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Sang Royal - Tome 1 : Trahison de groudonvert



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» Auteur : groudonvert - Voir le profil
» Créé le 26/01/2019 à 02:36
» Dernière mise à jour le 01/01/2020 à 15:10

» Mots-clés :   Action   Drame   Policier   Sinnoh   Suspense

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Chapitre 05 : Les premiers morts
La nuit était tombée depuis de longues heures désormais. La lune brillait dans le ciel et offrait une luminosité suffisante pour que l’on pût se repérer. Les arbres étaient espacés les uns des autres aux abords d’une petite clairière. Un matelas de mousse et d’herbe fraîche recouvrait celle-ci en grande partie. Dans les branches de plusieurs arbres et à des hauteurs différentes, des planches étaient assemblées et y étaient solidement attachées et clouées. Elles formaient ainsi des plates-formes d’entraînement. Cette clairière choisie tout spécialement offrait des avantages très intéressants.

Soudain, de la plus haute des plates-formes, une ombre se laissa tomber sur le dos. Un instant plus tard, elle se multiplia en plusieurs créatures difformes qui poursuivirent leur chute. Un hennissement de détresse se fit entendre près de la clairière. L’ombre tendit l’oreille et se retourna pour se laisser tomber, ses Reflets disparurent un instant plus tard.

Un cheval s’approchait à grande vitesse. Démolosse ne pouvait pas le voir, mais il entendait son galop effréné à quelques mètres de là. Il avait préféré mettre un terme à son entraînement pour aller voir ce qu’il se passait. Un hurlement le sortit complètement de ses pensées. Un bruit horrible et terrifiant audible par-dessus les cris de la bête le fit également sursauter. Le chien commença à trembler d’effroi. Ces cris l’avaient terrifié pour une raison qu’il ignorait.

« T’es qu’un poltron ! » se reprit-il, en pensée. « Tu es le Pokémon de la Grande Championne, arrête de trembler et va voir c’qui s’passe, Démolosse ! »

Il aperçut soudainement un serpent volant se précipiter vers lui. Il allait un peu trop vite pour qu’il eût le temps de l’éviter et préféra utiliser Abri. Le Pokémon se cogna dans un « gong » sonore. Il se secoua la tête et sembla surpris de tomber sur lui. Sans prendre le temps de réfléchir à ce qu’il venait de se passer, Draco lui lança exprès :

- Où est-il ?

Démolosse ne voyait pas de quoi il parlait. Après le combat contre Méga-Démolosse, il s’était reposé quelques heures avant de partir s’entraîner depuis quatre heures de l’après-midi. Il avait même sauté le repas du soir.


Sept heures plus tôt
L’éclairage de la pièce laissait à désirer. Une simple ampoule tombait du plafond. Une seule porte menait à cet endroit. S’y trouvaient une table et deux chaises d’un côté long et une troisième de l’autre. L’un des murs face à la chaise unique comportait une glace sans tain. Clara s’y trouvait assise depuis une bonne demi-heure maintenant, on lui avait apporté un verre d’eau qu’elle n’avait pas encore touché.

On était venue la chercher à l’arène peu de temps après la fin de son match contre Marc. La plupart des personnes présentes avaient quitté l’arène, à l’exception d’Élodie, Lucien et Julie. La surprise s’était lue sur leur visage quand la police avait sonné à la porte. Néanmoins, ils ne l’avaient pas menottée : elle les avait accompagnés de son plein gré. Son Draco se reposait dans sa Poké Ball, mais elle avait laissé les autres à l’arène.

Elle regardait sa Pokémontre de temps à autres. Elle avait l’étrange impression d’être revenu dans le bureau du Directeur le jour précédent. La même longue attente et le même énervement l’avaient accueillie. Elle supposait qu’on l’avait emmenée pour l’histoire du Roucarnage, mais pourquoi la faire attendre ?

Soudain, la porte s’ouvrit laissant entrer un homme dans un costume-cravate impeccable. Clara le reconnut pour l’avoir aperçu en conférence de presse plusieurs années auparavant. Il s’agissait de l’Inspecteur Mattz. Il avait les cheveux noirs et courts et une barbe de trois jours.

- Bonjour Mademoiselle Galano, veuillez m’excuser pour ce retard. Inspecteur Mattz, se présenta-t-il en tendant la main.
- C’est pas trop tôt. J’sais même pas pourquoi j’suis là.

Elle parla sur le ton du défi, mais se leva tout de même pour serrer la main du policier. L’Inspecteur s’assit en face d’elle et posa les documents qu’il avait apportés. Le quarantenaire lui indiqua d’un geste la chaise et la jeune fille s’exécuta. Elle attendit, non sans une pointe d’agacement, qu’il lui dît enfin la raison de sa présence au poste de police. Elle l’observa extirper différentes photos qu’il posa devant elle face visible. Elle ne les regarda pas et attendit qu’il s’exprimât enfin.

- Nous vous avons fait venir ici pour écouter votre version des faits sur deux enquêtes en cours.

Deux ? Elle s’était bien doutée qu’elle devait répondre de la mort du Roucarnage, mais de quelle autre enquête parlait-il ? L’inspecteur pointa du doigt les photos. Il s’agissait de clichés de la scène de crime où l’oiseau mourut. Elle regarda son interlocuteur et d’un geste indiqua qu’elle voulait qu’il poursuivît.

- Nous avons de forts soupçons de penser que l’un de vos Pokémon s’en seraient pris à ce Pokémon et il en serait mort. Que ce soit lors d’un entraînement ou d’une bagarre. Qu’avez-vous à répondre à ceci ?
- Je n’ai malheureusement plus de preuves à vous avancer, mais je vous garantis qu’aucun de mes Pokémon n’est responsable de sa mort.

Le policier pianota sur la table en réfléchissant aux paroles qu’elle avait prononcées. Elle avait parlé franchement, en évitant de commettre des erreurs de langage. D’habitude elle ne prenait pas ce genre de précaution, mais elle pensait que cela passerait mieux, si elle avait envie de convaincre son interlocuteur.

- J’aimerais bien vous croire, mais votre sœur a dit à l’Infirmière Joëlle que deux de vos Pokémon étaient en train de se battre et que des arbres brûlaient quand vous les avez séparés.
- Exact, vous avez raison. Il s’agissait de mon Draco et de mon Démolosse et je pense également que c’était ce dernier qui a mis le feu aux bois. Feu qui s’est éteint rapidement.

Il acquiesça. La forêt n’était plus en flamme à l’arrivée de la police. Clara répondait avec franchise aux questions de l’Inspecteur, pourquoi lui cacher des éléments ? Elle ignorait tout de l’identité du coupable de toute façon. Devant le silence de l’homme, elle décida d’ajouter :

- J’ignore si ça peut vous aider dans votre enquête, Inspecteur. Mais mon Pokémon a un comportement très étrange depuis cette nuit-là…
- Peut-être est-il étrange parce que vous le malmenez moralement ? l’interrompit-il.

Clara perdit son calme quand elle l’entendit remettre en doute ses capacités de dressage. Elle répliqua :

- Mes Pokémon sont habitués à mes excès de colère, je n’vous permets…

Elle s’interrompit quelques secondes. Préférant retrouver son calme et expliquer plus posément la situation. L’homme s’en rendit compte et la laissa, attendant ses explications :

- Inspecteur, je pense que mon Draco sait qui s’en est pris à ce Roucarnage.

Interloqué, le policier prit un stylo et écrivit quelque chose sur le bloc qu’il avait emporté dans la pièce. D’un geste, il lui indiqua de poursuivre. Elle respira profondément avant de continuer :

- Je ne crois pas qu’il soit coupable, j’ai mes raisons de le penser. J’aurais pu vous le démontrer cette nuit-là, si je n’avais pas été dans une colère noire. Maintenant c’est trop tard… Cependant, je l’ai surpris à me suivre durant toute la journée d’hier, il a également eu un comportement très étrange en ville hier soir…
- Plusieurs personnes en ont été témoins, en effet, ajouta-t-il, sarcastique.

Des gens les avaient vus ? Étrange… Elle était certaine pourtant que sa chute dans la neige était passée inaperçue. Ils se seraient ri d’elle… Ne voyant pas quoi répondre à ça, elle préféra terminer :

- Draco a également eu une crise d’angoisse dans la Grotte Retour hier soir et s’est enfui. J’ai perdu une heure à le retrouver.

L’Inspecteur termina de noter dans son carnet et croisa les mains avant de conclure :

- Je vois. Cet enchaînement d’évènements étranges vous a amenée à penser que votre Pokémon n’y était pour rien et savait qui était le coupable ? Dommage qu’il soit impossible de lui demander confirmation, soupira-t-il.
- En effet…
- Bien. Cela étant dit, la cause de la mort de ce Roucarnage est un arrêt cardiaque, mais nous ignorons encore de quoi il provient…

Elle sursauta en entendant cela. Elle eût cru qu’il était mort de ses blessure ou alors que son Démolosse l’avait accidentellement tué avec la fumée, mais un arrêt cardiaque dont la cause était inconnue ? Comment était-ce possible ? Mattz retira les photos et rangea son dossier. Il prit le deuxième qu’il avait apporté et posa les clichés face retournée sur la table.

- Si je vous ai amenée ici, Mademoiselle Galano, c’est surtout pour parler d’une autre affaire. En qualité de témoin, bien entendu.

Clara l’observa, étonnée. De quelle affaire pouvait-il s’agir ? Malgré tous les évènements auxquels elle avait été mêlée ces deux derniers jours, elle ne voyait pas en quoi cela pouvait la concerner. L’Inspecteur retourna alors les photos. Elle hoqueta de surprise en reconnaissant le bureau du Directeur de la Faculté.

- Quelques minutes après la fin de votre rendez-vous, le Professeur Michel Throshamp a été retrouvé mort… dans des circonstances ressemblant fortement à un meurtre, lui expliqua Mattz.

Elle s’affala sur sa chaise, désorientée. Elle avait espéré discuter avec son Professeur de l’étrange apparition à la fenêtre du bureau du Directeur après son match, mais ils étaient tous les deux absents. Elle comprenait maintenant pourquoi.

- Que s’est-il passé ? murmura-t-elle, tristement.
- Il est mort d’un arrêt cardiaque également, nous pensions à l’origine que c’était dû à ses problèmes de cœur, mais…

Un autre arrêt cardiaque ? Quelle étrange coïncidence ! Les deux affaires pouvaient-elle être liées ?

- Le corps a été retrouvé de manière étrange, il ne se tenait pas la poitrine comme quelqu’un victime d’une crise cardiaque. De plus, il aurait dû être retrouvé assis au bureau du Directeur Smith.
- Je vois…
- Ce n’est pas tout. Le meurtre a été commis porte et fenêtres fermées. Personne n’a pu entrer ni sortir de la pièce. Et aucune trace n’indique un quelconque stratagème, ni dans la pièce, ni sur le corps.
- Comment ?! s’exclama-t-elle. C’est impossible.
- Exact… Nous vous avons fait venir pour savoir si vous avez vu quelque chose de suspect pendant le rendez-vous.

Elle réfléchit à toute vitesse. À l’exception de cette étrange ombre à la fenêtre, elle ne voyait rien d’intéressant. Elle décida donc d’en parler.

- Je vois, lui répondit l’Inspecteur. Et vous pensez que la victime l’aurait également vue et qu’on l’aurait tué pour ça ?
- Je n’sais pas. Je peux me tromper, c’était au deuxième étage, comment un humain aurait pu se trouver à cet endroit et disparaître aussi vite ?
- En effet… répondit-il en réfléchissant. Peut-être que c’était…

Et soudain, la porte s’ouvrit à la volée et les deux sursautèrent. Une policière entra complètement paniquée et s’exclama en hurlant :

- C’est horrible, un autre Dresseur a été attaqué ! Il est…

*_*_*_*_*_*_*_*_*
Il neigeait fort sur la route sortant de Rivamar. Clara voyageait dans la voiture de l’inspecteur Mattz. Il avait accepté qu’il l’amenât à la scène de crime pour qu’elle rentrât plus rapidement à l’arène. La femme n’avait pas expliqué concrètement de quoi il s’agissait, elle savait juste qu’un Dresseur était mort.

Ils s’arrêtèrent à proximité de la scène de crime, un cordon de police avait été mis en place tout autour. Plusieurs policiers s’y affairaient déjà. Elle sortit de l’automobile et s’en approcha. Quel fut son choc lorsqu’elle vit la scène ! Le jeune homme qu’elle avait affronté le matin même – la police était venue la chercher avant qu’il ne partît – gisait sur le sol, mort. Sa main était écrasée et ensanglantée. Son Dracolosse et les trois Pokémon, qu’elle n’avait pas affronté, avaient la bouche grande ouverte et ne bougeaient plus.

Mais le pire restait à venir. Le Démolosse de son ex-adversaire avait le corps brisé et la neige était recouverte de sang sec. Sa poitrine comportait une profonde entaille en forme de serpent qui se mordait la queue. Une longue estafilade barrait également son ventre.

- Quelle horreur ! hurla-t-elle.

Elle réprima un haut-le-cœur. Malgré son envie de vomir, elle savait qu’elle ne pouvait pas se le permettre sur une scène de crime. Mais maintenant elle avait une preuve que son Pokémon n’était pas responsable.

- Inspecteur, appela-t-elle. Son Méga-Démolosse a subi la même attaque que le Roucarnage !

Il s’approcha d’elle et lui demanda comment elle pouvait le savoir. Elle pointa la marque du doigt.

- C’est pas une coïncidence. Les deux Pokémon ont été attaqués de la même manière, révéla-t-elle.
- Peut-être, mais ça n’explique pas comment les quatre autres et leurs Dresseurs sont morts, rectifia Mattz.

En effet, aucun des Pokémon ne semblaient avoir des blessures visibles. Clara trouva ça très étrange. Pourquoi avoir tué de deux manières différentes tous ces Pokémon ? Pourquoi s’être épuisé à tuer le Méga-Démolosse alors qu’il semblait dix fois plus simple de le tuer comme les autres ?

- Inspecteur, la victime a laissé un message ! cria un policier.

Mattz s’approcha du corps du jeune homme et regarda. La jeune Championne s’approcha également et son regard s’attrista en contemplant son ancien adversaire. Il avait été très arrogant avec elle, voire même méprisant, mais il ne méritait pas de finir comme ça, tout comme ses Pokémon.

- Connaîtriez-vous un « Luc, Mademoiselle Galano ? lui demanda le policier.
- Comment ça ?
- C’est le message laissé par la victime, répondit-il en le pointant du doigt.

Elle s’approcha et examina le message. Elle analysa rapidement les éléments et pensa rapidement que quelque chose clochait. Elle déclara alors :

- Inspecteur, il s’agit probablement d’un faux message.
- Vous êtes sérieuse ? Qu’est-ce qui vous permet de dire ça ?
- Si la victime avait vraiment écrit ce message, le coupable l’aurait effacé, répondit-elle.
- Peut-être l’a-t-il écrit après son départ ? suggéra-t-il.

Incroyable ! Il ne voyait pas plus loin que le bout de son nez.

- Enfin, c’est évident ! s’exclama-t-elle. Pourquoi lui aurait-il écrasé la main alors ? Il a remarqué son manège, écrasé la main puis écrit un faux message avec son sang.

Quand Clara ne perdait pas complètement le contrôle sous ses crises de colère, elle avait une remarquable capacité d’analyse. Talent qui lui servait souvent en combat pour prendre rapidement les meilleures décisions.

Luc… Ce prénom n’était pas inconnu. Il pouvait s’agir de Lucien, le colocataire de Marc ? Il était évident que Marc connaissait son agresseur. Pour elle, il n’aurait pas engagé le combat contre un parfait inconnu sous la neige alors que ses Pokémon étaient épuisés. Et ce faux message post-mortem en était la preuve : le coupable voulait écarter les soupçons, elle en était certaine.

- Bon… à moins que vous n’ayez encore besoin de moi, je…

Elle s’interrompit : son Draco sortit tout seul de sa Poké Ball alors qu’elle ne l’avait pas appelé. Il arrivait parfois à ses Pokémon d’agir ainsi quand ils avaient besoin de se dégourdir les jambes, mais ce n’était pas vraiment le moment, là.

- Rappelez votre Pokémon, Mademoiselle. Il va souiller la scène de crime ! l’interpela un agent.
- Draco, reviens !

À sa grande surprise, celui-ci esquiva le rayon rouge. Qu’est-ce qui lui passait par la tête ? Ça ne lui ressemblait pas pourtant… Peut-être avait-il également décidé de mener l’enquête ? En un instant, le Dragon renifla la scène, sans rien toucher, observa le corps de Marc et s’élança dans la direction que pointait sa main. Il disparut dans la neige, mais elle entendit un sifflement un peu plus loin ; il l’appelait.

La jeune Championne et l’inspecteur se regardèrent interloqués. Quelle mouche avait piqué le Dragon ? Ils se dirigèrent vers lui. Ils durent passer sous le cordon de police avant de pouvoir le rejoindre. La surface plane sur laquelle ils marchaient se changea en pente, glisser là-dedans pouvait s’avérer dangereux. Draco remonta en volant et ils s’installèrent tous deux dessus. Les écailles du Pokémon étaient rugueuses et empêchaient de glisser quand on s’y asseyait. La force du Dragon était impressionnante, pouvoir porter deux personnes faisant plusieurs fois son propre poids était un exploit.

Il descendit tranquillement avec ses deux passagers. Tout en bas de la pente, il les laissa descendre et montra ce qu’il avait trouvé : une Poké Ball noire. Clara la reconnut immédiatement pour être celle de son ancien adversaire, mais que faisait-elle là ?

- Une Poké Ball ? s’indigna Mattz. C’est ça qu’il a trouvé ? On peut remonter, il n’y a rien d’intéressant à en tirer.

Clara et son Draco pouffèrent. Si la jeune fille était intelligente et possédait une certaine capacité d’analyse, ce n’était rien en comparaison de son Pokémon. Contrairement à elle, il savait garder son calme en toute circonstance, ne s’énervait jamais et, surtout, était bien plus perspicace qu’elle. Bien que tous deux fussent incapables de communiquer ensemble, ils avaient trouvé des moyens simples pour qu’ils se comprissent. Si le serpent volant avait trouvé un indice, c’est qu’il paraissait important. L’inspecteur avait déjà entamé la remontée quand elle parla d’un ton parfaitement calme :

- Cette Poké Ball… vous n’vous êtes pas demandé pourquoi elle était là ?
- Un mec qui cherchait à capturer des Pokémon et qui l’aura oubliée sans doute, répondit-il.

Ce type était exaspérant. Non pas qu’il fût incompétent – il avait résolu l’affaire du tueur en série de Londres –, mais il laissait des indices trop importants. À se demander s’il ne le faisait pas exprès.

- Marc possédait des Poké Balls de cette couleur, je les ai vues.
- « Marc » ? répéta-t-il. Vous connaissez la victime ?
- Mon adversaire de s’matin, répondit-elle exaspérée. Bref, cette Poké Ball se trouve dans la droite ligne de son corps. Mais que…

Elle s’interrompit. Son Pokémon lui faisait un geste de la queue et lui indiquait sa corne. Dans sa hâte, elle avait complètement oublié un détail important. Le combat avait été très rapide.

- Où est son Galopa ? hurla-t-elle.

Elle se précipita pour fouiller le bois en contrebas, l’inspecteur sur ses talons. Après plusieurs minutes de recherche, ils durent se rendre à l’évidence : le Pokémon avait pu s’échapper. Mais il fallait le retrouver et vite. Elle ne pourrait pas lui parler, mais il pouvait confondre un suspect, donner des indices supplémentaires.

- Ici Mattz ! parla celui-ci dans sa radio. A tous les policiers, votre priorité est de retrouver le Galopa de la victime. C’est un témoin important !

*_*_*_*_*_*_*_*_*
La nuit était tombée lorsque Clara sortit de la Grotte Retour. Elle paraissait épuisée. Elle avait aidé la police à rechercher le Galopa disparu, mais avait finalement décidé d’abandonner les recherches pour rentrer. Marc était mort et il ne pouvait plus rien n’y faire, malheureusement. Certes, son Pokémon semblait lié à ces attaques, bien qu’il n’en fût pas l’auteur. La police se chargeait de trouver le coupable, pourquoi devrait-elle s’en inquiéter ?

Mais elle préférait se préoccuper de la situation présente. Draco ne semblait pas bien depuis leur arrivée, de plus les réflexions de Mattz sur son attitude du jour précédent l’avait intriguée. Toutes les personnes de la place avaient leur regard fixé sur les combats qui s’y déroulaient. Qui aurait bien pu être témoin de sa chute ? Personne n’avait ri et aucun ne s’était empressé de lui venir en aide. Il y avait quelque chose d’étrange, mais elle n'aurait su dire de quoi il s’agissait.

Malgré la fatigue, elle semblait contente de sa journée. Elle avait livré son premier match, dont le déroulement avait atteint toutes ses espérances. Elle avait répondu aux questions de la police et l’avait aidée dans son enquête – enfin surtout son Draco. L’intelligence et la perspicacité de son Pokémon l’impressionnaient toujours. S’il avait été humain, il aurait fait un excellent détective ou un Dresseur encore plus fort qu’elle.

Elle en frissonna. Un Pokémon donnant des ordres à d’autres… Quelle incroyable combinaison ! Ces créatures connaissent tout des affrontements entre eux, alors si l’un d’eux devenait un Dresseur… Elle se demandait comment elle pourrait le combattre. En théorie, elle semblait désavantagée, mais ne possédait-elle pas le titre de Championne Ultime ? Qu’importe le Dresseur en face, elle se battrait à fond. Elle n’avait pas connu la défaite depuis cinq ans ; personne n’avait réussi à trouver la faille. En général, il fallait à son adversaire deux Pokémon pour battre son premier et il ne pouvait se réadapter pour vaincre le deuxième, tant leur style de combat différait.

Plongée ainsi dans ses pensées, elle atteignit l’arène. Son arène, se corrigea-t-elle. Elle n’avait toujours pas l’habitude de cet état de fait. Lorsqu’elle passa la porte, elle tomba sur Élodie et, plus étonnamment, Lucien et Julie qui l’attendaient sur les canapés de la salle d’attente. Elle les rejoignit et les salua poliment avant de s’asseoir.

- Alors raconte ! Qu’est-ce qui s’est passé avec la police ? demanda sa sœur. Qu’est-ce qui t’as pris autant de temps ?

Elle ôta son manteau et épousseta ses vêtements. Elle semblait mal à l’aise et n’avait pas envie de répondre tout de suite à sa question. Elle souffla un bon coup avant de s’expliquer :

- Ils m’ont questionnée au sujet du Roucarnage, d’abord et puis…
- Quel Roucarnage ? l’interrompit Julie, curieuse.
- L’enquête de la police d’hier matin dans les bois, répondit la jeune Championne, lasse.

Elle ne semblait pas d’humeur pour une confrontation. Elle voulait effectuer un dernier entraînement avec ses Pokémon pour se changer les idées et se coucher pas trop tard. En plus de ça, elle devait encore passer un coup de fil à son frère, ce qu’elle aurait dû effectuer le jour précédent. Elle se tourna vers sa sœur et continua d’un ton parfaitement sérieux :

- Throshamp a été tué. On a retrouvé son corps dans l’bureau du Directeur.
- Throshiamp est mort ?! s’exclama sa sœur, surprise.

Les trois autres la fusillèrent du regard. Le moment paraissait vraiment mal choisi pour des blagues sur son nom de famille. Elle s’excusa et se tassa, penaude, dans son fauteuil.

- Qu’est-ce qui s’est passé ? demanda Lucien.
- Il a fait un arrêt cardiaque.
- Ce n’est pas un meurtre, alors ! affirma-t-il, rassuré.
- La police pense le contraire, répondit la jeune Championne, cassante.

Elle décrivit alors les circonstances de la découverte du corps. Elle parla également de l’étrange ombre à la fenêtre. Les trois autres comprirent alors qu’il s’agissait bel et bien d’un crime et non d’un accident.

- Cette ombre à la fenêtre… Tu crois que… commença Élodie.
- J’en suis pas sûre, mais c’est pas le moment d’en parler ici, l’interrompit-elle.
- De quoi parlez-vous ? questionna Julie, curieuse.
- Ce s’rait bien que tu t’débarrasses de cette manie de m’interroger sur ce qui n’te regarde pas Julie, s’emporta Clara, énervée.

Julie s’empourpra et croisa les bras. Sa patronne souffla et jeta un œil à Lucien. Elle ne savait pas comment le lui annoncer, mais elle devait le lui dire. Son filleul était décédé dans des circonstances violentes, comme tous ses Pokémon. Elle n’eut pas le temps d’ajouter quoi que ce fût, Lucien lui parla alors :

- Élodie m’a invité à rester, tu m’as promis un entraînement, je crois ? demanda-t-il avec engouement.

Ravie de ne pas avoir à se faire annonceur de mauvaises nouvelles et heureuse de cette proposition, elle accepta avec joie.

- Mais avant, il faut que je passe un coup de fil à Maël.
- Trop cool, j’pourrai lui parler ? demanda Élodie, très enthousiaste.
- Bien sûr, allons à l’ordi, comme ça j’pourrai vous l’présenter, répondit Clara.

*_*_*_*_*_*_*_*_*
Après avoir récupéré Xatu et Évoli pour leur futur entraînement, Clara et ses trois compères s’étaient retrouvés devant l’ordinateur de Julie. La jeune Championne avait décidé de privilégier une conversation par Pokype – le Skype du monde Pokémon –, plutôt que par téléphone. L’application permettait de plus facilement discuter à plusieurs. Une webcam installée au-dessus du PC allait les filmer tous les quatre.

Elle avait déjà lancé l’appel à son frère et attendait qu’il répondît. Julie avait également préparé un agenda électronique sur le côté du logiciel de visioconférence. Après de longues secondes, un jeune homme apparut. Il portait les cheveux courts et roux-brun. Il avait les mêmes yeux que Clara, Élodie avait les yeux plus proches du bleu que du vert. La jeune Championne s’amusait souvent de leurs couleurs de cheveux. Bien qu’ils fussent tous de la même famille, ils possédaient des couleurs de cheveux naturellement différentes.

La relation entre la jeune Championne et son frère avait toujours été distante. Si elle s’entendait à merveille avec Élodie, la grande différence d’âge entre elle et Maël – huit ans ! – leur avait toujours nui. Ils s’aimaient beaucoup, certes, mais l’un comme l’autre avait toujours privilégié leurs Pokémon et le travail. À sa naissance, son frère s’apprêtait à débuter son voyage initiatique.

- Salut frérot ! lança-t-elle, heureuse de le revoir après cinq ans.
- Hey Clara, coucou Élodie ! Vous avez bien grandi ! répondit-il avec un grand sourire. Vous êtes devenues de charmantes jeunes femmes maintenant !

Élodie rougit et le remercia timidement, mais Clara soupira, ce genre de remarque l’exaspérait plus qu’autre chose. Elle se contint ne souhaitant pas gâcher leurs retrouvailles. Après tant d’années, elle avait envie de revoir son frère et surtout ses anciens Pokémon.

- Qui sont vos amis ? demanda-t-il, intrigué.
- Julie, ma secrétaire à l’arène et Lucien, un camarade de la Faculté, les présenta-t-elle. Julie, Lucien, voici Maël, notre grand frère.
- Enchantés, répondirent-ils en même temps.

Lucien se pencha en avant, intrigué. Le jeune homme semblait très intéressé par le frère de Clara. Peut-être était-ce dû à leurs habits communs ? Maël était aussi habillé d’un costard-cravate noir. Il se demandait si ses compétences de Dresseurs équivalaient celles de sa sœur ou peut-être au moins supérieures à celles de Marc…

- Je me demandais, vous êtes aussi fort que Clara ? interrogea-t-il timidement.

La fratrie rit aux éclats à sa question. Pensait-il vraiment que le jeune homme aurait une puissance équivalente à celle de sa jeune Championne de sœur ? La question ne surprenait aucun des trois. On la leur avait posée maintes fois.

- J’suis sa p’tite sœur, pourtant j’suis loin d’avoir le niveau de Clara, répondit Élodie, un peu jalouse.
- Et moi, j’utilise principalement les anciens Pokémon de ma sœur, ajouta Maël. On pourrait penser que j’ai son niveau, mais c’est pas l’cas, malheureusement.
- Te sous-estime pas, frérot, tu es plus fort que tu ne l’penses, assura la benjamine. J’n’ai jamais réussi à vous battre l’un comme l’autre.

La jeune fille soupira. Bien qu’elle adorât ses aînés, elle conservait un complexe d’infériorité vis-à-vis de son grand-frère. Les deux sœurs avaient une excellente relation et cela lui avait permis de l’atténuer au fur et à mesure du temps. Mais depuis que Maël eut rejoint l’entreprise familial six ans auparavant, ils s’étaient côtoyés très souvent avant qu’elle ne partît à la Faculté de Rivamar. Sa force surpassait la sienne et certains de ses Pokémon étaient aussi redoutables que ceux de Clara.

- Vous travaillez dans quoi ? demanda Julie, souhaitant participer à la conversation.
- Je suis le Directeur financier de Galano & Fils SA, répondit-il d’un air important.

Le jeune homme avait en effet suivi un parcours fulgurant. Ayant mis un terme à son voyage initiatique plus tôt que prévu, il avait suivi des études d’économie et de finance à la Faculté de Rivamar depuis l’âge exceptionnel de treize ans. Très intelligent et plus mâture que la plupart des adolescents, il avait brillamment réussi ses études sur quatre ans, dont la dernière à Washington pour apprendre l’anglais. À l’âge de dix-huit ans, il commença à travailler dans l’entreprise familial – une gigantesque entreprise de recherches sur les Pokémon – avant qu’il n’en devînt le Directeur financier.

Son frère surdoué réussissait parfaitement sa vie professionnelle et gardait néanmoins du temps pour s’occuper de ses Pokémon et poursuivre leur Dressage. De ce fait, il n’avait aucune vie sociale : ni femme, ni enfants. La préoccupation première de leur fratrie ne semblait clairement pas être le renouvellement du nom Galano.

Quel étrange nom de famille, pensait-elle souvent. Leurs grands-parents paternels étaient décédés depuis longtemps et elle n’avait trouvé aucune trace de son origine. Leur père, Xavier, restait évasif sur le sujet.

- Au fait, comment va Évoli ? lança-t-il joyeux.
- Mais il va parfaitement bien ! lui répondit-elle en le sortant de sa Poké Ball.

Le jeune chat marron à collerette blanche sauta sur son épaule et poussa un cri tout mignon. Il était désormais en pleine forme et attendait avec impatience de pouvoir s’entraîner. Il salua d’un signe de tête son ancien maître – il avait éclos dans ses bras avant qu’il ne l’envoyât à Clara.

- Tu comptes l’utiliser à l’arène ? demanda-t-il intéressé.
- Pas encore, il n’a pas le niveau. J’attends qu’il ait évolué.
- Tu sais déjà en quoi ? lui demanda Julie, intéressée.
- Non, lui rétorqua-t-elle, cassante.

Elle y avait longuement réfléchi à une époque, mais elle avait décidé que le mieux semblait encore de le laisser décider. Elle s’adapterait à son choix, mais elle savait que ses autres Pokémon possédaient plus de compétences qu’elle pour l’aiguiller vers le meilleur choix. Évoli apprenait vite grâce à l’expérience de son équipe, mais son dernier combat contre Lucien lui avait démontré qu’elle ne pouvait pas encore s’en servir. Tous les cinq discutèrent encore de choses et d’autres pendant plusieurs dizaines de minutes, avant que Clara n’en vînt au sujet de son appel :

- Si j’t’ai appelé, c’est entre autres pour te proposer un match.
- Ah oui ! Ce fameux match que l’on attend depuis longtemps ! s’exclama-t-il. Tu as des dates à me proposer ?

La jeune Championne parcourut lentement son agenda électronique sous l’œil avisé des trois autres. Il y avait quelques trous qu’elle lui indiqua, mais aucune date ne lui convenait.

- Malheureusement, je suis très occupé ces prochaines semaines, je ne pourrai pas me libérer, s’excusa-t-il rapidement.

Elle soupira. Tout ça les amenait déjà à début avril. Deux mois et demi lui paraissaient tellement longs. Puis elle se rappela que des années s’étaient écoulés depuis qu’ils s’en étaient parlé. Elle finit par trouver une date libre juste après un certain Florian Rubert.

- J’ai une date à te proposer, que penses-tu du 4 avril ? demanda-t-elle.

Quelques minutes s’écoulèrent où il feuilleta son propre agenda avant qu’il ne lui répondît :

- À 14 heures ? On pourra dîner ensemble.
- Ça m’convient, on s’donne rendez-vous au Centre Pokémon à midi ?
- C’est parfait, alors on s’reverra à ce moment-là. Tes Pokémon ont l’air impatients de te revoir.
- Moi aussi, j’me réjouis de les revoir. J’me demande comment va Colhomard depuis tout ce temps.
- Toujours aussi hargneux et revanchard je parie, murmura Élodie.

Le crabe géant la terrifiait ; il n’avait jamais pardonné à sa sœur de l’avoir abandonné au profit de Démolosse, son plus grand rival. D’une violence incroyable, aucune pitié n’avait transparu de lui lorsqu’elle l’avait affronté quelques années plus tôt. Elle se demandait comment Maël avait réussi l’exploit de le maîtriser et de l’entraîner.

- Et comment vont tes autres Pokémon ? poursuivit Maël. Ça se passe bien à l’arène ?
- Eh bien, ils sont en pleine forme. On a gagné notre premier match aujourd’hui…

Elle s’interrompit, attristée en repensant à son adversaire du jour. Il ne méritait pas de finir comme ça. Elle baissa la tête, sécha d’un geste des larmes qui avaient commencé à perler à ses yeux et se ressaisit. Son petit manège ne passa pas inaperçu auprès de sa sœur :

- Qu’est-ce qui s’passe Clara ? s’inquiéta-t-elle.

Sa réponse se fit attendre, les trois autres la pressèrent pour qu’elle se confiât. Elle ne voulait pas que Lucien l’apprenne, il devait le savoir, mais elle ne pouvait s’y résoudre. Elle finit par répondre dans un murmure à peine audible :

- Marc… est mort.

Le visage des quatre autres se métamorphosèrent, une fois le choc passé, ils durent digérer cette information. Lucien s’effondra même au sol en pleurs. Julie s’assit à côté de lui pour tenter de le réconforter. Élodie prit sa sœur dans ses bras et la berça gentiment. Personne ne lui posait la question fatidique, mais elle devait le dire :

- C’est un meurtre… et tous ses Pokémon sont morts, révéla-t-elle tristement.

Son frère l’observait, inquiet. Quelque chose s’était vraisemblablement brisée en elle. Il aurait voulu la rejoindre immédiatement, mais il n’en avait pas la possibilité. Trop loin, trop occupé. Il ne savait pas quels mots lui dire. Il proposa alors :

- Rendez-lui hommage. Faites un combat Pokémon, c’était un Dresseur.
- Mais on l’connaissait à peine ! murmura Élodie. Comment le prendrait-il ?
- C’est ce qu’il aurait voulu. Qu’on ne se morfonde pas et qu’on retrouve celui qui l’a tué, annonça Lucien.

Il avait un peu repris contenance et s’était relevé. Il sécha ses larmes et remercia Julie de l’avoir soutenu. Il sortit de l’espace réservé à la secrétaire et se rendit à l’arène. Lorsque la porte se referma, on entendit un cri.

- Ne le laissez pas seul, ajouta Maël. Ce n’est pas le moment ! Je pense qu’il vaut mieux qu’on se quitte ici. Je te rappellerai dans la semaine pour voir comment tu vas Clara.

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Clara, Lucien, Julie et Élodie se trouvaient à présent dans l’arène. Ils avaient sorti l’ensemble de leurs Pokémon pour un entraînement sous la forme d’un hommage à Marc. Démolosse ne participait pas à l’entraînement, Élodie l’ayant informé qu’il avait quitté l’arène dans l’après-midi pour s’entraîner.

L’arène était immense et chaque Pokémon avait son adversaire ainsi que la place pour l’affronter. Xatu affrontait le Gardevoir et le Lippoutou d’Élodie en deux contre un. Évoli et Ectoplasma se combattaient pour une revanche. Julie en possédait trois : un Sidérella, un Goupelin et un Roigada. Le premier faisait face à un Pifeuil et le second un Ténéfix (appartenant tous deux à Lucien). Le troisième, enfin, se battait en compagnie des deux derniers Pokémon du jeune étudiant (Alakazam et Lugulabre) contre Draco et le Cornèbre de la sœur de la jeune Championne, tous les cinq suivaient les directives de leurs Dresseurs respectifs.

L’affrontement avait débuté depuis un bon quart d’heure maintenant. Ses trois partenaires se donnaient à fond, mais pas elle pour leur laisser une chance – très mince. Les trois contre deux ne lui posaient pas problème, elle avait même proposé qu’ils l’affrontassent tous ensembles, mais ils avaient décliné l’offre. Ils se concentraient tous uniquement sur le match et leurs Pokémon, refusant de penser à quoi que ce soit d’autre. Ils voulaient lui rendre hommage et refusaient de se laisser aller aux larmes et à la colère.

Ils avaient pris le temps de se réconforter les uns les autres avant de débuter. Lucien avait partagé quelques anecdotes sur son filleul, mais avait beaucoup pleuré. Il savait qu’il ne le reverrait plus jamais, mais il irait lui dire aurevoir.

- Alakazam, Éclat Magique ! lança-t-il farouchement.

Un puissant éclat lumineux et violet éblouit tous les Dresseurs et s’apprêtait à frapper ses deux adversaires. Ils étaient faibles au type Fée tous les deux. Mais Draco para l’attaque avec sa Brume, aidé par la Buée Noire du Cornèbre. Une combinaison défensive, certes, mais qui permettait de les protéger tous deux.

Deux Ball’Ombre sortirent alors de la brume, essayant de profiter de l’effet de surprise. Mais le Dragon, l’ayant prévu, s’envola suivi de Cornèbre.

- Dracosouffle ! lança Clara.
- Ténèbres ! ajouta sa sœur.

Le rayon vert projeté par le serpent bleu se mêla aux rayons noirs projetés par les yeux du Pokémon Obscurité. Le souffle devint alors brun-noir. Mais l’Alakazam la stoppa avec ses pouvoirs psychiques. Le Roigada se téléporta alors pour lancer un puissant Laser Glace sur le Cornèbre. Mais la queue du Dragon vint se mettre au milieu. Ses perles de la queue devinrent orangées lorsqu’il projeta un Lance-Flammes contre l’attaque Glace.

- Quoi ?! s’écria Julie.
- Il peut attaquer des deux côtés ? sursauta Lucien.

Tous les deux avaient pourtant assisté à son match le matin même. Son Pokémon s’était pourtant servi d’une attaque Glace avec sa queue, pourquoi cela les surprenait-il ? Clara n’avait pas gagné ses titres par hasard.

- Draco, Blizzard !
- Feu d’Enfer ! répliqua Lucien.

La tempête de neige qui se leva paraissait beaucoup moins forte que celle utilisée contre Dracolosse ; il ne voulait pas toucher ceux qui s’affrontaient dans leur coin. Une véritable tornade de feu se créa dans l’attaque Glace et y mit un terme immédiatement. Lucien ne se débrouillait pas trop mal, elle devait le reconnaître.

Elle jeta un regard en biais à sa sœur pour lui indiquer que son Pokémon devrait suivre le sien. Elle mit quelques secondes avant de comprendre le message. Draco lança alors une Dracocharge sur l’Alakazam de la même manière qu’il avait contrattaqué le matin même. Leurs adversaires usèrent de Psycho tous les trois ensembles pour le stopper. Le Dragon tenta de se dégager en y mettant plus de puissance, ils peinèrent, mais tinrent bon.

C’est alors que le Cornèbre descendit subrepticement vers eux et attaqua le Lugulabre avec Feinte. La chandelle encaissa le coup, mais lâcha prise. Les deux autres Pokémon ne purent tenir seuls le Draco adverse, celui-ci percuta alors l’Alakazam avec sa Dracocharge.

Courageusement, tous deux se relevèrent. Ils ne voulaient pas abandonner, ils souhaitaient au moins porter un coup au Dragon. Soudain, un Laser-Glace le frappa, il grogna et jeta un regard amusé au Roigada qui l’avait surpris par derrière.

- Bien joué, Julie ! lança Clara.

Les deux avaient oublié la présence du Pokémon Royal ou avait feint de ne plus s’en rappeler. Il en avait profité pour se téléporter et frapper un gros coup. Le Dragon s’énerva un peu, mais joua le jeu. Sa perle du cou s’illumina en jaune. Lorsqu’il ouvrit la bouche, Clara comprit ce qu’il voulait faire.

- Draco, non ! Pas cette attaque.

Il ferma alors immédiatement la bouche. Son corps émis alors une grande vague d’électricité, toutes ses perles brillèrent en jaune et un vaste courant électrique s’échappa de lui. Il était entouré d’un véritable dôme, l’oiseau noir prit peur et s’envola le plus haut possible. De la foudre s’en échappait et frappait au hasard dans un vaste rayon. Clara s’approcha de sa sœur pour la protéger.

Les trois Pokémon adverses furent touchés par l’attaque Électrique sans nom. Mais ça ne se termina pas là, les Pokémon alentours durent s’éloigner pour ne pas se prendre un coup eux aussi. Un bruit assourdissant s’en échappait, personne ne se rendit alors compte que la porte derrière la jeune Championne s’ouvrit. Soudain, un éclair fendit l’air à côté d’eux. Quelques secondes plus tard, elles entendirent un hennissement au-dessus du vacarme. Tous, humains comme Pokémon, se retournèrent vers le nouvel arrivant.

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Le labyrinthe de la Grotte Retour… est horriblement complexe, surtout quand on n’en connaissait pas le chemin. La licorne de feu y avait tourné des heures durant, demandant fréquemment son chemin, mais peu de Pokémon l’aidèrent. Il se perdit souvent, mais parvint à s’en sortir.

Il faisait nuit depuis longtemps maintenant. Galopa semblait épuisé ; il ne tenait plus sur ses pattes. Mais peu importe, il se devait de continuer. Pour son Dresseur qu’il aimait tant, pour ses partenaires décédés, pour Démolosse, son ami de toujours, mort dans une mare de sang, il devait absolument prévenir l’Ultime Championne de ce qui se tramait derrière son dos.

Il connaissait l’identité du coupable, alors il devait l’en informer, qu’importe la manière. Il savait pourtant que les Pokémon ne pouvaient pas parler aux humains, mais il trouverait un moyen. Il marchait, péniblement, s’arrêtant fréquemment pour reprendre son souffle.

« Plus que cent mètres, vas-y ! Plus que cinquante mètres, tu y es presque ! s’encourageait-il.

Il sentait au loin d’autres Pokémon, dans les bois ou dans les étangs. Il devait se rendre à l’arène, retrouver la jeune fille que son Dresseur avait affronté plus tôt dans la journée. Il n’avait plus qu’un objectif désormais : venger son maître.

Il finit par arriver à l’arène. Il reprit son souffle, péniblement. La porte s’ouvrit alors automatiquement à son approche. Il la traversa et tomba sur le hall d’entrée, désert. Il entendit alors des bruits provenant de derrière le mur du fond, la salle des combats, pensa-t-il. Un entraînement se déroulait au même moment.

Il passa la seconde porte, le grincement passa totalement inaperçu, alors que les Pokémon continuaient toujours à se battre. Plus d’une dizaine se trouvaient là. Il aperçut rapidement la Championne, mais avant qu’il n’esquissât le moindre geste, un violent choc électrique lui parcourut le corps. Il en hennit de douleur, mais cela revigora un peu ses muscles fatigués. Tous se retournèrent vers lui. Humains comme Pokémon l’observèrent. Il effectua un pas en avant vers la jeune fille, puis un autre et un troisième…

C’est à ce moment-là qu’il le vit. Il le vit, telle une ombre avec un sourire malicieux et un regard de haine : le meurtrier, le coupable, celui qui avait tué son Dresseur adoré et tous ses amis, était là et le regardait. Il recula, cela ne se pouvait pas ! La peur le tenaillait ; personne ne pouvait le défendre, il était trop fort ! Avec l’énergie du désespoir, il se retourna pour s’enfuir.

Son cœur battait à tout rompre, la douleur avait disparu. Il avait abandonné tout espoir de venger son maître, il ne lui restait plus qu’à partir loin, en espérant que jamais il ne le retrouvât.

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Le Galopa venait de se retourner pour s’enfuir. Clara devait le retrouver rapidement. Pas le temps d’expliquer la situation aux autres, elle partit à sa poursuite, Draco sur ses talons. En sortant elle regarda partout pour trouver le cheval de feu. Il avait éteint ses flammes et rien n’indiquait la direction qu’il avait prise.

- Eh merde ! Comment j’suis sensé le retrouver ?! jura-t-elle entre ses dents. Et pour pas arranger les choses, Démolosse est pas là.
- Qu’est-ce qui se passe ? demanda Élodie dans un souffle.

Elle se retourna, tous les Pokémon ainsi que tous les autres Dresseurs se trouvaient derrière elle. Draco avait poursuivi sa route en direction du bois en contrebas.

- C’est le Galopa de Marc ? questionna Lucien.
- Pas l’temps d’expliquer, il faut le retrouver ! hurla-t-elle.
- On s’sépare ! s’exclamèrent-ils tous ensembles.

Les Psy se téléportèrent et tous les autres – ainsi que leurs Pokémon – partirent dans des directions différentes. Clara prit la décision de suivre son Draco. Ses capacités d’analyses lui avaient peut-être permis de trouver une piste ? Ou peut-être avait-il préféré rejoindre Démolosse et lui demander son aide dans le pistage ? Peu importe, aucune autre option ne s’offrait à elle, malheureusement.

Elle courut à fond les ballons jusqu’au bois, à tel point qu’elle y arrivât essoufflée. Elle s’arrêta un instant, avant qu’elle n’entendît un hennissement de détresse. Elle reprit sa course effrénée, elle devait protéger ce Galopa, outre les informations qu’il détenait, elle devait bien ça à Marc. Quelques secondes plus tard, elle entendit un hurlement qui lui glaça tous les os du corps ainsi qu’un bruit de déchirement, comme si on avait arraché quelque chose.

- NON ! hurla-t-elle.

Un gong étrange se fit entendre dans une clairière toute proche, là où sa sœur avait installé la zone d’entraînement de son Pokémon. Elle ne perdit pas de temps à s’y rendre et alla à la source du cri effroyable. Elle contourna les arbres, cherchant désespérément le Galopa. Un craquement étrange dans des branchages la fit sursauter. Soudain, on la poussa violemment pour qu’elle chutât, juste avant qu’elle ne sentît un petit tremblement de terre.

Elle rouvrit les yeux et aperçut son Démolosse qui lui lécha le visage, heureux qu’elle ne fût pas blessée. Draco apparut quelques instants plus tard. Elle se releva et épousseta ses vêtements. Elle regarda autour d’elle pour voir ce qu’il s’était passé. La vision lui retourna le cœur. Si elle s’était retenue avec Marc et Roucarnage, là ce n’était plus possible, elle se pencha de côté et vomit.

La tête dans les branchages, la bouche grande ouverte et les yeux exorbités, le Galopa gisait au sol, les pattes et la corne brisée. On aurait pu croire qu’il tenait debout sur les branches tombées sous son poids, mais la mort l’avait déjà emporté. De sa poitrine giclait une fontaine de sang. À côté de la jeune fille se trouvait un énorme cœur qui battait encore, bien qu’il n’y eût plus de raison. Il avait été arraché du cheval de feu et il en était mort sur le coup.

Elle pianota sur sa Pokémontre et appela la police. Elle les pria de venir immédiatement sur les lieux et leur indiqua qu’elle avait retrouvé le Galopa de son adversaire. Lorsqu’elle raccrocha, elle se détourna de la scène. C’était une véritable vision d’horreur, mais le plus important venait.

- Fais chier ! jura-t-elle entre ses dents. Marc, j’ai rien pu faire, pardonne-moi. Mais grâce à ton Pokémon, j’ai découvert un indice important.

Elle donna un énorme coup de poing dans l’écorce qui se brisa sous l’impact, du sang jaillit de ses jointures, mais elle ne s’en intéressait guère. Il n’y avait qu’une seule chose de certaine dans cette histoire : le meurtrier ou la meurtrière du gothique se trouvait dans l’arène. Il avait tué le Galopa pour qu’il ne tût à jamais. Un de ces trois-là était le coupable.

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Draco et Démolosse examinèrent la scène rapidement. Ni l’un ni l’autre n’avaient envie de rester, ce cadavre les gênait terriblement. Ils s’en allèrent et laissèrent la jeune fille appeler la police et rester auprès du Galopa. Lorsqu’ils se furent suffisamment éloignés, ils commencèrent à discuter. Le Dragon expliqua rapidement la situation à son partenaire qui l’écouta, pensif.

- Je vois, donc Throshamp est mort assassiné, Marc a aussi été tué et maintenant c’est au tour de son Galopa, résuma-t-il.

Il n’avait aucune idée de comment Draco avait obtenu toutes ses informations, mais peu lui en chalait. Ils devaient trouver une piste et aider leur maîtresse à découvrir la vérité, quoi qu’il leur en coûtât.

- Lucien était proche de Marc, peut-être avait-il un mobile, suggéra Draco. Il y avait un message ensanglanté disant « Luc » sur le sol.

Le Dragon semblait tout aussi décontenancé par la situation. Aucun d’eux ne savaient comment procéder. En plus, d’après ce qu’il lui avait raconté, la police de Rivamar semblait particulièrement incompétente.

- Peut-être que ce n’est pas lui la vraie cible. C’est peut-être que le début d’une série de meurtres, supposa le chien ténébreux.

Il pensait peu probable que Lucien fût le meurtrier, à moins qu’il eût lui-même écrit « Luc ». Mais aucune des deux autres n’avaient de réels mobiles pour tuer Marc non plus. Il n’y avait qu’une seule option restante.

- Sais-tu quel est mon âge ? lui demanda-t-il le plus sérieusement du monde.

Pensif, il sursauta à sa question étrange et le regarda, intrigué. Pourquoi la lui posait-il ? Le moment semblait particulièrement mal choisi, mais il joua le jeu et réfléchit, il lui révéla ensuite son raisonnement :

- Clara a toujours dit que tu es né quelques jours après elle. Tous les deux avez passé toute votre enfance ensemble, c’est pourquoi vous vous entendez si bien et que tu es aussi fort, résuma-t-il. Elle a dix-sept ans, je dirais donc que tu en as aussi dix-sept.
- Erreur ! tonna-t-il.

Le Dragon sursauta, il ne s’attendait pas à ce qu’il le corrigeât ainsi. Où se trouvait l’erreur ? Interloqué, il indiqua au chien qu’il devait s’expliquer. Il inspira intensément et révéla le terrible secret qui entourait Clara et lui :

- J’ai quinze ans. Je suis né deux ans après Clara et seulement quelques jours après Élodie.

Draco comprit alors la signification derrière ses questions incongrues. La jeune Championne avait des troubles de mémoire depuis longtemps, mais lui non.

- Je vois, ça explique pourquoi tu t’entends aussi bien avec elle. À l’origine, tu étais…
- Le Pokémon d’Élodie. Exactement ! termina-t-il.

Ça changeait tout. Absolument tout. Lucien n’était pas le principal suspect pour eux d’eux, désormais. Démolosse raconta alors son histoire :

- Il y a une douzaine d’années, un évènement étrange eut lieu. Alors que l’on n’avait jamais été proche, Clara se rapprocha de moi, alors qu’au contraire sa sœur s’éloigna. Bien que je sois à l’origine le Pokémon d’Élodie, je suis devenu le Pokémon de sa grande sœur et je partis avec elle sur les routes.
- En résumé, Clara ne se souvient plus de la vraie histoire, mais Élodie s’en rappellerait…
- Si c’est le cas, elle a toutes les raisons de vouloir du mal à sa grande sœur et de la faire souffrir !

Démolosse ne semblait pas perturbé de ce changement de main. Il s’entendait à merveille avec toutes les deux. Mais si un jour il devait choisir, ce serait Clara sans aucun doute. Mais deux questions les taraudaient, lui et Draco :

Trois suspects. Aucun mobile apparent. Qui pouvait bien être le coupable ? Et surtout, comment annoncer la vérité à Clara une fois le meurtrier découvert ? Cette affaire s’annonçait très complexe. Parmi l’entourage proche de la jeune Championne, un traître se cachait.

À SUIVRE