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Crocodiliens de Arzonhydre



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» Auteur : Arzonhydre - Voir le profil
» Créé le 31/08/2020 à 21:25
» Dernière mise à jour le 31/08/2020 à 21:25

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V - ...
- Donc tu en as bien fait partie.
- Ca t'étonne? il marmonne, le nez fourré dans ses bras croisés contre lui.
Je suis bien obligé d'admettre que non, même si j'ai pas envie de le blesser. Je hausse les épaules.
- Au cas où t'as pas remarqué, t'as un énorme insigne cousu sur le pantalon...
- Je sais bien, il grogne, piqué au vif.
- C'était le pantalon que tu portais là-bas? Ca ressemble pas à ceux que j'ai déjà vus.
- Le truc blanc templier? C'est pas très pratique pour les missions dans la nature. Et comme t'auras remarqué, je suis pas le gars le plus adapté du monde à voler des Pokémons dans des ruelles sombres...
- C'est pas totalement faux... mais tu faisais quoi, alors?
Il hausse les épaules, en continuant de fuir mon regard obstinément.
- On piégeait les randonneurs et les Rangers. On créait des bases temporaires dans des zones reculées. On cherchait des Pokémons rares. C'est toujours utile, des sbires capables de s'en tirer ailleurs qu'en pleine ville. C'était juste... pas ceux qu'on voyait le plus.
Je ne réponds rien, pensif.
La tempête, dehors, n'a pas bougé d'un iota. Elle continue de siffler dans les couloirs au loin, pendant que je tente de rester un minimum au chaud, en pleine réflexion. Jasper s'est tu aussi, les ongles plantés dans ses avant-bras.
- Tu les as quittés.
- J'ai été porté disparu, surtout... Mais vu que je ne suis jamais retourné leur dire que je n'étais ni étouffé dans un sable mouvant ni en prison, c'est tout comme.
- T'as... gardé leur pantalon?
- J'en ai pas d'autres qui peuvent survivre dans la nature. Et puis, de toute façon... Je suis déjà probablement recherché pour participation à des crimes organisés. Quel est l'intérêt de changer de pantalon si je peux pas changer de tête...
- T'as jamais été arrêté?
- Je suis apparemment trop bon pour me cacher dans la nature pour mon propre bien.
- Jusqu'à ce que je ruine tout, j'imagine.
J'ai réfléchi quelques instants au fait que j'étais enfermé dans un château en ruines avec un criminel en fuite, avant de conclure que c'est pas la pire chose qui me soit arrivée aujourd'hui, de toute façon. Et puis, pour un criminel, il est pas si désagréable que ça.
- Pourquoi tu les avais rejoints?
La prise de ses ongles sur ses bras se resserre. Je retiens mon souffle, en me demandant si je dois avoir envie de me coller une autre baffe.
- Je sais pas... il finit par murmurer. J'avais nulle part où aller, j'imagine...
- T'as pas vraiment eu le choix, alors.
- Tu vas me dire que de tout Unys, le seul endroit où j'aurais pu aller me réfugier à seize ans, c'était une mafia sectaire criminelle à tous les niveaux? J'aurais pu trouver autre chose, si j'avais cherché plus loin. N'importe quoi d'autre. C'était probablement loin d'être ma seule option.
- Tu crois qu'à seize ans, j'aurais seulement été capable d'atteindre la mafia sectaire, moi... je renifle, sceptique.
- J'y croyais, aussi, il lâche presque sur un air de défi. Ou je voulais y croire... Ma mère et son copain passaient leur temps à frapper le Ponchien de la maison. J'ai ramené un Chovsourir blessé, une fois, et ils ont manqué de le tuer. Je voyais les gens être violents partout autour de moi. Je comprenais pas comment on pouvait avoir envie d'enfermer un Pokémon chez soi juste pour son plaisir, quand c'était pour le maltraiter comme ça. Je voulais... croire que j'étais du côté des gentils. Pas comme les autres. Que moi, j'avais compris, et que c'est pour ça que tout le monde me détestait. Qu'ils étaient tous complices.
J'ai ouvert la bouche pour répondre, avant de me rendre compte que je n'avais rien à répondre. Je l'ai refermée, un peu gêné. Qu'est-ce que je suis censé lui dire? Je peux pas lui répliquer qu'il a eu raison de rejoindre une organisation criminelle qui a manqué de saccager le pays, ni lui dire que les humains ne sont pas tous comme ça alors que mon Mascaïman m'a rencontré à cause d'un sadique qui a trouvé marrant de le faire mourir de faim.
Aucune bonne réponse.
- Pardon, il marmonne pour briser le silence qui s'est installé. Je vois même pas pourquoi je t'en parle.
- C'est moi qui a lancé la conversation, techniquement.
- Mmh.
Il laisse s'écouler quelques secondes, avant de reprendre - l'envie de raconter ses problèmes apparemment plus puissante que celle de disparaître sous terre.
- J'y croyais dur comme fer, au début, et puis le temps est passé. Peut-être que j'avais moins besoin d'y croire. Que j'étais plus aussi incapable de me voir vivre sans eux... Je nous ai vu voler, attaquer les gens, indistinctement entre les brutes et les innocents, n'être pas meilleurs qu'eux. Et puis... ce qui est arrivé, est, arrivé.
Les interminables flash news télévisés lors de la chute de la team Plasma me sont revenus en tête, sans arrêter de l'écouter.
- Je les ai pas quittés juste après. Je suis resté un moment. J'avais trop peur. Et une sacrée impression d'être revenu au point de départ, aussi. C'était le bazar, tout le monde se dispersait plus ou moins dans tous les sens, et le jour où je les ai quittés, je suivais un Sage qui tentait de ramasser les miettes. Il était... bizarre. Ils l'étaient tous, de toute façon. Ils jouaient leur rôle, tu me dirais... Il avait besoin de quelqu'un pour le guider à travers le Château Enfoui et le défendre. J'étais bon en navigation dans le désert, j'avais un Crocorible, et j'étais influençable et complètement paumé, alors j'étais le meilleur choix, probablement. Il aurai au moins pu amener quelqu'un pour faire face aux gêneurs à ma place, ceci dit. Je me suis pissé dessus quand un dresseur nous a trouvés.
Pause. J'attends qu'il reprenne de lui même, avant que l'impatience devienne insupportable.
- Et ensuite?
- Et ensuite? Il a roulé sur mon Pokémon, voilà ce qui s'est passé. J'ai rarement eu aussi peur de ma vie. J'ai cru qu'il allait me cramer sur place. Mais il a juste continué son chemin, et il est parti arrêter Glaucus. Je me suis caché jusqu'à être sûr qu'ils soient partis, et je me suis retrouvé tout seul. Pour la première fois depuis... depuis que je les avais rejoints, en fait. On était jamais totalement seuls. Toujours un autre sbire à proximité, au cas où. Sauf peut-être ceux à qui on faisait vraiment confiance. Je me suis retrouvé tout seul et j'ai eu encore plus peur. Je suis resté avec mon Pokémon, je ne suis jamais retourné les voir, et... voilà.
Il désigne la pièce autour de nous, avec un sourire sans joie.
- Maintenant je suis un criminel en fuite qui vient de manquer de tuer quelqu'un en ruminant le passé parce que j'étais trop occupé à être misérable pour être prudent.
- En attendant, tu m'as pas tué, je réplique. T'es même revenu me voir alors que je venais de te courir après en te menaçant à moitié.
Seules les rafales me répondent.

§

Je ne sens plus mes doigts.
Je les colle sous mes aisselles comme je peux, dans le maigre espoir de les réchauffer suffisamment pour en retrouver la dextérité. Je claque des dents de plus en plus, aussi. La température a vraiment salement baissé, dehors, pour que je sois en train de congeler sur place comme ça.
Je suis aussi épuisé, et apparemment incapable de trouver une position où mon corps ne finit pas par hurler à la mort de douleur à au moins deux endroits différents.
Jasper m'observe me dépatouiller avec mon inconfort grandissant depuis tout à l'heure, n'osant pas offrir son aide ou n'ayant aucune idée de quoi offrir tout court. Je suis particulièrement jaloux de son sweat, mais je lui ai assez pourri sa journée à lui aussi pour aller jusqu'à prendre ses vêtements. En plus, ils sont pleins de sa sueur à lui, je suis sûr. Ouais, non, en fait je suis plus jaloux.
Je resserre mes jambes contre moi avec un soupir de plus en plus glacé.
Cette nuit est interminable.
Toujours aucun signe de Mascaïman, dont je ne peux de toute évidence qu'espérer qu'il ai trouvé un abri quelque part pendant que je me les pèle dans mon t-shirt me collant encore au dos, crade de sueur et de sable. Toujours aucun signe du moindre secours, non plus... même si, maintenant que je sais pourquoi mon pote du jour s'est enfui en me voyant, je ne suis pas sûr d'attendre leur arrivée avec un grand enthousiasme. Ca le fait moyen, de se dire qu'il se serait fait arrêter à cause de moi.
- Et tu te caches depuis tout ce temps? j'ai fini par demander, en ayant du mal à le croire.
Il a hoché la tête d'un air particulièrement gêné.
- Mais pourquoi? T'as pas tué des gens non plus, tu vas pas finir en prison à perpétuité...
- J'ai nulle part où aller. Qu'est-ce que tu veux que je fasse ensuite? Faire semblant que rien n'est jamais arrivé et être serveur dans un fast-food pour le restant de mes jours? Tout ce que les gens verront toujours, c'est ce logo sur mon pantalon.
- T'exagères. Ca se rachète, un pantalon.
- C'est une métaphore.
- Elle est nulle ta métaphore.
Il est retourné se murer dans son silence, et moi dans mes frissons de bloc de glace en formation. Et s'est de nouveau étirée une longue attente ponctuée par les rugissements du vent, où, au lieu de me plaindre mentalement encore et encore du long désastre de ma journée, je réfléchis à ce qu'il vient de me dire avec le vague pressentiment que je vis un moment important de ma vie. Ou de la sienne, au moins.
Tout en ayant une certaine difficulté à le réaliser, par ailleurs.
Une tâche blanche apparaît dans mon champ de vision à ma droite, et je sursaute en m'éloignant quand elle manque de me toucher. Je retiens un grognement de surprise obscène avant de voir son origine. Jasper me tend un grand vêtement blanc, qu'il vient de tirer de son sac sans fond. Je le fixe un moment avant de réaliser.
- C'est ton... uniforme?
Hochement de tête.
- Tu l'as gardé.
- J'osais pas te le proposer mais t'as l'air d'avoir froid et...
Je vais quand même pas mettre un uniforme de la Team Plasma juste parce que j'ai froid, je me dis en le fixant d'un air ahuri.
- ... a-après, si t'en veux pas... il lâche en le ramenant contre lui, de nouveau très mal assuré.
- Trop froid pour être difficile... je grogne en l'attrapant pour me réfugier dedans.
Je laisse mes bras hors des manches, pour garder une espèce d'once d'impression que je n'ai pas abandonné toute fierté quand même, et je ramène la capuche sur ma tête pour le faire tenir. Si on m'avait dit qu'un jour je serais reconnaissant d'un presque inconnu pour m'avoir tendu son costume Plasma...
Un authentique uniforme Plasma, n'empêche. Je me sentirais presque chanceux, d'un certain point de vue.
- Il est devenu quoi, ton Crocorible? je finis par demander pour dissiper la gêne qui s'est installée.
- Mon... oh. Je l'ai relâché dans le coin il y a un moment.
- Pourquoi faire?
- Il méritait d'avoir une meilleur vie que de me suivre dans ma déchéance, j'imagine... De toute façon, il me suivait même pas volontairement. Par habitude, au mieux. C'est juste un énième Pokémon volé.
Je hausse les épaules pour à peu près la quarantième fois cette nuit, même si cette fois se noie un peu sous le poids du vêtement posé dessus.
- Volé à qui?
- A... enfin, pas une personne en particulier. C'est long à expliquer.
- Au cas où t'as pas remarqué, on a encore toute la nuit.
Il se dandine un peu, mal à l'aise, avant de soupirer.
- Pendant la construction de la route, ils ont dérangé beaucoup de Pokémons. Ceux qui revenaient sans cesse à la recherche de leur territoire, ils les capturaient. Et probablement d'autres en bonus, aussi... Alors on les a "libérés". Et distribués parmi les nouveaux sbires. J'ai reçu un Mascaïman. J'ai reçu d'autres Pokémons, pendant le temps que j'ai passé là bas, mais c'est le seul qui est resté avec moi jusqu'au bout. Je lui avais même donné un nom. On était pas censés avoir le droit. C'est ma seule amie là-bas qui a eu l'idée. Je me demande ce qu'elle est devenue. Elle est partie bien avant moi. Elle voulait devenir Dresseuse et explorer le monde avec un Pokémon qu'elle a vraiment, authentiquement sauvé, lui. Douée comme elle est, elle doit en être à la Ligue, depuis le temps... Et moi, je vis dans un train abandonné. Pas la même catégorie de réussite dans la vie.
Si il y a bien un truc que j'ai appris pendant cette nuit, c'est que ce gars est capable de décrocher une médaille olympique en dépression clinique.
- C'est pour lui que t'es revenu là? Ton Crocorible.
- Peut-être. Je devrais le laisser tranquille, mais...
- Il te manque.
- ... Oui.
Il a murmuré ça comme si il avouait un meurtre.

§

- Qu'est-ce que tu vas faire ensuite, du coup?
Silence, et cet air de honte absolue peint sur son visage.
- Je sais pas.
- Y'a pas une bande d'anciens sbires, à Port-Yoneuve ou je sais plus où?
- Si... comment tu sais?
- Ma mère a eu une proposition d'emploi pour la construction d'un bâtiment annexe, pour eux. Elle l'a refusée, mais comme je suis son confident pour absolument tout, apparemment... Pourquoi tu les rejoins pas?
- Je sais pas, il répète, un peu sur la défensive. J'ai peur. Probablement. Je sais même pas ce qui m'attend, si je me fais arrêter! Pourquoi t'essaies de m'aider?
- Ca, ça serai ironique de ma part. Je suis même pas fichu de m'aider tout seul. Ou d'avoir la moindre idée de ce que je fais de ma vie, à part poursuivre un Mascaïman rebelle.
- T'as pas... envie de faire un truc en particulier?
- Je sais ce dont j'ai pas envie, mais ce que je veux faire... Et toi?
- J'aurais aimé être un Ranger, il murmure, rêveur. J'aurais aimé... protéger la nature et les Pokémons. Et demander aux enfants qui se cachent dans la forêt pourquoi ils ne veulent pas rentrer chez eux.
- C'est cool, comme projet.
- Projet? Comment tu veux que des écoles connues pour leur sélectivité acceptent un ancien membre de la Team Plasma qui vit dans un putain de train?
- Presque sûr que "savoir vivre dans la nature" est une compétence que t'as de bien plus développée que la plupart des fils à maman qui vont là dedans...
Il ne répond pas. Il laisse un silence douloureux s'étendre encore une fois.
- Elle travaille dans quoi, ta mère, pour avoir reçu une proposition d'emploi de construction?
- Archéologie. Vaguement. Les gens la recrutent pour qu'elle vérifie l'absence de sites archéologiques sous ce qu'ils construisent.
- Oh. Ca a l'air intéressant.
- Plus que moi, apparemment. J'ai passé ma vie à déménager à peu près une fois par an pour aller de chantier en chantier, et elle passe ses journées à se plaindre que si je faisais plus d'efforts, j'aurais le même genre de position qu'elle, aujourd'hui.
- Ta mère aussi, elle a l'air joyeuse.
- Elle m'a pas encore forcé à rejoindre une organisation criminelle, mais c'est un standard assez bas.

§

Je somnole. Je suis épuisé, et plus aussi transi que tout à l'heure. La tempête a un peu diminué, mais toujours pas de quoi sortir - de toute façon, il a intérêt à me porter tout seul si il veut obtenir quoi que ce soit de moi maintenant. Je veux juste dormir.
Crissement de griffes sur le sable. Elles m'atteignent difficilement, au milieu de ma semi-inconscience. Je grogne un peu. Laissez moi tranquille...
Elles insistent, gagnent en puissance.
- Viridian...
Je fourre ma tête dans mes bras en geignant.
- Viridian!
La note d'excitation dans la voix de mon allié du jour finit par me tirer de ma torpeur. Je rouvre les yeux.
Les cligne en refusant de voir ce que j'aperçois au bout du couloir, trottinant à ma rencontre avec une énergie à mille lieux de tous les scénarios catastrophes que je me suis imaginé cette nuit.
- Non... je murmure, avec un sourire grandissant.
Si, que sa présence affirme quand il se jette à ma rencontre, et que je l'attrape dans mes bras, en oubliant pour un moment mes douleurs multiples et ma fatigue. Cet idiot de Mascaïman est revenu. Je n'y croyais même plus. Il se frotte contre moi comme si il se prenait pour un Ponchiot retrouvant sa mère.
- Chiffon débile, je murmure en le serrant contre moi.
- Chiffon?
Je tourne la tête pour tomber nez à nez avec un Jasper qui sourit autant que moi, avec un bonus lueur amusée dans les yeux. Je marmonne et m'embrouille, un peu gêné.
- Oui, c'est... Enfin, quand je l'ai adopté, il avait un chiffon autour du museau, et enfin...
- Je me moque pas, il réplique, souriant. C'est mignon.
Moui. Ca se voit que tu te moques. Y'a de quoi de toute façon, c'est le seul être que j'ai jamais nommé de ma vie, et j'ai vraiment pas des capacités incroyables dans ce domaine.
Il s'interrompt brutalement pour se retourner.
Le sable crisse de nouveau, sous les pas d'une créature qui n'a absolument pas le même gabarit. Je l'imite et je suis son regard. Un couinement s'échappe de ma gorge. Le monstre apparu dans le couloir ne m'adresse qu'un bref instant d'attention avant de se tourner vers l'autre humain en présence, qui s'est figé comme si il venait de voir un fantôme.
Et, je comprends en le voyant sauter à son cou en hurlant son nom, c'est ce qu'il vient de voir. Je les fixe la mâchoire tombant un peu, ahuri et refusant d'y croire, pour la deuxième fois en à peu près cinq minutes. Le Mascaïman dans mes bras, lui, n'a pas l'air de prêter une grande inquiétude à la présence du plus grand Crocorible que j'ai vu de ma vie à quelques mètres de lui - et de toute évidence, pourquoi serait-il effrayé par son compagnon de parcours pour venir jusqu'ici.
- C'est... lui? Ton Pokémon?
Il m'aurait probablement répondu un "oui, c'est bien lui" extrêmement touchant et émouvant si il n'était pas occupé à s'étouffer dans ses sanglots en le serrant dans ses bras tremblants. Merde, j'aurais presque envie de pleurer aussi rien qu'à les voir. Je sentirais presque une petite larme touchée dévaler ma joue si j'étais pas suffisamment distrait par tous les trucs cassés dans mon corps qui pleurent de leur propre côté de la présence du Mascaïman dans mes bras. Et si ma joue n'était pas, accessoirement, un champ de bataille à peine dompté par le mouchoir de désinfectant auquel j'ai eu droit il y a déjà un moment maintenant.
A la place, je souris juste jusqu'aux oreilles de l'air le plus niais que j'ai jamais eu de ma vie.
Pas sûr que ça m'arrive souvent, d'être aussi sincèrement heureux pour un type que j'ai rencontré douze heures auparavant. D'être sincèrement heureux pour quelqu'un d'autre tout court, en fait. Mais bon, faudrai être le pire insensible du monde pour ne pas être un minimum touché. Non? Rassurez moi et dites moi que si. J'ai envie de me sentir niais.
Je serre mon propre Pokémon contre ma poitrine, en attendant qu'ils achèvent leurs retrouvailles particulièrement humides.
- T'es meilleur pour les noms que moi, je lance une fois qu'il est plus calme.
Il sourit au milieu de ses larmes.
- C'est pas moi qui l'ai choisi, mais merci.
- Quand même, Méléagan, c'est classe. T'as eu un bon goût en l'acceptant alors.
Mascaïman descend de mes bras pour aller examiner l'autre humain de la pièce, ce gars chelou qu'il a croisé y'a pas longtemps et lui a volé sa cannette vide. Je le laisse faire - de toute façon, je suis largement incapable de le suivre à son rythme. Il le renifle et renifle son sac quand il revient le chercher, l'air d'avoir une idée en tête. Je l'observe faire avec une suspicion grandissant lentement, jusqu'à ce qu'il m'adresse le sourire le plus sûr de lui que j'ai jamais vu sur son visage en se tournant vers moi.
- Tu viens?
Je fronce les sourcils. Il ne me laisse même pas poser la question évidente que je m'apprête à lâcher, et pointe le Crocorible du menton.
- J'te ramène chez toi, il affirme, avec les plus littérales étoiles dans ses yeux que j'ai jamais vu de ma vie.