Che compte accepter sa pRroposition, elle ne demande qu'un tierRs des terRritoirRes.
_ Vous pensez pouvoir lui faire confiance ?
_ Peu impoRrte. Nous impRroviserRons le moment venu. Nous avons besoin de nouveaux terRritoirRes. Ce n'est pas pouRr ça que j'ai demandé vous…
Gabriel fixa l'empereur, il semblait à nouveau en pleine méditation.
_ Che cRrois, reprit-il, que quelque chose nous menace. Che sens les espRrits… il se passe quelque chose.
Le silence se fit. Le petit poisson prit finalement la parole.
_ Vous devriez en parler à Ayin, Seigneur. Il pourra sans doute vous aider.
_ NotRre peuple n'aime pas Ayin, et encoRre moins ses hommes. Je me rRendRrais à la Mer des EspRrits demain, avec vous seule pouRr compagnie si vous le voulez.
_ Pourquoi ne pas demander à Belial ?
Baal poussa un grognement.
_ Belial ne doit pas veniRr !
Silence.
_ Il me pRropose de détRruirRe l'un des peuples de mon Rroyaume pour suRrveniRr aux besoins des autRres.
_ Mais vous ne pouvez pas faire ça…
_ Si, coupa l'empereur. La dispaRrition de Remiel et de tous les ElecrRtiques ne pourRrait que calmer tous conflits ! Ce sont eux qui sont à la base de toutes les guerRres civiles qui ont fait rReculer notrRe Monde jusqu'aux borRds des océans, nous pRrivant ainsi de toutes terRres ferRtiles ! Ce serRait le moyen le plus simple…
Gabriel allait répliquer, mais l'empereur lui fit signe de se taire.
_ Che ne ferRais rRien de tel. Nous tRrouverRons un moyen…
A nouveau le silence. La porte de la chambre s'ouvrit soudain sur une servante.
_ Oh, pardon Seigneur, s'excusa la souris bleu aux longues oreilles. J'ignorais que vous étiez en réunion…
_ Ce n'est rRien, cette rRéunion est teRrminée, répondit Baal sans quitter son général du regard.
Gabriel hocha la tête. Elle salua, puis quitta la pièce, remplacée par la servante qui finirait de réconforter l'empereur.