Chapitre 2 : La nouvelle facette du monde
Je me réveille le lendemain matin, ébloui par la lumière du soleil passant à travers la fenêtre du salon. Sans le savoir pourquoi, mais je me sens apaisé. Je ne suis pas pressé : je n'ai aucune sortie prévue pour aujourd'hui, et en plus, ça fait quelques jours que je n'ai pas dormi aussi longtemps et franchement, ça fait du bien. Je regarde ma montre, un réflexe que j'ai acquis au fil des ans.
- 10h ! Déjà ! m'écriai-je.
Je compris instantanément pourquoi je me sentais autant en forme : ça fait un peu plus de 11h de sommeil !
Avec toute cette histoire, j'ai complètement oublié la présence de la chouette posée sur mes cuisses. A cause de mes gestes brusques, elle s'est réveillée à son tour.
- Bou ! Bou ! pesta-t-elle.
C'est à ce moment précis que je me suis dit que quelque chose clochait. Au niveau de la couleur des plumes, il n'y avait aucune différence, celles-ci étant toujours brun clair. Ce qui m'interpella surtout était sa forme : l'animal était bien plus rond que la veille, et comme je suis quasiment certain qu'un hibou ne peut ouvrir la porte d'un frigo, cette rondeur n'est donc pas due à une suralimentation. Et puis ces hululements ! En général, une chouette fait plutôt : “Ouh ouh !”, mais là, les seuls bruits auxquels j'ai le droit sont : “Bou bou !”.
Le rapace prit son envol, se retourna et me fixa. Que la ressemblance est frappante ! Avec sa feuille sur son ventre, il ressemble comme deux gouttes d'eau à Brindibou, un des premiers Pokémons du jeu Soleil et Lune.
- Bouuuu ! cria-t-il.
- Ah ! Oui ! Tu veux manger !
J'étais complètement déboussolé devant la tournure des événements que j'en oubliais le principal. Arrivé dans la cuisine, tout en cherchant un escalope à donner à mon compagnon, je me giflais ; autant être sûr qu'il ne s'agit pas d'un rêve.
Une fois ma joue complètement rouge, j'en suis arrivé à la brillante conclusion qu'il ne s'agit pas d'un rêve.
Je pose l'escalope dans une assiette, histoire que ce filou ne salisse pas tout comme hier soir et lui posa sur la table. L'animal voleta jusqu'à la table à manger et les bruits de déglutition retentirent à nouveau dans la maison. Là, au moins, rien n'a changé !
- Alors comme ça, tu es un Brindibou ? demandai-je à la chouette.
- Brin. Di. Bou ! me répondit-elle entre deux bouchées.
Au point où on en est, il n'y a que deux scénarios possibles : soit on me fait une très grosse farce, mais dans ce cas-là, je m'incline devant celui qui a tout mis en place, ou alors, c'est la stricte réalité.
Quoiqu'il en soit, je me décidai à jouer le jeu jusqu'au bout :
- Bon, vu que tu as l'air d'être un Brindibou, tu dois être extrêmement fier de tes plumes.
- Dibou !
- Dans ce cas, je vais t'appeler Plumey. Ce sera plus facile pour nous deux.
Plumey tout juste baptisé me fixa alors du regard d'un air de dire : “Ne me dérange pas que je mange, toi !” Et il reprit son repas de plus belle.
Pendant mon petit déjeuner, je m’assieds dans le canapé et allume la télé. C’est clair que ces événements paranormaux doivent faire la une des journaux télévisés. En allumant, je tombe sur BFM TV, la chaîne devant laquelle je me suis endormi hier soir. En y repensant, je ne me rappelle pas avoir éteint quoi que ce soit. Comment cela se fait-il ? Il y aurait eu une panne de courant ? Tandis que Plumey fait le tour de la pièce en virevoltant, je tente de me concentrer sur la chaîne d’informations en continu :
- …Nous recevons Johnny sur le plateau, un scientifique français de l’ESA spécialisé dans les phénomènes spatiaux anormaux. Bonjour Johnny.
- Bonjour, répondit l’homme en blouse blanche assis en face du présentateur.
- Vous et votre équipe, vous avez étudié le fameux phénomène de 23h07 qui a touché le monde entier et totalement changé sa faune. Quelles informations pouvez-vous partager avec nos téléspectateurs ?
- Je vous remercie pour votre invitation et j’aimerais vous prévenir que la majorité des données acquises à ce jour sont classées “secret défense”. Je vous prierai donc de ne poser aucune question et je m’engage solennellement à vous expliquer tout ce je peux vous dévoiler à ce jour.
Le présentateur hocha la tête et le scientifique commença son exposé.
- Comme vous le savez certainement tous, à 23h07, la première météorite se pose. Je dis bien “se pose”, car, comme l’ont remarqué hier soir les astronomes de la NASA, au lieu d’accélérer au contact de l’atmosphère comme le ferait tout corps céleste, les météores ont fait totalement l’inverse, comme si elles étaient habitées ou dotées de volonté propre. A ce stade, les analyses sont toujours en cours.
Donc, à 23h07, le première météorite se pose dans le Little Sahara State Park, en Oklahoma, mettant hors service tous les appareils électroniques. Une gigantesque onde de choc se propage à travers les quatre coins du monde. Au bout d’une minute, l’onde de choc a fait le tour du globe, modifiant instantanément l’ADN de tous les animaux sans aucune exception, leur faisant acquérir une nouvelle apparence et surtout des pouvoirs affolants. Néanmoins, ne paniquez pas, cela n’a visiblement eu aucune incidence sur les êtres humains. A 23h08, toutes les météorites se posent à différents endroits du globe. Les scientifiques se sont mis d’accord pour appeler ces créatures “Pokémon” en raison de leur extrême ressemblance avec les monstres de la licence culte.
- Et quelle est l’explication à ce changement instantané d’ADN ? tenta le présentateur
- Excusez-moi, mais cette info est totalement confidentielle. J’ai dit tout ce que je pouvais vous dire.
- Nous comprenons Monsieur. Merci d’avoir fait le déplacement pour expliquer ce phénomène à nos téléspectateurs.
Et maintenant, un reportage exclusif sur les braquages “new generation”. Partout dans le monde, les malfrats n’ont pas perdu leur temps pour mettre au point des techniques de hold-up à l’aide des pouvoirs de Pokémons probablement soumis et torturés au préalable. Cependant, à chaque fois, alors que les autorités semblent dépassées par les événements, de surpuissants Pokémons apparaissent. Ils ont la faculté de parler dans la tête des humains, punissent les délinquants et libèrent les Pokémons de leur joug. Ils affirment être des dieux.
Reportage de Marie Ombrée et Marc Lorges…
- Bou !!
Plumey passe devant la télé, me cachant totalement le reportage.
- Plumey, dégage de là, steu plaît ! lui ordonnai-je. Tu caches totalement l’écran !
Cependant, le Pokémon Plumefeuille ne semblait pas prêt à me laisser regarder la télé tranquillement. Il me fonça dessus et instinctivement, je mis mes bras devant mon visage pour me protéger. Mais son but n’était pas de me faire mal ; il m’attrapa le lobe d’oreille gauche en plein vol et me traîna jusqu’à ma chambre, comme un parent le ferait avec un enfant qui a fait une bêtise. Il me lâcha juste à côté de mon téléphone.
- Non mais ça va pas ?! Tu es fou ?! pestai-je.
En passant mon doigt sur mon oreille meurtrie, je m’aperçus que j’avais bel et bien la douloureuse marque de son bec.
- Brin, dit-il en tapotant l’écran de mon portable avec son bec.
J’avais un appel de groupe WhatsApp manqué. Il s’agit du groupe contenant Mathis, Fedi et moi, dans lequel on se raconte tout et on planifie nos futures sorties. Je rejoignis l’appel de groupe :
- Ah, Thomas ! Tu tombes à pic ! s’écria Mathis. Est-ce que tu pourrais venir chez moi ? C’est à propos de Didier. Il a disparu !
- Moi, je suis déjà en route, ne t’en fais pas, fit remarquer Fedi.
- Oui mais tu habites beaucoup plus loin, objecta Mathis.
- Bon, je me mets en route. A tout de suite !
A ces mots, je raccroche, me chausse, appelle Plumey et sors de la maison.
C’est vrai que le monde a complètement changé. Plutôt que de voir des pigeons et des pies voler en direction des arbres et des fils électriques, maintenant, on a plutôt affaire à des Poichigeon et des Picassaut.
Partout où je passe, des Pokémons sont présents. Selon moi, ils sont si nombreux qu’il est impossible que les météorites ne soient pas habitées. Je pense très fortement que tous les animaux se sont transformés en Pokémons, mais également que beaucoup d’autres Pokémons ont débarqué, et transformé nos animaux pour mieux faciliter leur intégration sur notre planète. Bien entendu, ce n’est qu’une théorie.
Plumey était surexcité. Il volait partout, était curieux de toute chose. On aurait dit un enfant. Je me trouvais même dans l’obligation d’accélérer le pas pour le rattraper.
Au bout d'une quinzaine de minutes de marche, j'arrivais chez Mathis. Au moment où ce dernier m'ouvrit, nos portables sonnèrent simultanément. Il s'agissait d'un appel de Fedi :
- Au secours ! Venez m'aider ! J'ai trop peur, je me fais agresser par des Capumain !
Nous nous regardâmes en rigolant. Nous avons joué, et même poncé, plus familièrement, de nombreux jeux Pokémon et savons que les Capumain sont relativement gentils. Bien entendu, rien ne vaut une expérience réelle comme nous pouvons la vivre en ce moment ; malgré tout, je trouve la réaction de mon ami totalement exagérée.
Passons cette scène pathétique pour nous concentrer sur les événements qui suivent le “sauvetage” de mon ami. Dix minutes plus tard, nous pénétrons tous les trois dans le bâtiment où habite mon ami Mathis et commençons l'ascension des deux étages.
- Franchement, je ne te comprends pas, Fedi.
Pourquoi as-tu autant peur des Pokémons ? Tu n'avais pourtant pas peur des animaux avant… remarquais-je.
- Je ne sais pas. C'est différent. Avec leurs pouvoirs et tout l’bazar, j'ai peur d'être blessé irréversiblement, me répondit-il.
Ahhhh ! Il y a un machin qui te bouffe l'oreille, Thomas !
- Oui, je sais. D'ailleurs, c'est pas “un machin”, c'est Plumey !
- Concentrons-nous, les gars ! Il y a un Pokémon dans ma maison et il faut qu'on retrouve Didier, nous interrompit Mathis en ouvrant la porte de sa maison.
Nous entrons dans le salon et voyons un Malosse, clairement en surpoids, affalé sur un coussin.
- Tu nous as vraiment fait venir pour ça ?
- Oui, il faut le dégager et retrouver Didier ! me rétorque-t-il.
- Mais bon sang…
Je me prends la tête dans les mains, avant de continuer :
- C'EST Didier !
- Mais non, c'est un Malosse.
- Mathis, mon ami. Tous les animaux ont été transformés en Pokémons. Tous ! Même ma chouette que je connais que depuis quelques heures ! Même ton chien Didier, qui a subi une mutation génétique qui n'a même pas été capable de le faire maigrir !
- Je ne suis pas convaincu…
- Mais ta famille n'a rien dit en se levant ce matin ?
- Ils n'ont pas dû faire attention. Ils ont vu un gros chien noir ronfler : ils se sont dit “tout va bien”.
- Je ne sais plus quoi dire… Fedi, tu ne veux pas lui expliquer ? Tu ne dis rien depuis tout à l'heure…
Je me retourne et vois mon ami assis en position foetale à une bonne distance des deux Pokémons.
- Moi, ça m'aurait arrangé qu'il reste un chien banal, dit-il timidement.
Je crois que tant qu'il n'aura pas soigné sa phobie, on ne pourra rien tirer de lui.
- Bon, venez, on sort Didier au parc. Ça commence à empester ici ! Je parie qu'il n'est pas sorti crotter, n'est-ce pas Mathis ?
- Alors… Déjà, on n'est pas sûr qu'il s'agisse de Didier et en plus, c'est compliqué de lui mettre la laisse. Un Malosse, ça peut cracher du feu !
- Donne-moi la laisse, je vais te montrer. Et Plumey, par l'amour du ciel, arrête d'embêter Didier !
Le Pokémon arrêta de voler autour de la tête du pauvre Malosse et se posa sur l'accoudoir du canapé en boudant.
- On n'est toujours pas sûr qu'il s'agisse bien de Didier…
- Boucle-la !
- La laisse ou ma bouche ?
- Les deux...
La situation commence vraiment à me gonfler tellement elle est ridicule. Malgré mon humeur, Mathis accepta de me donner la laisse de Didier, ainsi que des gants pour sortir les plats du four.
Je lui rendis les gants, et attachai la laisse autour du cou du chien. Celui-ci, comme je l'avais imaginé ne se rendit même pas compte qu'on lui avait attaché quelque chose.
- Et voilà le travail ! Maintenant, je peux te laisser gérer Didier ?
- Ouais !
J'ouvris la porte d'entrée et Plumey revint se poser sur mon épaule gauche. Mathis se dirigea vers moi et Fedi, avec sa phobie, ferme la marche. A contrecœur, Didier se leva lourdement en ronchonnant. Visiblement très contrarié, le Pokémon Sombre fit jaillir des petites étincelles de son museau, entraînant un départ de feu sur le canapé.
- Oh bordel ! Fedi, vite, va dans la cuisine et apporte-moi un verre d'eau qu'on éteigne tout ça ! m'écriai-je.
- Ça je peux faire !
Vingt minutes plus tard, nous arrivons au parc pour chien, situé à 100 mètres du bâtiment.
- Il a l'air chouette, ton Pokémon, tenta Mathis.
- Arrête les jeux de mots, lui rétorquai-je. Je ne veux plus vous entendre, toi et ton chien.
Il détacha la laisse du cou du Malosse, pour le laisser gambader librement dans le parc. Le chien commença à renifler le sol, puis s'éloigna lentement vers le pied d'un arbre.
- Il s'agit peut-être bien de Didier.
- Mais bien-sûr que c'est Didier ! Regarde - comme il est fainéant !
- C'est drôle que ça soit devenu un Malosse.
- Je ne vois vraiment pas pourquoi tu doutes encore. Moi, par exemple, je me suis endormi hier avec une chouette dans les bras et je me suis réveillé avec un Brindibou. Même aux infos, ils disent que tous les animaux se sont transformés.
- Incroyable, s'exclama Fedi dans notre dos.
- Tiens, tu n'as pas dit que tu rentrais, toi ?.. T'es encore sur ton téléphone ?!
- Ah oui, au final, même si j'ai peur je me suis dit que ce serait sympa de rester ensemble. Mais venez plutôt voir.
Nous nous approchâmes de lui.
- Oula ! Pas si près avec ton Brindibou ! me repoussa-t-il.
- Ça va, Plumey ne va pas pas te manger ! rétorquai-je.
- Comment tu peux dire ça alors qu’il est en train de te mâchouiller le lobe d'oreille !!!
Bref, il faut absolument qu'on voit ça. Les présidents de toutes les nations du monde se sont réunis avec les “dieux” Pokémon et vont faire une annonce de la plus grande importance d'une minute à l'autre !
- Quoi ??? Déjà ???
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Ce sont mes premiers chapitres, alors merci d'avoir pris le temps de me lire jusqu'au bout.
Je peux tout-à-fait comprendre que vous ne voyez pas vraiment quelle direction l'histoire va prendre : pour l'instant, tout reste un peu flou pour vous, chers lecteurs, mais je promets d'offrir un scénario à la hauteur. Disons que pour l'instant, ce n'est qu'un amuse-bouche.
Du coup, n'hésitez pas à me dire comment m'améliorer et on se retrouvera, je l'espère, pour le chapitre suivant "Pris en otage".
A la prochaine.