Ch.7 : Des hommes virils, des vrais
« Les… Quoi ?! s’exclama le stupide chat. Non, non, je voulais dire à propos de l’argent ! J’ai en aucune façon envie de retourner là-bas !
— On ne peut pas les laisser là-bas !
— Dooonc tu suggère que NOUS y retournions ? On a entendu la police venir, donc tout est bon !
— Non, tout n’est pas bon ! insistai-je. Une prise d’otage ne se termine pas dès l’instant où la police arrive, et entre temps ils peuvent à tout moment liquider les otages !
Soudain, une grosse explosion retentit. Le genre « KABOOM », mais en plus réaliste, évidemment. Je me tourne immédiatement vers le matou pour aller voir, il acquiesce. Nous nous ruons alors vers l’origine du bruit, pour y découvrir une voiture de police retournée et en feu. Oh. Alors là c’était du jamais vu. Autour, les policiers affluaient. Face à eux s’avançait Amos, son arme à la main, et accompagné d’un Démolosse visiblement très méchant.
— Il est sérieux ? murmura Flamiaou. C’est quoi ce taré ? (il se tourna vers moi) Et… T’es sûr de vouloir les sauver maintenant que t’as vu ça ?
Il marquait un point, c’était certain. Pour faire court, après avoir vu ça, j’avais envie de TOUT sauf y retourner. Même avant, en fait ! Mais avait-on le choix ? Mighty M se trouvait là-bas, aussi ! Soudain, Amos se mit à parler.
— Vous arrivez trop tard, déclara-t-il aux policiers. Nous avons déjà emporté tous les Pokémon présents dans le centre.
L’un d’eux sortit son arme et visa Amos.
— Et les otages ?! cria-t-il.
— Ceux ayant coopéré vont bien. Pour les autres, c’est différent.
J’en frissonnai. De base, je faisais partie de ceux ayant refusé de coopérer. C’était donc un miracle que je n’aie pas été fusillé.
— Allons-y ! soufflai-je. Il est seul, nous pouvons le vaincre d’ici !
— Et pour quoi faire ? répondit Flamiaou. Je comprends que tu veuilles jouer les justiciers mais ça ne va rien nous amener de bon !
Je ne pus m’empêcher de sourire malgré la tension.
— Oh que si ! Une fois vaincu, nous demandons poliment une récompense à la police.
Les yeux du minou s’éclairèrent soudainement. Oui, il avait compris où je voulais en venir. Certes, l’adversaire était coriace, mais les conditions étaient différentes. Ce n’était pas qu’un match d’entraînement, là il y avait une véritable tension et nous le savions. Même Keunotor l’avait compris, alors c’est pour vous dire…
— Je te suis, conclut mon allié. Keunotor ?
— Keu !
— Dans ce cas-là, allons-y ! Keunotor, balance un Fatal-Foudre sur le Démolosse, et ensuite, on lui saute dessus !
La Souridodue s’exécuta, et des nuages noirs se formèrent au-dessus du groupe d’Amos. Seul ce dernier le remarqua, mais trop tard, son Pokémon fut foudroyé. Il se retrouva chancelant et confus.
— Maintenant !! criai-je.
Nous sortîmes de notre cachette et nous plaçâmes face à l’admin Rocket.
— Encore vous, siffla-t-il.
— Encore nous, oui, ricanai-je. Cette fois, nous allons nous débarrasser de toi et repartir pour de bon !
Sans y prêter attention, le gros malade tourna la tête vers son chien.
— Démolosse, tu penses pouvoir tenir le coup ?
Un aboiement signifiant un grand oui lui répondit. Souriant, Amos sortit deux autres Pokéballs, desquelles apparurent un Nostenfer et un Smogogo. C’était un putain de trois contre deux. Tout d’un coup, je me sentis faible. Pas que ce soit une première, mais l’espoir que je commençais à sentir s’était évaporé d’un coup. Même Flamiaou tressailla.
— Ce sera pire qu’avec le Major Bob, déclara-t-il. Ses Pokémon sont des monstres.
Je sentais des suées froides me parcourir le dos. Bon sang, quelle idée j’ai eu de vouloir l’affronter ? Nous n’avons aucune chance !
— Keu !!
Nous nous tournâmes vers la bestiole. Son regard semblait déterminé et pour le coup, à côté de lui nous faisions pâle figure. J’expirai lourdement. C’était maintenant ou jamais.
— Keunotor, bredouillai-je, utilise Spatio-Rift.
Même Flamiaou sembla étonné. Pourtant, il fallait que ça marche, sinon nous étions cuits. Et morts, également. Amos rangea son arme, amusé.
— Maintenant !! hurlai-je. Spatio-Rift !!
Keunotor se chargea d’énergie, mais l’autre riposta aussitôt.
— Nostenfer, Buée Noire.
La chauve-souris cracha un nuage noir opaque qui masqua toute la rue. Mes Pokémon s’en trouvèrent alors perdus. Finalement, Keunotor projeta un arc d’énergie mauve loupant les adversaires et qui partit s’encastrer dans un bâtiment, le découpant presque en deux.
— C’est inutile d’attaquer aussi violemment si tu ne peux maîtriser le combat, fit la voix d’Amos. Mais je dois reconnaître que ton Pokémon est particulier. Nostenfer, Ultrason.
Un bruit inaudible pour moi mit mes alliés au sol, tremblants de toute part.
— Maintenant, Démolosse, Déflagration.
Provenant de la fumée, une énorme boule de feu nous attrapa tous les trois. Flamiaou bondit alors sur sa trajectoire et tenta de la stopper avec un Lance-Flamme, mais c’était peine perdue. Finalement, l’attaque éclata en une gerbe rouge qui élimina mes deux créatures et me projeta au loin, sonné. La vue brouillée, je constatai que Keunotor était KO. Quant au chat, il tenait plus ou moins sur ses pattes.
— Flamiaou !! criai-je. Fuis ! (il se retourna vers moi, hésitant) Maintenant !!
Après un moment d’hésitation, il fila dans une ruelle. Quant à moi, je laissai ma tête tomber au sol, incapable de faire quoi que ce soit. J’entendis des coups de feu multiples, puis Amos s’approcha de moi.
— Tu as de la chance, je ne vais pas te tuer, dit-il. Tu n’en vaux pas la peine. Mais que cela te serve de leçon. Quant à ton Keunotor, je vais m’assurer d’en prendre soin, tu peux me faire confiance.
L’instant d’après, je sombrai dans l’inconscience.
*****
Je me réveillai doucement, ma tête me faisant souffrir pire qu’un lendemain de nouvel an. J’entendais des bruits, au loin. Peut-être parce que je me trouvais en ville ? J’avais l’impression que tout n’était qu’un rêve – où plutôt un cauchemar, compte tenu de la finalité.
— Enfin réveillé ? m’adressa un routier puant la clope.
Ai-je un ami routier qui fume ? Non… Ah, ça doit être Flamiaou alors. Je me tourne dans la direction du grognement, et j’aperçois en effet une petite boule de poil détestable. Au moins il est là, lui, ça me rassure.
— Oui, tout va bien. Et toi ?
Pas de réponse. J’ai dit un truc qui fallait pas ?
— … Comment ça, « Bu, balabi, dubidur ? » ? me demande-t-il, hésitant.
Ok, je ne crois pas qu’on se soit compris, habitant des égouts. Mais prenant en compte l’état assez misérable de ma tête, peut-être que j’ai – un peu – mâché mes mots.
— On est où ? j’articule.
— Okey, j’en déduis « On est où ? », mais crois-moi t’es pas facile à comprendre, saloperie d’humain. Je t’ai ramené dans une ruelle avant que les gens en blancs ne t’embarquent. Je les aime pas, eux.
— Et… Keunotor ?
Yes. La question qui tue. Comment je le sais ? Non pas parce que j’ai recouvré la mémoire de tout ce qu’il s’est passé une demi-heure plus tôt, mais plutôt parce que Flamiaou garde le silence et fait une tête à en faire pleurer Giratina. Je crois que je viens de tirer le jackpot, là. Je me redresse et m’adosse à un mur.
— Ils l’ont pris, hein ?
— Une fois que je t’ai caché ici, j’ai essayé de m’approcher de leur groupe. Apparemment ils emmènent tous les Pokémon dans leur QG à Céladopole. Keunotor et ton ami bodybuilder gay y vont aussi.
— En gros, si on veut les retrouver, on va devoir foncer dans la gueule du loup ? Autant directement appeler leur boss, car vu la rareté de ces deux-là, crois-moi qu’ils ont atterri directement dans son bureau.
Je fais mine de sortir mon smartphone et le déverrouille. Enfin j’essaie. Je m’énerve. Puis je me rends compte qu’il est cassé. Apparaissent donc le déni, puis la culpabilité, la colère, le marchandage, la dépression, la reconstruction, et enfin l’acceptation. Génial, vraiment de mieux en mieux. D’un autre côté il ne m’a pas vraiment servi jusque-là, à part pour l’heure et la date.
— Et concernant la Team Rocket, tu sais quoi que ce soit ? continuai-je.
— Pendant que tu faisais ta sieste, j’ai été questionner les policiers encore en vie. Apparemment, Amos est l’un des commandants de leur groupe, avec quatre autres. Ils n’ont pas beaucoup d’ancienneté, mais sont à l’origine du projet de résurrection de la team. Quant au chef, j’ai cru comprendre qu’il s’appelle Giovanni et que jusqu’à très récemment, il était enfermé. C’était assez flou mais je crois comprendre que le monsieur est désormais de nouveau aux commandes.
— Et t’as pas son numéro, du coup ?
Question conne, hein, mais aux grands maux les grands moyens. Tout ce qu’on pouvait espérer, c’était réussir à s’infiltrer chez eux, récupérer les deux zigotos, et filer sans qu’ils nous voient. Même si ça me faisait mal au cœur de laisser tous ces pauvres Pokémon, j’étais pas en mesure de faire quoi que ce soit.
— Sachant qu’on n’a pas d’autre choix que d’aller là-bas, je suppose que le casino est une solution concrète, soupira le chat.
Je me relevai tant bien que mal, époussetant mes vêtements crades.
— Préparons-nous, alors, et allons-y.
— A-t-on une chance de gagner, à deux ? Je veux dire… On va quand même devoir faire face au groupe criminel le plus puissant de la région, bien qu’il soit affaibli.
Je le regardai dans les yeux. La situation était plutôt désespérée, ça allait de soi. Pourtant, avait-on le choix ? Non pas que je sois envahi d’un courage descendu tout droit des cieux, mais je me voyais mal partir sans Keunotor.
— Je vois pas ce qu’on pourrait faire d’autre. Il va être temps de se dépasser. Quoi qu’il en soit, on part dès maintenant. Autrement, il sera trop tard.
On reste silencieux un petit moment, à se fixer dans le blanc des yeux. Sacré moment de gêne, hein. J’essaie de regarder ailleurs, de siffloter, mais c’est peine perdue.
— Euh… Il fait beau hein ? je tente vainement.
— Oui c’est ça aller, bon comment on y va, à Céladopole ? On a toujours zéro thune pour prendre un train ou un truc du genre.
— Bah… On y va à pattes ?
— Sérieusement ?
Il soupire bruyamment, puis fixa une poubelle. Il y eut un blanc pendant plusieurs secondes, puis il se tourna soudain vers moi.
— Vous faisiez vraiment des majorettes, avec l’autre débile ? me lança-t-il.
Outch. Allez, tchao mon honneur et ma dignité, ravi de vous avoir connus. On se capte dans une nouvelle vie, hein !
— Euh… Non, en fait on reprenait ses postures de combat les plus badass. C’est un catcheur pro.
Deuxième blanc. Une nirondelle chanta dans le ciel. Puis le chat entra dans un fou rire encore plus terrible que la veille. Oui, sérieusement, le truc à poil se roula par terre pendant de longues minutes. Et moi, bah… Comme d’habitude, j’avais honte.
— Allez, va crever sale bête, je soufflai.
— Oh… Oh… Non… M-Mais pour de vrai Read ?! hurla-t-il de rire.
Ahah. Lol. L O L !
Bref, je me levai tant bien que mal, et attrapant le minou sous le bras, je sortis de la ruelle. L’autre ne réagit pas, toujours occupé à se payer ma tronche.
— Bon, on se casse de cette ville, j’en ai marre.
— Par pitié fais le rejoindre l’équipe ! Je vais pas le blairer cet abruti mais je veux voir ça de mes propres yeux ! s’étrangla-t-il.
Et qu’il ne se mette pas en tête de me faire un arrêt cardiaque, lui, parce que sans Pokémon à mon actif, je vais…
— Oh putin, m’arrêtai-je soudainement. Je sais !
— Ah ça y est, t’as retrouvé les enregistrements vidéo ? qu’il continua.
— Nan débilos, j’ai trouvé une solution à notre problème.
Le tenant dos au sol, je le lâchai, espérant qu’il se fasse mal. Mais WTF d’Arceus qu’il se retrouva par je ne sais quelle magie sur ses pattes, comme attiré au sol ! Okey, ma bestiole est mystique.
— On va aller chasser des Pokémon sauvages, dans l’espoir d’en attraper des ultra forts ! Si tu te donnes à fond, je suis sûr qu’on pourra les battre facilement, et ensuite un jeu d’enfant !
Il s’arrêta soudainement de rire, et me fixa.
— Mais j’y pense, comment tu as fait pour capturer Keunotor, sans Pokémon ? Quoique je sais pas si cette question est utile…
Ah gamin, apprends donc que ton dresseur, malgré tout, est un véritable guerrier. Je m’empressai donc de répondre.
— En fait, je suis tombé dessus par hasard, et sentant le feeling entre nous passer, je me suis lancé pour sa capture. On s’est donc battus au corps à corps pendant cinq minutes, dans un combat… acharné… Malheureusement j’ai… perdu. Mais quand j’étais inconscient…… il est …… tombé sur ma Pokéball au sol… et voilà.
Intérieurement, je pleurais toute l’eau de mon corps. Pourquoi ? Par pitié, pourquoi ai-je dit ça sans me rendre compte que j’étais un gros naze ? Flamiaou resta à me regarder avec des grands yeux.
— Tu t’es… battu au corps à corps avec lui ? C’est…
C’est trop beau pour être vrai, oui. Pas plus tard qu’une seconde après, il entra de nouveau dans un terrible fou rire. LOL.
Bref, quelques minutes plus tard, on se retrouvait dans le centre-ville. Sur un prospectus de publicité pour la ville, j’avais repéré un office de tourisme pour les dresseurs. Nous nous trouvions donc devant un joli bâtiment marron et vert avec écrit en gros à la bombe « OFFICE DU TOURISME POUR DRESSEURS ». Étais-je devant le bon bâtiment ? Nous entrâmes et nous retrouvâmes dans un joli bâtiment avec des tables, des chaises, et trois comptoirs séparés par un mur derrière lesquels se trouvaient trois personnes. Au-dessus de chacun était accroché un panneau « Débutants », « Moyens », « Experts ». Il y avait des clients devant les deux premiers, mais pas le dernier comptoir. Naturellement je me dirigeai vers celui-ci.
— Bonjour, adressai-je à l’homme.
Il avait l’air vraiment chelou. Le mec baraque, avec un tête de méchant et une put** de cicatrice autour de l’œil. Il était torse nu avec des marques de peintures et des tatouages carpe diem et le symbole infini partout. Enfin, autour de son cou étaient accrochées des Pokéball teintées camouflage en guise de collier.
— Ouaais ? m’adressa-t-il d’une voix méprisante et beaucoup trop grave.
— Euh… Je… Je… Euh… C’est… Je… Euh… buggai-je.
Vous inquiétez pas, je gère la situation. Le gars a compris que j’suis un mec balèze. Flamiaou soupira.
— C’est quoi le meilleur endroit pour les Pokémon sauvages les plus forts ? demanda-t-il.
Ah bah forcément, quand t’as sa voix dégueulasse t’es bien, hein.
L’homme resta planté sur nous pendant quelques secondes. Brrrr qu’il est dérangeant. Puis il se pencha au-dessus du comptoir, vérifia que ses collègues n’en foutaient pas une, et revint sur nous. Vraiment chelou.
— Suivez-moi. Vite.
Il nous invita implicitement à le suivre derrière une entrée sombre, cachée par un rideau. Pas très rassurés, je vous avoue, nous entrâmes dans un couloir sombre et étroit menant à une remise toute aussi sombre. Dedans ça puait l’encens, c’était infect.
— Faites gaffe quand vous parlez. Il y a des choses qu’il faut pas dire en public.
Nous restâmes stoïques pendant quelques instants, le temps de comprendre le possible message caché.
— P-Pardon ? osai-je finalement.
Le mec semblait pas rassuré du tout, j’avais l’impression d’avoir sorti une blague raciste du dix-septième siècle en public. A part ça, je ne voyais pas ce que j’avais dit de mal.
— J’ai bien compris que vous étiez des individus très expérimentés et n’ayant peur de rien, mais pas la peine de le crier sur tous les toits ! Si les conn**ds à côté entendant que vous êtes bons, il vont vous envoyer droit dans l’arène de la ville ! C’est le but de ce bureau, de faire de la viande à Bob ! Mais moi je suis pas comme eux, depuis que cet enfoiré m’a volé ma place de gros dur de la ville, je fais résistance !
Merveilleux, c’est le royaume des collabos. Bah, de toute façon j’étais immunisé, étant déjà passé pour un débile devant le champion.
— Et donc ?
— Je vais vous aider les morveux (Flamiaou s’étrangla) mais à une condition ! Vous allez faire quelque chose pour moi.
Et voilà, j’en étais sûr. Avec un malade comme lui, soyez certain qu’il va nous demander des trucs vraiment chelou.
— Oui… ?
— Promettez-moi de ne pas aller dans l’arène !
Oh, c’est moins hardcore que ce que je commençais à imaginer.
— Ah bah… avec plaisir ! répondis-je faussement enjoué. Voilà mon pote, tope-la !
J’étais gênant. Mais également crevé, stressé, et j’en avais ras le cul de tout ça. Le bestiau se rapprocha dangereusement de moi, assez pour que je puisse humer avec un plaisir dissimulé l’âcre odeur d’alcool qui suintait de tous ses pores.
— Et si j’apprends que vous y allez un jour, où même encore pire, que vous y êtes DEJA allés, je vous écorcherai vifs, gronda-t-il.
Aie. Coup dur pour moi. Je regarde le chat, il a pas l’air franchement plus rassuré que moi. A la limite, lui n’a pas à se taper les reflux alcooliques me faisant dangereusement tourner la tête.
Au même moment, on entend des pas provenir du couloir. Instinctivement, je me raidis. Oui parce que maintenant, avec toutes les conneries que l’autre demeuré m’a balancé, je m’attend à voir arriver un guignol pire que lui. Ils vont toujours par deux. Comme les mormons. Et non, c’est l’un des gérants de comptoir qui arrive. Un homme enrobé, aux cheveux noirs et courts, et… c’est tout. Ah si, il porte une chemise blanche. Rien de plus. Nous voyant, il sourit.
— Ah, je vois des clients par ici ! J’espère que Jean-Patrice vous guide pour tout ce qu’il faut. Bonne journée !
Et il repartit. Et… JEAN-PATRICE ?! LUI ?! J’entends Flamiaou qui se plante les griffes dans le flanc pour ne pas rire, et moi bah…
— AHAHAHAHAH !! je m’écrie. JEAN… JEAN-PAT’ ! Oh non, mais c’est pas vrai, dites-moi que c’est une blague !
Lui par contre n’a pas l’air de comprendre. Tant mieux, j’aurais aimé éviter de l’énerver dans une cave miteuse et sombre. Bien sûr c’est un peu tard maintenant, mais bon… Il ne répond pas.
— Bon, je vais vous indiquer où aller. Vous êtes beaucoup trop flippants pour moi.
On retourne au rez-de-chaussée comme si de rien n’était, et la montagne de muscles nous tend une petite carte dessinée à la main. Je peux facilement remarquer l’utilisation hésitante des crayons de couleur lorsqu’il s’agit de ne pas dépasser. Une petite signature « J-P » tout en bas m’indique que c’est ce gros bonhomme qui en est l’auteur. Bref, un détail de plus dans une mer de choses bizarres. Sur le morceau de papier jauni se trouve une petite croix rouge indiquant grossièrement le Nord de la ville, près de Safrania. C’est vraiment très grossier, hein, parce que les échelles ne sont pas respectées. C’est à peine si le mec ayant dessiné ça savait ce qu’il faisait.
De son gros doigt congestionné, il pointe la croix, comme si nous ne l’avions pas vu.
— C’est là. Mais attention !! fait-il semblant de crier (il chuchotait). C’est extrêmement dangereux ! Heureusement que vous êtes des gros durs, sinon…
Il ne finit pas sa phrase, j’en conclut donc que c’était VRAIMENT dangereux. Bon, d’un autre côté, je ne savais pas trop quoi penser en voyant ce gros nounours avoir presque les larmes aux yeux. Je soupirai donc, le remerciai, et embarquant mon chat d’un coup de pied dans le flan, nous sortîmes. En fait, plus j’y réfléchissais et plus j’arrivais à la certitude que ce serait du gâteau. Il me fallait juste des pokéball.