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Pokémon : L'étoile d'Arkephyr de Arkephyr



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Informations

» Auteur : Arkephyr - Voir le profil
» Créé le 28/07/2023 à 18:15
» Dernière mise à jour le 28/07/2023 à 18:22

» Mots-clés :   Aventure   Drame   Région inventée   Romance

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[T] Duel manqué
J'observe le coucher de soleil avec appréhension. J'ai visualisé notre plan au moins mille fois dans mon esprit, et je n'y entrevois aucune faille. Alors pourquoi ne parviens-je pas à me défaire de ce mauvais pressentiment ?

– Tu viens dormir quelques heures ? souffle Juliette derrière moi.

Elle prend ma main avec une infinie douceur et me force à détourner les yeux du crépuscule flamboyant pour rejoindre notre camp improvisé.

Son visage habituellement si serein trahit son anxiété. Je lui ai pourtant conseillé de rester avec mon frère dans les appartements du Colisée, mais cette tête de mule a insisté pour me suivre jusqu'ici.

– Je n'arriverai pas à fermer l'œil... je grommelle en fixant les braises encore fumantes de notre feu.

– Il faut que tu sois en forme pour cette nuit... insiste mon amie en me fixant de ses yeux gris clair. Et tu as aussi une finale à gagner demain.

L'obtention du titre de Maître Pokémon est bien le cadet de mes soucis. Nos amis dresseurs n'auront d'ailleurs plus aucun avenir si la Team Fusion et leur horrible chef parviennent à concrétiser leur funeste projet.

– Est-ce qu'il faut que je t'aide à te détendre ? susurre-t-elle en battant exagérément des cils.

Je ne peux m'empêcher de pouffer de rire. Juliette a le don de tourner en dérision les situations les plus critiques pour les rendre plus... acceptables.

Cette fille est un concentré de lumière.

– On a quinze ans, Juliette... je rétorque en levant les yeux au ciel. On en reparle dans quelques années.

Mon amie éclate de rire, le regard pétillant tandis qu'elle me dévisage avec malice.

– Ce que tu peux être vieux jeu ! taquine-t-elle en tirant la langue. Et si on meurt cette nuit, en allant détruire le centre commercial ? Tu te mordras les doigts d'avoir dit non !

– Arrête un peu... je murmure en me renfrognant. Ce n'est vraiment pas drôle.

Le risque est bien réel. Nous allons littéralement jouer avec le feu cette nuit. Le moindre imprévu pourrait tout faire basculer.

Mais tous les regards sont braqués sur le Colisée. Le centre commercial de Lunapolis est fermé toute la nuit, et la plupart des habitants de la capitale sont cloîtrés chez eux pour regarder les rediffusions des combats de la semaine.

– Te bile pas, Thomas... reprend mon amie d'un ton apaisant en m'adressant un sourire confiant. Tout se passera bien.

Le paysage se brouille peu à peu et laisse place à une épaisse fumée suffocante qui m'entoure de toute part. Je dévale les escaliers comme un ouragan tandis que de nouvelles explosions retentissent partout dans le bâtiment.

– Juliette ! je crie à pleins poumons.

Je vérifie que mon foulard recouvre bien ma bouche en réprimant une quinte de toux. Des hurlements de panique se font entendre dans les étages inférieurs et provoquent en moi un sentiment de terreur indicible.

Je descends une nouvelle volée de marches et m'engouffre dans un couloir encore praticable en me laissant guider par les voix des innocents pris au piège.

Une immense affiche attire alors mon attention.

– Qu'est-ce que...

Le panneau présente une promotion exceptionnelle pour l'achat de Pokéball, et cette dernière est valable uniquement cette nuit. Quelque chose me chiffonne avec ce visuel, et je remarque rapidement que les couleurs des capsules ont été inversées.

Blanches en haut et rouges en bas. Comme les Électrode qui viennent d'exploser partout dans le bâtiment.

Nous sommes tombés dans un piège. Cette chienne de Marianne a très certainement eu vent de notre projet et a transformé notre expédition en véritable cauchemar.

– Par ici !

Je secoue la tête et reprends ma course effrénée avec une seule idée en tête : retrouver mon amie et la sortir de là avant qu'il ne soit trop tard.

Des centaines de personnes risquent de perdre la vie ce soir.

– Aidez-nous ! hurle une autre voix suppliante.

Je crispe la mâchoire et repousse d'un geste de la main la sueur sur mon front. La chaleur est insoutenable, et le simple fait de respirer est une véritable épreuve.

Des silhouettes finissent néanmoins par apparaître au bout du couloir. Les survivants se sont abrités dans une galerie encore préservée des flammes et attendent désespérément qu'on vienne les sortir de là.

– Pourquoi n'ont-ils pas pris l'issue de secours ? je grommelle en accélérant le pas.

Juliette et moi avons étudié les plans du bâtiment avec le plus grand soin pour en mémoriser toutes les sorties possibles. C'est même le premier critère que nous avons pris en compte avant de placer les bombes vivantes à l'intérieur du centre.

Les accès auraient-ils été délibérément verrouillés ?

– Thomas !

Je ne suis plus qu'à une dizaine de mètres de mon amie. Elle sanglote de soulagement en me reconnaissant et agite son bras dans ma direction pour s'assurer que je l'aie bien vue.

– Viens vite ! souffle-t-elle en toussant. Il y a des blessés.

Je décroche aussitôt une Pokéball de ma ceinture et libère Dracaufeu. Mon vieil ami n'aura aucun mal à résister à la chaleur extrême des environs – peut-être même réussira-t-il à multiplier les allers-retours pour sauver tout le monde.

Mon Pokémon est sur le point de rejoindre Juliette lorsqu'une détonation assourdissante retentit à côté de ses oreilles et le souffle comme s'il n'était qu'une vulgaire feuille de papier.

Le sourire figé de mon amie est la dernière chose que je vois avant que le plafond de la galerie ne s'effondre sur le groupe de rescapés.


**********
– NON !

Je me redresse beaucoup trop vite et vomis de la bile sur le côté du lit. Mon cœur tambourine avec fureur dans ma poitrine, et ma tête menace d'exploser.

– Où est-ce que je suis ?

J'ai l'impression d'être sur un bateau coincé dans une mer agitée, et il me faut un certain temps pour me rappeler les événements de la veille.

J'ai passé la soirée à me saouler avec mon frère. Nous avons sifflé une première bouteille de whisky en échangeant des vérités improbables, puis une deuxième pour les accepter et faire fi des rancœurs passées.

– Elle est vivante... je murmure en sentant une larme ruisseler sur ma joue. Elle est vivante.

Le même cauchemar hante mes nuits depuis dix ans, m'obligeant à revivre dans les moindres détails ce drame qui a marqué la fin de ma vie. Le Thomas qui parcourt la région depuis ce jour n'est rien de plus qu'un fantôme en quête de vengeance.

Du moins jusqu'à aujourd'hui.

– Enfin réveillé ! lance Jasmine en faisant irruption dans ma chambre en sous-vêtements. J'ai laissé du café et des viennoiseries sur la table du salon.

L'hôtesse ouvre d'un geste désinvolte la porte de la penderie et réfléchit un instant au choix de sa robe.

Je sens alors mon visage blêmir.

– Est-ce qu'on a...

– C'était incroyable... me coupe la jeune femme avec un regard pétillant. Je ne soupçonnais pas une telle sauvagerie derrière un masque aussi calme.

Je lève brusquement le drap d'un geste maladroit et remarque avec un certain soulagement que je suis encore tout habillé. Jasmine pouffe alors de rire et me lance une serviette ainsi que des vêtements propres que j'attrape au vol en fronçant les sourcils.

– Va donc te doucher... soupire-t-elle en choisissant une tenue toute simple. Je t'attends dehors, à moins que tu ne souhaites poursuivre nos ébats torrides dans la salle de bain ?

Je préfère ne pas lui répondre et rassemble mes affaires avant de me diriger vers la douche, qui est aussi spacieuse et luxueuse que le reste de l'appartement.

Je ne sais toujours pas qui est cette jeune femme, mais elle a bien trop d'assurance et de répondant pour n'être qu'une suivante. Mon frère l'a peut-être engagée pour garder un œil sur moi, au cas où je serais tenté de préparer un mauvais coup.

Le contact de l'eau froide me fait un bien fou et me dégrise presque entièrement. Je ressens encore la fatigue liée à l'alcool, mais le café devrait achever de me remettre sur pied.

Jasmine hausse un sourcil surpris en me voyant entrer quinze minutes plus tard dans le salon. Ma chemise en soie ivoire, aux motifs à la fois subtils et sophistiqués, semble faire sensation. La tenue est complétée par un blazer en velours bordeaux et un pantalon ajusté en coton qui lui est assorti. Les chaussures en cuir me font un peu mal au pied, mais je me voyais mal enfiler mes vieilles baskets.

– Voyez-vous ça... lance-t-elle avec un sifflement appréciateur. Nous avons un prince au Palais.

Je lève les yeux au ciel mais esquisse malgré tout un sourire amusé. Tant que je me trouve au Repaire, je peux me permettre de baisser ma garde et de me laisser aller à quelques fantaisies.

Peut-être mon frère me trouvera-t-il moins ennuyeux après ça.

– Quelle heure est-il ? je demande en fourrant la moitié d'un croissant dans ma bouche.

Le soleil artificiel baigne déjà le séjour de sa lumière chaude, mais je n'ai aucun véritable repère temporel sur lequel m'appuyer. Pour une raison qui m'échappe, Michael n'a pas jugé utile de disposer des horloges dans son Palais.

– Neuf heures et quart... répond tranquillement Jasmine.

Je manque de m'étouffer et recrache quelques miettes malgré moi.

– Tu te fous de moi ? Lucille va me tuer !

L'hôtesse esquisse un sourire en sirotant tranquillement son jus de fruit. Se pourrait-il qu'elle ait reçu la consigne de me retenir ici le plus longtemps possible ?

– C'est plutôt une bonne chose qu'elle ne t'ait pas croisé aujourd'hui... dit-elle d'un ton posé. Tu lui aurais reproché de s'être trémoussée contre un autre homme hier soir, et elle aurait remarqué ta gueule de bois ce matin. Comment veux-tu qu'elle réussisse à rester concentrée sur son match après ça ?

Je lance un regard noir à la danseuse. Le fait qu'elle soit plus raisonnée que moi ne fait qu'accentuer ma mauvaise humeur.

– Emmène-moi là-bas... j'ordonne en me levant de table.

La jeune femme soutient un instant mon regard avant de lâcher un soupir résigné. Elle se lève à son tour pour se diriger d'un pas vif vers la cuisine, ouvre un tiroir à la volée et en sort un couteau de très bonne facture qu'elle glisse dans sa botte.

Elle me lance alors un sourire provocateur en passant devant moi et approche alors son visage du mien.

– Je ne suis pas une espionne... me susurre-t-elle à l'oreille. Vois-moi plutôt comme le crochet du Serpent.

Le masque vient de tomber. Jasmine est bien plus dangereuse qu'elle ne le laisse paraître, et cet aveu inattendu ressemble davantage à une marque de confiance qu'à une tentative d'intimidation.

Michael ne tient pas seulement à garder un œil sur moi. Il veut s'assurer que rien ne m'arrive tant que je serai sous son toit.

– Et Lucille ? je lance en suivant mon ange gardien à l'extérieur. Elle a un autre crochet pour la protéger ?

La Team Fusion veut ma tête, mais mon amie est la plus exposée de nous deux. Sa mère ne reculera devant rien pour lui mettre la main dessus et mener à bien ses sombres desseins.

– Malik ne la quitte pas d'une semelle... répond-elle sans s'arrêter en prenant la direction du hall. C'est le mec hyper canon qui dansait avec elle hier soir.

Jasmine a ajouté cette dernière phrase pour me provoquer, mais cette révélation ne me fait ni chaud ni froid.

Je me contente de suivre l'hôtesse en silence jusqu'à l'entrée du Palais. Cette dernière avance tout droit vers l'ascenseur situé au fond de la pièce, puis me fait signe d'entrer avant d'insérer une clé dans le mécanisme où sont habituellement situés les boutons des étages.

– Où est-ce qu'on va ? je demande en fronçant les sourcils.

La jeune femme m'adresse l'un de ces sourires mystérieux et troublants dont elle a le secret.

– Nous allons au cœur du Palais... dit-elle avec le regard pétillant.

Les portes de l'ascenseur s'ouvrent sur une immense structure circulaire bordée par des gradins en pierre qui s'élèvent sur plusieurs étages.

– Il doit y avoir des milliers de gens là-dedans... je souffle d'un air incrédule.

Voici donc le fameux Colisée du Repaire. Mon frère l'a fait construire en se basant sur les plans de l'original, qui trône depuis toujours au sommet du Mont Aurora.

– Michael a toujours eu la folie des grandeurs... acquiesce-t-elle sans se départir de son sourire.

C'est la première fois que Jasmine l'appelle par son prénom. Elle ne se soucie plus de jouer son rôle d'hôtesse docile et laisse entrevoir une spontanéité naturelle qui me plaît beaucoup.

Lucille, quant à elle, semble bien moins détendue. Elle affronte le Maître depuis le centre de l'arène et affiche une détermination farouche, son Poussifeu toujours perché sur son épaule.

– Calme-toi, Draby.

Le bébé dragon lance des regards paniqués tout autour de lui. L'absence de son adversaire indique que celui-ci a probablement disparu sous terre.

Mon frère a dû piocher un Pokémon de type Sol.

– Tunnel... ordonne-t-il calmement.

Un Kraknoix surgit brusquement du sol et vient percuter Draby de plein fouet. Ce dernier est propulsé dans les airs et retombe lourdement sur le sol. Il se relève avec difficulté mais chancèle dangereusement.

– Le Pokémon de Lucille est mal en point... j'observe en fronçant les sourcils. Il est empoisonné.

Il ne m'en faut pas plus pour reconstituer l'essentiel du combat. Mon frère a sans doute réussi à placer une attaque Toxik pour empoisonner le bébé dragon. Cet enfoiré s'amuse donc à jouer la montre en incitant son Pokémon de se cacher sous terre pour laisser son adversaire s'affaiblir peu à peu.

Mon amie va devoir trouver le moyen d'en finir rapidement si elle ne veut pas passer les prochains mois à travailler au Hall Pourpre.

– Pas sûr que ça la dérange... je grommelle dans ma barbe.

– Mmmmh ? lance Jasmine en se tournant vers moi.

– Non, rien.

Lucille est désavantagée. Elle combat aux côtés d'un Pokémon qu'elle ne connaît pas, contrairement à mon frère qui a déjà eu l'occasion d'élever un Kraknoix.

– Damoclès ! crie-t-elle sans conviction.

Draby hoche la tête et se rue avec force sur son adversaire, mais ce dernier a le temps de le voir venir et plonge la tête la première dans la terre pour préparer un nouveau Tunnel.

– Désolé... soupire Michael. Il est temps d'en finir.

– Pas encore... souffle mon amie. Danse Pluie !

Mon frère écarquille légèrement les yeux en voyant le petit dragon se trémousser avec le peu d'énergie qui lui reste. Il ne s'attendait pas à ce que son adversaire ait l'idée de choisir une attaque qui ne s'apprend que par Capsule Technique.

– Dépêche-toi de sortir ! presse le Maître.

Une puissante averse s'abat sur le sable en transformant le terrain en immense mare de boue. Kraknoix rejoint rapidement la surface et tente de s'en extirper, mais ses petites pattes l'empêchent de se mouvoir comme il le souhaiterait.

Un sourire triomphant se dessine alors sur les lèvres de Lucille.

– Hydrocanon ! ordonne-t-elle avec assurance.

Rien ne se passe. Il semblerait que son Draby ne maîtrise pas cette capacité.

– On s'en fout ! enchaîne-t-elle sans laisser le moindre répit à mon frère. Damoclès ! Charge ! Rentre-lui dans le lard et gagnons ce match !

Michael se surprend à éclater de rire et décide de rappeler son Kraknoix dans sa Pokéball une seconde avant l'impact. Ses yeux sont animés d'une lueur étincelante que je n'avais plus observée depuis très longtemps.

Il reconnaît en mon amie une adversaire digne de ce nom.

– Lucille remporte le match ! s'exclame la voix dynamique du commentateur. Elle gagne ainsi son pari contre le Serpent !

Quelques applaudissement retentissent dans les gradins, mais beaucoup de spectateurs semblent déçus. J'en déduis que les enjeux du pari ont dû être présentés avant le match, et que certains d'entre eux se réjouissaient à l'idée de rencontrer une autre jolie fille au Hall Pourpre.

Michael s'avance vers ma protégée et ouvre la paume de sa main.

– Tu as gagné le droit d'être invisible... lui dit-il avec un sourire satisfait.

Lucille rayonne de fierté. Elle s'incline avec respect et lui remet immédiatement son smartphone. Je sais qu'elle attend avec impatience le moment où elle pourra de nouveau appeler son père.

– Et tu as gagné le droit de garder cette Pokéball... ajoute-t-il en désignant la capsule d'emprunt contenant Draby. Je suis curieux de voir ce que tu vas faire de lui.

Mon amie semble abasourdie. Elle songe un instant à refuser le cadeau, mais elle ne peut ignorer les premiers liens tissés avec le petit dragon au cours du combat.

– Je... Je ne sais pas comment vous remercier... balbutie-t-elle en dévorant des yeux la Pokéball.

– Commence par me tutoyer... soupire le Maître en levant les yeux vers les gradins. Je suis à peine plus vieux que ce crétin là-haut.

Je lui tends mon majeur et provoque l'hilarité générale dans le Colisée. Il n'y a que mon frère pour se donner ainsi en spectacle – le micro fixé à ses vêtements y est sans doute pour beaucoup.

Le temps semble s'arrêter lorsque les yeux de Lucille rencontrent les miens. Je ne peux m'empêcher de redouter sa réaction. Nous ne nous sommes pas quittés en bons termes, et je n'ai même pas été fichu d'arriver à l'heure pour son duel contre le Maître.

Elle a toutes les raisons de m'en vouloir.

– Tu n'en mènes pas large... raille discrètement Jasmine.

Je fais pivoter mon poignet en direction de l'hôtesse pour illustrer le fond de ma pensée et risque malgré tout un sourire timide à l'adresse de mon amie.

Cette dernière lève les yeux au ciel avant de se dérider à son tour.