7 - Morihogosha
Bastian ouvrit péniblement les yeux... Il n'y voyait rien. La douleur qui remontait le long de sa jambe était bien trop forte. Sans parler de ses deux côtes cassées qui lui coupaient le souffle. Chaque inspiration lui demandait beaucoup d'efforts, il s'agita à cette sensation, il avait peur de suffoquer ! Une main se posa sur son épaule, tentant de retenir tout mouvement.
"- Cessez de bouger ainsi et dîtes-moi si quand vous respirez vous sentez quelque chose dans vos poumons. "
Le geste avait effrayé l'officier explorateur qui avait sursauté et provoquer une souffrance encore plus grande ! Il ne put retenir un cri, encore sous le choc de ce qu'il avait vécu.
"- Au lieu de geindre et de gigoter comme un Spoink, répondez-moi !"
Le pauvre Bastian ne savait pas qui lui parlait, ni ce qui lui était arrivé après l'attaque. Tout était allé si vite... Mais il pensa qu'il s'agissait d'un médecin, vu qu'il essayait de s'occuper de lui, alors il prit le temps de calmer sa blessure pour tenter de lui répondre, avec difficulté.
"- N-Non... Je ne sens rien... À part des piques de... AAAAH ! "
Mortimer soupira mais ne relâcha pas la pression qu'il exerçait sur l'épaule de l'homme qui était allongé en face de lui. Il semblait qu'il n'y avait pas de danger direct pour le moment, mais ils allaient devoir vérifier si les côtes ne perforaient pas le poumon malgré tout. Il valait mieux ne prendre aucun risque, bien qu'il était surpris de découvrir l'état dans lequel on avait ramené ces deux policiers... Ils allaient être interrogés et pourtant leurs blessures étaient graves. Ce n'était pas responsable de la part d'un médecin de prendre part à de tels actes... Il comprenait parfaitement que tout ce qui devait se passer ici devait rester secret. Mais est-ce que cela devait partir aussi loin ? On aurait pu simplement les capturer et les garder éloigner de la civilisation. ... Mais Peut-être était-ce un châtiment encore pire ? Les études n'étaient pas prêtes d'êtres finies.
Il termina d'examiner toutes les plaies et bleus que Bastian avait sur tout le corps, avant de lui administrer une dose de calmant. Peu importe le sens dans lequel on pensait, le garder éveillé était une erreur. Autant pour sa souffrance que pour les éléments qu'ils pourraient voir autour de lui. Ils étaient à l'infirmerie. Après s'être occupé de ce cas-ci il se tourna vers le second, un autre médecin s'occupait déjà du deuxième officier. Son état était encore plus grave. Pour le moment il ne s'était même pas encore éveillé. Cela ne valait même pas la peine qu'il pose les yeux sur lui, si ce n'était que pour se tourmenter encore plus.
Il se dirigea vers la sortie.
Quand il ouvrit la porte, le chef de la sécurité lui barrait la route. Un frisson parcouru l'échine de Mortimer, mais il ne plia pas à sa surprise et resta impassible. Le large homme en face de lui le détailla de la tête au pied avant de fixer ses yeux dans les siens et de commencer :
"- Quel est le premier que nous pourrons interroger ?"
Sans déglutir, le médecin savait déjà ce qu'il allait lui répondre, puisque l'état de santé n'était pas ce qui préoccupait son "collègue".
"- Attendez quatre heures et vous pourrez vous occuper de l'estropié. Vous n'aurez même pas besoin de le brutaliser. Il parlera tout seul."
Un sourire se dessina sur le visage du chef. Il était ravi de savoir que leur force faisait automatiquement plier ceux qui se rapprochaient trop de leurs affaires.
"- Nous passerons dans deux heures. Dit-il simplement.
- Quatre. Répondit sèchement le médecin. Et ne perdez pas votre salive : je sais exactement ce qu'il en est quant aux ordres que je peux vous donner. Arthur n'a pas oublié d'omettre le statut de notre équipe durant l'absence de Cobalt."
L'homme musclé fit la moue, froissé par le comportement de cette personne en blouse blanche. Il n'aimait pas qu'on prenne des pincettes dans ce genre de situation. Dès qu'il en aurait l'occasion, il rendrait la pareille...
"- Au moins Arthur savait à qui on devait laisser gérer la sécurité de ces lieux. Se contenta-t-il de dire de sa voix calme.
- Sécurité ! Siffla Mortimer. On aurait du mal à craindre quoi que ce soit de ces cadavres que vous nous avez ramené !"
Sans vouloir ajouter quoi que ce soit de plus, il força le passage pour partir dans le couloir. Le chef de la sécurité ne bougea pas d'un seul centimètre face à cette opposition. À vrai dire cela ne lui faisait ni chaud ni froid. Il se contenta de le suivre du regard, soufflant de ses larges narines de devoir patienter si longtemps. Du moment que les officiers avaient assez de temps pour répondre à leurs questions, le reste n'avait pas beaucoup d'importance. Mais il fallait essayer de voir ça sous un autre angle, vu qu'il y était obligé. Hm... Autant se dire que si prochainement ils allaient avoir encore des problèmes avec la police, ils auraient une source sûre d'informations à porté.
... Pourquoi pas ?
Il finit par s'écarter lentement de l'entrebâillement de la porte en jetant un dernier regard aux victimes. Bastian malgré la dose de calmant qu'il avait reçu revivait en boucle le moment de l'attaque :
Son collègue et lui se trouvaient face à face avec le très vieil Ursaring, un ours des forêts. Il s'était dressé sur ses pattes arrières, imposant sa gigantesque stature aux deux hommes en-dessous de lui. Le second officier ne connaissait pas très bien la région, mais Bastian savait lui qu'ils étaient en très grand danger. Ils étaient à la saison qui suivait celles des amours. Les familles s'étaient formées et les parents devenaient plus dangereux encore pour protéger leurs petits. Attaquant tout occupant qui se dressait sur leur chemin, pour avoir la paix. Aussitôt qu'ils le virent, ils firent un bond sur le côté pour esquiver la puissance attaque tranche que le pokémon lança immédiatement. Un arbre fut tranché sous cette force et s'écroula avec fracas, chassant les oiseaux qui s'y étaient réfugiés.
Ce que les deux officiers ne savaient pas, c'était que cet Ursaring était sous les ordres de Nikki, l'espion de la base. Dans sa famille ce pokémon avait su traverser deux générations de dresseurs, démontrant une incroyable longévité. Ce qui se ressentait dans son expérience et sa force... Rare étaient ceux qui avaient réussi à le battre.
Bastian se rua vers son ami. Lui priant de battre en retraite avant qu'une hécatombe n'arrive. Mais celui-ci fut paralysé de peur devant tant de puissance, il fixait immobile l'arbre qui était au sol. Le pauvre Bastian fut obligé de sortir ses pokémons pour les protéger tous les deux : il sortit son Granbull, un molosse et son Arakdo, une araignée d'eau. Il envoya la deuxième dans les arbres. Quant au premier, il devait faire face à une créature trois fois plus grande que lui. Notre personnage ne perdit pas de temps : attaquer les premiers était tout ce qui leur restait pour se défendre. Il ordonna à son Granbull de lancer une attaque balayage, soutenue par les secrétions d'Arakdo. Cette tactique réussie à déséquilibrer leur adversaire, Batian tenta alors de secouer son collègue pour le faire réagir et fuir. Ce qui fonctionna, il commença à prendre ses jambes à son cou tandis que le premier officier ordonnait à ses pokémons de les suivre. Malheureusement le Granbull ne fut pas assez rapide et l'ennemi n'était nullement à terre. Il fut rattraper par les griffes de l'ours qui lançait la terrible attaque mania. Ne voyant pas son pokémon le suivre, Bastian s'arrêta suivit par les autres. Le reste s'enchaina...
Ils tombèrent sous les coups, le grand pokémon n'hésitant pas à les attaquer directement. Celui-ci brisa la jambe gauche du premier policier en l'envoyant contre des rochers, tandis que le second se prit des poings colossal alors qu'il était contre le sol, le touchant encore plus durement.
Il n'arrivait pas à se sortir de ce cauchemar, tant cela fut violent. Et maintenant gravé dans sa chair...
La suite était simple : après que Bastian et le second policier furent à terre, les membres qui les avaient attaqué vinrent les récupérer et les trainer à la base. Les laissant aux bons soins des deux médecins et des infirmiers.
Le pauvre Mortimer errait dans les couloirs, encore pensif. La totale ouverture du passage sur la terre avait enclenché une subite tension qui provoquait ces excès de violences. Au départ, il ne pensait pas qu'il aurait eut à agir de la sorte. Bien sûr il n'était pas de ceux qui avaient attaqué. Mais il les aidait. Pour lui, c'était la même chose. Il commençait à avoir une once de doute au fond de lui... Mais ils allaient vite se retrouver piéger par tout ces évènements, lui et ses amis... Ils savaient qui était originellement le groupe qui les embauchait. Malgré tout, leur curiosité, leurs passions les avaient poussé à découvrir tout cela et à oublier leur propre morale. Son cœur pressentait que quelque chose de grave allait en découler. Pourquoi est-ce que cela partait en ce sens ?
Il avançait mollement vers un lieu similaire à celui où il se trouvait précédemment : une autre infirmerie, un pokécenter. Il entra après avoir frappé et rejoigna Arthur, qui s'occupait d'un Granbull. Le Granbull de Bastian... Le pokémon était assis sur la couchette de soin, il avait les yeux rivés vers le sol, les épaules basses et aucune expression. Arthur était accroupie. Il avait son visage enfoui dans une main. Le cœur de Mortimer se serra en voyant ça, il s'approcha. Le pokecenter était vide à part leurs trois présences. En avançant il constata autre chose : le pokémon molosse était balafré... Une marque de griffure traversait son visage entier et un œil avait perdu sa vision.
"- Il ne craint rien... Fit Arthur sans quitter sa position. En réalité il est... Totalement... Soigné. Mais il se fait plus de soucis pour son dresseur que pour lui-même."
La voix du scientifique relevait quelque chose d'accablé. Mortimer le sentait. Ce que faisait ressurgir l'état actuel des choses était un évènement bien lointain, seulement il n'avait jamais su comment soigner ce mal. Il tenta alors de détourner ce au quoi son ami pensait :
"- Les autres pokémons vont bien ?
- Oh... Oui. Le deuxième policier n'a pas eut à les sortir. Ils sont en sécurité dans leurs pokéballs."
Arthur sortit les yeux de sa main pour regarder le vide, dans un soupir étouffé. Lui aussi réfléchissait.
Cela faisait plusieurs années que le projet avait été lancé. Au départ, il était le seul à en faire partie. Molly et Mortimer ne l'avait pas encore rejoins. Et encore, au moment où lui était arrivé, cela faisait déjà presque un an que le programme se déroulait. Mais avant, oui, avant, ce n'était pas comme cela que ça se passait. Avant, l'ambiance générale était celle de personnes qui jubilaient à l'aube d'une nouvelle découverte. Une découverte qui allaient changer la face du monde, sans aucune exagération. C'était un rêve de gosse qui se réalisait pour nombre d'entre eux. Puis quand le passage fut ouvert, se fut la concrétisation de ce rêve commun. Et il fallait faire appel à plus de monde pour pouvoir étudier la terre en toute discrétion. Surtout quand ils apprirent la présence d'hommes, d'humains, pareils à eux ! - Ou presque, suites aux études qui suivirent... - Mais à partir de ce moment là, quelque chose changea... Pas au sein de l'équipe de scientifiques. Arthur, qui avait fait levier pour inviter ses deux amis à participer au projet et qui ne les avait pas vu depuis des mois, constata que l'équipe de subvention commençait à avoir un autre comportement. Ils travaillaient moins avec eux, ils étaient plus avare. Et ils semblaient chercher quelque chose de bien particulier.
Cela fut confirmé par la suite. Ce qu'ils avaient trouvé sur la terre en étudiant le pays dans lequel ils avaient atterris les avait tous surpris... Et à partir de ce moment là il y eut deux groupes officieux bien définis dans les études menées :
Celui dirigé par Cobalt Friist et les autres.
Ils ne purent mener leur enquête quant à ce qu'ils avaient découvert. Le groupe de Cobalt les en empêchait. Il y avait anguille sous roche... Quelque chose c'était passé bien avant tout ça. Arthur le savait et avait malgré tout poussé ses recherches plus loin que les autres. Et un nom ressorti dans tout ce fatras d'informations :
Saji Totashiri.
Sentant son intuition aiguisée, Cobalt détourna l'intérêt d'Arthur. Jouant de sa passion et de la situation que le scientifique vivait il le poussa à faire des expériences qu'il regrettait aujourd'hui, afin de le détourner de la vérité. Il fit des expériences sur les gênes endormies de l'adn humain, plus précisément sur celui d'enfants de ce fameux petit village perdu entre l'Espagne et la France.
Les recherches furent cependant infructueuses. Cela ne fonctionnait pas. Des protestations s'élevèrent. Comment pouvait-on forcer les savants à faire des recherches sur des êtres aussi innocents ? Mais on les rappela à l'ordre, on les menaça, de bien des manières pour les forcer à le faire. Le problème quand vous participez à un projet maintenu secret, c'est que vous ne pouvez pas chercher de l'aide...
Petit à petit cela rappela Arthur qu'il sentait qu'il y avait autre chose que les recherches qu'on les forçait à faire qui intéressait Cobalt et ses amis. Cela lui rappelait qu'il devait continuer son enquête. Et il le ferait bien volontiers. Travailler sur des enfants faisait remonter des souvenirs... Il ne voulait pas y penser, il se bloquait. Il bloquait aussi par ailleurs sa culpabilité. Alors voir les évènements s'envenimer par les actes récents, tout cela l'embrouillait.
"- Arthur, s'il te plait. Souffla son ami en posant une main amicale sur son épaule.
Le scientifique regarda son ami, les yeux voilés par de la peine. Mortimer eut beaucoup de difficulté pour trouver les bons mots :
- Quelque chose ne tourne pas rond. Nous le savons. Mais ce n'est pas nous qui avons provoquer ce mal...
Il prit une courte pause dans son discours.
- Même quand ils nous ont forcé à faire ce que nous ne voulions pas, nous n'avons pas réussi. Nous n'avons rien à nous reprocher."
Arthur se détourna quelques instants et cru en ces paroles. C'était vrai, leur intention de base n'était pas mauvaise. Ils n'avaient rien fait de mal, se répéta-t-il. Puis une autre ombre traversa son esprit, il se redressa avant de dire :
"- Mais Lilly ?"
Mortimer ne sut pas quoi répondre. Il avait oublié cela. Arthur poursuivit.
"- Lilly, elle, est la seule à avoir..."
... Payé. C'est ce qu'il allait dire. Mais il se rappela de l'étrange réaction que j'avais eut après ma transformation. Non, je n'avais pas payé. Au contraire j'en avais l'air heureuse. Cela le coupa net dans sa phrase. Mortimer arriva malgré tout à comprendre ce que son ami allait dire. Il tenta alors de le rassurer :
"- Nous la retrouverons. Et nous travaillerons pour corriger ce que nous avons fait."
Qu'étais-je advenue ? Ce fut une nouvelle crainte qui s'ajoutait à leurs épaules. La forêt était agitée par de nombreux combats et je me retrouvais en plein milieu de ceux-ci. De nouveau cela rappelait qu'ils étaient responsables. Mais ils avaient bien l'intention de me retrouver et de réparer cette erreur. Mais pour pouvoir le faire, il fallait que la base retrouve son calme. Sinon on n'allait pas les laisser faire. Arthur pris la parole le premier :
"- Pour qu'on nous le permette il faut que nous montrions patte blanche. Aidons-les à découvrir ce que savent les policiers tout en évitant qu'ils leur arrivent malheur. Ils nous permettront ainsi d'enquêter sur le terrain. Nous pourrons partir à sa recherche.
- Pour combien de temps Cobalt est parti à Kanto ?
- Il devrait déjà y être et avoir fait la réunion à la Sylphe. On peut considérer que nous avons plus ou moins une semaine.
- Ne perdons pas de temps dans ce cas.
- Oui.
Ils s'apprêtaient alors à partir pour agir aussi vite qu'ils le pouvaient. Mais ils avaient oublier une chose : le Granbull. Arthur s'arrêta à côté de la porte et se tourna vers lui. Il eut un regard désolé et se ré-avança vers le pokémon. Celui-ci se redressa quelque peu, étonné qu'ils lui portaient encore un quelconque intérêt après ce qu'ils lui avaient fait. Le scientifique ne pouvait pas l'amener à son dresseur, pas avant l'interrogatoire ou bien il chercherait à le défendre. Mais cependant il pouvait lui promettre d'aller le voir après. Une faible lueur d'espoir apparu dans les yeux du gros chien. Il acquiesça et resta à attendre ici qu'on vienne le chercher. Les deux amis s'élancèrent alors pour retourner à la première infirmerie et veiller à ce que les choses se déroulent bien.
Malgré tout, ils avaient encore oublié quelque chose. Une chose que même Nikki et son Ursaring n'avaient pas fait attention : quelque part dans la forêt, l'Arakdo avait échappé au massacre...
J'ouvris péniblement les yeux... Je n'y voyais rien. La douleur qui remontait le long de ma jambe était bien trop forte. Pourtant je pris tout mon courage pour rassembler mes esprits et savoir ce qu'il se passait. Car j'étais encore étonnamment en vie.
Il y avait du bruit autour de moi. De la vie, du mouvement. Mais je ne savais pas quoi. Je me forçais encore un peu, tout en me redressant allongée sur le sol. Je n'étais plus au même endroit. Où est-ce que ce Haydaim avait réussi à m'emmener ? Ma vision devint petit à petit plus nette. J'étais dans un endroit de la forêt plus touffue, il y avait plus de verdure, de buissons... Et le jour s'était levé. Mais dans un sursaut douloureux, j'aperçus les mêmes sabots devant moi.
"- Paix, noctali. Rugit puissamment le Haydaim. Ici tu n'es pas chez toi."
J'entendis des murmures autour de moi, je tournais alors frénétiquement ma tête dans tous les sens pour essayer de deviner qui se trouvait caché dans les parages. Je ne vis rien que les arbres se mouvoir à cause des déplacements de ces autres créatures, encore inconnues. Je relevais alors mon regard vers le grand herbivore avant de prononcer d'une voix rauque :
"- Qu'est-ce que tu me veux ?"
Le grand cerf recula de deux pas après ma phrase. Il n'était nullement effrayé, mais c'était le moment de voir s'il avait raison.
"- Savoir qui tu es, carnivore."
Il commença à tourner autour de moi. Je n'étais pas rassurée et n'avais pas aimé qu'il m'ait appelé ainsi.
"- Jamais je n'ai touché la chair des autres pokémons. Répondais-je entre mes crocs.
- C'est ce que tu dis, prédateur. Je t'ai pourtant bien vu te jeter sur une faible créature.
- Tu te trompes."
Il attendit que je continue ma phrase, mais cette affirmation me suffisait amplement. Il se remit face à moi et me regarda droit dans les yeux. Acceptant son défi je ne baissais pas mon regard. Mes yeux rouges sang plongeant dans ses yeux noisette, nous nous sondions mutuellement, cherchant une trace de faiblesse dans l'égo de l'autre. Quand il vit que tenions tout les deux, il poursuivit.
"- J'ai vu les blessures que tu lui as infligé."
Je restait silencieuse, était-ce du rattata dont il parlait ?
"- Et il respire encore aujourd'hui. Poursuivais-je.
- Pourquoi ? Tonna-t-il comme le tonnerre, ses sabots d'ambres frappant le sol.
Cette question me laissait coi. Pouvais-je y répondre ? Pouvais y répondre sans mettre à mal mon secret ?
- Pourquoi devrais-je me défendre d'avoir sauvé une vie ? Demandais-je alors en retour.
Il me jaugea encore une fois. Sa fourrure brillant d'un éclat magnifique au soleil et qui m'aveuglait.
"- Comme je te l'ai déjà dit, Commença-t-il, Dans la forêt il est un ordre a respecté...
En tant que chef de harde, je n'ai jamais aimé les carnivores comme toi, qui déciment mes troupeaux. Pourtant Arceus a fait que tu devais manger de la viande tout comme il a fait que nous mangions des plantes. C'est l'ordre des choses.
Alors je te le répète : pourquoi ?"
Cette vérité ne me plaisait pas hélas. J'aurais préféré être transformée en pokémon plante et me sentir plus paisible quant à mes aliments. Malheureusement ce n'était pas le cas, je ne voulais pas l'admettre. Ni tuer moi-même des créatures pensantes pour survivre. La peine se lit dans mes yeux et le grand Haydaim fut très surpris de le voir. Il comprit immédiatement de quoi je souffrais. Il abaissa noblement sa tête vers moi pour être à ma hauteur. Je n'avais toujours pas la force de me lever.
"- Est-ce que cela se peut ? Pourquoi te soucier de ceux plus faibles que toi ? Souffla-t-il.
- C'est une insulte ce que tu dis là. Haute taille et taille basse ne change rien à ce qu'ils ressentent !
- Cela est bien vrai. Mais que leur enseignes-tu en les défendant ?"
Il ne faisait que me prendre par les sentiments. Passée d'abord par la tristesse, je venais d'être en colère puis coupable de mes actes. Qu'est-ce que je devais dire ? Et pourquoi me posait-il toutes ces questions ? Il me donnait l'impression de me tester, de chercher à savoir qui j'étais au fond de moi, c'était troublant. Mes yeux fixés dans les siens quelque chose d'étrange se produisait. Je baissais rapidement la tête, honteuse. Il poursuivit :
"- Que cela est étrange d'ignorer ainsi sa nature et de troubler celle des autres..."
Il se redressa.
"- Mais comme je le répète encore une fois, peut-être, peut-être que c'est la chance pour toi de prendre un autre rôle..."
Je le regardais alors, incrédule, tandis que son regard pris, dans un court temps, une douceur que je n'aurais jamais imaginé. Mais il l'effaça de son visage pour le remplacer par une expression à la fois triste et sérieuse.
Et je me pris encore une fois le choc de ses cornes qui me balaya de l'autre côté d'un buisson. Surprise, je failli me redresser de mon peu de force, tant je lui en voulais de me prendre à revers de cette manière, je ne comprenais désespérément pas ce qu'il me voulait.
Mais cette intention fut vite oublié quand je vis la masse de pokémons qui fuyaient mon arrivée : plein de pokémons cerfs, des Vivaldaims, des Haydaims... Je me retrouvais dans une petite clairière où j'en étais entourée. Ils m'observaient tous avec peur et appréhension. Augmentant mon incompréhension. Il voulait parler de ce que j'enseignais en n'agissant pas naturellement ? Et lui ? ! Est-ce que c'était bien naturel de faire venir un prédateur en plein milieu de sa harde ? ! Il me rejoignis assez rapidement de l'autre côté et observa mon regard. Il s'en détourna légèrement, continuant d'avancer vers le centre de la clairière. C'est là que je vis que se trouvait au sol une vivaldaim qui elle n'avait pas fuit... Elle semblait âgée et faible... C'est vers elle qu'il se dirigea, sans répondre à ma question silencieuse.
Je me relevais alors du mieux que je pouvais pour pouvoir à mon tours m'adresser à lui :
"- Qui est celui qui ne comprend pas ? Tu m'amènes au sein des tiens, tu tiens des propos contradictoire... ! Dis moi une bonne fois pour toute ce que tu me veux !"
Il baissa les yeux et frotta doucement sa tête contre celle de la vieille biche au sol. Je constatais que quelque chose de fragile venait de faire surface en lui après ce geste. Il s'éloigna difficilement d'elle pour me faire face.
"- Je veux rééquilibrer les choses. Murmura-t-il. Il y a longtemps dans chaque forêts était tenu un rôle. Un rôle qui permettait de maintenir un équilibre entre proies et chasseurs.
- Je ne te suis pas...
- Nous vivons dans la peur. Tous. Carnivore comme herbivore, tu le sais. Cette crainte de se faire chasser de chez soit. Pour se défendre, ou pour survivre..."
Je n'appliquais pas cette dernière affirmation...
"- Pourtant il est possible de mettre de côté notre nature. Poursuivit-il. C'est ce que tu fais.
- Regarde ou cela me mène...
- Je regarde. Et tu te tues. Pour ne pas à avoir à tuer les autres. "
Un silence de plomb parcouru les vivaldaims et les haydaims aux alentours, alors qu'ils étaient si agités. Cela me surpris, mais cela pouvait se comprendre au vu du sujet. Je n'arrivais pas à formuler autre que cette question :
"- Qu'est-ce que tu attends de moi... ?
- Je veux que tu prennes ce rôle avec moi. Je veux que tu sois Morihogosha."
Les autres étouffèrent un cri. On aurait dit qu'ils craignaient ce mot. Leur réaction mit en colère le pokémon :
"- Ce n'est pas un mot à craindre ! Car il permet la vie."
Je me contentais de le fixer, attendant la suite de son explication, car je ne le comprenais toujours pas.
"- Morihogosha, ou bien gardien de la forêt. C'est un rôle qui est donné à une paire afin de maintenir l'équilibre et la protection des bois. Il fit une pause, tout le monde moi y comprit, retenait son souffle. En échange de la mort des plus faibles, nous permettons de devenir plus fort.
- La mort des plus faibles... ?"
Je soulignais cette question face à un argument aussi subjectif. Il n'en dit pas mot, mais il retourna auprès de la vieille biche, comme pour... Pour la soutenir.
Soudain, l'idée commença à se dessiner dans mon esprit.
"- Devient Morihogosha et prend cette vie. Dit-il en me désignant la vieille biche. En retour... En retour préviens de tes chasses et de nos ennemis."
Est-ce que je rêvais ou bien il m'ordonnait de tuer un des siens ? Je jetais un regard paniqué vers cette vieille haydaim qui me regarda à son tour et me montrait son accord. C'était à peine croyable. Comment pouvaient-ils... ?
Devant ma surprise, le chef de la harde savait que j'allais hésiter, il s'approcha de moi pour... Me soutenir à mon tour, me parlant d'une voix de miel, la plus amicale qu'il m'ait été donné d'entendre.
"- La vie la quitte déjà. Quoi qu'il en soit ce sera dans l'ordre des choses. Mais si tu emportes son âme, tu lui permettras de reposer en paix."
J'ignorais ce que cela m'imposait comme responsabilité. J'ignorais comment tenir un rôle que je ne connaissais pas. Pouvais-je vraiment me permettre de prendre une vie pour sceller un accord dont je ne connaissais pas les conditions ? Ce n'était pas sérieux. Comme il le prévoyait, j'hésitais, il continua alors d'argumenter.
"- Ce n'est jamais simple. Mais tu vivras et tu permettras aux autres de vivre. Tu ne seras pas seule, je serais là avec toi. Même si je reste une proie et toi un prédateur. Tu ne tueras jamais gratuitement, tu appelleras toujours la chasse quand il le faudra. En échange, tu seras partout chez toi."
Ses paroles étaient très convaincantes. Mais j'avais très peur. Il me poussa alors de son museau vers la vieille biche, mes griffes n'arrivant pas à s'agripper au sol pour me retenir. La troupe autour de nous commençait à trembler.
"- Je ne peux pas faire ça ! Protestais-je. Pas devant tous les autres !"
Le haydaim s'attendait aussi à ça, il eut immédiatement la réponse.
"- Il faut leur enseigner correctement. Nous serons alliés, mais pas des amis."
La vieille biche à côté de moi me supplia :
"- Je t'en pris, fais le."
Je cédais finalement, pleine de désespoir, me retournant pour lui faire face avec un air désolé, mais qui restait effrayé. Elle acquiesça doucement de la tête, me présentant son cou. Je tremblais. Mais j'approchais ma tête, humant l'odeur qu'elle dégageait. Ce qui fut d'autant plus effrayant que cela éveilla un instinct que je ne me connaissais pas, comme si mon corps savait soudainement quoi faire. Et il fallait que je la prenne à la gorge, pour la tuer proprement. Mon estomac appuyait ma soudaine envie prédatrice. Je pris malgré tout le temps, secouée par une multitude de spasmes, de trouver le bon endroit où je devais mordre. C'était dans l'ordre des choses. Je voulais vivre.
Je pris une très forte inspiration.
Et en un éclair mes crocs percèrent sa peau, couvrant ma tête de son sang.