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Festival de Nicéphore



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» Auteur : Nicéphore - Voir le profil
» Créé le 27/07/2020 à 15:07
» Dernière mise à jour le 27/07/2020 à 15:07

» Mots-clés :   Alola   Slice of life

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Chapitre 1
Un claquement élastique et bref résonne entre les cinq murs sombres. Suit une sorte de soupir de papier : effectivement, c’est un paquet de feuilles qui est tombé, à plat sur le sol, seulement relié par le rabat bleu ciel de sa chemise protectrice. La fiche du dessus, gonflée d’air par la chute, émet donc ce petit froissement de retour au calme en se reposant à nouveau, doucement, sur sa voisine du dessous.

Joshua n’a pas regardé la scène, qui se déroulait à côté de son lit, mais c’est son bras qui a lâché le dossier, bien droit, bien à la verticale, pour que l’ensemble tombe de cette façon. C’était son idée pour émettre un claquement élastique et bref, net, qui imposerait un point final à sa dernière activité.

Cela fait, il ramène donc son bras vers lui, ses genoux aussi, et forme ainsi avec son long corps une petite boule molle de dépit. Le dos arrondi contre le mur bleu au travers de son oreiller, les pieds s’enfonçant dans la couette, il tourne la tête sur le côté, à droite, vers la longue vitre en triptyque de fenêtres qui court tout au long du mur de sa chambre.

Son regard gris rencontre un ciel crépusculaire, sous lequel les maisons avoisinantes deviennent trop sombres pour être nettement distinguées. Il fait encore plutôt clair, d’un clair teinté de rose et ombré d’azur marine. En somme, le ciel et ses nuages ont conspiré avec le soleil pour que l’on ne voie plus qu’eux, alors que le voile du soir dérobe à la vue les ruelles de Malié. Malgré la fourberie de la démarche, le spectacle vaut quand même la peine… Mais plus qu’un ballet de teintes abstraites entre les volutes des nuages, le garçon aurait aimé observer les gens qui passent. C’est plus actif, plus intéressant, c’est plus humain, et ça s’impose moins.

En fait, Joshua s’ennuie.

Au point de se dire que les nuages friment et que le ciel veut être vu. Bref, cela ne sera plus un problème s’il s’acclimate à l’obscurité du bas du décor. Il plisse les yeux, se hausse imperceptiblement sur son lit afin de mieux cadrer la rue en contrebas. Comme il n’est qu’au premier étage, c’est assez facile, mais le morceau de toit qui s’élance de la bâtisse au niveau du plancher du premier lui bloque un peu la vue. Ce n’est pas grave, puisqu’il en a un large pan, de l’avenue, ainsi qu’une partie de l’allée d’en face. À présent, il perçoit les pavés sous l’obscurité. Son corps se tend ; ses doigts, qui n’ont pas lâché le stylo qu’il utilisait auparavant, triturent mécaniquement l’objet, en font rouler le capuchon.

La rue est vide. Une poignée de fenêtres sont allumées, mais on n’y perçoit rien. Après quelques minutes, les lampadaires s’éclairent, d’un coup, par grappes de deux globes jaunes reliés d’un même poteau. Le rose s’évapore des nuages, le bleu s’étend comme une tache d’encre. Une ou deux personnes passent, et c’est tout.

Joshua en revient à sa chambre, il redresse son dos, détend les jambes. S’il peut s’appliquer longtemps sur une tâche précise, celle de simplement regarder une rue qui ne bouge plus est trop contemplative pour qu’il y consacre plus d’une poignée de minutes. Maintenant, la pièce est envahie d’ombres bleutées, et l’interrupteur de la lumière est à deux murs d’ici.

Trop loin.

Comme vidé de son énergie, l’adolescent laisse ses pensées faire les cent pas dans la chambre sans lui. Il n’aime pas s’ennuyer. Il déteste s’ennuyer, même. C’est presque la pire chose qui puisse arriver dans sa vie quotidienne. D’où le dossier, resté par terre, et toutes ses congénères liasses de feuilles griffonnées de projets, d’idées, de questions, d’inventions, de trucs, comme dit Thomas. De longues idées, définies de toutes parts par tous les détails adaptés, des idées qu’il peut travailler des mois sans se lasser, une à une, avec toute l’obstination et la précision dont un garçon de treize ans peut faire preuve.

En fait, c’est de moins en moins vrai.

Reposant le stylo sur son étagère de chevet (simplement pour faire quelque chose de son bras), il promène de grands yeux remplis d’ombres sur son environnement clos. On n’y voit plus grand-chose, mais les vagues formes qui se découpent dans les dernières lueurs du soir lui sont assez familières pour qu’il les reconnaisse d’un bref regard. Et elles sont nombreuses : du bureau, adossé au mur d’en face, aux étagères de tailles variables qui occupent divers coins et pans de la chambre, tout est chargé d’un fantastique bazar organisé. Il a entreposé là au fil du temps toutes ses idées réalisées, entre de vieux jouets à l’odeur de poussière et de bons souvenirs, et des paquets de notes soigneusement arrangés. Tout est à sa place, rien ne dépasse, tout s’aligne en pyramides hétéroclites très raisonnables. Les petites boîtes dans les grandes et les babioles étroites en équilibre calculé sur les plus gros objets.

Au bas de l’étagère bleu pastel, juste en face de son lit, c’est la file des classeurs et pochettes de couleur : tous ses dossiers de projets, dans l’ordre chronologique. Avant, ils étaient dans l’ordre des couleurs de l’arc-en-ciel, mais il n’y avait pas assez de documents pour toutes les couleurs, et à partir du moment où cela a été le cas, il a fallu les réorganiser autrement pour pouvoir mieux s’y retrouver. À chaque nouvelle idée, Joshua passe à la papeterie acheter une nouvelle pochette, où il écrit un titre avec application, mais maladresse, et il la remplit peu à peu de feuilles noires de schémas et de notes. Comme la place s’est mise à manquer avec le temps, quelques autres suivis d’affaires s’amoncellent au bas de sa petite étagère-table de nuit, celle en osier.

Son regard arrive justement sur celle-ci, où gît, entre le radio-réveil-digital-qui-fait-adulte et une Pokéball délaissée, son téléphone portable.

C’est ce genre de moments, de plus en plus fréquents, où il aurait presque besoin de parler à quelqu’un. Mais seulement presque, et puis, de toute façon, à qui ? Il saisit l’appareil et l’allume, pour regarder. Pas très utile, il le sait. Le mieux placé serait Lelio, son copain de l’école, et à part lui, il n’a pas grand-monde. Son grand frère n’est pas là ce soir. Dans son répertoire, à côté de son ami, il n’y a que les parents, quelques cousins, un ou deux camarades qu’il ne connaît pas bien. Son doigt effleure le prénom de Lelio.

Leur dernière conversation, fraîche d’il y a deux jours, était un peu moins plate que d’habitude : le garçon n’aime pas tellement les discussions textuelles, mais cette fois, ils avaient reparlé d’un film qu’ils adoraient tous les deux, et ça lui avait fait du bien. Lelio est vraiment un copain de l’école : en-dehors, le petit brun aux traits fins de Hoenn ne lui manque pas plus que ça, c’est d’ailleurs souvent lui qui lance les premiers SMS. Même un peu trop souvent au goût de Joshua…

Si leur dernier échange a été sympathique, celui-ci saura peut-être lui remonter un peu le moral ! Quoi de mieux à faire, de toute façon ? Après un bref regard à la pochette gisant au pied du lit, vite détourné, il se décide à engager ses ongles trop longs sur les touches.

<< Joshua >> Salut Lelio.

Lelio ne possède son téléphone que depuis quelques mois, et son amour absolu pour l’appareil dernier cri est toujours d’actualité. Aussi, son portable n’est jamais loin de lui, et en-dehors des heures où ses parents le lui reprennent, on ne peut s’attendre qu’à le voir répliquer au quart de tour.

<< Lelio >> Salut!!!
<< Lelio >> Ça va??

Joshua n’aime pas ces débuts de conversation-là, mais il l’a un peu cherché ; et la ponctuation de son ami l’agace légèrement, mais ce n’est pas faute d’avoir essayé de lui dire.

Donc normalement, il aurait dû répondre que ça allait, et lui, et l’autre que ça allait très bien, merci, puis la difficulté aurait été de lancer un sujet de manière naturelle.

<< Joshua >> En fait, non, ça ne va pas très bien.

Il préfère mettre des points nets à la fin de ses phrases.

<< Lelio >> Ah?? Pourquoi???

Pas facile comme question, mais c’est pour ça qu’il a entamé cet échange… mais finalement, comment expliquer qu’il s’ennuie, que ses projets l’ennuient, qu’il a peur que ses projets l’ennuient, qu’il a peur de ne plus rien trouver à faire, et peur de toute cette vie à remplir devant lui sans jamais s’ennuyer ? Mais que ça le gêne un peu de se dire ça parce que tous les adultes trouvent quand même quelque chose à faire et semblent tous occupés tout le temps sans problème ? Est-ce qu’il y arrivera, lui ? Comment ? Pourquoi ?

Il n’a pas l’habitude de se confier à Lelio. Histoire de réfléchir, il lance doucement le téléphone aux interrogations allumées un peu plus loin sur son couchage, ramène encore ses genoux contre lui et s’appuie contre le mur de droite, la tête reposant contre le rebord froid et saillant de la fenêtre. Le matelas est profond, la couette et la pénombre l’enveloppent avec douceur. Il dormirait bien maintenant, même s’il n’est que neuf heures et demie et que ce serait peu rentabiliser la soirée. Il n’a pas envie de lire, ni d’écouter de musique, et encore moins de continuer cette conversation par texto.

Deux coups résonnent à sa porte, qui s’ouvre sans attendre de réponse ; il se redresse. C’est Thomas qui fait comme ça. Effectivement, son frère passe déjà une tête prudente par l’entrebâillement, et informé par la lumière du téléphone que Joshua ne dort pas, s’exclame :

« Ben alors, t’es dans le noir ?
— Oui…! J’avais la flemme d’allumer. »

Pris au dépourvu, il a répondu sur un ton un peu trop paniqué à son goût. Avec un sourire, Tom pousse la porte pour presser l’interrupteur.

« Ouh ! fait le plus jeune avec le réflexe de se cacher les yeux. Préviens !
— Non, justement ! »

La lumière, auparavant trop blanche au goût de l’occupant de la chambre, s’est retrouvée quelques années plus tôt affublée d’un filtre jaune-orangé suspendu au plafond par deux bouts de ficelle, afin de rendre l’éclairage plus accueillant. L’adolescent, les muscles détendus, retrouve difficilement une position assise tout en se frottant les yeux.

« Tu n’étais pas chez Florian ? s’enquiert-il.
— Non, il est pas bien, il a annulé la répète. Je suis juste passé chez une copine lui rendre un truc, je reste ici ce soir. »

Thomas dit toujours "un copain" et "une copine", et ne donne les noms que de ceux qu’il va voir le plus souvent. On ne sait donc pas combien il a de copains et de copines, mais à priori, beaucoup.

Comparativement à Joshua qui est déjà grand pour son âge, l’aîné de la famille, à dix-neuf ans, ne dépassera jamais le mètre soixante-dix. À défaut de centimètres supplémentaires, il a la chance de disposer d’un visage avenant, expressif, fait de larges sourcils, d’yeux rieurs et d’une mâchoire carrée. Il se débrouille aussi mieux que son frère pour donner de l’allure à ses cheveux d’une blondeur un peu maigre : ébouriffés sous un bandeau noué contre son front, ils auraient presque l’air d’avoir un peu de volume. Ceux de Joshua, dans leur chemin incurvé jusqu’à ses épaules, laissent facilement à voir qu’ils sont mieux maintenus en place par la courbure différente de chaque mèche filasse que par une hypothétique épaisseur. Mais il ne les aime pas courts, ça lui donne un visage trop dur.

Bref, pour l’heure, pas de foulard chez le frère : ses mèches les plus longues balaient donc son large front alors qu’il jette un regard à la pochette sur le sol.

« Tout va bien ? »

Et il est perspicace.

« Pas trop, soupire Joshua en laissant retomber ses jambes en tailleur.
— Pas d’inspi ? »

Thomas franchit le pas de la porte, et repousse celle-ci derrière lui pour venir ramasser le dossier abandonné sur le parquet.

« C’est le truc de la Jostine ?
— Oui. Et oui, non, c’est un peu ça pour l’inspi.
— T’en étais où ? demande l’aîné en posant la chemise sur le lit et en se ménageant une place à côté pour s’asseoir.
— Comme j’avais défini les lois sur l’éducation dans le pays et que c’était géré par un seul groupe à l’échelle nationale, j’étais en train d’écrire les emplois du temps des élèves de cycle secondaire Jostiniens.
— Ah oui, tu m’avais montré le truc sur les écoles. Et du coup tu bloques là ?
— Ouais… (Joshua s’efforce plus ou moins de ne pas regarder son interlocuteur, plutôt la porte d’où il est entré)… je crois que j’en ai juste un peu marre du projet.
— Déjà ? Ça fait pas longtemps que tu l’as, celui-là.
— Oui, déjà, c’est le problème.
— C’était peut-être trop ambitieux de vouloir imaginer un pays tout entier, non ? Tu ne sais pas trop par où commencer ? »

Si le plus jeune pourrait se vexer d’un ton semblable de la part de n’importe qui, ou s’agacer que l’on essaie de parler à sa place, le timbre doux et encourageant qu’adopte Tom quand il s’adresse à lui parvient à lui faire oublier tout ce qu’il pourrait lui reprocher. Maintenant, il entame un léger balancement nerveux de sa droite sur sa gauche. Il n’a pas parlé à son frère de ses questionnements récents ou de sa crainte de l’ennui.

« C’est pas tellement ça, non, je n’ai pas eu de problème à démarrer… mais ça doit juste être que cette idée ne m’emballe pas, c’est tout. Et comme j’en ai pas d’autres pour le moment, ben, je suis un peu coincé. »

Sa voix s’étrangle un peu dans sa gorge, il s’empresse de la détendre d’un toussotement discret. Qui, tout discret soit-il, lui résonne sous le crâne tout le temps que dure le silence de son frère, teintant au passage ses joues de rouge. Cette fausse légèreté lui semble terriblement maladroite.

« Coincé ? réfléchit Thomas. J’irais pas jusque-là. Tu passes ton temps libre le nez dans tes feuilles…
— Pas que, au violon aussi, riposte l’autre avec trop de véhémence pour le contexte présent.
— Oui, même… je veux dire, c’est génial de te voir t’impliquer autant dans tous ces projets, et de voir le résultat que ça donne (Joshua le voit lancer un regard vers un récent sous-marin miniature à propulsion mécanique, qu’il affectionne particulièrement), mais tu ne feras pas forcément ça toute ta vie, c’est normal, tous les goûts nous passent. Je pense surtout que tu pourrais essayer d’autres trucs.
— Quoi par exemple ? » demande l’adolescent après un temps de réflexion — et après avoir tiqué sur l’avant-dernière phrase.

La réflexion était celle-ci : il se sait assez peu ouvert au monde extérieur, bien au chaud dans le confort familier de sa chambre, ses pochettes et ses projets, et il aurait été réticent à développer un tel sujet si Thomas n’avait pas présenté cela, inconsciemment, comme une potentielle solution à ses préoccupations actuelles. L’a-t-il percé à jour le plus naturellement du monde, ou simplement visé dans le mille sans le savoir ? Les deux sont déjà arrivés souvent.

« Oulà, je sais pas ! T’utilises pas trop ton vélo, tu pourrais te balader aux alentours de la ville comme ça, par exemple ? Passer plus de temps avec ta Chlorobule ? (Joshua détourne encore un peu plus le regard, mais l’autre ne s’en aperçoit pas) Hmm, ouais, cuisiner, dessiner, regarder plus de films… j’ai vu qu’il y avait des ateliers lecture à la bibli du quartier… ah, le centre culturel, ils proposent pas mal d’activités, non ?
— Je sais pas, surtout du sport…
— Il y a des sports sympa, même quand on n’aime pas trop ça. Tiens, j’ai un pote prof d’escalade qui m’avait proposé de passer essayer un de ces jours, ça te dirait pas ?
— Je ne sais pas trop.
— Tu sais pas grand-chose, rigole l’aîné. Alors que si, ça pourrait te faire du bien, et il faut essayer pour savoir. (Il observe un léger silence, un tout aussi léger sourire aux lèvres, puis :) Sinon, les combats de Pokémon…
— Pff, non ! sourit Joshua devant la taquinerie.
— Ah non par contre, y’a pas que les matchs qui impliquent des Pokémon. Tiens, le Village Festival, je t’en avais un peu parlé ? Ça fait longtemps que je n’en ai pas entendu de nouvelles mais je crois que ça existe encore.
— Ah oui, tu m’en avais parlé, oui. »

Une once d’intérêt s’éveille dans sa voix.

« Le but du truc au départ, c’était justement de ne pas faire intervenir les combats mais de développer d’autres manières les liens avec ses Pokémon, et de rencontrer du monde au passage.
— Mais ça n’a pas trop marché ça, si ?
— Mouais, je ne sais pas, je n’ai pas continué d’y aller très longtemps, en tous cas. C’est vrai qu’on ne sait pas vraiment ce que c’est devenu, ça fait quelques années déjà. Il y a eu une période de folie puis c’est retombé…
— Je me renseignerai.
— Et pas sur l’escalade ? raille Thomas en se penchant pour le gratifier d’un coup de coude.
— Euh, là comme ça, ça me dit moyenn…
— Oups, je crois que j’ai écrasé ton téléphone. »

Joshua récupère l’objet sous le poignet relevé se son aîné, et consulte l’écran par réflexe. En quinze minutes, Lelio a eu le temps de lui laisser une demi-douzaine de messages, tous plus exclamatifs les uns que les autres. En faisant taire d’une pression cette vague de sollicitations, le garçon repose l’appareil sur son étagère de chevet.

« Lelio me harcèle, répond-t-il au regard curieux de son frère. Je lui écrirai plus tard.
— Je vais te laisser, de toute façon, un peu de repos ne me fera pas de mal, déclare l’autre en s’étirant, puis se levant. Si ça te dit, on regardera ton violon demain, j’ai piqué un nouveau médiator chez Jennifer, je vais pouvoir t’accompagner.
— D’accord ! C’est qui, Jennifer ? ajoute-t-il alors que Thomas ouvrait la porte.
— Une copine ! Bonne nuit !
— Bonne nuit ! »

Le grincement familier du battant s’évanouit alors que la poignée tourne doucement, maniée de l’autre côté par une main précautionneuse. Joshua sourit. Il n’a rencontré le copain Florian qu’une ou deux fois en tout, mais il le remercie intérieurement d’être tombé assez malade pour annuler la répétition et laisser Thomas rentrer ce soir. Il n’y a rien de pire que se morfondre en essayant de dormir, et cette discussion, si elle lui a surtout laissé une meilleure humeur, a su lui apporter un peu d’espoir : si toutes les propositions de son frère ne l’emballent pas forcément, il a sans doute raison, il y a des choses à faire en-dehors de combats et en-dehors des projets.

C’est facile à penser. Il faudra qu’il ait le courage d’essayer, essayer de lui-même, pour une fois. Mais peut-être pas l’escalade.

Il hésite quelques instants à répondre à Lelio, se contente d’un simple « On en parle demain » et s’allonge pour de bon sur sa couette. Demain, lundi, l’attendent une conversation avec son ami, deux heures de cours de dressage, une séance de violon et quelques recherches personnelles. Aller dormir dès vingt-deux heures n’est peut-être pas une si mauvaise idée.