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Smirnoff R+ de Domino



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Informations

» Auteur : Domino - Voir le profil
» Créé le 28/10/2018 à 23:07
» Dernière mise à jour le 28/10/2018 à 23:07

» Mots-clés :   Amitié   Humour   Kalos   Romance   Slice of life

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SR107 - Par le Passé
2019

Linda, Kenneth et Roland.

Le petit garçon de neuf ans dormait sur la banquette à côté de sa mère, son Morphéo blotti contre lui.

- Tu veux un café ? demanda Kenneth.
- Non, ça ira. Au pire j'ai pu constater que tu étais un bon oreiller.
- Et réciproquement ! sourit Kenneth.

Linda sourit.

- Je suis confiante, maintenant.
- Qu'ils sont tous partis ?
- Oh, Kenny, voyons... Pauvre Charlie, c'était déchirant, j'avais envie de le serrer dans mes bras, le pauvre...
- Il a fait preuve d'un grand courage. J'espère qu'il va bien... marmonna Kenneth.
- On peut blâmer ses parents ?
- Non, assura Kenny. Tu ne sais pas comment tu aurais réagi, toi.
- Cela ne me gênerait pas ! Que ce soit Roland, Lily ou David… mes enfants font ce qu’ils veulent, je n’ai pas à… interférer… ça les regarde !
- Personnellement si Malcolm ou Rachel venait vers moi en me disant « Papa, je suis homo »… ça me fendrait le cœur…
- Kenny ! Pas toi quand même !
- Bah quand même, c’est un coup à encaisser, y’a de quoi se poser des questions…

Linda secoua la tête.

- Enfin bref... J'espère aussi que Lionel va bien.
- Mais oui. Ne t'en fais pas. Concentre-toi sur Etienne.
- Je suis confiante.
- Vraiment ? Ou tu essaies de t'en persuader ?
- Ah non, je le suis vraiment, je sais qu’il va se réveiller. En partie grâce à toi.

Kenneth sourit.

- Ah ce bon vieux Kenny, ce soutien moral indéfectible. Jadis on fit appel à lui pour mettre fin à de nombreux conflits. La seconde guerre mondiale, c'était lui !

Linda éclata de rire.

- Arrête...
- Il aussi empêché un violent conflit entre les indiens d'Amérique et la planète Saturne... Il a tout simplement posé des draps sur le toit de sa maison. Et toujours pas de conflit, donc ça marche !

Linda pouffa de nouveau.

- Arrête, on va réveiller Roland !
- Pardon, pardon. Tu veux savoir comment les belles-sœurs de Cendrillon meurent dans le conte ?
- Ca doit surement être ignoble !
- ... Ça l'est. Pardon.

Linda sourit en hochant la tête. Elle se pressa contre Kenneth.

- Merci, vraiment d'être un aussi bon soutien.
- C'est normal. Tu es ma meilleure amie après tout.

Linda soupira.

- J'espère que tout ira bien... après ça.
- On va vite être fixés.... Le délai donné par le médecin va bientôt expirer, soupira Kenneth.
- J'espère que l’issue sera… favorable… soupira Linda, moins confiante qu’elle n’y paraissait.
- Etienne se réveillera. Il nous regardera et il dira « J'vous ai bien fait peur, hein, bande de cons ! »
- Non, Kenny, voyons ! Il ne serait pas si vulgaire...

Kenneth fit silence un moment. Linda était toujours contre lui.

- J'ai toujours été maladroit.
- Ah, ça oui, mais c'est ce qui fait ton charme.
- Hm... C'est aussi pour ça que je n'ai jamais eu ma chance avec toi.
- Non, ça c'est parce que tu es mon meilleur ami, et que j'ai pour toi une grande affection, mais pas jusqu'à t'aimer de cette façon.
- Je comprends...
- Ca n'empêche que ces derniers jours, tu as été un grand support. Sans toi, je me serais effondrée.
- Je serais toujours là, Linda. Tu le sais, j'espère.
- Je n'en ai jamais douté.
- Merci de n'en avoir jamais douté. Ca me tient à cœur.

Linda regarda Kenneth, désabusée.

- Tu n'as jamais cessé de m'aimer, hein ?
- Jam-

Alarme. La loupiote au-dessus de la chambre d’Etienne. Linda se releva brusquement, manquant de décrocher la mâchoire de Kenneth dans la manœuvre.

- Oh Seigneur ! Mais qu’est-ce que…
- Etienne… ? s’étonna Kenneth.

Roland se réveilla, alerté par l’agitation. Il se demanda presque où il était. Sa mère était là avec monsieur Heine qui lui tenait le bras, ce que Roland prit presque mal. « Hey, c’est ma maman ! »

Deux infirmières arrivèrent et entrèrent dans la chambre.

- Monsieur Smirnoff ?
- Monsieur Smirnoff, vous nous entendez ?

Etienne avait les yeux ouverts. Il fixait le plafond. Kenneth et Linda émirent un soupir de soulagement. L’homme avait pris son bouton d’alarme et l’avait pressé.

- L’eau… de l’eau, s’il vous plait…

Roland vit son père éveillé. Un grand sourire illumina son visage. C’était peut-être la fin des jours sombres, qui sait…

***

- Faites doucement, Etienne… geignit Norbert, en larmes.
- Voulez-vous bien cesser de pleurer, Norbert ! souffla Linus.
- Mais ouais, il est vivant, tout va bien, inutile de sangloter…

Jonathan regarda Estelle, auprès d’Etienne, toute émue.

- J’ai bien cru qu’on allait te peeeeerdre !
- C’est moi ou vous avez passé deux semaines devant ma chambre à attendre que je me réveille ?! s’étonna Etienne en regardant tout le monde.
- Ah nan, eh, t’abuses, on est sortis pour essayer de venger ta mort…

Etienne regarda Lionel qui leva ses deux mains valides.

- Mais on a foiré notre coup !
- Disons que les enfants avaient prévu un plan de leur côté…

Etienne regarda Norbert puis regarda Roland qui haussa un sourcil, surpris.

- … avec ton petit Morphéo ?!
- N… nan… ?!
- Charlie, Léopold et leurs amis ! souffla Linus. Norbert, vous n’allez jamais au bout de vos histoires !
- Au moment de venir les sauver, on s’est retrouvés devant un dilemme… admit Travis.

Etienne regarda Travis, interloqué. Jonathan serra les dents.

- L’un des deux gamins qui était avec toi en voyage…
- Celui qui était toujours en vie ou celle qui est morte dans l’estomac d’un Ptera ? demanda Etienne, très sérieusement.

Jonathan regarda son beau-frère, inspira lourdement puis appuya sur le front d’Etienne en faisant mine de l’étouffer.

- Retourne dans le coma, pauvre truffe !
- HEY ! grogna Estelle.
- Si j’veux ! grommela Etienne en tirant la langue.
- Dexter a tué Gallhager, résuma Lionel.

Etienne regarda son ami policier, neutre.

- D’accord.
- On est arrivés, on a repoussé les Pokémon de Gallhager, il a commencé à dire qu’on était des adversaires de valeur…
- Même Linus avec son Chaglam… sourit Jonathan.
- Mistigri III n’a plus rien à prouver à personne, pas même aux tueurs à gage ! s’enorgueillit le britannique.
- Et pis Lionel a engagé la conversation… marmonna Travis.
- Je voulais éclaircir les liens qu’il avait avec ma famille… et au moment où il a repris le dessus sur nous…
- Sur vous, moi j’étais à mon aise !

Jonathan frappa l’arrière de la tête de Lindbergh.

- Aow !
- T’es vraiment horripilant quand tu t’y mets !
- Et toi tu as l’air d’avoir envie de frapper tout le monde… s’étonna Etienne.
- Dexter est arrivé, il a crié, on n’a pas trop compris… et il a tiré… souffla Norbert.

Etienne hocha la tête.

- Eh bien, je ne suis pas pour la peine de mort mais c’est… pas plus mal… il aurait pu s’en prendre à vous tous, je préfère être le seul à avoir morflé, ça me fait moins mal…

Kenneth arriva avec les Pokémon d’Etienne.

- Et hop, voilà ! Tous les 10 !
- Génial. Où sont les femmes ?
- Je suis là, moi ! gronda Estelle.
- Les autres, les vraies ! Linus ?
- T’as raison, John, fous-lui une mandale, il est reparti pour deux semaines !! grogna Estelle, furieuse.
- Nah, laisse-le vivre assez longtemps pour devenir un vieux con insupportable qui battra ses gosses !
- Vous êtes bien agités, tous, on dirait que vous revenez d’entre les morts aussi… soupira Travis.
- Mais qu’est-ce que tu racontes, toi ?! s’étonna Kenneth.
- J’allais le dire… marmonna Etienne.
- Lucy est partie chercher Charlie et Léopold avec Linda… souffla Linus.
- On a peut-être été durs avec eux… marmonna Norbert.

Etienne crut mal comprendre.

- Par rapport au fait qu’ils soient allés contre Gallhager ? Nan, fallait pas ! Il n’y a pas eu de morts supplémentaires, excepté… celui qui méritait de... enfin, je veux pas entrer dans ce débat…
- Mais nan, Etienne, ils parlent du coming-out de Charlie… marmonna Kenneth.
- Qui sort avec Léopold, du coup… souffla Travis.

Etienne regarda tout le monde et leva les bras, tout jouasse.

- YYYYES ! YES ! Je le SAVAIS ! Trop bien ! Il faut que je les voie !
- Si ils se sont pas barrés du pays après les réactions de leurs parents… marmonna Jonathan.
- John, je ne te permets pas de juger ! gronda Linus.
- Ah bah ça non, hors de question que je m’en mêle, c’est un coup à me casser une autre côte !
- Tu veux ma jambe, peut-être ? souffla Lionel en montrant son plâtre.
- Hey, j’ai presque un traumatisme crânien, ok ? geignit Norbert.
- Ce bandeau vous donne un air de Tintin, Norbert, ça redresse vos cheveux sur le devant… sourit Travis en l’imitant.
- Mais quel petit con ! grommela Norbert.

Linus ralluma son téléphone.

- OH MON DIEU !
- Quoi ? Quoi ??? J’ai créé cette sitcom, j’EXIGE d’avoir la fin !

***

- Si je m’attendais à ça !!! geignit Linda.
- Et moi donc… souffla Lucy, désemparée.

La blonde, au volant, regarda sa voisine brièvement.

- Ne vous en voulez pas, Lucy ! Kenneth lui-même disait que ça le gênerait venant de ses propres enfants…

Lucy se mordilla les lèvres en regardant la voiture de Charlie et Léopold, devant la leur.

Une banale course-poursuite, quoi.

- Mon fils qui me fuit. Si je m’attendais…
- Vous allez pouvoir vous excuser, il suffit qu’on les rattrape !
- Vous allez trop vite, Linda…
- Je sais, mais je veux les rattraper enfin ! Je sais que ce n’est pas très politiquement correct de dire ça, surtout à la mère de l’un d’entre eux, mais Charlie et Léopold sont comme mes enfants, je refuse qu’ils s’en aillent, je voulais tellement qu’Etienne les voie tous les deux heureux ensemble !

Lucy grimaça.

- Je ne m’y ferais jamais…
- Mais si. C’est toujours votre fils, Lucy, enfin !
- Je sais, mais lui et ce garçon…
- Léopold est adorable enfin !
- … je ne peux pas m’empêcher de trouver ça inconvenant, désolée ! Vous comprendrez quand ce sera un de vos enfants !
- Là encore comme je disais à Kenneth…

La voiture de Charlie et Léopold se rangea sur le bas-côté. Linda haussa un sourcil. Lucy se releva, stupéfaite.

- Mon fils !
- C’est la journée des miracles… souffla Linda.

Charlie sortit de la voiture, prêt à en découdre. Il fut étonné de voir Linda sortir de la voiture de sa mère.

- … Linda ?!
- Charlie, mon poussin !

La blonde se jeta au cou du jeune homme.

- Etienne s’est réveillé, je voulais juste que vous veniez le voir ! Il ne faut pas vous enfuir comme ça mon bébé ! Oh mon Dieu je suis TELLEMENT soulagée qu’il n’y ait pas eu d’accident !
- Mais qu’est-ce que vous faisiez avec la voiture de ma…

Lucy sortit de la voiture, intimidée. Charlie eut un mouvement de recul.

- Charlie…
- Tu devrais être contente, je me casse !
- Charlie, s’il te plait…
- Nan ! Nan, c’est toi, s’il te plait !

Léopold sortit à son tour de la voiture, véhément.

- Je mène ma vie comme je l’entends ! Et avec Léo, on va s’installer à Illumis. Je suis pris à la fac de Neuvartault, lui à Fort-Vanitas, on est en résidence étudiante à Illumis, je ne te permettrais pas de te mettre en travers de nous !

Linda regarda Lucy qui se mordilla les lèvres.

- … Ce que je vais dire est idiot…

Charlie et Léopold se regardèrent, prêts à répliquer.

- … mais ça me rappelle ton père et moi quand nous étions jeunes ! Oh Charlie, je ne peux pas accepter… ton choix de vie, mais…

Charlie grimaça.

- … reviens, au moins jusqu’à la rentrée, que je sache que mon bébé ne me déteste pas, parce qu’au fond tu es toujours mon fils et je t’aime !

Linda agita la tête et regarda Charlie, aussi gênée que lui. Léopold hésitait à assommer la britannique mais Linda secoua la tête en le regardant. Charlie approcha sa mère avec gêne et tenta de la prendre dans ses bras, mais Lucy se jeta à son cou.

- Ne t’enfuis plus jamais !
- … alors ne me rejette plus…
- Je vais essayer de faire un effort, je ne te garantis rien ! sanglota la britannique.

Charlie regarda Linda qui haussa les épaules. Léopold était plus perturbé.

- C’est le mieux qu’on puisse espérer pour le moment ! lui chuchota la blonde.
- Mmmmouais… geignit Léopold.

***

- Et du coup, ils sont rentrés, Norbert et Léopold ont définitivement fait la paix… souffla Linda auprès de son mari en fin d’après-midi.
- Ah bah encore heureux.
- Lucy… va essayer de faire des efforts, Lindbergh et Charlie sont toujours un peu en froid…
- C’est tellement stupide…
- Je sais mais que veux-tu… Tu as vu Judith ?
- Oui. La pauvre, elle en a pleuré… Elle a gardé les enfants pendant tout ce temps, elle avait autant peur de la mauvaise nouvelle à venir que de l’hôpital en lui-même…

Linda hocha la tête.

- C’était dur d’attendre.
- Je me doute. Et Roland…
- Roland voulait absolument être là à ton réveil, c’est un peu pour lui que je suis restée…

Le couple regarda leurs trois enfants, assoupis sur le canapé au fond de la chambre. Etienne inspira.

- Linda…
- Hm ?
- Je sens que tu vas vouloir que j’arrête ma carrière là…

Linda agita la tête.

- Disons que tu comptais t’arrêter avant ce voyage, maintenant après tout ça, je suppose que tu as eu ton compte, non ?

Etienne inspira en se redressant.

- Attention, chéri…
- Je vais continuer. Je vais reprendre ma carrière de plus belle. Il y a tellement à faire, tellement de choses que je peux faire…
- Etienne ?!
- Je sais, je sais, tu vas vouloir que je sois moins casse-cou… pas d’autre voyage itinérant, ça, je suis vacciné, crois-moi !
- J’espère bien !!
- Mais… Je veux dire, pour Poképolis, pour les Pokémon, pour… je suis passé à deux doigts de la mort, et je me suis dit… Tu as trois enfants, tu as enseigné tout ce que tu pouvais enseigner… et ça ne me suffisait pas ! Je veux que ma vie soit la plus productive possible, je refuse de m’encroûter plus encore. Je n’ai que quarante-et-un ans, j’ai encore tellement de choses à faire !

Linda sembla stupéfaite mais plutôt ravie.

- Eh bien… fais-les ! Mais sans prendre de risques… !
- Je me sens tellement vivant, Linda, j’ai presque envie de faire un quatrième enfant !
- … alors non, Etienne, là je mets un véto…
- Ça valait la peine d’essayer !
- Même l’adoption, hein, j’ai mes trois bébés, plus Travis en quelque sorte, on peut compter Charlie et Léo, certes…
- Mais même, nos enfants, regarde tout ce potentiel !
- Qu’est-ce que je t’ai dit à propos de parler des enfants comme ça ?

Etienne sourit.

- Je vois du potentiel dans tout, Linda ! Ma vie ne fait que commencer !

Linda agita la tête.

- Je dois admettre que ça me réjouit de te voir rebondir comme ça… sauf si tu es en pleine crise de la quarantaine…
- Crise de la quarantaine post-comateuse alors !
- Etienne, je dois te dire quelque chose…

Etienne plissa les yeux. Linda inspira.

- L’espace d’un instant je me suis dit que… si tu mourrais…
- … ah oui, tu sais casser l’ambiance, chérie…
- … j’ai pensé l’espace d’un instant que je pourrais refaire ma vie avec Kenneth, ça m’a… traversé l’esprit un instant… et… comme pour me punir de l’avoir pensé, tu t’es réveillé…

Etienne haussa les épaules.

- Inutile de te prendre la tête pour des pensées que tu as eues sous le coup de l’émotion. Même si honnêtement, c’est un choix que j’aurais fait aussi, à ta place !
- Oh, Etienne ! ricana Linda.

Etienne saisit la main de Linda.

- En attendant, ça te dit de refaire ta vie avec moi ?
- … Etienne !

***
***
***

Pokémon Rubis Omega Saphir Alpha – Thème de Vergazon

- Et je m’inscris en faux contre cette reconnaissance à retardement des territoires annexes aux nôtres comme des territoires Poképolites ! Unys, Kalos et Alola, autant de régions qui peuvent apporter tellement à notre pays, consolider notre nation, l’unifier au lieu de la morceler comme si nous étions des voisins trop timides pour nous adresser la parole ! Ouvrons-nous, sinon au reste du monde, au moins au reste de notre communauté ! Nos alliés, nos frères, notre territoire !

Le Congrès applaudit Etienne Smirnoff, 42 ans, qui avait décidé de mener cette fronde pour l’annexion des régions non-reconnues. Linda avait amené les enfants, stupéfaite. Kenneth et Judith se regardèrent, éberlués. Estelle s’était levée, exaltée.

- Yas, Frangin, yaaaaaas !
- T’es devant le Congrès, bouffonne ! grommela Jonathan en asseyant son épouse.

***

[Etienne Smirnoff vient de signer un traité d’une incroyable importance avec l’Association Pokémon dans un bras de fer administratif incroyable. L’Association Pokémon était au départ un simple organe régissant les rapports entre Pokémon et Humains, de manière plus symbolique qu’autre chose, mais Etienne Smirnoff a secoué cette politique routinière comme aucun autre auparavant, et le Président Archibald Pringle, au départ silencieux, a cédé…]

Lindbergh n’en croyait pas ses yeux. Lucy secoua la tête. Norbert et Lionel, pas mécontents d’avoir organisé cette soirée télé, regardaient l’écran en mangeant des doritos.

- Qui aurait cru qu’Etienne serait un tel animal politique… admit Norbert.
- Plus je le regarde faire et plus je prends un coup de vieux… admit Linus.

[C’est la première fois, à Poképolis, qu’une loi est portée au Congrès par le biais de l’Association pour permettre la non-possession de Pokémon. Il faudra inscrire son enfant dans le circuit officiel académique de dressage pour qu’il soit effectivement obligé d’avoir un Pokémon. Cependant, la loi Smirnoff devrait autoriser ceux qui le souhaitent à ne pas posséder de Pokémon du tout.]

Charlie et Léopold se regardèrent, stupéfaits.

- Ce n’est pas dit que ça passe, mais c’est déjà un grand pas en avant ! affirma Lucy.
- Je ne sais pas quoi penser de votre positionnement, Lucy, le fait que si vous aviez eu le choix vous n’auriez pas eu de Pokémon… marmonna Norbert.
- J’adore mes Pokémon mais honnêtement je ne suis pas une grande dresseuse, et je prends peu de plaisir à les élever, je pense qu’ils seraient mieux à l’état sauvage…

Charlie regarda sa mère, embarrassé.

- Non, rassure-toi, je ne vais pas les abandonner !
- J’espère bien, tes Pokémon, c’est un peu une partie de toi…
- C’est tout le point de contention, justement… les contre-manifestant insistent beaucoup sur le fait qu’être citoyen Poképolite et posséder au moins un Pokémon est indissociable… souffla Lionel.

Norbert inspira.

- Peut-être…

Floper, l’Hippopotas de Norbert, regarda son maître, intrigué.

- … mais peut-être aussi qu’on doit laisser le choix à chacun !
- Voilà, c’est plus ça… admit Lionel.
- Si tu ne veux plus des tiens, moi, je les prends ! sourit Linus en regardant sa femme.
- Si ça te chante !
- Et voilà, tes parents se disputent et c’est même pas notre faute ! sourit Léopold.
- A la tienne ! sourit Charlie en tendant son verre vers lui.

***

Cela passa. Sous conditions, mais cela passa.

- C’est incroyable, Etienne ! souffla Linda.
- Je ne suis pas peu fier !
- Honnêtement je ne te reconnais plus… D’habitude, après qu’on ait tenté de les tuer, les gens se renferment, ne sortent plus, mènent une vie tranquille, s’exilent, et toi…

Etienne sourit.

- J’ai décidé de prendre ma vie en main. Je vais reprendre le travail à plein régime et accepter le poste le plus haut qu’on me donnera. Et je vais reprendre activement la recherche aussi, on me transmet des travaux de toutes parts depuis l’annexion de Kalos, Unys et Alola…

Etienne vit le regard inquiet de Linda.

- Je ne vais pas me surmener, ne t’inquiète pas !
- Ah, je t’ai fait mon regard « David », c’est ça ?
- Un peu, oui… Tiens quand on parle du loup !

Le jeune homme, qui allait au frigo, regarda ses parents, interloqué. Ceribou se tenait sur son épaule.

- … papa fait encore le foufou ?
- Oui mon chéri ! sourit la blonde.
- Ah. Y’a Roland qui s’entraine avec Lily dans le jardin, je vais avec eux.
- D’accord… marmonna Linda.

David sortit par la porte de derrière du logement de Voilaroc.

- Je préfèrerais presque que tu entraînes les enfants personnellement…
- Je fais comme tu m’as dit, j’attends qu’ils me demandent. Par contre, Linda, ma Linda, il y a quelque chose que je dois absolument faire. Et j’ai besoin de ton consentement pour ça.

Linda s’étonna.

- Etienne, vraiment, en ce moment tu me fais peur !
- Je dois aller voir quelqu’un.

***

- Tu es sûr ? Je peux venir avec toi si tu veux !

Etienne regarda Kenneth et secoua la tête.

- Non. Je dois le faire. C’est trop important, il faut que je le fasse.

Kenneth acquiesça. Linda inspira.

- Au moindre souci, tu appelles !
- Au pire ça vous fera une occasion de vous bouger aussi pour venger ma mort !

Kenneth et Linda se regardèrent, blasés. Etienne sortit de la voiture et se dirigea vers la maisonnette. Il toqua trois coups. Une vieille dame lui ouvrit.

- Euh… oui… ?
- Bonjour, votre petit fils est là ?
- … Dexter ? Euh, oui… Dans le jardin, je crois…
- Je suis Etienne Smirnoff, votre petit fils a essayé de me tuer, j’aimerais discuter avec lui.

La vieille dame sembla un peu surprise. Kenneth et Linda sortirent de la voiture.

- … c’est juste un enfant, il a eu des problèmes mais je suis sûre que…
- Je suis là pour lui accorder mon pardon. Promis !

La vieille dame hésita quelques secondes, mais voyant son air candide et surtout voyant qu’il était accompagné d’une femme, elle invita Etienne à entrer.

***

Roland reçut la même année son Pokémon Académique. Morphéo se tenait discrètement à ses côtés pour observer ce moment.

La Pokéball s’ouvrit et un Ptitard en sortit. Roland regarda Morphéo, satisfait.

- Un Pokémon qui ira bien avec ta pluie !

Le nuage acquiesça.

***

Kenneth observa son téléphone, à table avec sa famille.

- Oh ! Le Pokémon Académique de Roland est un Ptitard !

Judith acquiesça.

- C’est prometteur en termes d’évolutions…
- C’est ce que je réponds à Etienne. Il a eu un Ptitard et Malcolm a eu un Grenousse, c’est marrant comme hasard, non ?

Judith sourit. Malcolm sembla un peu exaspéré par la comparaison. Rachel mangeait indifféremment.

***

Linda se plaisait à boire son thé et à lire dans le jardin en regardant ses enfants qui s’entraînaient.

- Couafarel !! Coup d’Boule !

Le Couafarel de Lily chargea vers Ptitard et Ceribou. David inspira.

- Feuill’Magik !

Ceribou esquiva en lançant ses feuilles pour faire diversion. Roland et Ptitard tenaient à faire face, mais le Pokémon de Lily était bien mieux entraîné.

- Attaque Ecume !

L’attaque créa une mousse devant Ptitard, mais Roland l’avait à peine depuis une semaine. Impossible de contrôler correctement l’attaque. Couafarel le chargea brutalement.

- Zut !!

Couafarel fit demi-tour.

- Morsure !! Chope-moi cette cerise !!

Couafarel s’empressa de tenter d’attraper Ceribou.

- Soucigraine !

Ceribou envoya une graine sur Couafarel. Elle l’excita un peu trop, diminuant sa Toison Epaisse.

- Et Charge !

Ceribou frappa Couafarel et réussit presque à le repousser. Roland semblait frustré. Lily laissa Couafarel revenir vers elle.

- Un souci, frérot ?
- … nan, ça va…
- Frérot…

David regarda Roland qui inspira.

- J’me sens faible ! Je suis l’aîné et David est plus doué que moi !
- Il l’a depuis tout bébé, tu peux pas comparer ! souffla Lily.
- Sans parler de toi…

Lily plissa les yeux en regardant son frère rappeler Ptitard et s’en retourner vers la maison. David regarda sa sœur, gêné.

- Hop, hop, hop, poussin !

Roland regarda sa mère avant de rentrer. Elle se poussa sur le banc du jardin contre le mur de la villa de Voilaroc des Smirnoff et tapota la place.

- Viens là, jeune homme. Début septembre il fait trop chaud, même à une heure pareille, on ne rentre pas comme ça !
- J’ai soif !
- J’ai de la citronnade juste là !

Roland sourit et alla s’asseoir près de sa mère qui posa son livre en regardant David et Lily s’entraîner.

- Tu me rappelles beaucoup ton père.
- Hm…
- Cette même timidité, cette force dans le regard…

Roland inspira et enleva ses lunettes pour se frotter les yeux.

- Je suis pas comme lui…
- Personne ne te le demande.
- J’aimerais bien être comme lui.

Linda agita la tête.

- Ton père te dirait que tu dois avant tout être toi-même.

Roland hocha la tête.

- Sors ton Ptitard, mon poussin.

Roland sortit Ptitard, affaibli, sur la table du salon. Linda sortit sa Gardevoir qui soigna le Pokémon avec son Vibra-Soin. Roland souffla en regardant le Pokémon de sa mère.

- Je suis pas comme toi non plus…

Linda éclata de rire. Roland baissa la tête. Linda regarda son fils et le serra contre elle.

- Tu es Roland et je t’aime en tant que Roland, tu n’as pas à être quelqu’un d’autre pour être un homme de valeur. Avec ton père, on t’aimera quoi que tu fasses.
- Mais papa fait des choses tellement extraordinaires…
- Ton père est clairement dans une période lumineuse de sa vie, mais toi aussi un jour tu feras de grandes choses !

Roland sourit.

- Tu es encore jeune, Roland, tu as la vie devant toi. Un jour tu comprendras quel cadeau c’est.

Roland acquiesça. Lily porta un coup au Ceribou de David après de gros efforts.

- Ton style de combat m’énerve ! grogna Lily.
- C’est toi qui est méchante !! geignit David en allant récupérer son Pokémon.

Roland et Linda sourirent.

***

- Papa…
- Oui fiston ?

David, Lily et Linda continuaient à manger tranquillement alors que Roland s’adressait à son père en bout de table.

- Je veux que tu m’entraines.

Etienne releva la tête, intrigué.

- Pardon ?
- Je… euh… je veux que tu m’entraînes…
- … pourquoi ça ?

Roland grimaça. Etienne regardait posément son fils.

- Eh bien, je veux devenir fort, pour accomplir de grandes choses.

Linda haussa un sourcil. Etienne hocha la tête.

- C’est un bel objectif. Mais je ne pense pas que tu aies besoin que je t’entraine.

Roland allait baisser la tête.

- Je pense que tu devrais étudier pour trouver ta voie. Si tu veux devenir fort, c’est que tu penses encore à un rapport Force et Faiblesse. Or, être fort, c’est penser Confiance en soi et Respect de l’autre.

Roland acquiesça, prenant ces conseils comme une route à suivre pour sa vie entière.

- Je peux t’orienter vers des revues techniques.
- Oui…
- Cela t’aidera, je pense.

Roland hocha la tête, plus que preneur. Linda sourit silencieusement.

***

Et les résultats ne se firent pas attendre à peine une semaine plus tard.

- Ptitard, Ecume !!

L’attaque vrombit devant Roland. David pensait avoir l’avantage avec Ceribou et tenta une attaque directe, mais…

- Torgnoles !!

Agitant sa queue, Ptitard frappa sa propre écume et la dispersa devant Ceribou, complètement encerclé. Sa tentative de Feuil’magik se perdit dans la mousse.

- Wow !!!
- Attaque Réveil Forcé !!

Ptitard sortit des bulles dans un angle mort de Ceribou et frappa le Pokémon de plein fouet. Lily s’étonna. Roland avait un regard…

David eut un mouvement de recul et retomba sur ses fesses. Roland se redressa.

- Dave !!

Il courut vers son frère et le releva. Ceribou s’ébroua et rejoignit Ptitard pour regarder leurs dresseurs. Roland tapota l’épaule de son frère, inquiet.

- Ça va ?
- Oui… T’es devenu super fort !
- Hm, j’ai beaucoup appris avec les magazines de papa… ça a changé ma façon de m’entrainer seul, et là du coup…

David essuya ses yeux. Roland sembla désolé.

- Tout va bien, David ?!
- Oui, oui, juste… tu m’as fait un peu peur

Linda observait, étonnée. Roland regarda son frère récupérer son Ceribou, puis il regarda ses mains, impressionné par ses propres progrès.

Un monstre était né.

***

De fait, Roland s’était dit que ce serait plus équitable avec sa sœur.

- Tir de Boue !

Ptitard envoya les sommations. Lily hocha la tête.

- Flair !!

Couafarel, guidé par son instinct, esquiva les boulettes et chargea Ptitard.

- Tes astuces ne marcheront pas !! Coup d’Boule !!
- Bulles d’O !

L’attaque envoya une nuée de bulles « dures » par opposition à la mousseline d’Ecume. Couafarel continua à esquiver.

- C’est pareil pour moi…

Couafarel approcha de Ptitard, prêt à le frapper. La spirale de Ptitard se mit à briller. Couafarel tomba assoupi et s’écroula juste devant le Pokémon Têtard.

- Hein ???
- Réveil Forcé !!

Ptitard asséna une claque magistral au Couafarel de Lily. Le Pokémon voltigea. Lily regarda son frère, parfaitement sûr de lui. Couafarel retomba lourdement au sol.

- … wow…
- Hm, hm, hmmm…

Etienne avait tout vu, aux côtés de sa femme qui avait tenu à ce qu’il assiste à une des sessions d’entrainement de ses enfants. David avait préféré passer son tour cette fois. Il approcha de ses enfants.

- Lily, ton approche était trop offensive.
- Je fais tout le temps ça.
- Elle fait tout le temps ça…

Roland hésita à finir sa phrase.

- … c’est pour ça que c’était aussi facile.

Lily fit la moue. Roland se ravisa.

- Mais ça n’empêche que tu es une sacrée adversaire, Lily !
- … oui, merci Roland…

Roland semblait gêné par sa propre attitude. Lily également, pas très habituée à de tels élans de sincérité de la part de son frère. Etienne hocha la tête.

- Roland, tu arrêtes de t’entrainer individuellement avec ton frère et ta soeur jusqu’à ce qu’ils aient leur Pokémon Académique.

Roland baissa la tête. Lily regarda son père.

- Tu le punis ?
- Non, je vous préserve. Il est plus avancé que vous, son entrainement est plus radical et plus intensif. S’il continue à vous affronter seul à seul, ce sera contreproductif.

Etienne regarda fermement Roland en le pointant du doigt.

- Désormais, tu t’entraines contre David et Lily, pas contre l’un ou l’autre, bien compris ?
- Hm !
- Tu n’as pas soumis Morphéo au même entrainement, n’est-ce pas ? Ta demande concernait ton incapacité à former avec Ptitard le même type de lien qu’avec lui…

Roland baissa la tête. Lily sembla comprendre.

- Roland avait peur de mal faire…
- Tout à fait.

Roland semblait gêné. Etienne hocha la tête.

- Du coup, c’est très bien qu’il ait demandé de l’aide. Vaut mieux être aidé que mal faire. C’est une leçon importante, Lily, je fais mon travail de papa, là !
- Oui bah oui.

Roland hocha la tête, soulagé.

- Je voulais pas que tu penses que j’étais faible.
- Et je ne l’ai jamais pensé. Vous êtes tous les trois forts à votre manière. Il n’y a pas qu’une seule force dans la vie, il y en a une infinité. Vous devez juste apprendre à trouver la vôtre, si vous tenez à devenir dresseurs.

David hocha la tête, aux côtés de sa mère qui semblait ravie que son mari s’investisse autant dans l’éducation de ses enfants.

***

- La puissance brute, c’est pas encore ça, fiston…

Roland acquiesça. Son Ptitard esquivait vivement les attaques d’Erwan, le Capidextre de son père. Des Coup Double bien lents. « Il peut aller beaucoup plus vite… »

- Ton style est simple, attendre une ouverture et frapper un grand coup. C’est une bonne stratégie, mais que tu dois garder en réserve plus tard dans le combat, pas en faire ta stratégie de prime abord…

Erwan manqua de frapper Ptitard mais la créature roula sur le côté pour esquiver.

- … parce que c’est éminemment prévisible et facilement parable.

Roland hocha la tête. Lily et David observaient. Leurs propres entrainements, sans Roland, étaient devenus un peu ennuyeux à la longue.

- Mais tu n’oses pas attaquer parce que je suis ton père, que je suis plus fort que toi et parce que tu sens que je te ménage et que j’ai encore énormément de latitude en termes de puissance et de vitesse…

Roland ne put qu’acquiescer alors que lui et son père tournaient en rond, se déplaçant avec leurs Pokémon, dans un combat d’entrainement plus actif qu’un combat classique.

- … parce que tu es faible…

Roland tiqua. Lily et David se regardèrent. Linda inspira, pas rassurée. « Il m’a prévenue, mais je désapprouve toujours… »

- Parce que tu fais des caprices en voulant que je t’entraine, en voulant de l’aide de la part de ton père…
- M…
- Parce que tu n’es pas capable de progresser seul, parce que si je n’étais pas sorti de l’hôpital il y a deux ans, tu aurais été incapable de protéger ta mère, ton frère et ta sœur…
- Mais n… mais p…

Erwan attaquait sans discontinuer. Ptitard peinait à esquiver et Roland à garder son flegme.

- Parce que tu n’es pas un homme, juste un petit garçon…
- Papa, mais…
- Et en tant que fils, tu es décevant.

Linda ferma les yeux en se mordillant les lèvres. Lily et David frissonnèrent. Etienne regardait fixement son fils avec dureté. « Pardon, fiston, mais je dois m’assurer de quelque chose… »

Il jeta un coup d’œil vers David et Lily à qui il avait dit de ne pas intervenir. « Si ce qu’ils m’ont dit est vrai, une fois dans l’exaltation du combat… »

Il regarda vers son fils. Ce n’était plus le même.

- Bulles d’O !!

L’attaque vrombit. Capidextre l’esquiva. Erreur. Ptitard bondit et le frappa en pleine face. Etienne eut presque un mouvement de recul. « Nom de… »

- Plaquage, encore !!

Ptitard avait frappé Capidextre et était passé derrière lui. Se projetant avec sa queue, il le frappa à nouveau dans le dos.

- Erwan, Mitra-Po…
- ECUME !

Ptitard se gonfla spontanément et cracha une vive mousse qui recouvrit le Pokémon de son père.

- Et Réveil Forcé !!

Ptitard frappa Capidextre au visage d’un coup de queue tournoyant. Le Pokémon frappait et refrappait successivement le Pokémon Longqueue. Etienne était subjugué. Mais il savait également qu’il devait couper court.

- Hem-hem. Erwan, Dernier Recours !

Bien que frappé sans discontinuité, Capidextre saisit Ptitard d’une main et le plaqua au sol. Roland grimaça, chercha une solution, mais n’en avait aucune.

- Bien. Fiston, je ne pensais évidemment pas un mot de ce que je t’ai dit.
- …
- Mais j’ai vu ce que je voulais voir. Ta véritable force.

Roland s’effondra à genoux. Linda se leva pour approcher mais Etienne la stoppa d’une main levée.

- J… Je voulais pas… frapper Erwan comme ça, je…
- Il n’a rien. Ton Ptitard est bien entraîné mais niveau force brute, ce n’est pas encore ça !

Capidextre agita les mains, tout joyeux. Roland sembla rassuré. Etienne prit son fils par les épaules.

- Tu n’as pas à avoir peur de ton potentiel, Roland.

Roland hocha la tête en se mordillant les lèvres.

- En grandissant tu apprendras à te maîtriser et à contrôler cette force en toi. Tu ne dois pas la craindre mais au contraire l’apprivoiser. Pour réaliser tes ambitions.

Roland acquiesça.
Son père n’avait pas tort.
Mais il n’avait pas raison non plus.

Certes, Roland était effrayé par son « potentiel » mais il était surtout effrayé par cette immense « rage » refoulée en lui.

Sa virulence envers le frêle et gentil David.
Sa franchise envers la forte et déterminée Lily.
Son accès de rage vis-à-vis de son père.

C’était presque comme si quelque chose en lui aurait dû se libérer à un instant donné, mais que l’occasion ne s’était pas présentée. Et Roland sentait toute cette énergie en lui, dont il ne savait pas quoi faire.

Le combat de Pokémon semblait être une bonne façon d’évacuer cette pression… mais comment ne pas aller trop loin ?

« Si je me lâchais définitivement… »

Roland, onze ans, regarda son frère et sa sœur. « … je pourrais leur faire du mal, à tous. »

Il regarda sa mère, qui approchait pour le serrer dans ses bras, emportée dans ce réflexe de mère de couver son fils qu’elle sentait en grand trouble. « Je pourrais faire du mal à maman ?! »

Comme pour le sortir de cet abime de réflexion, le Ptitard de Roland évolua en un Têtarte. Cela créa un blanc. Lily et David en furent étonnés. Etienne, se relevant, en fut tout naturellement surpris, et Linda elle-même en fut émue.

Roland regarda son Têtarte et sourit. Le Pokémon semblait content d’avoir évolué. Roland regarda son père et hocha la tête.

- Je vais apprendre à mieux me maîtriser, tu as raison !

Etienne acquiesça. Linda approcha enfin de Roland.

- Ça va mon poussin ?
- Oui oui, maman, j’ai juste… un peu trop tiré sur la corde…
- Oui, j’ai vu ça, mon poussin… mais tout va bien maintenant…

Elle peinait à dissimuler, comme ses enfants et même son mari, la crainte qu’elle avait ressenti en voyant Roland se déchaîner ainsi sur le Pokémon de son père.

***

- Et c’est pour ça que c’est super important de faire des câlins à vos Pokémon ! Comme ça, ils vous écoutent mieux ! Regardez comme Flamiaou est ravi que je le gratouille !

Lily grimaça alors qu’elle se contentait de passer la main sur la tête et le cou de Couafarel qui semblait apprécier sans plus, alors que David avait pris l’habitude de caresser continuellement Ceribou qui appréciait énormément. Léopold sourit.

- Y’en a au moins un qui m’écoute !
- Mouarf… c’est une perte de temps, mes Pokémon m’écoutent déjà bien ! souffla Lily.
- Oui mais ils t’écouteront mieux comme ça ! assura Léopold.

Charlie et Roland parlaient dans le salon de jardin sur la terrasse, observés par Linda.

- Tu es jeune, tu viens juste d’obtenir ton Pokémon Académique. C’est encore trop tôt pour réévaluer ta vision du dressage. Tu es un passionné, tu adores en apprendre plus. Cela va forcément conditionner ton orientation…

Charlie agita la tête en sirotant son thé. Roland buvait ses paroles. Il tenait le jeune homme en haute admiration, le sachant être un dresseur très talentueux.

- Regarde, moi, je voulais être champion d’arène quand j’étais petit. Je me suis aperçu que c’était trop haut pour moi, j’ai décidé de me professionnaliser, et ça ouvre bien plus de portes. Probable que tu feras prof au départ mais que tu vas te réorienter ensuite. Tu ne peux pas savoir comment tu vas grandir. Par chance, tu sais ce que tu veux : Rester entouré de Pokémon ! C’est une constante !

Roland sourit. Linda acquiesça.

- Je crois qu’avoir Etienne comme père lui colle un peu la pression !
- Je connais ça ! sourit Charlie. Mais j’ai plus l’impression que ça te tire vers le haut, non ?

Roland hocha la tête en souriant.

- Bon, on se fait un petit combat, histoire de te remettre à ta place, monsieur je terrorise mes frères et mes sœurs ?
- Charlie ! souffla Linda, amusée.
- Je les terrorise pas ! geignit Roland en souriant.
- Allez, gamin, viens prendre ta raclée ! Léo, je vais castagner Roland !
- Sois pas trop dur ! sourit Léopold.

***

Et à l’école…

- Smirnoff…

Le prof semblait presque excédé.

- C’est un vingt…

Applaudissements de la classe. Si en première année, Roland avait des notes plus régulières, la seconde avait été un enchaînement de notes maximales.

Roland n’était même plus surpris. Il ne faisait pourtant pas d’efforts particuliers. Il se contentait de faire ses devoirs, de prendre ses cours, de réviser ses leçons. Avec un peu plus de passion et d’empressement que certains, peut-être.

Ses professeurs avaient cependant tous un point commun, ils avaient un peu lâché l’affaire avec lui. Un constat qu’on fait habituellement aux élèves turbulents, difficiles, mais Roland autogérait tellement son entrainement et sa théorie qu’ils se sentaient presque avec un égal dans la salle de classe.

Ce qui culmina, peu avant l’entrée en troisième, à un autre problème.

***

- Votre fils, monsieur Smirnoff…
- Ma femme est dans la pièce.
- Et je suis toujours la mère de Roland ! assura Linda.
- Et elle a enseigné également par le passé, donc…

Roland sourit de l’humour de ses parents.
Bureau du proviseur. Grosse convocation en grandes pompes et tout et tout.

- Ahem… oui, mais disons que je m’adressais à celui qui gère son éducation…
- Ah, moi je me contente de lui faire des sermons, c’est elle qui l’éduque !
- Oh voyons chéri, je fais juste le ménage, la cuisine et la lessive !
- On n’a pas une femme de ménage ? s’étonna faussement Etienne.
- Chut, tu vas dévoiler notre terrible secret ! sourit Linda.

Roland essayait de ne pas rire devant le proviseur qui inspira lourdement.

- Bon, soyons brefs…
- Oh, oui, pitié ! sourit Etienne, un peu énervé par le personnage.
- … Roland a d’excellents résultats. Il n’a pas eu une note en dessous de 90% depuis au moins le second trimestre de sa première année.

Linda et Etienne se regardèrent.

- Nous savons…
- Et nous le félicitons continuellement pour ça.
- Nous sommes fiers de toi, Roland.
- Merci maman, merci papa.
- Oui, mais le souci c’est que ses professeurs… ne savent plus trop quoi faire avec lui.

Etienne haussa les sourcils.

- Ils n’ont qu’à lui donner des exercices plus difficiles, c’est la procédure…
- C’est déjà le cas. On se rappelle tous de l’incident avec son professeur de technique en première année…

Etienne et Linda serrèrent les dents. Le professeur avait cru faire son malin en donnant à Roland un exercice digne d’un élève de première année de faculté dans une évaluation, et Roland l’avait réussi haut la main et en avait même redemandé.

- Nous avons deux solutions… Soit le placement de Roland en école spécialisée…
- Pourquoi pas au zoo pendant que vous y êtes…

Etienne regarda sa femme qui venait de balancer ça au calme. Elle serra les dents.

- Désolée, je suis un peu tendue.
- Ça se comprend, admit Etienne.
- On… m’a prévenu que vous étiez…particuliers…
- Notre réputation nous précède, c’est d’un triste… soupira Etienne.
- L’autre solution c’est de lui faire sauter une classe.

Linda inspira et regarda Roland. Etienne semblait sceptique.

- Hmmm…
- Sachant que votre fils a largement le niveau. On pourrait lui en faire sauter deux, mais…
- Ce serait trop radical d’un point de vue social… souffla Etienne.
- Voilà.
- Et Roland, qu’est-ce qu’il en pense ? demanda Linda.
- On ne lui en a pas parlé, c’est pour ça que je vous convoque…

Etienne agita la tête.

- C’est gentil de nous mettre devant le fait accompli sans qu’on puisse y réfléchir, merci…
- De r… euh…
- Roland ?

Le jeune homme inspira et regarda ses parents.

- Ça ne m’embête pas.
- Là n’est pas vraiment la question… marmonna le proviseur.
- Non, je veux dire… je vois bien que la seconde année c’était trop facile pour moi, ça ne m’embête pas de passer en quatrième directement.

Etienne hocha la tête avec un demi-sourire. « C’est bien mon digne successeur. »
Linda inspira.

- Tu es sûr que ça ne va pas te stresser ? C’est un grand pas, la troisième année, c’est une transition importante…
- Certes… admit Etienne.
- C’est pour cela qu’on vous consulte… marmonna le proviseur.

Roland haussa les épaules.

- Je suis partant, ensuite le stress, je pense que je peux faire avec.

Linda semblait moins sûre. Etienne hocha la tête.

- C’est plié, cependant, si je peux me permettre un petit caprice de ma part…
- Oui… ?
- Eh bien, il me semble que vous avez les enfants Heine dans cette académie…
- Oui, en effet…
- Pour faciliter les choses à Roland, ce serait bien que vous le mettiez dans la classe de l’un d’entre eux.

Roland grimaça. Les enfants Heine, les enfants des amis de papa. Malcolm et Rachel. Il les appréciait sans plus. Malcolm était un peu timide, froid et distant, Rachel était plus agréable mais Roland et elle avaient une simple entente cordiale.

- C’est faisable.
- Et en effet, ce serait plus rassurant… admit Linda.
- Eh bien soit, c’est plié, Roland passera directement en quatrième année !

Le jeune homme en sembla aussi satisfait que son père.

***

- J’espère que tu ne m’en veux pas d’avoir pris cette décision unilatéralement…
- Tu plaisantes ! Ce sera génial d’avoir nos enfants dans la même classe ! sourit Kenneth.

Vacances d’été, Etienne avait convié son ami pour un petit apéro sur sa terrasse pendant que les enfants s’entrainaient.

- Mais euh… t’es sûr que ça va aller pour Roland ? J’veux dire sauter une classe en académie, ça me semble un peu radical…
- C’est mon fils, il y arrivera.

Kenneth plissa les yeux.

- On a déjà discuté de ce truc d’hérédité dans le dressage !
- Non, je veux dire que je le connais. Il y arrivera.
- Bon. Et pour Lily et David…
- Ils suivront la voie qui leur conviendra.
- Ah donc tu mises tous tes espoirs sur Roland en fait…
- Non, c’est juste que Roland suit un chemin qui me convient.

Kenneth leva les yeux au ciel en souriant.

Conversation d’une autre teneur dans la cuisine.

- Je ne sais pas quoi faire, ça me terrifie qu’il saute une classe ! Ça va trop vite, Roland, le Roland que je connais, mon petit bébé, n’est pas prêt pour subir ça.

Judith grimaça, toujours impressionnée par les élans protecteurs de son amie.

- Mais Linda, parles-en à Etienne, enfin…
- Je sais que je devrais, j’essaie parfois mais je ne sais pas comment avancer la chose, j’ai peur qu’il pense que je le surprotège !

Judith agita la tête.

- Tu es sa mère, tu ne le protègeras jamais trop.
- … tu crois ?
- C’est Lucy qui m’avait dit ça. Et même si son traitement de l’homosexualité de son fils rend ses opinions quelque peu discutables…
- Je t’avoue qu’avec Etienne on les voit de moins en moins à cause de ça… soupira Linda. Je parle plus avec Charlie qu’avec elle…
- Pareil pour moi, mais je pense que sur ce point, elle avait raison… mais pas de la manière dont elle le fait elle !
- J’avais compris ! sourit Linda.
- Maintenant… Roland va avoir douze ans, il va devenir un ado…
- Oh mon Dieu ! geignit Linda.
- Et t’as pas de chance parce que moi, j’ai les deux en même temps qui vont franchir cette étape, mais toi, ça va être Roland, puis Lily et ensuite David…

Linda souffla.

- Je suis pas prête !
- Personne ne l’est. Je m’attends à ce que Malcolm pète des plombs et fugue, et je suis certaine que Kenneth va interdire à Rachel de sortir avec des garçons.

Linda inspira.

- On n’en est pas encore là !
- Et heureusement !! ricana Judith.

Au dehors, David et Lily s’entrainaient contre Malcolm, son Kranidos et son Grenousse. David s’était vite écarté. « Trop bourrin pour moi ! »

Lily lui tenait tête avec Couafarel. Kranidos n’arrivait pas à percer la Toison Epaisse adverse, et Grenousse parvenait à peine à percer sa garde.

Roland restait dans son coin à lire, privé d’entrainement avec ses frères et sœurs, et Rachel était sur une chaise à côté des paternels à dorloter sa Croquine. Roland regarda vers elle. Elle releva les yeux vers lui et le salua, intriguée par son regard.

Roland baissa rapidement les yeux vers son livre.

On entendit un piaillement. Tout le monde se tourna vers le vieux pommier au fond du jardin de la demeure de Voilaroc. Etienne haussa les sourcils.

- Tiens donc.

Le Passerouge observait les enfants avec un air de défi. Malcolm plissa les yeux.

- Un Pokémon insignifiant. Continuons le combat.
- Quel combat, c’est à peine si tu arrives à me toucher ! ricana Lily.

Passerouge s’envola vers David qui l’esquiva de justesse. Le Pokémon alla s’installer sur la table de jardin, devant Kenneth et Etienne.

- … Ça te dit, pour agrémenter ton équipe ? marmonna Etienne.
- Tu n’as pas de Pokémon Feu, il me semble, Etienne…
- Je n’ai jamais aimé le type Feu… souffla le professeur.

Passerouge piailla de plus belle.

- … certainement pas aussi bruyants, d’ailleurs…
- Je vais le dégager avec Goinfrex…

Passerouge s’envola de nouveau. Rachel l’observait en couvant Croquine de ses bras.

Mais le Pokémon se dirigea vers Roland qui regarda les fruits secs qu’il grignotait tout en révisant. Le Pokémon resta en suspens dans l’air à piailler sur Roland. Malcolm, Lily, Rachel et David observaient. Roland inspira.

- Un souci ?

Passerouge fondit sur Roland et son sachet de friandises. Le jeune homme se leva avec son sachet et laissa le Passerouge charger dans le vide. L’oiseau se posa sur la chaise et piailla vers Roland. Le jeune homme inspira alors que son Morphéo sortait de derrière son dos.

- Pourquoi pas, après tout…

Le soleil de l’été avait donné à Morphéo sa forme Solaire. Passerouge chargea le Pokémon Climat mais son changement de type le protégea de la Nitrocharge.

- Morphéo, attaque Balle Météo.

Le Pokémon souffla une boule de fumée de taille modérée qui s’enflamma au contact du soleil. L’attaque frappa Passerouge qui s’énerva encore plus. Kenneth plissa les yeux.

- Il est bien énervé, ce Pokémon…
- Il a l’air d’être à la recherche de nourriture… et en ville, par une chaleur pareille, ça devient difficile de s’en procurer sans voler… marmonna Etienne.

Roland observa le Passerouge qui préparait une attaque Aile d’Acier. « C’est un simple Pokémon sauvage qui n’a aucune conscience de la stratégie basique… Mais il a une attitude intéressante... »

Passerouge allait frapper Morphéo qui esquiva sans difficulté la grossière attaque du Passerouge sauvage.

- Finissons-en : Lance-Soleil !

Les sphères autour du visage de Morphéo s’illuminèrent. Passerouge tenta une dernière charge mais le rayon de lumière, émergeant de son visage, le frappa de plein fouet. Passerouge s’écroula, mal en point. Roland sortit une Pokéball et regarda son père.

- Je peux ?
- Oui, fais donc.

Roland hocha la tête et envoya la Pokéball sur la créature sauvage. Elle ne se débattit pas. Roland ramassa la Pokéball, satisfait.

- Bien joué, Roland ! sourit David.
- Joli coup, frérot ! ajouta Lily.

Roland hocha la tête et alla se rasseoir. Il sortit Passerouge et le posa sur son épaule. La créature recommença à brailler.

- Baisse d’un ton…

Le Pokémon piailla moins fort. Roland hocha la tête et lui donna un fruit sec dont la créature se délecta. Rachel semblait impressionnée.

***

La rentrée. Roland était avec des gens qui avaient un an de plus que lui. Il arriva au milieu de la classe qui lui avait été attribuée, la quatrième année deux.

Il avait vaguement essayé de se mettre à niveau tout l’été, mais au final ça l’avait plus fatigué qu’autre chose, et à très juste titre, sa mère l’avait encouragé à se reposer plutôt qu’autre chose.

Les élèves arrivaient peu à peu. Roland ne connaissait personne, il avait été sorti de sa classe d’origine. Non pas qu’il y avait spécialement des amis, mais il connaissait un minimum les têtes des gens. Là…

Une tête connue arriva. Roland s’en étonna. Il était placé dans la classe de Rachel. Elle le salua et s’approcha de lui.

- Hey !
- Hey…
- Alors t’es dans ma classe !
- Bah oui, voilà… mon père voulait que je connaisse au moins une personne en arrivant…
- Eh bah c’est moi ! sourit Rachel.
- Bah c’est cool… sourit Roland.
- T’es prêt ? On a une année de programme d’avance sur toi !
- J’vais faire ce que je peux…

Rachel leva les yeux en souriant.

- Je vais éviter d’ébruiter ta réputation de « collectionneur de notes maximales » dans tes deux premières années !
- J’le faisais pas exprès, promis.

Rachel ricana. Roland la regarda, amusé.

Il n’avait jamais vraiment parlé avec Rachel. Disons qu’ils se fréquentaient par obligation, étant donné que leurs pères étaient amis. Malcolm avait toujours affiché une forme de froideur à son égard, que Roland n’avait pas cherché à dissiper. Rachel, d’un autre côté, il n’avait jamais vraiment osé l’aborder, pour une raison qu’il ignorait. Il la trouvait intimidante, en quelque sorte.

Mais maintenant qu’ils étaient dans la même classe, ils avaient une espèce « d’obligation » de copiner.

- Tu aurais pu être dans la classe de Malcolm aussi…
- Hm.
- J’ai l’impression que ça t’aurait déplu…

Roland haussa les épaules.

- J’ai pas… d’opinion précise sur lui…
- Il t’aurait sacrément chicané, il ne supporte pas quand papa parle de toi à la maison.
- Ah oui ?
- Hm.
- Et toi ?
- Moi ? Je m’en fiche ! Mon frère a un problème avec toi, moi je te connais à peine !

Roland agita la tête.

- T’es pas obligée de rester avec moi, tu peux aller avec tes amis…
- J’ai pas d’amis. Et ton père m’a payée pour que j’assure ton tutorat.

Roland regarda Rachel, stupéfait. Rachel éclata de rire.

- Tu verrais ta tête !!
- … attends, t’as pas d’amis ?!

Rachel inspira.

- Disons que j’ai un peu trop de caractère, que les garçons de la classe sont des idiots et les filles ont un caractère trop différent du mien. Du coup, ouais, ça me fait plaisir que tu sois dans ma classe, ça me fera quelqu’un à qui parler dans l’amphi.

Roland en rougit presque. Rachel sourit.

- C’était une blague, le coup de ton père qui me paye !
- J’avais compris, c’est juste que… c’est nul que t’aies pas de copains ou de copines dans la classe…

Rachel regarda Roland qui détourna le regard, un peu embarrassé.

- … c’est gentil de t’en soucier. J’avais dit ça en rigolant à moitié à mon père pendant un repas, et il m’a juste dit « Haha, comme moi. J’avais juste Etienne et Linda, c’est tout. »

Roland agita la tête.

- On reproduit les schémas de nos parents, je sais pas si c’est très glorieux…
- Je suppose que les chiens ne font pas des chats.

Roland sourit en acquiesçant.

Ils prirent une place dans l’amphi, côte à côte, et ne changèrent jamais de disposition pour leurs trois années d’académie à passer ensemble.

***

Et cette proximité n’échappa pas à leurs entourages familiaux. Rachel et Roland passaient beaucoup de temps ensemble, notamment à étudier ou à s’entrainer. Etienne voyait ce rapprochement d’un œil un peu intrigué.

- Eh bien, moi qui pensais qu’il serait dans la classe de Malcolm…
- Ils ne se sont jamais bien entendus… rappela Linda.
- Hm, et ça nous a toujours désolé avec Kenneth, on espérait que nos fils soient copains, comme nous pendant notre enfance !

Linda agita la tête.

- C’est une vision un peu simpliste des choses…
- Oui mais c’est juste un peu décevant… et je ne sais pas quoi penser de ce rapprochement entre notre fils et la fille de Kenneth…

Linda haussa les épaules.

- C’est ce que tu voulais mais pas avec le bon jumeau…
- Tu as compris ce que je voulais dire, Linda…

La blonde se redressa.

- … Ils sont amis, Etienne…
- Hm. Pour le moment. Je ne sais pas quoi penser de ça, vraiment…
- Moi ce que je vois c’est que notre fils a une amie, c’est une bonne chose.

Etienne inspira lourdement.

Dehors, la conversation était effectivement borderline.

- Mais non, pourquoi tu l’entrainerais plus durement, tu n’as aucune obligation Rachel… son évolution est juste due au temps et à tes bons soins, ça ne t’oblige pas à changer ton attitude vis-à-vis d’elle.

Rachel regarda sa Candine, tout fraîchement évoluée en ce début d’année. Elle avait un peu de mal à passer le cap.

- Mais tu comprends, c’était un peu comme… un doudou…

Elle regarda Roland, craignant qu’il se moque d’elle. Il n’en fut rien.

- Oui, tu t’étais résolue à l’élever parce que c’était un Pokémon qui n’était pas forcément fait pour le combat. En Candine, elle est plus robuste… mais tu n’as aucune obligation.

Rachel hocha la tête.

- Ouais. Mais tu sais quoi, j’ai envie d’essayer, j’ai envie de changer de style.
- Ok. Si tu veux que je t’aide…
- Bien sûr que je veux que tu m’aides. Je me rappelle encore quand tu as capturé ce Passerouge. Tu étais tellement sûr de toi !
- Je connais mes Pokémon, j’ai Morphéo depuis tout petit, Ptitard était mon académique et Passerouge nous a rejoint ensuite… Je pense que vu ta proximité avec Croquine, tu n’auras aucun mal à dresser Candine pour le combat. Avec ou sans mon aide.

Rachel acquiesça.

***

Lorsqu’ils se retrouvaient chez Kenneth, c’était pas mieux.

- Parfait… Tu t’en tiens à Feuil’Magik, Torgnoles et Ecrasement, c’est une bonne base…
- Elle maîtrisait déjà Feuil’Magik en Croquine, tu m’as dit que c’était mieux de garder les vieilles attaques…
- Tout à fait, c’est dans la continuité.
- Voilà. Et j’ai aussi lu les revues sur le combat. Ça semble à ma portée.
- Bien sûr que c’est à ta portée.

Rachel appréciait énormément la façon dont Roland lui parlait. Cette manière qu’il avait de toujours l’encourager, toujours la tirer vers le haut. Roland se contentait d’être naturel avec elle. Son amitié était hautement importante pour lui.

Mais de toute évidence ça ne passait pas pour certaines personnes. Roland et Rachel devaient subir constamment, la présence de Malcolm dans le jardin quand ils s’y trouvaient.

Non pas que le Malcolm le faisait exprès. Il faisait ses devoirs dehors mais ça ne lui convenait pas. « Il fait chaud, y’a du vent, mes copies s’envolent… »

Dans le salon de la demeure Heine…

- C’est ridicule d’obliger Malcolm à faire ses devoirs dehors, Kenneth !!
- C’est une fille, c’est un garçon, Etienne et moi sommes d’accord là-dessus, il faut les surveiller !
- Oui, comme ça vous obtiendrez l’effet opposé à celui que vous souhaitez ! Charlie et Léopold, ça ne vous a pas servi de leçon ?!

Kenneth regarda sa femme.

- Rachel a treize ans, Roland douze. Ils sont en pleine puberté, je ne veux pas prendre de risques !
- ... non mais je rêve… soupira Judith en prenant son téléphone.
- Tu fais quoi, là ?!
- J’appelle Linda, je suis sûre qu’elle va trouver ça aussi idiot que moi !

Dehors, toujours la même tension dans l’air…

- Même si je pense qu’une attaque défensive ne te ferait pas de mal.
- Aaaah j’aime pas les attaques défensives ! geignit Rachel.
- C’est pourtant une nécessité… spécifia Roland.

***

En classe, pourtant, rien ne changeait.

- La démonstration de ce cours de combat direct sera basée sur le volontariat…
- Moi !

Toute la classe regarda Rachel Heine qui venait de lever la main sous le regard surpris de Roland Smirnoff.

- Quelle audace ! chuchota Roland en souriant.
- Je sais, je suis super insolente ! ricana Rachel en se levant.

Le professeur de combat direct, un vieil homme un peu niais avec de grosses lunettes, regarda sa tablette.

- Mademoiselle Heine, euh… il me semble que vous avez toujours plus ou moins signifié que vous n’étiez pas une combattante…
- Les gens changent !

Roland haussa un sourcil, étonné.

- Bien, vous affronterez… ah, le petit Tom Anderson.

Un grand jeune homme blond descendit des marches pour aller se mettre face à Rachel. La jeune femme semblait sûre d’elle.

- Allez-y, les enfants.
- Candine, à toi !

La fillette-fruit apparut. Tom acquiesça.

- C’est parti, Sorboul !!

Le Pokémon Glace apparut. Rachel hocha la tête et regarda vers Roland qui hocha doucement la tête dans sa direction.

- Vu d’ici, monsieur Anderson a l’avantage.
- Il faut changer de lunettes…

Les autres élèves se figèrent. Rachel inspira, décidément elle ne savait pas quand se taire.

- Oui, euh… commencez donc… souffla le prof de combat direct, pas très vindicatif.
- Sorboul, Laser Glace !

Sorboul envoya l’attaque par sa bouche. Rachel hocha la tête. Candine esquiva l’attaque et bondit vers Sorboul.

- Torgnoles !!

Candine frappa Sorboul à coups de sépale. Les couettes végétales frappaient le sorbet de part en part.

- Non mais oh ! Souffle Glacé !!
- Ecrasement !!

Sorboul souffla droit devant lui, mais Candine frappa un grand coup de ses deux pattes dans le sol, esquivant incidemment le coup.

- Non mais où t’as vu qu’on pouvait esquiver une attaque comme ça ?!
- Dans « Esquive et Attaque » de Jane Bretch, pourquoi ?

Le professeur de combat direct haussa les sourcils. Roland grimaça. « Ne révèle pas tes souuurces !! »

- C’est… un livre qu’on examine en faculté, madame Heine !
- Oui, et ?

Roland agita la tête. « Elle a vraiment du caractère… »

- J’vais pas m’faire battre par ça quand même ! Stalagtite !!

Sorboul cracha des pics de glace.

- Candine, attaque Danse-Folle !

Roland se releva. « L’attaque défensive de son arsenal… »
Candine se mit à danser. Les mouvements de Sorboul devinrent erratiques.

- Mais non, mais !!! Laser Glace !

Roland plissa les yeux. « Son adversaire a l’air moyennement futé… »

Sorboul arriva à peine à crachoter l’attaque. Dans un mouvement de valse assez précis, Candine sauta vers Sorboul.

- Et Ecrasement !!!

Le Pokémon Fruit frappa de ses petites jambes le Pokémon Grêle à répétition devant la salle stupéfaite. Sorboul était laminé par les coups de talon de Candine. Le Pokémon Glace s’écroula, défait.

- Punaise… soupira Tom.
- C’est une victoire de Rachel, à la… surprise générale…

La salle applaudit la jeune femme, satisfaite. Roland souriait, impressionné. « Elle a très vite assimilé mes méthodes, je suis super fier d’elle ! »

- Mademoiselle Heine, vous faites pourtant partie des élèves de la classe qui était sur la liste des refus de démonstration…
- Sortez-moi de cette liste, Rachel l’éleveuse est devenue Rachel la boxeuse ! sourit la jeune fille.
- Bon. Tom, c’est un peu décevant, en tant que redoublant vous avez cru que mademoiselle Heine serait une adversaire simple…
- Bah en tant que non-combattante et avec une Croquine… enfin une Candine…
- Malheureusement pour vous, elle a changé de style de combat, comme quoi il ne vaut pas se fier aux apparences. Bien, c’était une belle démonstration, à vos places !

Rachel retourna auprès de Roland, tout content.

- Félicitations !
- Merci. Et merci pour tout !

Roland sourit, flatté. C’était une sensation étrange, être heureux pour quelqu’un d’autre.

***

- Un seize en combat direct ?!
- Hm !

Malcolm et Judith regardèrent Rachel qui mangeait avec eux.

- J’me suis trop bien battue, tout l’amphi m’a applaudie ! sourit la jeune fille, fière d’elle.
- Ça m’arrive souvent de bien me battre aussi… marmonna Malcolm.
- Moi qui pensais que tu allais en rester à élever tranquillement Croquine, voilà que tu te mets à te battre… s’étonna Kenneth.
- Bah en fait j’ai eu envie d’apprendre à me battre quand j’ai vu Roland capturer Passerouge l’autre fois chez les Smirnoff.

Kenneth haussa un sourcil.

- Ah oui ?
- Oui. Je sais pas pourquoi, ça m’a fasciné, du coup je voulais que Roland m’apprenne à me battre !

Malcolm plissa les yeux.

- J’aurais pu t’apprendre à te battre moi aussi… ou papa !
- Oui mais avec Roland je me sentais plus en confiance.

Kenneth regarda sa femme qui haussa les épaules.

- C’est très bien, ma chérie, si ça peut t’aider… marmonna Judith. En tout cas nous sommes fiers de toi !
- … voilà ! assura Kenneth, un peu gêné.

Rachel sourit, toute contente. Malcolm leva les yeux au ciel et soupira.

***

Cependant pour Roland les choses étaient moins simples.

- Je vous rends les résultats de votre premier devoir de technique…

Les élèves observèrent les écrans de leurs pupitres. Roland fit de gros yeux.

- Bon, 14, ça va, c’est pas mal… Roland ?!

Roland sembla avoir du mal à respirer, estomaqué. Rachel le regarda, impressionnée.

- Roland ?!

Il la regarda, au bord de l’apoplexie. Rachel regarda son écran.

Huit.

- … ça va, Roland, c’était ton premier devoir, tu…

Roland se leva et parla tout fort, avec une voix clairement angoissée.

- Excusez-moi, je peux aller aux toilettes ?

Tout le monde le regarda, un peu étonné.

- Oui Smirnoff, allez-y, mais ne tardez pas trop, je fais la correction dès maintenant, ça pourrait vous intéresser.

C’en fut trop pour Roland qui s’échappa en courant, marchant presque sur Rachel et les autres élèves pour sortir du rang de l’amphithéâtre. Rachel était stupéfaite, c’était la première fois qu’elle voyait Roland dans un tel état.

A son retour, il était silencieux. Il avait pleuré. Et il s’était installé bien à part de Rachel, complètement prostré.

***

- J’ai pris la correction pour toi, mais je suppose que tu n’en veux pas…

Roland était complètement en état de choc.

- Tu sais, c’est pas un drame d’avoir de mauvaises notes…
- Mon père… qu’est-ce qu’il va dire…
- Ton père n’est pas obligé d’être au courant de toutes tes notes ! souffla Rachel.
- Mon père est prof, il peut tout savoir, il sait TOUT ! Et moi… moi je ne vaux pas mieux qu’un pet de Smogo…

Rachel regarda Roland, époustouflée.

- C’est bien le garçon qui m’a encouragée mordicus quand j’ai voulu apprendre à me battre qui tient ce discours, là ? Roland ! Tu as le droit d’être faible, de te tromper, d’être mauvais à quelque chose, même !
- Mais c’est ma passion ! Les Pokémon, c’est… je… depuis que je suis tout petit je m’y intéresse et là…
- Tu viens de sauter une classe, c’est normal que tu aies des difficultés ! Je savais que j’aurais dû t’aider toi aussi pour tes leçons !
- J… j’ai pas besoin d’aide !
- J’ai pas dit que tu avais besoin d’aide, j’ai dit que tu avais besoin de MON aide.

Roland regarda Rachel qui le regardait avec entrain.

- Allez, on va de l’avant, on ne s’écroule pas sur un petit huit !
- … J’ai fait un hors-sujet dans la rédac sur les attaques à exception…
- Et c’est normal, et c’est arrivé à des tas d’autres élèves, et tu t’en relèveras parce que tu vas faire ce qu’il faut pour. Tu as eu une sale note mais tu vas t’en remettre. Tu ne pourras que remonter.

Roland hocha la tête, ruminant sa déprime. Rachel lui saisit l’épaule.

- Je t’interdis de flancher. Pas toi.

Roland regarda Rachel, interloqué.

- C’est toi qui m’a appris à être forte, ne te descends pas comme ça ! Tu n’es pas réduit à une seule note, Roland.
- … oh mon dieu, les autres contrôles…
- On s’en moque des autres contrôles. Va de l’avant.

Roland acquiesça, perdu.

***

Cette fois, ils se retrouvaient à la bibliothèque. Roland reprenait le programme de troisième année point par point.

- J’aurais dû faire ça cet été… j’ai été trop paresseux de me concentrer sur de simples révisions…
- Tu le fais maintenant, c’est déjà très bien.

Roland inspira en hochant la tête et en remplissant des fiches bristol, couvé par Morphéo. Rachel observa la bestiole.

- Il t’accompagne partout, hein…
- Hm. C’était mon tout premier Pokémon. Il s’était coincé dans une gouttière de ma maison. Maman m’a aidé à le récupérer au départ. Mais un début de tempête s’est déclenché. Elle a essayé de me faire rentrer mais je voulais pas le laisser.

Rachel haussa les sourcils.

- T’avais quel âge ?!
- Quatre, cinq ans peut-être. J’ai escaladé la gouttière et j’ai sorti Morphéo alors que ma mère me hurlait de descendre. Et je suis descendu, en tombant.

Rachel grimaça. Roland caressa Morphéo.

- Et il m’a retenu avec une Balle Météo qui a fait coussin au sol. On est rentrés rapidement, maman m’a serré dans ses bras et elle a capturé le Pokémon pour moi et me l’a donné en me disant : « Si il est avec toi, je serais plus rassurée. »

Rachel hocha la tête.

- Tu as de la chance d’être aussi proche de tes parents…
- Tes parents t’adorent, qu’est-ce que tu racontes ?
- Bah mon père en fait un peu trop des caisses, et ça arrive souvent qu’il dise des trucs du genre qu’il n’a pas l’instinct paternel ou que pour régler une dispute il nous donne de l’argent de poche… ou de se défiler en disant qu’il nous paiera la thérapie plus tard, vu quel père pas terrible il est…

Roland sourit.

- J’ai toujours trouvé que ton père était quelqu’un d’amusant…
- Ah oui, de loin, il est drôle à voir mais de près… on sent clairement que c’est maman qui voulait des enfants. Et là encore je crois que je la déçois un peu.
- On se trompe souvent sur ce que les gens pensent de nous… marmonna Roland.
- J’ai toujours l’impression qu’elle voulait que je sois plus féminine, plus « robe de princesses » et « poupées »… mes vieux jouets étaient horriblement roses et moches. Malcolm avait tous les jouets intéressants.
- Je suis sûr que tes parents t’aiment telle que tu es.
- Hm. Mais pas autant que les tiens.

Roland inspira en se relevant.

- Tu te poses des questions qui n’ont pas lieu d’être…
- Je sais. Heureusement que ma thérapie est financée d’avance, hein ?

Roland sourit et continua ses exercices.

***

Il remonta peu à peu la pente. Ses notes du début du trimestre étaient effectivement moyennes voire mauvaises, mais il arriva vite à se hisser au-dessus de la moyenne grâce à l’aide de Rachel.

- Bon, tu vas arrêter de progresser, hein ! Tes notes deviennent meilleures que les miennes, ça fait mauvais genre !

Roland ricana.

- Je ne sais pas comment te remercier…
- Tu n’as pas, enfin, on est amis, et puis tu m’as aidé pour dresser Candine, je te devais bien ça.

Roland hocha la tête.

- Hm. Mais tu es une excellente tutrice !
- Oh arrête, je t’ai juste donné les points de programme et tu m’as posé quelques questions, mais j’ai rien…
- Non, j’insiste. Tu devrais essayer de devenir enseignante.

Rachel s’étonna.

- Euh… bah j’y ai jamais vraiment songé…
- Tu ne sais pas vers quelle fac te diriger ?
- Je comptais suivre un cursus très classique et finir employée de bureau !

Roland regarda Rachel, stupéfait. Elle haussa les épaules.

- Hey, on peut être une fille cool et n’avoir aucune ambition !
- … euh… oui… enfin, tu fais ce que tu veux, mais… Rachel, tu es une fille exceptionnelle, tu vaux mieux que… travailler dans un bureau…

Rachel rougit violemment. Roland réalisa ce qu’il venait de dire.

- Enfin ce que je veux dire c’est que tu ne devrais pas te rabaisser, tu... es plus intelligente et douée que beaucoup de gens dans cette académie, tu…

Roland serra les dents, incapable de formuler autre chose que des compliments gênants. Il inspira.

- Réfléchis-y, je pense que tu as du potentiel.
- … oui, enfin j’avais… compris que c’était ce que tu voulais dire !
- Hm, voilà… tu viens chez moi pour t’entrainer ce soir ?
- Euuuh non, je suis un peu lessivée, je pense que je vais rentrer me reposer.
- D’accord, d’accord…

***

Le cycle académique se passa très calmement. Roland n’avait pas retrouvé son niveau d’antan mais il était quand même dans le haut du panier, et suivant les conseils de Roland, Rachel s’améliorait continuellement et suivant ses conseils, elle avait cherché à devenir professeur. La cinquième année fut l’occasion de forger cette idée.

- Le concours le plus simple mais le plus aléatoire c’est d’être professeur de combat direct…

Roland hocha la tête en regardant la documentation avec Rachel.

- Hm. D’un côté il suffit d’être fort, de réussir le concours théorique et le test psychotechnique, d’un autre côté c’est tellement à la portée de tout le monde que le nombre de candidatures est immense.
- Y’a cette fille en cinquième trois, Blandine, elle m’a dit que ça pouvait aller jusqu’à sept mille candidatures par an pour à peine 10% de reçus.
- Hm, mais regarde, selon ta note tu peux bénéficier d’un contrat préparatoire et d’une licence de professionnalisation en attendant qu’une place se libère !
- En effet, en effet…
- Salut…

Roland et Rachel se relevèrent vers un jeune homme blond qui était dans la bibliothèque tout comme eux.

- Oh, Jamie…
- Salut Jamie… marmonna Rachel.
- Roland, on était censés se voir pour le compte rendu de lecture en fondamentaux…

Roland haussa les sourcils.

- Mince, oui ! Désolé, Rachel…
- Non, non, vas-y, j’ai la doc qu’il me faut…
- A tout à l’heure !
- Hm !

Roland se leva et rejoignit son camarade. Alors qu’ils s’éloignaient, Rachel remarqua que le blondinet saisissait la main de Roland. La brune haussa un sourcil intrigué.

***

Le cours de fondamentaux était très généralement des cours de français, de géographie et de langues étrangères. C’était parfois un peu brouillon et les professeurs eux-mêmes étaient généralement plus spécialisés dans une des trois branches. La mesure, censée être économique, s’avérait parfois peu bénéficiaire aux élèves.

- Alors, pour le compte rendu de lecture, j’appelle Roland et Jamie.

Les deux jeunes hommes se présentèrent au pupitre devant les autres élèves.

- Nous avons lu « Loin dans la nuit » de Gavin Montiel, annonça Roland.

La prof de littérature s’étonna.

- Je… vous ai demandé de lire un livre de votre bibliothèque…
- Il était dans la bibliothèque ! assura Jamie.
- Euh… d’accord, continuez…

Roland tendit la main vers son partenaire.

- Oui, euh… « Loin dans la nuit » est un livre autobiographique. L’auteur raconte son périple à Alola pour effectuer une année de professorat à l’étranger, pour, selon lui, parfaire son éducation.
- Il considère en effet qu’il doit enseigner ailleurs que dans sa Johto natale, trop vieux-jeu selon lui, pour s’ouvrir à d’autres cultures et avancer, tant mentalement que spirituellement…

La prof semblait gênée aux entournures, mais Rachel trouvait le compte rendu intéressant jusque-là. « Typiquement le genre de livre de Roland, même… »

Jamie hocha la tête et poursuivit.

- L’auteur fait la rencontre d’un certain Antoine, assistant pédagogique. A Alola, il existe des assistants pour les professeurs, qui sont un reste de leur ancienne culture esclavagiste.

La prof ne savait plus où se mettre. Roland hocha la tête.

- Voilà. Peu à peu, l’auteur et Antoine se rapprochent par la force des choses, et l’auteur décrit beaucoup l’étendue de son attraction pour lui.
- Ok, les enfants, je pense que…
- En fait j’ai choisi un extrait que je trouve assez pertinent…
- Ce n’est absolument pas nécessaire, vous avez un seize, retournez à vos…

Trop tard, Roland avait saisi le livre et déclama, d’une voix très claire.

- « C’est inéluctable. Il m’attire. La douceur de sa peau, je n’ai même pas à l’éprouver pour la connaître. Au moment où il rajuste ses cheveux d’ébène, je suis hypnotisé par cette cascade d’or noir, retombant sur son derme perpétuellement basané. Antoine ne m’obsède pas seulement, il me hante. Son sourire et son odeur, conjuguées, suffisent à me troubler plus que n’importe quelle gravure obscène. J’ai l’idée, l’envie, le désir même, qu’il me possède. Je n’aurais jamais cru possible de tomber amoureux d’un homme auparavant. C’est chose faite et le nier serait un inacceptable refus de moi-même. »

Jamie était tout rouge. Roland reposa tout naturellement le livre. Les élèves étaient complètement hallucinés. Rachel également, de voir son ami aussi insolent et polisson.

- … ce n’était absolument pas nécessaire, monsieur Smirnoff.
- Je pense que si, madame. C’est un extrait comme un autre.
- C’est inapproprié !
- En quoi ?
- Ne jouez pas au plus malin, je pensais que vous étiez un élève sérieux, mais…
- Je SUIS un élève sérieux, et mon camarade également, madame.

Jamie se faisait tout petit. La prof leva les mains et laissa les enfants continuer leur compte rendu.

- Evidemment, l’auteur décrit les difficultés à vivre cette romance dans un archipel aux règles encore plus archaïques qu’à Poképolis avec une région divisée en plusieurs petites îles, chacune ayant ses propres règles.

Roland regarda Jamie qui hésitait à reprendre.

- Euh, oui, oui, le… euh… l’auteur décrit la politique des doyens, qui est individuelle. Chaque changement de doyen entraîne un changement de règles… j’ai… choisi un extrait…
- Qui a intérêt à être correct ! gronda la prof.

Jamie inspira et prit le livre. Roland tapota l’épaule de son camarade. Rachel était étonnée de leur proximité.

- Hem… « Avec Antoine, nous nous promenons sur la plage où il y a quelques semaines, nous avons pris un langoureux bain de minuit… »

La prof se frappa le front, excédée.

- « Nous passons devant un autel, je lui demande ce dont il s’agit, il me répond que le doyen de Mele-Mele vénère Tokoriko, et que cette statue est là pour recueillir les offrandes qu’on lui accorde. Je suppose qu’on va passer sans rien donner, mais non. On se dirige vers la statue, Antoine y jette une pièce, je fais de même. C’est obligé, quand on passe devant, me dit Antoine, sinon le doyen dit qu’on a le mauvais œil. Je ne peux m’empêcher de penser qu’il s’agit là d’une manière véreuse de récupérer des fonds, mais je fais silence, il n’est pas bon de critiquer la politique ici, je l’apprendrais à mes dépens plus tard. »

Roland hocha la tête et reprit.

- En effet, l’auteur va contester une tradition Melenoise qui consiste à châtier physiquement les enfants pour les punir, en leur frappant la main avec une règle. Son bras de fer avec le doyen de l’époque et les familles de l’île va mener à son exclusion.
- On s’est renseignés et ces traditions n’ont plus cours avec l’actuel doyen Pectorius qui a contribué à la modernisation de l’île…

La prof inspira.

- La conclusion, messieurs, à savoir la confrontation de vos avis sur le livre…
- Eh bien, moi je n’ai pas aimé…
- Moi non plus.
- J’ai trouvé que l’auteur insistait trop sur sa romance, d’autant que les témoignages rapportent qu’Antoine n’avait pas dix-sept ans mais treize au moment des faits alors que l’auteur en avait trente… marmonna Jamie.

Ahanement dégoûté des élèves. Rachel agita la tête.

- Aussi, je tiens à dénoncer fermement le caractère colonialiste du livre. L’auteur ne cesse de se targuer qu’il est en mission pour éduquer les petits autochtones, qu’il va les élever vers la civilisation… il utilise souvent le terme « négrillon » pour désigner ses élèves…
- C’est un livre de son époque, signifia la prof.
- Et je vois que ça vous choque moins que les descriptions homo-érotiques…

Nouvel ahanement des élèves. La prof regarda Roland, courroucée.

- Vous allez finir chez le proviseur, Smirnoff, je ne sais pas ce qui vous prend…
- Rien, je constate, c’est tout.
- Eh bien cessez de constater. Vous avez fini ?
- Hmm… on peut dire que c’est un témoignage intéressant mais un mauvais roman… admit Jamie.
- Ça se laisse lire mais c’est vraiment pas terrible… souffla Roland.

La prof tomba des nues.

- A vos places ! Vous aurez de bonnes notes, mais c’était franchement déplacé.

Roland retourna auprès de Rachel, tout fier de lui.

- Je vois pas en quoi, mais bon… souffla le jeune homme pour lui, bouffi d’insolence.

Rachel le trouva aussitôt très séduisant mais également très intrigant.

***

- C’était un compte-rendu… intéressant… commenta-t-elle après coup, aux casiers.

Roland haussa les épaules.

- Les autres compte-rendu étaient tellement conventionnels, sur des livres tellement niais…
- Hm…
- Je me suis mis avec Jamie pour le devoir, il voulait choisir ce livre mais il était persuadé que ça ne passerait pas, et ça me paraissait être une idée amusante.

Rachel haussa les sourcils.

- Amusante ?
- Oui. Tu as vu la tête qu’elle faisait ? Elle ne voulait pas qu’on développe quelque audace littéraire, juste qu’on en reste à des figures imposées, ça m’insupportait.

Rachel acquiesça, peinant à reconnaître son ami.

- D’accord, euh… c’est… nouveau, cette façon de… ?

Roland regarda Rachel, intrigué.

- Hein ?
- Je sais pas, je te savais pas aussi… virulent !

Roland haussa les épaules.

- C’est exaltant, plus on avance dans les classes, plus on est confrontés à des murs de conventions, c’est génial de les briser peu à peu !
- Oui, je… suppose… du coup, mon compte-rendu à moi et Amélie c’est sur « Madame Bonheur » de Kelly Vitassier…

Roland hocha la tête.

- Oui, et ?
- C’est un peu trop conventionnel, peut-être…
- Tu fais ce que tu veux, Rachel. Avec Jamie, on a pris un risque, ça a payé. Tu n’es pas obligée d’être spéciale, tu es déjà spéciale à mes yeux.

Rachel se mordilla les lèvres. Roland ferma les yeux, semblant regretter sa dernière phrase.

- Désolé, je suis un peu exalté après ce compte-rendu, d’avoir été jusqu’au bout, c’était tellement grisant !
- Je comprends, mais, ce que tu as lu devant tout le monde, tu n’as pas peur que les gens de la classe te prennent pour…

Rachel agita une main. Roland haussa les épaules.

- Qu’ils pensent ce qu’ils veulent. J’ai un truc à faire.

Rachel inspira en le regardant partir. « Il est tellement cool… »

Elle le vit rejoindre Jamie. Roland lui tapota l’épaule alors que le jeune homme semblait moins enthousiasmé que Roland et presque ému aux larmes d’avoir parlé aussi ouvertement devant toute la classe. « En plus il a fait ça pour soutenir un camarade, c’est vraiment honorable de sa part ! »

Rachel vit soudain Roland donner un baiser enfiévré à Jamie, à pleine bouche. Le blondinet lui rendit son baiser. Rachel tomba des nues, estomaquée. Roland laissa Jamie, ne lui lâchant la main qu’au tout dernier moment. Rachel se retourna, choquée. « J’aurais dû m’en douter ! C’est pour ça qu’il n’a jamais rien tenté avec moi ! Et puis ce compte-rendu… C’que j’peux être nunuche ! »

Rachel agita la tête. « D’un autre côté j’aurais pas eu l’air idiote à sortir avec lui, mon frère m’aurait détestée, mes parents se seraient embrouillés avec les siens… Mon père m’aurait arraché la tête je pense, surtout vu le nombre de fois qu’il est venu chez nous… »

Rachel hocha la tête. « Oui c’est peut-être mieux que Roland soit gay ! »

***

La famille Smirnoff accueillait donc un nouveau Pokémon Académique : Le Nounourson de Lily. Linda était toute charmée.

- Il est beaucoup trop mignon ! Je lui fais des câlins avant que tu n’en fasses un petit vandale !
- N’importe quoi ! David, arrête de dire que je transforme mes Pokémon en brutes !
- Ton Couafarel peut pas rester coiffé plus de deux jours tellement t’es une brute !
- N’importe quoi !

Roland sourit. Etienne secoua la tête et regarda son grand fils.

- Bientôt le voyage itinérant, fiston…
- Hm. T’inquiète pas, je serais vigilant et si mon professeur me paraît louche, je demande à en changer !
- Je ne m’inquiète pas… je ne m’inquiète plus, en fait. Ca fait quatre ans, je suis beaucoup plus à l’aise vis-à-vis de tout cela.

Roland acquiesça.

- Papa, ça t’es jamais arrivé de sentir que tu…
- Oui fiston ?

Roland inspira.

- … Que tu n’étais pas obligé de faire un choix ? Que si tu voulais tout avoir, tu pouvais tout avoir, sans te soucier de ce qu’on pourrait penser de toi ?

Etienne sembla circonspect.

- Tu es bien métaphorique, fils…
- Je… euh, c’est… personnel…

Etienne plissa les yeux.

- Je pensais que tu parlerais de ce genre de choses avec ta mère !
- Bah pas forcément…

Roland se demandait si son père avait bien compris, alors il choisit de rester dans l’évasif.

- Eh bien, tu me parles de… relations polyamoureuses, c’est ça ?

Roland agita la tête, gêné. « Pas vraiment, nooon… »

- Hmmm… Disons que moi, ta mère, et notre entourage, sommes des gens plutôt conventionnels, mais libre à toi de vivre ta jeunesse comme tu l’entends. En faisant attention, toutefois…
- Oui, bien sûr… juste…
- Tu ne sais pas si c’est correct. Eh bien, tant que tu ne fais de mal à personne, tout va bien. Tant que tu te sens en adéquation avec toi-même… Tu es encore jeune, avec le temps tu évolueras peut-être sur la question.

Roland acquiesça, rassuré.

- Tu as raison, papa…
- Roland, quelqu’un à la porte pour toi… cria David.

Roland prit congé de son père et alla à la porte.

- Un ami à toi, je crois… marmonna timidement David.
- Oui, merci…

Jamie. Roland ferma la porte derrière lui.

- Hey…
- Hey, désolé de venir jusque chez toi…
- Non, ça va…
- Je venais te rendre la doc que tu m’avais passé pour le livre…
- Oui, merci…
- Et… te dire que je cassais notre… histoire ?
- Notre flirt ! sourit Roland.
- Ouais. Du coup j’ai renoué avec Logan, il a entendu parler de notre exposé, ça l’a rassuré quant à mes sentiments...
- Cool. Cool.
- Désolé de… m’être un peu servi de toi.
- On s’est un peu servi l’un de l’autre, j’avais… envie d’explorer.

Jamie plissa les yeux avec malice.

- D’après une certaine rumeur entre certains garçons, j’étais pas le premier avec qui tu as… « exploré »…
- Certes, mais avec toi, ça a été… plus loin. Tu es venu chez moi, pas les autres.
- Hm. Sans rancune ?
- Sans rancune, Jamie. Merci encore pour…

Roland agita une main badine. Jamie sourit en baissant la tête. Le jeune homme approcha de Roland qui le prit de vitesse et lui adressa un baiser plus chaste que celui donné à l’école.

- A plus.
- … hm. A plus, Roland.

Jamie s’éloigna. Roland inspira.

« Si seulement je pouvais l’embrasser aussi facilement, elle… »

***

Rachel tenta d’abord d’en parler avec son père.

- Papa…
- Oui ?
- … Ça t’es déjà arrivé de bien connaître quelqu’un mais que d’un coup la personne change et tu ne la reconnais plus ?

Kenneth acquiesça lourdement.

- Oh que oui. Les simples syndicalistes qui deviennent des tueurs, Cynthia qui s’avère être une dangereuse tueuse à gages tout ça pour ouvrir une autre dimension, sans parler des élèves de voyage itinérant qui cherchent à tuer Etienne, ah ça on s’y connait en personnes qui changent du tout au tout !

Rachel regarda son père qui serra les dents.

- Boulette ?
- … jjje vais voir maman…
- Han non ! Han non mais pourquoi ? Racheeel ! geignit Kenneth, dépité.

***

Judith agita la tête.

- Tu sais les gens peuvent changer, mais au fond ils restent toujours les mêmes. Ton père par exemple, sous ses dehors maladroits…

Kenneth avait suivi sa fille au salon, dépité.

- J’voulais juste être de bon conseeeil !
- Eh bien il a de très bon côtés, c’est un homme affectueux, fort et qui adore ses enfants même si de toute évidence il n’est pas doué pour les conseiller.

Rachel acquiesça.

- D’accord, donc si j’ai l’impression que cette personne m’a cachée des choses, m’a menti…
- Elle avait probablement de bonnes raisons, il vaut mieux parfois ne pas juger les choses avant d’en avoir parlé avec le principal intéressé, ton père te dira, au vu de son expérience des filous…

Kenneth fit deux V de la victoire devant sa fille souriante.

- … qu’engager un dialogue ça vaut parfois infiniment mieux que se poser des questions dans son coin !

***

Rachel choisit de ne rien dire, de ne pas embêter Roland avec ça.

Il restait tout à fait normal avec elle, toujours cette même tendance à la complimenter à l’excès et à se reprendre qu’elle trouvait assez adorable de sa part. Roland s’investissait dans beaucoup de petits clubs ou de groupes de travail au sein de l’académie et avait acquis une réputation de jeune homme investi.

Un non-dit s’était installé entre eux. Roland avait embrassé publiquement ce garçon, Rachel l’avait vu, mais elle ne disait rien, et Roland faisait mine qu’aucune ambiguïté n’existait.

Rachel de son côté, peaufinait son ambition de devenir professeur de combat direct en étudiant comme une dératée et en participant à des clubs de combat Pokémon où elle excellait avec sa Candine. Roland lui avait conseillé de retarder l’évolution, le temps qu’elle la maîtrise pleinement.

- C’est si important que ça ?
- Quand on n’a pas d’intention particulière avec le Pokémon, non, on peut le laisser évoluer tout seul, quand on veut un Pokémon puissant, le fait de l’entraîner pleinement et de le faire évoluer au bon moment constitue un avantage par la suite.
- Je l’ai lu quelque part mais je voulais ta confirmation.
- C’est très bien de recouper les informations.

Rachel inspira.

- Pas trop stressé par le voyage itinérant ?
- Non. Mon père est confiant, ça me rassure pas mal je t’avoue.
- Tu m’étonnes. Mes parents ne s’en sont pas trop soucié… Malcolm a l’air de dire que ça va se faire les doigts dans le nez…
- Hm, pas étonnant de sa part.
- Moi… pfff… un peu les jetons, se retrouver dans la nature, comme ça…
- C’est un parcours très dirigé, on sera avec un professeur.
- Je sais, ce sera juste nouveau…
- C’est normal de stresser face à l’inconnu, mais c’est notre lot quotidien à tous, tu es bien assez forte pour faire face.

Rachel regarda Roland, interloquée. « Mais quand même, s’il est gay, pourquoi il me fait des compliments pareils ? Il se pose encore des questions ou bien… Hors de question que je sois son crash-test hétéro ! »

Roland inspira. « Elle doit me trouver inconvenant. Ou peut-être pas. Ça avait eu l’air tellement simple avec ces garçons, pourquoi c’est aussi compliqué avec elle… »

Roland arriva à son casier. Rachel alla au sien un peu plus loin. Roland la regardait discrètement. « Deux choses. Déjà, c’est une femme. Tu ne peux pas être aussi cavalier avec elle qu’avec Jamie et les autres. Entre garçons, on sait ce qu’on veut, il n’y a pas de règles à proprement parler. Une femme, ça se traite correctement, c’est ce que ton entourage et tes expériences t’ont enseigné. Les quelques filles avec lesquelles tu as flirté ne se laissaient pas toucher comme ça… »

Il l’observa hésiter entre deux cahiers. « Et surtout, elle, elle compte. Peu importe que ce soit un homme ou une femme, c’est ta meilleure amie, tu voudrais qu’elle soit plus mais si jamais elle ne ressent pas la même chose que toi, quelque chose va se briser et c’est tellement… »

Roland se plaqua contre son casier, dissimulé par la porte du sien, les yeux fermés, le cœur serré. « Tellement hors de question ! »

Il inspira et regarda son casier. « Et puis troisième chose : Elle doit se douter que tu fricotes avec d’autres garçons. Dans ta tête, tout est clair, mais c’est une femme. Les femmes ne comprennent pas qu’on ne choisisse pas, qu’on soit trouble et indécis. Elles veulent de la stabilité. Un homme qui joue sur deux tableaux, c’est un homme à qui on ne peut pas faire confiance. Quand bien même quelque chose se passe entre vous, ce ne sera jamais une relation normale… »

Il essuya son début de larmes. « Et tu devrais arrêter de gamberger là-dessus et te concentrer sur tes études. »

Rachel inspira. « Je sens bien qu’il me regarde. Je me sens tellement protégée quand il me surveille, quand il me conseille, juste quand il est à mes côtés… »

Elle secoua la tête. « Oublie-le, tu es hors de son radar. »

***

Etienne Smirnoff avait également amélioré le système de voyage itinérant. Il avait en effet compris que les choses seraient bien plus simples pour tout le monde si les élèves avaient la possibilité de se mettre d’eux-mêmes en binôme. Roland et Rachel s’étaient tout naturellement mis ensemble.

- Tu es sûr que ça ne t’embête pas ? demanda Rachel.
- Non, pourquoi ça m’embêterait ? Papa m’a dit que tous ses voyages itinérants auraient été plus faciles si ses élèves s’étaient mieux entendus dès le départ, et plus profitable pour les élèves. Donc c’est tout bénef !

Rachel ne put qu’acquiescer. « La jeune Rachel H. et son meilleur ami homo, oui, allons-y. »
Roland inspira. « Je vais être avec elle en permanence, ça va forcément déraper, je ne pourrais pas me contrôler… »

- Et ton frère ? demanda Roland.

Rachel désigna une place dans la salle. Malcolm était avec un jeune homme blond de sa classe.

- Un de ses potes ? s’étonna Roland.
- Un certain Théodore, ça arrive qu’il vienne à la maison, c’est un cliché de sportif, je t’avoue que je ne lui parle pas beaucoup.
- Hon.
- Et surtout je ne vois pas ce que mon frère lui trouve.
- L’amitié, c’est parfois bizarre… je suppose…

Rachel regarda Roland, intriguée par sa formulation, mais elle choisit de ne pas relever.

Un professeur arriva avec trois autres dans la salle d’attente des voyages itinérants de l’académie de Voilaroc. Jeune prof d’une bonne grosse trentaine d’années, le cheveu légèrement grisonnant aux tempes, barbe de trois jours, regard bleu lumineux. Imper rouge cuivré du plus bel effet, fermé en haut, comme une cape, et il ne portait pas les manches, en effet. Pull et pantalon noirs.

- Bonjour, Vernon Hartman. J’appelle le binôme 184, Roland Smirnoff et Rachel Heine.

Les deux élèves se levèrent et prirent leur bagage, prêts à suivre leur professeur.

***

La petite troupe sortit de Voilaroc. Le professeur avait été quelque peu silencieux sur le chemin. Rachel et Roland marchaient derrière lui.

« Il a l’air chelou, j’espère qu’on est pas tombés sur un tueur… » songea Roland.
« Il a l’air tordu, j’espère qu’on est pas tombés sur un violeur… » songea Rachel.

A la sortie de la ville, sur la route menant vers l’ouest, Vernon inspira et s’assit sur une pierre. Roland et Rachel se regardèrent. Ils posèrent leurs sacs et regardèrent leur professeur. Il les regarda.

- Hm. Ok. Euh…
- …
- …
- Je suis un peu timide…
- …
- …
- … alors pour faire les présentations, je vous propose de vous battre avec moi…

Les deux élèves se regardèrent. Vernon gratta sa barbe de trois jours. Rachel était intriguée par sa voix mielleuse.

- Quand j’ai vu vos noms, Smirnoff, comme le grand chercheur, et Heine comme la famille noble…
- Oh, pas si noble que ça… marmonna Rachel, badine.

Vernon se figea, apeuré.

- J’ai dit quelque chose de mal ?! J’ai gaffé ? Han non ! P-Pardonnez-moi, jeune fille, je voulais juste dire…
- Qu’on était deux noms impressionnants, oui j’avais compris.
- … enfin voilà, disons que ça me colle une de ces pressiooons… geignit Vernon en se saisissant les tempes.

Roland et Rachel se regardèrent, un peu intimidés.

- Du coup j’aimerais bien qu’on se batte histoire de briser la glace…
- On pourrait aussi juste se présenter… marmonna Roland.
- Euh… bah oui, tu as raison… euh… bah… commencez ?

Roland et Rachel se regardèrent de nouveau. Blanc. Vernon avait tendu la main vers Roland, puis la tendait vers Rachel. La gêne s’installait à mesure que les deux adolescents ne répondaient pas et se regardaient, puis regardaient leur professeur.

- J’avais envie de me battre contre lui, moi ! souffla Rachel.
- Moi aussi mais c’est un peu radical pour briser la glace, non ?
- Ouais mais c’est un prof, ça aurait été intéressant.
- On aurait perdu, certes, mais d’un autre côté, on aurait pu le tester ! admit Roland.
- Bah tu vois.
- Ok, on se bat !

Vernon regarda Roland et Rachel.

- D’accord. Ça me va, je suis pas doué pour les présentations.
- Vous êtes professeur de quoi si c’est pas indiscret ? demanda Roland.

Rachel regarda Roland, aussi intrigué qu’elle par le personnage.

- Moi, euh… je suis prof de physique des attaques. C’est une matière fascinante. On dit souvent de nous qu’on est des profs bizarres mais on est juste passionnés par ce qu’on fait.
- Vous avez quel âge ? demanda Rachel.
- Trente-sept ans.
- C’est quoi vos Pokémon ?
- Haha ! Vous n’avez qu’à me défier !

Roland inspira. Rachel cligna des paupières. Leur professeur en faisait des tonnes.

- … habituellement les jeunes m’aiment bien !
- Dans quel contexte ? demanda très sérieusement Roland.
- Je sens que tu m’aimes pas, toi !
- Je n’ai aucun avis sur vous, ça fait à peine une demi-heure qu’on se connait !
- Et toi… tu me regardes bizarrement !
- J’vous trouve beau !

Vernon rougit. Roland regarda Rachel qui haussa les épaules.

- Quoi, c’est vrai ?
- Ce… n’est pas très pertinent… admit Roland.
- O… On va se battre, ce sera plus probant que faire des présentations ! Je trouve. Je pense.

Vernon s’éloigna des deux adolescents.

- Bon. Vous pouvez vous mettre à deux sur moi… Vous avez combien de Pokémon ?
- Trois ! marmonna Roland.
- Un, souligna Rachel.

Vernon sembla intrigué.

- Trois c’est beaucoup, un c’est peu. Généralement les jeunes de vos âges ont deux Pokémon minimum. L’académique et un qu’ils ont capturé. Pourquoi vous n’avez jamais capturé de Pokémon, jeune fille ?

Rachel sembla gênée.

- Parce que… rien ne m’y oblige ?!

Vernon regarda en l’air en agitant la tête.

- Moui, c’est une réponse.
- C’est la mienne.
- Je pense surtout que vous avez commencé intensivement le dressage assez tard. A l’inverse, monsieur Smirnoff, né dans une famille d’éminents dresseurs, a, je suppose, un Pokémon récupéré avant son Pokémon académique, un Pokémon académique et un autre Pokémon capturé ensuite.

Roland s’étonna.

- Tout…à fait ! Pour nous deux.
- Oui, en effet, bien deviné… ou pas ?
- Je n’ai pas lu vos dossiers ! se dédouana Vernon. J’ai vu les noms, j’ai flashé !

Roland et Rachel plissèrent les yeux. Vernon agita les mains.

- Je veux dire, je veux dire euuuuuh j’ai vu… l’occasion… d’enseigner à deux grands noms… pour améliorer mon CV ! Voilà ! Je…

Vernon serra les dents, honteux.

- Je suis un immonde arriviste !! Pardonnez-moi !!

Roland inspira, lassé.

- Vous avez l’air sympathique, mais également…

Roland sortit Morphéo.

- … un peu irritant !
- Ouais, je suis un peu d’accord, votre numéro n’est amusant…

Rachel envoya Candine.

- … que cinq, dix minutes !

Vernon se figea. Roland et Rachel se tenaient prêts. Vernon hocha la tête, compréhensif. Il dirigea sa main vers sa ceinture.

- Vous vouliez des présentations, très bien. Je suis Vernon Hartman…

Il envoya un Ursaring. La créature, menaçante, écarta les bras et les griffes. Roland et Rachel semblèrent impressionnés.

- … surnommé « L’Ours » dans la faculté de Joliberges où j’exerce.
- A cause de votre Ursaring ? demanda Rachel, malicieuse.

Vernon toussota. Ursaring chargea vers les adolescents.

- Morphéo, Zénith !

Morphéo prit sa forme Solaire. Vernon grimaça.

- Pas de surnom ?! BRAUN ! TRANCHE !

Ursaring chargea vers Candine. Il rasa le sol de sa griffe, soulevant la poussière.

- Candine, attaque…

La Tranche frappa le Pokémon Plante de plein fouet, projetant la créature au loin.

- CANDINE !!
- Pas de surnom, c’est pas cool ça ! souffla Vernon. Bon, jeune fille, c’est fini pour vous. C’est le problème quand on n’a qu’un seul Pokémon, une fois qu’il est battu, c’est fini !

Rachel était médusée. Candine retomba derrière elle, ce qui la réveilla.

- C… Candine, oh non !!
- Au garçon mainten…

Vernon repéra Roland, furieux.

- Comment avez-vous OSÉ !!! LANCE SOLEIL !!!

Morphéo frappa Ursaring en plein ventre. Vernon regarda son Pokémon contenir l’attaque, et à la surprise de Roland, s’approcha du rayon concentré, partant de Morphéo et impactant Ursaring en plein bide.

- Hmmmmmm… c’est bien maîtrisé mais c’est trop diffus. Il n’est pas habitué à le lancer à pleine puissance. Et puis…

Vernon approcha de Morphéo, la bouche ouverte, qui crachait le rayon à distance de sa bouche.

- Un Lance-Soleil par la bouche, si je puis me permettre, c’est moins puissant qu’un Lance-Soleil tombé du ciel.
- Je… c’est trop technique pour m…
- Je sais. Braun, attaque Close Combat !

Ursaring avança en luttant à mains nues contre le Lance-Soleil. Roland était tétanisé. Il regarda vers Rachel. Vernon restait à côté de lui.

- Si tu veux la défendre, il faut être moins offensif, plus retors. Je sens que ce n’est pas ton style, mais je sens que tu n’es pas non plus en état de te maîtriser.

Roland regarda le professeur qui acquiesça alors qu’Ursaring atteignait Morphéo.

- Braun, Séisme.

Ursaring leva une patte vers le ciel. Le sol trembla, ce qui fit presque chuter Roland, obligea Rachel à porter et couvrir Candine. Morphéo s’écroula, assommé.

- Voilà. Les présentations sont faites…

Roland était à genoux, sous le choc. Rachel sanglotait contre Candine, un peu plus loin. Vernon les observa tous les deux et hocha la tête en souriant.

- Wow. Ça va être intéressant.

***

Vernon entra dans le centre Pokémon le plus proche en sifflotant l’air typique qu’on jouait dans le hall.

- J’adore cette musique. Lala-lala, la-lalala ! Pas vous ?

Roland gardait la tête baissée, l’esprit rempli de culpabilité vis-à-vis de Rachel. Laquelle tenait sa Candine dans ses bras, encore choquée.

- Aaaaaaaah non, faut pas le prendre comme çaaaa, rhaaan… Bon attendez-moi ici…

Vernon approcha du guichet du centre. L’infirmière mâchait un chewing-gum.

- Bonjour, professeur Vernon Hartman, je suis en voyage itinérant, j’aimerais savoir si je pouvais loger avec mes deux élèves.
- J’peux voir votre carte dresseur ?
- … je peux vous montrer ma licence de prof à la place ?
- Nan, j’ai besoin de votre carte dresseur.

Vernon inspira et sortit la carte qu’il donna à la jeune femme qui regarda Vernon, puis la carte, puis Vernon. Elle eut un sourire narquois.

- C’est une blague ?!
- Non.
- J’sais même pas si j’peux accepter ça.
- Vous faites comme vous voulez mais vous prenez au moins les deux petits en charge, soin des Pokémon, repas et logis.

L’infirmière inspira.

- Ouais. Mais vous, j’vous sers pas.
- Ca me va, j’ai l’habitude. Bon, les enfants, vous allez pouvoir faire soigner vos Pokémon par l’infirmière !

Roland et Rachel portèrent leur Pokéballs à l’infirmière qui les regarda avec dédain.

- Moi, je serais vos parents, les mômes, je porterai plainte, c’est pas normal qu’on vous mette en voyage avec un truc pareil.

Roland et Rachel ne relevèrent pas. L’infirmière plaça les Pokémon sur sa table et observa l’écran.

- Y’a pas besoin de soins approfondis, ça prendra une quinzaine de minutes. Leveinard, tu me sers deux repas pour les gosses et tu prépares deux lits. Vous avez la table six.

Vernon hocha la tête, ne remerciant pas l’infirmière.

***

- Vous êtes à l’écoute, j’ai votre attention ?

Roland hocha modestement la tête. Rachel mangeait mécaniquement ses frites, déprimée.

- Bon, j’y suis allé un peu fort, désolé, mais je tenais à ce que les choses soient claires. J’ai choisi vos dossiers parce que vous êtes deux noms connus, mais aussi parce que je voulais que les deux noms « connus » aient un enseignement de qualité. Je ne vous garantis pas, bien sûr, que vous serez aussi forts que moi au terme de ce voyage, mais vous pourrez atteindre ce niveau à mon âge, au moins.

Roland commença à manger et remarqua enfin que le prof n’avait pas de repas.

- Roland, tu es trop impulsif. Cela influence ton rythme en bien et en mal. En bien parce que face à une situation extrême, tu vas faire preuve de rapidité d’exécution MAIS en temps normal tu prends les choses avec calme et tranquillité. C’est bien, mais du coup tu n’as pas d’équilibre, de rythme normal d’exécution. Il faut travailler ça. Rachel…

Elle frissonna, un peu traumatisée. Vernon se mordilla les lèvres.

- Encore une fois désolé…
- Je sais ce que vous allez dire…
- Quand un dresseur ne possède qu’un seul Pokémon, son niveau de dresseur correspond exactement au niveau de son Pokémon. De fait, ta Candine, en pleine croissance, fait de toi une dresseuse de niveau incomplet, en cours de développement, plus encore qu’un dresseur comme Roland avec plusieurs Pokémon, qui possède un éventail de « niveaux » plus varié.

Vernon croisa ses mains qui montraient respectivement du doigt les deux adolescents.

- Ce que je n’avais pas prévu c’est que Roland allait réagir après ma frappe sur Rachel. Vous êtes amis, je présume…

Vernon regarda les deux jeunes gens qui hochèrent la tête sans se regarder. Vernon inspira.

- Je vois, on… commencera les leçons demain, je ne veux pas vous traumatiser encore plus.
- On n’est pas traumatisés…
- Non, ça va aller… souffla Rachel. Vous n’avez pas de plateau ?

Vernon secoua la tête. Roland tendit ses frites vers son professeur.

- J’ai pas faim, après une telle défaite, je mérite pas de manger…
- Ok, premièrement, c’était pas une défaite, j’ai vingt ans de plus que vous, c’était une démonstration de force, deuxièmement j’ai un casier judiciaire, je n’ai pas le droit d’être servi dans un centre Pokémon.

Roland grimaça. Rachel releva la tête.

- Pardon ?

L’infirmière arriva avec une desserte roulante.

- Vos Pokémon sont soignés, les mômes. Vous, dehors.
- Oui, oui, oui, tout de suite. Ce sont mes élèves, je voulais juste…
- De-hors.

Vernon se leva, les mains dressées devant lui pour le couvrir. Il lâcha cependant un Pokémon : Polarhume. Le Pokémon s’assit dans le box du centre, face aux enfants.

- Mon Pokémon peut rester je suppose ? Pour les surveiller ?
- Ouais, mais vous, dehors.
- D’accord, d’accord. Weiss, tu veilles sur eux. A demain les enfants, reposez-vous bien.

Vernon se dirigea vers la sortie. Polarhume regardait les enfants, la goutte au nez. Roland et Rachel se regardèrent.

- C’était bizarre, nan ? s’étonna la jeune fille.
- Ouais… je savais pas qu’on virait les gens avec un casier… ça va ?
- Oui… devenir prof de combat direct ça semble… moins simple du coup…
- Il a dit que tu étais en cours d’entrainement, c’est normal…

Rachel inspira.

- Tu n’étais pas obligé de réagir aussi violemment…
- J’ai pas réfléchi, c’est… sorti tout seul… ça m’a insupporté qu’il s’en prenne à toi.
- … Je vais me coucher.
- Hm… je suppose qu’il faut que je te suive…

Polarhume hocha la tête. Roland regarda Rachel.

- La prochaine fois, je l’empêcherai de te faire du mal.
- Roland…
- Je les empêcherai tous de te faire du mal.

Rachel inspira. « Pourquoi c’est toujours les meilleurs qui sont gays ? »

***

Roland ne parvint pas à dormir. Rachel, le lit au-dessus du sien, s’était assoupie comme une souche après une telle journée. Il se leva. Polarhume le repéra et se réveilla. Roland grimaça, mais Polarhume se contenta de le suivre. Roland laissa Morphéo pour surveiller Rachel, un peu échaudé par les multiples histoires familiales sur le sujet. Roland sortit des dortoirs et arriva dans le hall. Il aperçut quelque chose par la porte et vit une tente, visiblement établie par le professeur. Il se tourna vers l’infirmière de garde, différente de celle qui les avait servis et alla au comptoir. Une jeune femme noire avec de très beaux cheveux marron dorés. Roland était toujours suivi par Polarhume qui reniflait avec un sifflement en respirant.

- Excusez-moi…
- Oui, il y a un souci jeune homme ?
- Euh non, tout va bien… pour quelle raison une infirmière peut refuser quelqu’un ici ?
- Eh bien, d’abord les criminels, on n’a pas le droit de les accueillir, c’est interdit, les SDF aussi, mais on demande toujours les cartes dresseurs en cours de validité, ou alors les tentatives d’usurpation d’identité…
- D’accord… euh, l’infirmière qui était là avant vous, elle a refusé de servir mon prof et de le faire dormir ici, du coup il dort dehors…
- Ma collègue avait probablement une bonne raison, je suis désolée pour ton professeur mais nous avons des règles strictes.

Roland acquiesça et retourna se coucher, un peu intrigué. « Usurpation d’identité… ? »

***

Le lendemain, le petit groupe s’était posé sur les routes proches de Célestia.

- Bon, premièrement vous allez surnommer vos Pokémon.

Roland leva une main.

- Roland ! désigna Vernon avec emphase.
- C’est pertinent ?
- Oui ! C’est plus sympa quand même !

Roland plissa les yeux. Vernon pencha la tête sur le côté.

- Tu es trop pragmatique, Roland ! Bon, ça permet de forger un lien plus intense avec son Pokémon. Mes Pokémon…

Vernon sortit Ursaring, Polarhume et Pandarbare.

- … s’appellent Braun, Weiss et Schwartz… ce qui signifie Marron, Blanc et Noir en allemand.

Rachel grimaça. Vernon regarda la jeune fille en souriant.

- J’aime bien cette langue !
- C’est la seule raison ? s’étonna Rachel.
- Ma petite amie Amber est allemande ! sourit Vernon.
- Oh.

Vernon regarda Rachel, étonné.

- J’aurais cru que tu serais déçue que j’aie une petite amie, tu as dit que tu me trouvais beau hier !
- C’était avant que vous ne me mettiez une raclée, je ne peux plus vous parler aussi familièrement maintenant…

Vernon se gratta l’arrière de la tête.

- Hhhh, moi qui voulait inspirer de la sympathie à mes élèves…
- J’vous aime bien, hein, juste que…

Rachel s’était repliée sur elle-même. Roland lui tapota le dos.

- Ça va aller. Il est là pour t’entrainer, t’as rien à craindre.
- Je sais, je sais.

Vernon inspira et regarda Rachel.

- Tu veux qu’on décide ensemble du surnom pour ta Candine ?

Rachel regarda Vernon en souriant.

- Me traitez pas comme une gamine que vous auriez engueulé trop fort et que vous emmèneriez au parc d’attractions pour la consoler !
- Ah, je suis pas très subtil, désolé !

Roland sourit.

- Tu penses quoi de « Gambette » ? Pour les jambes. Si elle évolue, elle se battra très bien avec ses jambes !

Rachel haussa les épaules.

- Si vous voulez…
- Cool. Vous savez comment on surnomme un Pokémon ?
- Oui, on lui explique qu’on l’appellera d’une certaine façon à compter de maintenant, le Pokémon prend l’information en compte et ensuite on l’entraine un peu en utilisant le surnom… marmonna Rachel.
- Voilà. Merci de ne pas avoir peur de moi ! sourit Vernon.

Rachel ricana. Roland sourit également. Vernon inspira.

- Et toi, Roland, il faudrait que tu les choisisses toi-même. Si tu établis une connexion plus forte avec tes Pokémon, cela pourrait régler en partie certains de tes problèmes de rapidité d’exécution.

Roland acquiesça. Vernon inspira.

- Du coup on va commencer avec un entrainement de base, que je vous observe et vous évalue un peu mieux, un peu moins brutalement du moins, et à midi, on… essaiera de trouver une sandwicherie ?

Les élèves acquiescèrent.

***

Rachel entrainait Candine pour la faire évoluer en perfectionnant son attaque Ecrasement. Vernon apprenait à Roland les vertus de la sophrologie.

- Ce sont juste des exercices de respiration, mais je veux que tu apprennes à te maîtriser même quand tu t’énerves comme l’autre fois.
- Hm.
- Et j’en reste aux bases parce que si on approfondit, la sophrologie, ça peut devenir un peu bizarre !

Roland sourit, les yeux fermés, les mains sur son ventre.

- Monsieur…
- Oui ?
- Vous avez fait quoi pour avoir un casier judiciaire ?

Petit silence du professeur.

- Un… gros excès de vitesse !
- Vous n’avez pas gagné un concours de mensonge, déjà, ça c’est sûr.

Vernon se mordilla les lèvres. Candine tournoya sur elle-même et réussit à enfoncer le poteau de bois droit dans le sol d’un coup.

- YES !! Monsieur ! J’ai réussi !
- Excellent, Rachel… et maintenant, il suffit d’un entrainement plus classique. Je te laisse à tes exercices, Roland…

Roland inspira. « Sauvé par le gong… »

- Prête, Rachel ?

La jeune femme inspira. Candine se plaça face à elle.

- Prête.
- Je vais juste essayer de l’attraper, il te suffira de m’esquiver et d’essayer de m’attaquer avec Ecrasement.
- Oui !

Vernon hocha la tête.

- Schwartz !!

Pandarbare apparut et bondit vers Candine.

- Projection !!

Pandarbare fonça vers Candine, tentant de l’attraper. Le Pokémon esquiva, sautant habilement. Rachel observa le gros ours noir et blanc. Roland observait d’un œil, prêt à bondir.

Candine esquivait avec habileté. Les grandes pattes de l’ours fondaient pourtant sur le petit Pokémon avec rapidité. Se servant de ses sépales comme d’une hélice, le Pokémon augmentait la détente de ses sauts. Vernon jubilait. « J’adore quand ils suivent mes conseils et que ça marche !! »

Sur le terrain de jeux où ils s’étaient installés, Candine se posa sur une poutre. Pandarbare allait se saisir d’elle, en ligne droite.

- Gambette, Ecrasement !!

Un saut tournoyant mena le Pokémon Plante droit sur la tête du panda géant qui fut repoussé en arrière. Vernon acquiesça.

- Parfait, parfait !

Candine se mit alors à évoluer. Rachel inspira lourdement. Roland arriva à ses côtés.

- C’est le bon moment, apparemment.
- Hm.

Dans un réflexe, Rachel saisit la main de Roland. Le jeune homme rougit violemment. Il accepta cette main. « Elle en a besoin, je suppose… »

Rachel observa Candine se changer en Sucreine. Le Pokémon devint plus grand, plus robuste et bien plus athlétique.

- Wow ! Ça va être intéressant ! s’amusa le professeur.

Rachel lâcha Roland et alla voir son Pokémon qui semblait très satisfait de son évolution. Rachel sembla soulagée. De même, le fait qu’elle n’ait pas trop changé d’apparence la rassurait en quelque sorte.

- C’est bien, maintenant la prochaine étape pour toi, Rachel, ça va être de capturer un Pokémon. Tu dois amorcer la construction d’une équipe. Si tu veux devenir professeur de combat direct, tu dois acquérir de la force mais également diversifier tes Pokémon pour éprouver tes méthodologies.
- Hm !
- En tout cas je suis ravi de tes progrès, tu es prête pour le contrôle continu de demain !
- Merci professeur !
- Et toi, Roland, on va continuer ce travail sur le stress.

Roland inspira, pas très enchanté.

- Et ce soir… on va essayer de dormir au centre Pokémon de Célestia comme ça on sera près de l’académie pour votre contrôle et mes rapports.

Rachel et Roland se regardèrent alors que le prof semblait un peu crispé à l’idée.

***

L’infirmier de garde pouffa de rire en regardant la carte dresseur de Vernon qui garda le même air lénifiant face à la situation.

- Ouais, ok… vous pouvez loger ici… j’peux la montrer à des collègues ?
- Nan, gronda fermement Vernon en tendant la main.
- D’accord, mec. Enfin, mec…

Vernon reprit sa carte. Roland et Rachel comprenaient mal le souci que les infirmières et infirmiers avaient avec sa carte.

- Il vous a accepté, lui… marmonna Roland.
- Il était moins regardant sur mon casier ! tenta Vernon.
- Hm…

Ils s’assirent à un box du centre. Vernon désigna Roland.

- Tu es trop curieux !
- Et vous trop cachotier.
- Mais tu peux comprendre que j’ai peut-être une bonne raison de vous cacher des choses ?

Roland inspira et hocha la tête. Rachel le regarda. « Ah bah ça, oui, il peut comprendre… »

- Merci. Bon, vous faites des progrès assez rapides, je pense qu’on est bien partis. Vous êtes deux jeunes gens intelligents, si vous trouvez quoi que ce soit de contestable dans mon enseignement, n’hésitez surtout pas…
- Non ça va… marmonna Rachel.

Roland inspira, moins unanime.

- J’ai passé la semaine à faire des exercices de respiration…
- Ton manque de contrôle émotionnel est un vrai problème.
- En attendant j’ai été obligé de travailler ma théorie tout seul...
- J’ai cru remarquer, et Rachel m’a dit que tu étais très indépendant pour ce qui était de la théorie.

Roland regarda Rachel, un peu énervé. Vernon agita la tête.

- Et j’ai vu ton dossier, donc je sais que tu as sauté une classe.
- Et en quoi est-ce pertinent…
- Je ne pense pas avoir quoi que ce soit de profitable à t’apprendre, tu as déjà les bases et les acquis de progression, Rachel est plus fragile, elle a débuté en tant que non-combattante, tes conseils lui ont été profitables mais elle a besoin d’un peu plus de suivi…

Cette fois c’est Rachel qui était énervée.

- Fragile, non mais…
- Je me suis compris ! Ne vous énervez pas sur moi, les enfants… oh non…

C’est un autre infirmier qui arriva pour servir leur repas. Il regarda Vernon en ricanant. Le professeur leva les yeux au ciel. L’infirmier servait les plateaux en fixant Vernon qui détournait le regard.

- Merci…
- Merci.
- Merci !
- De rien, messieurs-dames. Pfffft !

Vernon baissa la tête vers son plateau. Roland haussa un sourcil.

- C’était quoi, son problème ?!
- Rien, rien, les gens sont bêtes… Je disais donc… euh…

Vernon agita une main, défait.

- Je disais rien, mangez, les enfants.

Rachel plissa les yeux.

***

- Le prof est bizarre, non ?

Rachel inspira.

- J’ai plus l’impression que ce sont les autres adultes qui sont bizarres avec le prof. Ça doit être un truc qu’on ne comprend pas.
- Hm. En tout cas il a pas de casier judiciaire.
- Non bah non, sinon ils lui auraient refait le même numéro que sur la route 217.

Silence. Sur le lit du haut, Rachel soupira.

- Je suis sûre que le prof sait ce qu’il fait avec toi.
- … j’ai pas l’impression.
- Fais-lui confiance.
- J’vais essayer. En tout cas je suis content qu’il t’aide à t’améliorer.

Rachel inspira.

- Roland ?
- Oui… ?
- … ça t’a gêné que je te tienne la main tout à l’heure ?

Petit silence. Roland répondit, un peu gêné.

- Non, non… tu es mon amie, c’est normal ce genre de choses. J’ai bien compris pourquoi tu l’avais fait.
- Je voulais pas te gêner.
- Pourquoi tu m’aurais gêné ?
- Bah devant le prof, tout ça…
- Oh, moi y’a rien qui me gêne, tu sais…
- Mais monsieur a besoin de gérer son stress !
- Oh arrête ! sourit Roland.

Nouveau silence.

- Rachel ?
- Hm ?

Roland pondéra ses mots en regardant les lattes du lit au-dessus de lui. « Elle est tellement proche et pourtant tellement loin… Tu voudrais tellement la rejoindre ou qu’elle te rejoigne… »

- … je suis content de faire ce voyage avec toi, je me sens plus rassuré.
- C’est moi qui devrait dire ça, Roland, c’est moi la fille « fragile » !
- Haha, toi, fragile… Il est un peu maladroit quand même ce prof.
- Oui il me rappelle mon père.
- Ah moi c’est marrant il me rappelle ma mère. Ce même côté malicieux sans en avoir l’air, et puis il a quelque chose d’affectueux.
- Le côté ours ? sourit Rachel dans son lit.
- Non, c’est dans son regard. Il a quelque chose de très doux dans les yeux, c’est assez fascinant je trouve.

Rachel inspira et entreprit de lancer la question qui pourrait amener à ouvrir un débat qu’elle voulait ouvrir. Cesser ce stupide non-dit entre eux. « Maintenant ou jamais, ma vieille. »

- Il t’attire ?

Silence. Gros, gros silence. Rachel attendait une réponse. Roland pondérait juste s’il devait répondre pleinement ou pas. Il inspira, vaincu.

- En quelque sorte, oui, je le trouve attirant. Dans le sens où il ressemble à un idéal de professeur que j’aimerais atteindre.
- Je parlais en tant qu’homme.
- J’avais compris.

Rachel se mordilla les lèvres.

- J’te juge pas, tu sais.
- Je sais. Je me doutais que tu savais un peu, j’ai… jamais vraiment été discret.
- Oui bah oui.
- Mais ça ne change rien entre nous, j’espère…

Rachel ferma lourdement les yeux.

- Non, bah non.
- Cool…
- Bonne nuit Roland.
- Bonne nuit Rachel.

Roland s’endormit, soulagé de s’être un peu confié.
Rachel s’endormit, le cœur cassé en deux.

***

Le contrôle continu du lendemain se passa dans une ambiance un peu morose pour la demoiselle et assez relax pour le monsieur.

- Smirnoff, les types que le type Feu encaisse sans problème ?
- Acier, Fée, Feu, Plante, Insecte.
- Un point. Heine, je veux les types qui battent le type Glace.
- Combat, Roche, Acier…

Rachel s’arrêta là, haussa les épaules.

- Un demi-point.

Rachel plissa les yeux. Roland la regarda en se désignant.

- … le type feu !
- Bah oui !
- Merde… souffla la jeune fille, un peu démotivée.
- Ça va, ce matin ?
- On est dimanche, je dois être un peu crevée, j’ai besoin de décompresser, cette semaine entière de cours, là…
- On en a pour deux mois, Rachel…
- Je sais. Ça va aller, t’inquiète…

Elle semblait un peu énervée. Il tenta de lui attraper la main mais elle l’écarta rapidement, ce que Roland prit assez mal. Il resta dans son coin et la laissa dans le sien.

***

Vernon tapait ses rapports dans la salle avec les autres professeurs. Une intendante arriva pour lui. Bonne vieille dame à lunettes un peu ronde.

- J’ai un souci avec votre dossier.

Vernon inspira.

- Voilà ma licence de professeur, avec mon prénom changé.
- … oui mais ça ne correspond pas à la carte dresseur…
- Enregistrez simplement ma présence, Vernon Hartman, c’est marqué sur tous mes papiers administratifs...
- Sauf votre carte dresseur, moi je vois toujours Débo…
- Je SAIS ce qu’il y a marqué sur ma carte dresseur, inutile de l’énoncer à voix haute, sur ma licence de professeur il y a marqué « Vernon Hartman », vous me désignez par ce prénom, compris ?

L’intendante siffla.

- C’est pas la peine de vous énerver…
- Vous faites semblant de pas comprendre !
- Oui bah moi au moins, je fais pas semblant d’être un homme, mademoiselle…

Vernon manqua de s’écrouler sur son clavier. L’intendante repartit comme elle était venue. Les autres profs regardaient Vernon du coin de l’œil. Le professeur s’efforça de finir rapidement ses rapports.

***

A la pause de midi du contrôle continu, Roland et Rachel étaient clairement en froid. Ils retrouvèrent Vernon qui était assis sur un banc dans le hall.

- Vous avez déjà fini vos rapports ? s’étonna Rachel.

Vernon inspira.

- De quoi je me mêle ?
- … pard…
- Non mais dites ! gronda Roland.
- C’est vraiment pas le moment, Roland, s’il te plait… souffla le prof, un peu sur les rotules.
- Vous avez pas à lui parler comme ça ! Excusez-vous !

Vernon regarda Roland droit dans les yeux.

- Excusez-vous !!
- Roland, c’est pas la peine, il est de mauvaise humeur, c’est pas grave…
- Non, il a pas à te parler comme ça !
- Je maintiens mes propos, gronda Vernon.

Roland se mit à bouillonner. Vernon le regarda fixement. Rachel s’éloigna, gênée.

- J’vous permets pas !
- Vas-y, vas-y, laisse échapper la colère, c’est bon de se mettre en colère.
- J’vous permets pas de lui parler comme ça !!
- Mais arrête Roland enfin ! grommela Rachel.
- Et après ça tu vas me dire que t’as pas besoin de gérer ton stress, hein ? harangua Vernon, encore vexé de l’incartade de tout à l’heure.

Une porte coupe-feu les interrompit. Un Pokémon s’échappait. Un Vipélierre. Roland, Rachel et Vernon se tournèrent vers lui. La petite créature semblait s’échapper. Elle traversa le hall et rejoignit le couloir face à sa porte. Le trio se regarda.

Deux laborantins arrivèrent. Vernon plissa les yeux.

- Vous n’auriez pas vu un Vipélierre ?
- Il a grimpé les escaliers…
- La serre sous la coupole de l’académie, mais bien sûr ! souffla un scientifique.
- C’est horripilant, ces transferts de matériel scientifique… grommela l’autre. Merci monsieur !
- De rien…

Les blouses blanches montèrent les escaliers. Vernon se leva.

- Vous me suivez ? Petit cours supplémentaire du dimanche.
- Vous ne vous êtes pas encore excusé !
- Mais laisse ! souffla Rachel.
- Rachel, je suppose que tu ne veux pas d’un Vipélierre, tu as déjà un Pokémon Plante…

Rachel s’étonna.

- Euh, bah non en effet…
- Bien. Roland, il est pour toi. Suivez-moi.
- Monsieur, on est censé manger… marmonna Rachel.
- Eh bah vous mangerez vite !

Vernon prit la porte que le Vipélierre avait prise. Ils se retrouvèrent dans un couloir vide. La porte d’une des salles était entrouverte.

- Il a été se cacher là…
- Elle. C’était une femelle, marmonna Roland.
- On s’en fiche… souffla Vernon.

Ils entrèrent dans la salle. La créature était blottie contre le bureau du professeur, au bout de la pièce.

- C’est une salle de travaux dirigés… marmonna Rachel.
- Pourquoi il a fui ? demanda Roland.

Vernon inspira.

- Les laborantins qui restent souvent le dimanche pour bosser en faculté s’occupent de vérifications préliminaires au transport de Pokémon académiques ou, comme ça a l’air d’être le cas ici, de Pokémon destinés à un professeur dans un laboratoire de hameau. Il appartient à chaque académie d’être la plus scrupuleuse possible lors du transport de ces Pokémon précis. Ce Vipélierre est probablement destiné à être refilé à un dresseur débutant de Renouet.
- Pourquoi était-il hors d’une Pokéball ? demanda Rachel.
- Parce que nos chers laborantins, avides de devenir les nouveaux Chen, Orme, Seko, Sorbier, Keteleeria, Platane ou Euphorbe, se font un devoir de faire un check-up complet à ces créatures voire parfois, en vertu de juteux contrats avec des laboratoires pharmaceutiques « côtés » de tester de nouveaux médicaments sur eux afin d’en constater les effets latents. C’est strictement interdit, ça peut mener à un décès prématuré. On a eu de nombreux cas de Pokémon académiques transportés frauduleusement par ce biais et qui sont morts aux alentours de l’âge de 17, 18 ans. C’est trop jeune pour un Pokémon, ils ont à peu près la même durée de vie que nous. Voire plus. On s’égare.
- Ce Vipélierre va mourir alors ? geignit Rachel.

Vernon secoua la tête.

- Mais non, ma puce, ce dont je parle est purement hypothétique. Roland, si tu veux bien…

Roland regarda le prof.

- Vous étiez en colère, tout à l’heure…
- Ouais. Mais j’m’excuserai pas, j’avais mes raisons.

Roland s’avança et sortit Têtarte. Vipélierre se redressa, apeuré. Vernon regarda Rachel, embarrassé.

- Vous excusez pas, je comprends. Ma mère m’a dit un jour : il vaut mieux parfois ne pas juger les choses avant d’en avoir parlé avec le principal intéressé. Je ne vous juge pas, et si un jour vous voulez m’expliquer, on s’expliquera.

Vernon acquiesça, ému.

- T’es une brave petite, Rachel.
- On me le dit souvent, merci.

Têtarte se contenta d’envoyer une Ecume. L’attaque ensevelit Vipélierre qui couinait, perturbée.

- Monsieur…
- Elle est de trop bas niveau, tu as bien fait. Capture-la.
- … c’est du vol, non ?
- Le prestige de l’établissement va en être terni, certes, mais en ce qui me concerne, j’en ai absolument rien à foutre.

Roland haussa les épaules.

- Ce n’était pas un jugement moral…

Roland lança la Pokéball et captura Vipélierre.

- … simplement un constat. Mon père a fait une thèse sur le vol, très bien documentée. Il y explique notamment qu’il faut distinguer le vol punitif du vol malicieux. Je n’ai pas le sentiment de voler par punition, plus de voler par malice. Je garde cette Vipélierre, elle est à moi.

Rachel sourit. Vernon acquiesça.

- Je suis désolé de la façon dont j’ai parlé à ton amie.
- Oh, ça va, si mes parents m’ont enseigné quelque chose, c’est qu’on ne gagnait que des ennuis à être fâché avec les gens… mais je m’en veux de m’être mis en colère contre vous.
- Je ne t’impose pas ces séances de gestion du stress pour t’embêter.
- Je sais. Je le réalise seulement maintenant, mais… quand j’étais enfant et que je m’entrainais avec mon frère et ma sœur, j’avais cette… rage au fond de moi qui ressortais pendant les combats, et…

Roland inspira.

- Cette… peur de leur faire du mal… c’est comme si il y avait deux Roland en moi…
- Je comprends ça, admit Vernon.
- Un bon Roland, le Roland habituel, et le mauvais Roland, cette… part sombre.
- Il n’y a qu’un seul Roland, celui qui combine le bon et le mauvais pour en faire du meilleur.

Roland acquiesça.

- On sort, sinon ils vont nous soupçonner d’avoir fait quelque chose.

Vernon et les élèves retournaient dans le hall à présent rempli d’élèves.

- Allez manger. Roland, ne sort pas Vipélierre avant ce soir, au centre Pokémon.
- Bien monsieur.

Vernon s’en retourna à la salle des rapports. Les autres profs le regardaient, moitié amusés, moitié dégoûtés. Vernon inspira et alla s’asseoir. Il prit ses écouteurs, pressé d’en finir.

***

Le soir venu, Roland et Rachel racontaient leur après-midi au professeur dans le centre Pokémon de la veille.

- Rachel a gagné tous ses combats et moi j’en ai gagné sept et j’ai fait trois forfaits.

Vernon haussa un sourcil. Roland grimaça.

- L’adversaire était trop fort, j’ai préféré renoncer.
- Toi ? Ça m’étonne.
- Passerouge est encore en cours d’entrainement, du coup j’ai un peu de mal à le lâcher contre certains adversaires.
- Ah. C’est bien que tu aies déclaré forfait alors.
- Et puis je ne pense pas que le KO soit la conclusion logique à tous les matches. Mais bref.
- Je suis fier de toi, jeune fille ! sourit Vernon.
- Je me sens tellement en confiance avec Sucreine, c’est incroyable ! sourit Rachel.
- C’est cool. Il va falloir que tu captures un autre Pokémon et vite, qu’on casse cette belle confiance !

Rachel grimaça. Vernon agita les mains.

- C’est trop artificiel d’avoir un Pokémon, d’être bien avec et de gagner tous les combats. En avoir plusieurs qui soient aussi forts l’un que l’autre, c’est comme ça qu’on éprouve ses capacités et qu’on devient meilleur !
- Oui vous avez raison je suppose…
- Et toi Roland, on va travailler à aplanir tes forces. Que Storm, Tarté, Robin et…
- Lys. Je vais l’appeler Lys.
- C’est trop chou ! sourit Vernon.
- Oui… si vous voulez…
- Je veux qu’ils soient tous de force égale, que tu te sentes aussi à l’aise avec Storm, que tu as depuis près de dix ans, qu’avec Lys que tu as depuis six heures à peine. Tu vois ce que je veux dire ?
- Oui.
- Aussi, est-ce que tu es décidé quant à la ligne évolutive à suivre de ton Têtarte ?

Roland acquiesça.

- Je veux qu’il évolue en Tarpaud. C’est plus simple s’il ne garde que son type d’origine.
- Et puis Tarpaud est plus mignon que Tartard quand même… marmonna Rachel.
- Aussi, oui ! admit Roland.

Vernon plissa les yeux.

- Dites voir, on n’en a jamais trop discuté parce que je n’aime pas trop fouiller dans la vie des gens, vu que j’aime pas trop qu’on fouille dans la mienne, mais…

Vernon désigna ses deux élèves.

- Il y a quelque chose entre vous ?

Roland et Rachel rougirent. Vernon agita les mains.

- Pardon, pardon, mauvaise formulation !! Vous… êtes juste amis ? Formulation tout aussi idiote, pardonnez-moi !!

Rachel et Roland se regardèrent, toujours un peu interloqués face aux inhibitions de leur professeur.

- On est juste amis, monsieur… marmonna Rachel.
- Oui… comme on vous a dit, on se connait depuis tous petits mais on n’est devenus amis que depuis qu’on est dans la même classe.
- Ok ! Pas d’autres amis… ? Camarades de classe ?

Rachel regarda Roland qui plissa les yeux.

- … quoi ?
- Quoi, quoi, tu as plein d’amis toi dans la classe…
- Des gens que je connais de vue ou avec qui je suis dans le même club mais rien de plus, Rachel, enfin, on passe tout notre temps ensemble, tu te doutes bien que je n’ai pas d’autres « amis » à proprement parler !
- Bah, il y a Jamie…

Roland fronça les sourcils.

- Pard… Mais Jamie et moi on a juste été dans le même groupe de travail ! Tu veux qu’on parle d’Amélie, de Paula, d’Anissa, de Charlotte…
- Je n’ai jamais embrassé aucune d’entre elles sur la bouche !

Roland se figea. Vernon agita la tête.

- Faut vraiment que j’arrête de m’intéresser à mes élèves…

Gros blanc à table. Vernon inspira et lâcha Weiss, le Polarhume, à côté de lui.

- Je vais faire un tour dehors, vous réglez ça entre vous, ok ?

Rachel acquiesça. Roland la regarda, embarrassé. Rachel se mordilla les lèvres.

- Je…
- …
- Roland, désolé, j’en avais marre qu’on n’en parle pas, je suis ton amie, tu peux tout me dire…
- Je sais…
- Alors pourquoi… pourquoi ces cachotteries ? J’ai passé du temps chez messieurs Norbert et Lionel, moi aussi, j’aurais pas été choquée…
- Tu peux pas comprendre… sanglota Roland.

C’était bizarre pour Rachel de voir un homme pleurer, la dernière fois, c’était son père en apprenant ce qui était arrivé à Etienne dans la forêt.
Rachel lui prit la main.

- Parle-moi…
- Tu vas me détester, me trouver bizarre…
- Mais non !
- Je veux pas que tu me juges, Rachel, pas toi…
- Je ne te jugerai pas, je veux juste qu’on puisse en parler…

Elle prit un kleenex de table et essuya ses larmes et son nez morveux. Roland sembla attendri par ces attentions de sa part.

- Allez. Dis-moi tout.

Roland inspira.

- J’aime les garçons et les filles.

Rachel haussa un sourcil.

- C’est-à-dire ?
- Bah… un garçon hétéro il va regarder que les filles, un garçon homo, il va regarder que les garçons, moi… je regarde les deux, je suis intéressé par les deux...

Roland haussa les épaules.

- Je suis bi.
- … ah bon ?
- Oui.

Le regard de Rachel s’illumina.

- Bah c’est cool !!
- … ah oui ?
- Bah oui Roland, t’as plein de choix ! On va pouvoir regarder les garçons ensemble, ça va être génial !
- … euuuh…
- Mais attends, je t’ai jamais vu flirter qu’avec des mecs, t’as une préférence ou…

Roland agita la tête.

- C’est plus facile avec les garçons.
- Oui bah oui, je me doute…
- Même si j’ai flirté avec une ou deux filles…
- Ok…
- Dont une qui s’est avérée être lesbienne… Francine, tu vois qui c’est ?
- Petite rousse à lunettes ? Roland, ça se voit de l’espace qu’elle est lesbienne !
- Oui bah quand tout le monde te convient… enfin quand les deux genres te conviennent sans distinction…
- Mais genre tu aimes autant les deux ou… c’est du 70/30…

Roland ricana.

- Mais non, Rachel, j’aime autant… ce que les hommes ont à donner que ce que les femmes ont à donner, c’est une question d’attirance envers la personne.
- Ah, ok.
- Et puis… le problème c’est que… je suis am…

Polarhume éternua. Roland et Rachel le regardèrent. Le Pokémon descendit de sa banquette et se dirigea vers le hall. Roland et Rachel se regardèrent.

- Son maître est en danger, il l’a senti… marmonna Roland.
- Le prof !

Roland et Rachel suivirent l’ourson polaire qui arriva jusqu’au hall. Vernon était aux prises avec les infirmiers d’hier.

- Je n’ai aucun compte à vous rendre, vous êtes immondes !
- Qu’elle dit, heh.
- On veut juste savoir si t’as une bite ou une chatte !

Rachel grimaça. Roland plissa les yeux.

- Mais ça ne vous regarde pas ! Vous avez de la chance que ce soit interdit de se battre dans un centre Pokémon, sinon je vous aurais donné une bonne leçon !!
- C’est quoi, tes Pokémon, un Gardevoir Mâle ?
- Avec un Mackogneur femelle, tu vois le genre ! sourit le collègue.
- Oh, mais vous êtes très drôles, messieurs, félicitations !
- T’as un problème ? Tu veux qu’on vérifie nous-mêmes c’que t’as dans le falzard ?
- M… quoi, non mais…
- T’as raison, j’irais bien tâter c’qu’elle cache, la travelo !
- Ouais pis lui montrer c’est quoi un homme en vrai…
- P… Pardon ?!

Rachel regarda Roland qui fulminait de nouveau. Rachel lui saisit la main pour le calmer. Il la regarda.

- Ensemble ? demanda-t-elle.

Roland prit une vive inspiration, plus apaisé qu’à l’accoutumée.

- Ouais !

La pluie remplit le hall du centre. Vernon se tourna vers les enfants. Roland avait sorti Morphéo.

- R… Les enfants, vous n’avez pas le droit…
- Punition !!

Sucreine usa de ses jolis mollets pour frapper les infirmiers au cou pour les plaquer au sol l’un contre l’autre, dans la flotte.

- HEY !
- PUTAIN MAIS…
- C’EST INTERDIT DE SE BATTRE !

Roland arriva avec Têtarte.

- C’est également interdit de se comporter comme des connards. Vibraqua !

Le Pokémon repoussa les deux infirmiers jusqu’à l’autre bout du hall. Polarhume se jeta dans les bras de son dresseur qui le serra contre lui.

- Vous êtes VIRÉS ! SORTEZ DE CE CENTRE POKEMON !

Roland haussa les épaules. Rachel prit le prof par le bras pour qu’ils sortent. Avant d’aller dehors, Roland tira la sonnette d’alarme, et le centre entier se retrouva plongé sous les jets anti-incendie.

- MAIS MERDEUUUUH !!!
- LA LITERIE !
- ET LA BOUFFE, PUTAIN !

***

Feu de camp, un peu plus loin dans les bois. Vernon était un peu honteux. Roland et Rachel n’avaient pas fini leur conversation. Ils étaient entourés par Ursaring et Pandarbare, craignant d’éventuelles représailles.

- Je suppose que vous voulez des explications…

Roland et Rachel secouèrent la tête. Vernon hocha la sienne.

- Parce que vous avez compris… ?

Roland et Rachel acquiescèrent. Vernon ferma les yeux.

- Je vous assure que je ne vous ferais aucun mal, les enfants.
- On sait, marmonna Rachel.
- On n’a rien dit, ajouta Roland.
- On veut juste que vous restiez notre prof.
- Et la prochaine fois qu’on vous embête, on vous défendra.

Vernon sourit.

- C’est moi qui devrais dire ça. Moi qui devrais vous défendre et pas l’inverse… désolé que vous ayez assisté à… ça…

Roland inspira.

- C’était violent, quand même… alors que vous n’avez rien fait à ces gens…

Vernon haussa les épaules.

- C’est toujours difficile d’être différent face à des inconnus qui n’ont aucune idée de votre situation. Je vis comme un homme depuis l’âge de dix-sept ans. Et à Poképolis, les… gens comme moi… ne sont pas regardés d’un très bon œil…

Rachel se mordilla les lèvres.

- Votre carte dresseur est toujours à votre ancien nom…

Vernon hocha lourdement la tête. Roland se mordilla les lèvres.

- Pardon de vous avoir soupçonné, questionné…
- Oh, tu as été mille fois plus poli que bien des gens, mon petit Roland. Et quant à moi, pardon de… ne vous avoir rien dit, et de vous avoir mis dans cette situation.
- C’est rien.
- Vous n’aviez rien à nous dire ! souffla Rachel.
- Tout à fait, en plus, enfin, à nos yeux vous êtes notre prof, c’est tout.
- Voilà. Qu’est-ce qu’on s’en fiche de votre carte dresseur !

Vernon acquiesça en souriant.

- Bien, on… va monter les tentes, du coup… Et on va devoir bouger si je veux continuer à vous loger dans un endroit correct et à ce qu’on vous serve des repas chauds…
- Hm.
- Ok.

Vernon monta sa tente en essayant d’arrêter de pleurer. « Je m’attendais à garder ça secret pendant trois mois, mais leur réaction, ça, je ne m’y attendais pas… »

Rachel arriva à monter sa tente la première. Roland avait plus de mal.

- Laisse, Roland, on va dormir dans la mienne.

Roland rougit.

- Euuuuh…
- Quoi ? Ça va, c’est bon, c’est pas comme si on n’avait jamais dormi ensemble !
- Dans la même pièce, oui, mais…
- Oh allez fais pas ton timide !

***

Roland et Rachel étaient donc sur le matelas gonflable, dans leurs sacs de couchage respectifs.

- Le prof a rien dit quand on a monté une seule tente… marmonna Rachel.
- Oh, après ce qui s’est passé ce soir, je pense que plus rien ne paraîtra vraiment étrange.
- En effet… sourit Rachel.

Roland inspira.

- Merci en tout cas, de… ne pas me juger.
- Mais non enfin. Tu es mon meilleur ami. Je suis juste contente que les choses soient claires.
- Hm.
- Du coup, le prof est trans-euh…
- Transgenre, Rachel.
- Transgenre, oui, toi tu es bi, et moi je suis la petite hétérosexuelle dans la prairie.

Roland éclata de rire. Rachel rit à sa suite.

- N’importe quoi !
- Bah quoi !
- M’enfin, on s’en fiche.
- Il a vraiment une copine, tu crois ?
- Oui, je l’ai vu l’appeler une fois ! sourit Roland.
- Comment ils font pour…
- Rachel ! gronda Roland en souriant.
- Tu te demandes pas, toi ?

Roland agita la tête. Rachel ricana.

- Je sais que tu es un petit vicieux maintenant !
- Arrête !
- Si, si ! Roland est bisexuel, il aime les garçons et les filles, la tête que ses parents vont faire quand ils vont le savoiiir !
- Je leur ai pas dit… Je sais pas si je devrais en fait… c’est ma vie privée, non ?
- Tout à fait.
- J’ai aucune obligation…
- Nan, aucune.

Roland hocha la tête.

- Je pense pas que ça les gênerait, mais bon…
- Oui, ils ont pas à savoir ça.
- J’avais invité Jamie chez moi, tu sais. Pour le devoir.

Rachel acquiesça.

- J’ai dit à ma mère que c’était un simple camarade de classe. La vérité… sans la vérité.
- Vous êtes sortis ensemble ou…
- Non, non, c’était juste un flirt.
- D’accord.
- J’aurais dû me douter que tu nous avais vus dans le couloir, tu as dû croire que je te prenais pour une idiote…
- Non, je me suis surtout demandé pourquoi tu n’abordais pas le sujet avec moi. Je suis ta meilleure amie quand même…
- C’est pas facile… si j’avais été juste homo, ça aurait été plus simple.
- Ah bon ?!
- Bah oui… Aimer juste les garçons, juste les filles, ça va, mais aimer les deux…
- Mais du coup, tu seras jamais heureux avec une seule personne, tu voudras toujours l’autre côté…

Roland grimaça.

- Bah… si !… je peux tomber amoureux d’une seule personne et vouloir rester avec elle et juste avec elle, bien sûr que si Rachel, je suis comme tout le monde !
- … oui bah oui, pardon… Je dois avoir l’air idiote d’accepter plus facilement le prof transgenre que mon meilleur ami bisexuel !

Roland sourit en haussant les épaules.

- Maintenant c’est toi qui es bizarre !
- Ah non, hé !
- Tu es la petite hétérosexuelle bizarre !

Rachel sourit. Roland sourit. Elle se tourna vers lui pour le regarder.

- J’ai l’impression de vraiment bien te connaître maintenant !
- Ah bon ? marmonna Roland en se tournant face à elle.
- Hm. Comme si tu t’étais ouvert à moi et que tu m’avais confié ton plus grand secret.
- Bah, c’est un peu le cas, en partie.
- Comment ça en partie ?

Roland inspira en regardant Rachel droit dans les yeux. Rachel plissa les yeux, intimidée. Roland se releva sur un coude, sembla pondérer ce qu’il allait faire, et embrassa doucement Rachel sur la bouche. La jeune fille se laissa faire. Roland recula et la regarda.

- Ça, c’est mon plus grand secret.

Rachel regarda Roland, surprise. Elle eut quelques secondes d’hésitation avant de l’embrasser à son tour. Les deux adolescents s’étreignirent avec passion, réalisant d’un coup leurs sentiments respectifs.

Vernon, qui s’était levé la nuit pour aller aux petits coins, entendit bien que ça s’agitait un peu dans la tente. « Normalement je devrais intervenir, mais… nah ! »

***

La dynamique changea un peu les jours qui suivirent.

Vernon continuait à enseigner normalement aux enfants. Mais Roland et Rachel étaient devenus bien plus proches. Vernon leur laissait leur intimité, respectant le fait qu’ils devaient parfois être seuls, manger seuls ou juste avoir du temps pour eux deux, les faisant chaperonner par Polarhume la plupart du temps.

La paix de ces quelques jours fut rompue par l’Inspection Générale Académique Poképolite. Une grande dame avec un chignon châtain. L’air bien coincée.

- Déborah Hartman ?

Vernon grimaça et allait répondre, quand Roland et Rachel montèrent au créneau.

- C’est Vernon, enfin !
- Vous voyez bien que notre professeur est un garçon ! grommela Rachel.

La femme toussota en regardant le professeur.

- Mes… excuses, je présume, votre dossier administratif vous désigne toujours sous le nom de…
- Ma licence de professeur est à jour, la procédure pour changer la carte dresseur est un peu longue…
- En même temps personne n’est censé avoir à le faire, marmonna l’inspectrice. Je me présente : Clarence Tenorman, inspectrice générale. J’ai été appelée pour vous imposer une surveillance de deux semaines suite à un incident dans le Centre Pokémon de Célestia…
- Quoi ?! s’offusqua Rachel.
- C’est lui que vous punissez ? grommela Roland.
- C’est NOUS qui avons défendu notre professeur ! grommela Rachel.
- Voilà, c’est nous qui devons être punis, c’est nous qui avons saccagé le centre Pokémon ! signala Roland en s’interposant entre Clarence et Vernon.

Vernon prit Roland par les épaules et le déplaça de côté.

- Tu es gentil, mon petit, mais laisse les grands parler. J’accepte cette surveillance et je suis désolé d’avoir saccagé ce fleuron de la civilisation célestine qu’est le centre Pokémon de Célestia.
- C’est cela, faites le malin, mademois… Monsieur, pardon… Votre situation civile est un vrai problème pour nos services…
- C’est tout moi, ça, causer des embêtements rien qu’en existant… souffla Vernon, sarcastique.
- Quoi qu’il en soit, même si ce sont vos élèves qui ont commis les atrocités…

Vernon pouffa de rire. Roland et Rachel ne purent réprimer un sourire.

- Hem-hem… Commis les atrocités dont le centre Pokémon a été victime, ils sont sous votre responsabilité, vous devez donc répondre de leur crime.
- Et quel crime ! souffla Rachel, indignée.
- C’est un crime, mademoiselle. Dégrader un bâtiment public Poképolite est un crime, que vous le vouliez ou non.
- Les infirmiers avaient insulté notre professeur ! signala Rachel.
- Votre professeur sait très bien quels ennuis il encourt de par sa situation qui, selon moi, d’ailleurs, devrait l’empêcher d’être aussi proche de deux jeunes adolescents influençables…
- Je préfère devenir comme lui que comme vous…

Clarence toisa Rachel. Elle regardait Roland depuis le début. C’était un jeu. Plus elle serait insolente, plus ça lui plairait, elle le savait. Le regard de Roland était sans équivoque. De la pure admiration teintée d’amour total.

Vernon s’interposa.

- J’accepte votre surveillance. Je vous demanderais simplement de ne pas les embêter tous les deux, que leur voyage se déroule le mieux possible.
- Très bien. Je prépare les formulaires.
- D’accord, d’accord.

Vernon s’éloigna un peu avec les deux jeunes gens.

- Restez discrets quant à votre relation, elle pourrait s’en servir comme prétexte pour vous placer sous un autre tuteur.

Les deux hochèrent la tête.

- Ignorez sa présence, c’est juste un mauvais moment à passer. Elle travaille pour l’Association Pokémon, c’est un organe administratif un peu vieillissant qui gère le système éducatif, elle n’est pas du genre à plaisanter.
- D’accord… marmonna Roland.
- Pardon pour tout à l’heure... geignit Rachel.
- C’est rien ma puce. Qu’elle s’en prenne à moi, c’est normal, je suis le prof et vous me connaissez assez maintenant pour savoir que, heh, j’ai l’habitude !

Roland et Rachel hochèrent la tête en souriant. Vernon avait une main sur une épaule de chacun de ses élèves.

- Mais je ne veux pas qu’elle vous embête. Bien compris ?
- Oui.
- Oui monsieur.
- Bon !

Vernon se releva. Clarence arriva auprès d’eux.

- Bien, vous signez ça et ce sera réglé pour les formalités de ma surveillance.

Vernon s’empara des papiers, à son ancien nom. Il inspira lourdement et signa l’ensemble.

***

Le trio se retrouva à observer une clairière, scrutés à quelques pas de là par Clarence Tenorman.

- Nous y voilà, Rachel.

Un troupeau de Ponyta qui broutait.

- Ces bébêtes sont très présentes à Sinnoh, elles aiment bien le climat général et la topographie. C’est l’occasion pour toi d’attraper un Pokémon.

Rachel inspira.

- Je peux essayer, oui.
- C’est un ordre, jeune fille ! menaça faussement Vernon.

Rachel leva les yeux au ciel et sortit des fourrés pour faire face aux Ponyta. Certains s’enfuirent. Rachel plissa les yeux. « Je ne veux pas des fuyardes… »

Elle sortit Sucreine. Le Pokémon fit face aux Ponyta. D’autres s’enfuirent. Une seule resta face à Sucreine. Elle était plus vigoureuse que les autres. Vernon hocha la tête.

- Elle a attendu de voir quelle Ponyta resterait pour lui faire face. Elle a une âme de guerrière, elle choisit une guerrière, elle a un bon instinct.
- Le meilleur.

Vernon regarda Roland.

- Après ce voyage, il faudra que vous cessiez de vous entrainer ensemble si c’était le cas auparavant.

Roland regarda son professeur qui inspira.

- Quand on aime quelqu’un, on perd toute objectivité, Roland, crois-moi.
- … vous avez peut-être raison…
- Tu pourras la conseiller, mais on ne peut pas aider à progresser quelqu’un qu’on voit comme la meilleure personne au monde.

Roland ne put qu’acquiescer.

- Je comprends.
- Tu as de la chance qu’elle t’accepte tel que tu es, c’est un cadeau formidable dans la vie, ne l’oublie jamais.

Roland regarda son professeur qui pencha la tête vers son élève.

- Là encore, je sais de quoi je parle.

Sucreine attaqua Ponyta à coups d’Ecrasement, sa botte frappant le cheval avec précision. Ponyta répondit avec Flammèche. Vernon serra les dents.

- Les Pokémon sauvages n’ont pas la même notion que nous dans l’usage des attaques, ils se servent d’attaques spéciales même quand leurs statistiques les orientent vers le physique, c’est assez frustrant à voir.
- C’est le professeur de physique qui parle !
- Oui tout à fait ! sourit Vernon en se grattant l’arrière de la tête.

Sucreine esquivait à la perfection et chacun de ses coups frappait Ponyta pour la repousser et contrer ses tentatives d’attaques. Rachel semblait prendre du plaisir à l’affronter. Le Pokémon entama une Roue de Feu bondissante vers le Pokémon Plante.

- Ah, elle a du potentiel ! admit Vernon.
- En même temps elle est restée pour faire face à Rachel, c’est qu’elle est plus douée que ses congénères…
- Gambette, Botte Sucrette !!

Sucreine tourna sur elle-même et contra Ponyta dans sa charge d’un habile coup de pied floral. Ponyta retomba en arrière, sonnée. Vernon fit signe à Rachel de lancer une Pokéball, mais Ponyta s’avança vers elle, sous le regard de Sucreine.

Le Pokémon Cheval Feu replia ses pattes et s’allongea au sol, semblant… se soumettre ?

- C’est quoi cette position ?! s’étonna Roland.
- Certains Pokémon gagnent du respect envers leur dresseur à l’état sauvage, en le combattant. Et de fait, ils acceptent la capture d’eux-mêmes.

Roland agita la tête alors que Rachel captura Ponyta. La jeune fille leva sa nouvelle Pokéball, toute contente. Vernon se releva des buissons.

- Un surnom, jeune fille, tout de suite !
- … c’est vraiment la priorité ?!
- Mais oui enfin !! grommela le prof.

Clarence toussota. Vernon se renfrogna. Roland plissa les yeux, se leva aussi et tendit le doigt vers Rachel.

- Ecoute ton prof, surnomme ton Pokémon ! cria exagérément le jeune homme.
- Vous êtes bêtes les garçons ! Je vais l’appeler Furiosa, d’accord ? Comme la fille dans Mad Max.
- … mais elle s’est soumise quand tu l’as surpassée ! s’étonna Vernon.
- Pis elle était pas si « furieuse »… admit Roland.
- Bah justement c’est mon leitmotiv avec elle, la transformer en monstre !

Vernon et Roland agitèrent la tête. Clarence approcha du groupe.

- En avons-nous fini ? J’aimerais que nous rejoignions un centre Pokémon avant la nuit, j’en ai assez de dormir dehors ou dans des motels.
- Bienvenue dans un voyage itinérant… marmonna Vernon.
- C’est cela, faites le malin…

Roland et Rachel se regardèrent, inquiets.

***

- Y’a marqué que vous êtes une fille…

Vernon avait la tête enfoncée entre ses mains au comptoir. Clarence observait sans sourciller. L’infirmière ne comprenait pas. C’est Roland et Rachel qui montèrent au créneau.

- Qu’est-ce que ça peut faire que ce soit un homme ou une femme, c’est notre prof ! Voici sa licence de professeur ! montra Roland.
- Sa carte de dresseur n’a pas encore été changée, voilà tout, sa licence est à jour, elle ! souffla Rachel.

L’infirmière regarda Clarence qui haussa les épaules.

- Votre centre, vos règles.
- … bah j’sais pas si j’peux vous prendre, vos documents correspondent pas.
- Je suis un professeur agréé, j’ai deux élèves que j’emmène avec moi et à qui j’enseigne, on veut juste se poser, manger, dormir…
- Eux deux et la dame, je veux bien, mais vous…
- D’accord, ça me va.
- Non !

Roland avait tapé du poing sur le comptoir devant une Rachel admirative.

- C’est tout le monde ou personne !
- Petit, c’est le règlement…
- Quel règlement ? Votre règlement qui cautionne une flagrante discrimination ?!
- Tu es trop jeune pour comprendre…
- C’est pas un bout de papier qui définit qui on est ! Vous n’êtes pas qu’une infirmière, vous faites autre chose dans la vie, eh bah mon prof c’est pas juste un nom ou une lettre à côté de « sexe » sur sa carte dresseur !!
- Roland, c’est pas la peine de… geignit Vernon, embarrassé.
- C’est tout le monde ou personne ! répéta Roland.
- Voulez-vous bien cesser de faire l’enfant ?

Roland regarda Clarence qui regarda l’infirmière.

- C’est bon, madame, nous prenons les places, madem…

Vernon lança un regard agacé à l’inspectrice qui se rectifia.

- Monsieur Hartman ira dormir dehors.
- Ça me va… souffla le professeur, résigné.
- Mais non ! grommela Rachel.

Roland se mordilla les lèvres et regarda Rachel.

- Pardonne-moi.
- Hm ?!

Roland sortit sa carte dresseur.

- Madame l’infirmière, regardez MA carte dresseur !

L’infirmière regarda la carte et fit de gros yeux. Roland hocha la tête.

- Le fils de qui vous savez. Si vous refusez mon prof, j’appelle mon père.

L’infirmière grimaça et regarda Clarence qui inspira. Rachel attrapa la main de Roland, très admirative. L’infirmière leva les mains.

- C’est bon, vous pouvez rester ici…
- YAY ! cria Rachel en se serrant contre Vernon.

Le professeur sourit, touché.

***

- C’était très inconvenant, je tiens à le dire. Vous n’êtes pas censés vous adresser ainsi à des membres de l’association Pokémon. Si la Mère Joëlle entend parler de cette histoire, vous allez passer un mauvais quart d’heure, Smirnoff ou pas !!

Rachel, à côté de l’inspectrice et face à Roland, était complètement subjuguée par son petit copain. Roland regarda Clarence, pas impressionné pour deux sous.

- Vous voulez dire cette histoire où une infirmière refuse un professeur pour un motif ridicule ?

Vernon inspira.

- Elle a en partie raison, c’était un peu radical de te servir de ta connexion avec ton père pour… moi…
- Pardon, j’ai hésité… mais…
- Tu l’as fait pour quelqu’un d’autre, c’était honorable de ta part, c’est si tu l’avais fait pour des motifs égoïstes que ça aurait été contestable ! assura Rachel.
- C’était gentil, en tout cas, un peu embarrassant mais gentil… admit Vernon.
- Et vous, aussi, défendez-vous, révoltez-vous, c’est pas normal que les infirmiers se comportent comme ça avec vous ! souffla Rachel.
- C’est le règlement ! somma Clarence. Les infirmières sont en droit de refuser quiconque leur semble suspect, et une personne dont l’identité n’est pas claire ou vérifiable est quelqu’un de suspect !

Vernon inspira. Roland secoua la tête, abasourdi par ce qu’il entendait. Rachel souffla. Clarence reçut les repas avec tous les honneurs.

- Quoi qu’il en soit, après une semaine avec vous, je peux délivrer un premier bilan.
- Comme j’ai hâte de ne pas entendre ça… marmonna Vernon en commençant à manger.
- Je pense que vous ne devriez plus faire de voyages itinérants, vous causez des tas de situations problématiques pendant le cheminement et je pense que les élèves en pâtissent.

Vernon regarda ses élèves. Roland acquiesça.

- Absolument d’accord, j’ai beaucoup progressé sur le plan humain, je me contrôle mieux et j’ai cru comprendre que mes contrôles continus se passaient plutôt bien.

Rachel inspira elle aussi.

- Pareil, je n’ai perdu aucun combat en contrôle continu, j’ai cimenté mon ambition de devenir professeur de combat direct, tant dans ma progression personnelle qu’en voyant mon professeur exercer, et j’ai réussi à combler mes lacunes de départ.
- On pâtit vraiment de ce professeur.
- Je dirais même plus, il a une mauvaise influence sur nous ! ironisa Rachel en regardant l’inspectrice.

Clarence inspira.

- Par ailleurs, vous ne les tenez pas suffisamment bien, ils sont terriblement insolents.
- Je n’ai pas à les tenir, madame.
- Oh que si. Dois-je vous rappeler que c’est eux qui ont provoqué l’incident du centre Pokémon qui explique ma présence ici ?
- De leur propre initiative.
- Vous auriez dû les en empêcher voire les sanctionner or je ne vois aucune trace de cela dans vos rapports – bien rédigés au demeurant, c’est au moins quelque chose à mettre de votre côté.
- Je ne suis pas leur père. Roland est impulsif et fort en gueule mais il est suffisamment intelligent et bien éduqué pour savoir quand il va trop loin et reconnaître ses torts. Rachel est plus mesurée et plus mature que lui, elle doit clairement devenir plus indépendante, mais tout comme Roland c’est une jeune femme intelligente et humble. Je sais pertinemment que je n’enseigne pas à n’importe qui, madame Tenorman, je prends mon rôle très au sérieux, et quant à ma situation personnelle, je…

Vernon souffla, regarda Rachel et se tourna vers l’inspectrice.

- … vous fais remarquer, et j’ose espérer que ce sera ajouté à votre inspection, que les deux infirmiers du centre Pokémon de Célestia ont, devant mes élèves, menacé de me violer.

L’inspectrice se figea.

- Ce qui, je suppose, est une réaction normale à ma situation.
- … v… vous conf… confirmez ?
- Oui madame.
- Tout à fait… marmonna Rachel.
- … Arceus tout puissant…
- Je sais que ma situation est administrativement un problème, surtout pour… vos services qui… je n’irais pas jusqu’à dire qu’ils sont inertes, mais disons qu’ils ne s’adaptent pas beaucoup, mais je peux vous assurer que ce n’est pas moi qui pose problème, c’est plutôt les réactions autour. Si les infirmières des centres Pokémon ne faisaient pas tout un pataquès d’une simple carte dresseur, vous n’auriez même pas eu à vous déplacer.

Clarence inspira, blême.

- Si cela venait à s’ébruiter, ce serait un scandale terrible pour l’Association !
- Eh bah on fait un marché, vous me laissez exercer tranquille et je me tais en retour.

Clarence ferma les yeux, vaincue.

- Il n’empêche que…
- Teuh-teuh-teuh-teuh. Vous me laissez tranquille.

Clarence se tut. Roland et Rachel mangèrent, fiers de leur professeur.

***

Clarence n’était plus là le lendemain, écourtant d’une semaine sa surveillance. Elle avait laissé une copie de son rapport : Positif, sans suite.

Vernon en fut éminemment soulagé et les semaines suivantes n’en furent que plus détendues.

- Et voilà…

Vernon posa la Roche Royale sur la tête de Têtarte, entre ses yeux. Le Pokémon en sembla ravi.

- Tu es sûr que c’est le bon moment ? demanda Rachel.
- Oui. Avec une évolution de ce type, vaut mieux s’y prendre en amont.
- Par chance pour nous, la région Sinnoh est riche en vieilles pierres…

Le groupe était à Vestigion et sortait tout juste des souterrains où le professeur, muni d’un Explorakit, avait pu déterrer l’objet tant convoité.

- Et comme ça on n’a rien eu à payer ! sourit Roland.
- Oui c’est un peu ce qui m’embêtait aussi, le marché des objets évolutifs est une vraie plaie… admit le prof.
- Vous allez rendre l’Explorakit à ce vieux monsieur ? demanda Rachel.
- Bien sûr, je n’ai aucune intention de continuer à déterrer ces stupides gemmes…

Le vieillard arriva justement peu après l’évolution de Têtarte. Roland caressait son nouveau Tarpaud.

- Je vais l’appeler « Potard ».

Rachel plissa les yeux.

- C’est moche. Je te quitte !
- N’importe quoi… sourit Roland.
- Ce voyage est génial en tout cas, on découvre plein de trucs, on apprend plein de choses et…

Roland regarda Rachel qui sourit en lui prenant la main.

- C’était lourd quand il y avait l’inspectrice… marmonna Roland.
- Hm. Mais ça nous a aussi permis de voir qu’on pouvait rester discrets.
- Toi aussi, tu commences à penser à l’après ?
- Hm… souffla Rachel, embêtée d’avance.

Le vieil homme approcha de Vernon.

- Oh, vous m’avez ramené des gemmes !
- Oui, en effet…
- Oh bah c’est bien gentil de votre part.
- Oh vous savez…
- Je me doute bien que vous n’avez pas envie de m’en déterrer plus…
- Euh, bah, nooon… geignit Vernon, embarrassé.
- Ce n’est pas grave. Au moins vous ne vous êtes pas enfuis avec l’Explorakit comme certains…

Vernon agita la tête. « J’aurais pu le faire mais bon, pas envie d’avoir une autre inspectrice aux fesses… »

- Je tiens à vous faire un cadeau !
- Oh c’est vraiment pas la peine… geignit Vernon, gêné.
- Vous avez été honnête, je récompense l’honnêteté…

Il donna une carte à Vernon qui l’observa, surpris.

- Un… bon pour un œuf gratuit en pension Pokémon ?!
- Pour vos élèves, par exemple, si vous vous dirigez vers Bonville…
- Eh ben pas vraiment mais… oui, ça pourra servir un jour… marmonna Vernon, pas certain. Au revoir monsieur !
- Au revoir et merci encore pour les gemmes !
- De rien, de rien…

Vernon s’éloigna avec Roland et Rachel.

- Un jour vous réentendrez parler de cet homme, les enfants, et il mettra au point un plan pour conquérir le monde avec ses gemmes, ou un truc comme ça.
- Mais grave… s’étonna Rachel.
- Cette obsession incompréhensible pour des pierres sans valeur… marmonna Roland, tout aussi interloqué.

***

- Hartman… ah… on…

L’infirmière du centre Pokémon de Vestigion déglutit en regardant le trio.

- On a reçu une circulaire spéciale… vous êtes les bienvenus !

Vernon agita la tête. Roland et Rachel explosèrent de joie.

- J’aime pas les traitements de faveur habituellement, mais là, bon… sourit le prof.

Vernon, Roland et Rachel allèrent prendre place dans un box de l’arrière-salle du centre Pokémon.

- Je vous en dois une, les enfants…
- C’est vous qui avez fait trembler l’Association, monsieur Hartman ! sourit Rachel.
- Mais oui, qu’est-ce que vous racontez, c’est vous qui avez rabattu son caquet à cette inspectrice ! souffla Roland.
- Moui… mais ce serait quand même mieux si c’était pareil pour tout le monde, pas juste pour moi parce que je suis avec monsieur Smirnoff et madame Heine !

Roland acquiesça.

- C’est sûr, oui…
- Oh je suis sûre que ça fera… comment disait le père de Charlie, déjà ?
- Jurisprudence.
- Oui voilà, que ça donne à tous les autres dans la même situation que vous l’occasion de se défendre en se servant de votre cas.

Vernon haussa les épaules.

- On verra bien… Et sinon, vous deux, comment ça va ?

Roland et Rachel se regardèrent, intrigués.

- … l’entrainement, mon enseignement, le contrôle continu, comment vous le sentez !
- Ah ! Bah, bien…
- Oui, y’a rien à redire en fait…
- L’examen final c’est dans trois semaines, je suis arrivé au bout de ce que je voulais faire avec vous, on va bientôt recevoir le lieu exact de l’examen, je vais avoir mon bilan professoral… du coup je voulais tâter la température…

Roland et Rachel rougirent.

- … et soit je suis toujours aussi nul en formulation, soit vous avez l’impression que tout ce que je dis est destiné à votre relation !
- Bah tout va bien ! souffla Rachel.
- Bah oui pour le moment…

Les deux se regardèrent.

- Enfin ça a été un voyage très cool !
- Oui voilà, on a beaucoup progressé grâce à vous ! assura Roland.
- Sur le plan du dressage !

Vernon secoua la tête en levant les yeux au ciel.

- On pourra pas me reprocher de m’être immiscé dans vos affaires, c’est déjà ça !
- Tiens donc…

Une jeune femme, longs cheveux blonds, l’air très blasé.

- … Vernon Hartman…
- Eleanor Leduc, tiens dooonc… geignit Vernon.
- … ou Déborah, je sais plus, tu as tellement changé depuis l’époque où on s’est connus…
- Hahahaha, toujours aussi drôle…

Vernon se tourna vers Roland et Rachel et mima avec ses lèvres les mots « Mon EX ! » en insistant bien. Les deux adolescents semblèrent un peu surpris.

- C’est marrant qu’on se recroise que maintenant…
- Oh on n’a pas croisé grand monde, moi, les gens, tu sais… badina Vernon, gêné.
- Je sais que tu as été inspecté, surtout…

Vernon baissa la tête, énervé au point de grommeler des paroles incompréhensibles dans sa barbe.

- SinontuvasbienEleanorquimalarguécommeunemerde…
- Pardon ?
- Tu vas bien à part ça ? geignit Vernon.
- Bah ouais. Eh les mômes, c’est pour aujourd’hui ou pour demain ?

Rachel se retourna et se rassit immédiatement.

- Malcolm !
- … Malcolm ton frère ?!
- Oui ! Oh merde !! Monsieur !
- Heh, ça va, j’ai été en académie aussi, je sais comment ça se passe ! souffla le prof.

Roland garda un air neutre. Malcolm et son camarade Théodore approchèrent le duo.

- Rachel !
- Oh, hey Malcolm !! Comment ça va ?
- Bien, bien et toi… ravi de voir que tu vas bien… Roland…

Roland se contenta de hocher la tête en évitant le regard de Malcolm. Théodore s’avança.

- Saluuut… heeeey, coucou jeune fille !

Rachel grimaça et regarda son frère.

- Théodore est vraiment cool, je suis sûr que tu l’aimerais bien, Rachel !
- … « je suis censée répondre QUOI ?! » songea la jeune fille.
- C’est elle ta sœur ? Hey, salut, comment ça va ?
- Bien, merci…
- Ton frère m’a dit beaucoup de bien de toi.
- Ah…
- Il paraît que tu veux devenir professeur…

Rachel acquiesça. Théodore regarda Malcolm.

- C’est de famille, alors !
- Moi c’est les maths, elle c’est le combat direct.
- Ah, ok. Pourquoi on appelle ça le combat direct d’ailleurs ?

Rachel inspira et regarda Roland qui lui fit signe de se lancer. Rachel regarda Théodore.

- Eh bien parce que les autres matières telles que la stratégie, l’apprentissage technique ou la physique des attaques sont aussi du combat en quelque sorte, le Combat Direct c’est l’apprentissage de la pratique du combat en lui-même…

Théodore acquiesça.

- Wow. C’est génial de rencontrer une fille aussi intelligente que belle !

Rachel rougit et se réfugia dans son jus de fruit. Roland restait impassible. Vernon grimaça alors qu’Eleanor le sollicita.

- Ce serait bien qu’on parle en privé… entre profs, si tu vois ce que je veux dire…

Vernon serra les dents.

***

- L’examen ce sera dans trois semaines, à Voilaroc.

Vernon acquiesça. « Retour au point de départ, donc… »

- Tu travailles toujours à Joliberges ?
- Hm. C’est cool, je suis bien intégré, là-bas…
- En tant qu’homme ?

Vernon soupira.

- Oui, en tant qu’homme… ça ne passera jamais, hein ?

Eleanor inspira.

- On était heureuses, Deb.
- Oui, je ne nie pas.
- Mais il a fallu que…
- J’ai fait le choix d’être moi-même, Eleanor…
- Sans penser à moi.
- Excuse-moi de m’être autorisé à être heureux, à vivre comme je l’entendais et à m’aimer tel que j’étais.

Eleanor inspira.

- Toujours avec cette Amber…
- Toujours.
- Amber et Vernon, ça sonne presque comme un couple parfait. Elle sait que tu…
- Evidemment. Et elle l’accepte très bien, elle.
- Il en faut bien…

Vernon souffla.

- Ça m’embête que tu sois aussi aigrie à propos de tout ça ! Rien n’est de ta faute, je ne te reproche rien, ça a été dur que tu me quittes après mon opération…
- Je voulais te quitter dès que tu as commencé les hormones.

Vernon hocha la tête.

- Je comprends…
- Et encore, j’ai été sympa, je n’ai pas tout balancé aux toilettes comme je l’avais envisagé.

Vernon regarda Eleanor qui semblait amère.

- Tu vis avec quelqu’un, tu crois que tout se passe bien, elle est un peu… masculine, mais ça te plait un peu, elle se fait appeler « L’Ourse » dans son école, tu penses que c’est sexy même, et du jour au lendemain…
- Non, Eleanor, je t’ai déjà…
- Je sais, tu t’étais toujours questionnée, mais… J’arrive même pas à te voir comme un homme, je te regarde dans les yeux et je regarde la femme que j’ai connue à l’académie et à la fac, et…

Vernon baissa les yeux vers son repas.

- … et c’est comme si tu étais vivante et morte en même temps.
- Je suis morte, et je suis vivant à présent…

Eleanor se mit à sangloter mais Vernon resta ferme.

- … ne t’en déplaise.

Roland avait observé la conversation du coin de l’œil, vu qu’à sa table…

- Quand on était petits, Rachel était la plus timide, quand papa m’a acheté Kranidos, elle a juste dit « Non papa, c’est bon, je ne veux rien ». Papa a cru qu’elle ne voudrait jamais de Pokémon, son Pokémon académique ça a été Croquine et elle n’a rien capturé d’autre…
- Jusqu’à maintenant ! sourit Rachel en montrant ses deux Pokéballs.
- Cool, sœurette ! C’est quoi ?
- Un Ponyta !
- Ah, ça te va bien ! admit Malcolm. J’ai fait l’acquisition d’un Cradopaud !
- … je sais pas si je peux te retourner le compliment, frérot !

Malcolm et Rachel ricanèrent. Théodore essayait sporadiquement de nouer un contact visuel avec Roland mais ça semblait impossible, Roland étant particulièrement fuyant et intimidé.

- Tu veux faire quoi plus tard ?
- Prof.
- Prof de quoi ?
- J’hésite encore entre stratégie et technique, je pense me diriger vers la technique, c’est plus intéressant et moins… codifié par des cas établis, alors que la technique c’est plus basé sur des schémas pratiques…

Théodore grimaçait, un peu paumé.

- OK… perso je veux devenir coach sportif.
- Ah.
- Du coup j’ai enseigné quelques trucs de muscu à Malcolm.

Roland regarda le jeune homme du coin de l’œil. Il hocha la tête en regardant sa sœur.

- T’as remarqué que j’étais plus athlétique quand même ?
- Bah, vaguement un peu plus qu’avant le départ… marmonna Rachel.
- Comme on a plein de temps libre en voyage itinérant, Théodore m’a donné plein d’astuces pour se muscler sans matériel, n’importe où…
- C’est vachement facile, on n’y pense juste pas assez ! sourit Théodore en regardant Rachel avec intensité.
- Et vous, vous avez fait quoi de votre temps libre ? demanda Malcolm.

Rachel inspira, gênée.

- On a beaucoup lu… Roland est très calé, on s’est souvent arrêtés dans des bibliothèques, du coup j’ai pas mal buché…

Malcolm grimaça.

- C’est… un peu chiant, non ?
- Alors qu’il y a tellement mieux à faire, prendre l’air, courir… T’aimes pas le sport, Roland ?
- Non.

Malcolm inspira en regardant le jeune homme.

- C’est un intello, le genre qui a sauté une classe.
- Hon. C’est pas avec ça que tu vas draguer les nénettes…

Roland ignora sèchement la remarque en mastiquant son blé cuit sauce tomate. Rachel le regarda du coin de l’œil, sentant le fauve prêt à bondir. Elle sentait aussi le regard de son frère sur elle, et c’était un peu gênant. « Avant, j’étais juste l’amie de Roland, c’était gérable. Maintenant, moi et Roland, on se connait de manière plus intime, du coup c’est comme s’il était en train de me juger… »

Elle inspira doucement. « Du calme. Ce que tu fais n’affecte en rien son honneur, ne le regarde en rien, n’a aucune incidence sur sa vie, c’est la tienne. Tu aimes Roland, tu partages quelque chose avec lui qui ne regarde en rien ton frère, tu joues la discrétion parce que c’est mieux pour le moment… et surtout parce que… »

Roland était à la fois très habituel et très froid, du point de vue de Rachel, mais en réalité il était comme avant, comme d’habitude vis-à-vis de Malcolm. « … parce que tu sais qu’il pense exactement la même chose, vaut mieux rester discrets. »

- M’enfin je suppose que t’es marié avec les bouquins !

Roland haussa une épaule et un sourcil, envoyant un vague signal positif. Théodore eut un petit rire méprisant et se tourna à nouveau vers Rachel.

- Tu aimes danser, Rachel ?
- Nnnnon, pas trop…

***

Lorsqu’Eleanor et ses élèves prirent congé vers leurs appartements au centre, Rachel enfouit sa tête entre ses mains. Roland profita de l’accalmie pour lui passer une main dans le dos.

- Je sais même pas par où commencer !! geignit Rachel.
- D’abord, ne t’excuse pas.

Vernon hésitait à revenir au box avec ses élèves. Roland serra les dents. Le prof comprit et laissa Polarhume avec les gamins et alla au visiophone. « Besoin d’appeler Amber… »

- J’hésitais un peu… souffla Rachel en regardant Roland.
- Un homme t’a abordé un peu lourdement, tu t’es contentée de répondre poliment, tu n’as absolument pas à te justifier envers moi.
- Il a été affreux avec toi aussi !
- Peu importe. Et puis tu n’as pas à rendre des comptes pour lui juste parce que c’est l’ami de ton frère.
- On est d’accord qu’on peut rien dire !
- Qu’est-ce que tu veux dire, Rachel ? Personnellement, j’arrive à peine à définir ce qui se passe entre nous, c’est… spécial, ça nous appartient. On n’a pas à se justifier auprès de qui que ce soit.

Rachel agita la tête.

- Pas faux.
- Tu as très bien réagi, c’est-à-dire comme tu l’entendais. On ne dit rien à ton frère, ni à personne d’autre, on reste entre nous, c’est notre histoire, ça ne regarde personne. D’autre que nous.

Rachel hocha la tête en regardant Roland.

- Merci de ne pas être dans ce délire « je veux le crier sur tous les toits »…
- J’ai déjà le vertige en regardant par une fenêtre, je me vois mal monter sur un toit ! sourit Roland.

Rachel sourit et embrassa Roland sur la bouche.

- Merci d’être aussi génial.
- Merci de ne pas te récriminer comme si tu étais en faute alors que tu es parfaite.

Ils restèrent l’un contre l’autre à se regarder comme des merlans frits lorsque Vernon revint en toussotant. Roland et Rachel se redressèrent. Malcolm arriva à la suite du professeur.

- On va faire un footing avant de dormir, si j’te revois pas d’ici là, à demain Rachel !
- Oui à demain… vous allez vers où ?
- Oh, comme l’examen est à Voilaroc, on va franchir le Mont Couronné à nouveau…

Vernon inspira.

- Ah c’est ballot, j’avais prévu de redescendre vers Floraville… admit Vernon.
- Ah… bah on se revoit à l’examen, je présume !
- Hm ! Bonne course, Malcolm !
- Yep, merci !

Malcolm s’en alla. Roland et Rachel se regardèrent en soupirant. Vernon agita la main en sirotant son café.

- Faire le chemin avec mon ex, non mais ça va pas !

***

Cette nuit-là, Roland se leva pour prendre un verre d’eau. Quand il revint, il aperçut Théodore qui essayait d’entrer dans le dortoir où il était posé avec Rachel et le prof. Il fixa le jeune homme, complètement interloqué. Théodore portait un marcel noir et un short.

- … hey. Je venais juste voir si… Rachel dormait…
- … pourquoi ?
- … comme ça pour discuter !
- … elle dort.
- Ok, ok, je venais juste voir comme ça…

Roland fixa Théodore avec intensité, sans sourciller. Le blond enleva la main de la porte coulissante et s’éloigna en regardant Roland qui ne le quittait pas des yeux. Le jeune homme à lunettes entra dans le dortoir. Vernon était réveillé et Polarhume s’était redressé sur sa chaise. Roland leva une main, assurant que tout allait bien. Rachel dormait à poings fermés. Roland se logea dans son lit du bas et ne dormit que d’un œil, fixant la porte avec défiance.

***

Il choisit de ne pas faire part de l’incident à Rachel. Elle n’avait pas besoin de cette information, et l’examen approchait à grands pas, du coup Vernon avait repris les entrainements.

- Rachel, c’est bien, on limite les mouvements inutiles !

Pandarbare attaquait Sucreine et Ponyta mais les deux Pokémon esquivaient à la perfection les attaques adverses.

- On passe en entrainement défensif juste après !
- D’accord ! souffla la jeune fille en contrôlant ses deux Pokémon.

Vernon observa Roland, aux prises avec son Ursaring dans un entrainement offensif.

- Storm, Hydrocanon !!!

La Danse Pluie de Tarpaud aida Morphéo à envoyer un puissant jet aqueux vers Ursaring qui contrecarra l’attaque à coups de Tranche.

- Charge et Vive-Attaque !!

Vipélierre et Passerouge chargèrent en zig-zag, prêts à prendre Ursaring en tenaille. Le Pokémon ours stoppa l’Hydrocanon d’un Coup Croix et s’apprêta à recevoir les deux petits arrivants.

- Potard, Mégaphone !!

L’attaque partit en cône vers Ursaring. Vernon acquiesça. Le Pokémon n’eut pas d’autre choix que d’encaisser le Mégaphone pour mieux choper Vipélierre et Passerouge au moment de leur impact dans chacune de ses pattes.

- C’est pas mal. Tu vas passer à trois Pokémon, et tu vas enlever Morphéo.

Roland acquiesça alors que Morphéo reprit sa forme originelle et se posa sur l’épaule de son maître. Vernon souffla. « On va l’exploser cet examen… »

***

- Ton Morphéo, ça intéresse le physicien que je suis.
- Ah ?
- Hm. Tu te bats avec lui en changeant sa forme et en balançant de grosses attaques…

Vernon agita sa frite pendant qu’ils mangeaient avec Rachel.

- … et évidemment le côté changement de type, changement de set de mouvements, c’est grisant pour un technicien aussi, je suppose.
- Hm, oui.
- Mais tu devrais varier un peu la donne parce qu’au final c’est très prévisible…
- Je sais. Je comptais compenser ça par la puissance mais au vu de notre premier affrontement…

Vernon acquiesça.

- On trouve toujours plus fort que soi ou quelqu’un qui peut encaisser ou appréhender des attaques puissantes. L’avantage quand tu sais à quelle sauce on peut te manger, c’est que tu peux l’envisager et y parer.

Roland acquiesça.

- Y’a un autre problème dont il faut qu’on parle.
- Oui ?
- Le fait, que tu dois déjà connaître, que tu n’entendes pas tes adversaires quand ils donnent des ordres si tu es sous Danse Pluie ou Grêle.

Roland ne put qu’acquiescer.

- On va travailler ça, c’est un problème récurrent des utilisateurs de climats, il y a des moyens de retrouver l’anticipation nécessaire à un bon combat.
- D’accord.

***

Le grand jour arriva. L’examen se déroula tout d’abord dans le centre culturel, gymnase et stade de la ville, l’ancien repère de la Team Galaxy reconverti. Vernon, Roland et Rachel entrèrent dans le hall, qui était bondé de professeurs et d’élèves.

- Génial, des collègues… soupira Vernon.
- On va devoir passer l’écrit… souffla Roland.
- Mais ça va, on est prêts… admit Rachel.

Vernon ne put qu’acquiescer. Il repéra son ex et leva les yeux au ciel. Malcolm salua sa sœur qui le salua en retour, lasse d’avance.

***

Roland et Rachel se retrouvèrent assis dans le gymnase reconverti en salle d’examen, chacun à leur table. On leur délivra leur relevé de notes du contrôle continu et la note de rapport du professeur. Rachel souffla de soulagement. « 16 au continu, 17 au rapport, génial ! »

Roland sourit. 18 au continu, 15 au rapport. « Parfait, parfait, parfait. »

Le dernier examen consista en une série d’exercices que les deux élèves réussirent tant bien que mal. Roland plissa les yeux en voyant que la rédaction portait sur les attaques d’exception, sujet qu’il avait foiré au début de sa quatrième année, mais il se rattrapa bien vite en torchant cette rédaction en quelques copies doubles. Rachel, elle, maximisa ses chances en détaillant les cas pratiques proposés le plus qu’elle pouvait. Roland lui avait appris qu’elle gagnerait plus en étalant son savoir qu’en l’économisant en théorie, mais qu’elle devait faire l’inverse en pratique.

Arriva la seconde épreuve de l’examen, d’une originalité folle, une série de combats, qui se déroulerait après la pause déjeuner.

***

- Mon poussin !!
- Maman ! sourit Roland en serrant sa mère dans ses bras.

Vernon était surpris. « Je le pensais plus proche de son père vu son penchant pour les études… » Rachel fut beaucoup plus casuelle avec son père et embrassa simplement sa mère avec affection.

Etienne s’avança.

- Eh bien, je vois que tu as bien grandi, Roland ! Tout comme Rachel, comme quoi, ce voyage fait ses preuves, d’années en années… Et voilà donc ton professeur !
« Oh. Mon. Dieu, Vernon, c’est Etienne Smirnoff, professeur avec plus de vingt ans de carrière, chercheur avec des centaines de cas stratégiques à son actif, militant politique en faveur des Pokémon, célébrité Poképolite pour ses nombreux faits d’arme à travers le pays… Il arrive vers toi, tu étais avec son fils pendant trois mois, es-tu prêt, non pas du tout, aaaaaaaaaaaaaaaa »
- Monsieur Hartman, je présume…

Vernon s’étonna et prit la main qu’Etienne lui tendait.

- Euh, oui… c’est… un grand honneur, monsieur Smirnoff…
- Pareillement, monsieur, j’ai fait des recherches sur vous, je vous connaissais sans vous connaître…
- Ah oui ?
- Eh bien apparemment dans la faculté où vous exercez, vous êtes connu sous un autre nom…
« Et merde, le père de ton élève est transphobe ! »
- … ou plutôt surnom, « L’Ours », c’est ça ?

Vernon blêmit.

- … oui eh bah oui… je…
- Vous êtes l’auteur de pas mal de bonnes feuilles à propos des Pokémon ursidés, que vous maîtrisez à la perfection, si je ne m’abuse…
- Oh, je suis une petite frappe comparé à vous !
- Ah mais dès que j’ai su que vous seriez le professeur de mon fils, j’ai regardé des vidéos de vos combats, vous êtes très impressionnant, permettez-moi de le dire !
- Merci, je… suis très flatté, je ne sais pas où me mettre ! geignit Vernon.
- C’est ton professeur, Roland ?
- Oui maman ! Monsieur Hartman, je vous présente ma mère, Linda Trautmann !
- « Mince, elle est jolie, c’est vraiment mon genre de nana ! » Madame, enchanté…

Vernon fit une révérence. Linda sourit, amusée.

- Oh, Roland, tu ne m’avais pas dit que ton professeur était un petit rigolo !
- Un peu trop, même… geignit Roland.
- Votre fils était un véritable ravissement en tant qu’élève, j’espère que mon enseignement aura porté ses fruits…
- Je n’en doute absolument pas ! sourit Etienne.
- Mais oui, d’après Etienne vous êtes très réputé… même si vous n’aviez jamais fait de voyage itinérant avant celui-là…

Vernon agita la tête. Kenneth arriva à ce moment précis.

- Ah vous n’en aviez jamais fait ?!
- Papa… Monsieur Hartman, mon père, Kenneth Heine !
- Monsieur… enchanté…
- Et ma mère Judith.
- Bonjour !
- Madame…« Arrête de trouver les mères de tes élèves bonnasses, arrête, arrête, arrête, Vernon !! »
- Pourquoi vous n’en aviez jamais fait, vous avez quoi, presque quarante ans ?!
- Kenneth… souffla Judith.
- Tu sais, certains professeurs hésitent, mais je suis certain que cela s’est très bien passé, regarde comme Roland et Rachel ont l’air épanouis !

Les deux rougirent intensément. Vernon semblait gêné et donc en faisait des caisses.

- Oh moi vous savez, j’ai jamais été très carriériste, je suis dans ma petite fac tranquille, j’enseigne la physique des attaques, et puis je me suis décidé du jour au lendemain, pouf ! Héhéhéhé…

Roland plissa les yeux. Rachel sembla interrogative également.

- On va regarder la dernière épreuve pour voir vos progrès les enfants ! signifia Linda.
- Vous n’avez pas vu Malcolm ? marmonna Kenneth.

Vernon inspira.

- J’ai… des trucs à faire, je dois préparer la paperasse pour le tournoi à venir !
- Très bien, à plus tard peut-être ! sourit Etienne.
- Hm ! « Tout sauf me tenir à côté de mon ex avec eux autour, c’est un coup à ce qu’elle m’oute et fiche en l’air ma belle relation avec le prof renommé et les MILF de mes élèves ! Mais qu’est-ce qui m’arrive ?! J’ai pourtant pas revu mes dosages de testostérone à la hausse ! »

Il chercha dans la foule. « Je suppose qu’Amber n’a pas pu venir… boh, c’est pas grave… »

***

Le grand terrain du centre culturel de Voilaroc avait été divisé en quatre, et chaque professeur avait été affilié à un terrain. Vernon, Rachel et Roland étaient, hasard malencontreux, au même terrain qu’Eleanor, Malcolm et Théodore.

- Risque d’affrontement, les enfants, préparez-vous…
- Hm.
- Ouaip.
- On a travaillé là-dessus lors du cours de la 8ème semaine, à savoir « On adore notre professeur chéri mais on est obligés de l’affronter même si on l’aime ».
- C’était trop long, admit Roland.
- Et un très mauvais souvenir quand vous avez commencé à pleurer… souffla Rachel.

Vernon sourit.

- C’est à toi, Rachel.
- Ah, mon premier match… merde, monsieur ! geignit Rachel.
- Tu te calmes, t’es mon élève, tu vas tout déchirer ! sourit Vernon en tapotant l’épaule de son élève.

Kenneth regardait les écrans géants.

- Il est bien proche d’eux… marmonna le vieux blond.
- C’est rassurant, ça veut dire qu’il s’en est bien occupé ! sourit Judith en faisant son tricot.
- M’enfin…
- Mais Kenneth, arrête de t’inquiéter pour rien…

Judith regarda Linda, les deux femmes se firent un clin d’œil. Lors de ses recherches, Etienne avait découvert que Vernon Hartman était un homme transgenre sans histoire, et cette nouvelle avait rassuré les deux femmes qui étaient, de fait, sûres que rien n’arriverait à leurs chers bambins.

Rachel arriva sur le terrain. Vernon se plaça derrière elle avec Roland. Rachel se retourna vers eux. Vernon leva deux pouces. Roland se contenta d’un sourire et d’un regard comme elle les connaissait si bien. Rachel se retourna vers l’adversaire : Une blonde aux cheveux bouclés. Son prof, un type avec des lunettes noires et l’autre élève, un petit gros. Vernon s’empara de la tablette qui contenait des informations minimes sur l’examen.

- Olga Pradier et son prof Enzo Ligstein.

Roland regarda Vernon qui inspira.

- Ouais, pareil, des gens de plus de vingt ans qui s’appellent Enzo, ça interpelle mon vécu… admit le prof en serrant les dents.
- J’vais t’écrabouiller ! cria la fille d’en face.

Rachel se désigna, genre « c’est à moi que tu parles ?! »
Olga baissa un pouce vers le sol. Rachel était trèèès impressionnée. « C’est quoi son délire ?! »
Vernon inspira. « Le professeur typique qui apprend aux élèves à exacerber les querelles pour se donner de la contenance et du courage… »

- Vas-y à fond, ma puce.

Rachel acquiesça. « J’vais lui montrer… »
L’arbitre baissa la main, et les examinateurs observaient attentivement.

- ALLEZ !

Olga envoya un Némélios mâle. Le lion rugit de toutes ses forces. Rachel acquiesça et envoya Sucreine. Les élèves serrèrent les dents, pas certains que la jeune femme ait l’avantage. Roland observait, confiant. Vernon ne disait rien.

- Commencez ! cria l’arbitre.
- Némélios, attaque Déflagration !!

L’attaque créa un mur de feu qui s’érigea devant le Pokémon Fruit. Rachel inspira.

- Gambette, Acrobatie !

La femme fruitée tourna sur elle-même et sauta par-dessus l’attaque. Les élèves semblèrent surpris.

- Ecrasement !!

Première rafale de talonnettes qui s’abattent sur le lion à la crinière solaire. Le félin s’effondra sur ses pattes. Sucreine retomba derrière lui.

- Et Balayette !

Un coup de pied sec dans le derrière du lion le fit s’écrouler la tête la première dans le sol. Les élèves firent un grand « Ooooh ! ». Malcolm était très impressionné par sa sœur. Kenneth et Judith tombaient des nues. Etienne et Linda étaient positivement éblouis.

- Ah oui, pas mal, ces progrès ! admit Etienne.
- Elle qui était si douce avec sa Croquine ! s’étonna Linda.

Rachel regarda Olga, aussi étonnée que les autres. Elle se contenta de hausser les épaules. La blonde rappela son Pokémon.

- Hors de question que je perde contre toi ! Grindur !!

Le Pokémon Graine Epine apparut. Rachel regarda Vernon qui inspira.

- La raison me dirait de te dire de changer, le goût du défi me dirait que tu devrais essayer sans changer.

Rachel regarda Roland qui gardait le même regard et le même sourire fier. Rachel lui rendit son sourire et se tourna vers son adversaire.

- Grindur, Dard-Nuée !!

L’œuf à piques tournoya sur lui-même et envoya une pluie de dards émanant de son corps. Rachel inspira.

- Gambette, Acrobatie…

Le Pokémon traversa la nuée de dards comme du petit lait. Olga fit de gros yeux. Rachel inspira. « Comment la frapper, mon Pokémon va se blesser avec des attaques physiques… »

Sucreine recula, influencé par les appréhensions de sa dresseuse. Cela encouragea Olga.

- Bah alors, on flippe ? Gyroballe !

Grindur se projeta vers Sucreine en tournoyant. Rachel serra les dents. Sucreine esquiva. Rachel se tourna vers Roland qui lui fit juste un signe. Rachel hocha la tête.

- Danse-Folle !!

Sucreine esquissa de langoureux mouvements. Grindur partit de n’importe quel côté, complètement perturbé. Sucreine regarda Rachel qui serra les dents. « Je n’ai pas d’attaque à distance avec elle… »

Elle se rappela des conseils du prof. « Dans une situation dangereuse, le bon dresseur réfléchit, le grand dresseur désamorce ! »

« J’ai bien une attaque mais je ne suis pas sûre de l’avoir assez travaillée… »

Grindur revint à la charge.

- Tu vas payer pour ça ! Tête de Fer !!

Rachel inspira.

- Gambette, Mégafouet !

Sucreine esquiva Grindur d’un pas de côté en agitant les mains. Le Pokémon s’écroula dans le sol. Sucreine avait les bras tendus dans une position inhabituelle. Les lianes d’énergie vertes apparurent, ayant ligoté la Graine Epine sans difficulté. Kenneth, Judith, Etienne et Linda observaient la scène, stupéfaits. Rachel agita un bras vengeur. Sucreine agita les bras vers l’arrière et envoya Grindur valdinguer au plafond où il resta enfoncé…

- Woooooooow…
- Dingue ce qu’elle a fait…
- Géant…

L’arbitre inspira.

- Victoire de Rachel Heine sur ce combat !

Le cercle d’élèves et de profs applaudit. Kenneth était stupéfait et regarda sa femme.

- Elle est géniale !! C’est fou ! Elle qui n’avait aucun intérêt pour le combat !
- Je t’avais dit que Roland avait une influence positive sur elle.
- Ah mais non, Judith, c’est ce prof, il est super ! sourit Kenneth.

Rachel revint vers Vernon et Roland.

- C’est grisant de se faire applaudir !
- Profite, à ta première défaite, ils vont te tancer. Joli coup le Mégafouet, tu le travaillais encore, il me semble ?
- Ouais mais je crois que je viens de le perfectionner ! sourit Rachel.

Roland se plaça face au second élève.

- Il s’agit de Corentin Welsh, Roland.

Roland acquiesça. Le jeune homme, un petit gros à lunettes, salua Roland qui salua en retour. Il appela un Picassaut. Roland hocha la tête et envoya son Passerouge. Vernon hocha la tête, satisfait. « C’est bien. Un Pokémon de constitution physique similaire, c’est la garantie d’égaliser les chances dès le départ. »

Corentin se pencha, prenant une posture un peu plus guerrière. Roland prit le parti de ne pas sous-estimer son adversaire de par son apparence au premier abord. Il se plaça également en garde. Vernon resta stoïque. Rachel toujours aussi admirative. Linda et Etienne observaient, impatients de voir les progrès du fiston.

- Commencez ! somma l’arbitre.
- Robin, Vive-Attaque !

Passerouge fonça le premier. En face, Corentin inspira.

- Eclate-Roc !

Picassaut frappa brutalement le sol avec son bec, créant une explosion de fumée.

- Monte !

Passerouge s’éleva dans les airs. Picassaut le poursuivit.

- Bec Vrillé !

Picassaut sortit de la fumée pour tenter de frapper Passerouge par en dessous. Roland inspira.

- Aile d’Acier !

Passerouge s’arrêta, croisa et décroisa les ailes, stoppant de plein fouet l’attaque adverse. Rachel sourit. Vernon hocha la tête. Picassaut était retombé au sol. Corentin était de toute évidence en stress.

- Balle Graine !

Picassaut attaqua. Roland plissa les yeux. L’attaque avait un rayon et une puissance optimales. « Son talent, c’est Multi-Coups… »

- Robin attaque Nitrocharge !

Vernon sourit, enthousiaste. « Il se sert de mes cours de physique des attaques !! »

Passerouge, entouré de flammes, traversa la nuée de graines, et frappa Picassaut de plein fouet, écrasant l’oiseau adverse au sol. Corentin serra les dents et rappela son Pokémon. Roland fit de même. « Il gère bien son timing… » songea Rachel.

- A toi, Amagara !

Le dinosaure fossile au long cou apparut. Le terrain se mit à grêler, mais ça n’atteignait pas les spectateurs.

- Oh l’erreur ! sourit Etienne.
- Ah oui, là… admit Linda.
- Il a un boulevard, votre fils, là ! sourit Kenneth.

Roland regarda Vernon qui inspira.

- Sois créatif !

Roland hocha la tête et envoya Morphéo. Corentin plissa les yeux. Le Pokémon prit sa forme Blizzard.

- Han non…
- Han si.
- Tu changes pas le temps, ok ? geignit Corentin.

Roland regarda les nuages de grêle et agita la tête.

- Non, ça me convient.

Vernon plissa les yeux. « Cette demande était fort puérile, ça va pas passer auprès des examinateurs… »
Rachel inspira. « Défensivement comme offensivement, il est à son avantage… »

- Mur Lumière !

Amagara dressa le mur entre lui et Morphéo. Roland hocha la tête.

- Storm, Balle Météo !!

L’attaque créa une sphère glacée qui se heurta au mur psychique. Corentin hocha la tête.

- Blizzard !

Amagara frappa et repoussa la Balle Météo et frappa Morphéo qui sembla horriblement gêné par cette puissante attaque qui…

- Tu… sais qu’en changeant de forme, Morphéo change également de type, hein… Il est de type Glace, là.
- Type Glace…
- Bah oui crétin !!! cria Olga derrière lui.
- Ah… euh… Lame de Roc !!

Amagara envoya l’attaque. Les rochers pointus partirent vers le Pokémon Climat. Roland inspira.

- Pistolet à O…

Morphéo visa correctement les lames et les dévia sans difficulté tout en s’avançant vers l’adversaire.

- Mais non mais pourq…
- Les attaques puissantes c’est bien, les attaques puissantes qu’on maîtrise, c’est mieux…

Morphéo se retrouva devant Amagara.

- N… Pouvoir Ant…
- Storm, attaque Déflagration.
- Mais on a dit que…

Morphéo, sous sa forme Blizzard, carbonisa Amagara qui s’écroula. La grêle cessa et Morphéo retrouva sa forme originelle.

- C’est pas parce que Morphéo change de forme et de type avec le temps que je dois en rester à des attaques du même type, bien au contraire.

Nouveaux applaudissements pour Roland de la foule assemblée. Malcolm semblait à moitié impressionné, mais pas tant que ça. Corentin rappela Amagara et envoya une troisième Pokéball.

- Tu es sûr ?
- Oui bah oui, si tu triches pas…
- Non parce que je veux dire, plus ça dure, plus on risque de perdre des points… « Enfin, il risque de perdre des points, mais je ne peux pas dire ça à voix haute… »
- Nan j’vais y arriver, allez mon Pokémon académique, j’te fais confiance !

C’est un Scarhino qui se dressa face à Roland qui hocha la tête. « Si j’envoie Vipélierre, c’en est fini… »

- Potard, go !

Tarpaud apparut, tout joyeux. Linda s’enthousiasma.

- Il a choisi Tarpaud, tu avais raison, Etienne !
- Je me doutais qu’il privilégierait la constance du type…

Corentin hocha la tête.

- Mégacorne !!

L’attaque, en ligne droite, fut parfaitement maîtrisée. Roland tenta de réagir mais Tarpaud fut frappé, soulevé et projeté en l’air. Vernon plissa les yeux. « Je vois le genre… »
« Il a compris de quoi il en retournait… » songea Rachel.
Roland hocha la tête, en phase avec son professeur et sa petite amie. « Il n’a qu’un seul Pokémon bien entraîné, les autres sont là pour faire nombre… »
Corentin sourit, content de son méfait. « Le début du combat était une ruse pour gagner des points en impressionnant son monde avec son Pokémon académique un peu plus fort que la moyenne… »

- Koud’Korne !

Scarhino bondit vers Tarpaud et le frappa pour le projeter vers le sol.

- Allez, Aéropique !!

Scarhino fit demi-tour et fonça vers Tarpaud pour le cueillir dans les airs. Roland inspira. « Il se croit dans un Concours Pokémon, je vais lui montrer… »
Roland contrôla sa respiration. « Se lâcher sans s’énerver, rester calme… »[/i]

- Potard, attaque Mégaphone !

Tarpaud poussa un cri qui forma une bulle de son autour de lui. Scarhino chargea mais fut détourné dans sa charge. Tarpaud retomba mais le coussin d’air formé par la bulle de son Mégaphone l’empêcha de tomber durement.

- M… Mais c’est pas vrai !! Mégacorne !

Scarhino se posa au sol et fonça vers Tarpaud. Roland fronça les sourcils. Corentin grimaça, étonné par la nouvelle attitude de son adversaire.

- Rebond !

Tarpaud sauta vers Scarhino et lui frappa le dos des deux pieds, le faisant chuter à terre.

- Et Vibraqua !!

Tarpaud émit un gargarisme, cracha une sphère d’eau et la balança sur Scarhino. L’explosion projeta l’insecte aux pieds de son maître.

- Relève-toi, Scarhino !
- C’est pas nécessaire, je crois…
- Allez !! Relève-toi !

Scarhino se releva difficilement. Roland inspira.

- Allez, Mégacorne !

Scarhino prépara l’attaque avec peine. Roland secoua la tête et rappela Tarpaud.

- J’abandonne. C’est inutile d’aller plus loin.

Vernon inspira et regarda l’arbitre qui secoua la tête.

- Ça compte comme une défaite pour lui…
- Je pense que ça lui convient.

Corentin s’étonna et sembla ravi d’avoir gagné. Or, c’est Roland qui avait marqué des points auprès des examinateurs en faisant preuve de clémence pour un Pokémon incapable de se battre correctement.

Etienne en essuyait presque une larme de fierté. Linda applaudissait avec le reste du public, charmée par le nouveau style de son fils.

***

Les combats s’enchaînèrent. Rachel fut notable pour ne subir aucune défaite, que ce soit avec Ponyta ou Sucreine, elle enchaînait les succès. Kenneth était gaga de sa fille, nouvellement une déesse du combat. Roland avait des hauts et des bas mais son style et sa gestion du stress jouaient clairement en sa faveur. Malcolm faisait montre d’une force extraordinaire. Rachel connaissait le style inimitable de son frère et Roland semblait positivement impressionné par la pure férocité de ses attaques, que ce soit avec Kranidos, Grenousse ou Cradopaud.

La règle qui imposait au professeur d’intervenir en cas d’ex-aequo entre élèves ne s’appliqua pas, et Vernon n’eut pas à se battre, ce qu’il apprécia. « J’aime pas me battre en public… »

La dernière session s’avéra fatale.

- Groupe Hartman…

Vernon, Rachel et Roland s’avancèrent.

- … contre groupe Leduc.

Rachel déglutit. Vernon ferma les yeux.

- Hasards de la destinée, je vous déteste… geignit Vernon.

Roland regarda Rachel avec une furieuse envie de lui saisir la main ou de lui donner une tape sur l’épaule, mais ils étaient filmés et retransmis sur des écrans géants. Il se pencha vers elle.

- Je suis avec toi. Quoi qu’il se passe, je suis avec toi.

C’est Théodore qui s’avança le premier. Roland plissa les yeux. Le grand blond salua Rachel. La brune leva les yeux au ciel, mal à l’aise. C’est Roland qui s’avança cependant le premier, contrairement à toutes les autres fois.

- Roland ?
- Je sais, ça t’oblige à affronter ton frère, mais ça me démange.

Rachel leva les mains, laissant faire. Vernon inspira.

- On reste calme, Smirnoff.
- …
- Je suis sérieux, Smirnoff.
- …
- … tu pourrais au moins me répondre !! geignit le prof.

Roland se tourna vers le prof. Le regard noir, comme prêt à tuer. Vernon eut presque un mouvement de recul. « Reste calme, mes fesses, tiens ! » geignit le prof.

Théodore inspira.

- J’aurais préféré affronter Rachel…

Roland ne sourcilla pas, regardant fixement Théodore, impassible. Linda s’étonna.

- Il a l’air tendu…
- Mais de façon moins frustre qu’avant… admit Etienne.
- Mes enfants vont s’affronter !! geignit Kenneth.

Théodore regarda Roland et haussa les épaules.

- Tu veux pas parler, pas de problème. Scalpion !

Le Pokémon apparut et se mit au garde à vous. Roland inspira et sortit Vipélierre. Théodore hocha la tête.

- Plutôt cool, ce Pokémon.
- Commencez !
- Vipélierre, attaque Fouet Lianes !!!

L’attaque de Roland vrombit et attrapa le bras de Scalpion. C’était trop rapide pour que le Pokémon de Théodore esquive.

- Wow, wow, wow…
- AaaaaaaaLLEEEEEEEZ !!!

Vipélierre chargea dans une Vive-Attaque mais esquiva Scalpion et le traîna en cercle autour du terrain. Vernon haussa les sourcils. Rachel gardait la bouche ouverte, stupéfaite. Etienne rehaussa ses lunettes, intéressé. « C’est à nouveau cet aspect qui ressort… »

Théodore regarda Roland qui le regardait avec rage. « Tu n’avais pas à la regarder comme ça, à lui parler comme ça, à tenter de la souiller ainsi… »

Scalpion était vigoureusement tracté dans le sable par un Vipélierre en pleine mesure de ses moyens. Théodore regardait Roland puis son Pokémon.

- COUPE !

Scalpion frappa les lianes qui le retenaient en les abattant au sol pour les tronçonner de ses lames. Roland plissa les yeux. « On n’est pas si débile, alors ? »

- Tête de Fer !!

Scalpion se tint droit et d’un rapide mouvement des pieds, il chargea d’un bond vers Vipélierre qui se prit le coup de plein fouet. Roland enragea de plus belle.

- Lys, Phytomixeur !!

Vipélierre agita la queue pour créer une tornade de feuilles qui emporta Scalpion dans les airs.

- Tête de Fer…

Scalpion utilisa l’énergie métallique pour s’alourdir et retomber sans tenir compte du vent. Roland sourit.

- Fouet Lianes !

Théodore haussa les sourcils. Scalpion retombait droit vers le sol, et la frappe de Vipélierre le déséquilibra et le fit mal retomber. Scalpion se releva difficilement. Vipélierre se tenait prêt. Théodore rappela son Pokémon en soufflant, ce qui étonna Roland.

- On passe au suivant, tu me contres un peu trop bien…

Roland se tenait prêt, et Vipélierre également. Malcolm plissa les yeux. « Pourquoi il est aussi vénère, c’est quoi son problème ? »
Vernon inspira. « C’est peut-être un sportif mais c’est pas un rigolo, sois vigilant, Roland… »
Rachel restait stoïque. « D’un côté j’adore, il défend mon honneur, d’un autre, c’est pas la peine, peut-être… »
Théodore envoya son second Pokémon : Feurisson. Roland garda Vipélierre sur le terrain.

- Lys, Enroulement !

Vipélierre se mit à courir pour attraper sa queue rapidement deux ou trois fois. Théodore hocha la tête.

- Vive-Attaque !

Feurisson chargea vers Vipélierre. Roland grimaça. « Pas d’attaque Feu ? C’est un coup de semonce ? »
Vernon secoua la tête. « Non, ne te prends pas la tête… »

- Esquive, Lys !

Rachel regarda Vernon qui serra les dents en secouant la tête.

- Météores !

Feurisson s’en tenait à des attaques normales. Théodore et Roland se fixaient en chiens de faïence. Roland plissa les yeux et regarda vers Vernon.

- Ne rentre pas dans son jeu…

Roland inspira, ne comprenant pas où Théodore voulait en venir. Il attendait une attaque Feu qui ne venait pas, et restait sur la défensive en conséquence. Théodore acquiesça.

- T’es un combattant intéressant…

Roland regarda Théodore qui ne le regardait plus en face, ce que Roland prit comme un mépris de sa part. « Il se prend pour qui ?! »

- … mais j’ai lu dans ta méthode, tu restes sur la défensive, tu trouves une ouverture et tu frappes si tu peux, et si tu peux pas tu trouves un moyen détourné…

Roland fut surpris de la qualité de cette analyse. Théodore inspira.

- Moi je suis un bourrin, mais j’me soigne.
- …
- Feurisson, attaque Combo-Griffes !

Feurisson frappa Vipélierre du bout des pattes, comme un chat, inondant le Pokémon Plante de coups rapides. Roland haussa les sourcils. « Il joue sur mon stress, il m’a bien cerné, alors qu’on a à peine parlé une ou deux fois… »

Roland inspira.

- Phytomixeur !

La manœuvre visait à repousser un adversaire qui avait imposé son rythme. Théodore sourit alors que Feurisson esquissa un mouvement de recul pour esquiver l’attaque. Roland grimaça.

- … Fouet Lianes !!

Vipélierre entreprit de choper Feurisson. Vernon secoua la tête.

- Feurisson, Nitrocharge !

Le Pokémon chargea en ligne droite. Roland grimaça. « Il m’a placé sur la défensive et dans l’interrogative pour mieux me prendre à revers une fois que je me prenais à son jeu… »

Feurisson frappa Vipélierre et l’acheva, déjà affaibli par la précédente bataille. Roland se mordilla les lèvres. « Merde, comme un bleu, je l’ai trop sous-estimé… »

Vernon inspira. « Il a compris que Roland était technique et qu’il pouvait jouer dessus. Quand il a dit qu’il aurait préféré Rachel, c’est probablement que son style à elle était plus semblable au sien… »

Rachel regarda les examinateurs. « Là, du coup, je ne sais pas s’il ne va pas perdre quelques points… »

Roland ferma les yeux. « Tu dois revoir ta stratégie. Pense à ce que ton père t’a enseigné, toujours varier l’approche en fonction de l’évolution des vecteurs de circonstance… Pense à ce que ton professeur t’a enseigné ces trois derniers mois… »

Roland respira profondément et regarda Théodore.

- Je… t’ai pris à la légère.

Théodore s’étonna. Rachel aussi. Vernon en pleura presque. « Il suit mes conseils !! »

- C’est une erreur que je ne reproduirai plus.

Théodore sourit en regardant Roland significativement.

- Je savais que t’étais un intello sympa !

Roland inspira. « C’est ce que je veux que tu croies… » Il rappela Vipélierre et envoya Morphéo. Théodore rappela Feurisson.

- Tu sors ton as, je sors le mien !

Un Gallame apparut. Vernon en siffla presque. Roland se tourna vers Rachel. « J’ai besoin de sentir son regard sur moi. »

Rachel hocha la tête. « Je suis derrière toi, ne t’inquiète pas, quoi que tu fasses, je suis derrière toi. »

- Je suppose que tu vas utiliser la Pluie… C’est plus versatile.

Roland haussa les épaules. Théodore sourit et haussa les épaules aussi.

- Surprends-moi !

L’arbitre sonna le début de la rencontre. Roland tendit un bras. Théodore regarda vers le ciel.

- COUP D’BOULE !

Théodore sursauta. Morphéo fonça dans Gallame, en plein ventre, et lui asséna un retentissant coup physique. Théodore regarda Roland qui sourit.

- Je suis un intello, mais j’me soigne !
- …

Vernon sourit, fier. Rachel sourit, amusée et énamourée.

Roland montra le ciel. Théodore ne commit pas la même erreur.

- Gallame, Coupe Psycho !

Les lames du Pokémon s’illuminèrent. La pluie s’activa. Morphéo restait en l’air. Théodore inspira. « Il a tout un éventail de possibilités… »

Gallame agita les bras et envoya les lames psychiques à distance. Roland inspira. « La forme Blizzard, c’est la plus limitée mais celle où j’ai le plus d’ouvertures pour surprendre. La Forme Solaire, c’est la plus complète, celle où je pallie à mes faiblesses en permanence. La forme Eau de Pluie, c’est celle où je peux balancer toute ma puissance mais où je dois faire preuve de self-control parce que justement cette puissance peut m’aveugler… »

Roland acquiesça. « Parfait dans cette situation. »

- Storm, Vent Violent !!

Morphéo, sous sa forme pluvieuse, créa une tornade qui dissipa les lames lancées. Théodore sourit. Gallame chargea devant lui et sauta vers Morphéo pour le frapper. « Ombre Portée… » songea Roland.

Morphéo recula et développa une Balle Météo. Gallame allait enchaîner sur une Plaie Croix. Roland hocha la tête. « C’est plus rapide, il est vraiment pas aussi bête que je pensais… »

Gallame chargea et brisa la Balle Météo pour mieux charger Morphéo avec une Lame Feuille. Roland serra les dents.

- Laser Glace !

L’attaque rentra dans le ventre de Gallame. Roland le regarda. Il serrait les dents. « Sa garde est mauvaise… »

Dans son mouvement de recul, Gallame frappa Morphéo avec la Lame Feuille prolongée à son bras. Roland écarquilla les yeux, surpris. « Il a baissé sa garde pour être certain de me porter un coup même si ça voulait dire être touché dans la manœuvre ! »

Vernon était impressionné également. « Leurs précédents adversaires étaient des simplets, ils déploient enfin l’étendue de leur talent, ce combat va leur profiter à tous les deux… »

Vernon regarda Eleanor, derrière son élève. « Elle est toujours aussi douée pour développer les potentiels latents… c’est un peu ce qui m’a attirée chez elle au premier abord… »

Roland inspira. « Faut que je passe la surmultipliée… »

- Balle Météo…

Morphéo développa une nouvelle sphère mais concentrée, chargée, grise, presque noire. Théodore grimaça et regarda vers Roland. Gallame chargea de nouveau. Roland inspira. « Il n’est pas méfiant et téméraire, deux mauvaises qualités mais pas si mauvaises contre moi… »

La Balle Météo d’orage formait un paravent devant Morphéo. Gallame chargeait, prêt à mener une Tranche-Nuit. Roland serra les dents. « Que je le frappe ou pas, il le mènera à bien… »

Il observa Théodore d’un coup d’œil qui le regardait intensément. « Il n’a pas l’œil aussi exercé que moi, ce qui explique son ‘inconscience’, il est entre l’inexpérience de la situation et l’absence totale de réflexion sur un problème – en fait il ne voit pas le problème à ne pas regarder faire mon Pokémon, donc il agit sans réfléchir alors que moi, si – et ça va me léser… »

- Fatal Foudre, Storm…

Morphéo s’électrisa. La lance électrique partit sur Gallame qui lança l’attaque, voyant le nuage noir se charger d’électricité. La Balle Météo fut coupée en deux, Morphéo fut sévèrement touché, et Gallame frappé par la Fatal Foudre. La pluie cessa et les deux Pokémon retombèrent au sol. L’arbitre inspira.

- Ex-aequo ! C’est aux profs de s’affronter pour départager leurs élèves.
- Inutile…

Vernon s’étonna en entendant Roland et Théodore le dire en même temps. L’arbitre s’étonna, les deux adolescents sourirent.

- C’était le seul match vraiment intéressant que j’ai fait aujourd’hui.
- Pareil, c’était cool, pas besoin de gagnant ou de perdant !
- Voilà !

Roland s’avança vers Théodore. Le jeune homme sourit et s’avança également. Rachel sembla rassurée. « Il est relou mais il a l’air d’avoir un bon fond… »

Malcolm plissa les yeux. « Si j’avais pensé que Théodore allait se mettre à respecter Roland… »

Roland et Théodore se serrèrent la main, applaudis par les autres élèves du cercle. Théodore se pencha vers l’oreille de Roland pour chuchoter.

- J’espère qu’on pourra se battre à nouveau…
- Hm !
- … ou même se revoir, j’te trouve super mignon !

Théodore se releva et salua Roland en lui faisant un clin d’œil. Roland grimaça et comprit plein de trucs. « Il la draguait pour sauver les apparences… devant Malcolm ?! »

Roland s’en retourna vers Vernon et Rachel, tout rouge. Rachel regarda Roland qui serra les dents.

- Il me trouve mignon !
- Tu les attires comme des mouches ! ricana Rachel, amusée.
- J’pensais que c’est toi qu’il voulait moi !
- Bah moi aussi, mais visiblement…

Roland regarda Théodore qui le fixait. Roland détourna le regard en souriant. Rachel inspira.

- Merci pour ce petit fou-rire, j’en avais bien besoin.

Etienne était tout fier de son fiston tandis que Linda essuyait quelques larmes.

- Il a l’air tellement plus en confiance qu’avant, je suis tellement contente pour lui !
- Ouais, il a l’air moins dans sa bulle ! admit Kenneth.
- Nos enfants vont s’affronter, je ne sais pas si j’ai hâte de voir ça… souffla Judith.
- Ça va être un beau combat, Malcolm le combattant contre Rachel qui est devenue une combattante… admit Etienne.

Rachel s’avança pour faire face à son frère, plutôt enjoué à l’idée de la confrontation.

- Prête, sœurette ?
- Hm…
- T’étais vraiment impressionnante avec ta Sucreine, c’est cool de voir qu’on est tous les deux doués pour le combat dans la famille !
- Oui bah oui.

Malcolm prit une Pokéball.

- Allez, Bufo !

Il envoya Cradopaud. Rachel agita la tête. « Pour contrer Sucreine, à coup sûr… »
Elle sortit Ponyta en réponse. Malcolm hocha la tête.

- J’aurais préféré que tu envoies Sucreine…
« Bah tiens. »
- M’enfin bon.

L’arbitre annonça le début de la rencontre.

- Furiosa, Ecrasement !

Ponyta chargea vers Cradopaud. Le Pokémon prépara une attaque Direct Toxik. Rachel inspira, pas rassurée. « J’ai déjà vu Malcolm se battre… »

Ponyta esquiva vigoureusement Cradopaud d’un mouvement clairement guidé par la peur de sa maîtresse. « … et ça m’effraie un peu. Il est plus expérimenté que moi, il se bat bien depuis qu’il est à l’école… moi j’ai tout appris sur le tard… »

- Rachel…

Elle releva la tête, écoutant Roland. Si elle se retournait vers lui, son frère aurait tout deviné, c’est sûr.

- … c’est un adversaire comme un autre. Garde ton sang-froid.

Rachel acquiesça. Vernon plissa les yeux. « Je dis rien, je serais dans le même état si je devais affronter mon frère… »

Rachel inspira et regarda Malcolm qui sourit.

- Voilà, un combat bien sérieux entre frère et sœur !
- On y va, Furiosa !
- Bufo, attaque Coup Bas !

Ponyta tournait autour de Cradopaud qui attendait son occasion d’attaquer. Malcolm plissa les yeux. « Elle n’attaque pas ? »

- Je t’ai déjà vu combattre, frangin, je connais ton style un peu fourbe…

Malcolm regarda sa sœur en haussant un sourcil.

- Comment ça, fourbe ?
- Bah tu sais, utiliser des attaques un peu subtiles pour ensuite bourriner de plus belle, je sais que tu fais comme ça. Je suis un peu pareille en fait.
- … Et ?
- Et je suis en train de faire Hâte, là. J’augmente ma vitesse.

Malcolm plissa les yeux.

- Boue Bombe !

Cradopaud se ravisa et cracha une boulette de terre. Ponyta esquiva rapidement et l’attaque explosa juste à l’emplacement où elle allait se trouver dans sa course en rond. Rachel plissa les yeux. « Sa précision effrayante… il est pas matheux pour rien… »

Etienne agita la tête.

- Pas à prendre à la légère, le Malcolm…
- Il s’entraine régulièrement sur des cibles à la maison, voire des cibles mouvantes, je me demande s’il a retravaillé ce style d’entrainement pendant son voyage… marmonna Judith.

Kenneth s’étonna.

- Tu t’intéresses à ses entrainements ?
- Evidemment Kenny ! C’est notre fils !
- Ah… je pensais qu’il était tout le temps fourré dans ses cahiers avec ses instruments géométriques, là…
- Oh, Kenneth… soupira Judith.

Roland inspira. « Sa vitesse va aider mais m’est avis que Malcolm va s’y adapter… »

- Bufo, Coup-Croix !

Cradopaud s’avança en croisant les bras. Ponyta le regarda, prête à répondre.

- Flammèche !

Ponyta lâcha une nuée de billes de feu. Malcolm s’étonna. « Attaque spéciale avec un tel Pokémon c’est forcément une diversion… »

Cradopaud contourna l’attaque sans cesser la sienne d’un solide mouvement dû à un jeu de jambes irréprochable. « Et évidemment son talent est Anticipation. A la vie sauvage, ça lui permet d’éviter le danger, mais une fois dressé, ce talent peut être adapté utilement notamment pour permettre de mener les attaques à bien sans se laisser perturber… »

Cradopaud frappa Ponyta à la gorge, ayant contourné sans faille sa diversion de Flammèche.

- Ha ! Tes tactiques ne sont pas encore au niveau, frangine !

Rachel haussa les épaules.

- Au moins autant que les tiennes, frangin. CAVALERIE LOURDE !

Ponyta fronça les sourcils, se retourna et donna une magistrale ruade, ses pattes renforcées par la force terrestre. Vernon semblait ravi. « Elle l’a assimilée !! Hihihihihi ! »

Cradopaud vit un beau vol plané et retomba dans le sable, KO. Kenneth et Judith étaient surpris.

- Elle a… sacrément progressé…
- Ah ça…
- Je ne doute pas que leur professeur a fait du bon travail, mais son changement d’attitude a commencé quand elle et Roland se sont trouvés dans la même classe… marmonna Linda.

Etienne agita la tête en observant Roland, tout content pour son amie. « Finalement, ça aura eu plus de conséquences positives que négatives… »
Malcolm rappela Cradopaud.

- Il était en cours d’entrainement…
- Tout comme Ponyta.
- T’étais obligée de devenir aussi forte ? C’était moi, le balaise de la famille !
- Pour ce qui est de la trigonométrie, peut-être, mais…
- Hey, te moque pas de moi !! souffla Malcolm, peiné.
- Mais non, j’me moque pas !
- Bon, t’as deux Pokémon alors j’en utiliserais que deux, moi aussi.
- Ça me va. Je garde Ponyta.
- Ok. Kranidos !!

Le dinosaurien apparut. Rachel frissonna. « Ok, ça va pas être de la tarte… »
Le Pokémon Coud’Boule racla le sol d’une patte, prêt à en découdre. Rachel regarda Ponyta. « Je ne sais pas si j’arriverais à placer une Cavalerie Lourde avec Ponyta. Ça vaut probablement le coup d’essayer… »

Elle regarda vers Roland par réflexe, qui lui intima de foncer dans le tas. Elle hocha la tête. « Il a raison, je dois le faire… »

- Furiosa, Danse-Flammes !

Ponyta cracha une spirale de feu. Malcolm inspira.

- Coup d’Boule !

Kranidos fonça en ligne droite. Rachel s’étonna. Vernon plissa les yeux. « En termes de défensive il l’emporte mais elle a lancé une vraie attaque avec de vrais effets… »

La Danse Flamme enserra Kranidos qui continua à avancer, tête baissée. Ponyta allait esquiver, mais le crâne de Kranidos se mit à luire. Rachel s’étonna. Vernon plissa les yeux. « C’était donc ça… »

- Psykoud’boule !

Kranidos frappa Ponyta au flanc. Rachel serra les dents. « Il a encaissé ma Danse Flamme mais il n’a pas arrêté son attaque, au contraire… »

Roland inspira. « Son contrôle, son timing et sa précision sont parfaits. Il est lacunaire au plan de la force brute comparé à Rachel mais c’est un vrai sniper à part ça… »

- Blast, attaque Attrition !

Nouveau coup de tête, répété. Ponyta ne peut répondre autrement qu’en esquivant un coup sur deux. Rachel grimaça. « Une attaque qui nie ma vitesse, maintenant… »

Roland voulait dire quelque chose, mais déconcentrer Rachel aurait été de mauvais aloi, surtout devant son frère.

- Monsieur… chuchota le jeune homme.

Vernon hocha la tête.

- Du nerf, Rachel ! On ne se laisse pas submerger !

Rachel acquiesça.

- Rebond !!

Ponyta échappa à l’attaque d’un bond. Kranidos la regarda d’un air rigolard.

- Ah, la voie des airs, hein ! sourit Malcolm.

Ponyta retomba sur l’ennemi et le frappa avec ses sabots, pour mieux s’enfuir ensuite. « Je dois tenter une Cavalerie Lourde ! »

Malcolm fronça les sourcils.

- Blast, Poursuite !

Kranidos poussa un grand cri et chargea vers Ponyta. Rachel sourit. « Ah, ça va être plus facile que je pensais ! »

Kranidos arrivait vers Ponyta, tout content. Ponyta prépara son attaque. Roland plissa les yeux. « C’est trop simple… Il va encore rectifier son attaque… »

- Fracass’Tête !

Dans sa course, Kranidos se chargea d’énergie bleutée, prêt à frapper. Rachel serra les dents. « S’il me touche, c’en est fini ! »

Mais Kranidos partait clairement en zig-zag dans son attaque. Malcolm serra les dents.

- L’attaque n’est encore qu’en cours d’apprentissage, Heine, vous faites quoi, là ? souffla Eleanor.
- P… pardon, madame !

Rachel hocha la tête. « C’est ma chance !! »

La Cavalerie Lourde frappa Kranidos de plein fouet. Le Pokémon partit sur le côté, écroulé dans le sable. Rachel souffla. « J’ai battu ses deux Pokémon avec un seul, wow ! »

Roland sourit, fier de Rachel également. Malcolm serra les dents, dépité.

- Zut… pardon, Krani…

Le Pokémon se releva, furax. Rachel fit de gros yeux. Roland pencha la tête.

Kranidos s’excitait et frappait sa tête contre le sable. Roland regarda Vernon qui plissa les yeux.

- Ce sont des Pokémon anciens, expansifs et simples dans leur fonctionnement, je sens qu’il n’a pas apprécié de perdre, et…

Kranidos se mit à évoluer d’un coup. Malcolm ouvrit la bouche en grand. Rachel sentit que ça allait mal finir pour elle.

- Oh, lui, il va pas pouvoir se balader dans la maison ! admit Kenneth.
- Déjà qu’en Kranidos c’était limite… admit Judith.

Charkos apparut dans toute son impressionnante grandeur. Rachel frissonna. Roland inspira.

- C’est juste un plus gros Kranidos, tu n’as rien à craindre ! assura le jeune homme.

Rachel hocha la tête.

- Furiosa, attaque Cavalerie Lourde !

Ponyta chargea, prête à frapper, mais Charkos l’évacua d’un simple Coup d’Boule. Vernon siffla. Malcolm semblait ravi.

- Ouaiiiiiiis ! Blast a évolué !
- … génial… marmonna Rachel en rappelant Ponyta.
- Maintenant le combat va vraiment pouvoir commencer, j’ai hâte d’affronter ta Sucreine !

Rachel inspira. « Ouais, Sucreine… »

- Gambette, Go !!

Sucreine apparut face à Charkos. Le Pokémon poussa un cri en agitant la tête et la queue. Il gratta le sol, prêt à en découdre. Sucreine frappa du pied sur le sol. Charkos se releva. Malcolm regarda sa sœur.

- Hey, elle fait pas ça à la maison, hein ?
- On verra bien !
- Hmph ! Blast, Coup d’Boule !!

Charkos sautilla sur place et chargea vers Sucreine.

- Gambette, Botte Sucrette !!

Charkos allait frapper Sucreine, mais le Pokémon Fruit stoppa le Pokémon Coud’Boule d’un simple coup de pied. Charkos ne s’écroula pas, cependant, il resta en place, maintenant la pression, tout comme Sucreine. Elle le repoussa d’une simple génuflexion, et Charkos se contenta de reculer en tapant du pied, visiblement excité par son adversaire. Sucreine se mit en garde.

- Blast, Fracass’Tête !

Charkos siffla par les narines et chargea vers Sucreine. Rachel se tourna vers Vernon qui agita un doigt négatif.

- Trop fort. La physique des attaques n’a qu’une condition pour s’appliquer pleinement, c’est l’égalité relative des puissances !

Rachel plissa les yeux.

- Esquive !

Sucreine se tourna vers Rachel, pas très enjouée. Rachel soupira. « C’est vrai que j’ai pas envie… »

- Prépare-toi à encaisser ça, sœurette ! sourit Malcolm.
- … Gambette !!

Sucreine frappa du talon sur le sol, claquant dans la résonnance du stade. Roland sourit, enfiévré. « Elle est tellement belle quand elle va contre l’autorité ! »
Vernon plissa les yeux, dépité. « Son caractère de chieuse qui revient à la charge ! »

- PIED VOLTIGE !!

Sucreine sauta vers Charkos. Malcolm fit de gros yeux. Eleanor et Théodore eux-mêmes étaient soufflés. Roland faisait un grand sourire. Vernon se couvrit.

Sucreine frappa Charkos en pleine tête d’un bon coup de pied. Le Pokémon fut détourné de son axe. Sucreine n’en sortit pas indemne cependant et retomba durement au sol. Charkos s’ajusta rapidement. Vernon serra les dents.

- Rachel !!
- Blast, Coup d’Boule !!

La tête de Charkos partit frapper le flanc de Sucreine qui se remettait encore du coup de Fracass’Tête. Rachel serra les dents.

- Désolé, sœurette…
- C’est moi. Mégafouet !

Sucreine avait utilisé ses mains pour ligoter la tête de Charkos.

- Et BOTTE SUCRETTE !!!

Des deux jambes, Sucreine frappa le crâne du Pokémon qui repartit dans l’autre sens et s’écroula, cette fois. Mais Sucreine était clairement KO également en retombant. Vernon agita la tête. « La force centrifuge que dégage ce Pokémon à chacun de ses mouvements est trop intense… »

Rachel inspira. Charkos se releva, tenace, alors que Sucreine restait un genou à terre, déçue. Rachel alla tapoter la tête de son Pokémon qui se releva, fièrement.

- Victoire de Heine, Malcolm sur ce match.

Rachel haussa les épaules, comprenant. « Il avait plus d’expérience… »

Malcolm s’avança cependant vers sa sœur pour la féliciter. Rachel sourit. « Il y a à peine un an, tu n’aurais même pas pu mener le début de la moitié de ce combat… »

Elle s’avança vers son frère. « Allez, quoi qu’il en soit, tu en sors grandie ! »

Le reste du cercle et quelques personnes du stade applaudirent le match. Kenneth avait la larme à l’œil.

- Je suis tellement fier de nos enfants ! C’est un beau match qu’ils ont donné, là !
- Ils sont devenus forts, ça fait plaisir à voir ! admit Judith.
- Et en plus on va pouvoir rentrer avec eux ! sourit Etienne.
- Ah bah j’espère bien ! sourit Linda.

***

Du coup le buffet de fin d’examen, en attente des délibérés du jury, se transforma en réunion de famille.

- Frangin !!
- Roland !
- Heeeeeey !

Roland serra David et Lily dans ses bras, ravi. La blonde et le petit brun regardèrent leur grand frère.

- Mon équipe a bien changé, j’ai hâte de vous la montrer !
- On est désolés, on avait cours, on pouvait pas venir te voir… souffla David.
- Et papa et maman ont refusé qu’on sèche ! avoua Lily.

Etienne se releva sombrement.

- AUCUN. DE MES ENFANTS. NE SECHERA. DE COURS !!!
- On a compris papa… souffla Lily.
- Et c’était bien avec Rachel ? demanda David.

Roland acquiesça.

- J’espère que vous aussi vous pourrez faire votre voyage itinérant avec quelqu’un dont vous êtes proche, comme moi j’ai fait. Mais au fait, David, c’est bientôt ton tour d’obtenir ton Pokémon Académique !
- L’an prochain… souffla le jeune homme. Et vivement, parce que le Nounourson de Lily arrive déjà à battre Ceribou à plate couture !
- T’as qu’à plus t’entrainer ! soupira Lily, lasse.
- Je m’entraine mais ça suffit pas contre une brute comme toi ! grommela David.

Roland sourit et se tourna vers Rachel qui était félicitée par Charlie. Roland s’étonna et alla vers eux. Charlie regarda Roland, tout sourire.

- Hey ! Devine qui était dans le jury d’un des terrains !
- Sérieux ?
- Nan, pas moi, Léo ! Il est encore en train de délibérer. Mais j’ai vu vos matches, wow ! Jolie progression !
- Merci. Enfin c’est plus grâce au prof…
- Hartman, c’est ça ? Vous avez eu de la chance, Vernon Hartman est très connu dans l’inter-LGBT des facultés sinnohites, c’est un sacré dresseur et un enseignant réputé, c’est cool qu’il ait enfin osé faire un voyage itinérant, il avait un peu peur à cause de…
- Bah, justement, Charlie, euh…

Charlie regarda Roland, étonné. Le jeune homme lui fit signe de lui parler à l’oreille. Rachel approcha. Charlie se releva, stupéfait.

- … dans tous les centres Pokémon ?!
- La plupart.

Rachel hocha la tête en regardant Charlie.

- Et à Célestia, les infirmiers étaient à deux doigts de s’en prendre à lui physiquement.

Charlie inspira.

- Ok… alors ça, ça va barder…
- Il a été inspecté suite à ça, vu qu’on a pris sa défense…

Charlie plissa les yeux et claqua des doigts.

- J’ai entendu parler de ça ! C’était vous ?!
- Oui… après que les infirmiers aient dit à notre prof qu’ils allaient lui « montrer ce que c’était un homme ».

Charlie sembla fulminer.

- Okaaaaay… je connais une vieille infirmière haut-placé qui va se prendre une rasade de lettres recommandées… merci pour l’info… Où est monsieur Hartman…

Charlie, Rachel et Roland se tournèrent vers le professeur à la veste cuivrée qui était entouré de confrères.

- Vous avez enseigné au fils Smirnoff et à la petite Heine ?!
- Dingue, en plus vous avez assuré !
- Vous voulez pas venir bosser à Rivamar ? La fac la plus cotée de Sinnoh, vous regretterez pas !

Vernon agita les mains.

- J… Je suis très bien à Joliberges, je ne veux pas être muté !
- Et pourquoi un voyage itinérant à trente-sept ans, je veux dire vous avez de toute évidence un immense talent !
- L’homme qui a enseigné au fils d’Etienne Smirnoff, votre renommée est faite, mon gaillard !
- Mais je vous assure que…
- C’est dingue que vous ne soyez pas plus connu !
- Venez boire avec nous, on va discuter !
- J… je dois aller féliciter mes élèves, je reviens !

Vernon s’éloigna vers Charlie, Roland et Rachel.

- Mais qu’est-ce-qui-se-paaaasseeeuuuuh !!! geignit l’homme en se saisissant le visage.
- Bah alors, il est où l’arriviste qui a choisi notre dossier pour nos grands noms ? sourit Rachel.
- Vous devriez être content, vous avez l’air d’être très reconnu par vos pairs ! sourit Roland.
- … mais j’aime pas l’attentioooon !

Les deux élèves secouèrent la tête. Charlie tendit la main à l’homme.

- Vernon Hartman ?
- Oui… ?
- Charlie Winchester, professeur Pro à la faculté d’Illumis et membre de l’Inter-LGBT des enseignants. Je viens d’apprendre ce qui vous était arrivé…

Vernon regarda ses élèves qui serrèrent les dents.

- Oh, euh… je m’y attendais, vous savez, c’est pour ça que j’hésitais à me lancer pour un voyage…
- Bah c’est pas normal. Je compte bien en référer directement à la Mère Joëlle.
- N… Ce n’est absolument pas nécessaire, j’ai… comme qui dirait réglé ça avec l’inspectrice qui est passée me voir…
- Ca non plus, c’est pas normal, vous êtes la victime dans cette histoire et on vous a traité comme un coupable…
- Ok, ok, monsieur Winchester, je… j’apprécie, ce que vous essayez de faire, mais c’est bon, c’est réglé, je ne veux pas que ça aille plus loin.
- Permettez-moi au moins d’en discuter en comité, sans forcément citer votre nom…

Vernon inspira.

- J’ai une petite vie tranquille à Joliberges, j’ai voulu… élargir mes horizons de carrière, c’était… difficile niveau administratif, satisfaisant niveau enseignement…

Vernon tapota les épaules de ses élèves et souffla.

- Mais honnêtement, partir en croisade contre des bigots qui admettent déjà à peine l’hétérosexualité libre, franchement…
- Vous ne pouvez pas laisser tout ça impuni. Laissez-moi au moins faire une lettre au comité appuyée par votre témoignage.

Vernon inspira et regarda ses élèves qui hochèrent la tête.

- Faites-le, monsieur, c’est pas normal ce qui s’est passé… souffla Rachel.
- On vous a fait dormir dehors comme un Grotadmorv hors de contrôle, on s’est moqué de vous, on vous a appelé par votre ancien nom, vous pouvez pas laisser passer ça… souffla Roland.

Vernon souffla et regarda Charlie.

- Si vous pouvez faire quelque chose…
- On va faire ce qu’on peut. Faut se serrer les coudes, vous n’êtes pas seul.

Vernon acquiesça. On lui tapota dans le dos. Il se tourna vers une jolie jeune femme aux cheveux bouclés.

- … Amber ?!
- Je t’ai vu, tu sais ! Avec tes élèves !
- Tu étais dans le public ?!
- Oui mais je ne savais pas si je pouvais te rejoindre avant ! Tu étais tellement mignon avec tes élèves sur le terrain à les encourager !

Vernon regarda sa petite amie, les larmes aux yeux et la serra dans ses bras. Amber fit de gros yeux, regarda Rachel et Roland, puis les salua d’une main alors que Vernon pleurait à moitié sur son épaule.

- C… C’était dur Amber !
- Je sais, je sais…
- J… Tu m’as tellement manqué ! J… J’aurais tellement voulu être dans tes bras plus d’une fois, c’était vraiment dur !
- Il fallait que tu le fasses, Vernon, c’est ton métier, c’est ta passion, tu ne pouvais pas ne pas le faire juste parce que…

Vernon s’éloigna d’Amber en essuyant ses larmes.

- Pardon. Pardon, j’suis pitoyable…
- Juste parce que tu as l’impression de n’être qu’un petit bout d’homme !

Vernon regarda Amber, faussement vexé. Elle lui pinça la joue affectueusement.

- Mon petit bout d’homme !

Vernon secoua la tête, ému, et embrassa sa promise devant tout le monde. Roland sourit, ému. Rachel en essuya une larme. Elle saisit la main de Roland, brièvement. Charlie inspira.

- Vous avez dû passer un voyage intense, je me trompe ?

Roland et Rachel lâchèrent leurs mains, pensant avoir été surpris. Ils hochèrent la tête. Charlie sourit.

- Vous verrez, le retour en académie, ça, ça va être dur !

Les deux ne purent que hocher la tête.

***

Les vacances d’été furent un bon test de la nouvelle relation entre Roland et Rachel. Ils continuaient à se voir casuellement, aux yeux de tous, pour s’entrainer ou réviser ensemble, et puis parfois ils sortaient en ville ou à l’extérieur pour mieux se fréquenter. A priori personne n’avait remarqué le changement de leur relation, et quand bien même…

- Ils ont fait un voyage ensemble, ça les a rapprochés, forcément ! souffla Etienne.
- Oui voilà. Mais j’ai l’impression qu’ils sont juste amis, ça me rassure ! admit Kenneth.

On sonna à la porte. David alla ouvrir à nouveau. Un grand jeune homme blond plutôt musclé. Le jeune Smirnoff rougit.

- Euh, oui ?...
- Salut, Roland m’a invité…
- Euh, bah, entrez, je suppose…

Théodore entra. David alla prévenir son frère. Roland entra et sourit.

- Théo ! Viens, on est dans le jardin !
- Ok, cool.

Théodore rejoignit Roland et Rachel à la table de la terrasse du jardin Smirnoff.

- Rachel !
- Coucou Théo !

Rachel fit la bise à leur ami. Théodore s’assit avec eux. Roland ramena une troisième bière.

- Alors comment va ? demanda Roland.

Théo inspira.

- Je t’ai écouté, j’ai pas fait mon coming-out, ni auprès de ma famille ni auprès de Malcolm…
- Si tu ne le sens pas, tu n’as pas à le faire, on en revient à la même chose.
- Si mon frère savait que tu as lorgné sur lui pendant tout le voyage ! ricana Rachel.

Théodore sourit.

- Je peux encore m’excuser d’avoir fait le relou ce soir-là au centre Pokémon ?
- Tu t’es plus qu’excusé en me donnant des conseils de fitness, je passe un été merveilleux en partie grâce à toi ! sourit Rachel.

Théodore sourit et regarda Roland.

- Et excuse-moi encore aussi…
- Bah, ça aurait été bizarre quand même tu avoues, toi et moi dans le dortoir, Rachel au-dessus de moi, le prof à mes pieds…

Rachel et Théodore éclatèrent de rire. Roland sourit en sirotant sa bière.

- En tout cas, je persiste, oublie Malcolm, il est clairement hétéro.
- Ouais…
- Chez les Heine, on a une politique très stricte d’hétérosexualité ! admit Rachel.
- J’ai une soirée chez un pote qui vient de rompre avec son mec, j’aimerais bien vous présenter l’un à l’autre !

Rachel s’étonna.

- Jamie et Logan ont rompu ?!
- Logan est un peu con, en même temps, faut dire, Jamie valait mieux que ça, je lui avais déjà dit qu’il ne le traitait pas correctement, toujours à le mettre à l’épreuve…
- Ouais, pas faux.

Théodore plissa les yeux.

- Jamie, ton…
- Mon « ex » en quelque sorte.

Théodore regarda Rachel qui haussa les épaules.

- On en parle sans problème. Avec Roland, tant qu’il me dit tout, je laisse passer.
- Ce qui ne veut pas dire que je peux aller à droite à gauche.
- Non, juste qu’on reste clairs l’un avec l’autre.
- Voilà.
- … c’est cool. J’aimerais bien avoir ça avec quelqu’un.
- C’est pour ça que je veux te présenter à Jamie, ça lui ferait du bien de rencontrer quelqu’un avec ton état d’esprit.

Théodore hocha la tête.

- Merci pour votre soutien, en tout cas…
- Ça fera cent pokédollars ! sourit Rachel.

Linda sortit avec une théière, vit les trois adolescents avec des bières et envisagea de se rentrer.

- Tu peux rester, maman, on allait s’entrainer…
- Oh, euh, je ne voulais pas… Non, je vais vous laisser entre vous les enfants ! Bonne journée !

Linda repassa la porte. Roland serra les dents.

- Papa croit que je suis polyamoureux, du coup dès que j’invite plus d’une personne, ils doivent croire que j’organise des bacchanales…

Théodore et Rachel éclatèrent de rire.

***

- Maman ?
- Oh ! Oui, Roland…

Roland vint s’asseoir dans la bibliothèque où elle s’était réfugiée.

- Rachel et Théodore ont pris congé…
- Désolée, je ne voulais pas m’imposer…
- Tu pouvais rester, on s’est juste entraînés ensuite. Théodore est un adversaire de valeur, j’ai tenu à ce qu’on reste bons amis, j’ai trop l’habitude de me battre avec Rachel, Lily et David, ça me fait du bien d’avoir un adversaire un peu nouveau.

Linda acquiesça. Roland regarda sa mère et souffla.

- Et… si un jour j’ai une relation avec quelqu’un, maman, promis, je t’en parle.
- Oh non, non, tu fais ce que tu veux, mon chéri…
- Papa a mal interprété ce que je lui ai dit, je ne suis pas… un petit dissolu !
- Tu fais ce que tu veux !
- Maman… !
- Avec ton père on a décidé de vous laisser mener vos vies comme vous l’entendez, on ne veut pas être ces parents intrusifs qui gâchent la vie de leurs enfants en mettant leur grain de sel…
- Et c’est très bien, mais vous avez le droit de savoir aussi…
- J’espère au moins que tu te protèges !

Roland regarda sa mère avec de gros yeux. Linda éclata de rire.

- Tu verrais ta tête ! Je plaisante mon chéri !
- Maman, il n’y a rien entre moi et Rachel… ni entre moi et Théodore, ni entre moi et personne. Je me concentre sur mes études.
- Je sais bien mon poussin. Et de toute façon ça ne me regarde pas, tu fais ce que tu veux.

Roland hocha modestement la tête.

- … maman ?
- Oui poussin ?
- C’est pas grave si je me marie pas… ?
- Oh bah non, mon chéri, tu fais comme tu veux, tu mènes ta vie comme tu l’entends.

Roland inspira. Il aimait la libéralité de ses parents mais parfois ça le laissait dans un flou qui ne laissait pas place à une vraie réponse, plus à un « fais comme tu veux, on va voir comment tu t’en sors ». Alors effectivement il faisait comme il voulait, et il ne savait pas toujours s’il faisait « bien ».

- Mais t’en fais pas, maman, je ferais jamais rien qui vous fasse honte ou…

Linda serra Roland dans ses bras.

- Tu ne nous feras jamais honte, Roland, enfin, nous sommes déjà tellement, tellement fiers de toi !
- Je sais bien…
- Je ne vous ai pas dérangés tout à l’heure parce que vous étiez tranquilles avec vos bières, j’avais peur de gêner !
- Mais non maman…
- Je peux te dire un secret ?
- Vas-y, maman…
- Ton frère va recevoir son Pokémon Académique et ça me terrifie à quel point vous grandissez tous les trois !

Roland ricana.

- Enfin quelque chose de normal !
- Qu’est-ce que tu veux dire par là ? sourit Linda.

***

David écarquilla les yeux.

Un Miamiasme. La créature tendit les bras vers le jeune homme…

- … ouiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiin !!!

… qui éclata en sanglots.

***

- Voilà, jeune homme. C’était vraiment pas la peine de pleurer en plein cours… soupira l’intendante.

David inspira et ouvrit avec anxiété sa nouvelle Pokéball…

Un Lumivole. Le jeune homme regarda Ceribou sur son épaule et eut un grand sourire.

- Parfaite ! Tu es parfaite !! s’enjoua le jeune homme en serrant le Pokémon dans ses bras.

***

Linda, Etienne et Roland étaient quelque peu stupéfaits. Lily buvait son yaourt à boire sans sourciller.

- Et du coup il a été en changer…
- Je comprends, mais quand même… admit Linda.
- Un Miamiasme, c’était presque insultant pour lui je suppose… souffla Etienne.
- Faut pas croire, David a sa fierté, il sait ce qu’il veut… Enfin, ça l’a pas empêché de pleurer devant tout le monde.

Linda agita la tête.

- Ca fait encore plus mauvais genre qu’un Miamiasme !
- Faudra que je lui parle… souffla Roland, inquiet.
- Mais apparemment ils ont accepté de lui faire le changement tout de suite…

David rentra de cours. La famille l’attendait dans le salon. Le jeune homme avait son Ceribou sur l’épaule, et Lumivole à ses côtés.

- Et voilà ! Elle est pas trop jolie ?

Etienne inspira. Roland pencha la tête. Linda sembla charmée. Lily haussa les épaules.

- Un truc tout faible qu’évolue pas…
- T’as un Couafarel ! grommela David.
- Mouais. M’enfin c’est toujours mieux que le Miamiasme, hein David…

Linda et Etienne regardèrent Lily qui haussa les épaules.

- Personne n’embête personne dans cette famille… j’me dévoue !
- Si t’es content comme ça, frangin… marmonna Roland.
- Bah oui, j’ai que des jolis Pokémon ! Tu peux m’aider à l’entrainer, Roland ?
- Ouais, ouais, bien sûr frangin.
- Pourquoi tu me demandes pas à moi ? grommela Lily.
- T’es méchante !
- Non mais…

Etienne et Linda se regardèrent, blasés.

- C’est pas les nôtres…
- Hm, je sais pas où j’ai été traîner, mais… marmonna Linda.

***

Le lendemain de Noël, Roland descendit à un arrêt de bus proche du parc de Rivamar. Rachel l’y attendait.

- Tu es fou !
- Je voulais que tu aies ton cadeau !
- Tu as dit quoi à tes parents pour t’absenter ?! s’étonna Rachel.
- Que j’avais un cadeau à offrir. Tu me connais…
- Incapable de mentir à ta mère, ok… Qui commence ?
- Euh… bah, à toi l’honneur !
- Mon cadeau est vraiment nul, vas-y, toi !

Roland haussa les épaules et prit son sac dont il sortit une couveuse avec un œuf blanc et bleu.

- … ROLAND ???
- Tu te rappelles le coupon de la pension que le prof a reçu du vieux type de Vestigion ?
- … Roland, c’est trop ! C’est quoi ?!
- Eh bien, on est en hiver, le temps est frais, je pense que si tu le sors de sa couveuse et que tu le serres contre toi, il va éclore !
- … Mon cadeau est vraiment, vraiment nul !
- Peu importe, tu es déjà un cadeau pour moi.

Rachel sourit, désabusée.

- Tu es vraiment un sale petit flatteur !
- Je sais.

Elle sortit l’œuf de la couveuse. Le contact avec l’air frais fit vibrer l’ovoïde. Rachel pressa l’œuf contre elle et provoqua l’éclosion. C’est un Goupix blanc qui en sortit. La créature couina et lécha le visage de Rachel.

- Roland, il est beaucoup trop mignon !
- Il sera parfait pour toi, alors.
- Eh bien je vais l’appeler Ronnie, comme ça il me fera tout le temps penser à toi !
- Tu prends un risque, Ronnie, Roland, ça se ressemble !
- Eh bien tant pis, je prends le risque… Et je vais également prendre le risque de t’offrir ton cadeau…
- Quoi que ce soit, ça me plaira !

Rachel tendit la boîte rectangulaire. Roland la saisit, intrigué.

- C’est trop gros pour être un stylo…
- Ça aurait pu être un stylo… geignit Rachel en serrant les dents.

Roland ouvrit la boîte et fit de gros yeux. Rachel semblait honteuse.

- … Sur le coup ça paraissait être une bonne…
- Une cravate…

Roland sortit l’objet de la boîte. Une belle cravate bleu marine. Roland regarda Rachel qui plissa les yeux.

- … tu n’es pas obligé de faire semblant d’être…
- … c’est ma première cravate !

Roland semblait sincèrement ému. Rachel s’en étonna. Roland sourit et regarda Rachel.

- Merci. J’avais jamais eu de cravate avant ça. C’est… c’est un très beau cadeau, Rachel !
- … bah ça tombe bien je savais exactement que ça allait te plaire ! sourit Rachel, gênée.

Roland regarda Rachel, ravi. Rachel sourit. Il s’avança et embrassa Rachel.

- Mes parents habitent à une rue d’ici !
- C’pas grave, m’en fiche !

Roland embrassa de nouveau Rachel qui poursuivit le baiser également. Le tout sous le regard amusé du Goupix d’Alola.

***

L’arrivée de Roland et Rachel en faculté se passa plutôt bien. De par leur orientation commune de professeurs, ils avaient de nombreux cours en commun et restaient donc très proches. Mais cette fois, Rachel s’était fait plus d’amis, qui s’étaient rattachés à elle et Roland mais qui étaient malgré tout plus proches d’elle…

- Nan, nan, le combat en équipe c’est du niveau quatrième année, tu peux pas aborder ça en première. Ils ont besoin des bases d’abord.
- Oui bah oui…
- En fait la première année, c’est toutes les bases, diriger le Pokémon, maîtriser sa force, donner des ordres. Et après tu abordes les thèmes plus pointus.
- Ok… merci Rachel !
- De rien, enfin, faut se soutenir !

Roland sourit. Il était très investi dans la préparation de ses concours, mais également dans la vie associative. Rachel se rassit face à lui.

- Laisse-moi deviner, ce soir tu as encore une réunion avec l’inter LGBT étudiante…

Roland serra les dents.

- On aborde le féminisme intersectionnel avec la sororité lesbienne, je t’aurais bien proposé, mais…
- … mais il y aura cette connasse de Hafida qui va encore me reprocher de lorgner sur sa meuf ! souffla Rachel.
- Je lui ai dit que c’était moi qui était bi et pas toi, mais elle veut rien entendre.
- Bah j’ai mieux à faire ce soir, Théo m’a invité à la contre-soirée de la fraternité, j’ai l’intention de boire et de me faire câliner par plein d’homosexuels affectueux ! sourit Rachel.

Roland inspira en levant les yeux au ciel.

- Hier encore, il ne s’assumait pas et le voilà membre de la plus puissante fraternité gay de la fac de Verchamps !
- Faut dire que t’as eu du nez en le casant avec Jamie.
- Ouais, je suis plutôt fier de moi sur ce coup ! sourit Roland.
- D’ailleurs à propos de couples qui marchent, ce serait bien qu’on se fasse une petite soirée rien que toi et moi un de ces quatre…
- C’est prévu, qu’est-ce que tu crois, Roland Smirnoff n’est pas qu’un entremetteur de légende, c’est également un grand romantique…

Il tendit un billet à Rachel qui le regarda.

- Tu as réservé une table demain au salon de thé de la fac pour la soirée lecture de poèmes ! Sur le sujet du… COMBAT POKEMON !

Roland acquiesça.

- Et ensuite je préconise une petite soirée dans ma chambre à l’internat… avec du vin rouge et des tomates cerise !
- Roland Smirnoff, sale petit polisson ! sourit Rachel.
- Hey, faut bien rentabiliser la bourse… que me donne l’établissement !
- Tu es dégoûtant ! Et ça se passe bien avec l’inter LGBT à part ça ?

Roland acquiesça.

- Hm, je me fais plein de relations…

Rachel plissa les yeux, souriante. Roland leva les mains.

- En tout bien tout honneur. Ça a l’air de fasciner les gens, un bisexuel en couple monogame avec une fille !
- On n’a jamais dit qu’on était monogames ! sourit Rachel.
- Disons que c’est en petits caractères sur le contrat !

Rachel sourit et attrapa la main de Roland qui saisit la sienne.

- Parle-moi de ces « relations » !
- Des gens qui veulent devenir professeurs, des gens qui veulent changer les choses à leur échelle… et des aspirants révolutionnaires.
- Ouuuh, éloigne-toi…
- Ouais, t’inquiète, j’ai vite vu qu’il fallait que je fasse attention. Pas envie de m’embrigader dans les mêmes histoires louches que les parents.
- Tu-m’é-tonnes… soupira Rachel, lasse d’avance.
- Après c’est grisant de militer, de se battre contre des forces qui nous dépassent… enfin, des forces, notamment l’Association Pokémon…
- Ce bon vieil Archibald Pringle… marmonna Rachel.
- Tu savais que jusqu’aux années 1950, le dressage était soumis à conditions pour certaines catégories de population ? Les handicapés, notamment, étaient tenus de ne pas avoir plus de trois Pokémon.
- Et encore maintenant, ils n’ont pas le droit d’effectuer de voyage itinérant, oui. C’est n’importe quoi…
- Plus je vais aux réunions, plus je tombe des nues…

Rachel sourit.

- Moi, tant que tu ne fais rien de dangereux.
- Bah en fait, je compte aller à la Marche des Fiertés d’ici deux semaines.
- Ah oui ?
- Hm. Il faut que j’en parle à mes parents.
- Pourquoi ça ? T’as aucune obligation, Roland, enfin…
- Bah en fait, si. Dans deux semaines, on est censés déjeuner chez les parents de ma mère.
- Aouch ! Les super gentils mais super collants qui vous font toujours plein de cadeaux ?!
- Eux-mêmes.
- Aouch… Et tu comptes t’y prendre comment ?!
- Eh bien j’ai déjà une bonne occasion qui se profile, donc ça, c’est bon… et je vais devoir avouer à mes parents…

Rachel serra les dents. Roland soupira.

- … que je suis un sale petit activiste !

***

- Ils ont beau dire, ils ont toujours besoin de moi au tribunal ! Je ne suis pas encore à la retraite et loin de là ! grommela Linus.
- Personne n’a dit ça, tu ne devrais pas parler aux jeunettes ignorantes qui arrivent de leur campagne ! souffla Norbert.
- Vous êtes au-dessus de ça, Lindbergh, clairement… marmonna Linda.

Roland, David et Lily observaient à moitié alors que les Winchester – minus Lucy – et les Finsbury-Maloney dînaient avec la famille. Charlie et Léopold semblaient quelque peu distants depuis le début du repas, ce que Roland avait remarqué du coin de l’œil.

- Je sais que je dis ça à chaque fois que tu me fais à manger, Linda, mais tu cuisines comme une déesse ! sourit Lionel en savourant ses patates douces.
- A chaque fois que je cuisine, j’ai droit à un « Huh, c’est pas aussi bon que Linda ! » souffla Norbert.
- Oh Lionel ! Je ne suis pas si douée, enfin ! souffla Linda. Et Norbert, je crois vous avoir assez refilé de recettes familiales…
- Mais je suis pas doué pour la cuisine !

Charlie semblait vouloir partir sans trouver d’excuse. Léopold mangeait sans le regarder. Roland était presque gêné pour ses amis. Etienne allait reprendre la discussion avec Linus quand le jeune homme se décida.

- Papa, maman…

Etienne et Linda regardèrent Roland. Norbert, Lionel et Linus se tournèrent également vers lui. David et Lily observaient nonchalamment.

- Je… samedi prochain, j’irais à la marche des fiertés.

Etienne haussa un sourcil. Linda plissa un œil. Norbert s’étonna. Charlie regarda le jeune homme, intrigué. Léopold grimaça.

- Fiston, on déjeune chez tes grands parents samedi prochain…
- Ma fac a un char cette année, je pense important de devoir y aller.
- … fiston, sans vouloir te vexer ou préjuger de ta vie personnelle, je ne pense pas que ce soit ta place, ou tu aies quelque légitimité…
- La légitimité n’a rien à voir là-dedans. Toi et maman m’avez toujours élevé dans une optique progressiste, nous avons des amis homosexuels, lesbiens, bisexuels, mon professeur de voyage itinérant était un homme transgenre…

Lindbergh s’essuya la bouche, nerveux. Charlie regardait Roland, toujours aussi stupéfait. David et Lily comprenaient la moitié de la conversation.

- … je suis investi dans des activités extra-scolaires en trait avec diverses minorités sexuelles persécutées par l’état Poképolite, j’estime important de devoir y aller.

Linda semblait étonnée en regardant tour à tour Etienne et son fils. Norbert sourit.

- C’est tellement honorable de ta part, Roland !
- … eh bien, si tu en éprouves le besoin…
- Je dois le faire. C’est important.

David et Lily regardaient Roland, étonnés. Roland les regarda.

- Et il faut se battre pour ce qu’on estime être important. Je n’irais pas chez les grands-parents, j’irais à la marche des fiertés avec mes confrères de la fac de Verchamps, sur leur char.

Etienne regarda Linda.

- C’est tes parents, c’est à toi de décider.
- … Mais bien sûr, Roland, vas-y ! Tu as l’air tellement… habité !
- C’est… en effet très surprenant… admit Lindbergh.

Lionel haussa les épaules.

- Il a raison, dans un sens, c’est important d’y être, qu’on soit « concerné » ou pas !
- Je ne peux même pas te soupçonner de vouloir échapper au déjeuner chez tes grands-parents, tu les adores… marmonna Etienne.
- Promis, ce n’est pas ça, papa !
- Bon.

Norbert essuya une larme sous l’œil presque atterré du reste de la table.

- Pardon, c’était vraiment très émouvant ! Je suis très touché par ta sollicitude envers les autres, Roland !
- … euh… merci, monsieur Finsbury… marmonna Roland, un peu décontenancé par l’attitude de l’ami de son père.

***

Charlie faisait la vaisselle pour Linda comme il en avait souvent pris l’habitude à chaque passage chez eux. Les adultes plaisantaient au salon. David et Lily étaient remontés dans leurs chambre, et Léopold fumait dans le jardin.

- Attends, je vais t’aider.

Roland s’avança et prit une assiette aux côtés de Charlie qui inspira.

- C’est chouette que tu ailles à la pride cette année…
- Je suis en faculté, je suis assez grand maintenant, je pense.
- Hm. C’est cool.

Charlie renifla. Roland le regarda.

- … tout va bien, Charlie ?!
- Excuse-moi…
- … tu… veux en parler ?
- Pardon, je… je pensais pouvoir garder la face, mais…
- Charlie ?

Charlie s’appuya à l’évier.

- On va se séparer avec Léo…
- … ah mince… euh…
- Il… Tout allait bien, et puis, depuis qu’on est à Kalos, il a commencé à aller voir ailleurs. Au début je laissais faire, je me disais qu’on n’était pas un couple marié non plus, qu’on était plutôt libres, j’avais eu un écart avec un ancien camarade de classe, je m’étais dit que je ne pouvais pas le juger, et puis il y a eu… bah ton exam de voyage itinérant, où je l’ai surpris avec un autre examinateur…

Roland s’étonna. Tout avait l’air de bien se passer dans le couple de ses amis jusque-là. « Alors même quand ça a l’air de bien se passer, ça peut aussi mal se passer en fait ?! »

- Et quand j’ai voulu lui en toucher un mot, il s’est…braqué, il a dit que ce n’était pas mes affaires, qu’on n’était pas un de ces couples chiants qui se jurent fidélité… et quand j’ai voulu revenir dessus, il m’a dit…

Charlie souffla en se passant une main sur le visage.

- … que moi j’étais amoureux de lui depuis le début mais que lui… restait avec moi par confort plus que par amour véritable… qu’il n’était pas aussi amoureux de moi que je l’étais de lui… que…
- Charlie…
- Oh Roland j’ai l’impression d’avoir gâché ma vie !
- Mais non !

Par réflexe, Roland serra Charlie dans ses bras.

- C’est horrible, on a failli annuler ce dîner mais on s’est dits qu’on ne pouvait pas faire ça à Linda… je dors sur le canapé depuis des semaines…
- Ça va aller, Charlie, parfois vaut mieux… vaut mieux être seul que rester avec quelqu’un qui ne nous aime pas…
- Je sais mais c’est dur !
- Tu vas t’en sortir, allons…
- J’me sens nul de m’être accroché comme ça, j’aurais dû m’en douter…
- Mais non, enfin, et puis je suis sûr que malgré ce qu’il a dit, il a été heureux avec toi…

Charlie s’éloigna de Roland en hochant la tête. Roland inspira.

- Tu es une des personnes les plus fortes que je connaisse, ça me fait mal de te voir pleurer comme ça… geignit le jeune homme.
- Pardon… et puis tu es fort toi aussi, regarde la force de conviction dont tu as fait preuve ce soir…
- C’était pas grand-chose. Allez, Charlie, tu vas t’en relever. Déjà je pense qu’il faudrait que tu déménages…
- Ouais ça semble inévitable…
- Mais inutile de te mettre dans des états pareils, hein ?

Charlie hocha la tête. Roland sourit. Charlie approcha le jeune homme et lui prit les épaules.

- Merci Roland, t’es vraiment un gars bien.
- De rien, voyons.

Charlie et Roland étaient très proches. Charlie tenta un baiser, chaste et doux, que Roland ne lui refusa pas. Il entreprit d’approfondir le baiser. Roland accepta ce baiser, comme s’il était part de la conversation. Charlie exprimait juste une forme de reconnaissance, et plus il regardait Roland, plus il ressentait une forme de connexion, et…

Il s’éloigna d’un coup, l’air catastrophé.

- … Oh mon DIEU !
- …
- … d… déso… désolé ?! Je…
- C’est rien, c’est rien…
- Roland, je viens de t’embrasser, là !
- C’est pas grave, je comprends.
- Tu aurais dû me repousser, en fait, je m’attendais à une réaction du genre « Mais ça va pas la tête, Charlie, qu’est-ce qui te prend ! »…

Roland haussa les épaules. Charlie montra Roland du doigt. Le jeune homme à lunettes serra les dents.

- … bisexuel.
- … j’en étais sûr, ce discours à table, c’était trop cramé !
- Ne dis rien, s’il te plait !
- Non, non, évidemment que non, on n’oute pas les gens ça se fait pas, mais… merde, t’embrasses bien en plus !
- Merci. Euh, non, c’était pas correct, je suis en cou-…

Roland serra les dents. Charlie hocha la tête.

- Je dirais rien, Roland, t’inquiète, je… veux pas vraiment que ça se sache, que… je t’ai embrassé, tu vois, ok, nos familles sont proches, ok, toi et moi on est proches, mais… pas… comme ça !
- Non, voilà ! souffla Roland. Et j’ai quelqu’un.
- Raison de plus… pour m’excuser piteusement !
- Mais non, je t’assure, je comprends. Ecoute, ça te dit de venir avec moi, mes amis et notre prof à la marche ? Pour te changer les idées ?

Charlie sourit en se replaçant à l’évier.

- Et être entouré de beaux mecs ?
- Eh, ça peut te permettre de faire des rencontres !

Charlie éclata de rire. Roland sourit en se remettant à la vaisselle.

- Ouais. D’ici là j’aurais probablement rompu franchement avec Léo…
- Si tu penses que c’est la seule solution…

Charlie saisit une assiette.

- Ouais… je crois bien.
- Et j’en suis désolé pour toi.

Charlie tapota l’épaule de Roland. Lequel rendit une tape dans le dos de son ami. Ils finirent la vaisselle dans le calme.

***

- J’espère qu’il va venir… souffla Roland.
- Tu es tellement chou avec ce bandana !

Roland plissa les yeux en regardant le bandana rose, mauve et bleu marine, drapeau de la fierté bisexuelle, qu’il portait autour de la tête.

- Mouais pis je laisse vraiment aucune place au doute... Par contre, toi, les fleurs, ça te va vraiment très bien.
- Merci. J’ai dit à mes parents où j’allais, ça les a estomaqués.
- Tu leur as dit que tu y allais avec moi ?
- Ouais. Et ça les a encore plus estomaqués ! ricana Rachel. Malcolm allait me faire une réflexion sur ma tenue…

Roland regarda Rachel en top noir et mini short en jean.

- …mais après ça il a plus moufté !

Roland sourit, amusé. Théodore et Jamie arrivèrent.

- Heeeeeeey !
- Salut !
- Coucou !
- Bah alors !
- Vous êtes beaux tous les deux ! sourit Rachel.
- Merci, tu es très… hippie… marmonna Théodore.
- C’est un look épicurien ! sourit Rachel.
- Mouais… y’a votre prof je crois…

Rachel releva la tête et vit effectivement Vernon Hartman accompagné de son amie Amber. Le professeur était torse nu avec un sac à dos sur les épaules et les cicatrices de sa mammectomie étaient apparentes sous ses pectoraux.

- MONSIEUUUUR !!!
- Rachel ! Ça me fait plaisir de te revoir !
- Je savais que vous étiez bien foutuuuu !
- … Amber, je te présente Rachel, mon élève au voyage itinérant…
- Je l’avais déjà vue mais je l’avais peu entendue, il est vrai… sourit la blonde.
- Elle est incorrigible, désolé… souffla Roland en approchant son professeur.
- Roland, mon dieu, tu portes des débardeurs ! s’étonna Vernon en faisant la bise à son élève.
- Et vous, vous avez des tatouages !
- Ah, je m’enorgueillis de vous les avoir cachés pendant trois mois, ça veut dire que je suis resté pudique et convenable ! sourit le prof.
- Certes… Amber, bonjour !
- Roland, c’est un plaisir, il m’a beaucoup parlé de vous !
- Idem, sans vous il n’aurait pas tenu le coup avec tout ce qu’il a subi pendant le voyage…
- Oh, les procès sont en cours, ne t’inquiète pas pour ça ! fulmina la femme aux cheveux frisés.
- Bon, on va rejoindre le char de la fac.
- Yep, pareil, je rejoins le char des professeurs LGBT, je suis devenu une vedette à cause de vous deux ! sourit Vernon.
- Il a donné des conférences à Joliberges, il se bat pour que les voyages itinérants soient facilités pour les transgenres, alors qu’avant c’est à peine s’il élevait la voix ! sourit Amber.
- Disons que j’ai eu une bonne motivation !

Rachel sourit, fière. Roland la regarda.

- Je crois qu’il parle de Charlie qui l’a soutenu auprès de l’inter LGBT des éducateurs !
- Crois ce que tu veux, je suis sa motivation !
- Tu es surtout la mienne ! sourit Roland.
- Oh, petit coquin ! sourit Rachel en embrassant Roland sur la joue.
- Ah berk, des hétéros ! sourit Vernon.
- Monsieur, vous êtes hétéro, vous aussi ! souffla Rachel.
- Mais oui Vernon, qu’est-ce que tu racontes ! souffla Amber.
- Hey…

Roland se tourna vers Charlie, vêtu très simplement d’un polo et d’un short.

- Charlie !
- J’ai hésité, mais…

Roland serra son ami dans ses bras.

- J’suis content que tu sois venu !!
- … ouais. On a définitivement rompu hier avec Léo…

Rachel sembla surprise.

- Han non, Charlie…
- C’est comme ça…souffla Charlie, dépité. Ca t’embête pas si je reste avec vous… ?

Roland secoua la tête.

- Aucun problème, Charlie.
- Nan, y’a pas de soucis ! souffla Rachel.
- Y’a de la place pour tout le monde ! assura Théodore.
- Mais oui, viens sur le char avec nous, tu verras plein de beaux garçons ! sourit Jamie.

Charlie acquiesça et suivit ses amis.

***

La fête battait son plein. Roland était sur le char avec Rachel.

- C’est terrible… Ils étaient si mignons tous les deux… souffla la jeune femme.
- Ouais, je t’avoue que ça me fait pas mal gamberger… Tout avait l’air de bien se passer, et au final…

Roland agita les mains. Rachel plissa les yeux.

- Tu te sens mal pour eux… ?
- Oui mais surtout… nous deux ça a l’air de bien se passer mais qui sait, ça pourrait mal tourner…
- Bah le truc c’est que personne ne sait qu’il y a un nous…
- Je pense que Charlie l’a compris…

Rachel agita la tête.

- Je pense qu’on peut lui faire confiance pour ne rien dire…
- Ouais…
- Maintenant, Roland, j’ai… vraiment pas envie de sortir avec toi en mode couple unicellulaire, notre relation à « semi-distance » me convient, si le voyage itinérant avait duré un mois de plus, on se serait foutus sur la tronche aussi !
- Probablement…
- Je suis trop caractérielle et solitaire, tu es trop affectueux et docile, on cohabiterait mal je pense. Si ça peut durer c’est justement parce qu’on se laisse tranquilles, et quand on se voit ce n’en est que mieux.

Roland acquiesça.

- J’sais pas. Des fois tu me manques.
- Moi aussi, tu crois quoi, Roland !
- Tu réalises ce qui va se passer à la fin de la faculté ?

Rachel serra les dents.

- Ton concours d’entrée prend un an de plus que le mien…
- J’ai une année de prépa en plus… souffla Roland.
- Du coup on va forcément avoir un an de séparation…

Roland se mordilla les lèvres. Rachel inspira.

- C’est pas plus mal, ça fera un an ou on aura moins de chances de s’embrouiller.
- Ça me mine vraiment, cette histoire… Alors le couple parfait n’existe pas ?
- Bah non. Et puis ça te mine, regarde Charlie dont les parents ont divorcé pendant une période…
- Hm, ouais…
- Et puis toi et moi… Roland, on sait pas ce que l’avenir nous réserve. Je peux rencontrer quelqu’un qui va me plaire autant voire plus que toi, et toi aussi, ou alors on peut se fâcher sur une connerie à tout moment...

Roland acquiesça.

- J’ai pas envie de me prendre la tête, juste de profiter… et si un jour ça doit casser, bah ça cassera, mais je refuse qu’on se rende malheureux…
- C’est ma logique aussi. Tant qu’on passe du bon temps comme c’est le cas actuellement, on continue, mais si un jour on en vient à se faire du mal…
- Voilà.

Rachel hocha la tête en soufflant.

- C’est bien, je gambergeais pas, mais maintenant…
- Où est Charlie, d’ailleurs ?

Théodore arriva entre les deux tourtereaux.

- C’est pas votre pote, là-bas, sur le char des profs ?

Roland et Rachel regardèrent vers le char en question. Vernon se tenait en bas dudit char, à discuter avec des passants. Il désigna le char en souriant. Charlie dansait, torse nu, avec des tas d’autres hommes sur le char.

- … bah tu vois, apparemment ça va mieux ! sourit Rachel.
- Oui…à croire qu’on peut se relever du pire…
- Ça, c’est un excellent état d’esprit, Roland ! sourit la jeune femme.
- Je t’aime, Rachel. Plus que n’importe quoi. Plus que les Pokémon, même.

Rachel sourit.

- Je t’aime aussi, gros béta obsédé par les Pokémon !

Le couple sourit et s’embrassa. La foule de la marche des fiertés les acclama. Les deux levèrent un V de la victoire en direction des gens qui marchaient à côté des chars.




Générique de fin : Scissor Sisters – Might Tell you tonight

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I just might say it tonight
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That I love you
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