Roland se leva, visiblement pas très reposé. Il se saisit le front. Seul dans son grand lit, il contempla le plafond et se décida à se lever.
Il alla d’abord aux toilettes se vider la vessie. « Quelle idée, la bière aussi… »
Sortant des toilettes, il se rendit au salon et vit la personne qui dormait dans le canapé. Il s’assit dans son fauteuil et caressa les cheveux du jeune homme qui se réveilla doucement.
Matt se frictionna les yeux. Sa Cheniselle, dans ses bras, se réveilla en même temps et s’ébroua en frissonnant, caressant son maître par la même occasion.
- Il est quelle heure ?
- Presque sept heures.
- … han meeerde… ma tête !
- On n’aurait pas dû faire une soirée jeux vidéo-bière ! sourit Roland.
- Mais c’était trop marrant !
- Certes. Allez, debout, je fais le café.
- Tu peux me l’apporter ?
- Ouais.
- Merci Roland, t’es un amour.
Roland sourit et alla jusqu’à la cuisine. Il regarda son téléphone qu’il avait laissé sur le plan de travail de la cuisine au cours de la soirée d’hier. Trop de messages.
De Rachel :
[On aurait dû en discuter.]
[Je sais qu’on n’habite pas ensemble et que je n’ai pas à décider pour toi, mais que tu décides arbitrairement de loger quelqu’un chez toi, ça me gêne…]
[Rien à voir avec le fait qu’il soit gay et que vous vous entendez bien, attention.]
[Et là encore quoi qu’il se passe, tant que tu m’en parles après, tout va bien.]
[Je t’aime, Roland, ça, ça ne change pas, hein ?]
[Bonne nuit, bisous…]
Roland inspira.
« Je sais pas quoi en conclure. Ca oscille entre le ‘Je ne te fais pas confiance’ et le ‘Oh et puis merde fais ce que tu veux’. Là où je suis d’accord c’est que je l’aime. »De Charlie :
[Roland, les affaires de Matt ne sont plus à l’appart…]
[Je suppose qu’il est chez toi…]
[Ça y est, j’ai trouvé le message sur le frigo… putain T_T]
[VOS messages… oh Arceus… T___T]
[Tu l’as aidé à déménager ?! Ça veut dire que tu me détestes aussi ?! é_è]
[Roland, dis à Matt que je l’aime et qu’on doit discuter…]
[J’espère que tu essaies de le convaincre de revenir…]
[Je SAIS que tu essaies de le convaincre de revenir, pardon. Je te fais confiance, on est amis, hein ? Je compte sur toi mon pote…]
Roland inspira et éteignit son téléphone.
« Là par contre ça pue le manque de confiance et ça me gonfle… »Finalement Matt s’était levé et avait rejoint Roland, en t-shirt et caleçon, dans la cuisine.
- Ça va ? demanda Roland.
Matt, hagard, regarda Roland en haussant les épaules. Roland hocha la tête.
- Tu restes autant que tu veux.
- J’voudrais pas déranger.
- Tu me déranges pas. En fait ça me permet de voir ce que ce sera si j’ai mon frère et ma sœur l’an prochain.
Matt sourit.
- Toujours à me trouver des excuses.
- Ecoute, ma copine croit que je vais la tromper avec toi… et ton mec compte sur moi pour vous rabibocher.
Matt plissa les yeux en s’appuyant sur la table de la cuisine.
- Merde, ça craint.
- C’est un peu ce que je me suis dit. Tiens, si tu veux lire les textos…
Matt regarda le téléphone de Roland qu’il venait de poser sur la table et détourna les yeux.
- Nan, j’ai pas envie… de voir ses supplications.
- J’aurais préféré ne pas les voir non plus… souffla Roland en versant deux tasses.
- Et j’te fais confiance, tu me raconterais pas de cracks, pas toi.
Roland sourit et servit sa tasse à Matt.
- Merci copain.
Roland sourit. Les deux compères prirent place sur les chaises hautes pour siroter leur café.
***
Pendant que Matt était à la salle de bains, on frappa à la porte. Roland s’étonna et regarda par le judas. Il haussa un sourcil et ouvrit à Rachel.
- … oui… ?!
- Salut… je me disais qu’on pourrait faire la route ensemble, on le fait jamais, ce serait sympa !
Roland plissa les yeux.
- J’attends Matt, il est sous la douche.
- Ah… il a dormi…
- Sur le canapé.
- Oui, oui bien sûr.
- Bien sûr… marmonna Roland.
- Je sais que je suis idiote, mais…
Roland hésita à réagir et se contenta d’un mouvement de tête succinct.
- … je… n’ai pas pu m’empêcher d’être un peu inquiète…
- Tu ne me fais pas confiance ?
- Ah si, si, si, je te fais confiance !
- Alors… c’est à Matt que tu ne fais pas confiance ?!
- Si, si, bien sûr que je lui fais confiance !
- Alors quoi ?
Rachel inspira et hésita.
- Disons qu’après ce qui s’est passé avec le doyen…
Roland ferma les yeux et eut un mouvement de recul pour fermer la porte.
- Non, Roland, attends, c’est pas ce que je voulais d…
Il lui ferma la porte au nez et baissa la tête. « Génial, elle va me le rappeler jusqu’à la fin des temps… »
Morphéo sortit de derrière le porte-manteau. Roland le regarda. Il était un peu étonné, regardant la porte puis Roland.
- Ouais… ça va être un test de colocation et de relation… même si honnêtement dans les deux cas, je me demande où ça va me mener…
Morphéo agita la tête, intrigué. Roland inspira et prépara sa valisette. Matt sortit de la salle de bains habillé.
- C’est bon, je suis prêt.
- Hm. On va y aller doucement.
- Quelqu’un a frappé ?
- Rachel.
Matt serra les dents. Roland inspira.
- Elle croit qu’on va se sauter dessus.
- Ah… euh… c’est… pas dans mes intentions… ?!
- Elle a des raisons de ne pas me faire confiance, rien à voir avec toi.
Matt plissa les yeux.
- Des raisons ?
- Tu le répètes pas ?
- Parole d’homme.
- J’ai embrassé le doyen après le combat contre le proviseur.
Matt grimaça.
- Le doyen… Truce ???
- Oui.
- Embrassé…
- Il a commencé, j’ai… entériné.
- Et du coup tu estimes qu’elle a des raisons de…
- Oui, c’est compréhensible.
- Bah non.
Roland plissa les yeux. Matt inspira.
- C’était après le combat avec le proviseur, donc c’était y’a un bail, donc c’est passé je suppose vu que vous êtes toujours ensemble ?
- Oui…
- Du coup si elle remet ça sur le tapis c’est elle qui a un problème on est bien d’accord ?
Roland haussa un sourcil.
- Je… suppose qu’elle est encore devant la porte…
- Punaise. On peut sortir par la fenêtre ?
- … du quatrième étage ?
- Et crotte. Bon, tentons une sortie…
Le duo ouvrit la porte et découvrit… Rachel et Charlie.
- Oh ! Bah quel hasard… souffla Charlie.
- On fait la route ensemble, Roland ? demanda Rachel.
Roland et Matt se regardèrent.
- C’est non pour moi.
- Pareil. Situation trop gênante.
Le duo dépassa les attentistes. Rachel et Charlie se regardèrent.
- Bon bah on va vous suivre de loin, hein ! souffla Charlie.
- Voilà, au pire on peut juste vous suivre… ajouta Rachel.
Roland lança un regard affligé à Matt qui ferma les yeux, un peu gonflé également. La troupe descendit les escaliers de l’immeuble et en sortit. Roland et Matt marchaient à bonne vitesse, côte à côte, semant presque Rachel et Charlie.
- Roland, Matt, ne faites pas les enfants ! grommela Charlie.
Roland et Matt se regardèrent, encore plus affligés que dans les escaliers. Ils décidèrent de courir. Charlie agita les mains mais dût s’arrêter et se rendre à l’évidence.
- J’ai merdé.
- Moi aussi, j’aurais jamais dû venir… et te convaincre de venir avec moi !
- Bah faut dire qu’on a un peu pensé à la même chose… même si j’en ai un peu honte…
- Moi aussi parce que je sais pertinemment que Roland ne ferait jamais ça ni à moi ni à toi…
- Et Matt…
Charlie sembla hésitant. Rachel plissa les yeux. Charlie secoua la tête.
- Non, Matt ne me ferait jamais ça !
- Et je suppose qu’il a une conscience, donc qu’il ne me ferait pas ça à moi non plus, la meuf de son pote !
- On est cons, quand même, nan ? geignit Charlie.
- On est amoureux, je préfère ! admit Rachel.
- Mouais. En attendant on va être en retard…
***
Arrivée à l’académie. Matt et Roland étaient essoufflés.
- Pas ça tous les jours ! souffla Roland.
- Tu… m’étonnes ! Pfff… geignit Matt.
Le duo alla jusqu’à la salle des profs et y entra ensemble. Les tables avaient repris leur disposition normale. Léopold avait pris le bout de table de Hadley et il semblait occupé comme un vrai petit chef, des lunettes sur le nez qui semblaient ne pas être neuves. Claire était à sa gauche. Malcolm à sa droite. Vincent était à côté de Malcolm, préparant son cours comme n’importe quel professeur. Megan, en bout de table opposé à Léopold, inspira en regardant les deux.
- Eh bien je vois que vous avez bien fêté l’after du séminaire ! admit Megan.
- Roland, Matt, bonjour ! sourit Léopold. Prenez place.
Roland et Matt se regardèrent. D’un réflexe commun, ils se mirent dans la continuité de Vincent. Malcolm les regarda, suspicieux. Roland le regarda.
- Un problème ?
- … pour le moment, nooon…
- Nous n’avons eu aucun rapport sexuel !
Vincent agita la tête.
- Vraaaaiment ravi de plus être prof principal…
- Je… c’était pas ce que j’allais dire…
- J’héberge Matt en attendant que Charlie se calme.
- D’accord. Tu t’en tiens à ça.
- Un, tu n’es plus principal intérimaire, Deux, tu n’es personne pour me dire comment mener ma vie, Trois, ce que tu insinues est insultant, dégradant et homophobe. Donc garde ce que tu as à dire pour toi, merci.
- … ok, je vous laisse régler ça, toi et Rachel… et Matt…
- C’est ça, enfonce-toi… soupira Roland.
Rachel et Charlie arrivèrent quelques minutes plus tard.
- Excusez-nous…
- Les taxis de cette ville… souffla Charlie.
Malcolm regarda sa sœur, scandalisé. Vincent les regarda et regarda Malcolm.
- Oh non mais là vous devenez ridicule, Heine !
- Quoi ? s’étonna Rachel.
- Il vient de nous soupçonner d’avoir une aventure et je pense qu’il fait pareil avec vous deux… marmonna Roland.
- Oh ! Oh alors ça, Malcolm, c’est vilain ! grommela Rachel.
- J’arrive plus à suivre… marmonna Megan.
Claire inspira, détachée. Léopold souffla.
- Bon, tout le monde est là…
Léopold tapota sur son téléphone.
- Je fais l’appel, vous êtes tous présents, très bien. Alors, notre équipe pédagogique traverse ce que j’appellerais une légère crise… Winchester…
Charlie regarda Léopold, choqué.
- Pardon ?!
- Vous avez fait preuve d’un comportement inadmissible hier au séminaire. Doppler et Perry, vous vous êtes enfuies tout comme Smirnoff et Clancy. Résultat, nous n’avons pas pu participer en tant qu’équipe aux festivités de l’après-midi. J’ai réussi à expliquer la situation au Proviseur et au Doyen…
Malcolm et Vincent regardèrent Léopold, effarés.
- QUOI ???
- Mais on va se faire allumer !! cria Hadley.
- Teu-teu-teu ! C’est moi le Principal !
« Il est pas très crédible quand il est hyper sérieux… » songea Roland.
« On n’y croit pas du tout c’est lamentable… » songea Rachel.
« J’ai l’impression de le revoir jouant un rôle pour draguer des minettes à la fac… » soupira intérieurement Charlie.
« Ça lui va même pas les lunettes, il est irrécupérable » soupira Matt.
- Donc j’ai évoqué la situation avec eux. Le Doyen a proposé son aide.
Roland grimaça. Rachel pencha la tête sur le côté. Matt plissa les yeux. Charlie secoua la tête.
- Et voilà, je m’en doutais, c’est ton premier jour et tu fais déjà n’importe quoi…
Justin entra dans la salle des professeurs de l’équipe pédagogique 2.
- Bonjour à tous…
Regards en coin. Seul Léopold salua poliment.
- Monsieur Truce a fait appel à un prestataire détaché de l’académie, une amie à lui qui officie en tant que thérapeute de groupe…
- Venez…
Une petite dame à lunettes avec un chignon entra. Habillée très sagement, petite robe bleue marine à pois, lorgnons dorés, regard tout mignon de petite dame toute mignonne.
- Equipe pédagogique 2, voici Teresa Torres.
- Bonjour-bonjour !
- Elle va vous aider à régler vos problèmes privés qui empiètent sur votre vie personnelle.
- Car telle est ma spécialité ! Je vous verrais donc aux interclasses, un par un pour des entretiens privés. On commencera par vous, monsieur Winchester.
Charlie se désigna.
- Moi ?! Alors si je dois y passer, Léopold aussi !
- On y passera tous, Winchester ! somma Léopold avec un doigt tendu.
- C’est un travail collectif de fond, il faut régler cette crise rapidement sinon cela va empiéter sur votre travail et sur les résultats de l’établissement !
- Qu’est-ce que ça peut bien me faire… souffla Charlie.
- Oh allons, vous êtes un jeune homme investi, vous ne pensez pas ce que vous dites, vous êtes comme tout le monde, vous avez une limite qui vous empêche d’aller trop loin, de franchir la ligne rouge. Vous savez que cette situation doit trouver une issue !
Charlie plissa les yeux et se releva. Il regarda Léopold.
- Et donc c’est ta solution pour… tout ça ?
- En fait j’ai eu l’idée par Claire qui m’a envoyé des messages pour excuser son absence de l’après-midi en disant qu’elle ne se sentait pas bien et qu’elle avait besoin de faire un point. En essayant de la convaincre de ne pas sécher l’après-midi, je me suis dit qu’on aurait tous besoin d’une bonne thérapie pour remettre les choses à plat afin que je commence sur de bonnes bases !
Charlie grimaça et regarda Teresa qui le regarda avec un petit sourire adorable.
- Moi ça me va.
Tout le monde regarda Matt qui hocha la tête.
- J’trouve ça bien, j’accepte.
- Merci, Clancy, j’apprécie votre collaboration.
- Ouais, ça peut pas faire de mal. Bien géré, Léo.
- Merci Smirnoff.
Le doyen inspira.
- Je vous laisse donc avec madame Torres, j’ai… à faire…
- Attendez, Truce…
Justin se tourna vers Léopold, évitant soigneusement de croiser les regards de Rachel et de Roland.
- J’aurais besoin de vous voir concernant la réunion parents-professeurs !
- … c’est dans quelques mois, vous avez le temps de voir venir !
- Oui eh bien non, je veux préparer ça avec attention, je pense que c’est une nécessité, chaque année c’est un bordel monstre.
- Euh… c’est une simple réunion où les parents viennent rencontrer les professeurs sur rendez-vous…
- Et je pense que ça gagnerait à avoir plus de gâteaux apéritifs et de jus d’orange ! admit Léopold.
Malcolm regarda Vincent.
- Non, vraiment, super votre choix.
- J’ai plus à faire semblant d’apprécier vos piques cyniques, Heine, je suis simple prof.
- Monsieur Winchester vous venez avec moi, on va discuter dans le bureau général ? suggéra Teresa.
Le brun regarda le blond qui inspira.
- Je propose une solution pour garder de bonnes relations de travail, donne une chance à madame Torres !
Charlie inspira et se leva. Il regarda Matt.
- On pourra discuter après ?
Matt inspira.
- Va d’abord discuter avec la dame. Hein ? De tes problèmes de comportement, là.
Charlie baissa la tête, vaincu, et suivit Teresa. La petite dame mena Charlie au bureau général dont elle avait la clé. C’était une petite pièce pour ce genre d’entretiens impromptus.
- Asseyez-vous.
Charlie s’assit dans le fauteuil. Teresa prit la chaise rembourrée en face.
- Bien. Monsieur Winchester, est-ce que vous pouvez raconter l’incident qui nous amène à nous entretenir ?
Charlie poussa un long soupir et se passa une main sur le visage.
- Vincent Hadley, notre ancien professeur principal, a été démis de son poste. J’attendais depuis bien quatre ans que le poste se libère afin de… grimper un échelon qui m’aurait permis de passer en faculté avec une certaine réputation et de toucher au but final de ma carrière et… le poste est allé à mon ex petit-ami, Léopold Finsbury et… disons que je me suis mis en colère…
- Un peu rudement.
Charlie regarda la femme un peu ronde à lunettes.
- Vous savez, pourquoi vous me demandez ?
- Je veux votre vision des choses.
- Bah… je trouve ça injuste, je n’ai jamais fait le secret de mon intention de prendre le poste au cas où il se libèrerait… et au final… quand j’ai enfin une occasion… ça va à un mec qui n’a jamais eu d’autre ambition que de faire son boulot, qui n’a jamais rien voulu de plus et… c’est tellement injuste !
Teresa hocha la tête.
- J’ai lu vos dossiers… Léopold Finsbury est votre ex-petit ami.
- Oui.
- Qui dit sentiment d’injustice dit…
- Jalousie, je sais…
- Non… Frustration. Cette déception vous fait ressentir un manque qui vous frustre. Cette réussite de Léopold ça aurait pu être la vôtre si vous étiez toujours avec lui. Vous vous sentez exclu de cette joie puisque vous êtes exclu de la vie de Léopold et vous manquez de confiance en votre vie actuelle, donc vous ne vous sentez pas de taille à rivaliser.
Charlie plissa les yeux.
- Rivaliser… avec Léo ?!
- Quand il a eu cette promotion, il est passé d’élément tolérable à concurrent sérieux. C’est un changement radical, et votre vie était basée sur la stabilité à tout prix malgré les problèmes autour que vous avez choisi d’ignorer ou de passer sous silence…
Charlie grimaça.
- Mais… je n’ai pas de problèmes dans ma vie, je… euh…
- Vous êtes encore dans le déni. On ne vitupère pas sur son entourage sans qu’il n’y ait du refoulement derrière. Exprimez-vous, communiquez.
Charlie inspira.
- Je veux pas passer pour un faible…
- Et cette apparence de fort que vous voulez vous donner est en train d’affecter vos relations sociales et votre vie amoureuse. Baissez votre garde, ouvrez votre cœur.
Charlie hocha vivement la tête, comprenant ce que Teresa lui disait.
***
Matt inspira en ouvrant sa salle tout en recevant le SMS de Roland.
[Va pour manger en tête à tête ce midi]
Matt hocha la tête, un peu peiné. « Ça m’embête de l’entrainer dans mes problèmes… »
Il tourna la tête vers la salle de Rachel. La prof de combat direct l’observait du coin de l’œil et détourna la tête quand elle vit qu’il l’avait capté. « Euh… ok… ?! »
Rachel leva les yeux au ciel. « Quelle idiote tu fais !! C’est ridicule d’être soupçonneuse, ils ne font rien de mal, Roland héberge juste un ami le temps que ses problèmes de couple se calment… mais après ce qui s’est passé… »
- Ra… chel ?
- AAAH !
Rachel se tourna vers Matt qui avait laissé ses élèves entrer dans la salle. Rachel fit de même avec les siens, laissant la porte ouverte.
- Matt. Quelle bonne surprise !
- Euh, pas vraiment, je suis juste en face et j’ai vu que tu m’as vu…
- … j’étais sarcastique, gros béta !
Matt inspira. Rachel souffla.
- Matt, ce n’est pas contre toi…
- Je sais, Roland m’a expliqué pour le doyen…
Rachel blêmit. Matt agita la tête.
- Roland c’est le mec le plus intelligent que je connaisse. Les seuls moments où il a l’air d’un parfait abruti, c’est quand il parle de toi et de votre futur ensemble. Je pense qu’il est assez malin pour savoir qu’il a déconné et qu’il a pas besoin que tu le fliques.
Rachel cligna bruyamment des paupières.
- Pardon ?!
- Je suis en train de dire que tu es une petite veinarde et que tu vas tout gâcher si tu continues d’avoir peur de sa bisexualité.
Rachel serra les dents. Matt haussa les épaules.
- Maintenant, si il doit se passer quelque chose, je dirais pas non.
- QUOI ?
- Rien. A toute !
Matt rentra dans sa salle en sifflotant. « Et voilà, elle va repartir comme en quarante ! »
Rachel secoua la tête. « Mais quel petit couillon celui-là ! »
***
Charlie approcha de Léopold qui allait ouvrir sa salle. Le blond regarda son collègue britannique.
- Euh… je te dois des excuses, je crois…
Le blond fit signe à ses élèves d’attendre et prit Charlie à part.
- Je t’écoute.
- J’ai… euh, j’ai été… odieux… tu… tu mérites cette promotion, je… j’ai pété un plomb, clairement et je te demande de m’excuser pour mon comportement.
Léopold hocha la tête.
- D’accord.
- Et concernant mes sentiments… euh…
- Tu veux vraiment qu’on en parle ?
Charlie inspira.
- Je devrais parler à Matt avant, peut-être…
- Oui.
- En tout cas, sache que… ouais, peut-être bien que j’ai encore un faible pour toi.
Léopold hocha la tête.
- Je comprends.
- Mais ça ne veut pas dire que je veux tenter quoi que ce soit…
- C’est un peu mort, je suis pris et toi aussi ! sourit le blond.
- Ok… Et toi, ça va ?
Léo pencha la tête.
- Hm ?
- Ce que tu as dit au tournoi, à propos de… Robbie qui n’était pas désiré…
- Oh, t’en fais pas, c’est réglé… et puis le fait que je ne l’ai pas désiré à la base ne veut pas dire que je ne l’aime pas maintenant… ou que je n’aime pas Annette.
- J… je voudrais pas que tu sois malheureux, c’est pas ce que je te souhaite…
- Je sais bien, mon Charlie…
Léopold tapotait l’épaule de Charlie avant de réaliser ce qu’il était en train de faire et de retirer sa main.
- C’était purement amical ! assura Léopold.
- Oui je sais… marmonna Charlie.
- A votre poste, Winchester, votre professeur principal vous l’ordonne ! grommela faussement Léopold en s’en retournant vers sa salle.
Charlie eut un léger sourire avant de repartir vers sa propre salle. Léopold semblait moins enthousiaste.
***
Interclasse de dix heures. Léopold était parti avec Teresa pour montrer l’exemple au reste du groupe qui était resté en salle de réunion de l’équipe.
- J’ai fait la paix avec Léo, on a mis les choses à plat, donc tu peux revenir.
- Non.
- Mais pourquoi, enfin !
Megan, Claire, Roland, Rachel, Malcolm et Vincent observaient Matt et Charlie tenter de régler leurs problèmes.
- Parce que le problème n’est pas à propos de Léopold, il est à propos de toi et de ton attitude envers moi !
- Comment ç… mais enfin de quoi tu parles ?!
- Je ne suis pas ton larbin ou ton laquais, ou ton sous-fifre, je suis ton petit ami, on vit ensemble, on partage tout, et…
- Mais tu n’es absolument pas mon sous-fifre ou quoi, enfin, tu te fais des idées je ne pense pas ça de toi !
- Mais c’est comme ça que tu me traites ! Tu voulais absolument que je sois de ton côté à ce stupide séminaire alors que je m’en fichais, moi, que Léo soit notre principal ! Quand tu t’es mis en rogne, je ne me suis pas dit : « Wow, super, il défend son bifteck », je me suis dit…
Matt hésita. Charlie grimaça. Rachel, Claire et Megan attendaient la suite. Malcolm s’en foutait royalement et écrivait ses mails. Vincent était également sur son téléphone. Roland tapota le dos de Matt.
- Vas-y, exprime-toi.
- … Bah je me suis dit que t’étais une tête de con de t’énerver comme ça !
- Une QUOI ???
- Une tête de con ! Ouais ! T’es un vrai Bourrinos dans ces cas-là, tu m’horripiles, t’es plus raisonnable du tout, tu te rends même pas compte à quel point j’ai eu HONTE quand tu es allé voir les membres de l’administration un par un pour leur crier dessus !
- Mais j’avais le droit d’être en colère quand même !
- Mais pas comme ça ! Et je commence même pas sur le fait que tu aies encore des sentiments pour ton ex, alors ça…
- Nan, ça, ça n’a rien à faire ici, Matt…
- Oh que si.
- Vincent !
- M’en fous, allez-y, déballez tout Clancy, on veut tout savoir… soupira Vincent en envoyant un SMS.
- Quoi mais non… marmonna Megan.
- Pardon ?! s’étonna Roland.
- Euuuh… geignit Claire.
- Non, non, non… souffla Rachel.
Malcolm lança un regard appuyé à Vincent. Matt explosa.
- Déjà, j’en étais sûr. Je m’en doutais. Au début de notre relation, une fois un peu bourré ou un peu stone, ça t’arrivait de chialer en disant « Ouiiin, mon Léo chéri d’amour… »
- Matt !!
- … j’ai laissé passer parce que je savais que ça faisait longtemps, que vous aviez toute une histoire, que c’était pas pareil que ce qu’il y avait eu entre toi et moi…
- Matt, st...
- … mais je pensais au moins que ça t’était un peu passé, et du coup toute ta crise d’hier, c’était juste de la jalousie parce que ton ex, que tu aimes toujours, avait un poste que tu convoitais ! En gros, tu…
Matt agita les mains, énervé aux larmes.
- … tu as fait comme si ton « mari » avait une meilleure situation que la tienne, alors que… que putain, c’est moi ton mec ! Je sais que j’ai jamais été très possessif, mais putain…
Matt, furieux, agita les bras une fois de plus et se leva, énervé.
- Je vais à ma salle !
Roland inspira et suivit Matt. Charlie écrasa sa tête entre ses mains. Vincent regarda tout le monde.
- J’étais ironique, moi !
Megan inspira.
- Bon, bah c’est Léopold qui va passer le meilleur interclasse, du coup…
***
Teresa en restait bouche bée. Léopold s’était… effondré.
- Je voulais pas… je voulais pas qu’il s’énerve, quand j’ai entendu mon nom j’étais content et ensuite j’ai vu qu’il était fâché et ça m’a fait de la peine… et j’ai vu que ça lui faisait de la peine aussi, et je ne pouvais rien faire !
Teresa semblait presque gênée. Léopold était une serpillère humaine.
- Et je n’en voulais même pas de ce poste ! Et Charlie qui se met dans un état pareil alors qu’on a tout ce passif derrière… et… et qu’il s’énerve comme ça, et que… et…
- Calmez-vous…
- Je me sens tellement nuuul !
Teresa observa Léopold chagriner sur la table du bureau général. Elle inspira. « Justin n’exagérait pas en disant qu’il y avait des problèmes dans cette équipe… »
- Il… il vient de s’excuser et… et j’ai dû maintenir cette façade du professeur principal sérieux et prêt à accepter les excuses de son subordonné, mais… j’avais envie de lui pleurer dessus, de lui dire à quel point j’étais désolé, qu’il pouvait le prendre s’il le voulait, son poste à la con !
Teresa inspira.
- Et vous ne lui avez pas dit parce que…
- Parce que je pense aussi à ma femme et à mon fils ! Cette position, c’est du salaire en plus, c’est des opportunités pour le futur, j’ai pas le choix je dois penser à eux…
Léopold semblait presque se calmer.
- Mais… mais de voir à quel point ça aliène les gens que j’aime, je… mmm…
- Non, non, pitié, ne…
- Je veux faire de mal à personne ! Personne, bon sang !!! Uuuh…
Léopold se remit à pleurer de plus belle. Teresa inspira lourdement.
***
Repas de midi. Roland et Matt mangeaient à part, séparés par Megan et Claire du reste de la tablée. Rachel mangeait face à son frère. Charlie mangeait avec Léopold et Vincent.
- Je vous dois évidemment des excuses à vous aussi… je n’aurais pas dû vous parler comme ça...
- On s’en fiche de moi.
Léopold leva un œil rougi et fatigué vers Vincent. Charlie s’étonna. Vincent prenait une grosse bouchée de son hamburger.
- Réglez vos problèmes de couple. Si Clancy continue de rester énervé comme ça, ça pourrait poser des problèmes.
- Matt ne va pas mettre son travail en péril…
- Lui, non. Ses sautes d’humeur, oui. Il vous a bien allumé tout à l’heure en salle des profs.
Charlie souffla. Vincent inspira.
- Je suis absolument pas le mieux placé pour donner des conseils sentimentaux, vous étiez là l’an passé, vous avez vu la tambouille avec Meredith…
- Oui bah oui…
- Mais je pense que vous devriez profiter de la présence d’une thérapeute. Si vous voyez ce que je veux dire.
Charlie hocha la tête, convaincu.
Matt avait imprimé des notes stratégiques confiées par Megan. Il observait et semblait confus.
- Un souci ?
Matt releva la tête vers Roland.
- Je comprends ce qui est écrit…
- C’est pas ça, tu sembles dubitatif. Genre à te demander si ça vaut le coup.
Matt sourit. « Comment tu fais pour me comprendre mieux que mon propre mec ? »
- Ouais… en fait je me demande surtout si ma Cheniselle le souhaite. Tu vois ce que je veux dire.
Roland agita la tête.
- Techniquement, tout Pokémon est en demande d’apprentissage. Ce qui diffère c’est la manière de s’y prendre et le conditionnement. Attention, je ne parle pas de manipulation, mais d’éducation et d’influence de l’environnement. Tu élèves plus ou moins ta Cheniselle et tu as une confiance absolue en ses capacités propres. A l’état de nature, Cheniselle ne se déplace qu’en cas d’extrême danger. Si j’en crois ce que je déchiffre sur les revues que t’a donné Megan, tu dois masser Cheniselle et lui faire des exercices avec la nourriture, l’obliger à se déplacer pour l’obtenir, et ensuite à l’entraîner en la récompensant avec de la nourriture si elle se déplace et enfin livrer des combats où elle aura d’elle-même le réflexe de se déplacer…
Matt plissa les yeux.
- Mais j’ai toujours fait le strict minimum avec elle, alors lui imposer ça tout d’un coup…
- Je conçois, mais pense à une situation où le combat sera la seule option, et où il deviendra nécessaire que Cheniselle esquive des attaques…
Matt grimaça. Roland sourit.
- Pour reprendre les mots de mon père, « Dresser et aimer sont les faces d’une même pièce ». Elle t’aimera, que tu exploites ses capacités ou non. Tout est bien en elle, c’est à toi de décider si tu veux ouvrir cette porte ou non.
Matt hocha la tête en regardant Roland qui lui souriait avec douceur. « Je comprends mieux le doyen… c’est dur de lui résister… »
Claire semblait toujours un peu éteinte. Megan la couvait du regard, inquiète. Rachel faisait bonne figure. Malcolm la regarda.
- Un souci ?
- Je ne pense pas que ce soit bon que j’en parle avec toi.
- Je suis ton frère.
- Précisément.
Rachel inspira.
- Je ne sais pas comment réagir à ce qui se passe avec Roland et Matt.
- Hmm… J’ai toujours détesté ton mec parce qu’il se la joue Grand Justicier Libérateur de la veuve et de l’orphelin, pour moi il ne fait rien d’anormal. Si tant est qu’il ne flirte pas avec lui.
- Ils ne flirtent pas !
- J’espère, sinon je lui casse la gueule.
Rachel regarda son frère qui haussa les épaules.
- Si ça s’avère !
- … mais même si ça s’avère, je te défends de toucher à Roland, frangin, sinon t’auras affaire à moi !
Malcolm désigna sa sœur des deux mains.
- Tu vois, tout va bien, tu es toujours aussi amoureuse de lui, réagis comme tu l’as toujours fait, je suppose que ce genre de situation arrive régulièrement.
Rachel balbutia presque.
- Euh… oui, oui…
- Eh bien réagis comme tu l’as toujours fait. Rien n’a changé, ton mec fait toujours la charité chrétienne au premier venu.
Rachel hocha la tête.
- Wow, merci frangin…
- J’essaie de m’améliorer et de réfléchir avant de parler, faut croire que ça me réussit.
Rachel sourit. Malcolm lui sourit en retour.
***
Roland accompagna Matt jusqu’au petit bureau de Teresa.
- Ça va aller, la dame va juste te poser des questions sur toi et tu devras juste y répondre.
- Ouais…
- Ça va ? T’as l’air en stress…
- Non, non, tout va bien. Pas l’habitude de me faire… analyser…
- Ça peut que te faire du bien, je pense…
Matt hocha la tête en la gardant basse.
- J’y vais, à toute.
- Ouais.
Matt regarda Roland partir. Il était censé attendre Teresa devant le bureau, mais il choisit de se rendre à sa salle une fois Roland hors de sa vue et de s’y enfermer. Une fois dedans, il souffla puissamment, comme soulagé d’un poids, et alla se poser à son bureau comme si de rien n’était, pour ne rouvrir qu’à l’heure de reprise des cours.
***
- Clancy…
Matt ne regarda même pas Léopold.
- Euh, on m’a rapporté que vous n’étiez pas allé voir Teresa ce midi…
Megan, Charlie et Roland regardèrent Matt qui se ferma complètement et ne répondit même pas à Léopold.
- Euh… je peux comprendre que tu contestes mon autorité de professeur principal – toi plus que tous les autres – mais j’ai mis ça en place pour aider, pas pour sanctionner…
- Je sais. Je ne conteste pas ton autorité.
- Alors quoi ?
Roland pencha la tête, intrigué. Charlie grimaça.
- M’enfin, Matt, on y est passés moi et Léo, et c’est en ce moment le tour de Claire, tu peux pas te défiler comme ça !
- Ok.
Léopold haussa un sourcil. Charlie plissa les yeux.
- Comment ça, ok ?!
- Ok, quoi, c’est enregistré, je note.
Matt regarda Léopold en inspirant lourdement. Roland semblait intrigué voire déçu. Rachel ne comprenait pas. Malcolm regarda Léopold.
- Tu prévois des sanctions ?
- … quoi ? Nan !
- Il s’est défilé d’un programme que tu avais mis en place !
- Oui mais non, je suis sûr qu’il avait ses raisons !
Matt agita la tête.
- C’est avec toi que j’aurais dû sortir, Finsbury, t’es mieux luné que ton ex finalement.
Léopold rougit. Charlie regarda Matt, ulcéré. Rachel, Roland, Vincent et Malcolm se regardèrent, interloqués. Megan inspira en secouant la tête.
- C’est encore la personne absente qui passe une super interclasse…
***
- Je supporte pas les conflits.
Teresa acquiesça.
- Quand je les ai vus se disputer, ça a… réveillé de vieux souvenirs désagréables en moi… Disons que ma jeunesse est remplie de conflits idiots où je n’avais rien à voir mais… j’y étais mêlée bon gré mal gré.
- Expliquez-moi…
Claire souffla.
- J’ai un… frère. Un demi-frère. C’est le fils illégitime de mon père et… ça a un peu brisé ma famille. Disons que ma mère n’a jamais apprécié le fait que mon père veuille le reconnaître.
- Ils n’ont pas divorcé ?
Claire soupira.
- C’est ce genre de couple taiseux qui ne veut pas faire de scandale…
- Oh, je vois.
- Genre mariés très jeunes, maman qui sert papa comme sa bonniche, papa qui est le seul de la famille à travailler… la situation est statique, quoi qu’il se passe, elle fera avec et il ne fera rien pour changer quoi que ce soit. Sauf que ma mère a harcelé la femme en question qui… s’est suicidée et on s’est retrouvés avec Max sur les bras vu que mon père avait reconnu le petit.
Teresa hocha la tête, intéressée.
- Effectivement, vous n’avez pas dû grandir dans un environnement facile…
- Et j’ai nourri un certain ressentiment envers lui…
- Ce n’est pas sa faute, c’est votre père le fautif…
- Oui mais… j’étais une gamine, il symbolisait tout ça et… à la moindre occasion, je le repoussais alors que lui m’a toujours vu comme sa chère grande sœur…
- Vous repoussiez la source du conflit mais vous ne cherchiez pas à le résoudre.
- J’étais enfant, je pouvais faire quoi ?
- Certes. Et à présent, vous et votre frère…
Claire inspira.
- On est toujours en contact mais on ne s’appelle que quand on a besoin l’un de l’autre. Il est un peu chochotte sur les bords, il ne réalise pas à quel point tout ça m’a fait du mal et son côté « J’étais le cœur du problème mais je ne l’ai jamais vraiment réalisé »… ça a fini par m’horripiler, j’ai quitté la maison dès que possible.
Teresa acquiesça.
- Revenons à la situation actuelle. Votre environnement professionnel semble très important pour vous…
Claire souffla.
- Léo est mon meilleur ami, je m’entends bien avec Charlie et Matt aussi… J’ai commencé à sympathiser avec Malcolm alors qu’il me sortait par les yeux l’an passé… Roland est adorable, Rachel et Megan sont des amies… Vincent…
Claire inspira.
- Vincent a toujours été comme une sorte de père pour moi… c’est idiot, il n’a que sept ans de plus que moi, mais il m’a toujours couvée de loin, je me sens très redevable. Il reste distant parce que c’est le professeur principal, et…
- Plus maintenant.
Claire hocha la tête. Teresa hocha la sienne également.
- Et c’est ça qui vous embête plus que le conflit en lui-même, le changement drastique sur votre environnement. Vous aviez trouvé un confort après toute votre jeunesse conflictuelle et ça vous embêtait que les choses changent...
Claire ne put qu’acquiescer.
- Vous devez prendre sur vous, c’est le seul moyen. Attendre de vous réadapter. Vous auriez besoin d’une thérapie plus poussée mais je crains que ma mission ici soit temporaire, et je ne suis que psychologue scolaire…
- C’est déjà bien de pouvoir parler ! assura Claire.
- A défaut, vous pourriez déjà essayer de prendre contact avec votre frère, de le voir plus régulièrement pour tourner cette page, parce que les changements dans l’environnement professionnels sont récurrents, vous vous exposez à un sacré ascenseur émotionnel en restant dans votre état actuel.
Claire hocha la tête en soupirant.
- C’est plus facile à dire qu’à faire.
- C’est quelque chose que vous devrez faire pour avancer. Vous êtes en couple ?
Claire fit une moue clairement négative. Teresa serra les dents.
- C’est un problème ?
- Disons que… vu la catastrophe qu’était ma famille, j’aimerais bien moi de mon côté avoir une famille. Histoire de ne pas faire les mêmes erreurs, de boucler la boucle.
- Oui je comprends…
***
Claire sortit du bureau, soulagée. « Ça fait du bien de déballer tout ça… »
- Hey…
Claire releva la tête vers Megan.
- Hey, Meg…
- Tout s’est bien passé ?
- Oui oui… Les garçons se sont encore disputés ?
- Matt a dit à Léopold qu’il aurait dû sortir avec lui plutôt qu’avec Charlie… souffla Megan.
- Oh pfff ! ricana Claire.
- Ouais, ça devient n’importe quoi… Ça va mieux ?
- Oui merci. Je vais me ressaisir, prendre sur moi… Merci encore pour hier.
- C’est rien, c’est normal, voyons.
- Tu comptes aller la voir aussi ? demanda Claire.
Megan sembla gênée. Claire poursuivit.
- En théorie tu devrais vu que tu es partie aussi… Et puis peut-être que ça te ferait du bien, vu ton souci avec ta coloc…
- Oui mais non, ça, ça me regarde…
- Et puis aussi tes sentiments pour moi.
Megan se figea. Claire inspira.
- Tu n’avanceras pas si tu continues à faire une fixette. Tu t’es calmée par rapport à l’année dernière, mais entre la fois où tu t’es précipitée pour m’aider à déplacer les bureaux et hier où tu m’as suivie jusqu’au parking…
Megan serra les dents.
- Je… C’était pas ça, on est amies, Claire, je pouvais pas te laisser…
- Oui mais tu n’as pas à te mettre dans des situations aussi dangereuses juste pour… essayer de m’impressionner. Je sais déjà que tu es quelqu’un de bien, pas la peine de… faire comme si j’étais ta femme !
Megan inspira.
- Euh… j’ai cours, je… suis en retard.
Megan dépassa sa collègue qui inspira. « Indécrottable, la pauvre… »
***
Le soir venu, Roland et Matt allaient partir ensemble.
- Matt, attends…
Roland et Matt se tournèrent vers Charlie, seul.
- Matt, s’il te plait, on se fait un resto et on en discute tranquillement…
- Non.
- Je n’ai plus de sentiments pour Léo, c’est fini tout ça, je veux que tu reviennes, je t’aime…
- Mais je sais tout ça.
- A… Alors quoi ?! Qu’est-ce que je peux faire pour que tu reviennes ?!
- Je sais pas, devine !
Matt partit devant. Roland regarda Charlie en serrant les dents.
- Désolé…
- … j’espère au moins que tu essaies de le convaincre de revenir…
- Je… n’ai pas à le faire, je me contente de l’héberger et au cas où tu n’aurais pas capté, je viens de te donner un indice. Excuse-moi. Tiens, un autre indice.
Charlie grimaça, ne comprenant pas ce que Roland voulait dire. Le fils Smirnoff rejoignit le fils Clancy.
- C’est incroyable ce que les mecs peuvent avoir du mal à comprendre que tout ce qu’on attend, c’est des excuses !! Mais il est tellement près de ses couilles qu’il est physiquement incapable de s’excuser !!
- Hm…
- Bon, ce soir, pizza ?
- Matt, pourquoi t’es pas allé voir la thérapeute ?
- Hein ?! Mais quoi, j’avais pas envie…
- Ça ne coûtait rien…
- J’ai pas à me faire analyser, je suis pas fou.
Roland plissa les yeux.
- Personne ne dit ça, c’est juste que ça aurait pu te causer des ennuis, ou causer des ennuis à Léopold, ou…
- Au doyen ?
Roland serra les dents.
- T’en pinces pour lui, hein ?
- Je… non ! Je suis amoureux de Rachel.
- Mais t’aurais bien niqué le doyen.
- Arrête. Je disais pas ça pour t’embêter, je me posais simplement la question.
- On va prendre un verre ?
- On est en semaine, Matt.
- Et alors ? Ce serait cool, nan. C’est quand la dernière fois que t’es allé t’éclater ?
Roland inspira.
- C’est une très mauvaise idée.
- Raison de plus.
Roland prit son téléphone qui avait vibré. Texto de Rachel.
[Bonne soirée. Je t’aime.]
Roland grimaça. « Elle sait taper où ça fait mal… »
- Alors ?
Roland agita la tête.
- Pas longtemps.
- Ouaiiiiiiis ! J’connais un super bar !
Matt partit devant. Roland serra les dents.
***
Le Drôle d’Embringue était un café tranquille, posé, relax où tout type de public aimait à s’arrêter. Il y avait des banquettes rembourrées, des coussins, plein de petites tables pour deux personnes, et quelques couples s’étaient arrêtés. Roland était surpris.
- Je m’attendais à une boîte ou à un club…
- Tu m’as pris pour un dépravé ou quoi ? sourit Matt, malicieux.
Il accueillit son demi-pêche avec joie et Roland son thé aux épices.
- Merci…
- Merci. Je me disais que ce serait bien de se poser après le boulot. Alors, reprenons avec le doyen.
- Non, je veux pas parler de lui… soupira Roland.
- Moi si, ça évitera qu’on parle de moi.
Roland inspira.
- Disons qu’avec Rachel on a toujours été très libérés quant à nos attirances respectives, on a toujours refusé de devenir ce couple hétéro plan-plan classique, et la situation de secret vis-à-vis de nos familles a contribué à ce qu’on soit très atypiques et très ouverts l’un à l’autre concernant nos désirs. Quand elle trouve un mec mignon, elle me le dit, quand je trouve un mec ou une nana mignonne, je lui dis, on…
Matt écoutait, fasciné.
- Quelques fois en soirée, ça a pu arriver qu’on… flirte, en tant que couple, avec d’autres gens.
- Ouah ! s’illumina le brun.
- Mais jamais très sérieusement… Sauf une fois, ou ça a un peu dérapé avec un de nos amis communs… mais…
- Raconte !!
- Nan !
- Allez ! J’ai besoin de détails croustillants !
- Non, j’insiste ! Bref, pour ce qui est du doyen… eh bah… je… ne m’attendais pas à ce que l’environnement professionnel ici soit si oppressant et…
Roland souffla.
- Disons que… Rachel s’est un peu fondue à cet environnement et que j’ai fini par la prendre non plus comme une source de réconfort mais plutôt comme une part du problème.
Matt hocha la tête.
- Alors que le doyen faisait plus « distraction extérieure ». Et de ne pas lui dire explicitement que j’étais attiré par lui, c’était…
Roland baissa la tête, honteux.
- … c’était excitant.
- … d’accord. T’as pas à avoir honte, Roland, c’est normal de s’égarer un peu parfois. Ne serait-ce qu’en pensée, et les actes, bah, comme tu dis, avec Rachel vous avez toujours eu certaines habitudes, t’as agi selon ton instinct, après elle a mal réagi parce que le doyen est un mec et que tu es un mec et que c’est une nana.
Roland haussa un sourcil. Matt se releva.
- Les nanas qui sortent avec des mecs bisexuels ont souvent ce truc d’avoir plus peur des mecs autour que des nanas, parce qu’elles ressentent les autres femmes comme une compétition normale et les hommes comme un truc contre lequel elles ne peuvent pas lutter parce que c’est carrément un autre monde. Tu comprends ça ?
- Oui bah oui.
- Du coup, pour elle, même moi, qui suis juste ton pote, je suis une menace.
- Hm…
- Mais ce serait pareil avec Charlie, avec Léo… bon pas avec Vincent, bien sûr…
- T’es méchant ! sourit Roland.
- Non, réaliste. Et je suis aussi réaliste quand je dis que ça crève les yeux que tu aimes Rachel comme un fou, alors dis-lui juste la vérité de ton cœur et tout s’arrangera.
Roland hocha la tête et inspira.
- Tu as fait combien d’années de psycho ?
- Juste des cours quand j’étais en fac de droit, je voulais m’orienter vers le pénal et y’avait des cours de psychologie criminelle vachement intéressants.
Roland hocha la tête.
- Ca explique beaucoup de choses. Ton attitude détachée…
- J’suis devenu prof pour être auprès de Charlie.
- Ton habileté pour t’introduire dans tes académies fermées la nuit pour photocopier et coller des milliers d’affiches…
- Ah non, ça, c’est les études de cas criminels !
- Et ta défiance envers la psy.
Matt souffla.
- J’ai pas besoin d’analyse. J’ai déjà un très bon thérapeute.
Roland regarda Matt qui le fixait en souriant. Roland s’étonna.
- Tu as déjà un thérapeute ?
- Non, crétin, je parle de toi.
- Oh.
- Tu m’as déjà remis les idées en place, j’attends juste que Charlie s’excuse.
- Ah bon.
- D’ailleurs je t’invite pour ce thé, je te suis redevable, c’est vraiment chou ce que tu as fait pour moi ces deux derniers jours.
- Mais non, allons, c’est normal. Ça me fait plaisir de m’entendre aussi bien avec toi, Charlie est quelqu’un de cher à mes yeux, je suis content de voir qu’il a trouvé quelqu’un de bien.
Matt sourit et regarda Roland avec roublardise.
- Toi et Charlie…
- Hein ?
- T’as jamais voulu…
- N… Non !
- Même quand lui et Léopold se sont séparés ?
- J’étais déjà avec Rachel à l’époque !
- Ah oui. Mais t’aurais pas dit non !
- Matt, c’est gênant ! C’est comme un grand frère pour moi !
- Justement, le fantasme du mec plus âgé qui déflore le fils des amis de ses parents…
- Matt ! ricana Roland, gêné.
- Vous vous retrouvez tous les deux dans le garage familial et il te culbute sur le capot de la voiture…
- Matt, stop !! geignit Roland en agitant les mains.
- Allez, tu peux me le dire, je me fâcherai pas !
Roland agita la tête.
- Disons… que je le trouve mignon.
- Aaaaaaaaaah !
- Mais sans plus. C’est un très bon ami.
- En même temps, un ronchon comme lui et un mec calme comme toi…
- Non, c’est même pas ça, c’est juste que je sens que je n’en tirerais aucun bénéfice. Je suis content de notre relation telle qu’elle est. J’ai de la chance d’être son ami, ça me suffit. Je n’ai jamais ressenti l’envie ou le besoin d’en avoir plus avec lui.
Matt hocha la tête.
- Tu l’as déjà entendu s’excuser ?
Roland rata un battement. « Ne. Lui. Raconte. Pas. Ça. Charlie te tuerait et Rachel te tuerait aussi quand elle l’apprendrait par un Charlie en furie parce que je l’ai dit à son mec. »
- Ou du moins admettre qu’il avait tort, qu’il était en position de faiblesse ?
- … Charlie est quelqu’un de très fort, qui a toujours voulu être fort, surtout aux yeux de son père. Il a beaucoup complexé vis-à-vis de ses parents d’être homosexuel, c’est un peu comme s’il voulait se rattraper en étant… macho !
Matt ne put qu’acquiescer.
- Ouais bah il abuse sur les sessions de rattrapage…
- Certes. Mais on ne le changera pas comme ça.
- Oui c’est sûr… Tu crois que j’ai raison d’attendre des excuses ?
- Oui. C’est le minimum.
Matt hocha la tête.
- Ok. Bah j’attends. Tu lui dis pas dans mon dos, hein !
- Bah non tu me prends pour qui enfin…
- J’sais pas, tu pourrais jouer sur deux tableaux, monsieur Smirnoff, après tout, tu connais Charlie depuis plus longtemps que moi…
Roland inspira.
- C’était ça aussi, l’attrait du doyen…
Matt haussa un sourcil.
- Il était nouveau dans mon entourage. En fac, j’étais dans la même promo pendant deux ans, là de me retrouver avec d’anciens amis et de nouvelles personnes…
Roland sembla avoir une épiphanie et regarda Matt.
- Tu ne devrais pas dévaloriser ta place auprès de Charlie.
Matt haussa un sourcil.
- Y’a de la verveine dans ton thé ?!
- Je veux dire… si tu ressasses ta théorie selon laquelle son histoire avec Léo a plus d’importance que son histoire avec toi, autant le quitter tout de suite, et Charlie ne retrouvera jamais plus personne parce que Léo comptera toujours plus que tous les autres, alors que…
Roland inspira.
- Clairement, Charlie n’était pas aimé par Léopold, alors que ça crève les yeux que vous vous aimez comme des fous.
- … c’est lui qui me dévalorise…
- Charlie t’aime, c’est juste que la situation est trop tendue, toi, ton mec, son ex, c’est un baril de poudre. Vous devriez changer d’équipe pédagogique.
Matt baissa les yeux.
- J’aime bien être prof mais être prof sans passer du temps avec Charlie…
- Travailler ensemble, ce n’est peut-être pas fait pour nous. Pour vous, pardon…
Matt regarda Roland qui inspira entre ses dents.
- Je pense que ça pourrait nous perdre à terme, avec Rachel aussi, ça me fait peur. Il vaudrait peut-être mieux qu’on change tous d’équipe pédagogique, travailler tous ensemble dans la même, c’est peut-être pas une bonne idée…
Matt agita la tête.
- Certes. C’est triste mais probablement vrai…
- On digresse, on digresse… que fait-on ce soir ?
- Pas de bière, déjà…
- Pas de bière, on est bien d’accord.
- Du vin !
- Matt ! ricana Roland.
- Tu as un délicieux vin rouge qui traine dans un placard !
- C’est un cadeau de tante Estelle !
- Bah on va le dégommer, le cadeau de tante Estelle !
- Ça va être la semaine de la gueule de bois ! ricana Roland.
***
Sitôt dit, sitôt fait. Roland et Matt étaient rentrés à l’appartement et s’étaient débouché la bouteille de rouge offerte par tante Estelle et l’avaient presque descendu d’une traite.
- Il est bien bon, ce rouge ! souffla Matt, pompette.
- Hm. Bon choix, tata.
- Tu t’entends bien avec ta tante ? Parle-moi de ta famille !
- Oh ma tante Estelle c’est le genre cinquantenaire un peu hippie, elle est éleveuse slash coordinatrice, elle a une belle équipe d’ailleurs, elle a toujours un peu souffert d’être dans l’ombre de mon père… un peu comme je souffre d’être dans l’ombre de ma sœur et de mon frère.
- A ce point ?! Attends, ton frère et ta sœur sont plus jeunes que toi, nan ?
Roland inspira.
- Ma sœur est une combattante remarquable. Tu as vu son Chelours ?
- Oui, sacrée bestiole.
- Je n’ai jamais réussi à le battre.
Matt haussa les sourcils.
- Et mon frère, bah c’est un coordinateur et sa façon de se battre diffère trop de la mienne, je ne sais jamais sur quel pied danser…
- Avec son petit Ceriflor, là ?!
- C’est un Pokémon de coordination absolument remarquable. Mon frère est très talentueux, il deviendra un grand artiste.
- Et toi t’es un prof génial, de quoi tu te plains ?!
Roland haussa les épaules.
- Je suis un combattant moyen et j’enseigne, tout bêtement. Je ne pense pas que j’arriverais jamais au niveau de mon père et je ne serais jamais aussi spécialisé que mon frangin ou ma frangine, je… suis condamné à être moyen.
Matt plissa les yeux.
- Je suis un juriste raté qui fait prof par confort pour être auprès de son mec qui est encore amoureux de son ex… j’ai pas de famille et niveau dressage je suis juste une blague.
- Nooon, tu te bats super bien !
- Mouarf. Je balance ma Cheniselle et mon Tritox est un petit rebelle…
Roland essaya de resservir du vin mais la bouteille était vide.
- Je crois que j’ai un fond de merlot d’une précédente soirée…
- Allons-y pour le merlot, au point où on en est…
***
- Du coup, Malcolm était en chien sur elle, mais vraiment. Il la lâchait pas la Meredith et elle le lâchait pas non plus, et Vincent qui faisait comme si ça le touchait pas alors que son ex se tapait son syndiqué…
- Ouaiiis j’vois le genre… ricana Roland.
- Un peu comme moi avec Charlie, de me pavaner avec lui devant Léo ça a toujours été un truc excitant…
Roland reprit une gorgée de vin. Les deux étaient allongés presque l’un sur l’autre sur le canapé devant une série Netflix qu’ils regardaient vaguement.
- Avec Rachel, on s’amusait à… draguer chacun de notre côté en boîte ou en fête étudiante et après à bien montrer qu’on était en couple, c’était assez excitant.
- La monogamie c’est surfait. Dès demain, je dis à Charlie que je veux qu’on soit un couple libre !
Roland agita la tête.
- Tu psychotes quand il dit qu’il a encore des sentiments pour Léo mais tu veux que vous alliez voir ailleurs librement ?
- Ouaiiiis t’as raison, c’est pas une solution. Pourquoi c’est aussi compliqué d’être bien avec quelqu’un ?
Roland inspira.
- C’est pareil qu’avec un Pokémon, c’est pas facile au départ d’être sur la même longueur d’ondes que lui, ça s’apprend.
- Pourquoi tu ramènes toujours tout aux Pokémon ? ricana Matt en regardant Roland.
Roland haussa les épaules, la tête de Matt posée sur son torse, levée vers lui.
- Parce que finalement on en revient toujours à eux, quoi qu’on fasse. Quand tu dors seul, tu dors avec Cheniselle, donc en quelque sorte tu n’es jamais seul.
Matt haussa les épaules.
- Un Pokémon remplacera jamais un homme. Ou une femme.
- C’est certain. Sauf dans certains cercles bizarres.
Matt regarda Roland avec de gros yeux.
- … que je n’ai jamais cotoyé !
- Roland Juliette Cécilia Smirnoff !!
- Mes seconds prénoms sont Erwan et Bernard, primo, secundo ne t’aventure pas sur ce terrain-là, j’ai assez de problèmes en étant simplement bisexuel !
- Ok, ok, ok…
Matt reposa sa tête sur le torse de Roland, silencieux.
- Faudrait qu’on aille se pieuter, il est presque minuit.
- Hm.
- J’ai la flemme de déplier le canapé, tu viens dans ma chambre ?
Matt regarda Roland qui haussa les épaules.
- Pour dormir !
Matt se releva, titubant un peu.
- En espérant que je vomisse pas…
- Mais non, une bouteille et demi de vin rouge, tu vas pas vomir.
- Mouais. Toi par contre, t’arrives pas à te relever.
- Attends, attends…
Matt tendit la main pour aider Roland qui se releva et atterrit à quelques centimètres du visage de Matt, debout face à lui.
- …
- …
- … il…
- Oui ?
Roland déglutit et se remit à murmurer doucement.
- …il y a probablement une vie où je fais ce mauvais choix de t’embrasser…
- Ton haleine pue le vin rouge, même avec un bâton je t’embrasse pas… murmura Matt sur le même ton.
Roland ricana. Matt rit à sa suite.
- … et…
- Et ?
- … et ça mettrait un bordel pas possible, et je veux pas ça.
- Et donc là tu ne vas pas m’embrasser ?
- Non.
- Tu as la meilleure excuse du monde. On est bourrés.
- Certes.
- Mais ton couple à toi va bien.
- Hm.
- Tu dis que tu es dans l’ombre de tes frangins mais toi au moins tu as trouvé l’amour.
- Toi aussi tu as trouvé l’amour, enfin. Charlie t’aime et tu aimes Charlie.
- J’sais pas si ça va suffire encore longtemps.
- Pourquoi on est là comme deux cons au milieu de mon salon à se parler d’aussi près l’un de l’autre ?! s’étonna Roland.
- J’sais pas, on doit avoir ce genre d’instant de grâce chelou qui n’arrive que quand on est ivre…
Roland leva les yeux au ciel en ricanant, rompant le charme et s’éloignant.
- Viens te coucher, crétin.
Matt haussa les épaules et suivit Roland jusqu’à sa chambre. Roland enlevait pull et pantalon pour ensuite se coucher. Matt fit de même et se glissa dans le lit.
- Bonne nuit, Matt.
- Bonne nuit, Roland.
Les deux firent silence. Ils entendirent la télé qui tournait toujours dans le salon.
- Merde, on a oublié la télé ! souffla Roland.
Matt éclata de rire. Roland pouffa à son tour. Il se leva et tenta de passer par-dessus Matt.
- Oh la la, Roland Smirnoff à quatre pattes au-dessus de moi !
- Ça va hein !
- C’est quand que tu fais du sport ?
- Dit-il, t’es aussi crevette que moi !
- Tu pues le vin.
- J’irais me doucher demain, la flemme.
- T’es craaade ! ricana Matt.
Roland alla éteindre au salon. Il retourna vers la chambre et se remit dans le lit.
- Voilà, on est tranquilles !
- Cool.
- Bonne nuit Matt…
- Bonne nuit Roland…
Les deux hommes se positionnèrent pour dormir. Roland tourna le dos à Matt qui fit de même au départ. Ils se collèrent ensuite dos à dos.
- T’es brûlant ! ricana Roland.
- C’est toi qu’est tout glacé, espèce de Stalgamin !
- Demain je vais avoir une de ces gueules de bois…
- Grave… faut qu’on arrête de boire en semaine… faut qu’on grandisse, je crois.
Roland inspira.
- Qu’on grandisse…
- Hm…
Les deux hommes s’allongèrent pleinement sur le dos et se regardèrent.
- J’ai vingt ans, toi vingt-six, il est temps d’agir comme des hommes et plus comme des ados. Parce que depuis le début on agit comme des ados…
Matt souffla.
- Je veux pas agir comme un adulte. J’ai passé toute ma jeunesse à être le plus adulte de ma famille avec mes parents en plein divorce…
- Et moi je suis le fils à sa maman et à son papa qui croit que tout se règle en disant « Je suis le fils d’Etienne Smirnoff, lâchez-moi la grappe »…
Matt et Roland se regardèrent et inspirèrent en même temps.
- Je vais affronter la grande méchante thérapeute…
- Et je crois que je dois avoir une discussion avec quelqu’un moi aussi.
Sur ce, ils s’assoupirent.
***
Megan attendait devant la salle de Teresa le lendemain matin, mais Matt arriva.
- J’te vole ton tour ?
- Volontiers, j’ai absolument pas envie de rendre des comptes à Zelda Rubinstein !
***
On toqua à la porte. Justin regarda son Prismillon, interloqué. La créature aux ailes au motif de Pokéball émit un petit piaillement.
***
- Eh bien je suis ravie que vous ayez décidé d’assister à la séance, finalement !
Teresa servit du thé à Matt qui inspira.
- Disons que… j’ai un très bon ami qui m’a convaincu d’arrêter de faire l’enfant et de me prendre en main.
***
- On peut se parler ?
Justin regarda son bureau encore en réparations et inspira.
- Je demande un devis d’avance ou bien…
- Non, non, promis.
Justin inspira et laissa Roland entrer.
***
- Le truc c’est que… chaque fois que les choses deviennent sérieuses avec Charlie, je prends la fuite.
Teresa acquiesça.
- Ça fait… presque quatre ans qu’on sort ensemble et trois qu’on vit ensemble. La meilleure relation de ma vie. A ses yeux, c’est… moins beau et romantique qu’avec son ex mais pour moi… je suis sorti avec Charlie à l’académie, il m’a quitté pour Léo, j’ai rongé mon frein, le hasard de la vie a fait qu’on s’est revus après qu’ils aient rompu, qu’on se soit fréquentés de nouveau, que…
Matt inspira.
- Que tout aille enfin bien pour moi, que ce soit mon tour, après toutes mes galères familiales, et… et je suis redevable à Charlie de tout ça… et quand je l’ai vu… devenir un tel animal…
Teresa agita la tête.
- Pour un garçon désinvolte et peu sérieux, vous êtes drôlement sensible.
- Je veux pas que les choses changent.
- Tout doit bien changer un jour, monsieur Clancy. Les gens meurent, c’est inéluctable.
Matt grimaça.
- Les gens se perdent de vue, les équipes pédagogiques se modifient, se défont, les gens prennent de l’âge, voient des opportunités leur échapper, s’énervent et votre solution ça a été de prendre la fuite. Vous n’avez pas su contrôler la fureur de Charlie et ça vous a troublé en tant qu’homme et en tant que petit ami, parce que le petit ami qui ne peut pas soutenir son compagnon se sent futile à ses côtés.
Matt acquiesça tristement. Teresa agita les mains.
- Oubliez ça ! Vous n’avez pas de rôle à remplir ou que sais-je. Un couple, c’est un voyage à deux. Vous avez votre part à faire mais l’autre doit aussi se rendre compte de la portée de ses erreurs.
Matt s’étonna.
- … c’est mon état d’esprit depuis le début…
- Ah, je ne dis pas que votre état d’esprit était le mauvais, c’est votre réaction de fuir qui était la mauvaise.
- Mais si j’étais resté, on aurait pu s’engueuler, notre couple aurait fini en cendres, je me serais retrouvé seul, Charlie aussi…
- Et ?
Matt grimaça et regarda Teresa, toujours souriante.
- … vous voulez qu’on casse ?
- Je veux que vous affrontiez la situation en face. Pas en criant, pas en partant dans de grands effets…
Matt plissa les yeux. « On lui a parlé de l’engueulade d’hier en salle des profs… »
- … juste en étant sincère. La sincérité c’est invincible. Ça passera ou ça cassera mais au moins vous saurez à quoi vous en tenir et vous n’aurez plus à fuir. Juste à affronter ce qui se passe, comme un homme, pas comme un petit-ami, un compagnon, une moitié, un Homme, un être humain qui assume ses opinions et ses erreurs.
Matt hocha la tête. Teresa garda le silence et regarda Matt en souriant.
- … genre… maintenant, là, en sortant ? geignit le jeune homme.
***
Roland inspira. Justin l’observait, soucieux.
- Je…
Roland se rassit.
- J’ai aimé ce qui s’est passé. Physiquement. Entre nous. Vous êtes beau garçon, vous avez cette façon d’être complètement lunaire qui vous rend incroyablement séduisant, même vos Pokémon sont géniaux, mais…
Justin ne savait pas à quoi s’attendre comme chute.
- … émotionnellement comme charnellement, mon cœur appartient à Rachel Heine. Je n’ai pas de sentiments pour vous, sinon une profonde sympathie pour votre personne et vos idées. Vous trouverez quelqu’un de bien un jour mais ce ne sera pas moi.
Justin hocha la tête.
- Bien reçu.
- Je voulais juste clarifier les choses, régler ça comme un adulte… Rachel a réagi de façon un peu trop… brutale à mes yeux…
- Elle a eu raison, j’ai dépassé les bornes, ne serait-ce qu’en tant que doyen… Elle a été violente mais après coup, je l’ai mérité. C’est un peu quand… on prend du recul sur les punitions qu’on a reçu de la part de ses parents et qu’on se dit « J’avais fait une bêtise, ils ont eu raison de me punir ». C’est exactement ça.
Roland hocha la tête, compréhensif. Justin poursuivit.
- Sans indiscrétion, vous et Rachel, comment… comment vous vous êtes rencontrés ?
- Oh on s’est retrouvés dans la même classe. Et ça s’est fait très naturellement.
Justin inspira.
- J’envie les gens comme vous qui ont trouvé l’amour comme ça, sur leur chemin…
- Je dis pas que ça a toujours été facile. Et puis ça vous arrivera aussi, rien ne presse, vous êtes encore jeune. Charlie a trouvé Léopold dans l’entourage familial et ce très jeune, ça n’a pas empêché que lui et Léopold aient rompu.
Justin acquiesça.
- Certes.
- En tout cas, vous restez mon doyen et je reste dans votre établissement, donc, restons bons amis !
Justin sourit.
- Vous êtes bien le premier mec à me rembarrer qui ne me laisse pas la moindre amertume…
- Malheureusement pour vous je suis plus doué pour rembarrer les gens que pour leur trouver des âmes soeurs ! sourit Roland.
Roland tendit la main vers le doyen qui lui prit la sienne pour une franche poignée amicale.
***
Roland prit le hall avec sérénité. Matt sortit au même moment du bureau de Teresa.
- Alors ?
- Retournement de cerveau, et toi ?
- Pas de retournement sur le bureau !
- On a vraiment des vies de merde. J’me prends la tête et toi, tu baises pas !
- Grave, qu’est-ce qu’on attend pour se suicider ? soupira Roland, sarcastique.
- La fin de nos séries préférées, on a déjà eu cette conversation.
- Ah, oui, c’est vrai.
Matt et Roland se rendirent en salle des profs, observés par le reste de leur équipe. Matt inspira. Roland alla s’asseoir en face de Rachel et Matt resta dans l’encadrement de la porte.
- Je… pourrais parler à Charlie en privé ?
Léopold tendit les mains pour dire « faites donc ! ». Charlie se leva et rejoignit Matt.
Matt regarda Charlie qui le regarda, puis regarda ses chaussures. Matt souffla.
- J’me suis enfui parce que tu m’as fait peur.
Charlie regarda Matt, étonné.
- Tu m’as fait peur et j’ai pas su faire face à… ta frustration, alors que j’aurais dû t’aider à gérer tout ça, je… j’me suis enfui. Jusque chez Roland. J’ai la gueule de bois parce que j’ai préféré boire pour oublier plutôt que… de te dire en face que j’avais eu peur de toi.
Charlie acquiesça en inspirant, l’air contrit.
- J’suis désolé. Pour tout. Tu es mon homme et pas… mon punching ball, je devrais pas… t’en imposer autant, je sais que tu es plus fragile que tu en as l’air et… pfff…
Matt regardait Charlie, étonné.
- … et même si je réussis pas forcément ma carrière, il faut que je garde à l’esprit qu’au moins, j’ai réussi mon couple !
Matt resta éberlué et tomba dans les bras de Charlie.
- Me refais plus ça ! Te remets plus jamais en colère en oubliant que j’existe, s’il te plait !
- Oui, oui, pardon…
- Que tu sois prof principal ou pas, moi je t’aimerais toujours, ok ?
- Matt…
Depuis la salle des profs, on entendait Matt pleurer sur Charlie.
- Je considère que c’est une réussite ! sourit Léopold.
Roland inspira et regarda Rachel.
- Matt va repartir de chez moi, donc…
- Ce n’était pas lui le problème, qu’on soit bien d’accord.
- Je sais, c’est pour ça que j’ai été voir le doyen.
Rachel fit de gros yeux. Léopold, Vincent et Malcolm se redressèrent. Megan et Claire se regardèrent, intriguées.
- Tout est réglé, on s’est expliqués.
- Sur quoi ?! s’étonna Vincent.
- Roland, qu’est-ce qui s’est… marmonna Léopold.
- Quoi, tu t’es battu avec lui aussi ?! souffla Malcolm.
Roland inspira.
- Rien de grave. Une affaire personnelle que je devais régler au lieu de la laisser en suspens. Agir comme un adulte.
Claire sembla admirative. Megan impressionnée. Malcolm ne chercha pas à comprendre. Vincent laissa tomber également. Léopold se demanda s’il allait avoir des problèmes. Rachel ne dit rien mais elle prit la main de Roland sous la table et il la serra en retour.
***
- Je suis contente que tout soit rentré dans l’ordre. Je devrais aller m’excuser auprès du doyen pour le bureau, non ? sourit Rachel.
Roland haussa les épaules. Rachel agita la tête.
- Si vous êtes amis, je devrais essayer d’être plus cool moi aussi, non ?
- Comme tu le sens. C’est toi et ta conscience.
- Ça a l’air de t’avoir fait du bien en tout cas, d’avoir eu un colocataire !
- Disons que ça a agréablement brisé ma routine et fait voir les choses sous un autre angle. Tout bénef !
- Mais qu’on soit bien clairs, je n’étais pas jalouse !
Roland sourit alors qu’ils se dirigeaient vers la salle des profs.
- Non, tu ne l’étais pas, sourit Roland, amusé.
- Merci de le remarquer.
Léopold arriva près d’eux.
- Salut le petit couple préféré d’Illumis, Roland, tu es attendu par Teresa pour cette interclasse !
Roland haussa les sourcils.
- Son… son travail est terminé, non, tout est réglé…
- Pour que le rapport soit complet il faut qu’elle ait ton évaluation aussi.
- Megan n’a pas fait la sienne ! marmonna Roland.
- En fait les tours de Matt et Megan sont passés, mais pas le tien, tu étais le dernier à être évalué…
Rachel regarda Roland qui semblait stressé.
- Je… peux refuser ou m’enfuir comme Matt ?
- Tu n’as pas l’ancienneté nécessaire pour pouvoir te conduire comme un galopin et je te rappelle que le proviseur t’a dans le collimateur, mon petit Roland ! sourit Léopold.
Roland regarda Rachel qui haussa les épaules.
- Si tu as pu faire face au doyen, tu pourras lui faire face à elle !
Roland inspira lourdement et hocha la tête.
- Ok j’y vais. A tout à l’heure…
- Oui ! souffla Rachel.
- A toute ! salua Léopold.
Rachel regarda le blond.
- Tout va bien ? T’avais l’air secoué hier midi après ta propre séance…
- Moi ? Oh oui, j’ai juste… remué plein de vieilles histoires et du coup j’étais ému !
- Oh. Qu’est-ce que j’aimerais pas me faire analyser, moi… souffla Rachel.
- J’ai pas dit que c’était plaisant, hein !
Roland arriva devant le bureau, frissonnant. « Pars. Fuis. Tu ne veux pas faire face à ça, tu t’y es toujours soustrait, une fois de plus ou de moins… »
Teresa arriva en même temps que lui.
- Roland ! Quelle bonne surprise ! Je vais pouvoir terminer avec vous !
- Euh… oui, euh… volontiers… héhé…
Trop poli, Roland suivit la petite dame dans le bureau.
- Asseyez-vous donc, je ne mords pas !
Roland s’assit, un peu anxieux. Teresa s’assit en face de lui.
- Alors… Votre rôle dans toute cette histoire, c’est que vous êtes parti avec Matt et que vous l’hébergez à présent…
- C’est terminé, tout est résolu, il a fait la paix avec Charlie, j’ai fait ce qu’il fallait de mon côté…
- Ce qu’il fallait ?!
- Oui enfin… Je suis très mal à l’aise de devoir vous parler, je suis désolé, pour moi tout est arrangé – grâce à vous, d’ailleurs, merci ! – mais du coup je ne vois pas pourquoi j’aurais à me soumettre à cet exercice à mon tour sachant que…
Roland agita les mains.
- Qu’il n’y a plus rien à dire !
Teresa fixait Roland, interloquée.
- Vous êtes mal à l’aise de devoir me parler ?
- Oui.
- Pourquoi ?
- Parce que je n’ai aucun problème !
- Personne n’a parlé de problème, nous sommes là pour examiner une situation, ses causes et ses conséquences.
- Je n’ai fait qu’aider un ami.
- Eh bien voilà.
- C’est bon, je peux partir ?
Teresa regarda Roland qui regardait la dame à lunettes en face de lui. Teresa joignit les mains en observant Roland qui n’osait pas bouger sans qu’on lui en donne l’ordre. Roland inspira.
- J’aurais jamais dû partir de chez mes parents…
Teresa se releva.
- J’étais bien, là-bas… J’aime mon métier de professeur, mais là, gérer de front le travail, les relations de travail, la hiérarchie, mon couple…
Roland secoua la tête et regarda Teresa.
- C’est… c’est normal de me sentir désœuvré comme ça, après avoir fait des années d’études, l’académie, la fac, les concours, en ayant eu l’aide de mes parents pour m’installer sur Illumis, j’ai un bon salaire, un bon travail, une petite amie merveilleuse, pourquoi…
Roland agita la tête et les mains, erratique.
- … pourquoi je suis pas satisfait ?! Pourquoi je me sens pas parfaitement bien ? Je suis archi-préparé et j’ai tout ce que j’attendais de la vie, pourquoi je suis pas heureux ?!
Teresa cligna des paupières, se releva, posa ses mains sur la table et répondit à Roland.
Générique de fin :
Village People – YMCA« Young man, there’s no need to feel down
I said Young man, pick yourself off the ground
I said Young man, cause you’re in a new town
There’s no need to feel unhappy ! »