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La Cendre et la Braise de Ramius



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Informations

» Auteur : Ramius - Voir le profil
» Créé le 22/03/2019 à 19:19
» Dernière mise à jour le 13/05/2020 à 14:12

» Mots-clés :   Absence de poké balls   Amitié   Mythologie   Présence d'armes   Suspense

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Chapitre 1 : Nouveauté connue
φ

Les buissons sont rusés. Celui-là en particulier est doué pour cacher ses baies ; mais il faudrait qu’il soit encore plus vicieux pour m’avoir. On m’a déjà fait tous les coups. Pour moi, chercher à manger, ce n’est plus simplement lutter avec un tas de branchages pour lui arracher une maigre pitance ; c’est éviter avec aisance les pièges classiques, regarder un peu attentivement, trouver les baies plutôt bien cachées. Et à partir de là, cela devient comme deviser sereinement. Avec un buisson. Moi vérifiant soigneusement qu’il ne me garde pas en réserve un tour que je ne connaîtrais pas après avoir passé au crible tous les stratagèmes que j’ai appris – ou même volés, en un sens – des plantes vertes qui ont précédé mon interlocuteur actuel ; et lui, ce dernier, mais pas le dernier que je visiterais, me regardant de ce petit air supérieur auquel on reconnaît les buissons, cette façon de dire :

Tu veux mes baies ? Tu penses les avoir toutes trouvées ? Tu penses avoir déjoué mes astuces les plus savantes ? Mais tout ça n’est qu’illusion, que forfanterie la plus effrontée : il t’en manque une. C’est-à-dire, au moins une, quelques-unes, sans compter toutes celles qui n’ont pas encore eu le temps de pousser…

Peut-être, mon cher buisson, mais ça n’est pas très malin de déguiser tes baies en feuilles. Un crétin avec de bons yeux aurait tôt fait de te déshabiller complètement en croyant remplir son estomac, et là, tu serais embêté, hein ? Rassure-toi, ça n’est pas dans mon genre. Moi, quand je n’ai plus faim, j’arrête de manger – ce qui survient en général assez tôt. Alors ne fais pas le malin : cette baie cachée entre tes racines qui affleurent, je l’ai vue. Mais je te la laisse.

L’Astre est au zénith, le sage de la montagne-aux-pentes-sans-longueur n’entrera pas en transe avant qu’il n’ait parcouru la moitié du ciel. Inutile donc de me hâter en allant à sa rencontre. Je prends le temps, sur mon chemin, d’apprécier la chaleur du jour, les caprices d’un petit vent joueur mais pas méchant… Quand on voyage comme je l’ai fait, on apprend à profiter de l’instant. Je me laisse entraîner par le vent dans ses jeux, et lui donne le contrôle de mon allure.

***
Mon bon ami le sage a laissé courir le bruit de notre conversation. Quel indécrottable farceur… Mais ce n’est pas à un vieux Serpent-Enragé qu’on apprend la sérénité. Je me résigne à louvoyer au sein du troupeau de curieux attirés par la rumeur. Je pourrais presque tous les identifier rien que par leur attitude. Ce n’est certainement pas la première fois que cet oiseau d’augures quelconques me fait le coup…

Il y a ceux qui veulent se divertir, et qui estiment qu’entendre dialoguer deux guignols est un bon passe-temps ; ces voyeurs-là vont être déçus. Cruellement. Il faudra que je m’arrange pour arracher quelques fragments, quelques moments de contemplation, de leurs mines surprises et ennuyées. De tels souvenirs sont toujours marrants. Il y a aussi ceux qui viennent pour faire plaisir à des amis, ou par défi. Ceux-là s’en iront discrètement. Je les préfère aux voyeurs.

Il y a, enfin, ceux qui ont un intérêt dans la conversation, qui se classent encore en deux catégories. Les gens cultivés, ou les disciples du maître – ce que je ne suis pas loin d’être – qui ont connaissance du sujet que nous allons aborder, voire même des arguments auxquels il faut s’attendre, et qui sont venus s’instruire. Un bon public, mais restreint, et je vais en choquer plus d’un. Baste. Il y aura pire : les gens qui ont un intérêt moral dans la conversation. Ce sont les pires : eux seront carrément outrés que je ne pense pas comme eux, que je refuse leur médiocrité et leur lâcheté, que je méprise leur incapacité à contempler le monde… Je ne sais qui d’eux ou de moi est le moins fou. Eux pour imposer leur volonté, moi pour avoir la mienne propre. Mais je sais qu’il y aura des clivages, avec eux.

Parmi toute cette foule, je ne repère aucun combattant. Personne ne cache ses pensées et émotions ; tous sont émoustillés de découvrir bientôt (ou bien maintenant, quand je les écarte et que je passe) ma prestance annoncée, qui a dû faire jaser plus d’un bavard. Ils semblent ignorer que je peux lire dans leurs gestes comme le sage dans leurs esprits, qu’ils m’affichent leur bassesse aussi explicitement qu’ils craignent que mon ami ne puisse la voir. Techniquement, je pourrais moi-même la voir ainsi, car le sage m’a initié à l’art de penser ailleurs que dans ma tête ; mais j’y reste un novice.

J’ai des yeux pour voir, et je vois une foule de racle-misère, de traîne-la-patte, des chiens galeux et des misérables qui n’inspirent nulle pitié. Des blancs-becs se pavanent comme des conquérants, des croûtons balafrés à la fois par le temps et par l’usage aimeraient bien qu’on les respecte pour leur soi-disant expérience, et des fous qui se prennent pour des sains d’esprit. Une foule normale, quoi. N’empêche que je n’éprouve pas et n’éprouverai jamais aucun plaisir à avoir ce genre de rassemblement autour de moi quand je parle. Bien sûr, la situation prête à rire par bien des aspects… Mais le rire lui-même n’est pas plaisant.

… et c’est alors que l’autre sursaute, se retourne, et dit : ciel ! Mais regardez qui voilà !

Les visages et les corps autour du sage reflètent la surprise. Ils n’ont pas compris la blague. Ils n’ont pas compris surtout que ce plaisantin vétéran et invétéré l’a interrompue et a signalé mon arrivée au lieu de dire la chute !

Il dit, donc : bonjour, mon vieil ami.

Cette historiette, je l’ai déjà entendue cinq fois… C’est à croire que l’hurluberlu que je suis venu voir ici avait prévu de la raconter pour me permettre de (presque me forcer à) faire une entrée réussie. Il en est capable.

Ah, je vois que tu t’en rappelles, mon petit papillon.

Je ne réponds rien et m’approche du bord de la montagne. Devant moi, le sol s’effondre brutalement, l’air est d’une clarté très pure et la lumière qui vient de l’Astre se fait chaleur et douceur. Je suis entré dans le cercle dévolu au sage : aucun spectateur n’a osé venir aussi près de l’ermite — et du vent — que je le suis, et je respire donc (enfin) un air… raisonnablement peu chargé en fragrances diverses, confuses et chaotiquement entremêlées.

Bon, tu vas pas faire ton buisson toute l’après-midi ! Fais du bruit !

— J’imagine que tu parles d’un bruit articulé, pas d’un bourdonnement.

Parlant de parler, n’est-ce pas pour parler que tu es venu, beau-parleur ?

— Toutes les paroles ne se valent pas. Je pèse les miennes et ne les engage que sciemment.

Vu les paroles dont tu parles, c’est une bonne idée. Mais quelle est la valeur d’une… ah, j’oubliais. Les formalités d’usage.

Il se retourne vers l’assistance et annonce, d’un air goguenard :

Bla bla bla bla bla bla bla bla bla bla bla bla, déclare ouverte, bla, discussion philosophique, bla bla bla, d’accueillir comme il se doit quelqu’un qui voyage beaucoup, et qui arrive en plus à en tirer une certaine sagesse ! Je ne sais pas pour vous, mais moi, je l’appelle le Voyageur. Bla bla bla.

Blablabla, c’est noté. Nombre total de stratagèmes employés pour essayer de me surprendre, un peu plus grand. Et c’est encore un échec, quoique l’idée était bonne, pleine de ce dénuement qui manque parfois aux sages.

Tu allais demander quelle est la valeur d’une parole… Parles-tu du sens de la parole, ou bien de celui que lui donne le parleur ?

Bonne question, puisque je viens de blablater des mots chargés de sens. Mais les deux, au fond, sont proches. Si toi et moi disons Astre , même sans contexte, sans phrase autour, nous n’aurons pas dit la même chose. L’Astre, pour moi, amène l’aube et le crépuscule ; c’est un changement de monde, un passage du jour à la nuit. C’est une transformation radicale, c’est un mouvement. Pour toi, c’est un ami et un allié, qui peut être présent ou absent. Dans les deux cas, il est figé ; quelle que soit l’intensité de la lumière qu’il t’envoie, du moment qu’il t’en envoie, c’est pour toi le même Astre bienveillant.

— Tu parles juste, comme souvent. Et ces deux Astres en apparence différents, qui sont mouvement et présence, ne sont ni réels ni inexistants ; seulement incomplets et parties d’une réalité plus grande.

Petit coquin, vas. Tu ramènes la discussion sur ton sujet de prédilection, hein ? Mais je te vois venir !

— Nous avions convenu de ne pas choisir de thème, de laisser la logique et le hasard imposer d’eux-mêmes un début, une fin, et éventuellement quelque chose au milieu.

Vrai. Mais cette discussion-là, nous l’avons eue très souvent. Je commence à croire que tu aimes provoquer les mêmes situations gênantes.

— Et toi, tu prétends que tu aimes chercher la nouveauté dans le connu.

Si je ne me trompe pas… oui, il laisse couler et ne répond rien. Parfait. Pendant qu’il réfléchit en silence, je me tourne vers la foule. Il y a déjà quelques éclaircies sur l’arrière des auditeurs. Mais ceux qui sont à l’avant ne peuvent pas s’éclipser facilement, et je discerne bien des signes d’impatience.

Le sage prend son temps, alors je continue. Je laisse ma vision grappiller d’elle-même de nombreuses images de gens dont je sais qu’ils sont là pour le spectacle ; certains de ceux que j’avais repérés comme prometteurs m’offrent de véritables chefs-d’œuvre d’incompréhension… Ce que c’est satisfaisant ! Autant que ceux qui sont dans l’axe de mes yeux. Bien sûr, ils savent (quoique ?) que je ne les fixe pas, que je regarde partout à la fois, et que mon attention n’est nulle part ; et pourtant, ils ne peuvent pas s’empêcher d’être gênés, et presque toujours de détourner le regard… J’aime bien intimider ainsi les mauviettes. Car c’en sont : à leur place, avec une foule entre eux et moi, je me serais fixé avec la plus extrême insistance. Qui que je soie, qui qu’eux soient, cette… rencontre, assemblée… leur donne l’occasion de se prendre, même pour un instant, pour autre que soi… Et ils ne la saisissent pas. Pourtant, c’est toujours enrichissant.

Personne ne s’attendait à un silence aussi long… C’est une manière de faire en usage plus loin, à l’opposé d’où l’Astre s’incline lors des temps plus froids. J’adore m’en servir pour déconcerter mes interlocuteurs ; voir le sage réutiliser cette technique qui l’a autrefois embarrassé me réjouit. Le temps coule comme une cascade, je peux presque sentir ses pensées s’arranger sagement dans sa tête, former des lignes et des courbes, des forêts et des montagnes… Bientôt, il parlera, et sa parole sera particulièrement sage, car elle nous fera entendre la forme de ses pensées ; en attendant… l’assistance ne comprend rien et attend, piaffe d’impatience et de surprise, remue, s’agite et me réjouit. Tant que j’en suis à bonne distance, je peux tout à fait apprécier une foule !

La nouveauté dans le connu… Ce concept à lui seul, ainsi formulé, laisse à réfléchir…

Il se tait à nouveau, mais cette fois-ci, c’est pour m’inviter à parler. La nuance est subtile mais je peux la percevoir.

Quand je voyage, ce que je vois est toujours nouveau. Pourtant, je peux trouver des équivalences, des similarités, dans ma mémoire. Pour moi, voir l’inconnu dans le connu, c’est ça : distinguer deux paysages subtilement semblables.

Quant à moi, je le perçois comme le fait de rester attentif, de se laisser surprendre par ce qu’on connaît. De voir se lever l’Astre une fois de plus, et de pouvoir encore l’admirer.

— Quelque chose que tu fais déjà, donc.

Inconsciemment. Mais oui, la splendeur de cette perle suspendue dans le vide du ciel m’éblouit. Voilà bien quelqu’un qui ne peut être que de nature divine. Sais-tu que je songe à le vénérer ?

— Là, tu cherches le connu dans le connu.

Ce n’était pas seulement une pique, mon ami.

— Alors j’y réagirais comme ne l’étant pas.

À mon tour, je plonge dans le silence de mes pensées. Cette nouvelle est… Déconcertante. Oui, pour une fois, le sage m’a surpris. Et il me faut appréhender, acquérir cette idée farfelue. Me l’approprier. Vénérer ?

J’ai demandé, un jour, quelles étaient les limites d’un dieu. Un dieu peut-il souffrir ? Mourir, avoir peur, échouer ? En un mot, vivre ? Une autre fois, je me suis interrogé, non pas sur la transcendance des dieux eux-mêmes, mais sur celle de leur créations. La création d’un dieu transcendant peut-elle, doit-elle ou ne peut-elle pas, être parfaite, et transcendante ?

Aujourd’hui, je te demande ceci. Qu’y avait-il avant ? Avant moi, il y avait mes parents, et leurs parents avant eux. Avant cet arbre, là-bas, il y avait une graine, une fleur, un autre arbre. Tout a une origine, y compris l’Astre. Avant le jour, il y a la lumière ; avant la lumière, il y a l’Astre ; avant l’Astre, il y aurait eu les dieux. Qu’y avait-il avant les dieux ?

Ce qui fait un enchaînement de questions de plus en plus saugrenues. Tu t’améliores.

— Merci.

L’histoire des Dieux est longue et complexe… Même moi, je n’en discerne que quelques fragments, confus, indistincts. Imagine un vent dans la montagne-aux-pentes-sans-longueur. Ce vent s’éparpille et s’effiloche dans les replis de la montagne, il s’engouffre en rugissant dans ses failles pour ressortir, murmure, à l’entrée. Ensuite… retire la montagne. Ne garde que quelques souffles du vent, et tente de reconstituer le vent à partir de cela… et songe que le vent, en réalité, allait dans plus de directions, et par plus de chemins, que ceux de la montagne.

— Un défi trop lourd pour être relevé par un sain d’esprit.

Peut-être... Mais tu connais mon obstination. Quand je Vois un fragment, je le mémorise. Et je l’assemble aux autres. Chaque saison qui passe, j’en comprends un peu plus. Ce n’est pas le sage qui va te répondre, mais l’oracle. Libre à toi ensuite de reconstituer la sagesse ; moi-même, je m’y refuse, car ma pensée est obscurcie par sa propre clairvoyance.

— Ta confiance m’honore.

Je te fais surtout confiance pour trouver une nouvelle façon de penser ta question éternelle. Ce qui promet d’être intéressant !

Alors… L’histoire elle-même ne t’intéresse pas autant que sa source, sa racine, son origine… Celle-ci est enténébrée. Mes perceptions commencent avec la naissance du temps, mais il semblerait qu’il y avait quelque chose avant le temps. Ou devrais-je dire, avant le Temps… Cela, je ne le vois pas. Dès que surgit le Temps, en revanche, je vois le conflit. Je vois une lutte primordiale entre deux aspects d’une réalité qui leur est extérieure, une lutte si féroce qu’elle conduit ses combattants à se transcender eux-mêmes.

Ces combattants, ces deux Entités, poussées à bout par leur opposition, ont trouvé le moyen de se réduire et de s’étendre à la fois, de se définir et de se faire. Elles se sont inventé des noms. Le concept de temps s’est condensé en tant que Dialga, et celui d’espace en tant que Palkia. Et… rien ne s’est passé. Ils ont continué leur lutte, dans un Univers démesurément vide qu’ils venaient de remplir dans son ensemble avec une autre sorte de vide. Deux autres sortes, en fait : eux-mêmes.

Puisque le temps existait, on peut dire que rien de notable ne s’est passé pendant un bon moment. Le temps et l’espace s’entre-déchiraient, mais et alors ? L’Univers était au-delà de cela. Et puis, deux nouvelles Entités sont apparues. C’est-à-dire qu’elles étaient déjà là avant, mais elles ont à leur tour accompli cet acte de pure auto-fondation qui consiste à prendre un nom. Deux nouvelles Entités… mais indiscernables, entourées de brouillard. Je devine qu’elles prirent nom et forme seulement du fait de leur pouvoir.

Un pouvoir gigantesque. Un pouvoir dont la seule apparition a stoppé net la lutte fratricide de Palkia et Dialga. Un pouvoir entaché, aussi, qui laisse un arrière-goût amer à ma vision d’oracle. Un pouvoir fondamentalement dérangeant. Surtout… lorsque le brouillard se dissipe, il ne reste qu’une Entité. Arceus. L’Autre a disparu. Son absence, cependant, laisse derrière elle une trace, une réminiscence. Mais pas une fausse note : au contraire, l’absence de cet Autre a provoqué une harmonie universelle qui dure encore.

Ces événements, l’Univers en a gardé le souvenir, l’écho. C’est ce que je vois, mais je suis conscient de voir au travers du prisme de ma propre imperfection. Aussi, ne tiens pas ce que je viens de dire pour vérité absolue. Forge-toi ta propre vérité. Et tant que tu y es, partage-la donc !


— Cette amertume dont tu parles… Elle me rappelle l’idée de la Faute Première.

Cette histoire venant de, euh, d’une religion arcésienne qui m’échappe, selon laquelle tout être vivant est condamné à l’erreur par une faute commise par le premier d’entre eux ?

— Oui. Les deux Entités se sont opposées, et Arceus a probablement détruit l’autre. Et un écho différent de ce même événement aurait inspiré le prophète de… la religion en question, qui m’échappe à moi aussi… Lequel l’aurait mal perçue ou bien simplement réécrite pour lui être utile. Ce n’est pas ça qui m’intéresse, mais le point suivant : de même que la Faute Première est illégitime, parce que l’erreur est inconnue lorsqu’elle est commise… Le dieu survivant, Arceus, a-t-il légitimité à prétendre à l’omnipotence ?

Pourquoi pas ? S’il a anéanti l’Autre, et que cela a apporté un équilibre qui maintient l’Univers en vie aujourd’hui encore ; et que cet anéantissement a eu lieu en un temps où le concept de Faute, de bien et de mal, n’existait peut-être pas…

— Non, ce n’est pas ce que je veux dire. Arceus se laisse régulièrement percevoir par des prophètes qui prétendent ensuite qu’il s'agit du dieu de la Création, le père de l’Univers, et qu’il convient de le vénérer. Soit dit en passant, ils ont un peu de mal à s’accorder sur la façon de faire cela, mais passons. Et si l’Autre avait apporté l’harmonie à l’Univers avant d’être détruite par Arceus pour une raison ou une autre ?

Ah. Je vois où tu veux en venir.

— Toujours à la même question, reposée chaque fois différemment. Pourquoi diable irais-je vénérer Arceus comme on ne cesse de me le demander ? Quelle légitimité a-t-il, à prétendre qu’il en est digne ?

Mais le sage ne me répondra pas. Tourné vers l’Astre, il contemple le crépuscule qui embrase le ciel. Sa transe mystique ne prendra fin qu’une fois la nuit bien installée. Sans un mot de plus, je m’envole donc, et pars chercher un endroit où dormir. Je remarque au passage que de la foule qui encombrait le lieu avant mon arrivée, il ne reste plus grand-chose. Tant pis pour eux ; moi, j’ai beaucoup appris aujourd’hui, et j’ai réappris autant. Les conversations avec le sage sont toujours enrichissantes.