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Sous la poussière de Ashenere



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Informations

» Auteur : Ashenere - Voir le profil
» Créé le 29/09/2021 à 23:01
» Dernière mise à jour le 31/10/2021 à 16:31

» Mots-clés :   Mythologie   Sinnoh

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Chapitre 1
Bip, bip, bip, bip...

J'entends le réveil sonner au loin. Je commence à tendre la main pour l'éteindre quand je sens quelque chose à mes pieds. Il me faut quelques secondes, à travers la brume du sommeil, pour comprendre que ce n'est que Li. J'atteins enfin ma Pokémontre, posée sur ma table de nuit et la sonnerie s'arrête. Je me lève en essayant de ne pas trop le déranger, et j'enfile mes lunettes. Dans la semi-pénombre de la chambre, je distingue la boule de poils bleue et noire, pelotonnée au pied du lit et l'étoile qui scintille faiblement au bout de sa queue. Li n'entend jamais le réveil, il adore dormir tard. Mais ce matin, il va falloir faire une exception.

Je commence à rassembler mes affaires. Mon regard se perd sur mon bureau, enseveli sous des feuilles éparpillées et des piles de livres, pour finalement se poser sur un cadre doré. Mon diplôme d'archéologie. "Décerné à Archie Almadi après présentation de sa thèse sur l'Histoire et la culture d'Hisui", peut-on lire, au milieu des arabesques qui semblent parcheminer le précieux document. Archéologue, un rêve d'enfance devenu réalité il y a plus de deux ans. Ma thèse avait vivement impressionné le comité du Centre d'Archéologie de Vestigion, qui m'avait alors proposé un emploi. J'étais tellement heureux et fier ! J'allais pouvoir participer à l'exploration des Souterrains directement et, avec un peu de chance, découvrir des artefacts oubliés ! J'étais enthousiaste, probablement un peu trop même. Mais cet enthousiasme commença à s'effriter lorsque les jours se succédèrent, puis les semaines, puis les mois... Aucune découverte, rien d'important, même pas un morceau de poterie ou une pierre taillée. Je me sentais perdu au fin fond de l'infinité de galeries serpentant sous Sinnoh. Je sais bien qu'on ne peut pas faire une découverte majeure tous les deux jours, mais rien en deux ans ? Même pas une toute petite trouvaille de rien du tout ? J'en étais là de ma vie, à essayer de négocier avec le destin, couvert de la poussière des tunnels, lorsqu'un bruit terrible avait empli l'espace. Puis des cris s'étaient répercutés dans les longs couloirs et j'avais commencé à courir vers leur source, Li sur mes talons, tandis qu'une alarme retentissait.

Un éboulement. Je savais ce qu'il se passait, ce n'était pas la première fois que ça arrivait, et j'avais dû suivre une formation sur les procédures d'évacuation avant d'être autorisé à descendre dans les Souterrains. Après quelques minutes de course, je me retrouvai devant les rochers entassés. La poussière soulevée me faisait tousser et je distinguais à peine les vestes rouges des secouristes, sécurisant la zone. Puis la situation se calma progressivement et nous avions pu confirmer qu'il n'y avait pas de victimes. Ce n'était qu'une galerie mineure et personne ne l'explorait en ce moment. Les ouvriers spécialisés avaient donc commencé à évacuer les débris tandis que je retournais à ma morne journée.

"Au moins j'aurais un truc à raconter à mes parents la prochaine fois qu'on s'appellera". C'est ce que je m'étais dit. Pourtant, j'eus quelque chose de bien plus intéressant à leur rapporter. Quelques heures plus tard, de nouveaux cris se firent entendre dans les galeries. Mais sans que retentisse le tonnerre de l'éboulement ou le cri strident de l'alarme. Que se passait-il ?

Un tunnel. Voilà ce qui se passait. L'éboulement avait permis la découverte d'un tunnel caché depuis des siècles, voire des millénaires et qui venait d'apparaître par miracle.

Je n'avais pas pu approcher, malgré l'envie qui me dévorait. Trop dangereux d'aller explorer tout de suite, il faut d'abord sécuriser la zone, tout pourrait s'effondrer... Alors j'étais resté là, pendant de longues minutes, à regarder cette brèche dans le mur, ombre au milieu des lampes, cette grotte oubliée qui ressurgissait du passé. Que pouvait-il y avoir à l'intérieur ? Était-ce juste une vieille galerie minière où quelques pierres précieuses dorment encore ? Trouvera-t-on des fossiles de Pokémon inconnus ? Des ruines ? Des artefacts anciens ? Mon esprit commençait à s'emballer et c'est Li, comme toujours, qui me ramena à la réalité, en se frottant sur ma jambe.
— Tu as raison Li, si je m'excite trop, je vais avoir l'air d'un fou et on risque de me refuser le droit d'explorer en premier. Et ça, c'est pas possible !
Ses grands yeux jaunes m'avaient fixé, et, même si Li se contrôle bien mieux que moi, j'y vis briller l'excitation et l'impatience.

Ces événements s'étaient déroulés deux semaines auparavant. Depuis, j'avais obtenu le droit d'explorer la galerie puisqu'elle se trouvait dans ma zone, dès qu'elle serait sécurisée. Alors j'avais guetté la fin des travaux, vérifiant l'avancée des ouvriers (bien trop souvent à leur goût), incapable de me concentrer sur une quelconque autre tâche.

Et ce matin, la fin de l'attente sonne enfin. Je vais pouvoir pénétrer dans cette galerie et découvrir ses secrets. J'essaie de ne pas trop y penser, je ne veux pas être trop déçu... On ne va sûrement trouver qu'une vieille Pierre Feu ou une Perle au fond d'un couloir vide... Mais si ce n'était pas le cas ? En me préparant, mon esprit alterne entre l'espoir et le pragmatisme, entre les rêves et mes cours sur la dernière grande découverte des Souterrains, qui remonte à si longtemps. Tellement longtemps que certains pensent d'ailleurs que continuer l'exploration est un gâchis de temps et de moyens. Heureusement quelques pierres précieuses ou fossiles refont quelques fois surface et les gens semblent alors satisfaits pour un temps.

Un bruit me sort de mes réflexions : Li s'étire et se réveille enfin. Ses grands yeux dorés, embrumés de sommeil font le tour de la chambre avant d'atterrir sur moi. En me voyant habillé et équipé pour partir, il se souvient et se réveille complètement, bondissant, plein d'énergie, à mes pieds.
— Et oui, c’est le grand jour, heureusement que tu t'es enfin levé, j'ai failli partir sans toi !
Je le taquine évidemment. Jamais je ne serais parti affronter cette incroyable journée sans mon Lixy. J'ai besoin de son aide et de sa présence, sinon je risque de me perdre dans mon enthousiasme !

Après un petit-déjeuner pris à la hâte, nous sortons tous les deux de notre petit studio pour nous retrouver dans les rues de Vestigion.
Le ciel est gris, empli de nuages, et il semble que la pluie puisse nous surprendre à tout moment. Mais peu importe, il ne pleut pas sous terre et c'est sous terre que nous allons. Je traverse la grande place, Li sur mes talons et je ne peux m'empêcher d'admirer l'immense statue qui trône en son centre. Je passe devant quasiment tous les jours et pourtant elle m'impressionne à chaque fois. Son aura mystique, ce Pokémon étrange et fantastique, sorte de fusion entre Dialga et Palkia, Légendaires présents dans tant de mythes de Sinnoh, et cette inscription indéchiffrable que le temps a effacée. Li mordille mon pantalon pour me forcer à avancer et je constate que, plongé dans ma contemplation, je me suis arrêté.
— Ah désolé Li, tu as raison, on va être en retard si je continue à traîner comme ça.
Il pousse un petit cri las qui signifie clairement "Heureusement que je suis là" et nous reprenons notre chemin à travers les vieilles rues pavées de l'ancienne cité.

Après quelques minutes, nous arrivons enfin devant le bâtiment du Centre d'Archéologie de Vestigion.
C'est de là que nous pourrons accéder aux Souterrains, grâce au Passage, un grand ascenseur permettant d'atteindre facilement les galeries qui courent sous le continent. Ou du moins la zone des Souterrains accessible à partir de Vestigion. En traversant le hall d'entrée je passe devant la grande carte de la région et celle, simplifiée, des galeries. Au milieu des villes dessinées, de gros points rouges indiquent les différents Centres : Vestigion, le plus ancien, puis Charbourg et Rivamar, tandis qu'un dernier marque le nouveau Centre qui doit être inauguré l'an prochain à l'Aire de combat. Après avoir passé les portiques de sécurité, je m'engouffre dans le grand couloir menant au Passage. Sur le chemin, je croise un guide expliquant à des touristes comment se servir de l'Explorakit qui vient de leur être fourni. Ce kit d'outils permet d'accéder rapidement aux zones publiques des Souterrains, peu importe leur localisation dans Sinnoh. C'est très pratique pour les amateurs mais seules les zones sûres et explorées de fond en comble leur sont accessibles ainsi. C'est pourquoi les professionnels (comme moi !) doivent utiliser le Passage. Il est aussi plus pratique pour évacuer les débris des éboulements ou organiser des visites des ruines découvertes.

Et justement, Li et moi arrivons enfin à l'entrée du Passage et commençons à attendre que l'ascenseur remonte avec sa lenteur habituelle. Un écran sur le mur indique à quelle profondeur il se trouve, tandis qu'un autre diffuse une chaîne d'information. La présentatrice semble parler du seul sujet important de ces derniers jours, l'épidémie de folie Pokémon. Mais comme chaque jour, elle semble répéter les mêmes informations : on ne sait pas d'où ça vient, on ne sait pas ce qui la provoque, on ne sait pas comment la guérir, on ne sait rien, mais surtout restez calmes. Tandis que les images des ravages causés par les premières victimes défilent, la voix de la présentatrice reprend :
— Si vous voyez un Pokémon avec une lueur rouge dans les yeux ou si un de vos Pokémon devient soudainement agressif, veuillez vous rendre dans le Centre Pokémon le plus proche ou contactez le numéro suivant...
Je détourne les yeux vers l'autre écran pour vérifier où se trouve l'ascenseur. Il n'est plus très loin, encore quelques instants et... Voilà, l'ascenseur arrive dans son fracas habituel, et, après une petite hésitation, décide d'ouvrir enfin ses portes. À cette heure-ci, peu de gens reviennent d'en bas et la grande cabine se vide très rapidement. Je me jette presque à l’intérieur et j'observe les autres passagers : autres archéologues, ouvriers, secouristes venant patrouiller, puis les portes se referment et nous nous enfonçons dans les profondeurs.

L'appréhension commence à m'envahir. C'est ma première vraie exploration, d'un lieu inconnu. Vais-je être à la hauteur ? Et si je commettais une erreur qui compromettait un artefact ? Et si je ruinais une peinture rupestre vieille de milliers d'années en posant ma main sur un mur ? Les scénarios catastrophes se multiplient dans mon esprit et la descente me semble interminable. Puis mon corps se met à vibrer, traversé par un doux ronronnement. Li a senti le stress s'emparer de moi, et il a décidé de l'affronter. Son affection et sa confiance en moi me rassurent tant ! Je me baisse pour caresser sa petite tête bleue et nous restons un instant ainsi, coupés du monde, apaisés. Notre bulle éclate lorsque l'ascenseur s'arrête brusquement. Je manque de trébucher avant de me relever avec difficulté. Je baisse les yeux, puise le courage qu'il me manque dans le sourire de Li et nous sortons enfin du Passage.

Les galeries partent dans tous les sens, et même les nombreux panneaux et plans dispersés à chaque intersection n'arrivent pas à dissiper l'aura de labyrinthe qui plane sur les Souterrains. Mais après deux ans, je connais le chemin pour rejoindre ma zone par cœur et je n'hésite pas. Je m'enfonce dans la galerie de droite puis la deuxième à gauche puis j'arrête de réfléchir et je me laisse guider par l'habitude. Mes pas s'accélèrent à chaque croisement et c'est en courant que j'arrive au lieu de l'exploration. Là, à quelques pas de l'entrée, je m'arrête brusquement, stupéfait.

Quelqu'un est sur le point de pénétrer dans la galerie.