La légende de Galar (réécriture) de Scorbunn

Le train démarre. Assis dans un compartiment, seuls, Pelage de Feu et Eclair d’Or font de grands signes à Nigosier. Même si ses paroles étaient difficiles à comprendre durant les premiers temps, les deux amis pensent qu’elles leur seront fort utiles pour mener à bien leur mission.
Dans le compartiment où ils sont assis, il y a deux banquettes en cuir l’une en face de l’autre, séparées par une table rectangulaire. Des couvertures sont à leur disposition sous leurs sièges afin qu’ils puissent se reposer. Le trajet durera probablement toute la nuit, puisque de nombreux petits villages comme celui de Paddoxtown (peuplés d’humains, mais aussi de Pokémon ; certains ne comptent d’ailleurs parmi leurs résidents uniquement ces derniers !) sont à traverser.
Le Flambino réussit à attraper un dépliant rangé avec les draps. Il présente un wagon de ce train dans lequel il est possible de faire l’acquisition de produits variés en payant avec des monnaies assez inhabituelles, comme par exemple des objets personnels, des services, des combats, des informations, et bien d’autres encore, il serait long et inutile de toutes les citer ici.
Enchantés par tout cela, les deux amis sortent de leur bulle de confort et prennent le couloir situé à leur gauche, puisque l’autre est une impasse. Ils gambadent joyeusement jusqu’à l’entrée dans le wagon central. La grande pièce aux tons chauds comporte un bar, une cabine, d’étranges appareils dont le fonctionnement est encore obscur aux deux jeunes Pokémon… Ils sont apostrophés par un oiseau au plumage noir de jais, haut d’au moins deux mètres :


-Les deux p’tits jeunes, vous cherchez quoi, exactement ? Du boulot ?
-Laisse-les, répond mon rival à leur place, je suppose que c’est la première fois dans ce train. Tu ne faisais pas le fier, la première fois que tu y étais.
-Mêle-toi de tes prisonniers, réplique sèchement le Corvaillus, alors que mon interlocuteur sort du wagon. Alors, les jeunes ?
-Nous venons juste faire un petit tour, murmure Pelage de Feu, intimidé par le regard du corbeau, et regarder un peu ce que vous proposez dans cette boutique ambulante…
-Et qu’est-ce qui vous amène dans ce train, les questionne leur interlocuteur. Vous ne venez pas ici pour faire un peu de tourisme, n’est-ce pas ?
-Nous sommes à la recherche de mon père, qui a été capturé alors qu’il se battait avec mon frère, explique le Flambino. Nous espérons obtenir des informations sur ce qui aurait pu lui arriver. Et j’aimerais beaucoup savoir où est parti mon frère et le revoir.
-De mémoire de Corvaillus, il y a dans ce train des personnes qui pourront te renseigner un peu sur ce que tu cherches. En échange d’un petit service de la part de ton ami, je peux te donner leurs noms. Il s’agirait d’un petit don d’électricité à une pile. Et comme je suis très sympathique, je vous offre un sac à dos chacun ! Alors, marché conclu ?
-Avec plaisir ! répondent les deux amis d'un ton enjoué.


L’oiseau couleur de jais lance deux sacs à dos, l'un blanc et ocre, l'autre orange et rouge aux pieds des jeunes voyageurs. Le corgi au pelage aux couleurs similaires à celles de son sac, s'avance les yeux brillants vers lui, prêt à accomplir sa part du marché. Du bout gris de son aile, le marchand désigne une tige métallique reliée à une pile. Le regard mauve posé sur l'acheteur, il attend sa réaction.
Joyeux, Éclair d'Or saute vers le dispositif en lançant une étincelle, émettant alors un bruit métallique. La pile se charge très rapidement en électricité.
Le corbeau prend alors un téléphone relié à un long câble réglisse et compose avec une griffe cachée par son plumage un numéro sur le clavier. Quelques instants plus tard, il marmonne :

-Jamais il ne répond, celui-là… Désolé, les jeunes, mais celui qui est susceptible de détenir des informations ne veut pas décrocher. Tout ce dont je me rappelle, c'est qu’il avait mentionné un pacte, une légende, bref, des trucs du genre quoi. Installez-vous, on va discuter un peu.
-On va parler de quoi ? le questionne Pelage de Feu en s'installant sur l'un des tabourets du bar, aussitôt imité par son compagnon de voyage.
-De nos vies respectives. Si je ne me trompe pas, vous ne connaissez pas encore vos passés respectifs. Mais je vais d'abord raconter mon histoire.
Autrefois, je vivais avec les autres membres de ma famille, des Bleuseille et des Minisange. Un jour, lorsque mon fils a évolué, j’ai voulu lui laisser la place en tant que chef du foyer. Je suis longtemps resté à la recherche d'un emploi, sans en trouver un qui me convienne réellement.
J'ai été embauché en tant que taxi durant quelque temps, mais la présence constante d’un humain m'a rapidement déplu. Lors de mon dernier trajet, un humain parlait avec mon pilote de ce fameux train. Je n'ai pas hésité une seule seconde et je suis venu ici. J'ai découvert des personnes amicales et une ambiance agréable. Ainsi, je suis à ce poste depuis une demi-douzaine d'années.
Mais depuis peu, ma famille me manque terriblement. Je me demande ce qu'ils sont devenus durant mon absence. C'est mon dernier trajet, ensuite, j'irai les retrouver. Vous savez, ça fait du bien de pouvoir parler un peu à quelqu'un en sachant que notre interlocuteur ne nous jugera pas. Éclair d'Or, nous écoutons ton histoire.
-Moi, je vivais seul, raconte-t-il en plongeant son regard de jade dans celui de son camarade. Non pas par choix, mais mon œuf était orphelin. J'ai passé mes trois premiers jours à pleurer et à me cacher dans un buisson, qui n'était d'ailleurs pas des plus confortables. Jour et nuit, j'espérais que mes parents viendraient me chercher. Mais ça ne fut jamais le cas. Le loup brun que tu as vu dans la Zone des Gouttelettes pour la première fois m'a recueilli et élevé en compagnie d'autres orphelins. Un jour, il m'a parlé de quelqu'un qui avait besoin d'aide, et m'a emmené à ta rencontre. À toi, Pelage de Feu.
-Je vivais avec mon frère, Unash, et mon père, Hibanu, et ils se sont disputés violemment. L'un d'eux a lancé un ballon enflammé sur l'autre, mais qui m'a touché. Mon frère est parti, mon père a été capturé, et j'ai rencontré Éclair d'Or.

Les larmes aux yeux, les trois Pokémon marquent un silence. Le Corvaillus propose aux deux autres de les emmener sur les Terres des Dangers, où ils trouveront des réponses chez un de ses amis.

-Notre train arrive à Motorby, annonce une voix mécanique, veuillez descendre.

Ils obéissent et descendent, alors que le jour n'est pas encore levé.