II - Professeur Magnolia
Tous attendent que Magnolia s’explique maintenant. Cela ne doit pas être si grave que ça pense Platane, sinon Euphorbe les auraient prévenus avant et il n’aurait pas attendu la fin de la journée. En plus Euphorbe, comme tous les professeurs, a la possibilité de réunir de façon exceptionnelle tous ses collègues, comme il l’a fait pour leur parler des ultra-chimères qui ont menacé Alola. Tout ceci tend à le rassurer. Et pourtant, il n’a pas souvent vu Euphorbe être tendu comme cela. Pour rajouter à ses inquiétudes, alors que Magnolia avait jusque-là accroché sur son visage un sourire inamovible, la voir d’un coup la mine plus grave lui fait l’effet d’un enfant qui découvre que derrière le masque du clown se cache un personnage triste.
- Je ne veux pas vous inquiéter outre mesure, commence Magnolia, mais voyez-vous depuis quelque temps j’ai découvert un phénomène étrange proche de mon laboratoire et comme je n’arrive pas à l’expliquer, je voudrais le partager avec vous.
Magnolia laisse un léger silence, prend une inspiration et se lance.
- Un jour que je menais mes recherches sur le terrain, derrière mon laboratoire, j’ai vu au loin un faisceau de lumière rouge pointant vers le ciel. J’ai d’abord cru à la luminosité d’une attaque Pokémon déviée par un autre Pokémon mais comme cette lumière était fixe, j’en ai déduit que ce devait être des enfants qui jouaient avec un laser. Le lendemain je suis retournée continuer mes études au même endroit et, vous le devinez, la lumière rouge était toujours là.
Tous les professeurs commencent à s’imaginer ce que cela peut être mais aucun n’ose l’interrompre. Tous attendent la suite.
- J’ai donc décidé d’aller voir de quoi il s’agissait. Arrivée sur place, la lumière émanait d’un trou dans le sol, entouré de petits cailloux et montait droit dans le ciel. J’ai décidé de jeter dans ce faisceau lumineux un bâton qui a disparu aussitôt, sans un bruit.
Cette histoire est déjà passionnante, se dit Platane.
- Je suis donc retournée au laboratoire afin de me documenter et j’ai passé l’après-midi et une bonne partie de la nuit à chercher si des précédents semblables à celui-ci avaient déjà été observés. Vous êtes tous plus jeunes que moi ici donc je vais vous dire une chose, chercher une partie de la nuit à mon âge sans s’endormir en plein milieu de ses recherches la tête dans un livre est en soi un exploit.
Magnolia a à nouveau un petit sourire à la suite de cette phrase et cela détend le collège de professeurs.
- J’étais donc dans mes recherches mais rien n’était consigné, rien de semblable, que ce soit à Galar ou dans d’autres régions. Et puis plus les heures passaient plus je me trouvais envahie d’un doute. Et si à force de chercher, la lumière disparaissait sans laisser de traces ? Quelle tragédie, comment l’étudier et surtout comment expliquer aux autres personnes ce que je venais de voir ? À force de ressasser cette idée, je n’arrivais plus à lire les différents comptes-rendus sur les phénomènes Pokémons inexpliqués. J’ai donc décidé au beau milieu de la nuit de retourner voir cette lumière. J’ai essayé de marcher aussi vite que possible mais vous savez à mon âge, cela ressemble davantage à une lutte contre la gravité qu’à un pas accéléré.
Des rires s’élèvent de la table. Si tout le monde s’interroge sur la gravité du problème, l’autodérision de Magnolia fait du bien.
- J’ai donc décidé d’y aller en Taxi-Corvaillus.
- En quoi ? la coupe Keteleeria.
- Ah oui pardon je ne vous en ai pas parlé, pour faire simple c’est un Pokémon volant qui nous sert de taxi. Un peu comme les Pokémontures ici. J’ai donc pris ce taxi et un soulagement me traversa lorsque je vis la lumière rouge toujours présente, immobile. Je m’étais dit que la nuit, sa lumière serait plus visible et attirerait du monde mais l’aura était assez faible et personne n’était autour. J’ai fini le chemin à pied pour m’approcher le plus doucement possible de la lumière. Tout était silencieux et en pleine nuit comme cela je pensais que je pourrais écouter si un bruit sortait du trou dans le sol, mais non, rien du tout. Après un moment d’hésitation j’ai fini par me décider à passer la main dans le faisceau rouge. À l’instant où ma main a touché ce faisceau, tout est devenu flou et j’ai eu le sentiment que quelqu’un me tirait fort le bras pour m’emmener vers le ciel. La sensation n’était pas désagréable mais assez surprenante. Après quelques secondes, je me suis retrouvée au milieu d’un désert de cailloux, face à un Léviator géant.
- Un Léviator géant ? crie Chen.
Tout le monde se met à essayer de prendre la parole pour poser une question à Magnolia. Le résultat est une cohue incompréhensible. Magnolia continue, impassible.
- Vous m’avez bien compris, j’ai vu de nombreux Léviator ; Galar est une île je vous le rappelle, mais celui-ci était au moins trois fois plus grand que les plus grands spécimens étudiés à ce jour. J’ai essayé de regarder autour de moi pour voir si je reconnaissais un élément extérieur qui aurait pu me donner un indice d’où j’étais, mais rien, un désert de cailloux à perte de vue. L’avantage de vivre sur une île, c’est qu’elle est facile à cartographier, vu qu’elle a des limites physiques. Et il est donc facile d’en faire le tour. Mon âge avancé ne peut pas avoir que des inconvénients, je peux donc affirmer sans crainte avoir fait le tour de Galar plusieurs fois et vous affirmer aussi que ce grand désert où j’étais ne se trouve pas à Galar.
Les autres professeurs sont sidérés. Cette histoire semble encore plus incroyable que les ultra-brèches et les ultra-chimères. Dans la salle règne maintenant un silence de plomb. Magnolia aurait pu raconter son histoire devant une classe de chaises vides, elle aurait eu le même bruit de fond.
- Il n’y avait donc que le Léviator et moi, et ce dernier était extrêmement menaçant. Je ne voyais pas de lumière rouge semblable à celle que j’avais vu à Galar pour pouvoir faire le chemin retour. Il n’y avait donc qu’une chose à faire, essayer de le battre. J’ai envoyé le seul Pokémon que j’ai toujours avec moi, mon Palarticho. Mon Palarticho est un Pokémon Loyal qui m’a sauvé plusieurs fois et qui n’a perdu que très peu de combats avant que je le récupère dans des circonstances que je vous expliquerai plus tard. Lorsqu’il est sorti de sa Pokéball et a vu le Léviator, il s’est retourné vers moi et j’ai senti une certaine interrogation dans son regard. Je lui ai expliqué la situation et nous avons décidé de le combattre. N’ayant aucune connaissance de notre adversaire et de sa force, nous avons décidé de lancer son attaque unique tout de suite, joute astrale.
- Joute astrale ? Ce Palarticho a une attaque signature ? se permet d’interrompre le Professeur Chen.
- Effectivement, nous avons découvert il y a peu que le but ultime des Canarticho n’est pas seulement d’évoluer en Palarticho mais de gagner assez de combats pour pouvoir apprendre cette attaque unique.
- Ce Palarticho est décidément fascinant, lui répond Chen.
Magnolia reprend.
- C’est une attaque type combat extrêmement puissante mais qui demande énormément d’énergie au Pokémon et qui peut l’affaiblir pour la suite du combat. Palarticho a donc lancé Joute astrale et le Léviator l’a encaissé sans broncher.
- C’est normal, Léviator est un type vol, s’essaye Platane.
- Je sais bien, et les attaques combats y sont plus faibles, mais voyez-vous, Joute Astrale est assez puissant pour faire de sérieux dégâts, faiblesse ou pas. Or là le Léviator a pris autant de dégâts que si j’avais lancé trempette avec un Magicarpe.
- Ce Léviator devait être d’une puissance phénoménale, ajoute Euphorbe. Que s’est-il passé ensuite ?
- Ensuite, tout s’est passé très vite. Le Léviator a lancé un Hydroqueue qui a mis hors d’état de combattre mon Palarticho, en un seul coup. Je n’avais plus d’autre option j’ai donc sorti ma PokéBall et au moment où j’ai rappelé mon Palarticho, je me suis sentie tirée par les pieds comme si une main m’avait attrapé les chevilles. Encore une fois la sensation n’était pas désagréable mais très surprenante. Tout est devenu flou et je me suis retrouvé à l’endroit où j’étais lorsque j’ai posé la main dans cette lumière rouge. Elle était toujours là, exactement comme avant ma rencontre avec ce Léviator. J’ai passé un moment debout à attendre de voir si quelque chose allait se produire, mais rien. Tout était calme et silencieux. J’ai passé le reste de la nuit à cogiter sur ce qui venait de se passer. J’en étais même venu à douter de ce qui m’étais arrivé, était-ce réel ? L’état de mon Palarticho sur la table du centre Pokémon le lendemain me laissait penser que ce n’était pas qu’un mauvais rêve.
Elle continue.
- J’ai passé deux jours à essayer d’étudier le phénomène et je suis retournée plusieurs fois proche de la lumière mais elle n’est jamais partie et ne s’est jamais déplacée ; elle n’a jamais changé d’intensité ni pointer ailleurs que droit vers le ciel. Au bout de ces deux jours, je décidais de réessayer de mettre la main, par curiosité. Il s’est passé exactement la même chose que la première fois, le même Léviator géant, le même désert, le même combat, la même sensation d’être arrachée du sol puis tirée vers le bas. Et au final, la même attaque qui a mis hors de combat mon fidèle compagnon. C’est en allant au centre Pokémon pour la deuxième fois pour soigner mon Palarticho que j’ai fait la rencontre d’un voyageur qui m’a parlé de l’école Pokémon. J’étais en train de me faire sermonner par l’infirmière Joelle qui s’inquiétait de me voir reprendre les combats à mon âge quand ce jeune homme est entré dans le centre Pokémon avec un magnifique Excelangue. Il venait d’arriver à Galar et cherchait des renseignements sur les spécialités locales. Après l’avoir renseigné sur nos currys locaux, j’ai continué à discuter avec lui. C’était un jeune homme plein d’envie qui effectuait un tour des régions culinaire. Il essayait de gouter un maximum de spécialités pour pouvoir ensuite tout compiler et ouvrir son propre restaurant, comme son père. Vous connaissez tous son père puisque c’est le charmant monsieur chez qui nous avons mangé hier soir. Après lui avoir dit que j’étais professeur, il m’a parlé du professeur Euphorbe et de l’école Pokémon. Et c’est ainsi que j’ai eu idée de prendre contact avec Euphorbe, dans un premier temps pour parler de cette école Pokémon, puis pour vous exposer le phénomène auquel je suis confrontée en ce moment, savoir si l’un d’entre vous peux m’éclairer sur ce sujet.
Le monologue de Magnolia prend fin dans le même silence qu’il a commencé. Tous les professeurs sont maintenant plongés dans leurs réflexions. Visiblement, personne n’a déjà été confronté à ce problème, il se serait déjà manifesté sinon.
Voyant le silence se prolonger, Magnolia reprend.
- Je vous en parle aujourd’hui car je suis inquiète. Je ne sais pas expliquer ce qui s’est produit et je me dis : Et si le Léviator géant descendait sur Galar ? Vu sa taille et son apparente puissance, il pourrait déstabiliser l’équilibre naturel du monde Pokémon. De plus, nous savons tous que si les Léviators sont si populaires, c’est pour leur capacité de destruction qui nous est conté dans les récits anciens.
Chaque professeur prend conscience de la gravité du problème et tous se regardent afin de voir qui va pouvoir briser ce silence. Magnolia se rassoit et dit.
- Maintenant que vous avez le même niveau d’informations que moi, je vous en prie, dites-moi ce que vous en pensez.
Orme prend la parole en premier.
- Est-ce que le Léviator que vous avez vu avait une couleur différente de ceux que nous pouvons croiser dans la nature ?
- Non de ce que j’ai pu observer, il avait les mêmes couleurs, à quoi pensez-vous ?
- Eh bien, il y a à Jotho une légende qui raconte qu’un Léviator géant et d’une puissance phénoménale est le gardien d’un des lacs du nord de la région. D’après les récits que nous en avons aujourd’hui ce Léviator serait rouge. Peut-être vous êtes-vous retrouvée face à ce spécimen.
- Non, désolé, il était bien bleu.
- Avait-il des nageoires plus développées que celles des autres Léviators ? enchaîne Platane.
Magnolia fait non de la tête.
- Peut-être est-ce une certaine forme de méga-évolution, insiste Platane, certains Pokémons grandissent lors de leur méga-évolution, peut-être qu’à Galar ce phénomène est amplifié.
- Je vais avoir beaucoup de mal à affirmer ou nier ce que vous proposez professeur Platane, je ne connais pas aussi bien les méga-évolutions que vous mais ce dont je suis sûre, c’est que le Léviator que j’ai vu n’était pas dans sa forme méga-évoluée que nous connaissons.
- Et puis cela pose le problème de savoir qui détient le bracelet qui a activé sa méga-évolution, nous ne connaissons pas de Pokémons qui méga-évoluent d’eux même, dit Seko.
Quant à moi je doute fortement que cela puisse être une ultra-chimère, ajoute Euphorbe. Nous n’avons jamais vu d’ultra-chimères qui prenne la forme de Pokémons existants et la lumière rouge que vous décrivez ne ressemble pas vraiment à une ultra-brèche.
Les professeurs doivent maintenant se rendre à l’évidence, ils n’ont aucune idée de ce qui a pu provoquer ce phénomène.
- Qui, à part vous, à la connaissance de cette lumière rouge ? questionne Chen, soucieux de la sécurité des habitants de Galar.
- Avant que je ne vous en parle, nous n’étions que deux, mon assistante Sonya et moi. Je vois où vous voulez en venir Professeur Chen, vous vous inquiétez de voir des enfants jouer avec la lumière et se retrouver en danger ? Ne vous inquiétez pas, j’ai fait construire autour de la lumière une zone de travaux fictive. C’est un des avantages d’être professeur, sous couvert d’étude de terrains archéologiques, je peux faire fermer n’importe quelle section des terres sauvages. Pour les gens qui se promènent autour il y a donc une zone de travaux de fouilles au milieu de laquelle, derrière des palissades, se trouve notre lumière. J’ai pris soin de disposer plusieurs autres lumières fictives qui imitent la lumière émise du sol, ceci afin que rien ne paraisse suspect.
- Très ingénieux, vous avez bien fait. N’avez-vous pas peur que quelques trouble-fête viennent vandaliser votre zone de travaux et ainsi se mettre en danger, continue Chen.
- Nous n’avons pas vraiment de personnes mal intentionnées à Galar, nous avons bien la team Yell mais ce sont plutôt des enfants en manque de reconnaissance et qui se cherchent que de véritables bandits. Ils n’iront pas fouiner dans ma zone de travaux, je connais leurs parents personnellement et ils ont trop peur des conséquences que pourrait engendrer un tel acte.
- Bien, maintenant que nous savons que la zone est sécurisée et que tout le monde a pris connaissance du problème, je vais poser la question à laquelle tout le monde pense, qu’est-ce que l’on fait ? dit Chen.
Les premières secondes d’hésitations de tous les professeurs donnent une bonne indication sur le fait que personne ne sait quoi faire.
- Je pense que nous devons envoyer quelqu’un sur place pour assister Professeur Magnolia dans ses recherches, lance Keteleeria
- Je me porte volontaire, dit immédiatement Platane en levant la main.
Tous les professeurs sont surpris. Non pas qu’ils ne le pensent pas capable d’aider Magnolia mais celui-ci a déjà accepté le projet d’école et cela demande à passer du temps dessus.
- Je vois deux avantages notables à cela, premièrement la méga-évolution, sujet que je traite depuis des années, semble être ce qui se rapproche le plus de ce que Professeur Magnolia a vu. Deuxièmement, je suis géographiquement le plus proche de Galar, cela facilitera probablement la logistique si je dois venir, argumente Platane.
Avec ces arguments, il espère pouvoir convaincre les autres car la véritable raison de son volontariat se trouve ailleurs. Ce récit de Magnolia a ravivé en lui le désir et l’envie de voyager. Il n’a plus ressenti ce sentiment depuis ses premières escapades à travers Kalos. Et puis le plaisir d’être parmi les premiers professeurs à découvrir tous ces nouveaux Pokémons le rend impatient. Bien sûr, il va devoir étudier ce Léviator géant mais au cours de son voyage, il en est persuadé, il va découvrir tant de nouvelles choses.
Il n’y a pas vraiment de débat entre les professeurs, pour le plus grand plaisir de Platane. Tous ont envie de découvrir la région de Galar mais d’un point de vue totalement objectif, il est évident que Platane doit y aller.
Le projet de l’école Pokémon est donc mis entre parenthèses, étant donné le départ en urgence de Platane pour Galar. Vu l’importance de la découverte de Magnolia, les professeurs se sont mis d’accord de se connecter au moins une fois par semaine au réseau inter-centres Pokémons pour pouvoir évaluer l’avancée des études de terrains et se tenir prêts en cas de demande de la part du binôme Platane/Magnolia.
Euphorbe se lève à nouveau.
- Bien, écoutez il est tard et je sais que la plupart d’entre vous ont des vols ce soir. Si personne n’a d’autres questions je pense que nous pouvons clore cette réunion annuelle. Nous avons bien avancé et nous serons de toute façon amenés à nous retrouver bientôt pour parler de Galar. Motisradio a enregistré et transcrit toute la réunion. Le compte rendu ainsi que l’enregistrement intégral vous seront envoyés d’ici la fin de la semaine. Merci à tous d’être venus, j’espère que vous avez apprécié votre court voyage à Alola autant que j’ai apprécié vous recevoir et que vous reviendrez.
Les professeurs applaudissent Euphorbe, qui rougit, puis se lèvent pour sortir de l’école Pokémon. Tous se rendent compte que le soleil est déjà bas sur l’horizon. Vu que la salle n’a aucune fenêtre, il est plus difficile de se rendre compte du temps écoulé.
Tous les professeurs retournent en bus à l’aéroport avec le professeur Euphorbe au volant. Les discussions dans le bus ne sont pas très animées, la fatigue commence à se faire sentir. L’attraction principale de ce moyen de locomotion est bien évidemment le professeur Magnolia et sa région de Galar mais tout le monde prend soin de ne pas aborder le sujet du Léviator géant afin de ne pas créer un nouveau silence. Magnolia commence par parler de son curry préféré et de son affection pour son Voltoutou. Mais ce qui occupe le plus le trajet est l’explication du concept du Pokémon Camping et de ses bienfaits pour les relations entre Dresseurs et Pokémons.
Le mini-bus finit par s’immobiliser devant le l’aéroport alors que le soleil est en train de se coucher par-delà l’horizon. Tous les élèves de l’école Pokémon d’Alola sont venus dire au revoir aux professeurs et plus particulièrement Sacha qui est bien conscient que sans eux tous, il n’aurait jamais réussi à remporter cette ligue. Après de longs adieux entre Sacha et ses Pokémons, les Professeurs passent tous remercier chaleureusement Euphorbe pour l’accueil impeccable.
- J’essayerai d’être au niveau de votre accueil dans un an, lui glisse Magnolia.
- Oh j’ai beau vous connaitre depuis peu, je n’ai aucun doute sur votre capacité à accueillir les gens dans les meilleures conditions, répond Euphorbe.
- Je ferai tout pour que ma prestation efface la vôtre des mémoires, lui dit en rigolant Magnolia.
Euphorbe sourit. L’esprit de compétition et de challenge qui anime cette vieille dame est impressionnant et le contraste entre son état physique et mentale a quelque chose de très touchant.
Chaque professeur prend son avion, marquant ainsi la fin de cette réunion des professeurs, et le début d’une nouvelle aventure.
Ce n’est qu’une fois seul dans l’avion que Platane peut réellement prendre la mesure de ce qui lui arrive. Il regarde par le hublot en jouant avec la Pokéball contenant le Brutalibré de Sacha. Il essaye de se remémorer tout ce qui s’est passé comme pour se convaincre que cette réunion a bien eu lieu. Cela fait plusieurs années qu’il participe à des réunions des professeurs mais aucune n’a été aussi forte en émotions pour lui. L’année de l’annonce des ultra-chimères a été un choc pour les professeurs mais cela ne le concernait que de loin. Là il avait dans la même réunion été désigné comme directeur de la nouvelle école Pokémon de Kalos et assistant terrain de Magnolia pour les recherches sur un phénomène inconnu. Cela fait beaucoup. Le départ pour Galar est prévu pour dans deux semaines, il s’est promis de ne pas commencer les démarches pour l’école Pokémon avant son retour de Galar. Il n’arrive pas à s’enlever de la tête cette image d’un Léviator géant détruisant des villes par excès de colère. Il sait bien qu’il est inutile de tout dramatiser mais lui qui a passé des années à étudier les Pokémons sait à quel point la relation entre les Hommes et les Pokémons est fragile et qu’il suffit d’un évènement comme celui-ci pour pouvoir détruire cette confiance mutuelle pendant des générations. D’autant plus que si un tel évènement se produit, même si ce n’est pas dans sa région, cela diminue considérablement les chances de monter son école Pokémons. Comment demander à des parents d’envoyer leurs enfants dans une école dont le principal sujet d’étude est potentiellement dangereux pour leur santé ?
Non décidemment, il lui faut à tout prix percer le mystère de ce Léviator.
Le ciel est d’un bleu azur au-dessus d’Illumis. Platane pose un pied hors de l’avion avec le sentiment de se retrouver dans un endroit familier. Cela lui fait ça à chaque fois qu’il quitte sa région. Et dire que dans deux semaines il part pour une durée indéterminée dans une nouvelle région. Platane chasse ces pensées et appelle le premier taxi qu’il croise, direction son laboratoire.
Deux semaines plus tard, Platane est adossé à la rambarde extérieure du bateau partant de Port-Tempères pour le mener à Galar, seul. Seul car pour des raisons de protections des espèces locales, il est interdit d’emporter des Pokémons d’une région à une autre. Il essaye de faire le point sur ce qui s’est passé ces deux dernières semaines mais il les a traversées en fantôme. Cette mission qu’on lui a donnée fait monter en lui depuis deux semaines un mélange d’excitations et d’angoisse. Il est toujours excité à l’idée de partir parcourir une nouvelle région mais il ne sait pas à quoi s’attendre sur place et surtout il sait qu’il doit des résultats à ses homologues.
Les appels de Magnolia à deux reprises ont eu pour effet de le rassurer un petit peu mais il ne pouvait s’empêchait de penser à autre chose qu’a ce voyage et cela le rongeait un peu. Il n’a eu que très peu d’interactions ces deux semaines, il a juste eu le temps de parler avec Serena de cette histoire d’école Pokémon. Comme le projet lui a plu et qu’ils étaient d’accord pour dire qu’attendre six mois était trop long, ils ont décidé que Serena commencerait à prospecter de son côté le temps que Platane revienne de Galar. Elle a bien grandi depuis ses premières aventures avec Sacha et Platane lui fait une entière confiance. Cela lui enlève un poids de l’esprit car il sait que le projet n’est pas en stand-by et qu’il sera probablement avancé au moment de son retour.
Il n’arrête pas de penser à son retour alors qu’il ne sait pas quand il rentrera, dans une semaine ou dans un an ? Il faut que j’arrête de penser à mon retour se dit-il, cela ne m’aide pas à me projeter dans mon voyage. Il voit quand même des points positifs à son départ pour Galar. En plus des nouveaux sujets d’études qu’il est sûr de trouver, il lui tarde de retrouver Magnolia. Il s’est surpris à s’être attaché à cette « bonne femme », toujours souriante et à sa connaissance quasi infinie en matière de Pokémons.
Magnolia lui a dit qu’il logerait chez elle, juste à côté du laboratoire Pokémon. Il ne sait pas trop à quoi s’attendre, mais il est content d’être proche du laboratoire et du lieu d’apparition de la lumière rouge.
Ça y est, les matelots larguent les derniers amarres et, dans un grondement, le bateau se met en route. C’était un paquebot de taille raisonnable, à trois étages, et il ne doit pas être plein à plus de la moitié. Il faut dire que la compagnie qui vend les billets ne fait pas de pubs et les prix sont assez élevés. Encore un frein à l’exploration et à la découverte, pense Platane.
Il décide de rester à l’arrière du bateau pour voir la côte de Kalos s’éloigner. C’est la première fois qu’il quitte sa région en bateau et voir sa côte s’éloigner lui fait un léger pincement. Afin de ne pas trop tergiverser, il se dirige vers l’avant du bateau pour voir la côte de Galar se dessiner. La côte arrive assez rapidement sur la ligne d’horizon, cependant, le bateau laisse les falaises sur bâbord pour la longer un peu. Platane regarde sa montre, il reste environ cinq heures de trajets. Autant aller faire une petite sieste pour arriver en pleine forme là-bas, surtout qu’on ne peut pas dire que ses dernières nuits aient été de tout repos. Il rentre dans le bateau pour chercher sa cabine, celui-ci est composé d’une volée de couloirs immenses donnant sur des chambres de part et d’autre.
- Une fois à l’intérieur, se dit Platane, il est difficile de savoir si nous sommes dans un bateau ou dans une barre d’immeuble de la périphérie d’Illumis.
La cabine est tout aussi déprimante, un lit simple fait face à une petite table en plastique sous laquelle se trouve un tabouret. Seul point positif, la vue de la mer depuis la chambre.
- Heureusement que je ne passe que quelques heures là-dedans se dit Platane, cette chambre aurait de quoi me déprimer en quelques jours.
Platane s’allonge sur son lit tout habillé, persuadé que dans quelques minutes il sera debout.
Quelqu’un toque à la porte, Platane se lève péniblement, encore un peu engourdi, il ouvre et voit un membre d’équipage.
- Monsieur, nous sommes arrivés à Moston, je vous invite à descendre par le pont inférieur.
Mince alors, se dit Platane, pour quelqu’un qui voulait passer quelques minutes allongé, j’y ai passé presque cinq heures, comme quoi j’en avais besoin. Il se dépêche de plier ses bagages pour ne pas faire attendre Magnolia. Il descend en courant les escaliers qui mènent au quai. Une fois à la porte il lève les yeux, le ciel est bas et gris, beaucoup moins plaisant qu’a son départ. Il baisse une première fois les yeux pour découvrir les quais de cette nouvelle ville. Le port, bien qu’assez étendu, semble avoir été frappé par l’industrialisation de masse. Le quai, au pied du paquebot, est vaste et dégagé. Plus loin, des bâtiments difformes sont accolés les uns aux autres. L’ensemble n’était pas désagréable à l’œil mais il semblait évident que les édifices ont été construits à différentes périodes et sous différentes influences architecturales. A bien regarder d’ensemble, cela ne lui semble pas extrêmement différent de certaines villes de Kalos. Là où Alola est vraiment dépaysant, Moston lui semble plutôt familier. Il baisse une nouvelle fois les yeux pour tomber sur la silhouette de Magnolia, un peu plus loin sur le quai. La professeure l’attend avec un grand chapeau et un long imperméable, lui donnant un air très noble. Il marche d’un pas décidé vers elle. Rien que de penser au sourire de Magnolia, il en avait le sourit aussi. Et sans surprise, elle l’attend avec son air heureux, appuyé sur sa canne.
- Bonjour Professeur Magnolia, lui crie Platane en agitant les bras.
- Je vous en prie professeur Platane tout le monde m’appelle Magnolia ici, vous pouvez faire de même, lui répond-elle calmement.
- Dans ce cas, faites de même et arrêtez de me vouvoyez j’ai l’impression d’avoir vieilli entre Kalos et Galar.
- Entendu, as-tu fais bon voyage, Platane ?
- Je pensais réfléchir à tout un tas de choses pendant le voyage et puis finalement je me suis juste écroulé sur ma couchette, c’est le personnel de bord qui est venu me réveiller.
- C’est très bien que tu te sois reposé un petit peu, j’ai énormément de choses à te montrer.
Ils montent à l’arrière d’une voiture noire où un chauffeur les attend.
- Nous ne prenons pas les fameux taxis Corvaillus ? s’enquit Platane.
- Oh non, je ne voudrais pas te jeter si vite dans le grand bain, ne sois pas trop impatient, tu auras bien le loisir de les utiliser.
- Je me disais en arrivant, que cette ville de Moston me semblait familière…
- Ca ne m’étonne pas, Moston est le plus grand port de Galar et la population y est importante. Toutes les personnes qui travaillent sur les chantiers navals ont dû être logés vite et pas cher, d’où toute ces petites maisons aux styles bien variés. Et ceci n’est pas propre à Moston, c’est le commun de tous les grands ports industrialisés. Donc oui, tu as probablement vu des villes qui y ressemblent dans les autres régions.
- C’est donc pour ça. Quel est le programme maintenant ? dit Platane avec entrain.
La voiture a maintenant quitté la ville et file à toute allure à travers de grands espaces verdoyants qui contrastent avec le gris du ciel. Platane a la tête collée à la fenêtre et scrute l’horizon pour voir s’il peut apercevoir un nouveau Pokémon.
- Et bien nous allons aller directement à mon Laboratoire, que je te montre le lieu où nous allons travailler et te présenter mon assistante. Puis nous irons manger un curry et nous installer chez moi où je te montrerai la pièce que je t’ai réservée.
- J’ai tellement hâte de découvrir tout cela, dit Platane le front toujours collé à la fenêtre de la voiture.
- Je n’en doute pas, ton impatience est perceptible. Pendant la fin du trajet je te propose un petit topo sur la géographie de Galar, qu’en penses-tu ?
- Avec plaisir, il faut bien commencer par quelque part ma découverte de cette région.
Magnolia sort de son petit sac une carte qu’elle déplie sur la banquette arrière. La carte semble dessinée à la main mais les différentes zones sont très bien définies.
- Tu viens d’arriver à Moston, tout à l’ouest de Galar. Au milieu ici se trouve Yesthingham, c’est là que se trouve mon laboratoire. Cette ville est très intéressante pour les recherches car assez centrale dans l’ile. Ce que nous sommes en train de traverser en voiture, ce sont donc des Terres sauvages, à l’ouest de Yesthingham. Au sud se trouve la région des lacs, à l’ouest se trouve une région montagneuse, et enfin au nord de vastes plaines. Être au centre de tous ces habitats différents est une aubaine pour l’étude des Pokémons.
- Je trouve impressionnant d’avoir une si grande diversité dans une seule île.
- Effectivement c’est une chance, surtout que nous avons aussi énormément de côtes, ce qui est très intéressant pour l’étude du milieu aquatique.
- Et quelle est cette grande ville au Nord des plaines ? dit Platane en pointant du doigt le nord de la carte toujours posée sur la banquette arrière.
- C’est notre ville industrielle. Tu sais ici, depuis que nous nous sommes ouverts aux autres régions, nous avons pris le tournant de l’industrie et nous exportons beaucoup, des métaux notamment. Et c’est dans cette ville que sont la quasi intégralité de nos usines. Ce n’est pas une très jolie ville si tu veux mon avis mais c’est impressionnant à voir une fois. Nous irons lorsque nous aurons élucidé notre mystère.
Avec l’excitation de l’arrivée à Galar, Platane a totalement oublié qu’il est ici pour traiter un vrai sujet et pas juste faire du tourisme.
- Tu as raison, une fois ce mystère résolu, je prendrai peut-être le temps de faire un peu de tourisme. Et où se situe cette fameuse lumière d’ailleurs ?
Magnolia lève la tête de la carte et scrute le paysage sur la droite de la voiture.
- Là-bas, dit-elle en pointant du doigt une petite colline à travers la fenêtre de Platane.
Platane regarde par la fenêtre et devine une petite zone de travaux sur une partie dégagée de la plaine.
- Effectivement, vu d’ici on ne voit pas ce rayon lumineux, quand bien même le temps est couvert.
- Oui et tant mieux, nous n’avons pas besoin de curieux.
Platane regarde maintenant dans le sens du véhicule, une ville se dessine au loin, faite de petites maisons en briques rouges, certainement Yestingham. Le voyage à travers ces terres sauvages lui donne plutôt une bonne impression pour l’instant. Il ne se sent pas aussi dépaysé qu’il pensait l’être en arrivant, tant mieux se dit-il.
La fin du voyage se passe en silence, le ronronnement continu du moteur n’étant perturbé que par le cri de Pokémons au loin.
Après une petite heure de trajet, la voiture finit par s’immobiliser devant le Laboratoire de Magnolia. Platane descend de la voiture, prends son sac dans le coffre et, après avoir remercié le chauffeur, suit Magnolia pour entrer dans le Laboratoire. Au moment où la grande porte vitrée s’ouvre, Platane fait un pas vers l’intérieur avec le stress d’un écolier qui découvre sa classe.
Ca y est, sa nouvelle aventure commence maintenant.