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Minuit de Suroh



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» Auteur : Suroh - Voir le profil
» Créé le 05/08/2023 à 22:16
» Dernière mise à jour le 06/08/2023 à 10:51

» Mots-clés :   Kalos   Suspense

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Chapitre 5 : 23h – La signature à venir.
6h
C’était une excellente journée pour pêcher ! Comme à son habitude, bien avant l’aube, notre pêcheur avait donc pris son temps et son énorme sac, duquel dépassait sa Méga-Canne fétiche.

Dans sa tenue bleue et blanche, il avait transporté son attirail à travers tout Fort-Vanitas pour se diriger vers la petite rivière de la Route 7.

Il s’était installé depuis plusieurs semaines à Fort-Vanitas et avait su rester discret, mais les habitants de la ville l’avaient rapidement adopté. Lorsqu’il se rendait de bon matin à sa rivière attitrée, il saluait toujours les habitants du village d’un « bonjour » chaleureux. On l’avait vite invité aux soirées arrosées du samedi soir au château du village.

Ce matin-là, il s’était levé bien avant l’aube, avait serré les mains des quelques personnes déjà réveillées dans le village avant de filer vers sa rivière. Mais comme à son habitude, – et ça, les habitants ne le savaient pas – une fois un peu éloigné du village, il s’était mis à épier ce qui se passait dans le Champ de Baies avec la lampe de son Holokit.

On aurait cru un voyou en repérage pour faire un rapt. Il notait pour lui-même tout ce qui avait changé depuis la veille. Instruments pour labourer, stocks de baies, quantités d’engrais…

Il s’apprêtait à repartir bredouille – comme d’habitude – lorsque, pour la première fois, il remarqua quelque chose de changé. Oh, ce n’était pas grand-chose. Un autre que lui ne se serait pas alarmé.

Mais cela faisait des semaines que celle qui s’occupait de ces champs rangeait le fruit de ses récoltes au même endroit. Or, cette fois-ci, une caisse était restée un peu en arrière, un peu cachée.

Pris de curiosité, et sachant que la propriétaire ne serait pas là avant longtemps, notre pêcheur entra dans les jardins et courut le plus discrètement possible jusqu’à la caisse isolée. Depuis le temps qu’il attendait ça ! Il espérait ne pas être déçu : il n’avait jusque-là rien trouvé de concret et commençait sérieusement à s’alarmer.

Il fit la grimace en voyant que la caisse était remplie de baies Kiwan. Pire que de mettre les mains sur une bûche pleine d’échardes, on ne pouvait que se blesser en manipulant ces baies. Comment l’extérieur d’une baie peut-il être aussi piquant et son intérieur aussi savoureux ?

Un vrai mystère aux yeux de notre pêcheur qui, avouons-le, ne connaissait rien du tout en matière de baies.

Il prit donc son courage à deux mains et fouilla dans la caisse, à l’aveugle, espérant trouver quelque chose, quoi que ce soit ! Il fallait absolument qu’il trouve. Et soudain, bingo. Après avoir abîmé ses vêtements et s’être écorché les bras, il était tombé sur un objet à la surface lisse. Une Poké Ball. Il se dépêcha de la retirer de la caisse, en grognant à cause des dernières épines qui lui blessaient les mains.

Une fois la Poké Ball en main, il savait qu’il devait agir intelligemment. Mais son temps était compté : chaque seconde le rapprochait du moment où la propriétaire du terrain allait débarquer. D’abord, des preuves. Il fallait des preuves.

Il posa donc la Poké Ball sur la caisse et prit avec son Holokit plusieurs photos de ses trouvailles, sous tous les angles. C’était, si vous voulez mon avis, un spectacle plutôt comique que de voir cet homme d’un autre temps s’évertuer à faire fonctionner une machine aussi révolutionnaire que l’Holokit. Il appuyait sur tous les boutons, allumait, puis éteignait sa lampe par inadvertance…

Mais trêves de plaisanteries, car notre homme venait de prendre la décision de découvrir ce que contenait la Poké Ball. Il prit donc la Poké Ball dans une main, puis sortit sa canne à pêche de son sac pour se défendre avec. Heureusement qu’il faisait encore noir et que le froid dissuadait les gens du coin de sortir trop loin de chez eux, car ce pêcheur avait une allure des plus étonnantes.

Il se décida à jeter la Poké Ball devant lui, s’attendant à tout : un Léviator ? un Tyranocif ? un Pokémon de type Dragon ?

Une petite explosion de lumière bleue éclaira momentanément la nuit noire, puis une silhouette apparut. Instinctivement, notre homme fit un pas de recul, prêt à utiliser sa Méga-Canne fétiche s’il le fallait ! Un peu ébloui, il lui fallut quelques instants pour distinguer la silhouette du Pokémon qui venait d’apparaître.

Un simple… Voltorbe ? Mais le sang du pêcheur se glaça dans son échine : les Voltorbe ne savent faire qu’une chose, exploser ! Notre homme courut en toute hâte avant de se jeter à plat ventre contre la terre, les deux mains sur la tête.

Mais rien. Il attendit quelques secondes, quelques minutes et puis il devint évident pour lui que le Voltorbe était complètement passif. Il revint doucement vers le Pokémon pour ne pas risquer de le brusquer. Le Voltorbe, immobile, regardait notre homme d’un air furieux, mais ne faisait rien de plus.

Le pêcheur reprit donc la Poké Ball qu’il avait posée sur la caisse pour que le Voltorbe y entre de nouveau – le Pokémon Balle n’opposa aucune résistance. La fraîcheur matinale fit frissonner notre homme, malgré le grand manteau bleu qu’il portait. Il réfléchissait intensément à ce qu’il venait de découvrir ; mais le temps n’était pas à la réflexion, il fallait vite replacer la Poké Ball là où il l’avait trouvée.

Il prit donc la Poké Ball et la replongea en grimaçant là où il l’avait trouvé, avant de filer à grandes enjambées vers l’extérieur du champ, son sac serré contre lui.

Il vérifia que personne n’avait rien vu mais, comme il s’en doutait, personne n’était dehors aussi loin du village à une telle heure. Et celle à qui le champ appartenait ne viendrait que plus tard, bien après le lever du soleil – mais ce n'était pas une raison pour traîner.

Une fois arrivé au bord de la rivière, il marcha quelques mètres dans la boue du rivage avant de trouver son coin d’herbe fétiche. Il s’assit lourdement sur le sol sec et prit une grande inspiration d’air frais, légèrement humide comme il l’aimait. Content, il planta sa canne à pêche à côté de lui et se mit à réfléchir.

Il n’y avait pas trente-six moyens d’expliquer la présence d’un Voltorbe au fond de cette caisse. Les Voltorbe sont connus pour les puissantes explosions qu’ils sont capables de créer – celle qui avait mis une telle Poké Ball au fond de la caisse voulait donc…

Un frisson parcourut son échine. Il savait qu’une grande soirée allait se tenir le soir-même au Palais Chaydeuvre. Le Palais se gargarisait de sa cuisine locale : les baies qui venaient d’être cultivées allaient donc forcément être envoyées là-bas. Une soirée importante… Et une caisse dans laquelle un Voltorbe était caché, incognito.

La gamine ne pouvait que vouloir faire sauter le bâtiment.

Au loin, le soleil se levait. Une nouvelle journée venait de commencer, une journée au terme de laquelle une explosion allait tout détruire. Les premiers rayons de soleil éclairèrent les cimes des arbres. Les espoirs d’entraide et de communion détruits en moins d’une seconde. L’or de l’aube se refléta sur la rivière calme. Les gangs se sentiraient plus forts que jamais.

L’aurore illumina le visage de Beladonis.

Il ne tenait qu’à lui d’arrêter le cours du temps.

*
12h
La matinée venait de couler doucement, comme l’eau tranquille de la rivière dans laquelle Beladonis pêchait, songeur. Depuis plusieurs heures qu’il réfléchissait calmement à sa découverte de la matinée, il ne savait pas quoi faire.

La certitude qu’il avait, après avoir suivi à la trace les moindres faits et gestes de Rose ces dernières semaines, c’est qu’elle préparait un mauvais coup – même s’il n’avait rien de tangible pour le prouver.

Il désespérait jusque-là d’en découvrir les tenants et les aboutissants, mais sa découverte inespérée du matin avait tout rendu clair. Le plan de Rose était simple comme tout : faire entrer un Voltorbe dans l’enceinte du Palais, et tout faire exploser.

Notre homme se caressait le menton. Comment empêcher cela, tout en accomplissant sa mission ? Depuis que la justice avait relaxé Rose, on lui avait demandé de le surveiller et, si elle préparait quelque chose, de la surprendre en flagrant délit. Il fallait neutraliser les éléments dangereux de façon définitive.

C’est ce point qui le tracassait. Ses supérieurs exigeaient de lui un flagrant délit. Donc, impossible de la tenir à l’écart de la fête et de l’accuser en prenant appui sur la présence du Voltorbe dans la caisse. Elle aurait vite fait de clamer son innocence : quelqu’un d’autre aurait mis la Poké Ball au milieu des baies, elle ne savait rien, etc.

Il fallait donc qu’il laisse Rose agir. Mais il ne pouvait évidemment pas mettre en danger les vies des invités. Beladonis avait donc pensé à demander aux gardes de l’événement de garder un œil sur la jeune fille. Mais là encore, il fallait qu’il soit réaliste : les gardes arrêteraient immédiatement la jeune fille, et ne permettraient jamais qu’on puisse mettre en péril la vie de quiconque.

Notre détective à canne à pêche était dans une impasse. Soit il arrêtait Rose pour la placer en garde à vue le temps de la soirée, empêchait le drame mais perdait tout espoir de l’arrêter. Soit il ne l’arrêtait pas, la laissait continuer son plan, mais mettait en danger la vie de toutes les personnes présentes à cette soirée.

Il n’était pas pressé : la soirée ne commencerait pas avant des heures. Il sentait seulement un peu de frustration monter en lui. S’il avait le choix, il fallait forcément qu’il arrête Rose avant qu’elle n’entre au Palais avec son Voltorbe.

Des semaines de filature pour rien… Ce ne serait pas la première fois que ça lui arriverait, mais tout de même. Maintenant qu’il savait précisément comment la jeune fille allait s’y prendre, il devait bien y avoir un moyen.

Il fut interrompu dans le cours de ses pensées par le « ploc ploc » de bottes qui s’enfoncent dans la boue. L’un des amis qu’il s’était faits au village se dirigeait vers lui.

— Bah alors, mon vieux, toujours à pêcher, hein ? Ça mord aujourd’hui ? Tiens, tu t’es fait mal au bras ? Avec ta canne à pêche, je suppose, dit l’ami du pêcheur en riant.

Tel un Métamorph, Beladonis changea du tout au tout : il perdit immédiatement son air soucieux, laissa retomber nonchalamment sa main sur sa canne à pêche et arrondit son dos dans une posture décontractée. En un instant, juste avant que l’autre ne puisse le voir, Beladonis était redevenu un pêcheur comme les autres.

— Tu sais bien… Je dois manquer de concentration. Moi non plus je n’arrive pas à comprendre comment j’arrive à être aussi maladroit… Et pour la pêche… Quelques Magicarpe, et encore ! Pas grand-chose, répondit Beladonis avec humilité.

— C’est vrai que j’ai rarement vu quelqu’un comme toi ! Toujours au fond de tes pensées, hein ? Bon, je peux papoter un peu mais j’ai pas toute la journée : il faut que je me prépare !

— Ah oui ?

— Tu sais bien, ce soir, c’est le jackpot ! Il faut que je me prépare pour que tout soit prêt. Il doit être un peu plus de midi, là… Ouais, c’est ça ! Il me reste tout l’aprèm pour être prêt mais je dois pas traîner non plus. Faut que j’avance sur mon mémoire ! Si je pouvais écrire un peu avant de filer à la soirée, ce serait vraiment top.

— Tu travailles sur quoi en ce moment ? demanda Beladonis pour entretenir la conversation avec son jeune ami.

— Les caractéristiques des nouveaux Pokémon du coin ! Les Fouinette, les Ptitard, les Cradopaud, les Couaneton… Là, je me concentre sur leurs talents et leurs capacités ! Surtout, si tu pêches un Pokémon particulier, tu te souviens de ce qu’on a dit, hein ? Tu me le gardes au chaud ! Ça m’intéresse !

Mathias regarda l’heure sur son Holokit.

— Ouais, faut vraiment pas que je traîne. Bon, allez, salut ! Passe pas toute la journée ici, hein ! Protège-toi du soleil, on a beau être en hiver, ça tape fort ! Et tiens-moi au courant !

Beladonis, qui n’avait finalement dit que quelques mots, regarda l’autre partir à grandes enjambées. Il l’aimait bien, et…

Le regard de Beladonis se figea. Une onde de bien-être parcourut son échine, et se propagea harmonieusement jusqu’à l’eau de la rivière devant lui. Tout le corps du détective se détendit d’un seul coup, il ferma les yeux d’aise.

Il se délecta de ce plaisir si particulier qui le faisait aimer son métier. Cette sensation lorsqu’on trouve la solution à une énigme insoluble… C’est sans pareil. Instantanément, tous les verrous se lèvent, tous les problèmes s’envolent, le poids qui pèse sur le cœur disparaît. On a l’impression d’être si léger que l’on pourrait s’envoler.

Puis, il faut redescendre sur terre. Et Beladonis aimait aussi le côté pragmatique de son activité. Il saisit donc sa canne à pêche avec une ferveur renouvelée, et remercia intérieurement Mathias.

« Tu viens de sauver des milliers de vies, mon jeune ami », pensa-t-il.

*
18h
Beladonis s’était donné beaucoup de mal pour trouver les Pokémon qu’il recherchait. Lui qui avait pris cette couverture pour passer inaperçu et rester près des champs en toute circonstance, n’avait jamais vraiment été un bon pêcheur. Tout juste arrivait-il à remonter sa ligne lorsqu’un Pokémon faible comme tout daignait s’en approcher.

Mais, cet après-midi, il avait tout donné. Au moindre frémissement du fil qu’il tenait du bout de ses bras, il tirait comme un forcené sur sa canne, ses deux pieds fermement ancrés sur son carré d’herbe.

Et ses efforts avaient payé ! Après avoir jeté assez de boue sur les Pokémon Eau du coin pour vider la rive tout entière, il avait réussi à capturer de nombreux Pokémon Eau.

Il regarda sa vieille montre et constata que l’heure du début de la soirée approchait. Il fallait se dépêcher.

Sur la vingtaine de Pokémon qu’il avait réussi à attraper, il relâcha ceux dont il n’avait pas besoin. Il ne garda que cinq Poké Ball avec lui, qu’il rangea précieusement le long de sa ceinture comme s’il avait été un véritable dresseur – une pour chaque salle dans laquelle les invités passeraient.

Pressé, son long manteau encrassé et tailladé au niveau des avant-bras battant l’air derrière lui, il se dirigea vers le Palais. Il était concentré sur son objectif, et réfléchissait aux moyens les plus efficaces pour empêcher le crime d’avoir lieu.

Le soleil tombait silencieusement derrière l’imposante stature du Palais, laissant les hommes seuls face à leurs démons intérieurs. Lorsque Beladonis arriva aux abords du Palais, il dut se frayer un passage à travers un groupe d’invités élégamment parés qui attendaient déjà.

Une fois devant la grille d’entrée, il ressemblait à un drôle de poisson, au milieu de ces gens aux manières distinguées. Un Mygavolt lui barra le chemin alors qu’il s’approchait de la grille d’entrée.

— Qui va là ? demanda un garde qui vint se poster à côté de son Mygavolt. La soirée ne commence qu’à dix-neuf heures, nous vous invitons donc à patienter le temps que les préparatifs soient terminés.

Le ton était froid, méthodique, inhumain. Rien qui puisse impressionner Beladonis, qui s’avança avec sa dégaine originale :

— Cher Monsieur, je vous souhaite le bonsoir. Les apparences ne sont certes pas à mon avantage, mais je dois accomplir une mission d’une importance capitale pour les F.P.I. Aussi, malgré ma démarche cavalière, je souhaiterais m’entretenir dans les plus brefs délais avec le responsable de la sécurité de ce bâtiment.

— Vous… Pardon ?

Le garde eut un mouvement de recul, un peu désarçonné. Sous le regard impérieux et intelligent d’un Alakazam, il reprit cependant vite ses esprits.

— Votre carte, s’il vous plaît, exigea-t-il.

— Mais certainement.

Beladonis sortit sa carte des Forces de Police Internationales, certes un peu salie par son activité de l’après-midi, mais bien officielle. Le garde la regarda attentivement, puis regarda Beladonis, avant de se gratter la tête.

— D’accord. On peut savoir ce que vous faites ici ?

— Je m’entretiendrai des raisons de ma venue avec votre responsable. Où est-il ?

— Tenez, voilà un Holokit grâce auquel vous pourrez lui parler. J’ai déjà lancé l’appel, il vous attend à l’autre bout du fil, intervint un autre garde, accompagné quant à lui d’un Gardevoir.

— Je vous en remercie, répondit poliment Beladonis.

Il saisit l’Holokit et marcha vers un coin isolé de l’esplanade où des serveurs préparaient les tables pour l’apéritif qui se tiendrait incessamment. Il commença ensuite l’appel :

— Cher Monsieur, je vous remercie d’avoir accepté de prendre cet appel. Êtes-vous bien le responsable de la sécurité de l’événement de ce soir ?

— Oui, répondit une voix masculine, impérieuse. Que font les F.P.I. ici ?

— Nous avons, comme vous, pour mission de protéger les individus qui sont présents. J’irai droit au but. Si je n’interviens pas immédiatement, un drame aura lieu ce soir. Je n’ai besoin que d’une vingtaine de minutes, et vos hommes pourront bien évidemment m’épauler dans ce que j’aurai à faire.

La voix de l’interlocuteur de Beladonis ne broncha pas, toujours aussi puissante, lorsqu’il demanda :

— Quelle est cette menace dont vous me parlez ? Les F.P.I. ont-ils eu connaissance d’éléments qu’il nous serait utile de connaître ?

— Ces éléments sont confidentiels. Sachez qu’il n’y aura aucune menace tant que vous me laisserez agir librement dans l’heure qui vient. Mais le temps nous est compté, il faut faire vite, pressa Beladonis.

— Bien. Je ne m’opposerai pas aux F.P.I. Faites votre travail, et n’hésitez pas à me recontacter. Vous avez carte blanche. Les employés auront pour ordre de vous épauler dans tout ce que vous souhaiterez faire. La sécurité prévaut. Bonne soirée, Monsieur.

Le « bip bip » de la fin d’un appel retentit. Beladonis se félicita que l’homme en charge de la sécurité du bâtiment soit aussi direct et efficace. Il retourna auprès des gardes de l’entrée du bâtiment.

— C’est bon ! Votre patron me laisse les coudées libres, j’aurais juste besoin de l’aide de l’un d’entre vous.

— Je vais venir avec vous, alors, répondit immédiatement l’homme au Mygavolt en jetant un regard méfiant sur Beladonis.

— Très bien, en route. Je vous expliquerai sur le chemin ce que nous allons faire.

Le feuillage des arbres des alentours bruissait, tandis que le chant de quelques Pokémon Vol apportait à la fraîcheur du vent un air de mélodie harmonieuse, pendant que Beladonis refourguait son gros sac humide à l’un des gardes.

Ensuite, débarrassé, il accompagna le dresseur du Mygavolt à grands renforts de gestes jusqu’à l’entrée du Palais.

— On va commencer par s’occuper du parvis. Mettez-le dans un endroit où il restera jusqu’à la fin de la soirée, d’accord ? Il faut absolument que chacun reste à sa place jusqu’à ce que les invités aient quitté le Palais.

— Très bien, répondit Tobias sans vraiment parvenir à cacher son scepticisme. Si j’en ai l’occasion, je vérifierai moi-même qu’ils ne bougent pas. Mais dépêchons-nous, il ne faut pas que les invités nous voient plus longtemps.

Et les deux hommes entrèrent dans le Palais, ensemble. Ils y restèrent plusieurs dizaines de minutes. Beladonis chipotait, réfléchissait, et acceptait avec beaucoup d’entrain les réflexions pragmatiques et judicieuses de son nouveau camarade.

Une fois qu’ils avaient fait le tour de toutes les salles par lesquelles les invités passeraient, plus une Poké Ball ne restait à la ceinture de Beladonis.

Ils retournèrent au portail peu avant l’heure à laquelle les invités allaient enfin pouvoir entrer dans l’enceinte de la prestigieuse demeure. Beladonis serra avec énergie la main de son compagnon :

— Je vous remercie de votre aide, mon cher ami. Et je compte sur vous pour que ces petits Pokémon restent bien en place. Tenez-moi au courant, aussi. J’ai votre parole ?

— Vous l’avez, répondit avec un très léger sourire Tobias.

*
Une minute avant minuit
Tic.

Mathias, accompagné de ses collègues serveurs, nettoyait assiette après assiette avec un soin qui baissait à mesure que sa fatigue augmentait. Il baillait toutes les deux minutes, et rêvait de retourner dans son lit, bien au chaud. Peu lui importaient maintenant les histoires du début de la soirée. Il voulait juste se lover contre celle qu’il aimait.

Tac.

Tobias, droit comme un piquet, patrouillait dans la salle du banquet, sans se douter qu’un Voltorbe sur le point d’exploser se tenait juste au-dessus de lui. Consciencieux, il tenait la promesse faite à Beladonis, et faisait régulièrement vérifier que les petits Pokémon qu’ils avaient disposés un peu partout étaient bien en place. Son Mygavolt à l’œil perçant, gêné par la puissante lumière des plafonniers, scrutait partout, sauf là où il aurait dû.

Tic.

Debout près de Malva, sa fille près d’elle et l’œil des caméras braqué sur elle, la diplomate était empreinte d’une majesté impériale. Elle se tenait dans une salle de l’étage avec un nombre choisi d’invités, juste au-dessus de la salle du banquet, et attendait qu’il soit l’heure de signer le papier disposé devant elle. Elle se savait en danger. Son sang battait dans ses tempes, mais son sourire restait solaire.

Tac.

Rose, rentrée chez elle à Fort-Vanitas, attendait patiemment. Une lueur démente dans le regard, elle avait hâte que le Voltorbe relâche enfin toute l’énergie qu’il accumulait depuis une heure. Elle s’imaginait l’explosion magnifique, le trait de lumière incandescent d’une beauté ineffable qui transpercerait le ciel de la nuit. Ses yeux fous croyaient apercevoir Lysandre à ses côtés qui la félicitait.

Tic.

Beladonis, anxieux, était pris de sueurs froides. Tant que la signature n’était pas finie, rien n’était joué. Pour l’instant, ce qu’il pouvait faire de mieux, c’était de rester là, près de la maison de Rose. Il aurait voulu défoncer sa porte pour l’interpeller immédiatement, mais il devait attendre. Le temps ne lui avait jamais paru aussi long.

Tac.

Une horloge sonna minuit.

L’heure du crime.