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Calendrier de l'Avent 2018 de Comité de lecture



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Informations

» Auteur : Comité de lecture - Voir le profil
» Créé le 12/12/2018 à 23:59
» Dernière mise à jour le 13/12/2018 à 00:05

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Jour 12 : Cher Rufus, par Flageolaid et LunElf
Algatia, le 20 Juillet 1958
Cher Rufus,

_____Je t’expédie ce billet sans savoir s’il te parviendra avant ton retour. Cela fait trois jours que l’on ne t’a pas vu à l’arène et Honorine compte sur toi pour arbitrer le petit tournoi d’été. En outre, les formalités administratives s’accumulent, ce qui irrite profondément Regina. Tu connais bien notre Championne, elle n’apprécie pas de devoir gérer cela toute seule. À croire que la Maison Bleue ne peut pas tourner sans toi !
_____J’envoie un de mes Bekipan faire le tour des îlots environnants en espérant qu’il saura te retrouver rapidement.

Bien à toi,
Clothilde

_____P.S : N’oublie pas de donner une récompense à Bekipan dès réception du courrier, mais évite les baies Gowav, cela ne lui réussit pas.


~~~

Algatia, le 15 Août 1958
Cher Rufus,

_____Voilà presque un mois que nous n’avons plus de nouvelles de toi, tout le monde commence à s’inquiéter à l’arène. J’ai longuement hésité avant d’écrire cette seconde lettre. J’ai d’abord essayé de retrouver ta trace dans les environs d’Algatia, mais Bekipan a refusé de me dire où il t’a remis mon dernier billet. Une petite enquête auprès de dresseurs nomades n’a rien donné non plus. Je ne comprends pas, on dirait que tu te caches. T’entraînes-tu en secret, sans nous en avoir soufflé un mot ?
_____J’ai beau réfléchir, je ne trouve rien qui aurait pu augurer un départ si soudain dans nos conversations ou dans ton attitude, ces derniers temps. Je m’étonne presque que le ciel soit resté si décidément bleu après ton départ : rien d’autre n’a changé, seulement, tu n’es plus là pour soupirer après la chaleur ou nous sourire comme tu le faisais. Cela me manque.
_____En tous cas, tu as raté le retour de Kyle. Il s’est présenté au port il y a dix jours, rayonnant à nouveau ; depuis, il nous raconte toutes sortes d’histoires sur le continent. Bonne nouvelle, ce voyage a vraiment l’air de lui avoir profité, comme il l’espérait, et lui a ouvert de nouveaux horizons, outre ceux de la bande de mer qu’il a dû traverser jusqu’à Hoenn. À l’en croire, il a retrouvé le goût de s’entraîner dur, là-bas, sans se cloîtrer sur notre petite île qui ne lui offrait plus que des duels qu’il connaissait par cœur. Il m’a expliqué qu’avant, il lui semblait avoir exploré toutes les possibilités du combat, assez pour que ça ne l’intéresse plus ; et qu’il avait réalisé en reprenant son entraînement qu’il y avait toujours moyen de repartir sur ses bases pour trouver d’autres chemins à exploiter. Est-ce ton cas ? En attendant ta réponse, je note précieusement ses conseils.
_____D’ailleurs, il nous a annoncé que son compère Lyle devrait lui aussi revenir à la Maison Bleue d’ici quelques jours. Il ne manquerait plus que toi pour reformer notre joyeuse troupe. Quelles que soient les raisons qui t’ont poussé à quitter Algatia, s’il te plaît, peux-tu répondre à cette missive ? Tu n’auras qu’à écrire au dos de cette lettre et la donner à Bekipan. Un seul mot suffira : nous voulons simplement nous assurer que tout va bien de ton côté.

Je t’embrasse,
Clothilde


~~~

Algatia, le 8 Octobre 1958
Cher Rufus,

_____Pour mon précédent courrier, Bekipan a mis presque un mois à revenir. Je l’ai retrouvé un matin, affalé devant l’arène, son plumage blanc et bleu noirci de crasse. J’ignore s’il est parvenu à te délivrer sa lettre, c’est pourquoi j’ai décidé aujourd’hui d’envoyer six de mes amis à plumes te retrouver. Ne t’étonne donc pas si tu reçois cette missive en plusieurs exemplaires.
_____La chaleur est enfin devenu supportable, mais je regrette le ciel bleu de l’été qui s’en va peu à peu. De même que le climat, j’ai l’impression que l’humeur générale se détériore légèrement, tant à la Maison Bleue que dans le reste d’Algatia. Les rues se vident, les combats d’arène se raréfient, l’ennui s’installe.
_____Nous avons lancé il y a deux semaines le tournoi annuel, qui apporte tout de même une certaine activité. Bien que juge de touche, j’ai pu effectuer quelques duels amicaux, qui m’ont amené de sympathiques nouvelles rencontres ! Mais avec moins de participants que l’année dernière, le tournoi reste moins vivant ; j’espère que les choses bougeront davantage une fois les simples qualifications terminées, j’ai repéré quelques dresseurs prometteurs pour le tournoi en lui-même. Toutefois, pour la plupart, ce sont des dresseurs sédentaires installés à Algatia depuis quelques temps déjà.
_____Je t’ai parlé de Lyle dans ma dernière lettre, si jamais tu l’as reçue. Il est rentré à l’arène au meilleur de sa forme, mais constate lui aussi avec amertume un changement depuis l’an dernier. L’ambiance n’est plus la même. D’ailleurs, Cécile m’inquiète. Elle se fait plus distante, nous qui nous croisions régulièrement, et voilà plusieurs mois qu’elle n’entraîne plus son Méditikka.
_____Et à propos d’arrivées, Raymond nous est revenu. Ou plutôt, notre championne lui a demandé d’assurer tes fonctions de dresseur d’arène pour une durée indéterminée. Il a également repris la gestion des documents administratifs, Regina souffle enfin. Nous en avons beaucoup parlé ces derniers temps, elle s’inquiète tellement à ton sujet qu’elle n’est pas toujours très concentrée lorsqu’un challenger la défie. Je t’en prie, si un de mes Bekipan parvient à te trouver, donne-nous de tes nouvelles.

Affectueusement,
Clothilde


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Algatia, le 30 Octobre 1958
Cher Rufus,

_____Deux Bekipan ne sont pas encore revenus, mais un des autres a délivré son message. À qui ? Je ne le saurais jamais si tu t’entêtes dans ton silence. J’envoie néanmoins quatre de mes fidèles Pokémon pour cette missive-ci.
Je ne pensais pas te réécrire si vite, mais mon moral a fini par me pousser à reprendre la plume. Tu sais que je n’aime pas l’hiver, or il a décidé d’arriver prématurément cette année... Après un été qui s’éternisait, je ne pensais pas que le froid viendrait aussi tôt. Ne plus voir le bleu de la mer par la fenêtre me déprime. Elle est au mieux d’une couleur terne et pâle, au pire grise sans plus de limite avec le ciel. Il fait trop froid pour sortir ou laisser la porte ouverte comme j’aime le faire, et j’ai l’impression que tous les habitants restent plus ou moins reclus chez eux.
_____Il y aura quand même de l’animation à l’arène ces prochains jours, avec les derniers matchs du tournoi, mais la Maison Bleue a connu des jours meilleurs en termes de fréquentation. Kyle a l’air de penser que tu as eu raison de quitter l’arène sans un mot comme tu l’as fait. Il sous-entend parfois qu’il pourrait t’imiter, un jour... Je ne le comprends pas. Au fait, Cécile est finalement partie, quelques jours après l’envoi de ma précédente lettre. Cela m’a bouleversé.
_____Hier, j’ai pris le ferry avec Sidonie et un groupe de dresseurs de la ville. Nous avons passé la journée à Nénucrique, une virée entre amis à laquelle il ne manquait que ta présence. Le froid et le mauvais temps nous ont obligé à déambuler dans le marché couvert durant une grande partie de l’après-midi. Finalement, les heures ont défilé trop vite, nous avons à peine profité du voyage.
_____Honorine était avec nous ; et c’est après ce moment passé avec elle que j’ai réalisé que nous ne nous voyions plus beaucoup en dehors de l’arène, où l’on n’a jamais tant le temps de discuter. Nos sorties tous ensemble, avec elle, Kyle, Lyle et toi me paraissent déjà lointaines et je regrette de ne plus les voir aussi souvent qu’à cette époque — travail à l’arène excepté. À croire que c’est toi qui nous liait, ou que le contact est plus difficile à établir avec le poids de ton absence. Tout cela contribue à mon humeur morose.
_____Aussi, j’ai rêvé de toi la nuit dernière. Cela n’a pas amélioré mon humeur. C’était un songe bizarre, avant que mon réveil ne sonne. Tu étais revenu à la Maison Bleue, tout sourire, à dos de Lokhlass. La mer était d’azur, de la même couleur que le ciel. Lorsque mes yeux se sont ouverts, il faisait gris. J’ai failli en pleurer. À la place, j’ai pris une feuille et un stylo pour entamer cette lettre.
_____Si mes Bekipan sont incapables de me donner le moindre indice sur ta position, je continue à mener mon enquête de mon côté. Cela m’a permis de me rapprocher de quelques-uns des habitants que tu avais l’habitude de fréquenter. Bien que toujours sans nouvelles, Rose et Maxence ont proposé de m’épauler dans les recherches, tout comme Lyle avec qui j’échangeais déjà de temps en temps à ce sujet. Tous les quatre, nous avons fouillé l’île et tous les îlots alentours de fond en comble, trois jours et demi durant. Nous nous sommes aventurés assez loin sur les chenaux 124 et 127, pour tout te dire.
_____Nous commençons à penser que tu t’es réfugié sur le continent. Mon amie Sidonie y a quelques contacts, surtout vers Nénucrique, elle pourra se renseigner sur d’éventuelles arrivées de dresseurs nomades là-bas. Tant que tu t’obstineras à garder le silence, nous n’aurons pas d’autres moyens de savoir que tu vas bien. Nous verrons bien si cela donne quelque chose, je crois que nous en aurions tous cruellement besoin.

Porte-toi bien,
Clothilde


~~~

Algatia, le 12 Décembre 1958
Cher Rufus,

_____En un mois et demi, il ne s’est pas passé grand-chose à l’arène ou à Algatia même, mis à part la fin du tournoi qui s’est déroulée sans surprises. Mais j’ai l’impression que les fêtes à venir enthousiasment les habitants. Un semblant de bonne humeur est de retour. Je garde un souvenir agréable du début du mois, lorsque nous avons décoré l’arène avec Honorine et Regina, qui a consenti à tenter l’expérience pour une fois. Cela faisait longtemps que nous n’avions pas partagé ainsi des moments de complicité ensemble !
_____Nous avons suffisamment de jours de beau temps en ce moment pour pouvoir profiter du ciel bleu par la fenêtre, en dépit des températures rudes à l’extérieur. Cela ne m’empêche pas de rendre plus régulièrement visite à mes amis ou connaissances.
_____J’ai à nouveau renvoyé tous mes Bekipan vers toi, sauf deux pour gérer le courrier de l’île, mais je pense que ce sera la dernière fois. Nous t’avons cherché partout, dans la mesure de nos possibles, et aussi loin que nous l’avons pu. Maintenant, nous pourrions déclarer une disparition, lancer des avis de recherche, mais l’idée me dérange. J’ai l’impression que tu n’as pas envie d’être retrouvé.
_____Nous en avons longuement discuté avec Rose, Maxence et Lyle. Après toutes ces recherches à l’aveugle, nous avons finalement réfléchi aux raisons qui auraient pu te pousser à quitter Algatia sans un au revoir, du jour au lendemain. Il y en aurait tant, qui peut savoir... Tu étais si discret sur ta famille, par exemple, dont nous savons seulement qu’elle se trouve sur le continent. Sur tes aspirations, en tant qu’homme et en tant que dresseur. Nous réalisons qu’en fait, nous ne te connaissions pas vraiment. Ton sourire chaleureux formait comme une barrière imperméable entre toi et les autres ; à rire ensemble, nous en avons oublié de nous connaître au-delà de nos manières d’être. Quoi qu’il en soit, nous sommes parvenus à cette conclusion évidente : tu ne serais jamais parti sans une excellente raison. Alors, quelle qu’elle soit, nous la respecterons.
_____Je crois que néanmoins, j’aurais tant aimé te revoir pour Noël. Je sais que tu détestes cette fête, pourtant je garde le vague espoir que tu franchisses le seuil de la Maison Bleue le 24 au soir, impossible de le chasser. D’ailleurs, notre arène ne gardera ce surnom plus très longtemps. La Ligue souhaite uniformiser l’apparence de ses bâtiments officiels ; cela concerne les centres et boutiques Pokémon, ainsi que les arènes. L’an prochain, nous devrons entreprendre des travaux afin de transformer notre sympathique Maison Bleue en un édifice tout en angles avec un toit jaune. La nouvelle a été accueillie d’une grimace collective.
_____Regina est maussade depuis, d’autant que tu sais à quel point elle déteste les fêtes de fin d’année, elle aussi. Je passe lui tenir compagnie de temps en temps, pour parler de combats, de courrier, de la météo et un peu de toi. Trop occupée, elle ne suivait nos recherches que de loin, mais je l’ai mise au courant de nos avancées et elle est d’accord avec notre décision. Je crois qu’elle n’espère même plus te revoir un jour, et elle a probablement raison. Quoique, si ce n’est pas pour Noël, j’aimerais bien que tu reviennes un jour, même dans plusieurs années, peut-être, comme si de rien n’était, avec l’habituel “Bonjour !” enjoué. Je me demande comment je réagirais.
_____J’ai tort de me bercer d’illusions, mais je ne peux m’en empêcher. C’est Noël qui m’y oblige en un sens. Lorsqu’on me demande quel cadeau me ferait plaisir cette année, je me pince les lèvres pour ne pas répondre “le retour de Rufus à l’arène”. Tu serais un superbe cadeau pour tout le monde à Algatia. Mais il me faut aller de l’avant. Si tu ne reviens pas pour les fêtes, je devrais me faire à l’idée que tu ne reviendras peut-être jamais à la Maison Bleue. Et si c’est effectivement le cas, je profiterai donc de cette ultime lettre pour te dire ce que tu ne m’as pas laissé le temps de te dire cet été. Au revoir, mon ami.

Mes sentiments les plus sincères,
Clothilde


~~~

En dépit de la saison, la mer portait son plus bel azur d’été. Le ciel qui l’en vêtissait était à peine tacheté de nuages bleutés, portés par une douce brise comme d’indolents oiseaux. Le soleil brillait, envoyant dans l’eau mille touches blanches éclatantes et éphémères. Tout était calme : le seul doux bruit des vagues flottait dans l’immense atmosphère. Tout autour de la mer, seulement un horizon de nuances bleues.

Un seul clapotis plus insistant s’élevait sur cette immensité turquoise. Des vaguelettes insistantes tapotaient gentiment sur une surface, bleue, d’écailles mates minuscules : des nageoires. Le Pokémon marin, nullement dérangé, fendait les flots d’une nage tranquille. Du haut d’un long cou fin aux courbes harmonieuses, il portait sur la mer un regard de la même tranquillité, de la même profondeur. Derrière lui s’ouvrait un chemin d’écume blanche.

Devant lui, les contours flous d’un île commençaient à se discerner.

Et sur sa carapace polie par une vie de navigations, un jeune homme était assis, tout aussi tranquille, de courts cheveux au vent et l’attention dirigée au lointain. Il sourit en découvrant Algatia se découper à l’horizon, caressa distraitement le cou de sa monture, et se perdit dans ses pensées.

De son autre main, il maintenait en place une fine pile de cinq feuilles de papier à lettre bleu, qui frémissaient sous l’air marin.