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Détective Pikachu : Le Monstre de Galar de T'oine



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Informations

» Auteur : T'oine - Voir le profil
» Créé le 20/09/2019 à 15:19
» Dernière mise à jour le 24/09/2019 à 10:22

» Mots-clés :   Absence d'humains   Aventure   Policier   Suspense

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Prologue : Il s'est passé quelque chose...
Il s’était passé quelque chose. Non pas que dans ce coin, les "quelque chose" n’étaient pas communs, mais ce "quelque chose" là avait… quelque chose. De différent. De très différent.

Le corps avait été découvert un peu plus tôt dans la matinée, alors que les alentours du lac se teignaient d’une magnifique couleur rosée. Rosée, comme la chair de cette pauvre créature qui s’exposait à l’air libre.

Le témoin, un Maraiste qui pêchait régulièrement dans le coin, avait dû être transporté d’urgence au centre Pokémon le plus proche, pour un suivi psychologique intensif. Il faut dire qu’il y avait des raisons. De tout ce qu’il avait pu voir au cours de sa carrière, l’horreur qu’il avait sous le nez aujourd’hui dépassait l’entendement. Il regardait le corps. Vision étrange que celle d’un cadavre. Notre cerveau avait du mal à imprégner cette image, à la décoder, à la comprendre. Un corps représentait à lui seul un paradoxe : une chose qui existait, et qui n’existait pas en même temps. Et le commissaire Noctunoir n’aimait pas les paradoxes.

Partout autour de lui, ses collègues s’affairaient. L’agent Caninos, un nouveau, flairait le sol aux alentours à la recherche d’indices éventuels, mais les odeurs que dégageait la terre humide le matin masquaient beaucoup d’effluves nauséabondes. Ce n’était pas plus mal. Le chien policier préférait de loin les odeurs de vase et d’herbe mouillée que celle d’un… bref. Pendant ce temps, l’agent Colombeau patrouillait au-dessus d’eux, l’œil aux aguets, guettant le moindre mouvement suspect qui pourrait faire remuer une ramure, un buisson, ou n’importe quoi qui pourrait attirer l’attention. Hoothoot, quant à lui, référençait les quelques pièces qu’ils avaient déjà pu relever. Et ce n’était pas beaucoup. Pour ne pas dire rien.

Lui, il refixa son attention sur le cadavre, se massant les tempes, craignant la migraine qui menaçait de se pointer à n’importe quel moment, comme à chaque fois qu’une de ses enquêtes faisait du surplace. Il ne comprenait vraiment pas comment de si faibles créatures, comme leur victime du jour, pouvaient encore avoir l’audace de vivre dans le coin. Ces Terres Sauvages portaient bien leur nom, enfin ! Elles appartenaient aux Pokémons sans foi ni loi, et lui n’avait aucun pouvoir ici, malgré son insigne. Seule la loi du plus fort était reine en ces lieux. Et, sans vouloir juger qui que ce soit, un Moumouton ne faisait clairement pas partie du sommet de la chaîne alimentaire.

Le commissaire Noctunoir regarda une dernière fois la scène de crime, avant de reprendre la direction de la ville. Il en avait assez vu, et son expérience en matière de crime ne cessait de lui hurler à l’oreille qu’ils ne trouveraient rien ici. Le tueur avait été doué, très doué. Aucune trace, aucune piste, rien. Autant attendre au chaud le rapport de ses agents.

Cependant, il ne pouvait s’empêcher de penser au pire. Des horreurs, il en avait vues, sur ça, on était d’accord. Mais là… Comment croire que ceci était l’œuvre d’un Pokémon ? Il réprima un frisson. Si lui-même avait du mal à croire en quelque chose de rationnel, comment allaient réagir les habitants, qui n’étaient pas les derniers à se laisser abuser par le frisson que pouvaient procurer certaines fables que racontaient les parents des parents de nos parents pour qu’ils soient sages ? Il fallait à présent qu’il réfléchisse à comment il allait endiguer la vague de panique qui allait s’abattre sur ses concitoyens quand ils apprendront que, non loin de chez eux, sur des Terres qu’ils avaient déjà foulées, rôdait…

Un monstre.


*

Il était très en colère. En rage, même. Et ça ne lui ressemblait pas. D’ordinaire, malgré sa faim, il n’avait aucun mal à se contenir. Mais cette nuit avait été différente. Il n’avait pas su attendre le bon moment pour lui sauter dessus. Il l’avait flairé à des kilomètres, traqué à travers les hautes herbes, les sous-bois, les marécages, il l’avait suivi comme une ombre encore plus silencieuse qu’un spectre, jusqu’à le retrouver. Il paissait là, devant lui, dans ce pré, au milieu du troupeau. Mais son camouflage n’avait pas suffi à masquer la fine odeur de sang qui s’échappait de la minuscule plaie de sa patte antérieure droite. Ça ne lui faisait pas très mal, mais ça le gênait, juste ce qu’il fallait pour le ralentir un peu. Ce Moumouton allait lui garantir un repas sans trop d’effort. Alors il avait attendu.

Il voulait attendre que le troupeau s’éloigne un peu, mais les Moumouton bougeaient rarement une fois le soleil couché. Ça l’embêtait : ils étaient bien trop près de sa tanière, et il se refusait à chasser autour de chez lui. Ça risquait d’attirer l’attention. Il était prêt à abandonner, à se rabattre sur autre chose, quand la faim s’était rappelée à lui. Mais il avait bien plus que faim. Il était affamé.

Et c’est son estomac vide qui l’avait poussé à se jeter sur sa proie sans attendre un moment plus opportun. Une faim qui l’avait pris aux tripes, au plus profond de son âme, et qui lui avait presque arrachée un hurlement. Presque. Mais suffisamment. Alors que la lune éclairait le troupeau, un grondement sourd était sorti de sa gorge, s’élevant au-dessus des fourrés où il s’était caché, et le troupeau, alerté et paniqué, s’était mis en branle. Trop tard.

Le monstre était sorti des buissons d’un bond puissant, fendant l’air comme une flèche, ses dents blanches luisant d’un éclat froid comme la mort, ses yeux rouges trahissant son envie de sang. Il slalomait entre les moutons, gauche, droite, droite, gauche. Il claquait des dents et grognait pour se frayer un passage jusqu’au cœur du troupeau, où se trouvait sa cible, et les idiots apeurés s’écartaient. Sa langue pendait avidement, la bave lui ruisselant sur le menton. Il avait conscience d’être effrayant. Maléfique. Il avait de quoi faire cauchemarder le Seigneur Darkrai lui-même.

Un des mâles dominants du troupeau a bien tenté de l’arrêter, mais sa force et la rage qui l’animaient étaient bien plus puissantes que n’importe quel instinct de survie. Le Moumouton l’avait chargé, mais une simple parade avait suffi à le faire rouler dans la poussière, avant d’être piétiné par ses congénères effrayés. Il reprit sa course, et en quelques enjambées seulement, il était arrivé à la hauteur de sa proie, qui ne put rien faire d’autre qu’hurler de peur en voyant à travers ses yeux écarquillés les mâchoires diaboliques se refermer sur lui…


*

Le commissaire se trouvait à son bureau, attendant sagement que l’orage passe. La nouvelle n’avait pas été longue à filtrer à travers les journaux, et déjà un frisson de peur commencer à s’emparer de la ville. A commencer par le maire.

« Il me faut des réponses, Noctunoir, et il m'en faut vite ! On ne peut pas laisser cette affaire s’éterniser, il en va de la sécurité des habitants, et de la tranquillité de cette ville !

Et de votre réputation, pensa le commissaire. Le maire faisait les cent pas devant son bureau. Du moins, c’est ce qu’il ferait s’il pouvait marcher. Smogogo allait et venait, et Noctunoir le suivait du regard. Comme il s’en était douté, les rapports de ses hommes n’avaient rien donné, chou blanc ! Aucune preuve, aucun indice, rien. Ils avaient bien tenté de retrouver le troupeau auquel le Moumouton était rattaché de son vivant, mais tous ses membres étaient éparpillés aux quatre coins de la région, jusqu’à la chaîne de montagne à l’est. Certains avaient même pris le premier train ou bateau et avaient plié bagages. On pouvait les comprendre… Sous le choc, les quelques moutons retrouvés n’avaient pas pu répondre à la moindre question, ou alors leurs réponses étaient totalement incohérentes et chaotiques.

– J’ai bien conscience des enjeux, monsieur le maire. Le fait est que nous n’avons rien à se mettre sous la dent à l’heure actuelle. Mes hommes ont eu beau chercher, ils…

– Alors cherchez plus !

Noctunoir secoua la main devant son visage, pour évacuer les vapeurs vertes à l’odeur industrielle qui s’échappaient des moustaches du maire. Il n’aimait pas quand le vieux Pokémon s’énervait, ça le faisait fumer encore plus et ses émanations mettaient toujours des jours à disparaître. Il allait encore devoir aérer son bureau jour et nuit… Mais même après, elles semblaient ancrées à jamais dans les narines de Noctunoir.

– Avez-vous une suggestion, monsieur le maire ? Une solution quelconque à nous proposer ?

– Possible, oui.

Le Smogogo s’arrêta enfin de tourner. Noctunoir n’avait pas pris conscience jusque-là qu’il avait lui-même le tournis, et il s’appuya discrètement à son bureau, en proie à un léger vertige. Sûrement les gaz. Monsieur le maire lévita jusqu’à la fenêtre et observa la ville en contrebas. Les ouvriers du matin sortaient des usines pour aller déjeuner, remplacés au pied levé par les équipes de l’après-midi. Les cheminées ne cessaient jamais de fumer, par ici, et ça lui plaisait grandement. La ville ne dormait jamais. Et ça ne plaisait pas à Noctunoir. Le crime n’avait pas d’heure.

– J’ai entendu parler d’un Pokémon. Un Pikachu, il me semble. Il est détective, et d’après les dires, il est loin d’être mauvais. Il pourrait peut-être vous donner un coup de main.

– Monsieur le maire, je…

– Ne discutez pas, s’il-vous plaît. Nous n’avons pas de temps à perdre, le coupa Smogogo. Commissaire, vous allez me faire appel à ce détective. Il vit à Safrania, dans la région de Kanto. Vous allez le faire venir ici au plus vite, et ensemble, vous allez me trouver ce monstre et le mettre hors d’état de nuire, avant que la peur n’envahisse nos rues ! J’espère être clair ?

Smogogo sortit de la pièce, la porte claquant derrière lui. Très clair…, soupira intérieurement Noctunoir. Il ne restait dans le bureau que lui, lui et son angoisse qui ne l’avait pas quitté depuis la découverte du corps. Las, laissant échapper un soupir, il attrapa une feuille vierge et un crayon, et commença à écrire :

A l’attention du Détective Pikachu