Les Apôtres d'Erubin de Malak

Dans l'imaginaire collectif, Almia était l'une des régions où l'air était le plus pur, du fait de son mode de vie très proche de la nature. Vaslot aurait dû être heureux de pouvoir à nouveau le respirer, après plusieurs mois passés dans une ville comme Céladopole, avec ses énormes immeubles collés les uns aux autres, ses embouteillages, ses usines et donc sa production de CO2 et autres gaz polluants. Et pourtant, l'air frais et sain d'Almia rendait Vaslot mal à l'aise, comme s'il n'était pas à sa place ici.

Surtout que cet « ici » était, en l'occurrence, en plein milieu de l’École Ranger, entouré par tous ces futurs défenseurs de la justice et de la loi, qui devaient avoir le plus grand mépris pour un mafieux Rocket comme lui, qui se servait des Pokemon pour l'argent. Mais eux, finalement, Vaslot ne s'en souciait nullement. Ils ignoraient qui il était réellement, et le prenaient juste pour un membre de la famille d'un des élèves en visite. Ce qu'il était, après tout. Non, la personne dont il était le plus inquiet à l'idée qu'elle ne découvre sa vraie nature était juste à côté de lui en ce moment, tandis qu'ils marchaient paisiblement dans le grand et vert domaine de l'école.

- N'est-ce pas un endroit merveilleux ? Lui demanda Marine en souriant. Ça fait plus de cinq mois maintenant, mais chaque matin, je continue à me balader ici pendant une demi-heure. C'est si reposant et paisible !

Vaslot était plus du genre à trouver le repos après avoir réussi un coup lui ayant rapporté plusieurs milliers de Pokédollars que dans la contemplation de paysages, mais il devait admettre que le cadre était bien choisi. La vue en hauteur sur la mer, les Pokemon sauvages qui se baladaient à droite à gauche, l'air marin, et surtout le silence. La promenade hors de l'école continuait jusqu'à la Place de l'Essor, le lieu où on pouvait avoir la meilleure vue du domaine, et où les Nirondelle se regroupaient.

- Ils vous forment vraiment au métier de Ranger ici, où à être de futurs branleurs millionnaires ? Plaisanta Vaslot.

- On fait souvent des sorties en forêt ou en montagne, précisa Marine. Tout pleins de lieux inhospitaliers dans lesquels on passe plusieurs jours, à tenter de trouver de la nourriture comestible et un coin pas trop inconfortable pour dormir.

Vaslot, en bon grand-frère protecteur, fronça les sourcils.

- Ils vous lâchent en pleine nature au milieu de Pokemon sauvages peut-être dangereux, alors que vous savez à peine utiliser un Capstick d'entraînement ?

- Y'a toujours un prof ou un Ranger qualifié avec nous, le rassura sa sœur. Puis c'est ce qu'on sera sans doute amené à faire plus tard, autant s'y habituer. Ça permet aussi à ceux qui s'imaginaient autre chose d'être confronté à la réalité. On a déjà eu six départs de gars qui ont renoncé.

Outre les dangers de la nature, Vaslot ne s'inquiétait pas trop pour Marine. Elle avait toujours été très débrouillarde ; une obligation quand on avait comme parent qu'un père bon à rien et alcoolique. Ce n'était sans doute pas le cas de pas mal de fils de bonnes familles qui étaient venus ici attirés par le prestige de la fonction et parce que leurs parents pouvaient leur payer cette école hors de prix.

- Et les cours théoriques, comment ça se passe ? Tu t'en sors ?

- Quand ça concerne les Pokemon, oui. Mais à côté, on a des enseignements technologiques et scientifiques, de langue étrangère et même de droit, qui sont très loin de mon pauvre niveau scolaire. Puis ce qu'on doit faire en sport, c'est violent quoi. On se croirait à l'armée…

- Bah, ce n'en est pas loin. Les Pokemon Rangers sont des combattants tout-terrain.

Vaslot se demanda vaguement s'il ne pourrait pas aller rencontrer les professeurs des matières où Marine avait des difficultés, et leur verser un petit pot-de-vin pour qu'ils améliorent ses notes. Mais il y renonça bien vite. Tenter de corrompre des employés de la Fédération Ranger, ce serait assez dangereux.

Vaslot s'était pris une petite semaine de congé pour rendre visite à sa sœur à Almia. Le chef de section Byz n'avait eu aucun problème à la lui accorder. Faut dire que Vaslot n'avait pas chômé ces derniers mois. Son réseau à Céladopole ne faisait que s’agrandir, et grâce à son sens aigu des affaires et de la façon dont se servir des autres, Vaslot contrôlait déjà bien 5% des bénéfices mafieux de toute la ville, ce qui était énorme. Byz n'hésitait donc pas à caresser dans le sens du poil ce jeune homme miraculeux qui lui avait rapporté si gros en si peu de temps.

Il fallait préciser que Vaslot avait également profité de la chute de N.W.C. Prédisant ce qui allait se passer avant en envoyant ses preuves et son témoignage à Funerol, il avait fait en sorte de faire tomber dans les mains de la Team Rocket une bonne partie des employés de N.W.C situés à Kanto les moins... regardant sur les lois. Le petit bonus, ça avait été le suicide de Stylord. Vaslot en avait été fort triste... car il aurait largement préféré que ce pourri passe le reste de sa vie dans une cellule froide et humide. Mais maintenant que Stylord n'était plus, Vaslot pouvait librement circuler à Almia, sans craindre que quiconque n'ait connaissance de son rôle dans l'explosion au Vert de la Planète. Enfin, personne d'autre que les autorités locales avec qui il avait passé un accord.

Du coup, avec tout ça, Vaslot avait eu une promotion, et on lui avait même changé ses Pokemon contre de plus puissants. Il avait huit sbires Rockets sous ses ordres aussi. Le jeune homme était satisfait de sa réussite, mais pas surpris. Il avait toujours su qu'il aurait pu s'élever très haut, s'il n'était pas resté bloqué dans une bande pourrie avec des pleins de dettes sur le dos. Et naturellement, il ne comptait pas rester sous les ordres de Byz toute sa vie. Ni sous ceux de la Team Rocket, d'ailleurs…

- Ah, Marine, tu es là.

Une voix enjouée et quelque peu timide fit sortir Vaslot de ses rêves de grandeur. Il se tourna vers l'adolescent qui venait d’interpeller sa sœur. Un peu plus jeune que Vaslot, c'était un garçon bien fait de sa personne, aux cheveux verts assez longs retenus par un bandeau. Il s'avança vers Marine avant de remarquer la personne qu'il ne connaissait pas à ses côtés. Marine fit les présentations.

- Eliott, je te présente mon frère, Vaslot. Grand-frère, c'est un camarade de classe. Il m'aide beaucoup, il est doué en tout.

Le dénommé Eliott rougit du compliment. Vaslot ne put que remarquer comment il dévorait sa sœur des yeux.

- Enchanté, monsieur, fit le garçon en serrant la main de Vaslot. On ne vous remerciera jamais assez ici d'avoir permis à Marine de venir étudier ici. Votre sœur éclaire toutes nos journées, même les plus pluvieuses.

Vaslot haussa les sourcils devant cette déclaration digne d'un vieux poète romantique, et aussi devant le « monsieur » qu'Eliott lui avait donné, alors qu'ils ne devaient avoir qu'un ou deux ans de différence.

- Le professeur Kreluch nous cherche, dit ensuite Eliott à Marine. Y'a un beau bazar dans le champs sud. Plusieurs Pokemon se battent. Ça nous fera un beau exercice de capture.

- O.K, j'arrive.

Elle laissa Eliott partir devant puis dit à son frère :

- Désolée. Les cours non-prévus, ça arrive souvent ici.

- Pas de problème. De toute façon, je comptais y aller. C'était sympa de revoir Almia, mais j'ai un paquet de trucs qui m'attendent à Kanto.

- Pour ton travail de euh... conseiller en vente et communication ?

- C'est ça, assura Vaslot en souriant mentalement.

- Comment as-tu pu avoir un poste pareil, alors que t'es même pas allé au lycée ?

- La boîte pour laquelle je bosse fait passer les capacités et les talents naturels avant les diplômes.

Ça au moins, c'était véridique. La Team Rocket se fichait pas mal du niveau d'étude de ses employés.

- Je te rappelle quand je suis rentré à Kanto, conclut Vaslot. Et d'ici là, fait gaffe à toi. Il me semble que cet Eliott a un peu flashé sur toi.

- Je sais, ricana Marine. Mais je vais éviter de m'engager sur ce terrain-là. Eliott est un gars bien, mais s'afficher comme sa petite amie fera de moi la cible préférée de quasiment toutes les filles de l'école.

Vaslot serra sa sœur contre lui, et la laissa filer, vers son cours de Pokemon Ranger, vers ses nouveaux amis et futurs camarades, vers le chemin qu'elle avait choisi : celui de la justice et de l'innocence. Une fois sorti du domaine de l'école, Vaslot alla retrouver l'homme qui attendait négligemment sur le pont en bois reliant l'est de Véterville en fumant une cigarette. C'était en réalité un sbire Rocket en civil, assigné à Vaslot par Byz. Pour sa protection bien sûr, mais aussi pour le surveiller. Autant le chef de section de Céladopole était satisfait de son travail, autant la confiance absolue en un nouveau membre ne se gagnait pas en quelques mois dans ce milieu.

- Allez, lui dit Vaslot. J'en ai fini ici. On passe prendre le pognon de Bouffarti à Bonport, et on rentre.

Jetant sa cigarette, le sbire acquiesça d'un air sombre avant de dire :

- Sauf vot'respect chef, ça craint pas un peu, vot'sœur ici ? J'veux dire, c'est la Fed'Ranger quoi. S'ils pouvaient tous nous coffrer, ils l'feraient.

Vaslot jeta un regard peu amène à ce Rocket patibulaire qui avait l'air de reprocher à sa sœur de faire les études qu'elle voulait.

- Ce n'est pas à nos proches à s'adapter à notre choix de vie. Nous avons choisi cette voix en toute connaissance de cause.

- Ouais, parlez pour vous... marmonna le sbire.

Il n'en dit pas plus, et Vaslot n'en eut pas besoin. En effet, c'était quelque chose de relativement courant dans la Team Rocket que de voir des membres ici contre leur gré, pour tout un tas de raisons. Parce qu'ils avaient des dettes. Parce qu'un membre de leur famille était retenu en otage. Pour la sécurité que la Team pouvait offrir... Il y en avait bien une petite partie qui croyait aux idéaux de l'organisation, à savoir un gouvernement mondial fort et prospérant grâce aux Pokemon. Mais pour Vaslot, et beaucoup d'autres, la seule raison de leur présence ici, c'était l'argent et le pouvoir.

Au bout du pont, ils croisèrent un vieil homme avec un chapeau melon beige et une canne, qui semblait se demander ce qu'il fabriquait ici. Quant Vaslot passa devant lui et le salua d'un signe de tête, celui-ci demandait d'une voix chevrotante :

- Veuillez m'excuser, mademoiselle. Je cherche quelqu'un. Peut-être pourriez-vous m'aider ?

Vaslot plissa les yeux.

- Vous m'avez appelé « mademoiselle » ?

- Mille excuses, madame, corrigea le vieil homme. Je ne pensais pas que vous étiez marié. Vous faites si jeune.

- Ce vieux se fout d'vous, chef, décréta le sbire. Je lui fais sa fête ?

Vaslot avait certes les cheveux longs, et on pouvait à l'occasion le prendre pour une fille, de loin et de dos, mais jamais de face et à cette courte distance. Cela dit, il calma les ardeurs de son subordonné.

- On est censé se faire discret dans cette région, et pas agresser le premier vieux un peu myope qui passe, soupira-t-il.

Puis, au vieil homme, il dit :

- Je suis un garçon, monsieur. Qui cherchez-vous au juste ?

- Vous êtes un glaçon dîtes-vous ? Oh, ne vous inquiétez pas, je ne suis guère sociable non plus, madame. Et je suis un homme marié. Du moins je l'étais. À qui par contre, ça j'ai du mal à m'en souvenir... Enfin bref, je cherche... euh... vous savez ?

- Non, je crains de ne pas savoir, s'impatienta Vaslot.

Le vieux était non seulement aveugle, mais visiblement également sourd et sénile.

- Allons bon, mes informations étaient on ne peut plus claire pourtant, se lamenta le vieil homme. Il devait se rendre à l’École Ranger cette semaine pour y rendre visite à sa sœur qui est étudiante là-bas. Peut-être l'ai-je raté ?

Les deux Rockets échangèrent un regard perplexe, et Vaslot fut soudain sur ses gardes.

- Ce ne serait pas moi que vous cherchez ? Demanda-t-il.

- Je recherche un jeune homme, madame.

Vaslot s'impatienta. Il attrapa le vieil homme par les épaules pour le mettre bien en face de lui, et lui cria presque dans les oreilles :

- Je suis un garçon ! Vaslot Worm. Est-moi que vous cherchez ?

L'homme fut momentanément perdu, puis il s'exclama :

- Diable, mais pourquoi ne l'avez-vous pas dit immédiatement ?! Si vous êtes monsieur Vaslot Worm, en effet, vous êtes bien celui que je recherche ! Enfin je crois... En espérant ne pas m'être trompé dans le nom... Je n'ai pas une bonne mémoire, voyez-vous...

- Je ne m'en serai jamais douté, ironisa Vaslot. Bon, et vous êtes qui ? Que me voulez-vous ?

- Que je suis... Ah oui, ça je sais. Je suis Pierre-Emmanuel Bigoutet, fondateur et ancien directeur de l'Institut des Beaux Arts d'Illumis, dans la région Galar.

Vaslot fronça les sourcils, et son sbire Rocket signala :

- Illumis est à Kalos, pas à Galar, vieux.

- Kalos ? Mais oui bien sûr, Kalos, c'est d'où je viens, oui. Bien que j'habite le plus souvent à Sinnoh ces temps-ci... L'Aire de Détente, vous connaissez ? C'est une petite ville tranquille, assez huppée, sur une île au nord-est de Sinnoh. Le climat y est avenant, et les gens sont charmants. La comtesse Divalina nous y offre l'hospitalité. Vous comprenez, techniquement, c'est au Premier Apôtre à qui il appartient de trouver une base, mais il aurait été bête de dénigrer le magnifique manoir de la comtesse. Mon humble demeure à Illumis aurait été assez grande pour accueillir tous les Gardiens bien sûr, mais le professeur préférait un endroit un peu moins peuplé. Alors il se trouve que…

Vaslot l'arrêta en levant la main. Il savait d'expérience que si on laissait commencer un vieux, on aurait droit à l'intégralité de sa vie, surtout si celui-ci était sénile.

- Je suis assez occupé, monsieur Bigoutet. Veuillez me dire ce que vous me voulez, ou je pars.

- Ah oui, ce que je vous veux... Veuillez m'excuser, je suis assez distrait... Voyez-vous, nos modestes services de renseignements ont enquêté sur le fameux courrier qui a été adressé à Monsieur Funerol lors du procès de Jadielle, et qui a permis au professeur Erable de l'emporter sur la N.W.C. Nous avons mis quelques mois, en passant sur les enquêteurs de Parmanie jusqu'au champion Koga, mais il est quasi-sûr que ce soit vous qui en soyez à l'origine.

Vaslot retint une grimace. Il n'avait pas pensé, en envoyant ce courrier avec les preuves dedans, qu'Erable mènerait son enquête. Et c'était d'autant plus embêtant que Vaslot ne l'avait bien sûr dit à personne dans la Team Rocket.

- Un courrier ? Les enquêteurs de Parmanie ? Répéta le sbire. Il parle de quoi au juste, chef ?

Vaslot ignora la question du sbire pour demander à Bigoutet :

- Quand vous parlez de « nous » et de « vos modestes services de renseignements », vous faites référence à qui ?

- Eh bien, des Gardiens de l'Innocence, évidemment. Je vous en ai sûrement déjà parlé ?

- Non, soupira Vaslot. C'est quoi au juste ?

- Oh, vous pourrez nous qualifier d'association plus ou moins clandestine. Nous ne faisons rien d'illégal bien sûr, et nous œuvrons au plus grand bien, cela dit, il nous est nécessaire de travailler dans le plus grand secret.

Vaslot songea vaguement que si cette organisation était vraiment concernée par la discrétion, elle n'aurait pas envoyé un gars comme ce Bigoutet.

- Et donc ? Le professeur Erable fait partie de vos Gardiens de l'Innocence ?

- Assurément. Il en est même le chef. C'est lui qui nous a demandé d'enquêter sur le mystérieux bienfaiteur de la lettre, et c'est en enquêtant que nous avons appris que vous vous êtes retrouvés face à face avec... Mélénosius ? Non, Vecepapropius ?

- Verelosius, corrigea Vaslot. Verelosius Morenocautys.

Vaslot ne pourrait jamais oublier ce nom. Il en faisait encore des cauchemars parfois, en revoyant ce visage pâle et androgyne s'étirer en un sourire sadique. Il avait tenté d'enquêter sur lui, mais avait fait totalement choix blanc, comme les autorités de Parmanie d'ailleurs.

- Oui, ce monsieur. Un individu guère fréquentable. Enfin bref, mes collègues et moi, nous combattons les gens comme lui, qui se font appeler « Agents de la Corruption ». Nous aimerions donc vous convier dans notre base, afin que vous nous fassiez le récit de votre rencontre avec Cetemieusus. Par la même, le professeur Erable souhaite vous remercier personnellement pour l'aide que vous lui avez apporté contre N.W.C, qui était alors sous contrôle des Agents.

Vaslot devait avouer qu'il aimerait bien en savoir plus sur ces fameux Agents, ainsi que sur leur maître, ce soi-disant dieu Horrorscor et son Marquis, que Verelosius avait cités. Toutefois, quelque chose dans l'appellation des noms des deux organisations le fit tiquer.

- Vous vous faite appeler les Gardiens de l'Innocence, vous dites ? Et vous combattez les Agents de la Corruption, hein ? Si vous avez fait votre enquête, vous savez que je fais partie de la Team Rocket. Nous ne sommes pas exactement des parangons d'innocence. En fait, nous bossons largement plus du côté de la corruption.

- Il ne faut pas confondre la corruption avec un c minuscule et celle prônée par Horrorscor, qui prend une majuscule. Si vous avez envoyé toutes ces preuves à monsieur Funerol, c'est que vous étiez forcément révolté par les agissements de la N.W.C.

- Mouais... C'était pas très propre, ce qu'ils faisaient sous le Parc Safari, c'est sûr. Mais j'ai surtout agi par vengeance personnelle envers la N.W.C, et surtout envers son directeur des ressources humaines, celui qui s'est suicidé. C'est pas pour ça que j'ai envie de faire triompher la paix et l'amour, ou quoi que ce soit du genre.

- Nous avons tous les profils chez les Gardiens, lui assura Bigoutet. Peu importe le passé ou les convictions, tant que nous avons tous une sincère détermination à lutter contre Horrorscor et ses sbires. Mais ne vous inquiétez pas, cher monsieur. Il n'est pas question de vous recruter contre votre gré. Nous souhaitons juste vous inviter pour parler. Vous aurez autant de choses à apprendre de nous que nous de vous.

Vaslot envisagea la chose. Tant que ça n'engageait à rien, avoir plus d'infos n'était pas un mal. Et il lui fallait surtout savoir ce que ces Gardiens savaient sur lui, et comment se défendre si d'aventure ils devenaient ses ennemis. Vaslot n'aimait pas avoir sa vie étalée chez des gens qu'il ne connaissait pas. Même la Team Rocket ne savait pas grand-chose à son sujet, et il comptait bien que ça reste ainsi. Et puis... toute cette histoire à propos de ces Agents, de leur Marquis et de ce fameux Horrorscor, qui serait probablement un Pokemon, ça pourrait se révéler intéressant pour la Team également, et si c'était le cas, Vaslot serait encore plus bien vu par sa hiérarchie.

- Très bien, je passerai voir quand j'aurai le temps... Votre base se trouve donc à l'Aire de Détente de Sinnoh, le manoir de la comtesse... Divalina, c'est ça ?

Bigoutet hoqueta, comme s'il ne se souvenait pas l'avoir dit un peu plus tôt... ce qui était très probablement le cas.

- Oh, je vois... Le réseau de la Team Rocket nous avait déjà repéré donc ? Il va falloir que l'on prenne plus de précautions…

- La seule précaution à prendre serait de vous mettre à la retraite, fit remarquer Vaslot.

Il laissa là le vieil homme qui s'était mis à marmonner des trucs connus de lui seul. Étant resté silencieux depuis, le sbire Rocket rattrapa son chef et demanda :

- C'était quoi ce binz là ? Tout ce que ce gars a raconté…

Vaslot s'arrêta et toisa son subordonné, avant d'avoir vérifié qu'il n'y avait personne autour pour les surprendre.

- Edor... c'est bien ton prénom, hein ?

Ce dernier hocha la tête.

- Eh bien, Edor, à mon grand regret, tu vas devoir oublier tout ce que tu as entendu. Ce vieil idiot en a un peu trop dit. Je ne tiens pas à ce que le chef de section sache que je me suis mêlé d'un procès judiciaire en divulguant des éléments que j'étais censé réserver à notre hiérarchie. J'aimerai aussi que la Team ne soit pas au courant pour l'instant de toute cette histoire au sujet des Agents et tout... Tu comprends, si ça se révèle intéressant, je tiens être celui qui sortira ça de son chapeau.

- Vous délirez, chef ! Protesta le sbire. Vous n'pouvez pas cacher des trucs comme ça aux supérieurs, quoi !

- Bien sûr que si. La preuve : je l'ai déjà fait une fois. Non, en fait, ça fait deux fois. La première c'était quand j'ai roulé la Team dans la farine en lui faisant croire que mon ancien patron l'avait trahie.

Vaslot prit une de ses Pokeball. Il aurait préféré avoir un pistolet, mais n'avait pas pu amener le sien ici à Almia. Se sentant à juste titre menacé, Edor prit la sienne qu'il lança, révélant un simple Nosferapti ; un Pokemon digne d'un sbire de bas étage comme lui. Alors que Vaslot lui, avait sorti un Hypnomade. Quand Byz l'avait fait monter en grade, il avait remplacé son Soporifik par son évolution.

- Arrêtez ça chef ! Protesta Edor, qui devait avoir compris qu'il ne pourrait rien faire. J'me la fermerai, j'vous le jure !

- Les promesses d'un Rocket ne valent rien. Je le sais, car j'en suis un aussi, et que les miennes doivent valoir encore moins que les tiennes.

Edor perdit son sang-froid et cria à son Nosferapti de lancer Vampirisme. Vaslot Ricana, et ordonna Rafale Psy. En une attaque, ce fut fini. Le Nosferapti gisait K.O au sol. Impuissant, Edor tomba à genoux, tremblant devant l'Hypnomade qui approchait.

- Vous... vous allez juste m'hypnotiser pour que je perde mes souvenirs, hein chef ?

- Ah, j'aurai bien aimé, mon pauvre vieux, mais tu sais comme moi que ce genre d'hypnose n'est jamais définitive. Tu pourrais retrouver tes souvenirs dans quelques jours. Ou si Byz suspecte quelque chose dans ton comportement, il pourrait lever l'hypnose avec un autre Pokemon Psy. Non, je vais bien t'hypnotiser, mais pas pour te voler tes souvenirs, je le crains... Ne t'en fais pas, Edor. Je suis un gars sympa. Tu ne sentiras rien, tu seras profondément endormi.

Le sbire, comprenant le sort qui lui était réservé, tenta de fuir en hurlant, mais fut bien vite réduit à l'impuissance par les pouvoirs psychiques de l'Hypnomade. Le ramenant devant lui avec sa télékinésie, il bloqua mentalement ses paupières et son cou pour qu'Edor ne puisse détourner le regard de la pendule qu'il lui remua devant les yeux. Peu de temps après, le sbire tomba endormi. Un sommeil fort et qui durait un petit moment.

- Désolé, mon gars, lui dit Vaslot même s'il savait qu'il ne l'entendait plus. Rien ne doit entraver ma réputation et mon ascension, pas même le plus petit détail.

Puis il ordonna à Hypnomade de le jeter par-dessus le pont. Tombant dans la rivière, il coula en quelques instants, même si elle n'était guère profonde. Vaslot ne resta même pas le temps qu'il se noie. Il songeait déjà à l'excuse qu'il allait devoir sortir au chef de section Byz pour justifier sa mort.