Scène classique au fin fond du Bourg-Palette. Trois gamins sont venus dans le laboratoire du Professeur Chen au jour et à l’heure dites pour y recevoir leur premier Pokémon afin d’effectuer leur voyage Pokémon.
Dans l’arrière salle, un jeune homme préparait les trois Pokémon en les brossant une dernière fois. Il s’attardait sur Bulbizarre.
- Bulbizarre, Bulbizarre… Le plus facile à entraîner, avec son type Plante secondé par son type Poison qui lui donne une bonne défense, son caractère facile et ses bonnes attaques. Celui qui évolue le plus rapidement d’ailleurs, et qui est le plus fiable sur la durée…
Le jeune homme aux cheveux roux et aux grands yeux verts observa le Pokémon Plante aux grands yeux rouges. Il inspira.
- Tu ferais un super premier Pokémon pour moi… Ou bien Salamèche… difficile à entraîner, mais puissant, robuste, fiable. Et en évoluant, il gagne des ailes et donc plein de nouvelles possibilités en combat…
Il se releva après avoir fini de préparer Salamèche et regarda Carapuce.
- … mais le plus équilibré c’est Carapuce. Il est axé sur la défense, et le type Eau, c’est le plus polyvalent…
Le Pokémon apprécia que le jeune homme insiste bien sur la carapace. Il inspira. Le professeur Chen apparut dans l’encadrement de la porte.
- Il va être temps, Billy.
- Je sais, je sais… Hmph…
Billy fit rentrer les trois Pokémon dans leurs Pokéballs et poussa la desserte à roulettes jusqu’à la pièce centrale et publique du laboratoire. Les trois dresseurs attendaient, et le jeune homme en blouse blanche apporta les trois Pokémon de départ à portée des futurs dresseurs. Les familles étaient présentes, enjouées.
- Nos enfants vont devenir des maîtres Pokémon !
- N’est-ce pas un jour glorieux pour le Bourg Palette ?
Billy resta impassible. Le professeur Chen énonça son discours.
- Bien ! Nous allons procéder à la remise de votre premier Pokémon, de votre Pokédex et de vos Pokéballs. Je compte notamment sur vous pour capturer le plus de Pokémon possibles afin de récupérer le plus de nouvelles données pour mes recherches…
Billy leva les yeux au ciel. C’était le but initial de cette « remise » de Pokémon, former de futurs assistants au professeur Chen. Du haut de ses treize ans, il savait parfaitement que la plupart des dresseurs voulaient juste devenir balaises, récupérer des badges et aller jusqu’à la Ligue Pokémon. S’ils attrapaient plus de cinq Pokémon au cours de leur voyage, c’était déjà un miracle. Le Professeur récupérait plus de données de la part d’observateurs extérieurs que des envois semestriels de dresseurs débutants dans la nature, ce qui serait pourtant un moyen plus profitable de récupérer des données fraîches.
Mais le professeur se prêtait à ce petit jeu sans sourciller. Il subissait une pression énorme des parents desdits dresseurs débutants. Y compris de ceux de Billy. Les trois enfants choisirent leurs Pokémon…
- Je prends Bulbizarre !
- Ah non !! Je le voulais ! Et pourquoi c’était toi en premier !
- Parce que le professeur m’a demandé le premier !
- Eh bah moi je veux Carapuce !
- Ah non, je veux pas Salamèche, il est trop nul !
Le professeur s’efforçait de rester neutre. Les parents observaient, béats, leurs enfants lutter pour leur droit au starter Pokémon le plus performant. Le professeur grisonnant avait cependant des difficultés à supporter les caprices des apprentis dresseurs du Bourg Palette et levait les yeux en prenant son mal en patience. Billy allait partir, absolument dégoûté, lorsque…
- Si tu ouvres la Pokéball il est à toi tu peux plus refuser !
- Mais non arrête je veux pas de ce lézard débile !
- Bon bah moi je prends Carapuce hein…
- Mais non, maiiiis !!!
Les deux gamins de dix ans se disputaient la Pokéball. Billy les regardait avec dégoût. Il ne put s’empêcher de grommeler.
- On joue pas avec les Pokéballs, c’est pas des jouets, y’a un vrai Pokémon dedans !
Les parents haussèrent les sourcils et regardaient Billy qui avait daigné s’exprimer. Chen se tourna vers Billy en lui faisant signe de se taire, que ça ne servait à rien de dire quoi que ce soit, mais Billy le regarda en fronçant les sourcils.
- On n’a pas d’ordres à recevoir d’un gamin qui n’a pas le droit d’avoir de Pokémon ! cria un des gamins.
- Ouais, Billy, c’est tout juste si tu as le droit de bosser pour le professeur, alors baisse d’un ton !
- Ouais, laisse les vrais dresseurs dresser des Pokémon !
Billy allait répondre quelque chose mais il vit les regards méprisants des adultes du bourg au fond de la salle et préféra tourner les talons pour se rendre dans les tréfonds du laboratoire en fulminant. Le professeur Chen inspira et observa les enfants continuer à se disputer la Pokéball.L’alarme résonnait dans tout le bâtiment. Dans l’appartement soigneusement mal rangé, le jeune homme se leva, décoiffé et dans le coltard.
- Mmmmm…
Il passa devant Piafabec qui l’observa alors qu’il se dirigeait vers la salle de bains.
Il prit sa douche en sifflotant alors que l’alarme résonnait de plus belle.
Une fois habillé, il prit le temps de se faire un thé qu’il agrémenta d’une lampée de rhum alors que l’alarme, similaire à une alarme de sous-marin, avec la lumière et la grosse sirène assourdissante, continuait de bousiller les tympans de tout l’immeuble. Un Drackhaus dormait paisiblement derrière lui, visiblement peu importuné par le bruit, la carapace fermée.
Il prit même la peine d’observer ses mails en buvant son thé, veillé par son Piafabec posé sur son épaule et son Strassie qui lévitait autour de lui en tournoyant.
Finalement il prit la direction des ascenseurs de sa suite privée dans l’immeuble, vêtu d’un pull à col roulé noir et d’un pantalon cargo de la même couleur. Ses cheveux roux étaient en permanence décoiffés et cachaient à peine son regard taciturne. Passant face à une fenêtre donnant sur un balcon, il sembla ignorer totalement qu’un Clamiral s’y trouvait et tentait d’entrer, paraissant tout à fait désespéré.
L’alarme résonnait encore plus dans l’ascenseur, mais il semblait plus amusé par la rythmique de la sonnerie qu’autre chose.
Il traversa les bureaux, forcément désertés au vu du bruit, sauf une pièce où il semblait y avoir du monde. Il salua en passant l’homme de ménage accompagné de son Chinchidou qui se tenait les oreilles, endolori. C’était un grand type basané portant un bleu de travail des plus classiques, le cheveu noir et ras, la moustache fournie, l’air profondément antipathique, se bouchant une oreille.
- Comment va, Farouk ? cria le jeune homme par-dessus la tonitruante sirène.
- Hmph…
Le jeune homme entra dans la pièce où son supérieur présidait une séance. L’homme en chemise cravate et aux cheveux frisés, se tenant droit derrière la fin de la longue table de la salle de réunion, lui lança un regard massacrant et appuya sur le bouton pour éteindre l’alarme, ce qui provoqua un soupir de soulagement généralisé des occupants de la pièce.
- Billy… tonna l’homme derrière le bureau, non sans rage.
- Léo ! sourit Billy, avenant à l’excès.
- Quand cette alarme sonne, ça veut dire convocation générale !
- Ca veut pas dire « pointez-vous le plus vite possible ».
- Précisément, si !
- Précisément non, ça donne même pas d’heure précise à laquelle se pointer dooonc…
Billy s’assit à côté de Deandra qui le regarda, fâchée.
- Salut, Dee. Ça va ?
- … Ok, premièrement tu es affreusement en retard…
- Sans déconner, Détective Pikachu… souffla Sherry.
- Deuxièmement tu m’appelles pas « Dee »…
- C’est noté, Dee.
- … Troisièmement…
Elle se tourna vers son supérieur.
- Bordel, Léo, à quoi ça rime de faire sonner cette foutue alarme pendant une demi-heure non-stop sachant pertinemment que Billy arriverait bien à un moment donné et que ça servait à rien de la faire sonner comme ça jusqu’à ce qu’il arrive ???
Hobbes, Sherry, Jasper et Arianne rétorquèrent en brouhaha à la suite devant un Billy affirmatif. Léo leva les yeux au ciel. Une jeune femme à lunettes portant un béret violet observait, interloquée.
- C’est la procédure ! grommela le patron.
Nouveau brouhaha scandalisé. Léo leva les yeux au ciel et réactiva l’alarme pendant dix bonnes secondes.
- AOW !
- Putain ! grommela Billy.
- Mes acou-phèèèèèèneuuuuuh !! geignit Sherry.
- Tchhhh… pesta Arianne, les mains sur les oreilles.
- Ouillouillouille !! grommela Jasper.
- Léo, merde !! cria Deandra.
- Voilà. Vous allez tous vous calmer et on va ENFIN pouvoir commencer la réunion.
- Premier point à l’ordre du jour, revoir cette procédure concernant l’alarme… souffla Hobbes.
Brouhaha d’acquiescement dans les rangs. La jeune femme au béret portant des lunettes observait, interdite, les collègues s’écharper ainsi.
- SILENCE ! Sinon je rallume cette putain d’alarme et vous finissez tous sourdingues ou tarés, encore que pour la deuxième affliction, je pense que j’aurais pas grand-chose à faire !
- Ha, il vous a bien mouchés, là ! sourit Billy.
- Billy, tais-toi… gronda Léo, furibard.
- Non.
- … Je commence en vous présentant enfin et officiellement la recrue qui complète enfin notre équipe, à savoir mademoiselle Monday.
La jeune femme à lunettes salua. Tout le monde la fixa. Billy regarda Léo.
- J’croyais que c’était une étudiante égarée depuis le coup de la semaine dernière.
- Non, c’est une Generation Kid, Billy.
- Elle ressemble à une meuf qui fait la manche dans le métro.
- Billy !
- J’ai raison ou pas ?
Sherry, Deandra et Arianne hochèrent la tête. Hobbes agita la tête. Jasper resta neutre.
- Billy…
- Mes potes sont d’accord.
- Tes quoi ?! ricana Deandra.
- Pardon ?! souffla Hobbes.
- Pfff… lâcha Arianne.
- Je suis votre popote quand vous voulez, monsieur Billy… sourit Sherry en ajustant ses cheveux.
- Je ne vous déteste pas mais de là à… marmonna Jasper, incertain.
Billy regarda le reste de la bande et regarda Léo.
- Ils sont d’accord avec moi.
- Non mais non ! grommela Deandra.
- On n’a pas dit ça ! grommela Hobbes.
- Vous avez nié que j’étais votre pote mais pas qu’elle ressemblait à une meuf qui faisait la manche dans le métro ! Même elle, elle sait que j’ai raison !
Monday regardait Billy en se mordillant les lèvres. Elle regarda Léo qui regarda tout le monde.
- Je… euh… je dois répondre ?! demanda Monday.
- Faites… faites comme vous voulez, on est dans un pays libre… marmonna Léo.
- Oh. Euh… je… ne me soucie pas trop de mon look, dooonc… c’est probablement normal que vous pensiez ça, je suppose, oui !
Billy inspira et allait répondre lorsque Monday continua en regardant toute l’assemblée.
- En tout cas, je suis ravie d’être dans une équipe aussi diverse, avec un homme en surpoids…
Jasper haussa un sourcil.
- … un homme musulman pour gérer les services généraux, votre équipe comporte trois femmes dont une femme de couleur et une femme transgenre…
Arianne, Sherry et Deandra haussèrent un sourcil.
- … et si la rumeur – enfin, si Mademoiselle Sherry – dit vrai, vous et monsieur Léo étiez ensemble, donc je travaille avec et pour un homme homosexuel, je trouve ça très stimulant et très intéressant d’être entourée de profils aussi variés, ça va être très enrichissant sur le plan personnel !
Tout le monde regarda Léo alors que Léo regardait Sherry qui haussa les épaules.
- Vous l’avez faite glander une demi-heure à l’accueil la dernière fois et elle est insupportable, j’ai fait la conversation comme j’ai pu !!
***
CHAPITRE 2 – Flux Migratoire***
- Bon. Reprenons notre sérieux, second point à l’ordre du jour, je vous ai tous conviés ici pour vous annoncer la tenue de notre première mission officielle. Oui, Billy ?
- Donc l’escapade génocide de Genesect avec des tresses c’était pas une mission officielle ?!
Arianne s’avança fermement de trois pas, prête à tuer Billy. Léo lui fit signe. Arianne stoppa, le regard meurtrier, et recula de trois pas, les bras croisés. Monday et Jasper, de l’autre côté de la table, avaient observé la scène, abasourdis.
- Première mission officielle, donc.
- Alors on est d’accord que ça compte pas, ses emplettes au magasin exotique ?
Arianne s’avança de nouveau, stoppée de nouveau par Léo.
- Si tu pouvais ne pas m’interrompre…
- J’veux juste voir si elle veut vraiment me tuer !
- Arianne, merci de ne pas tuer Billy.
- Je veux juste le faire horriblement souffrir.
- C’est également proscrit.
- D’accord, alors je précise simplement qu’une fois, j’ai fait agoniser une victime pendant trois jours entiers avant qu’elle ne meure enfin. C’est tout ce que j’avais à dire.
Silence de mort.
- Rrrrrr !
Tout le monde regarda Sherry qui avait agité une main féline en grondant. Elle regarda tout le monde et haussa les épaules.
- Quoi ? Avouez que c’est excitant !
- Non, résuma Hobbes.
- Oh, vous, hein.
- Quoi, moi ? souffla Hobbes.
- Quoi, quoi ? Une grande femme noire qui adore le cuir violet, ça vous excite pas ?
- Je… suis toujours dans la pièce… gronda Arianne.
- Arianne est une collègue, je n’ai pas à ressentir ça pour elle et vous non plus, si vous continuez, j’en réfère à la RH qui avisera ! souffla Hobbes.
- Qui est la RH ? demanda Monday.
Tout le monde se regarda. Léo inspira.
- C’est moi.
- Le patron joue le rôle de ressources humaines ? Ce n’est pas très logique, enfin…
- On n’a pas besoin de Ressources Humaines, je n’emploie que des Generation Kids, je suis le seul à décider de qui entre et qui sort ici…
- Oui mais pour une situation disciplinaire telle que décrit monsieur Hobbes…
- Je m’en chargerai personnellement, j’ai été choisi pour fonder cette agence sur ce critère précis !
- Quel critère ?!
Billy hocha la tête avec un sourire vipérin.
- J’l’aime bien, tout compte fait. On la garde.
- Je vous ai expliqué précédemment que j’avais été confirmé par le Club Olympe…
- Oui mais ça ne présume absolument pas de vos capacités à gérer un personnel, et encore moins à effectuer des actions telles qu’établir un bulletin de paie ou gérer des CV…
- Le salaire des Generation Kids est réglé par le domaine public comme vous savez, ils ne reçoivent que des primes pour leur participation ici comme vous savez et je viens de vous dire que je n’embaucherai QUE des Generation Kids DONC je n’ai pas besoin de gérer des CV !
Monday hocha la tête.
- Ça reste problématique.
- NON et utilisez de vrais mots, pas des néologismes que vous avez lu sur Twitter, MERCI !
Monday leva les mains, abdiquant face à son patron. Billy hocha la tête.
- C’est bien, on est deux à te faire chier !
- Cette réunion dure depuis beaucoup trop longtemps…
- Passez à l’ordre de mission au lieu de tergiverser, alors, qu’on en finisse… souffla Hobbes.
Tout le monde acquiesça en brouhaha. Léo leva les yeux au ciel. Evoli sauta sur la table.
- SILENCE !
Le Pokémon avait utilisé une attaque Mégaphone qui fit se boucher les oreilles de tout le monde. Il regarda son maître qui acquiesça d’un signe de tête.
- Merci. La baie de Rivamar est actuellement en effervescence suite à la transhumance quinquennale des Pokémon Eau des mers du sud vers les lacs du continent… Oui, Sherry ?
- Mademoiselle Sherry.
- … Oui, Mademoiselle Sherry ?!...
- Ça veut dire quoi, Transurbance Qu’un Canal ?
- Transhumance Quinquennale, une migration qui a lieu tous les cinq ans. Ne m’interrompez pas, s’il vous plait.
- Bah vous avez qu’à utiliser des mots normaux aussi…
Tout le monde sembla acquiescer. Léo toussota.
- Je poursuis. Cette migration est en amorce depuis quelque mois et à chaque…, par Arceus, Sherry, vous cherchez quoi sur votre téléphone ?
- Ça veut dire quoi, « être en amorce » ?
- DEBUTE !
- Eh, on n’a pas tous fait la fac de Lettres, hein !
- Arceus… Bref, cette migration débute et comme à chaque fois elle est sujette à la prédation et au braconnage vu qu’un nombre incalculable d’espèces transite par un seul point.
Sherry inspira lourdement et chercha sur son téléphone. Léo tapa du pied sur le sol.
- Des gens profitent que tous les Pokémon soient au même endroit pour faire de la capture de masse de Pokémon Eau afin de les revendre !
- C’est pas compliqué d’être limpide, hein ! souffla Sherry.
- Elle a pas tort, je m’embrouille, moi, avec ton vocabulaire de princesse… marmonna Deandra.
- Merci, ma belle ! sourit Sherry.
- On… va se calmer sur les compliments sinon je cogne, répondit Deandra.
- Je confirme… soupira Hobbes.
- Oh, une petite gifle n’a jamais tué personne ! pouffa Sherry, excitée.
Léo se pinça l’arête du nez. Monday ouvrit la bouche.
- Mademoiselle Sherry soulève un point important, en utilisant un vocabulaire trop élaboré, vous êtes excluant envers ceux qui auraient eu une éducation moins favorisée, c’est du mépris de classe.
Léo regarda Monday qui haussa les épaules. Jasper grimaça. Hobbes semblait presque embarrassé. Deandra, Sherry et Arianne haussèrent les sourcils. Billy leva les yeux au ciel.
- Oh non, pas une social justice warrior…
- Je… ne fais pas de « mépris de classe » !
- Vous êtes issu d’un environnement bourgeois, je me trompe ?
- Non, non, t’es dans le vrai… marmonna Deandra.
- Toi, tais-toi ! grommela Léo.
- Et pourquoi vous vouvoyez certains employés et pas d’autres, soit vous tutoyez tout le monde, soit vous ne tutoyez personne, sinon c’est du favoritisme !
Arianne, Jasper et Hobbes semblaient d’accord avec ce dernier point.
- Elle a raison. Vouvoie-moi, ça effacera complètement le fait qu’on ait dormi ensemble tous nus ! sourit Billy.
- … Billy et Deandra, vous prenez le premier hélicoptère pour Rivamar. Vous rejoignez l’équipe scientifique qui nous a sollicités.
- Une équipe du professeur Sorbier ? demanda Billy.
- Non, une équipe indépendante.
- Oh.
- Euh, Léo, c’est pas pour foutre la merde, du tout, mais j’ai pas de Pokémon Eau, ça va pas être un peu compliqué pour… la mission dans son ensemble ?
Léo haussa les épaules.
- Je vois pas pourquoi…
- … euh, je sais que je suis pas le couteau le plus affuté du tiroir, mais…
- Je n’ai pas de spécialiste en Pokémon Eau sous la main, de toute façon…
- Hobbes a une équipe plus fonctionnelle…
- Je refuse d’y aller avec ce quadrumane ! grommela Billy. Ça veut dire « Qui a quatre mains ».
- Merci mon chou ! sourit Sherry en tapotant sur l’épaule de Billy qui s’était tourné vers elle pour lui dire.
- Evitez de me toucher quand même… marmonna Billy, agacé.
- Oh, je vois, on est chatouilleux !
- On va dire ça, oui… grimaça Billy.
- Il n’est pas prévu par mon contrat que je parte en mission sauf mandature spéciale… marmonna Hobbes.
- J’ai un Pokémon Eau, je pourrais y aller, moi ! annonça Monday en levant la main.
Billy la regarda.
- T’as quel âge ?
- Vingt ans !
- … Lève plus la main pour parler en public, t’as plus que passé l’âge…
- Pardon !
- Ton équipe n’est absolument pas faite pour ce genre de mission, Monday…
- Ah, non, ne me tutoyez pas, ça fait trop bizarre !! geignit Monday.
- … faudrait savoir !
- C’est une familiarité que je ne vous autorise pas ! Dans les relations hiérarchiques, le mieux en tant que supérieur, c’est de vouvoyer tout le monde !
- Je suis un supérieur hiérarchique complexe !
- … si cette formulation vous convient…
- Et puis vous êtes ma subordonnée, vous n’avez pas à discuter mes méthodes !
- D’accord, d’accord…
Léo regarda Deandra en soufflant, visiblement très, très gavé.
- Deandra, tu…
Deandra hocha la tête, acceptant le tutoiement.
- … as été désignée comme coéquipière officielle de Billy, je te fais confiance sur cette mission. Tu agiras un peu comme un garde du corps !
- Je peux garder mon corps tout seul… souffla Billy.
- Ouh la la… souffla Sherry en s’éventant.
- Il vaut mieux que vous soyez deux, on ne sait jamais, et en tant que Generation Kids et agents de terrain…
- J’ai beaucoup apprécié ce PDF de formation que tu nous as envoyé par mail, d’ailleurs… marmonna Deandra.
- Merci. Bref, l’hélicoptère vous attend, Jasper monitorera la mission depuis sa salle de contrôle…
- Oh ! Oh ! Je pourrais le regarder faire ? demanda Monday en levant de nouveau la main.
Elle regarda Billy qui la jugeait, blasé.
- Pardon… Je pourrais le regarder faire ?
- Non, vous devez régler les détails de votre contrat de travail avec moi ! souffla Hobbes.
- Ah, donc c’est vous qui assurez les fonctions de RH ! sourit Monday.
- Les fonctions chiantes, oui… marmonna Hobbes.
- Hahah ! sourit Billy. Bien fait !
- Ce sont des tâches qui incombent à la masse dirigeante, Billy, des tâches qui veulent dire que je suis ton supérieur.
- Oui, des tâches qui t’aident à compenser le peu que tu as dans le pantalon, quoi ! sourit Billy.
- Arrêtez de parler de tâches et de pantalons… geignit Sherry, en sueur.
- Mais vous pensez qu’à ça ma parole ! grommela Deandra.
- Si vous saviez ! souffla Sherry.
***
Préparation avec Jasper et son Azumarill dans la réserve logistique.
- Dis, Billy, pourquoi t’es aussi relou avec Léo ?
Billy regarda Deandra et haussa les épaules.
- En quoi c’est pertinent pour la mission ?
- … pardon, c’est toi qui dit ça ?
- Tu permets, un Azumarill me met un gilet pare-balles !
Deandra plissa les yeux en observant Billy se faire habiller par le Pokémon. Deandra regarda Jasper qui lui tendait le kevlar.
- … vous pourriez m’aider à le mettre ?
- Je… euh…
- Vous pouvez m’habiller, Jasper, enfin, on est collègues !
- Oh, euh… si je vous touche de façon inappropriée…
- Mais non, voyons…
***
Hélicoptère. Billy et Deandra restaient silencieux, côte à côte.
- Pourquoi t’es aussi relou avec Léo ? demanda Deandra.
Billy regarda Deandra, ne daigna pas répondre et retourna à son téléphone.
- Je t’ai posé une question…
- Y’a trop de bruit avec l’hélice, j’ai pas envie de crier, ça me gonfle.
Deandra leva les yeux au ciel.
***
Héliport de la plateforme d’étude scientifique de Rivamar. Plate-forme pétrolière désaffectée reconvertie en poste d’observation scientifique, elle est la propriété d’un riche mécène qui s’en sert pour conduire des études et en revendre les résultats au plus offrant. Les équipements qui attentaient à l’environnement ont été supprimés et remplacés par des éléments aidant à l’observation des Pokémon tels que des caméras sous-marines ou des appareils de transport subaquatiques.
- Pourquoi t’es relou avec Léo ?
Billy regarda Deandra qui haussa les épaules.
- Ouais, j’veux savoir.
Billy désigna ses oreilles. Deandra plissa les yeux.
- Jasper ne peut pas entendre nos conversations en permanence…
- Les miennes, si, je sais pas éteindre ou rallumer ce truc donc il entend tout.
***
Dans la salle de contrôle, Jasper inspira alors que c’est Lucario qui était aux communications.
- C’est toujours aussi inintéressant… marmonna la femelle.
- Je me doute… souffla le gros bonhomme en tripotant ses tableaux de bord.
Léo entra avec Evoli sur son bras replié.
- Tout se passe bien ?
- Ils sont bien arrivés.
- Bon.
Léo resta là à observer les écrans.
- … je n’ai aucune image tant qu’ils n’utilisent pas le téléphone satellite.
- Oh, je sais, je voulais juste… voir comment ça se passait…
- Je suis à la console centrale et mes Pokémon règlent le reste.
- Hm, je vois ça. Vous me prévenez si… quelque chose tourne mal ?
- Comme la procédure l’exige.
Léo hocha la tête et tourna les talons. Jasper souffla. Charmillon releva la tête.
- Il ne trompe personne.
- Oh, c’est pas comme si ça m’intéressait, leurs histoires… marmonna Jasper.
- Tu en penses quoi de la petite nouvelle ?
Jasper haussa un sourcil.
- Absolument rien, enfin, Charmillon !
- Je demande !
- Elle lui a tapé dans l’œil ! sourit Pikachu.
- Ok, vous arrêtez ça tout de suite ! Je ne pense rien d’elle, je viens à peine de la rencontrer ! grommela Jasper.
- Tu étais bien silencieux à la réunion… on t’a déjà dit d’aller plus vers tes collègues, d’essayer de te faire des amis ! marmonna Azumarill.
- Oh moi leurs délires sur des choses insignifiantes, ça m’ennuie très vite…
- Ca peut se comprendre mais bon quand même, tu dois faire un effort pour sociabiliser ! reprit Pikachu.
Jasper leva les yeux au ciel.
- J’essaierai la prochaine fois.
- J’émets de sérieux doutes, Jasper, je pense que tu vas te défiler… marmonna Darumacho.
- Tu me connais trop bien… soupira Jasper. Disons que vous me suffisez comme fréquentations, je ne sais pas si j’ai besoin… d’amis humains.
Lucario inspira en fermant les yeux. Pikachu et Azumarill haussèrent les « épaules ». Charmillon agita ses antennes, calmement posté sur le crâne de son maître.
Silence dans la salle. Jasper inspira.
- Charmillon, tu peux aller me chercher le concombre coupé, s’il te plait ?
- Oui Jasper ! s’écria Charmillon en voletant jusqu’au garde-manger.
- Jasper, ils y sont ! signala Lucario.
« Bonjour, Billy et Deandra, nous sommes du GKA… »
Jasper hocha la tête. « Ca y est, ils ont établi le contact avec le commanditaire… »
***
- Bonjour, je suis Luke…
Le jeune homme, parka bleue, bonnet rouge, barbe de trois jours, serra la main de Billy et de Deandra.
- Voici Carrie…
Une femme en pull vert et aux cheveux décoiffés salua d’une main.
- Et Erik, qui nous supervise…
Le jeune homme désigna un homme plus âgé en costume.
- Je suis surtout le créateur et le directeur de cette plateforme de recherche. Erik Derriksen, enchanté.
Billy et Deandra saluèrent.
- Euh… c’est moi qui ai fait appel à vous… On… cette plateforme de recherche a pour but d’observer et de reporter les déplacements des Pokémon sur le continent de Sinnoh et de les rapporter aux diverses équipes d’observation sur le terrain… enfin je suppose que vous savez à quoi sert… ce genre de structure…
- Non, annonça platement Deandra.
- Pas vraiment… marmonna Billy. Mes observations de Pokémon aquatiques, je les pratiquais plus ou moins depuis la plage, à dos de Clamiral ou en bathyscaphe transparent que j’empruntais à des sociétés sous couvert de but promotionnel, du coup je suis pas très au fait de tout ça, mais je veux bien que vous m’expliquiez tout.
Luke sembla surpris. Erik inspira.
- Je vous avais bien dit qu’ils avaient monté leur agence y’a pas très longtemps et que du coup ils serviraient à rien.
- Papa… souffla Carrie.
- J’dis ça, j’dis rien. Moi, je finance, juste… Si vous voulez bien m’excuser…
L’homme plus âgé partit. Deandra s’écarta sans le regarder pour le laisser passer.
- Euh… j’ai fait appel à vous en pensant que vous… euh, que vous sauriez tout ça et même que vous pourriez m’apprendre des trucs…
- On sait jamais vraiment tout. Et puis ça demande du temps d’observer les migrations, et du coup vu mon manque de moyens en milieu aquatique…
Luke acquiesça, visiblement ravi de pouvoir papoter.
- Euh, ok. Alors… On se trouve à un point de croisement. Les Pokémon Aquatiques de cet hémisphère passent tous par ce point pour aller se reproduire et pondre dans les trois lacs du continent. Ils se répartissent en trois groupes selon leurs affinités climatiques. Les Pokémon du froid vont au Nord, le lac Savoir, vers Frimapic. Les Pokémon qui apprécient la chaleur vont au Lac Courage. Les Pokémon qui sont plus habitués à un climat tempéré rejoignent le lac Vérité. Voyez, sur cette carte, nous sommes ici, à la croisée des chemins, à l’endroit où la masse migratoire arrivant d’Alola…
- Oui, ils se réunissent dans le creux de l’archipel pour y faire une pause.
- Voilà, ils arrivent en ligne droite et se séparent en fourche, et à cet instant, moins nombreux, ils sont plus vulnérables. On vous a appelés parce que la première fois qu’on a assisté à cette migration… ça a été une catastrophe…
Carrie inspira. Billy et Deandra relevèrent la tête vers elle.
- Des dizaines de chalutiers… les pêcheurs qui viennent en masse, les touristes, les passants… certains regardent juste, d’autres capturent, d’autres affrontent les Pokémon migrants juste pour le challenge, et les chalutiers… ils dressent juste un filet et ils attaquent.
- La première fois on n’a rien pu faire…
Luke semblait contrit. Billy hocha la tête.
- Quand on a su qu’une agence pour la protection des Pokémon se créait…
- Il a même mis son salaire en jeu pour qu’on vous embauche, marmonna Carrie. Mon père ne voulait pas qu’on se donne cette peine. Il a dit que c’était la nature…
- C’est pas la nature ! grommela Luke.
Billy observait l’échange. Deandra se regardait les ongles.
- Les humains qui interviennent dans la vie des Pokémon, c’est pas la nature !
- Inutile de dire qu’on n’est pas dresseurs, sur cette plateforme… marmonna Carrie.
- Je… les Pokémon doivent avoir le droit de migrer en paix, si on est arrivés à modifier nos projets d’urbanisme en fonction des territoires et des migrations des Pokémon, c’est pas pour les embêter quand même dans leurs migrations !
Billy hocha la tête.
- Tu prônes un respect de l’état de nature tout en ne rechignant pas à une intervention humaine quand c’est nécessaire. J’aime cet état d’esprit. Je pense qu’on peut vous aider sans problème. Hein, Dee ?
- Mais arrête de m’appeler « Dee » ! grommela Deandra.
Luke hocha la tête, rassuré. Billy s’assit dans l’ancien siège d’Erik.
- Bon, explique-moi comment tout ça fonctionne.
Deandra inspira. Carrie passa devant elle.
- Je vous fais un café ?
- Un double, bien serré…
Billy s’attela à la reprise et à l’archivage des travaux de recherche des autres professeurs à travers le monde. C’est encore ce qu’il préférait faire de ses journées. Quand il en était arrivé aux travaux de Sinnoh, le professeur Chen arriva avec un thé qu’il déposa à ses côtés.
- Bilan de la guerre civile du jour : J’ai fait un rappel de base des règles de vie avec un Pokémon, pour appuyer ton intervention, qui était juste, ainsi que des avantages et désavantages de chacun des trois. Au final ils voulaient tous Salamèche. Je leur ai signifié qu’ils pouvaient en attraper dans la nature s’ils voulaient et au final ils se sont lassés, vexés, et ils ont pris un Pokémon au hasard en soupirant. Et je crois que l’un d’entre eux m’a traité de vieux schnok en partant. Sous les applaudissements de sa mère, évidemment.
Billy secoua la tête.
- Ils ne veulent pas dresser des Pokémon, ils veulent juste être un nom de plus sur le parvis du Plateau Indigo…
- Je sais bien. C’est pas demain la veille que je complèterai le Pokédex avec un de ceux-là…
Billy poussa un soupir.
- Si moi, j’y allais…
- Tes parents refusent catégoriquement que tu dresses un Pokémon. C’est déjà tout juste si j’ai obtenu que tu travailles ici. Je n’ai pas le droit de te remettre un Pokémon.
- Hmph… Si au moins je savais pourquoi…
- Tes parents ne sont pas comme les autres parents du Bourg Palette, ils ne sont pas intéressés par le fait d’avoir un fils en vadrouille…
- Mais moi j’en ai envie ! Je suis pas comme ces abrutis tout juste dehors qui vont dormir chez eux avant de se faire emmener en taxi à Jadielle parce qu’ils vont avoir peur de passer une nuit dehors ! Moi je veux dresser des Pokémon, je veux les étudier, vous aider à compléter le Pokédex…
- Je sais ! Je sais, mon garçon et crois-moi ça m’embête autant que toi…
D’autres assistants entrèrent dans le laboratoire pour consulter de la documentation.
- Ecoute, Billy, ton tour viendra, je te le promets. Il faut que tu respectes la volonté de tes parents pour le moment.
- Bah ça fait chier… C’est embêtant, pardon, professeur…
- Ça va, Billy. Je comprends.
Le professeur Chen regarda le jeune homme se replonger dans ses travaux d’archivage. Il soupira grandement et sortit de la pièce. Une assistante le regarda.
- Vous ne comptez vraiment pas lui dire…
- Je devrais, je sais bien que je devrais… d’autant qu’il faudra bien, mais j’ai un rôle dans cette ville qui dépasse celui de simple professeur Pokémon… la parole des parents passe avant la mienne…
Le professeur rangea les dossiers concernant les trois dresseurs qu’il avait fait éclore ce matin.
- … et si des parents bigots effrayés par le potentiel infini de leur enfant refusent qu’il ait des Pokémon, je ne peux pas m’opposer à leur parole. Il en va de ma réputation et de la confiance qu’on me porte.
L’assistante inspira.
- Si je puis me permettre, professeur…
- Les impôts locaux de ces gens nous financent, je ne peux pas me permettre de manquer à mes obligations de confidentialité, répondit platement le professeur.
L’assistante hocha la tête et s’éloigna. Le professeur regarda les Pokémon dans les grands enclos dehors. Il inspira. « Même si je dois avouer qu’au bout de deux ans et demi, ce dilemme commence à me peser… »
Billy passait un temps fou au laboratoire du professeur. Bien que seulement âgé de treize ans et n’ayant aucune formation, il était capable d’effectuer presque toutes les tâches de la vie quotidienne et scientifique du laboratoire. Il mettait un point d’honneur à nourrir les Pokémon que les dresseurs laissaient ici. Des rebuts, pour la plupart. Certaines belles bêtes. Les dresseurs en voyage modifiaient constamment leurs équipes et Billy devait parfois s’occuper de Pokémon bien dressés, envoyés par des dresseurs confirmés et qui devaient se reposer après un dressage intense. Cela ne faisait qu’aiguiser l’appétit de Billy pour une vie de dressage. Il accumulait les frustrations qu’il conservait dans un journal de bord. Il refusait d’appeler ça un journal intime. Il le complétait sur son temps libre. Aux confessions franches succédaient des dessins de Pokémon, des observations sur le comportement du peu de Pokémon sauvages qu’il pouvait observer autour du Bourg Palette, et des divagations sur la manière qu’il aurait de mener sa propre vie de dresseur.
Le ressentiment de Billy se répartissait entre plusieurs personnes. Les autres habitants du Bourg Palette le regardaient de travers, comme si ils savaient quelque chose, et cela rendait Billy haineux voire misanthrope. Les enfants du Bourg Palette se moquaient de cet adolescent qui n’avait pas le droit d’avoir de Pokémon et étant donné qu’il était toujours planté au labo, on comprenait bien qu’il avait quelque chose d’anormal, et on le regardait avec condescendance. Ses parents…
- Bonjour Billy…
- C’était bien, ta journée ?
Il les regardait à peine et montait dans sa chambre où il s’enfermait. Ils ne cherchaient pas plus loin. Valait mieux ne pas lui parler que d’avoir la moindre confrontation, apparemment. Parfois, les jours où il y avait beaucoup de travail à abattre, il restait au labo le plus tard possible. Juste pour ne pas les voir. Quand il y était obligé, il était toujours froid.
- Je sais que tu nous en veux, mais un jour tu comprendras pourquoi on t’a interdit de Pokémon.
- Je vois aucune bonne raison à ça, répondait sèchement Billy.
- On a nos raisons, c’est tout.
Billy lança un regard noir à son père.
- « Vos » raisons ?
- C’est comme ça, Billy, tu discutes pas.
- J’ai envie plus que tout de devenir dresseur, vous m’en empêchez et je ne sais même pas pourquoi, et je devrais ne pas discuter, alors que…
- Billy !!
Le jeune homme aux cheveux roux regarda sa mère qui avait tapé sur la table.
- Tu manges en silence et on arrête de parler de dressage de Pokémon ! On n’est pas dresseurs dans cette famille, je… je refuse de te laisser partir sur les routes, je suis ta mère, je refuse, point !
C’est ce qu’elle disait toujours, avec une forte émotion. Et Billy était bien obligé de comprendre. C’était sa mère après tout.
« Il faut écouter ses parents. Tes parents t’aiment, ils savent ce qui est le mieux pour toi », avait dit le professeur Chen un jour.
- Et voilà, tu vas encore faire pleurer ta mère.
- Mais je… mais les autres… mais… hmph…
Impossible de discuter. Un jour, dans un coup de colère, il prit son assiette et alla manger près de l’enclos du laboratoire, avec les Pokémon. Il y avait une vieille Florizarre qu’il avait surnommée Rosie. Rosie avait appartenu à un dresseur très puissant qui avait gagné beaucoup de ligues Pokémon et s’était fait un vrai nom à travers le monde. Et il avait commencé chez le professeur Chen ! Un véritable honneur pour le Bourg Palette !
Sauf que le Bulbizarre qu’il avait choisi au départ était une femelle. Un dresseur masculin avec un Pokémon femelle, quelle honte, quelle pitié, on allait forcément préjuger de son orientation sexuelle (ou un truc comme ça). Il l’avait faite évoluer pour la forme et l’avait envoyée au Professeur. « C’est temporaire » avait-il dit.
C’était il y a quinze ans. Le dresseur n’a jamais redemandé Rosie ou même des nouvelles de Rosie, et le professeur n’avait pas le droit d’interférer dans les affaires des dresseurs. « En théorie je les envoie dresser des Pokémon dans un but scientifique. Ce ne serait pas éthique de ma part de leur dire de faire ci ou ça ». Depuis sa naissance, Billy était au Bourg Palette, et il avait vu Rosie dans l’enclos du professeur, près de chez lui, depuis sa chambre. La Florizarre regardait vers la sortie de la ville, attendant son dresseur, sa vieille peau de Florizarre fonçant au fur et à mesure des années, sa fleur resplendissant toujours mais son corps s’affaissant sous le poids de la vieillesse. Ses yeux s’empourpraient de veines rouges, et son regard torve était atténué uniquement par son béat sourire naturel de Florizarre.
« Je vais finir comme Rosie », pensait Billy parfois, en mangeant à côté de l’enclos. « Je vais passer ma vie à regarder vers la sortie de la ville sans jamais faire quoi que ce soit d’autre que pourrir sur place… »Léo entra de nouveau dans la salle de contrôle avec du café.
- Voilà pour vous, Jasper ! Tout se passe bien ?
Jasper regarda son supérieur hiérarchique.
- Oui… Monsieur Billy est en train de recueillir des données sur la mission.
Léo vit le casque avec microphone sur la console.
- … mais euh… vous n’écoutez rien, là ?!
- J’écoute, Monsieur Léo, signala Lucario. Jasper dit vrai. La situation est actuellement entièrement sous contrôle.
Léo acquiesça et regarda Jasper qui le regardait.
- Vous faites quoi, là, en fait ?
- Oh en attendant que les choses bougent je vérifie que la logistique d’urgence est bien en place, et oui en effet c’est le cas. J’ai également procédé à un check-up avec le PC sécurité des plages de Rivamar qui est paré à intervenir au cas où. Et j’ai aussi contacté la marine nationale de Sinnoh pour les prévenir de notre intervention afin qu’il n’y ait pas le moindre cafouillage. Tout est OK.
- … bien, et la police, la gendarmerie, l’armée… ?
- … j’ai… vous êtes sarcastique, là ou…
- Ah non pas du tout.
- Oh, eh bien j’ai estimé que les forces en présence étaient déjà suffisantes, pas la peine d’encombrer les lieux.
- Mais on ne sait jamais…
- On parle d’une simple migration de Pokémon, ça gênerait les Pokémon à terme si trop de monde était amené à intervenir sur les lieux.
Léo haussa les sourcils. Jasper avait fait preuve d’une sorte de fermeté, montrant en somme qu’il savait à peu près ce qu’il faisait.
- Oui, oui, vous avez tout à fait raison ! admit Léo. Bon eh bien, continuez, hein…
Léo partit de la salle en lançant des regards sur des écrans qu’il ne pouvait pas comprendre. Jasper inspira.
- Si même moi je vois clair dans son jeu alors que je me contrefiche de leurs histoires… Lucario, repasse-moi sur le canal B.
- Canal B, ok, Jasper.
Pikachu, Darumacho et Azumarill regardèrent leur maître.
- Arianne, tout va bien ?
***
La jeune femme était sur un bateau à moteur, prête à rejoindre un yacht de croisière.
- Qu’est-ce qu’on m’aura fait faire dans cette agence… Oui, tout va bien, j’approche du S.S. Amarantine.
« Bien. N’oubliez pas que vous ne devez pas faire couler le bateau, il est rempli de Pokéballs contenant les résultats de vols ponctuels dans les centres Pokémon de tout Unys… »
- Bien reçu.
« Contentez-vous de remettre Kafelnikov aux garde-côtes qui arriveront au moment où vous activerez le bipeur signal dans votre étui. »
Elle regarda l’espèce de mini-sac à main minuscule et sans anse ni poignée qui tenait dans sa main et qui était aussi décoratif que pas pratique.
- … Bien reçu.
« Interdiction formelle de tuer sur cette mission, d’accord ? »
Arianne leva les yeux au ciel.
- Bien reçu.
« Terminé ! »
Arianne secoua la tête. « C’était bien la peine d’envoyer la tueuse mercenaire pour une mission pareille… »
Elle regarda sa robe de soirée et son chignon de tresses. « Ce que je vais avoir l’air conne en plus ! »
***
- Et donc on observe que les Pokémon qui vivent ici, sur ce bras de mer et sur cette plage même y vivent temporairement, ils restent un mois, deux mois, six mois, mais ils bougeront forcément et presque jamais pour revenir. C’est un peu comme si ils sentaient qu’ils étaient dans le passage, en plein milieu d’un flux migratoire.
Billy acquiesça.
- Ouais, ouais, ça paraît logique, leur instinct leur dit que c’est un mauvais endroit où établir un territoire, qu’il y aura du transit…
- Voilà. Pareil, les courants sont changeants, variables, tout est fait pour dire aux Pokémon de bouger.
- C’est pareil sur la terre ferme, y’a des endroits infertiles et en friche permanente parce que ce sont des lieux de passage régulier pour les migrations, mais je pensais pas que ce serait pareil pour la mer…
- Tu sais que l’eau est même moins salée qu’ailleurs sur ce bras de mer.
- Non ?
- Si, la concentration est diminuée pour encourager les Pokémon à avancer vers les lacs.
- C’est fou…
- Tout ça pour réguler naturellement la circulation.
- Waouh… c’est dingue, tout se fait tout seul !
- Voilà, la nature en action !
- Ouais, ça donne le vertige parfois. Et on va observer la même chose dans les airs, les courants évoluent en fonction des mouvements des Pokémon.
- D’accord !
- J’aurais dû m’intéresser à la biologie marine plus intensément, ça amène à des comparatifs intéressants avec les autres environnements !
- Oui pareil, je me suis spécialisé dans la marine mais le reste aussi ça a l’air intéressant !
Deandra semblait se faire immensément chier et elle en était à son troisième café.
- Le gros de la vague migratoire va arriver d’ici treize heures, je suppose que vous avez faim… marmonna Luke en se relevant.
- Ouais c’est pas de refus, ouais… marmonna Deandra.
- Je vais vous chercher la glacière de sandwiches.
Luke partit de la salle de contrôle de la plateforme. Billy se tourna vers elle.
- C’est super intéressant, hein ?
- Euuuh non pas du tout…
- Ah ouais, t’es comme ça…
- Bah toi ça t’intéresse, tous ces trucs d’environnement, de mode de vie des Pokémon, de migration, mais moi… je me contente de taper, taper, taper !
- Ahon. A une époque, je détestais les gens comme toi.
- Hm. Pourquoi t’es aussi relou avec Léo ?
Billy siffla par les narines.
- Ça m’amuse ?
- Tu devrais pas être aussi vache avec lui. Il a beaucoup enduré pour en arriver là.
- Je sais. Enfin, je me doute, on n’a pas eu l’occasion de beaucoup discuter…
***
Bureau, pendant la semaine.
Léo passa la tête par le box de Billy.
- Salut…
Le jeune homme avait un gros casque sur la tête relié à son Porygon2. Il agitait la tête comme si il écoutait de la musique rythmée.
- Oh, ok, pardon…
Billy regarda Léo s’en aller alors que Porygon2 diffusait dans ses oreilles :
[AU QUATRIEME TOP IL SERA… 15 HEURES ET 44 MINUTES…]
***
- … disons que j’ai été super occupé ! marmonna Billy.
- Mouais. Si la moitié de ce qu’il m’a raconté est vraie, vous en avez vu de belles tous les deux…
Billy regarda Deandra.
- Cela te regarde absolument pas.
- On parle de mon meilleur ami, ça me regarde un peu…
- On parle de ma vie sentimentale et de mon ex. Enfin, de la seule personne que j’ai fréquentée digne d’être appelée mon ex…
Deandra haussa un sourcil.
- Si tu permets, on a une mission et j’ai un cours de zoologie marine super intéressant à suivre pour combler mes relatives lacunes sur le sujet…
Luke revint avec la glacière.
- Désolé, c’est pas le grand luxe mais on n’a pas vraiment la place ni les ressources pour une cuisine…
Billy prit un sandwich et croqua dedans.
- Bon appétit, Dee !
Deandra inspira en se levant pour prendre à manger. Elle changea de pièce, laissant les deux je-sais-tout entre eux. Elle croisa Carrie.
- Je pensais que vous en auriez marre plus tôt…
Deandra inspira.
- C’est pas que c’est pas intéressant, c’est juste que ça m’intéresse pas.
- M’en parlez pas. Je suis juste ici pour accumuler de l’expérience et bosser pour une vraie équipe scientifique.
- Tiens, d’ailleurs, pourquoi vous n’êtes pas rattachés au Professeur Sorbier ? s’étonna Deandra.
Dans la salle de contrôle, Billy avait posé la même question à Luke.
- C’est compliqué… A la base, on voulait désaffecter cette ancienne plateforme pétrolière, ce qu’on a fait…
Carrie agita la main.
- Le truc c’est que ça demandait plus de moyens humains et financiers qu’une simple observation scientifique, du coup on a du faire appel à un mécène…
Luke serra les dents.
- D’où la présence d’Erik Derriksen…
Carrie serra les dents.
- … qui n’est autre que mon père.
Deandra hocha la tête.
- D’accooord… Du coup vous êtes coincée ici…
- Je surveille et protège les intérêts de mon père. Luke est à l’initiative du projet.
- Et vous et lui…
- Nous sommes collègues.
- Ah, ok. Juste collègues ? demanda Deandra.
- Ah, là, on sort du cadre professionnel, je n’ai rien à vous dire !
- Oui, oui, pardon.
- Et puis je pourrais en dire autant de vous et votre coéquipier…
- C’est l’ex de mon meilleur ami ! V’la pas la réputation que j’aurais à l’agence !
- Oui pardon. Lui, il est dans la recherche à ce que j’ai compris de sa conversation avec Luke…
- Voilà.
- Mais vous, euh, en tant que Generation Kid, vous n’êtes pas censée vous intéresser à tout ? Vous avez forcément un domaine de compétence…
- La baston.
- Une passion…
- La baston.
- Un truc où vous spécialiser…
- La-Bas-ton.
Carrie hocha lourdement la tête.
- Du coup vous vous chargeriez de…
- Bastonner. Les gens qui chercheraient à empêcher les migrateurs de… migrationner…
Carrie acquiesça.
- Ouais… Votre agence est encore jeune, non ?
- On a quoi, une semaine ?
- … ouaaaaaaaaaais… souffla Carrie, désemparée.
Luke souffla en l’air.
- J’sais pas… j’dirais pas que ça m’a jamais traversé l’esprit, mais…
- J’en sais quelque chose, hein, bosser ensemble, surtout dans un environnement restreint, ça donne des idées… sourit Billy.
- Déjà y’a son père qui vient quasiment une fois par semaine, toujours à l’improviste…
- Ouais, pas cool…
- Et puis, même si j’apprécie énormément Carrie, que je la trouve belle, intelligente, mignonne, affectueuse…
Billy hocha la tête. Luke soupira et regarda la mer par la vitre de la cabine centrale de la plateforme.
- … je suis plus intéressé par mon travail avec les Pokémon que par une éventuelle histoire avec elle.
Billy haussa les sourcils. Luke le regarda.
- Je sais, je suis un crétin !
- Non… Non, je… en fait je comprends très bien.
- Ah ?
- Ouais, je me suis un peu retrouvé dans la même situation.
- Oh.
- Et… j’ai choisi les Pokémon.
- Ah… et j’imagine que…
Billy se mordilla les lèvres.
- J’dirais pas que je regrette… mais je me demande ce qui se serait passé si j’avais fait l’autre choix…
Carrie haussa les épaules.
- Luke ? Bof, il est gentil mais… tu vois le genre, si on sortait ensemble, il serait plus intéressé par l’influence des courants sur le comportement des Corayon que par moi.
Deandra acquiesça.
- Ouais, j’ai un pote qui a été dans la même situation. Je lui ai dit qu’il n’avait rien perdu justement parce qu’il n’avait pas à passer après des Pokémon.
- Ah, ouais, clair.
- Ça lui a pas suffi, il est toujours mordu.
Carrie inspira, gênée. Deandra haussa les épaules.
- Faut croire que certains sont assez fous pour tout passer à ceux qu’ils aiment…
- … ouais, faut croire. Et vous…
- Moi ? Oh je suis le genre de meuf qui tombe que sur des connards !
***
Hobbes éternua. Jasper se releva et regarda vers son collègue.
- C’est pas un moulin !
- Pardon ? Oh, j’amenais juste Monday, pour lui faire visiter.
- … oh.
- Bonjour !
Hobbes regarda Monday.
- Alors ça, tu vois, c’est ça la fameuse salle de contrôle. Jasper monitore les équipes sur le terrain et leur procure toutes les informations et ressources dont ils ont besoin.
- Waouh !
- Mais je suis son supérieur donc si je veux entrer dans son bureau, j’entre quand je veux.
- Trop pas, rétorqua Pikachu.
- Lol, genre, souffla Azumarill.
- Oh que non… soupira Lucario.
- Que nenni, très cher monsieur Hobbes… ricana presque Darumacho en pianotant sur un clavier.
Hobbes regarda les Pokémon de Jasper qui lui-même le regardait, un peu interloqué, Charmillon posté sur son épaule gauche.
- Jasper manipule des données extrêmement confidentielles. Seul Monsieur Léo est autorisé à entrer ici quand il le souhaite. Et encore.
- Oui mais bon, c’est pas comme si Jasper pouvait me virer.
- Lui, non, mais nous, oui.
Tous les Pokémon avaient répondu ça en même temps. Hobbes haussa les sourcils et leva les mains.
- Euh, bon, Monday, la visite se terminait ici, donc… ça te dit qu’on aille prendre un café à la machine dans la cuisine ?
Jasper haussa un sourcil. Monday inspira, hésitante.
- En fait, j’aimerais bien rester ici !
- De toute évidence Jasper ne veut pas être dérangé, donc…
- Elle peut rester, ça ne m’ennuie pas. Et puis ça lui permettra de voir comment ça se passe, marmonna le gros bonhomme.
Hobbes sembla surpris.
- Et tes Pokémon n’y voient aucun inconvénient ?
Silence général. Jasper désigna une console distanciée de la sienne.
- Tu peux t’installer là, si tu veux, c’est le poste de contrôle temporaire.
- Chouette, merci !
- Inutile de te dire que tu ne dois toucher à rien.
- Bien sûr, bien sûr.
- Eh bah si elle reste, je vais rester aussi, hein !
Jasper inspira lourdement. Les Pokémon se tournèrent vers lui. Hobbes fit quelques pas vers une chaise et… disparut, semblant tomber dans le sol. Jasper serra les dents. Monday le regarda, étonnée.
- Waouh !! C’est vous qui…
Jasper inspira alors que Hoopa sortait de derrière lui. Dans un grand geste, le Pokémon Djinn salua la jeune fille.
- Tu l’as envoyé où ?
Monday salua en retour. Jasper répéta sa question.
- Hoopa, où as-tu envoyé Hobbes ?!
- Au pire endroit de la planète pour lui actuellement !
Jasper regarda ses écrans de contrôle internationaux. Hoopa agita l’index négativement.
***
Sherry était stupéfaite, Hobbes était sorti de nulle part et avait atterri sur elle, assis sur ses genoux.
- Hein ? Hein ?!
- … vous souhaitez quelque chose et voilà que ça arrive tout soudainement ! sourit Sherry.
- Je… mais je… je…
- Vous voulez un petit massage ?
- Ah non, non, certainement pas ! grommela Hobbes en se relevant.
Sherry secoua la tête. Débugant arriva sur son bureau.
- De toute évidence il est terriblement attiré par vous, mais il ne veut pas se l’avouer, Mademoiselle Sherry !
- J’avais bien compris, merci !
***
Monday observait Jasper qui alluma son microphone sur le canal 2.
- Arianne, tout se passe bien ?
« Pas vraiment, non. »
- C’est-à-dire ?
***
Arianne était en belle robe dans une belle fête de plaisance.
- Eh bien déjà je me sens complètement hors-sujet…
« N’importe lequel d’entre nous se sentirait hors-sujet si ça peut vous rassurer… »
- Et ensuite, j’ai fouillé attentivement, aucune trace de chargement illicite.
***
Jasper haussa les sourcils. Monday observait.
- … Kafelnikov est bien sur le bateau ? demanda Jasper.
« Oui, la cible a été repérée se resservant du ponch à de nombreuses occasions… »
- Vous pensez avoir une occasion de l’approcher ?
« J’aimerais avoir une preuve qu’il est bien en train de faire transiter des Pokémon avant de le livrer aux autorités… »
- Oui, c’est logique…
- Elle a un Pokémon Psy ?
Jasper regarda Monday qui haussa les épaules.
- Mewtwo aurait pu sentir la présence d’un chargement quel qu’il soit sur un bateau de quelque taille que ce soit.
« Qui parle ? »
- Euh, c’est Monday, la nouvelle arrivante.
« … vous la laissez écouter les détails d’une mission ? »
- Il faut bien qu’elle voie comment ça se passe.
« Elle verra quand elle y sera elle-même, en mission ! »
- En attendant elle suggère que vous utilisiez un Pokémon Psy, mais j’allais lui expliquer que…
« Dites à cette enfant que je suis ce qu’on appelle dans le jargon des Generation Kids une Typière. »
- Madame Arianne est un Generation Kid qui ne maîtrise qu’un seul type de Pokémon, les Pokémon Poison.
- Ah, oui ! Ce doit être fascinant !!
- Mais de toute façon, je suppose que Madame Arianne a déjà pensé à utiliser un Pokémon pour détecter un chargement…
***
La femme noire en robe violette sur le bateau haussa les sourcils. « Merde. Non. »
Elle sortit rapidement Ectoplasma derrière elle. Le Pokémon regarda sa maîtresse qui lui fit signe de ne rien dire.
- Si j’ai utilisé un Pokémon pour vérifier si le bateau avait un chargement suspect ?
Ectoplasma hocha la tête et s’enfonça dans le sol du bateau. Il en ressortit aussitôt, incapable d’y entrer totalement. Arianne haussa les sourcils.
- … bien sûr et la conclusion est que le bateau entier est bourré de Pokéballs…
« Ah oui ? »
- Oui. J’ai essayé de faire fouiller le bateau par Ectoplasma et il ne peut pas traverser le sol. La seule chose qu’Ectoplasma ne peut pas traverser c’est une Pokéball. CQFD.
« Ah, malin, pour éviter d’être pris en cas de fouille humaine, ils ont chargé la cargaison dans les cloisons ! » s’enjoua Monday.
Arianne leva les yeux au ciel. « Génial, surclassée par une morveuse… »
« Vous pouvez faire arrêter Kafelnikov maintenant que vous avez localisé la cargaison. »
- En effet.
« C’est chouette pour vous, vous allez pouvoir rentrer rapidement.»
Arianne inspira et vit qu’il y avait un buffet. Elle regarda Ectoplasma et haussa les épaules.
- Ouais, on verra, si y’a pas de contretemps d’ici là. Arianne, terminé.
« Pardon, quel contret-CLIC »
Arianne se dirigea vers le buffet. Ectoplasma la regarda, interloqué.
- Je comptais vous utiliser, mais en dernier recours. Je ne suis pas là à utiliser mes Pokémon comme des outils comme tous ces zouaves…
- Ah mais je n’ai rien dit, moi ! ricana Ectoplasma de sa grosse voix, prêt à se servir également au buffet.
***
Un an après cette remise de premier Pokémon précise, il y eut un incident.
Billy s’occupait de superviser les assistants sur la réception d’une livraison de Pokéballs. Le laboratoire avait des stocks très précis, tout était vérifié à la virgule près. Chaque dresseur débutant se voyait remettre un Pokédex, un Pokémon et cinq Pokéballs pour lancer son voyage. Les arrivages de Pokéballs et de Pokémon issus de la pension au sud d’Azuria – et depuis l’île 4 de l’archipel Sevii rattaché à Kanto en cas de pénurie – devaient être gérés minutieusement. Aucun dresseur ne devait être lésé. Les parents du Bourg Palette veillaient au grain. Leurs précieux enfants devaient bénéficier de tous les avantages dus à un futur Maître Pokémon. Billy repensait au pourcentage extrêmement faible de dresseurs du Bourg Palette qui réussissaient réellement. Mais l’histoire de Red restait dans toutes les mémoires.
« J’avais quoi, vingt ans quand j’ai donné ce Pikachu à Red. Vainqueur de la Ligue Pokémon du continent de Kanto 6 mois plus tard, c’était un exploit, à l’époque… »
Billy connaissait le mythe en entier. Red était talentueux à cause du « Bon air de Bourg Palette » qui « favorisait le lien avec la nature » et qu’il y avait quelque chose de « sacré » dans les enfants de ce village éloigné de tout aux gens à l’esprit étroit qui croyaient réellement que le Bourg Palette était une machine à créer des champions.
« Scientifiquement c’est absolument inexact. » avait décrété le professeur Chen. « Et la preuve, en trente ans de carrière, je n’ai, dans les faits, qu’une dizaine de dresseurs Pokémon reconnus qui étaient pour la plupart, des cas particuliers. Le but, c’est remplir le Pokédex, pas devenir Maître. Et de ce point de vue, force est de constater que j’avance peu… »
Et Billy en était désolé. Il supervisait ces livraisons depuis presque son entrée chez le professeur en tant qu’assistant. Les autres assistants avaient des avis partagés sur Billy mais professionnellement, ils le respectaient tous. Ce que Billy avait toujours trouvé étrange. « Je suis trop jeune pour que des adultes me respectent autant… »
Un Pokémon volant se posa sur le camion de Pokéballs. Billy n’y prêta pas attention au départ, trop occupé à tout checker. Les livreurs transportaient les cartons. Le Pokémon se posa alors face à Billy.
Le jeune homme releva la tête vers le Piafabec devant lui. Il haussa un sourcil et reprit le cochage des cases.
- Lot 142, parfait… Lot 143…
- Piaaaaaa !
Billy se tourna vers Piafabec qui lui avait crié dessus.
- … quoi, hein ?! Mais qu’est-ce que tu me veux ?
Piafabec sauta au visage de Billy qui retomba en arrière.
- Ah !!! Au secours !!
Piafabec volait autour de Billy, comme attirée par lui. Billy avait remarqué que c’était une femelle, il savait différencier les genres entre les espèces. Ce plumage ventral plus ferme, ces ailes plus brillantes…
- Billy !
- Oh mon Dieu ! Rattatac ! Charge !
Rattatac sauta sur Piafabec qui s’éloigna, mais se posa plus loin pour fixer Billy qui se releva. Une jeune femme aida Billy à se relever.
- Tout va bien ?!
- …
- Billy, ça va ?
- … j… j’peux même pas me défendre contre un simple Piafabec…
Billy fixa le Pokémon à son tour. La créature semblait inexplicablement fascinée par lui.
Choqué, il retourna au laboratoire, laissant sa collègue superviser le chargement.
Prostré dans un coin, atterré par son impuissance.
***
- On m’a expliqué ce qui s’était passé…
- Tchhh…
- Je suppose que tu ne veux pas épiloguer… souffla le professeur Chen.
Billy inspira, au plus mal.
Le professeur avait remarqué que l’adolescence du jeune homme se passait mal. Que l’incapacité à vivre sa passion le rongeait de l’intérieur. Billy voulait être dresseur plus que n’importe quel glandu qui passait récupérer un Salamèche ou un Bulbizarre une fois par mois. Le professeur recevait des nouvelles en continu des dresseurs qu’il suivait. Et ce n’était pas glorieux. Alors qu’il connaissait le secret qui entourait Billy et savait pertinemment qu’il avait une manne sous le coude.
Depuis quelques temps, pour tromper l’ennui, Billy fréquentait un nouvel assistant. Un dresseur parti il y a six ans et qui était revenu devenir assistant. Le jeune homme, un grand brun aux yeux bleus, fascinait Billy qui s’était mis à discuter avec lui. Une forme de compréhension s’était installée. Ils papotaient parfois près de la barrière de l’enclos, avec Rosie qui mangeait derrière eux.
- J’sais vraiment pas pourquoi le vieux te donne pas de Pokémon en vrai. Personne n’en parle. Ou ne m’en parle, du moins.
- Hmph… je veux pas me mettre à détester le professeur…
- Pourtant j’ai clairement l’impression que c’est lui qui bloque.
- Nan, c’est mes parents, il m’a dit que c’était mes parents…
- Ouais, il te dit ce qu’il veut, hein…
L’assistant prit la main de Billy qui la retira.
- Nan, James, pas aujourd’hui, je suis vraiment pas d’humeur.
- Allez… je sais bien que t’aimes ça…
- … nan.
- Ok, ok, j’insiste pas. J’ai droit à un bisou ?
- On pourrait nous voir…
- C’que t’es coincé…
Billy ne voulait pas passer pour un coincé, alors il embrassa James un instant. Ils se séparèrent et James haussa les épaules.
- Tu devrais confronter le vieux à propos de tout ça. Une bonne fois pour toute, genre. Sinon, tu vas rester à pourrir ici.
Billy regarda Rosie alors que James s’éloignait. La vieille Florizarre se tourna vers Billy, tendant son vieux museau vers le jeune homme qui le caressa.
***
Nouvelle remise de Pokémon. Trois gamins pourris-gâtés. Les familles derrière, toutes contentes. Le professeur en mode hypocrite. Billy sombre comme un ciel d’hiver.
Une scène répétitive. Bien trop répétitive. Billy était à bout.
- Voilà, les enfants, le choix vous appartient, désormais…
Un jeune garçon soupira.
- Ils sont nuls tous les trois, je peux pas en avoir un autre ?
Le professeur Chen secoua la tête.
- C’est un de ces trois-là, seulement.
- Ouais bah les dresseurs qui gagnent des ligues, ils ont aucun des trois…
Billy leva les yeux au ciel. « C’est pas pour ça qu’on vous en donne… »
La gamine se jeta sur la Pokéball de Salamèche.
- Oui eh bah moi je veux Dracaufeu il est trop fort !
- Ah non, c’est moi Dracaufeu, j’ai réservé ! Hein maman ?
- Comment ça réservé, c’est quoi ces histoires de réservation ? cria une mère.
- Vous acceptez les pots-de-vin, maintenant, professeur Chen ?
- Mais non voyons, notre petit Jason exagère ! Prends n’importe lequel des trois, mon chéri, tu seras le meilleur quoi qu’il en soit.
Les deux enfants se regardèrent sans lâcher la Pokéball. Le troisième regarda les Pokéball comme si c’était des boîtes de conserve.
- On peut les regarder avant ? Je veux pas d’un Pokémon avec un caractère nul. Vous êtes au courant que le caractère influence les compétences ?
- Je vous propose juste un Pokémon, ils sont choisis au hasard, vous avez tous des chances égales, ils sont tous prêts à être dressés.
- Oui mais tant qu’à faire autant qu’il soit bon dès le départ, non ?
- C’est à vous de le rendre bon, jeune homme, répondit le professeur. Aucun Pokémon n’est réservé les enfants, calmez-vous, reposez cette Pokéball et…
Le coup partit.
Ou plutôt la chaise.
Il l’avait balancée.
Vers les gosses.
Billy.
Samuel Chen se retourna vers son assistant, les yeux exorbités, les dents apparentes, les sourcils froncés.
- RAMASSIS… DE SALES PETITES MERDES INGRATES…
- Billy !
- LES POKEMON… LES POKEMON sont des ETRES VIVANTS !!! PAS DES ACCESSOIRES POUR STARLETTES DE LA LIGUE POKEMON !!!
Il désigna les gamins.
- Votre rôle, petites MERDES, votre rôle en venant ici est de parcourir le continent pour collecter des données SCIENTIFIQUES !!! Pas de devenir des champions ! On s’en FOUT de ça !!! C’est à la portée du premier ABRUTI venu !!!
Petit silence. La gamine haussa les épaules.
- Ouais bah pas à ta portée à toi en tout c…
Billy se mit à courir vers elle. Il fut saisi en plein vol par le professeur.
- Billy, mais enfin ! Excusez-nous ! Martha, supervisez la remise !
Le professeur emmena Billy en arrière-salle et l’assit de force sur une chaise.
- Mais qu’est-ce qui t’a pris, enfin ?!
Billy, fou de rage, se releva et poussa le professeur. Sous les yeux de quelques assistants, dont James.
- QU’EST-CE QUE VOUS ME CACHEZ ??? POURQUOI JE NE PEUX PAS AVOIR DE POKEMON ???
Samuel Chen regarda Billy, apeuré. La rage insondable de son assistant explosait.
- …
- DITES-MOI !!! C’est vous, hein ??? C’est vous qui voulez pas ! Parce que vous avez trouvé la bonne patte, le mec qui va rester votre assistant, ranger votre paperasse, nourrir les rebuts ?!
Le professeur ne répondit rien, se contentant d’un regard catastrophé envers son assistant. Billy serra les dents, au comble de sa colère.
- POURQUOI ??? DITES MOI POURQUOI !!! Dites-moi, s’il vous plait, si…
Il avait empoigné le professeur, terrifié.
- Si vous avez une once de respect, de respect pour moi, d’am…
Billy s’interrompit, réalisant ce qu’il allait dire, et voyant les larmes qui se formaient au coin des yeux du professeur Chen, complètement acculé. Billy lâcha tout et s’enfuit par la porte de derrière. Laissant là le chercheur en Pokémon fondant en larmes, terrassé par la situation.***
- Ça commence !
Deandra se réveilla du canapé où elle avait tapé une bonne grosse sieste. Billy et Luke étaient face aux vitres. Une nuée incroyable de Pokémon Eau arrivait vers l’angle de plage de Rivamar.
- Voilà… Regarde la composition des rangs.
Deandra s’avança derrière eux pour observer. Elle ne voyait qu’une foule de Pokémon Eau.
- A la surface, les plus gros comme les Wailmer ou les Léviator, les plus vulnérables comme les Babimanta ou les Froussardine, et les plus faibles comme les Lovdisc et les Magicarpe. Les plus gros surveillent et informent les Pokémon sous la surface des potentiels dangers dont ils doivent les protéger. Les plus forts sont sous la surface, ils montent la garde en comptant sur ceux de la surface pour surveiller pour ceux qui se trouvent sous l’eau.
- Génial… Ils se sont complètement adaptés à la tridimensionnalité de leur environnement…
- Voilà. On repère des comportements similaires chez les Pokémon volants ?
- Oui, absolument, mais pas de manière aussi fusionnelle… Même les Sharpedo ont arrêté de faire preuve d’un comportement prédateur pour accompagner la migration… Les Pokémon volants voyagent en groupes distincts par espèces et ne mélangent les genres que si les espèces en questions sont perdues ou blessées.
- Ah. Bah les Pokémon Eau c’est d’un bloc. Même élément, même migration.
- C’est incroyable !
Deandra se regardait les ongles. Carrie ramena du café et en proposa à Deandra qui acquiesça vivement.
- J’espère qu’il rend sourd…
- Oh moi parfois je mets des boules quiès, il parle tout seul en travaillant, sur une plateforme isolée, c’est le genre de truc qui peut donner des envies de meurtre… soupira Carrie.
- Ouais, j’comprends bien…
Erik, le mécène, arriva pour observer le spectacle.
- Ah, voilà enfin la zone de pêche ambulante !
Deandra regarda le vieux qui la regarda en souriant.
- Vous allez devoir les « protéger », c’est ça ?
- Euh bah oui…
- Eh bien qu’est-ce que vous faites encore ici ?
- … je prends un café… marmonna Deandra en soulevant la tasse.
- Hon.
- Et vous n’êtes pas mon employeur, dooonc…
- C’est moi qui ai payé !
- C’est Luke qui a contracté, c’est lui qui décide. Je ne suis pas mercenaire, juste agent de terrain. J’obéis aux ordres de celui qui a passé contrat avec mon agence, donc avec monsieur Léo.
Erik haussa les épaules et consulta son téléphone. Luke regarda Deandra puis Billy.
- Euh… Je préfèrerais que ce soit toi qui y aille !
- Bah voyons, souffla Deandra.
- Moi ? s’étonna Billy.
- Oui, toi au moins tu feras attention aux Pokémon et tu ne les blesseras pas, j’en suis sûr !
- Je suis toujours là et je vous écoute – malgré moi, mais je vous écoute... gronda Deandra.
- C’est quoi, ça ?! s’étonna Carrie.
Tout le monde se tourna vers la vitre. Les Pokémon arrivaient dans la baie, lorsqu’une nuée de chalutiers sortit de derrière le phare du comté de Rivamar. Des dresseurs sortirent du sous-bois environnant la plage. Une basse retentit avec un beat bien dégueulasse, et un micro résonna, sortant de toute évidence de la même enceinte.
- BIENVENUE A CAPTURE FEST 2 ! CETTE ANNEE LES POKEMON EAU SONT EN NOMBRE ET VOUS POURREZ EN CAPTURER AUTANT QUE VOUS VOULEZ !!!
Luke et Carrie se regardèrent, stupéfaits. Billy s’étonna. Deandra inspira.
- J’vais casser du braconnier, j’reviens.
Elle prit la porte. Billy utilisa son légendaire sens de l’observation et de la déduction pour…
- C’est VOUS !
Il s’était tourné vers Erik. Carrie le regarda.
- Papa ?!
- Vous n’avez aucune preuve !
- Monsieur Derriksen ?! s’étonna Luke.
- Déjà, votre nom est débile !
- Non mais dites.
- L’évènement m’a tout l’air prévu et sponsorisé, ce qui m’indique qu’un humain est à l’origine de tout ça…
- Sans déconner, Détective Pikachu ! ricana le vieil homme.
- Et surtout ce qui me met la puce à l’oreille c’est que vous êtes un sale profiteur de mécène qui finance des recherches privées et qui forcément n’y trouve pas son compte, donc qui profite de ces recherches pour se faire encore plus d’argent !
- Papa !
- Moi qui ai toujours voulu que vous vous intéressiez à mes recherches… s’étonna Luke.
- Elles sont intéressantes ! sourit Erik. Grâce à elles, je sais qu’il y a un spot de capture tous les cinq ans dans cette baie ! L’évènement de l’an passé était déjà génial…
- Ar-ce-US ! geignit Luke, réalisant l’étendue de la supercherie.
- … mais cette année, j’ai dit qu’on aurait au moins un Generation Kid pour l’évènement, ce qui a fait exploser la participation ! Le tout sponsorisé par la plateforme de recherches !
- J’ai envie de vomir ! geignit Luke.
- Papa, comment as-tu pu ?! s’offusqua Carrie.
- Oh, voyons, tu pensais vraiment que je subventionnais ton blanc-bec de petit ami sans contrepartie ?!
- C’est pas mon petit ami, papa !
- C’est pas ma petite amie, monsieur Derriksen !
Billy inspira alors que Deandra se trouvait sur la plateforme, dehors, prête à intervenir.
- Vous devriez aller dehors aussi, monsieur Billy, le spectacle sera encore plus impressionnant si vous vous y mettez à deux !
Billy acquiesça.
- Vous avez bien raison.
- Allez, dehors !
Billy regarda le vieux mécène.
***
Billy rentra chez lui, exténué. Ses parents l’attendaient à table avec un sac. Ils se levèrent et le regardèrent sévèrement.
- Quoi ? Vous le savez déjà ? C’est bon, j’ai juste pété un câble, rien à voir avec vous !
- Ce n’est pas ça, Billy…
- Une voisine t’a vu.
Billy leva les yeux au ciel.
- M’a vu, génial, du coup votre précieuse petite réputation de parents du Bourg Palette est toute froissée, quelle tristesse ! Ces gens étaient des cons, j’ai bien fait de leur gueuler dessus, et je crois que le vieux Chen va plus vouloir de moi au labo vu ce que…
- Une voisine t’a vu embrasser ce garçon.
Billy haussa les sourcils.
- Quoi mais…
Le père jeta le sac aux pieds du fils.
- Fous le camp.
- … quoi… ?! Mais… Maman…
La mère secoua la tête, ne voulant rien avoir à faire avec ça.
- Mais… M… Laissez-moi juste recevoir un Pokémon chez le professeur dans ce cas-là…
- Hors de question que tu aies un Pokémon et hors de question que notre fils soit une pédale.
Billy tombait des nues. Il regarda de nouveau sa mère qui secouait la tête.
- Quel échec… je voulais juste un enfant normal… juste… un enfant normal…
Billy serra les dents, prit le sac et prit également la porte, sous le regard furieux de son père.
***
Au coucher du soleil, Billy allait franchir les portes de la ville.
- STOP.
Billy, tout larmoyant, se retourna vers le professeur Chen, sans sa légendaire blouse blanche. Billy s’essuya le visage.
- Professeur…
- J’ai appris ce qui s’est passé.
- … j’suis désolé…
- Tu plaisantes. Allez, ressaisis-toi. Je vais tout t’expliquer.
Billy soupira, résigné.
- Au moment où je suis viré, génial…
- Je n’avais pas le choix. Comme tu sais, cette ville est gangrenée par les ambitions des habitants de voir leur rejeton devenir un maître Pokémon. Depuis ta naissance, tu es destiné à être un grand maître, encore plus grand que Red lui-même.
Billy haussa un sourcil.
- Lorsque tu es né, Billy, ta venue au monde a attiré tous les Pokémon sauvages des environs autour de l’hôpital du comté de Bourg Palette. J’étais là également.
- … pourquoi vous partez aussi loin, ça devient glauque…
- La plupart des habitants n’ont pas compris ce qui se passait mais moi et tes parents, si. Ton arrière-grand-père était de cette trempe et tu en es aussi. C’est une spécificité qui se transmet parfois, selon les Générations, et tu es l’enfant de cette nouvelle génération…
- … ça prend encore moins de sens…
- Billy, tu es un Generation Kid.
Billy pencha la tête. Un Piafabec se posa derrière lui, à quelques pas.
- Un… un Generation Kid, attendez, vous voulez dire…
- Tous les cent-cinquante-et-un ans – comme le nombre originel de Pokémon – se soulève une nouvelle Génération. Une poignée d’enfants dans le monde naissent avec le talent naturel de dresser des Pokémon. Au point de pouvoir parler avec ceux qu’ils capturent.
Billy clignait des yeux, ne comprenant pas grand-chose à ce que lui disait le professeur. La personne la plus rationnelle qu’il connaissait tenait le discours le plus irrationnel possible.
- Lorsqu’elle apparaît, cette Génération change la face du monde. C’est un pouvoir grandiose que tu possèdes. Certains de ces dresseurs sont connus historiquement. C’est un pouvoir qui te promet à un brillant avenir, quoi que tu fasses. Quel que soit le Pokémon que tu captures, même le plus ridicule Magicarpe, tu en feras une créature exceptionnelle ! Cependant, c’est également un pouvoir effrayant…
Billy hocha la tête, comprenant mieux.
- … tes parents ont eu à la fois peur de ton potentiel inouï et de la jalousie des autres habitants du Bourg Palette. Ils ne voulaient pas être ostracisés par ta faute. Ils t’ont gardé avec eux parce que l’opprobre de l’abandon aurait été plus grande encore…
- Mouais, jusqu’à un certain point… soupira Billy.
- Et je m’assurerais que ces salauds soient châtiés comme ils le méritent, sois-en sûr…
Billy haussa un sourcil étonné.
- En attendant, observe derrière toi.
Billy se tourna vers le Piafabec.
- C’est…
- C’est la femelle Piafabec dont tu as eu peur il y a quelques semaines. Tu as cru qu’elle voulait t’attaquer. Tends ta main vers elle.
Billy regarda le professeur qui hocha la tête.
- … ça échappe à tout entendement, à toute logique scientifique…
- Ce qui te rend d’autant plus fascinant. Tends ta main.
Billy tendit sa main vers Piafabec qui se posa sur son bras. Le professeur Chen donna une Pokéball à Billy.
- Je sais que ce n’est ni un Bulbizarre, ni un Salamèche et encore moins un Carapuce, mais j’espère que tu accepteras que ce Piafabec soit ton premier Pokémon…
Billy laissa couler les larmes qu’il retenait depuis tout à l’heure.
- Professeur…
- Ramène-moi plein de données pour mon Pokédex, surtout !
- … j’suis désolé pour ce que je vous ai dit…
- C’est moi qui suis désolé… si j’avais fait plus attention à ton bien-être qu’à ma réputation… Mais c’est terminé tout ça. Je sais à présent que j’ai plus à gagner à faire reposer mon futur sur toi que sur ce village de bouseux.
Billy sourit.
- Voici ton Pokédex et une petite dizaine de Pokéballs pour commencer…
- Merci…
- Un peu d’argent – je suppose que tu es parti à la va-vite…
- Hey, c’est mon dernier chèque de salaire !!
- Oui évidemment, enfin… et ça, c’est Rosie.
Billy observa la Pokéball de la vieille Florizarre.
- Je sais qu’elle est déjà dressée, donc que normalement je n’ai pas le droit de te la confier, mais bon, on sait toi et moi que son abruti de dresseur ne reviendra jamais la chercher donc bon… autant qu’elle sorte un peu, la brave petite.
- Merci professeur… J’vais tellement vous ramener de données que vous devrez faire au moins huit Pokédex pour tout ranger !
- Je n’en attends pas moins de toi, mon garçon ! Allez, va, Billy. Et si tu as besoin de quoi que ce soit n’hésite surtout pas !
Billy hocha la tête en regardant une dernière fois le professeur Chen avant de partir. Le scientifique inspira. « Et voilà. Enfin tu vas réaliser ton rêve de remplir le Pokédex, Chen. Tu as eu raison d’être patient. Il est suffisamment mûr à présent. Même si c’est dommage qu’il ait fallu en arriver là… »***
« Jasper ! »
- Jasper, Monsieur Billy vous demande ! cria Lucario.
Jasper remit son casque.
- Oui, monsieur Billy ?
« Est-ce que j’ai la possibilité de procéder à des arrestations ? »
« Pardon ? Vous voulez arrêter qui ?! »
Jasper regarda Darumacho qui hocha la tête.
- Tout à fait, monsieur Billy, il faut juste que vous ne blessiez pas la cible.
« Cool. Euh, comment je fais s’il s’est échappé ?! »
Jasper inspira et envoya un mail.
- Nom de la cible ?
« Erik Derriksen, le commanditaire, c’est lui qui créait le spot de braconnage en échange de pognon. »
- C’est bon, je lance un mandat d’arrêt international…
« Waouh, cool ! »
Jasper souffla.
- C’est quoi, déjà, le mail de la police municipale de Rivamar…
Monday semblait silencieusement amusée par tout cela.
***
Deandra était dehors, sur la plateforme. Elle observa les chalutiers qui préparaient les filets.
- Ok… donc eux, je les bloque, ensuite les dresseurs… ça devrait être gérable…
Carrie était sortie, se tenant les avant-bras et arriva aux côtés de Deandra qui la regarda.
- … mon père est un monstre… je peux rester ?
- Ouais, pas de souci. Pour commencer je vais couler les chalutiers.
- … euh, ok ?
Deandra sortit un Noeunoeuf. Le Pokémon atterrit trois par trois dans les mains de la dresseuse.
- Maîtresse…
- … Deandra !
- Ivo !
- Uvo !
- Ovo !
- Ovum !
- Oval !
- Et Joeuffrey, pour vous servir !
Les cinq autres regardèrent l’œuf cassé qui semblait un peu moins intelligent que les autres.
- Toujours à se faire remarquer celui-là…
- Comment allez-vous, Maîtresse Deandra ?
- Toujours célibataire ?
- Au moins vous n’avez pas pris de poids !
- Mais ça se voit que vous n’avez pas de mec vu la tête que vous tirez !
Deandra leva les yeux au ciel. Carrie regarda les œufs parlants, à moitié terrifiée.
- Bon, les Noeunoeuf, Pilonnage sur les bateaux, là-bas.
- Elle change de sujet, c’est qu’on a raison !
- Hm !
- EXECUTION !
Deandra balança les œufs par-dessus bord. Carrie haussa les sourcils. Les œufs rebondirent sur la surface de l’eau. « Joeuffrey » poussa un cri.
- En ordre de bataille ! Tactique de groupe !
- Un !
- Deux !
- Trois !
- Quatre !
- Cinq !
- GO ! Pilonnage en bande !
Les Noeunoeuf sautèrent vers les chalutiers, un chacun, et transpercèrent de haut en bas chacun des six bateaux qui allaient s’attaquer au cortège de Pokémon migrateurs.
- Ça, c’est fait. Gardevoir !
Le Pokémon Etreinte apparut, les mains jointes sous le regard étonné de Carrie.
- Oui, Madame ?
- Enlève les filets de la mer et pose-les sur les bateaux.
- Bien, Madame !
Gardevoir leva les bras et souleva les filets hors de l’eau. Certains étaient déjà remplis.
- Ouvre-les pour libérer les Pokémon.
Gardevoir écarta les mailles du filet et libéra les quelques Ecayon, Magicarpe et autre Poissirène qui s’étaient coincés. Puis elle balança les maillages sur les bateaux, embêtant les pauvres marins qui tentaient de colmater les trous créés par les Noeunoeuf.
- Et voilà, Madame ! annonça poliment Gardevoir.
- Merci. Booon. Les dresseurs sur la jetée…
Certains s’étaient enfuis en entendant le bruit des Noeunoeuf traversant la coque des bateaux. Deandra sortit Queulorior.
- Maîtresse Deandra, toujours aussi ravissante !
- Queulorior, faut dégager les pouilleux sur la plage, là-bas.
- Oh, Maîtresse Deandra, un si vilain langage émanant d’une si jolie personne !
- Attaque Draco Météore !
Queulorior frappa dans l’air, envoyant une sphère rougeoyante au-dessus de la foule d’êtres humains. Elle éclata en feu d’artifice au-dessus de la foule et fit chuter une pluie de météores rouges autour d’eux. Cela effraya quelques badauds et curieux. Pas les plus acharnés.
- Mouais, pour l’efficacité on repassera…
- Pourtant cette attaque était parfaite… souffla Carrie, subjuguée.
- Ouais, Queulo’ a passé sa vie à la Zone de Combat de Hoenn, il a vu toutes sortes d’attaques, je me suis contentée de le récupérer et de l’aider à perfectionner tout ça…
Certains dresseurs avaient sorti des Trépassable et Bacabouh pour créer des digues de sable pour bloquer les Pokémon Eau. Deandra leva les yeux au ciel.
- On a affaire à du lourd. Balle Graine !
- Avec grand plaisir, Maîtresse Deandra !
Queulorior tendit la queue vers les constructeurs de barrage et les bombarda de graines. Les dresseurs reculèrent, laissant leurs Pokémon encaisser. Les Pokémon Eau semblaient perturbés.
- Ah mince ! Queulorior, fais gaffe, tu gênes !
- Ce n’est pas moi, maîtresse Deandra…
Deandra s’avança et vit effectivement des plongeurs.
- Sérieusemeeeeeeeeeent !!! Bon, ça me pète les reins tout ça…
Elle sortit Démétéros. Carrie resta stupéfaite.
- Démétéros ?!
- Démétéros !
- Deandra chérie, mais on se les caille ici, pourquoi tu me sors à la plage, je déteste la flotte !! geignit le génie de la fertilité.
- Urh… Démétéros, j’aurais besoin que tu soulèves la mer en créant trois croisements aquatiques jusqu’à chacun des trois lacs du continent de Sinnoh.
- Ce sera tout ? demanda le génie avec la même voix de fausset.
- J’veux bien un petit transat aussi.
- Mais fallait le dire tout de suite !
Démétéros leva les bras en poussant un cri très efféminé, soulevant le sable de la mer pour créer un véritable bras d’autoroute pour les Pokémon Eau, évacuant les plongeurs apeurés. Carrie observait, sur le cul, les actions surréalistes de la dresseuse à côté d’elle. Deandra vit le lit de sable que Démétéros avait créé pour elle et elle s’y allongea. Sortant Motisma, elle le transforma en réfrigérateur et y piocha une cannette.
- Tu veux un soda, Carrie ?
- …
- … quoi, c’est vraiment pas grand-chose, hein, je t’assure…
Billy arriva avec Luke qui se rangea aux côtés de Carrie.
- C’est… impressionnant…
- Hm… mon père ?
- Je crois que la police municipale l’a arrêté… marmonna Luke.
- Oh…
Billy arriva aux côtés de Deandra.
- Tu les envoies où ?
- Bah aux lacs !
- C’est pas les bonnes directions.
- J’suis pas géographe !
- Moi non plus mais je sais différencier le nord du nord-ouest de l’ouest…
- T’as qu’à m’aider avec ton gros cerveau, là !
- Ouais.
Porygon2 sortit, flotta jusqu’à Démétéros et lui montra une carte virtuelle des lieux avec les lacs bien indiqués. Le génie pouffa de rire.
- Oulala, j’étais à côté de la plaque !
Il redirigea ses toboggans aquatiques de sable, de sorte à ce que les Pokémon puissent nager paisiblement sans être embêtés.
- Et si on voulait juste capturer un Carapuce ? grommela un père de famille.
- Dans cinq ans faudra apprendre à voler je crois ! souffla une jeune femme.
Billy observa les Pokémon Eau tranquillement se déporter vers leurs lacs préférés. Il se tourna vers Luke et Carrie. Carrie était effondrée.
- Qu’est-ce que je fais, Luke ? Mon père est un salaud, il va aller en prison, on va perdre la plateforme, les recherches, nos résultats…
- Calme-toi, Carrie…
- Mais non, on a travaillé trop dur… TU as travaillé trop dur !
- O… Oui mais j’aurais jamais pu y arriver sans toi, je suis persuadé que tant qu’on est ensemble, tout ira bien…
Carrie hocha la tête et s’écroula sur Luke qui la réconforta comme il put. Billy inspira et prit le téléphone satellite réservé aux cas d’urgence. Il y composa un numéro.
- … oui, Sonia, bonjour, Billy à l’appareil… Je pourrais avoir Gilbert ?... merci…
Deandra regarda son collègue qui observait les Pokémon qui partaient vers leurs lacs.
- Gilbert ? Ici Billy, comment tu vas, vieux machin ? Hahaha ! Ouais, écoute, tu aurais des options de titularisation pour deux chercheurs en biologie marine ?... Hm ? Ouais. Pour qu’à terme ils n’aient plus à dépendre de fonds privés, voilà… L’un des deux a des observations intéressantes sur le flux migratoire entre Rivamar et les grands lacs.
Luke observa Billy qui lui leva un pouce. Luke hocha la tête.
- Ça va s’arranger, Carrie, t’inquiète pas…
Billy s’écarta pour régler les derniers détails, observé du coin de l’œil par Deandra.
***
- Donc voilà, professeur…
Billy, deux ans après avoir quitté Bourg Palette.
- J’suis dans cette situation de merde où je dois revenir sur Kanto pour rafler les badges de la région alors que j’ai déjà des tas de rapports de recherche à mon actif…
Avec son look un peu « homme des bois » limite SDF, il faisait un peu tâche dans le centre Pokémon d’Azuria où il s’était arrêté. Il était entouré de Piafabec, Florizarre, Porygon2, Drackhaus et quelques autres Pokémon capturés en chemin. Les infirmières regardaient le jeune homme au visiophone qui effrayait un peu tout le monde, d’autant qu’il mangeait des nouilles instantanées sans gêne, comme ça, devant le téléphone.
- … mais pour entrer dans les centres d’archives pour faire des recherches sur des documents existants dont certains que j’ai édité moi-même, je dois avoir participé à la Ligue Pokémon et même l’avoir gagné pour certaines archives secret-défense ??
« Billy, Billy, Billy, tu n’es pas sans savoir que dans « Secret-Défense », il y a secret relatif à la sécurité internationale, tu ne peux évidemment pas les consulter comme ça ! »
- J’suis scié que même VOUS êtes incapable de m’offrir un accès !
« J’ai à peine le droit à une demi-heure de consultation, et inutile de te dire que la photocopie ou la divulgation de documents est proscrite. »
- Mouais. Pourquoi vous vouliez que je vous appelle d’Azuria ? J’en suis à quatre badges, j’aurais aimé pouvoir enchaîner…
Le professeur inspira.
« Et moi j’aimerais que ta future visite aux grandes archives te soit amplement profitable. Tu as une expérience sans faille du terrain, mais tes manières en public sont quelques peu… inconvenantes ? »
Billy, pas très rasé, mal habillé et sale, regarda l’écran du visiophone, choqué.
- Moi ??? Inconvenant ?!
Les autres visiteurs du centre Pokémon ne purent qu’agréer, certains se bouchant même le nez.
« En fait je voudrais te proposer de travailler un temps pour le fils d’un couple d’amis. Ils ont une excellente réputation, je pense que ce sera très formateur ! »
- … vous voulez me faire bosser chez des bourges ?!
« Tout à fait, Billy ! Il s’agit des habitants de la villa au bout de l’impasse dans la continuité des routes 24 et 25. »
- … ce coin complètement inintéressant ?!
« Voilà. J’aimerais que tu y ailles et que tu travailles pour ce jeune homme, Léo, le Pokémaniaque et créateur, à seulement seize ans, du réseau informatique de transfert des Pokémon ! »
Billy plissa les yeux en voyant la photo.
- Il a l’air super con.
« C’est ce genre de jugements à l’emporte-pièce que j’aimerais que tu… atténues, justement, en travaillant au contact d’êtres humains plutôt qu’avec des Pokémon en permanence. La famille de Léo est prévenue, tu dois te présenter dans les prochains jours. »
- … et si je refuse ? J’ai mes badges à récupérer, moi !
« Ma réputation est en jeu également, Billy, je t’ai recommandé, Léo aurait besoin d’aide pour du référencement et de la complétion de données individuelles, choses pour laquelle tu es absolument qualifié… »
- Vous, vous, toujours vous, professeur ! Rhalala ! Et moi dans tout ça !!
« Promets-moi que tu te présenteras ! »
- J’promets que dalle !***
- … et donc maintenant ils sont tous les deux affiliés au professeur Sorbier ?
Billy acquiesça. Il était avec Deandra dans le bureau de Léo pour faire son rapport.
- … c’est… généreux de ta part, Billy, utiliser tes relations pour aider des gens que tu venais à peine de rencontrer…
Billy haussa les épaules.
- C’est comme ça.
- Bon. En tout cas pour une première mission, c’est une réussite, je suis fier de vous ! Vous pouvez disposer, j’attends un rapport écrit complet dans la semaine.
- Bien.
- Bien Léo.
Billy et Deandra partirent. Léo inspira et regarda Evoli qui pencha la tête sur le côté.
- Eh bah voilà ! On commence doucement mais sûrement ! Et Billy coopère, ça fait plaisir !
- Hmmm…
- Quoi, Evoli ? Parle !
Le Pokémon agita la tête.
- J’ai plutôt l’impression que Billy fait ce qu’il veut…
- Il pouvait tout à fait fraterniser avec l’équipage de la plateforme…
- Ce n’est pas lui qui a arrêté Derriksen mais la police, et c’est Deandra qui a empêché les Pokémon de se faire braconner…
- … au moins Billy n’a pas entravé le bon cours de la mission ! sourit Léo.
- Mouais…
« Monsieur Léo ! »
- Oui, oui, Mademoiselle Sherry, vous pouvez faire entrer Arianne !
C’est Hobbes qui entra.
- Euh, ok… ?
- Arianne est retournée dans ses appartements, elle a dit qu’elle ne s’estimait pas concernée par la note de frais qui a précédé l’arrestation de Kafelnikov…
- Quand même, qu’on nous fasse payer un buffet entier… marmonna Léo.
- Hm… Euh, je voulais surtout porter ceci à votre attention…
Léo observa la liasse de feuilles.
- Han non, mais…
***
Billy entra dans le bureau de Deandra qui se reposait dans sa grosse chaise, entourée par Motisma et Gardevoir.
- Yo.
- ‘lut.
- Bravo pour… la réussite de la mission, en gros. J’ai un peu perdu le fil.
- On n’est pas des professionnels, j’ai agi à l’instinct, les ordres étaient de faire en sorte que les Pokémon puissent migrer, c’est fait. Toi tu t’es intéressé à ce qui se passait, moi j’en suis pas capable, voilà tout. Faut se compléter dans la vie.
Billy inspira et resta là. Deandra le regarda du coin de l’œil.
- J’suis relou avec Léo parce qu’on a déjà travaillé ensemble.
Deandra releva la tête.
- C’était… on était jeunes, on s’est très vite entendus, on a…
Billy inspira.
- … eu une histoire ensemble… Il était sentimental, moi j’étais… concentré sur mes objectifs… lui il m’embauche pour regagner mon affection, moi… je communique en l’asticotant. Un peu comme avec tout le monde quoi…
Deandra hocha la tête.
- Mouais. Je sais qu’il est pas simple voire un peu space, mais tu devrais essayer de calmer le jeu…
Billy haussa les épaules.
- Calmer le jeu, ça fait pas avancer les choses…
- Faire l’andouille non plus.
- Certes. En même temps, je sais même pas si je vais rester ici… Et je pense que tu te dis la même chose. C’est pas en devenant agent de terrain que tu vas faire des combats dignes de ce nom…
- Hey, mon Démétéros a créé une autoroute de sable ! Respecte !!
- Non.
Billy partit. Deandra leva les yeux au ciel en secouant la tête.
Billy allait vers la salle de pause lorsqu’il croisa Léo, tendant la note d’honoraires de la mission.
- … Tu sors de ton bureau de temps en temps, c’est cool !
- Tu as réglé les honoraires de la plateforme d’observation ?
- Nnnnnoooouuuuiiiii ?!
- Pourquoi tu as fait ça ? M’enfin Billy !
- J’voulais pas les embêter avec ça…
- Tu vas faire ça avec toutes tes missions ?!
- Seulement celles qui me tiennent à cœur.
Léo haussa un sourcil.
- Je… devrais être content que tu t’investisses…
- Je fais ce que je peux.
- Mais ne fais pas ça systématiquement !
- Eh bah t’as qu’à me sucrer ma prime, tant pis.
- Non mais Billy…
Le rouquin soupira et se tourna vers Léo.
- Tu me connais. Tu sais très bien que si je l’ai fait, c’est que ça comptait. Ne discute pas de primes ou de bénéfices avec moi. C’est pas ce qui m’intéresse…
Billy s’éloigna.
- … Et c’est pas pour ça que je suis là.
Léo inspira lourdement alors que Billy ferma la porte de la salle de pause. Léo souffla, un timide sourire sur ses lèvres.
- Je me doute bien, Billy, je me doute bien…
Générique de fin :
Vianney – Je m’en vais« J'ai troqué mes cliques et mes claques
Contre des cloques et des flaques
Un sac à dos pour oublier
Qu'avant c'est toi qui me pesais
Ce qui m'emmène, ce qui m'entraîne
C'est ma peine, ma peine plus que la haine
Oh ma route, oh ma plaine…
Dieu que je l'aime »