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Pokémon : L'étoile d'Arkephyr de Arkephyr



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Informations

» Auteur : Arkephyr - Voir le profil
» Créé le 20/08/2022 à 17:04
» Dernière mise à jour le 23/07/2023 à 18:41

» Mots-clés :   Aventure   Drame   Région inventée   Romance

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[L] Abandon de poste
– Tu es prête.

Je gonfle les joues pour exprimer mon désaccord. Je pourrais prolonger mon entraînement encore quelques jours pour augmenter mes chances de victoire contre le prochain champion.

Je suis certaine que ce serait bénéfique pour mes Pokémon.

– Gobou n'a même pas évolué ! je proteste en posant mon regard sur le petit amphibien.

Thomas laisse échapper un léger soupir. Je déteste quand il fait ça, parce que j'ai l'impression qu'il me prend pour une enfant.

– On pourrait passer les six prochains mois ici sans qu'il n'évolue... répond-il avec patience. Ce n'est pas aussi simple.

Ça fait plus d'une semaine que nous nous entraînons aux abords d'Aquamielle. Je commence réellement à apprécier la vie en pleine nature, et je sais désormais allumer un feu sans me brûler les doigts. Mon cher compagnon de route m'a aussi appris à reconnaître les baies et à les cuisiner de différentes manières pour satisfaire les pupilles de nos Pokémon. Il m'épate chaque jour un peu plus.

Massko se porte quant à lui beaucoup mieux depuis quelques jours. Le contact du pendentif en cristal l'a purifié du mal étrange qui le rongeait, mais il lui faudra du temps pour se pardonner d'avoir blessé Macronium et d'avoir tenté de me tuer.

Je n'ai pas manqué d'interroger mon ami sur le mystérieux collier en sa possession, mais ses révélations n'étaient pas aussi croustillantes que je ne l'imaginais. Il s'agirait en réalité d'une simple labradorite – une pierre bleue réputée pour son pouvoir de protection – renforcée par le pouvoir d'un Pokémon Psy. Selon ses dires, il n'est pas rare que les dresseurs s'en procurent une par précaution.

Thomas n'a d'ailleurs pas été surpris d'apprendre que mon père m'a confié une de ces pierres le jour de mon départ. J'aurais pu lui raconter la vérité sur ma mère, mais nous ne sommes pas suffisamment proches pour que je me consente à me livrer ainsi sur mon passé.

– Reviens, Gobou... je soupire à mon tour en rappelant mon Pokémon dans sa Pokéball. Il y a plutôt intérêt à ce que je gagne.

Je suis en réalité bien plus confiante que je ne veux bien le montrer. Depuis qu'ils s'entraînent avec Pikachu, mes partenaires ont réalisé des progrès fulgurants, au point où je commence à me questionner sur mon éthique en tant que dresseuse. Jamais je ne progresserais aussi vite si je voyageais seule, et j'ai parfois le sentiment de tricher en profitant de l'expertise de Thomas.

– J'imagine que ça ne dépendra que toi... répond-il avec un sourire malicieux. On y va ?

Je lui tire la langue avant de rassembler mes affaires à contrecœur. Je suis toujours heureuse de faire escale dans une ville, ne serait-ce que pour pouvoir faire une vraie lessive et me procurer des produits de première nécessité – du chocolat en grande quantité, par exemple. Hélas, ça implique aussi de me séparer de Thomas.

Mon ami a été parfaitement clair sur ce point. Il ne veut surtout pas que nous soyons vus ensemble à nouveau. Le souvenir de notre agression est encore frais, et il est persuadé que notre situation s'aggraverait si nos assaillants parvenaient à l'identifier.

Je le trouve un peu paranoïaque sur les bords. Mais comme je n'ai pas envie de me faire attaquer à nouveau par ces malades, je préfère ne pas remettre en cause son jugement.

– Tu viendras quand même me voir à l'arène ? je demande en calant mon sac à dos sur mes épaules.

– Si tu es sage...

Je ne peux m'empêcher de lever les yeux au ciel. Cette façon qu'il a de m'infantiliser à chaque occasion me met hors de moi, et je suis à peu près certaine qu'il en joue pour le seul plaisir de me provoquer.

Je décide ne pas entrer dans son jeu et poursuis ma route en silence. Nos chemins se séparent lorsque nous apercevons au loin les premières habitations de la ville.

Aquamielle est une petite bourgade sans prétention. De nombreux touristes y affluent en période estivale pour changer d'air et profiter des sources chaudes, mais la station balnéaire se vide dès lors que l'automne pointe le bout de son nez.

Thomas aurait franchement pu rester à mes côtés. La plupart des personnes âgées que je croise m'observent avec curiosité, mais il y a quand même peu de chances qu'elles soient liées de près ou de loin à nos agresseurs.

– Bonjour ! je lance avec bonne humeur en m'approchant de deux vieilles dames assises sur un banc. Sauriez-vous où je peux trouver l'arène de la ville ?

J'ai toujours eu un bon feeling avec mes aînés. Je n'ai pourtant jamais eu la chance de connaître mes grands-parents. Mon père s'est retrouvé orphelin à l'âge de quatorze ans, et ma mère n'a jamais été vraiment proche de sa famille.

Elle n'a jamais été proche de qui que ce soit.

– C'est juste un peu plus loin, jeune fille ! me répond la plus coquette des deux avec un sourire. Bonne chance avec lui... Tu en auras besoin.

Je déglutis en songeant que je ne me suis pas vraiment renseignée sur le champion. La Ligue ne divulgue que très peu d'informations à leur sujet, et les dresseurs sont tenus de respecter une clause de non-divulgation sous peine d'être radiés de la compétition. Et lorsqu'un article un peu juteux réussit par miracle à passer entre les mailles du filet, il est généralement supprimé dans la minute qui suit.

Thomas a tout de même réussi à dégoter son nom : Alexandre. Un gars prétentieux dans le même moule que Iona, qui n'hésite pas à écraser ses adversaires pour les dissuader de revenir.

Mais il en faudra bien plus pour m'intimider.

– Pas besoin de chance quand on a du talent... je réplique avec un clin d'œil complice à l'adresse des deux mamies. Merci pour votre aide !

Je reprends ma route et passe devant le Centre Pokémon sans m'arrêter. Gobou est encore un peu fatigué, mais je n'ai pas prévu de le faire combattre aujourd'hui. Quelques heures au calme dans sa Pokéball suffiront à le requinquer complètement.

– Je vais finir comme lui... je grommelle en souriant malgré moi.

Thomas a réussi à me convaincre que l'on pouvait se passer des services de la Ligue sans pour autant délaisser ses Pokémon. D'un autre côté, c'est ce genre de philosophie qui cause le déclin de toutes ces installations aménagées pour le bien-être des dresseurs.

Certaines boutiques – comme celle de Jasélia – sont déjà à l'abandon. Qu'adviendra-t-il lorsque les Centres Pokémon fermeront définitivement leurs portes ?

– Waouh... je murmure en apercevant le bâtiment de l'arène. C'est impressionnant.

L'édifice est grandiose et contraste fortement avec le reste de l'architecture de la ville. Il s'agit d'une structure ultra-moderne qui ressemble davantage à un complexe aqualudique qu'à une arène. Je me demande d'ailleurs à quoi peuvent bien servir tous ces toboggans dont certaines parties sont visibles depuis l'extérieur.

Je prends une profonde inspiration et pousse les portes du bâtiment d'un air décidé.

– Je m'appelle Lucille ! je lance d'une voix forte en traversant l'entrée d'un pas vif. Et je viens défier le champion de cette arène !

Ma voix résonne en écho à l'intérieur du complexe avant de se perdre au loin. Je fronce alors légèrement les sourcils et m'avance dans l'immense espace contenant les bassins et les toboggans, mais il n'y a personne.

– Ce n'est pas normal... je souffle en lançant un regard par-dessus mon épaule pour m'assurer que personne ne s'apprête à se jeter sur moi. Bonjour ? Il y a quelqu'un ?

Le champion s'est peut-être noyé dans son ego. À moins qu'un challenger dévasté ait fini par le tuer suite à une défaite particulièrement humiliante ?

– Tu as trop d'imagination, Lucille... je maugrée en me retournant. PUTAIN, THOMAS !

Cet idiot m'a fichu la trouille de ma vie. Ne peut-il donc pas faire comme tout le monde et s'annoncer à voix haute, plutôt que de rôder dans l'ombre comme un voleur ?

– Je suppose que c'est raté pour la discrétion... dit-il en haussant un sourcil. Je peux savoir ce que tu fais ?

J'écarquille les yeux d'un air incrédule.

– À ton avis, gros malin ? je lâche avec mauvaise humeur. Je viens me détendre au spa. Tu pourrais peut-être me renseigner ?

Mon ami me tend une feuille de papier à moitié déchirée, sur laquelle il reste encore des morceaux de ruban adhésif. Je la saisis d'un geste brusque et la parcours rapidement des yeux.

Je me sens alors très conne – encore plus que d'habitude.

"Notre champion sera absent jusqu'à la fin de la semaine pour raison personnelle..." je lis en fronçant les sourcils. "Afin de ne pas perturber le déroulement des voyages initiatiques de nos challengers, son remplaçant vous attend au rucher à la sortie de la ville."

– C'était affiché sur la porte d'entrée... précise inutilement Thomas, les yeux pétillants de malice.

J'ai envie de le baffer. Je ne pensais pas qu'un homme seul puisse susciter en moi autant d'émotions contradictoires.

Mais je dois bien admettre que je le mérite.

– Tu sais où se trouve ce rucher ? je soupire en froissant l'affiche.

– À la sortie de la ville... répond-il comme si j'étais profondément débile. C'était écrit sur l'aff...

– JE VOULAIS DIRE PRÉCISÉMENT !

Je décide de bouder pendant tout le trajet. Je suis plutôt bon public quand il s'agit d'humour – j'ai d'ailleurs beaucoup d'auto-dérision en temps normal, mais je suis beaucoup moins réceptive dans des situations stressantes comme celle-ci.

Thomas se fiche pas mal de me voir à ce point angoissée. Au contraire, il ne manque jamais une occasion d'en rajouter une couche. Son attitude est bien plus puérile que la mienne, quand j'y pense.

– Tu n'étais pas censé rester invisible ? je finis par lâcher lorsque nous atteignons enfin la sortie de la ville.

Je viens seulement de remarquer qu'il ne porte pas son sweat à capuche habituel. Je n'ai pas l'impression qu'il affectionne particulièrement ce vêtement – je ne l'ai jamais vu le porter en dehors des villes, mais c'est aussi la première fois que je vois aussi détendu en public.

– Nous sommes grillés... répond-il sur le ton de la conversation.

Je marque un temps d'arrêt et me tourne immédiatement vers lui. Le fait qu'il ne semble pas inquiet ne suffit pas à me rassurer complètement.

– Qu'est-ce que tu veux dire ? je demande en plissant les yeux.

Thomas esquisse une moue songeuse.

– Un champion redoutable disparaît de la circulation pile au moment où nous arrivons à Aquamielle... murmure-t-il avec un sourire sardonique. C'est plutôt pratique, non ?

Je crois comprendre où mon ami veut en venir.

– Tu penses qu'ils cherchent à endormir notre vigilance.

– J'en suis convaincu... acquiesce-t-il avec un hochement de tête. Tu as réussi l'exploit de vaincre Iona, et tu es même parvenue à échapper aux professionnels qui ont essayé de t'enlever. Nos charmants agresseurs ont déjà dû faire leur rapport à leur supérieur. Ils savent que nous sommes tous les deux sur le qui-vive.

Le raisonnement de Thomas se tient. Ceux qui cherchent à nous nuire pourraient très bien nous laisser croire que nous avons fait le plus dur, pour ensuite frapper au moment où nous nous y attendrons le moins.

À moins que je ne devienne paranoïaque à mon tour, et que tout ceci ne soit en réalité qu'un gros malentendu.

– Qu'est-ce qu'on fait, alors ? je demande en plongeant mon regard dans celui de mon ami.

Je dois bien admettre que je suis un peu perdue. Lorsque j'ai décidé de quitter la maison pour me lancer dans cette aventure, je ne m'attendais pas à me retrouver mêlée à un complot dont je ne connais ni les instigateurs, ni leurs motivations.

Mais je ne pensais pas non plus rencontrer ce garçon taciturne dont la seule présence suffit à me réconforter.

– On va faire ce qu'on sait faire de mieux... répond-il de sa voix grave en s'autorisant un sourire. Gagner des badges, et survivre.