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Pokémon : L'étoile d'Arkephyr de Arkephyr



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Informations

» Auteur : Arkephyr - Voir le profil
» Créé le 19/08/2023 à 11:38
» Dernière mise à jour le 19/08/2023 à 11:38

» Mots-clés :   Aventure   Drame   Région inventée   Romance

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[J] Faire face
Ces dernières vingt-quatre heures m'ont paru interminables. Thomas est resté inconscient sans que son état s'améliore, Michael s'est amusé à sniffer les spores de Florizarre pour faciliter soi-disant sa concentration, et Alice s'est réfugiée dans ses livres comme elle le fait à chaque fois que la situation devient compliquée.

Nous n'avons pas avancé d'un pouce depuis notre dernière conversation. Même si les intentions de Marianne et de sa Team Fusion nous paraissent un peu plus claires, nous n'avons pas de piste qui nous permettrait de lancer une véritable offensive.

Je me demande parfois s'il ne vaudrait pas mieux abandonner le combat. Si Mew est réellement en train de dégénérer, alors peut-être devrions-nous attendre qu'il rende l'âme de lui-même – en admettant que cela mette un terme aux agissements de Marianne.

– Je file à l'arène... lance ma sœur en posant son casque sans fil sur ses oreilles. Tu me tiens au courant s'il y a du nouveau ?

Elle dépose un bisou sur ma joue sans me laisser le temps de répondre et quitte l'appartement d'un pas vif. Alice a toujours été une petite pile électrique, et ça ne s'est pas arrangé depuis mon accident. Elle ne reste jamais plus de quelques minutes sans rien faire et se débrouille toujours pour rester occupée le plus longtemps possible.

Je me redresse sur mon canapé en m'étirant longuement et attrape la télécommande pour allumer la télévision. Comme bien souvent à cette heure-ci, il n'y a rien d'intéressant à regarder. Les émissions sur les Pokémon n'intéressent plus personne et ont laissé la part belle aux programmes de téléréalité.

Je zappe d'un geste presque machinal et arrive finalement sur AFI TV, la chaîne d'information en continu qui diffuse chaque jour, en boucle, les mêmes sujets d'actualité déprimants.

– Tu crois qu'ils vont te dire où se cache Mew ?

Michael débarque dans le salon en caleçon, une serviette encore mouillée négligemment posée sur son épaule. Si la douche semble lui avoir remis les idées en place, elle n'a malheureusement pas eu raison de ses mauvaises manières.

– Un café ? propose-t-il en se dirigeant spontanément vers la cuisine.

– Je veux bien... dis-je en soupirant. J'imagine que tu as bien dormi ?

Une ombre fugace passe sur le visage de mon ami.

– Seulement d'un œil... murmure-t-il sombrement. Je suis inquiet pour mon frère. Pour Lucille, aussi.

Je lui lance un regard compatissant en hochant doucement la tête. Michael se montre toujours très détaché avec les autres, mais il est loin d'être invulnérable. Voir Thomas étendu sur ce lit a été un véritable choc pour lui, d'autant plus qu'il ne manquait pas moins de deux Pokéball à sa ceinture au moment de son arrivée.

Mon ami active la cafetière en observant la baie vitrée d'un air absent, puis remplit deux grandes tasses avant d'ajouter un morceau de sucre dans la sienne.

– Tu peux monter le son ? me demande-t-il en plissant les yeux.

Je porte mon attention sur la télévision et vois un portrait récent de Thomas apparaître sur toute la hauteur de l'écran. J'augmente aussitôt le volume et me décale légèrement sur la droite pour laisser Michael s'asseoir à côté de moi.

"De nouvelles informations nous ont été communiquées sur le terroriste répondant au nom de Thomas Gray..." annonce la journaliste d'un ton grave. "Ce dernier se serait très récemment réfugié à Lunapolis, après avoir échappé de justesse aux forces de l'ordre."

J'échange un regard inquiet avec mon ami. Si la fuite de Thomas n'est pas passée inaperçue, alors il est possible que nous ne soyons plus en sécurité dans la capitale.

– Tu as vérifié ses affaires ? s'enquiert calmement Michael.

J'acquiesce d'un air assuré. Ce n'est pas un hasard si je suis parvenue à me faire passer pour morte pendant toutes ces années tout en habitant sur le lieu de l'accident qui m'a défigurée.

– Il n'y avait aucun mouchard... je confirme sans quitter des yeux l'écran de télévision. Pikachu m'a même donné un coup de main pour vérifier.

Le Pokémon Électrik n'aurait eu aucun mal à détecter la présence d'un dispositif électronique à proximité. Thomas n'a donc pas pu être précisément géolocalisé.

– Ils bluffent... je grommelle entre mes dents.

Je me raidis en voyant débarquer Steve Erzat sur le plateau. Le capitaine de la gendarmerie esquisse un sourire figé à l'adresse de la journaliste avant de prendre place sur le siège situé à sa gauche.

Notre belle région est corrompue jusqu'à la racine. Nos institutions sont gangrenées par les membres d'élite de la Team Fusion et se nourrissent au quotidien de l'influence néfaste de Marianne.

Seul un fou – ou un stupide inconscient – se risquerait à se dresser contre une mécanique aussi bien huilée.

"Nous avons quadrillé la capitale..." assure Steve en fixant l'objectif de la caméra de son regard froid. "Y compris l'espace aérien. Où que tu sois, Thomas Gray, je te promets que tu ne nous échapperas pas."

Cet homme me glace le sang. Nous avons eu plusieurs fois l'occasion de le confronter par le passé, et nous nous sommes toujours joués de lui avec plus ou moins de réussite. Mais nous étions encore des enfants insouciants à l'époque, et lui-même n'était qu'un officier mû par une ambition démesurée.

La situation n'est plus la même qu'il y a dix ans. Le regard du capitaine de gendarmerie ressemble à celui d'un prédateur prêt à fondre sur sa proie pour la réduire en charpie.

C'est le regard d'un tueur.

"Mais qu'est-ce qui a pu pousser le terroriste à revenir ici après tout ce temps ?" questionne la journaliste en feignant une moue anxieuse.

"C'est difficile à dire..." répond Steve avec un air sombre. "Vous savez, cet homme est... psychologiquement instable. Il ne pense pas comme vous et moi. Il n'est pas exclu qu'il prépare un nouvel attentat pour célébrer – à sa manière – les dix ans du premier."

La journaliste lance un regard horrifié au capitaine de gendarmerie avant de plaquer ses deux mains contre sa bouche.

– Elle ferait une bonne actrice... commente Michael en lui lançant un regard mauvais. Je devrais peut-être la recruter pour le Repaire.

Je crispe la mâchoire et me mords la langue pour m'empêcher d'être horriblement vulgaire. Comment ces gens-là peuvent-ils encore se regarder dans un miroir après avoir passé la plus grande partie de leur journée à raconter de telles inepties ?

"V... Vous allez l'en empêcher, n'est-ce pas ?" bredouille-t-elle avec espoir. "Ne sommes-nous pas mieux préparés qu'il y a dix ans ?"

Steve Erzat esquisse l'ombre d'un sourire réconfortant.

"Ça ne fait aucun doute..." dit-il en hochant doucement la tête. "Néanmoins, j'appelle la population à la plus grande vigilance."

Son expression devient plus grave tandis qu'il fixe à nouveau l'objectif avec une lueur malsaine dans le regard.

"Nous avons eu la confirmation que Thomas Gray est aidé par son frère..." ajoute-t-il avec un air sourire à peine perceptible.

Un frisson désagréable parcourt mon échine. Je n'ose pas tourner la tête vers mon ami et garde mes yeux rivés sur l'écran de télévision.

"Vous voulez dire..."

"Absolument..." coupe le capitaine. "Michael Gray, le Maître Pokémon d'Arkephyr, a toujours été de mèche avec son frère, y compris lors de l'attentat du centre commercial de Lunapolis."

Je ne sais pas ce qui me retient de balancer ma tasse de café contre l'écran. La Team Fusion a toujours été particulièrement prudente vis-à-vis de ses accusations. C'est d'ailleurs cette rigueur exemplaire qui leur a permis de manipuler progressivement l'opinion publique pour discréditer la Ligue Pokémon.

Michael a toujours été dans leur ligne de mire, mais il n'ont jamais osé le confronter de la sorte. Ce mensonge effronté ne leur ressemble pas.

– Pourquoi une telle agressivité ? je souffle sans comprendre. Pourquoi maintenant ?

– Parce que l'étau se resserre dangereusement autour de Marianne... souffle une voix rauque et familière derrière moi. Parce que s'ils ne frappent pas un grand coup maintenant, alors ils ne se relèveront jamais de celui que nous allons leur asséner.

Je me retourne brusquement en bloquant ma respiration. Thomas se tient debout devant moi, avec ses beaux yeux foncés et ses cheveux décoiffés, comme si ces dix dernières années ne s'étaient jamais écoulées.

Mais celui que j'aimais autrefois n'est plus le même aujourd'hui. Son visage jadis bienveillant trahit désormais une colère à peine contenue, et son regard est hanté par les spectres de son passé, comme s'il portait à lui seul le poids du monde tout entier.

– Je...

Les mots se bloquent dans ma gorge et les larmes me montent aux yeux. J'ai imaginé nos retrouvailles des milliers de fois, mais je ne pensais pas perdre tous mes moyens.

– Je suis désolé... murmure mon ami avant de contourner le canapé pour me prendre dans ses bras. Je suis désolé pour tout, Juliette.

Thomas étouffe un sanglot tout en resserrant son étreinte. Je ferme les yeux et m'abandonne un instant à ce moment de tendresse, comme si plus rien autour n'avait la moindre importance, m'enivrant de son parfum boisé.

Le raclement de gorge insistant de Michael finit par nous ramener tous les deux à la réalité.

– Yo... lâche-t-il en tendant un poing fermé. Bien dormi ?

Thomas se libère de notre étreinte pour prendre son frère dans ses bras, ignorant le poing tendu vers lui. C'est comme s'il ressentait le besoin irrépressible de nous serrer contre lui, afin de s'assurer que nous sommes bien réels.

– Qu'est-ce qui t'est arrivé ? je demande dans un souffle.

Nous avons besoin de savoir ce qui s'est passé. Mon ami a sans doute vécu un traumatisme particulièrement douloureux auprès de Marianne, mais nous devons à tout prix connaître les tenants et les aboutissants de cette histoire pour prendre les mesures qui s'imposent.

– Elle tient Lucille... répond-il de but en blanc en échangeant un regard empreint de gravité avec son frère. Mew l'a conditionnée sans que je puisse l'en empêcher.

Une ombre passe dans le regard de Thomas tandis qu'il observe les Pokéball accrochées à sa ceinture.

– Elles ne sont plus que quatre... je murmure d'un ton hésitant. Est-ce que les autres sont...

Mon ami secoue doucement la tête.

– Ectoplasma était sous sa coupe depuis le début... explique-t-il d'une voix blanche. Et Métamorph...

Je baisse les yeux en m'abstenant de tout commentaire. Ni Michael ni moi ne connaissions l'identité de son sixième Pokémon. Lorsque nous avons fait sauter le centre commercial, nous voulions réduire à néant le travail de la Team Fusion et libérer tous les sujets d'expérience de leurs abominables souffrances.

J'étais loin de me douter que Thomas chercherait à capturer le Métamorph du Projet Fusion.

– Il a sacrifié sa vie pour sauver la mienne... achève-t-il d'un ton douloureux. Dracaufeu s'est extirpé de sa Pokéball pendant qu'il se transformait en Électrode pour lancer une Explosion et couvrir notre fuite. Je crois l'avoir vu prendre mon apparence pour nous faire gagner du temps, mais nous étions déjà loin et...

Mon ami semble soudain se souvenir de quelque chose et parcourt le salon des yeux avec une angoisse presque palpable.

– Est-ce que vous avez vu Poussifeu ?

Je hausse un sourcil en me demandant ce qui lui arrive, mais Michael semble comprendre de quoi il en retourne et pose aussitôt ses deux mains sur les épaules de son frère pour le forcer à se calmer.

– Dracaufeu était seul quand il est revenu... répond-il en échangeant un bref regard avec moi pour obtenir confirmation. Avec Pikachu, Tortank et Florizarre, qui étaient tous les trois dans leur Pokéball.

Un voile de tristesse traverse brièvement le regard de Thomas, mais ce dernier retrouve rapidement contenance en affichant une détermination renouvelée.

– Il s'en sortira... lâche-t-il dans un murmure à peine audible. Ce petit monstre est plein de ressources.

Un léger silence s'installe alors dans la pièce, et j'en profite pour aller chercher de l'eau pour tout le monde.

– Installe-toi donc sur le canapé... je souffle en posant les verres sur la table. Nous avons un million de choses à nous dire.

Mon ami obtempère, et nous passons les deux heures suivantes à nous raconter nos vies – un moyen comme un autre de rattraper le temps perdu. Michael m'avait déjà expliqué dans les grandes lignes ce qui était advenu de son frère depuis l'accident, mais l'entendre de sa bouche m'apaise d'une manière que je ne saurais décrire.

J'espérais secrètement que Thomas ait des informations à nous donner sur la localisation précise de Marianne, mais cette dernière a utilisé le pouvoir de téléportation de son Mew pour pour couvrir leur arrivée. Nous avons alors passé plus de vingt minutes avec Dracaufeu pour essayer de lui faire cracher le morceau en langage des signes, mais il nous a fait comprendre qu'il s'est contenté de voler en ligne droite en suivant les lumières de la capitale.

Après avoir plusieurs fois passé au peigne fin la Forêt d'Obscurance sans obtenir le moindre résultat, j'en suis arrivée à la conclusion qu'elle avait un Pokémon capable de modifier la topographie des lieux pour s'assurer que personne ne la trouve.

Thomas a néanmoins pu confirmer la dégénérescence de Mew. D'après lui, le Pokémon fabuleux serait devenu plus un peu pâle après avoir utilisé ses pouvoirs psychiques à plusieurs reprises.

En revanche, il ne croit pas du tout à la théorie selon laquelle Mew aurait été créé par une civilisation plus ancienne. Mon ami penche plutôt pour la légende qui affirme qu'il viendrait en réalité de l'espace, et qu'il n'apparaîtrait qu'aux personnes dotées d'un cœur pur.

– C'est vrai que Marianne est un ange venu du ciel... lui a alors fait remarquer Michael avec un sourire moqueur.

Ce à quoi il a répondu par un majeur bien tendu.

Malgré la perte de ses deux partenaires et de son amie, Thomas est bien plus serein qu'il ne l'était au moment de son arrivée. Quand Dracaufeu me l'a ramené au beau milieu de la nuit, délirant et souffrant de fièvre, j'ai cru un instant qu'il ne s'en remettrait pas.

Ces quarante-huit heures de repos forcé lui ont permis de mettre un peu d'ordre dans ses émotions pour envisager la suite des événements avec plus de lucidité.

– Bon... je soupire en observant le soleil se coucher derrière les gratte-ciel. C'est bien joli, tout ça, mais qu'est-ce qu'on fait, maintenant ?

Michael hausse les épaules avant d'étirer ses bras.

– On boit l'apéro ? suggère-t-il d'un ton enjoué.

Thomas esquisse un faible sourire en sortant de sa poche son vieux Pokédex. Il le pose alors sur la table et nous lance un regard intense.

– Je vous propose deux choses... déclare-t-il d'une voix vibrante. D'abord, on fait tomber la Team Fusion. Pour de bon.

Je fronce les sourcils avec une moue sceptique. Je ne vois pas comment son vieux boîtier rouge va pouvoir nous aider à coincer la plus grande organisation criminelle de la région, mais j'imagine qu'il doit avoir une idée derrière la tête.

– Et ensuite ? demande son frère en plissant les yeux.

Thomas vide tranquillement son verre d'eau avant de le reposer sur la table dans un léger tintement.

– Ensuite ? On reconstruit ce qui a été détruit. On fait revenir ce qui a disparu. Et on rappelle ce qui a été oublié.

Je laisse échapper un soupir teinté d'exaspération. Mon ami a toujours été quelque peu énigmatique, mais c'est un trait de caractère que je ne suis plus très sûre d'apprécier.

– Je ne te suivrai pas sans un plan fonctionnel et détaillé... je préviens en croisant les bras. Je vous rappelle – à tous les deux ! – que les autorités sont à vos trousses. Il est hors de question que je me lance dans une entreprise suicidaire pour vos beaux yeux.

Thomas acquiesce d'un air entendu. Son sourire s'est estompé, et je peux lire dans son regard les regrets qui le hantent quand il songe au désastre de notre dernière opération.

– Je vais tout vous exposer dans les moindres détails... assure-t-il avec gravité. Mais Michael a raison...

Je hausse un sourcil en me demandant à quoi il fait allusion, mais un nouveau sourire – sincère, cette fois-ci – s'épanouit sur ses lèvres.

– C'est l'heure de l'apéro... conclut mon ami avec une grimace. Pour être honnête avec vous, je ne vois pas comment vous pourriez accepter mes plans sans être un minimum alcoolisés.