Au petit matin, il ouvre les yeux. Un grand sourire illumine son visage.
Il se lève et enfile quelques vêtements. Marchant hors de la chambre à coucher, il arrive dans le salon et la cuisine. Nouveau sourire.
- Han non, c’était censé être une surprise !
- Tu ne sais tellement pas où sont les ustensiles de cuisine que j’ai été réveillé par toi en train de fouiller !
- Tu peux pas m’en vouloir d’essayer !
- Ah ça non…
Charlie approcha et regarda ce que Matt avait préparé.
- Oh t’as essayé de faire des œufs brouillés c’est trop mignon ! Ça me rappelle nos premiers petits déjeuners de couple !
- … tu veux dire les matinées bière-pétard ?!
- Ouais !
- … j’le prends super mal ! souffla Matt en ricanant.
- C’est trop mignon de ta part en tout cas. Prêt pour ce matin ?
Matt leva les yeux au ciel.
- J’ai l’impression que malgré l’arrivée de ton Roland, c’est aussi Troisième Reich que l’an passé.
- Mais non, ça va s’arranger. L’équipe est beaucoup plus homogène depuis que Meredith est partie et que Roland l’a remplacée.
- Mon Dieu, Meredith, je l’avais presque oubliée…
- Du coup, au lieu d’avoir affaire à un triumvirat Vincent-Malcolm-Meredith, on a juste Vincent et Malcolm qui grognent dans leur coin. Je trouve, personnellement que ça se passe mieux que l’an passé, largement.
Matt agita la tête. Charlie remarqua la Cheniselle à la cape Déchet qui se tenait sur une chaise à côté de son maître.
- Tu as cuisiné avec Cheniselle ?
- Elle a juste validé les temps de cuisson !
Charlie sourit en prenant un sachet de croquettes vers le balcon.
- Comment tu peux rester simple professeur de fondamentaux quand tu es aussi ingénieux dans l’usage de tes Pokémon ?
- Ingénieux, ingénieux…
- Utiliser le talent Anticipation d’un Pokémon pour chronométrer, c’est fortiche quand même ! Arrête de te descendre !
Charlie remplit la gamelle sur le balcon. Un Rapasdepic vint s’y poser. Charlie regarda le Tengalice posé sur un perchoir au bout de la passerelle.
- Matt, rappelle-moi de racheter un perchoir…
- Tengalice s’y pose encore ?
- Ouais…
Rapasdepic se mit à crier. Charlie grimaça.
- Ah non, tu te calmes !
Le Pokémon se renfrogna. Tengalice ouvrit un œil. Charlie soupira.
- Tu peux lui laisser sa place… ?
Le Pokémon poussa un net grognement et descendit à contrecœur. Charlie leva les yeux au ciel.
- J’adorerais gérer vos problèmes, mais j’ai une vie, une carrière, un couple…
Tengalice alla se poser devant sa gamelle et commença à grignoter. Rapasdepic se posa sur son perchoir et cria sa joie d’avoir retrouvé son foyer.
- Bon. On va pouvoir déjeuner tranquillement… AAAAH !
Matt ricana. Un Ectoplasma sortait sa tête du canapé, hilare.
- Combien de fois je t’ai DIT de ne pas faire CA ! Et toi ça te fait rire !
- Parce qu’à chaque fois il te fait le coup et tu réagis toujours de la même façon !
- Au moins cette fois c’était pas la nuit… souffla Charlie. Dire qu’on me considère comme le meilleur dresseur de l’académie alors que mes Pokémon sont hors de contrôle !
- N’importe quoi, Charlie ! ricana Matt. Ils ont juste du caractère…
Un lézard noir crapahuta sur le plan de travail pour tenter de voler une tartine, mais Matt le repoussa.
- … et ils influencent les miens d’ailleurs, mais de là à les trouver hors de contrôle ! Tritox, tu arrêtes, je t’ai déjà nourri !
Charlie regarda Matt.
« Et voilà… »Il inspira et nourrit Ectoplasma à son tour.
« Et voilà chaque matin, cette piqûre de rappel. Ce cessez-le-feu à toutes mes inquiétudes. C’est lui. C’est mon Matt. »Le jeune homme aux cheveux frisés prit le lézard noir entre ses bras. Le Pokémon se réfugia sur les épaules de son maître, toujours aussi roublard.
« Quand on a rompu avec Léo, j’ai cru que j’allais tout perdre, et puis au final, j’ai tout gagné de nouveau… »Charlie sourit et secoua la tête pour se diriger vers le bureau.
« Je n’irais pas jusqu’à dire que ma vie est parfaite mais au moins je suis bien dans ma tête, bien dans ma vie, bien dans ma peau. »Charlie ouvrit la porte du bureau pour y trouver un petit Pokémon gris et noir caché derrière un fauteuil. Il leva les yeux au ciel en souriant.
« Et même si techniquement on bosse avec mon ex, on est un couple suffisamment fort pour faire la part des choses. Et avec le recul, je suis mieux avec Matt que je ne l’étais avec Léo. »Charlie prit Bébécaille et le porta dans ses bras.
- Eh bah, mon petit reptilou ? On fait encore son timide ?
Le Pokémon couina et réfugia son museau dans le creux du cou de son maître. Charlie ramena la créature au salon. Matt avait mis la table.
- En parlant de caractère…
- Hm, le syndrome du dernier arrivé…
- Laisse-lui du temps.
- Ouais… sauf que les autres ont pas pris autant de temps à être dressés. Je sais pas ce que je fais mal…
- Rien, il a juste son petit caractère, lui aussi… Tu en feras bientôt un chef, comme les trois autres.
- Mouais.
Le jeune homme s’assit à table, prenant le Pokémon sur ses genoux. La créature semblait habituée à ce « traitement de faveur » que lui adressait son maître. Matt observait la scène indifféremment, s’assit face à Charlie et commença à manger aussi. Charlie donnait de temps à autre une croquette au petit Pokémon dragon posé sur ses cuisses.
- Je l’infantilise trop, peut-être…
Matt haussa les épaules.
- C’est toi le dresseur, qu’est-ce que je peux dire, moi…
- Tu es dresseur aussi…
- Oui mais moins orienté pour le combat que toi. Moi je me contente des deux miens, de ma petite Cheniselle qui ne bouge pas trop et qui est toute calme et de mon petit Tritox mâle donc incapable d’évoluer…
- Ça va, c’est pas un Apitrini non plus.
- Certes. Ce que je veux dire, c’est que c’est toi qui pousse les Pokémon au meilleur de leurs capacités, moi je suis juste le mec qui vit avec toi, qui tente de faire le petit déjeuner et qui élève casuellement deux Pokémon.
Charlie inspira alors que Bébécaille demandait clairement toujours plus de croquettes.
- Ton avis compte pour moi.
- Pour les choses de la vie, oui, en matière de dressage, c’est toi la référence.
Charlie sourit en donnant carrément une poignée de croquettes à grignoter à Bébécaille. Matt plissa les yeux.
- T’as le droit de manger aussi, hein…
- Je sais, je veux juste m’assurer qu’il soit bien nourri avant de manger. Je retrouve souvent ses gamelles à moitié pleines, je suis sûr que je dose mal ses rations…
Matt observait nonchalamment. Charlie se mordilla les lèvres.
« C’est du langage d’éleveur. »Matt se servit du jus d’orange. Charlie hésita à nourrir plus encore Bébécaille.
« C’est des trucs que Léo m’avait appris quand on était encore ensemble. Le coup de manger avec le Pokémon pour qu’il mange mieux et plus. C’est du langage d’éleveur, il le sait, et il doit être en train de me faire mille reproches dans sa tête, en mode ‘ah tu penses encore à lui, je suis sûr que tu vas te remettre avec lui…’ alors que non, non, merde, je suis bien avec Matt. C’est pas comme si j’essayais de m’en convaincre. »- A quoi tu penses ?
Charlie sourit en regardant son petit ami.
« Il veut jouer à ça ? »- Je pense à trois petits mots.
- … trois petits mots ?... Ahon. Je vois le genre…
Matt avait levé les yeux au ciel. Charlie souriait toujours.
- Tout va bien. C’est à ces trois petits mots que je pense.
- Beau rattrapage, Winchester, j’ai cru que tu allais me sortir le sempiternel « Je t’aime, tihihi, c’est ça mes trois petits mots ! »
- Non. Tout va bien. On a un chouette appart, un chouette couple, de chouettes Pokémon, tout va bien.
- Les tiens sont de sacrés fouteurs de merde quand même.
- … certes. Sauf Bébécaille.
- Bah justement c’est inquiétant. Ce serait plus rigolo s’il foutait la merde aussi. Tiens, c’est mes trois petits mots à moi. « Foutre la merde ».
- C’est pas très poétique ! ricana Charlie.
- Parce que « Tout va bien », c’est poétique ?
- Certes.
Bébécaille commença à refuser la nourriture et s’endormit sur les genoux de Charlie qui haussa les épaules, posa le sac de croquettes et commença enfin son déjeuner. Matt sembla satisfait. Charlie sourit.
« Oui, voilà, tout va bien. »***
« Matt dit que je suis la référence. Il a peut-être raison, peut-être tort. Toujours est-il qu’effectivement, je sais ce que je vaux. »- Winchester, bonjour !
- Fisher, hey ! La forme ?
Charlie serra la main du vieux professeur dégarni avec quelques cheveux blancs sur le caillou. Matt attendait là, comme un piquet.
- On attend toujours votre confirmation pour la consultation sur la conférence des professionnels du milieu scolaire !
- Je suis un peu occupé sur des tas d’autres trucs en ce moment, notamment mon autorisation de cours en plein air et la prochaine réunion du collectif inter-LGBT des écoles, mais je serais au moins à la réunion préparatoire !
- Ah, bien, bien ! Monsieur…
Matt se contenta d’un salut de la main alors que le professeur Fisher se déplaçait vers sa salle. Charlie regarda son petit ami.
- Tu pourrais au moins dire bonjour…
- J’évite de saluer tout ce qui est plus âgé que mon mobilier… admit Matt.
- Oh pfff. C’est pas comme ça que tu vas te faire des relations !
- J’ai déjà une relation, merci.
- Matt ! C’est pas ce que je voulais dire !
Matt haussa les épaules en souriant.
- Tu es le mec investi, moi je suis le mec de l’ombre, ça me va très bien cette position !
- … hm… j’espère !
- Promis si j’ai à me plaindre, je me plaindrais. Mais comme t’as dit, « Tout va bien ».
- Salut-salut !
Léopold arriva auprès du couple. Matt regarda Charlie.
- J’ai mal aux pieds !
- … j’ai compris le message… gronda Charlie. Salut, Léo…
- Vous avez entendu la nouvelle ?
- Si c’est un potin, non, Léo… marmonna Charlie.
- Hey, je suis pas juste le mec qui rapporte les potins ! Rachel aurait collé une raclée à Phelps hier dans son cours ! Les cinquième et sixième années ne parlent que de ça !
Charlie grimaça. Matt vérifia son portable pour faire comme s’il n’écoutait pas l’ex de son mec alors qu’en fait ça l’intéressait beaucoup tous ces potins.
- Ah oui ?
- Hm ! Elle l’a fait dans le cadre de son cours, mais apparemment Hadley a été harcelé par la présidente des parents d’élèves…
- La mère de Jérôme, oui, c’était à prévoir…
- Du coup ce matin on va encore avoir droit à une réunion à couper au couteau !
- Troisième Reich… marmonna Matt.
Charlie lança un regard noir à son petit ami qui eut un sourire espiègle. Léopold plissa les yeux et choisit d’ignorer le brun.
- Bref, préparez le pop-corn !
- Ouais… merci Léo…
Matt inspira.
- Tu le remercies d’avoir trouvé une excuse vaseuse pour venir te parler ou… ?
- Ça reste mon meilleur ami. Même si on a été ensemble, qu’on a rompu, que c’était moche et que depuis il a eu un bébé et que je me suis mis avec toi, ça reste mon meilleur ami.
- … tu t’écoutes parler ou bien…
- Je pensais qu’entre toi et moi les choses étaient claires et qu’on était au-dessus de ces conneries de jalousie…
- Je suis pas jaloux, je le trouve juste naze de chercher des prétextes...
- Et je pensais également que tu étais au-dessus de ce genre de commentaires mesquins…
- Tu te méprends teeellement sur moi ! sourit Matt, espiègle.
Le couple entra en salle des profs. Roland, Rachel, Léopold et Malcolm étaient déjà là.
- Salut tout le monde…
- Salut les gars… souffla Roland.
- ‘lut… souffla Rachel.
- Hm… marmonna Malcolm.
Charlie s’assit à sa place habituelle tout comme Matt. Charlie regarda Léopold qui triait ses cours de la matinée. « Je ne vois pas pourquoi Matt réagit comme ça, Léopold est bien dans sa vie, moi bien dans la mienne, il n’y a pas d’ambiguïté… »
- C’est vrai, ce qu’on raconte, t’as changé la couche de l’autre avorton ?
Rachel regarda Matt et inspira.
- Mon frère a passé la soirée au téléphone avec Hadley à propos de ça, donc je préfèrerais qu’on en parle une fois que notre cher professeur principal sera là.
Malcolm siffla par les narines, visiblement énervé. Charlie haussa les sourcils.
- C’est si grave que ça ?! Pour un simple recadrage ?!
- Ça peut aller loin, on parle de la présidente des parents d’élèves… gronda Malcolm.
- Inutile de dire que j’ai passé la soirée enfermée dans ma chambre ! souffla Rachel.
- Et en plus tu es rentrée tard… grommela Malcolm.
Roland serra les dents en détournant le regard. Charlie inspira.
« Le jour où ce pauvre Malcolm se sortira l’avant-bras du cul, on aura fait un graaand, grand pas… »Megan et Claire arrivèrent, souriantes.
- Rachel, c’est vrai ce qu’on raconte ?! s’étonna Claire.
- Tu as botté les fesses du petit merdeux ? sourit Megan.
- Eh bien disons que la version officielle retiendra simplement que j’ai donné un cours de combat direct avec une petite démonstration originale ! marmonna Rachel, posément.
- On aurait dû y penser plus tôt, oui… admit Megan.
- J’ai hâte que Vincent soit là, je me demande comment il va gérer ça ! Salut les garçons !
- Coucou Claire ! sourit Léopold. Megan…
- Salut les filles ! sourit Charlie.
- Salut ! sourit Roland.
- Yo ! salua Matt.
Les deux femmes s’assirent à leurs places habituelles. Malcolm avait à peine levé la tête.
- Je suppose que vous avez mal dormi…
Tout le monde se tourna vers Claire qui venait de dire cela à Malcolm. Charlie inspira.
« Elle a le mérite de mettre le doigt là où ça fait mal… »Il choisit de ne pas lui répondre. Charlie agita la tête.
« Cela dit, à force de titiller la bombe, elle va finir par la faire exploser… »- Eh bien, toujours aussi poli…
Rachel inspira et regarda Roland qui lui fit signe que tout allait bien se passer. Vincent arriva, visiblement embêté.
- Booon… Bon, bon, bon…
Charlie observa le massif homme roux à lunettes.
« Je me demande quel effet ça fait d’être dans une carcasse pareille. J’ai toujours l’impression que le seul fait d’exister lui est pénible… »- Je fais l’appel…
- On n’a pas le temps.
Vincent regarda Malcolm qui ferma son ordinateur et regarda sa sœur.
- Ce qui s’est passé hier est grave. Tu as pris une décision unilatérale qui nous met tous en péril et qui va avoir des répercussions jusque très haut. La présidente des parents d’élèves est furieuse. Jérôme t’aurait demandé d’aller aux toilettes, et tu lui aurais répondu : « Non, chie-toi dessus ! »
Eclats de rire autour de la table. Claire, Megan, Léopold, Charlie et Roland s’esclaffent sans gêne. Malcolm pousse un soupir exaspéré. Matt regarda Rachel d’un air lubrique.
- Je t’aime !
Vincent toussota lourdement.
- C’est sérieux !
- … ce qui veut dire qu’on doit rire encore plus fort ? souffla Matt.
Charlie regarda Matt, outragé.
« Je fais mon mec concerné pour la galerie, uniquement. En vrai, ça m’excite assez quand il est cynique en public… Même si cette salle des profs n’a rien de glamour, y’a plus d’une fois où j’aurais bien… enfin bref. »Vincent gratifia Matt d’un regard affligé, auquel le jeune homme aux cheveux bouclés noirs répondit par un insolent sourire. Léopold semblait agacé par le comportement du jeune homme. Vincent se détourna du professeur auquel il accordait visiblement peu de crédit. Charlie inspira.
« Cela dit, ses airs méprisants, il peut se les garder… »- C’est du sérieux, mademoiselle Heine…
- Madame.
- Aucune importance, vous…
- Ma-dame.
Rachel regarda Vincent avec fermeté. Charlie plissa les yeux et regarda Roland qui fixait Rachel.
« Ils recommencent leur petit jeu puéril, on n’est pas sortis de l’auberge… »- Madame Heine, bon sang… Vous avez dépassé les bornes !
- Alors. Je me permets de vous rappeler que dans le cadre de mon cours, je suis autorisée à affronter mes élèves si j’estime que c’est pertinent dans le cours. Or, ça l’était, mon cours portait sur les différences de niveau.
Vincent grimaça et agita la tête.
- Mouais…
- Ensuite, pour ce qui est de mes propos, c’est parole contre parole. Je nie en bloc avoir dit ça.
- C’est confirmé par les amis de Jérôme !
- Eh bien contrairement à certains de mes collègues, je n’enregistre pas mes cours donc on n’a aucune preuve que ça ait été dit !
Roland afficha un grand sourire. Malcolm frappa du plat de la main sur la table.
- C’est TOI ! C’est ta faute, tu l’as forcée à faire ça !!
Claire, Megan, Charlie, Léopold et Matt semblèrent stupéfaits. Malcolm montrait Roland du doigt comme un excité. Vincent en avait sursauté de tout son poids. Rachel leva les yeux au ciel.
- Mac…
- Tu nous en veux de t’avoir passé un savon pour le couloir, du coup tu as cru bon de demander à ma sœur de faire le sale boulot à ta place !! J’aurais dû m’en DOUTER !
- Tu… te… calmes ?! marmonna Roland, interloqué.
- Je vois bien comment tu la regardes, comme si elle avait accompli sa mission, là ! Depuis que vous êtes amis je SAIS que tu as une mauvaise influence sur elle !
« Mais qu’il est naïf, par Arceus… » songea Charlie.
- Heine, sans vouloir prendre parti, les histoires personnelles n’ont rien à faire à cette table… marmonna Vincent.
- Je n’ai RIEN demandé à Rachel ! souffla Roland. Elle est libre et indépendante et si tu as quelque chose à lui dire, tu peux lui dire !
- Il ne m’a rien demandé, j’ai fait ça par pur esprit de solidarité avec mes collègues. Hadley, dites simplement à cette mère indigne que rien de ce que j’ai fait ne dépassait le cadre de mon cours. Ce qui est vrai, n’est-ce pas ?
- En théorie, oui, en pratique…
- Sa mère n’est pas censée tout savoir.
Rachel regarda Charlie qui inspira.
- Vincent, elle a raison, rien de ce qu’elle a fait ne sort du cadre de son cours. En tant que prof de combat direct, elle a certaines largesses en matière disciplinaire qui font qu’elle peut se permettre de rudoyer un élève si ça sert son cours. En l’occurrence, oui, c’était le cas. C’est tout ce que madame Phelps a besoin de savoir. On a réglé le souci par nous-mêmes, l’administration n’a pas à intervenir, tout le monde est content. Et si j’étais vous, j’en profiterai pour faire un rappel à madame Phelps en lui disant clairement que certes, madame Heine y est allé fort MAIS elle n’aurait pas eu à être aussi vache si Jérôme s’était comporté correctement. Parce que je suppose qu’il ne s’est pas comporté correctement.
Rachel inspira en levant les mains.
- Ma formation me dicte d’absorber sans répondre. Autrement que par le combat.
- Justement, il y a des propos rapportés…
- Qui ne sont que des propos rapportés. C’est parole contre parole. Je suis la prof. Je sais ce que j’ai dit, à savoir : Rien qui ne devait être dit.
Vincent rehaussa ses lunettes. Malcolm enfonça sa tête entre ses mains. Megan et Claire étaient clairement ravies. Roland observait Rachel avec satisfaction. Charlie inspira.
« C’qu’il faut pas faire… »Léopold inspira.
- On peut pas dire qu’il y a rien eu et passer à autre chose ?
Malcolm, Vincent, Charlie et Roland regardèrent Léopold qui haussa les épaules, mal à l’aise.
- J… je supporte pas les conflits, ça me met à fleur de peau…
- Bon, je m’expliquerai avec madame Phelps, avec vos arguments, mais que ça ne se reproduise plus. Ça aurait pu remonter jusqu’au proviseur et au proviseur adjoint et ça aurait pu aller très loin. Vous avez pris un gros risque, madame Heine…
- Risque calculé, j’étais prête à m’expliquer avec la maman du petit, sans problème.
Malcolm secoua la tête et regarda Roland.
- Quand tu es dans les parages, je ne la reconnais plus !
- Malcolm, je suis la même que d’habitude, arrête de t’en prendre à Roland.
Malcolm regarda sa sœur et grommela en croisant les bras.
- Booon, c’est réglé… vous pouvez relâcher vos sphincters, Finsbury.
- Héhéhé… hem… souffla Léopold.
Charlie et Matt se regardèrent, quelque peu désabusés.
***
Rachel sortit de la salle, suivie par Roland qui arriva à ses côtés.
- Ça devient compliqué.
- Oui, mais d’un autre côté, ça devient excitant.
- J’avais compris. Même si, devant ton frère…
- Je parle de l’aspect dangereux, Roland.
- Oui… oui, bien sûr. Faut qu’on se tienne à carreaux.
- C’est un fait, on a trop joué avec le feu cette fois…
- Hem-hem…
Roland et Rachel se tournèrent vers Charlie. Matt traînait la patte derrière.
- Mais pourquoi tu vas aussi vite-heu…
- Sur le fond, je suis d’accord avec ce que tu as fait, et honnêtement après ce que ce gosse a fait à Matt, ça me démangeait, mais tu as pris un sacré risque. Ça marchera une fois de jouer sur les mots, mais franchement, fais gaffe.
Rachel hocha la tête.
- Je sais. Je l’ai fait précisément parce que je savais que je ne le ferais qu’une fois.
- Je me doute bien, je voulais juste m’en assurer.
- Tout va bien, Charlie, merci.
- Autant l’un que l’autre, filez doux, trop se faire remarquer, surtout dans ces circonstances, ça a rarement du bon.
Roland et Rachel se regardèrent et hochèrent la tête. Charlie leur fit signe de s’éloigner. Le duo s’éloigna donc. Matt arriva auprès de Charlie, un peu suspicieux. Charlie inspira.
- Je les connais depuis qu’ils sont gosses, parfois j’aime bien leur faire la morale.
- … mouais. Tu te débrouilles mieux avec eux qu’avec Bébécaille.
- Tu laisses Bébécaille où il est, s’il te plait ! sourit Charlie en levant les yeux au ciel.
- Hm. En tout cas je trouve ça mignon que tu joues les grands frères…
Charlie agita la tête.
- Disons que je leur suis redevable.
- Ah.
- Ca date d’avant qu’on se mette ensemble.
- Ok.
Charlie regarda Matt qui semblait déjà passé à autre chose. Il inspira en se dirigeant vers sa salle.
« Un autre truc que j’aime avec Matt c’est qu’il ne cherche pas à créer de conflits inutiles en posant des questions inutiles. Alors qu’avec Léo, c’était tout le temps comme ça, de son côté comme du mien. On se prenait tellement la tête. Et je suis tellement loin de ça avec Matt… »- J’y vais, ma petite salle fétiche m’attend. Les seconde années, ce matin.
- Oh, cool. Moi les première, pour l’introduction à la professionnalisation.
- Tu vas tellement t’éclater… geignit Matt, sarcastique.
Charlie leva les yeux au ciel.
« Alors oui c’est vrai que de loin, notre relation, ça peut ressembler à On déconne, on s’amuse et on baise, mais c’est peut-être justement tout ce dont j’avais besoin. Certes, parfois j’aimerais qu’on avance en tant que couple et après je me dis… pour quoi faire, franchement ? Vous êtes très bien comme vous êtes, inutile de vous encombrer avec des conneries. C’est mon crédo depuis que je suis avec Matt. Et ça marche, alors… »- Hey !
Charlie sursauta presque. Léopold.
- Hon. Hey…
- Ça va bien ?
- Tu veux dire depuis la réunion qu’on vient d’avoir et où tu étais en face de moi ? Ouais.
- Hm, dis donc, il me semble que cet après-midi tu as un cours sur le terrain avec les quatrième…
- Oui…
- Tu as choisi un accompagnateur ?
- Oui.
- Parce que tu sais que tu dois prendre un professeur de dressage, hein !
- Hm-mm.
- Donc pas Matt.
- Hm-mm.
- Tu vas prendre qui alors ?
- Roland.
Léopold sembla dépité.
- … mais euh… et les années précédentes…
- Les années précédentes, je n’avais personne, Rachel et moi on se complète assez dans nos branches respectives, Claire et moi on n’est pas super proches, Megan aussi, c’est sympa de faire ça avec toi mais ce serait plus sympa avec Roland.
Léopold baissa la tête, visiblement affecté.
- Ok, euh… bah… amusez-vous bien…
- C’est pas pour s’amuser, Léo, c’est du travail.
Léopold se dirigea vers sa classe.
« Matt a raison, il est ridicule à trouver des prétextes. Et puis pourquoi il cherche autant mon contact ?! A vue de nez, ok, Annette a pas l’air hyper marrante, mais bordel il est marié et ils ont un enfant, pourquoi il me reniflerait les fesses, d’autant que je suis en couple, et… C’est trop tordu ! »Charlie entra dans sa classe. Les premières années semblèrent se demander à quelle sauce ils allaient être mangés. Charlie sortit Bébécaille qui se posa dans le coussin en velours sur le bureau. Les élèves semblèrent charmés et cessèrent leurs conversations. Charlie sourit et sortit son Tengalice qui alla se poser sur un perchoir dans la salle.
« Tu m’étonnes qu’il vole celui de Rapasdepic à l’appart… »Les élèves furent cette fois impressionnés. Le silence se fit dans la salle. Charlie acquiesça.
« Toujours aussi doué pour les tenir en respect, Winchester… »Debout, à la manière d’un conférencier de grande société, Charlie s’appliqua à faire son laïus aux élèves.
- Le monde des Pokémon. Notre monde. L’Histoire nous apprend quel rapport compliqué et conflictuel nous avons avec les Pokémon. Ils ont tantôt été des armes dangereuses que nous pensions devoir repousser et combattre. Ils ont tantôt été des armes dangereuses que nous pensions pouvoir apprivoiser. Ils sont devenus des alliés, des compléments, des fragments de notre personnalité. Nous les dressons.
Charlie fit un signe à son Tengalice qui sauta vers son maître, puis vers les élèves qui crièrent de surprise. Le Pokémon se posa sur un pupitre vide et y resta, posé sur une patte, l’air de scruter la scène.
- Nous les contrôlons.
Charlie désigna un autre pupitre sur lequel Tengalice sauta sans difficulté.
- Nous combattons avec eux.
Charlie demanda à Tengalice de revenir vers lui. Il envoya Rapasdepic. Les deux Pokémon se frappèrent, l’un avec son bec, l’autre avec son pied. Les deux se firent face, chacun d’un côté de Charlie.
- Mais surtout, nous vivons avec eux. Même s’il n’est plus obligatoire d’avoir un Pokémon en tant que citoyen Poképolite, 80% de la population de Poképolis possède au moins un Pokémon, et environ la moitié dresse sérieusement ses Pokémon. Cette partie de la population choisit généralement d’exercer un métier en lien avec les Pokémon, ce qui fait d’eux, ce qu’on appelle un Dresseur Professionnel.
Charlie pressa un bouton sur son ordinateur qui afficha les mots en grand : « DRESSEUR PROFESSIONNEL ».
- Qu’est-ce qu’un dresseur professionnel ? Eh bien par exemple, en tant que professeur de dressage Pokémon, je suis donc d’emblée un dresseur professionnel. Un dresseur professionnel, c’est quelqu’un dont la profession implique de près ou de loin des Pokémon.
Charlie changea l’écran de sa présentation pour montrer sa carte dresseur. Certaines parties étaient censurées.
- Cette carte, que vous avez tous, est une banale carte dresseur à première vue. Il y a mon nom, mes prénoms, ma date et mon lieu de naissance, ma taille, mon adresse, mon Identifiant dresseur, qui consiste en cinq chiffres, mon origine académique ainsi que les icônes correspondant aux Pokémon que j’utilise. Vous pouvez mettre votre carte dresseur à jour avec un simple ordinateur dans l’encoche-scan prévue à cet effet. Quand vous capturez un Pokémon, il est référencé officiellement comme l’un des vôtres grâce aux Pokéballs qui sont des objets connectés, mais sur votre carte dresseur, vous devez le faire apparaître obligatoirement. La carte dresseur est une carte d’identité, et vos Pokémon font partie de votre identité. Vous voyez que j’ai quatre Pokémon actuellement : Tengalice, mon Pokémon Académique. Son icône est entourée d’un cadre bleu. Rapasdepic, ma première capture, Ectoplasma, ma seconde capture, tous les deux cernés d’un cadre rouge, et Bébécaille, cerné d’un cadre vert, parce qu’il est issu d’un œuf que j’ai fait éclore moi-même. Pourquoi ces cadres, eh bien pour déterminer votre niveau de responsabilité vis-à-vis du Pokémon ainsi que le niveau de prise en charge en cas de soins – mais ça concerne plus les centres Pokémon. Les étoiles, c’est l’expérience en tant que professionnel. J’ai vingt-six ans, je suis professeur depuis ma sortie de la fac, de fait je suis classé trois étoiles mais c’est purement en vertu de mon ancienneté et de mon niveau. J’ai des collègues plus
forts que moi qui ont moins d’étoiles et d’autres plus faibles qui en ont plus. Bref…
Charlie se rassit à son bureau et éteignit le projecteur.
- Quel est le but de ce cours. En première année, je vous apporte une théorie, en deuxième et troisième, je vous apporte des éléments, en quatrième et cinquième je vous apporte la pratique et en sixième année, je vous prépare pour votre orientation en fac et ce qui s’ensuit. En tant qu’élève de cette école, vous avez tous un dossier chez moi, c’est moi qui me charge de vos projets professionnels, si vous en avez. Je peux aussi altérer votre formation, à savoir que mes notes personnelles servent à tous mes collègues. J’ai un rôle de régulateur de votre formation au sein de l’équipe pédagogique. Evidemment, je vous le dis pour que vous n’ayez pas l’impression que je contrôle votre avenir : 1, vous faites ce que vous voulez de votre vie ! 2, mon activité est extrêmement contrôlée, je suis surveillé notamment par le bloc éducation de l’Association Pokémon à laquelle je rends des comptes permanents. 3, mon cours est exclusivement magistral, si vous avez une question, je peux vous prendre sur rendez-vous lors de la dernière heure de la journée que je réserve pour ça, mais de manière générale, j’évite les interactions pour éviter les frictions. Mon rôle est également de repérer les potentiels afin d’accentuer certains suivis. Dans la sixième année deux, que je gère depuis leur arrivée ici, j’ai plusieurs élèves qui vont bénéficier de ma recommandation expresse pour obtenir en fac des stages pour devenir professeurs, assistants de champion d’arène ou même simplement policier. Bien. Est-ce que vous avez des questions, est-ce que tout le monde a bien compris… Oui ?
Le gamin avait levé la main en tremblotant.
- Euuuh… mais là en première année, on…
- Je vais juste vous expliquer ce qu’est la professionnalisation, les métiers, les moyens d’y accéder.
- Euh d’accord.
- Je sais que c’est un peu effrayant à première vue mais ne vous inquiétez pas, en première année, vous m’avez seulement deux heures par semaines, ça vous laisse le temps de réfléchir à tout ça.
Le jeune homme hocha la tête. Charlie sourit.
« J’avoue être assez fan de l’impression bien badass que je leur donne alors que concrètement je passe mes semaines à vérifier des mails et à élaborer des tableaux croisés dynamiques ! »- Bien. On commence donc avec un rappel d’éducation civique...
***
- Avant de commencer le cours, petit rappel de civisme…
Roland regarda la Quatrième Cinq et notamment le petit Jérôme Phelps qui semblait s’être bien fait engueuler par sa mère la veille.
- A savoir que les cours sont faits pour être suivis et non otages de quelques contestataires. Comme disait un grand écrivain, « Il y a autant de manières de se révolter que de raisons de se révolter et de sujets de révolte », mais quitte à vous révolter, révoltez-vous pour de bons motifs. Un professeur raciste, un surveillant homophobe, le personnel de la cantine qui reluque les élèves… Mais pas quelque chose d’aussi bête qu’un emploi du temps.
Grommèlements dans la salle. Roland inspira.
« Je sais, je mets mon grain de sel où il faut pas, mais bon… »- Bref. On passe au cours qui va concerner les techniques avancées, quand on combine deux attaques, avec un ou deux Pokémon, et on va notamment examiner les implications quand les Pokémon qui effectuent la combinaison sont contrôlés par un ou deux dresseurs.
***
- La région des grottes inutiles, c’est clairement Sinnoh. Je dis pas ça parce que j’aime pas cette région, je dis ça parce que j’aime pas cette région.
Certains élèves de la deuxième année sourirent, connaissant l’humour de leur prof.
- Le Mont Couronné est un vrai gruyère, un labyrinthe de grottes qui se fragilise de décennie en décennie à mesure que l’homme l’exploite et l’explore. De par son emplacement en plein milieu de la région, de toute façon, le relief allait forcément être gênant. D’autant que d’après la légende, Arceus vit au sommet de la montagne. Du coup, ce qui au départ ne devait être qu’un simple tunnel semi-routier s’est avéré être un véritable réseau de tunnels qui au fur et à mesure a abimé l’écosystème de la montagne.
Matt alluma son rétroprojecteur.
« Je sais jamais me servir correctement de ce truc… » et montra une série de photos de la grotte.
- Comme vous le voyez, à mesure que le temps passe, la grotte prend une teinte de plus en plus bleutée, la roche se charge de fer – ce qui explique que ce soit le lieu d’où les Magnézone et les Tarinorme sont originaires – et en fait à mesure qu’on creuse la roche, les couches géologiques sont de plus en plus ferreuses et la grotte prend cette teinte bleutée. Le danger c’est que la charge en fer ne perturbe les Pokémon sauvages du coin et qu’on se retrouve avec une Île de Fer 2. Avec les Racaillou qui développent une affinité électromagnétique sans pouvoir vraiment la maîtriser et qui évoluent en des Gravalanch sans jambes, qui lévitent, donc, et qui une fois évolués en Grolem, ne peuvent pas se rouler en boule complètement. Mais je suis juste professeur de Fondamentaux, je n’ai pas à entériner là-dessus, toujours est-il que cette anomalie a amené à une évolution de l’espèce à Alola, et que les scientifiques de la région ont exporté du minerai issu de l’île de Ula-Ula pour faciliter une transition écologique plus simple pour les Racaillou de l’île. On va peut-être aboutir au même constat pour le Mont Couronné sous peu, si on continue à creuser plus profond et plus largement dans la montagne.
Matt inspira.
- Mais revenons à la géologie…
- Monsieur, y’a d’autres Pokémon qui sont concernés ?
Matt plissa les yeux.
- Euh, je suis pas trop censé vous parler de Pokémon dans ce cours.
- Oui mais c’est pour savoir, ma cousine elle habite près du Mont Couronné à Sinnoh et si ça se trouve ses Pokémon sont malades…
Matt grimaça. Brouhaha dans la classe.
- Nan mais je voulais pas dire malade, je voulais dire que ça les perturbait d’un point de vue environnemental. Même nous, ça nous touche. La charge en fer perturbe l’économie agricole autour de la montagne, c’est un fait connu, la terre est très riche en fer, ça oblige les fermiers notamment de Bonville à déplacer leurs champs près des temples. Mais les Pokémon dressés c’est autre chose, ils subissent moins l’environnement, vu qu’ils ne sont pas sauvages. Ca répond à ta question ?
- Oui bah oui.
- Bon. Je continue, grand trois, topographie sylvestre…
***
- Mais QU’EST-CE QUI NE VA PAS CHEZ VOUS ???
Megan inspira en regardant les autres professeurs dans la salle de l’équipe pédagogique.
- Si c’est comme ça à chaque interclasse, perso, je vais ouvrir un camion à burgers…
- J’te rejoindrais… souffla Rachel.
- On fait ça à trois les filles… geignit Léopold.
Vincent ignora les trois professeurs et se tourna vers Matt.
- Vous n’êtes pas censé parler de Pokémon dans votre cours !
- Ma parole, vous avez des drones espions ou quoi ?! s’étonna Matt.
- Je suis sûr que Matt ne pensait pas à mal… souffla Charlie.
- C’est la déléguée des élèves de deuxième année, Fatima, qui est venue me dire que vous aviez évoqué l’influence du fer sur le comportement des Pokémon.
- Alors déjà, je tiens à dire que ce système de délégués qui rapportent la moindre merdouille, c’est un coup à créer des souffre-douleur dans chaque classe ! marmonna Matt.
- Je suis SERIEUX, Clancy ! Non seulement vous recommencez à faire de la propagande écologiste…
- J’aurais jamais dû faire mon coming-out végétarien… plaisanta Matt.
Charlie lui donna un coup de coude. Matt regarda son petit ami qui serra les dents. Matt inspira.
- Pardon, papa, je le referais plus.
- Clancy, vous êtes un prof correct et surtout vous êtes le…
Tout le monde regarda Vincent qui semblait chercher une formule adéquate.
- …petit ami… de Winchester…
- Je préfère « Partenaire de bridge », ça rend mieux devant maman.
Claire ne put s’empêcher de pouffer. Roland souriait ostensiblement. Rachel et Charlie, tout gênés qu’ils étaient, taillèrent un sourire. Megan elle-même se risqua à un rictus. Seul Léopold était au comble de l’embarras.
- Restez sérieux une minute. Vous n’arrêtez pas de cumuler les petits problèmes d’année en année, et d’année en année depuis que vous êtes là, je vous avertis que ça va vous retomber dessus…
- Je clarifie les propos de monsieur Hadley : On n’a aucun problème pour te soutenir s’il t’arrive quelque chose, mais ne provoque pas ta chance.
- C’est d’un chaleureux.
- On a déjà eu cette discussion, et déjà eu une réunion avec les délégués des classes, Matt est un professeur apprécié des élèves, ça lui arrive de dériver de son cours mais comme il l’a dit lui-même, il ne pensait pas sérieusement influencer les élèves ou parler de Pokémon dans son cours.
Vincent se pinça l’arête du nez.
- J’ai le proviseur adjoint au cul cette année, on est l’équipe pédagogique la plus jeune de l’établissement en moyenne depuis le départ de Meredith, je ne peux pas accepter le moindre écart.
Roland inspira et leva la main, mais Charlie le prit de cours.
- Bon, passons. Vincent, j’ai choisi mon co-intervenant pour le cours en plein air de cet après-midi…
- Pour rappel, vous pouvez pas prendre Clancy, Monsieur Heine ou moi.
Charlie agita la tête.
« Oh oui, Malcolm ou Vincent, ce serait TEEEEELLEMENT le fun… »- Je prends Roland.
- Pas Finsbury cette année ?!
- Non.
Roland haussa les sourcils.
- Euh, Charlie, t’aurais pu m’en parler…
- J’voulais te faire la surprise ! Je savais que tu avais un trou…
- … que je comptais utiliser pour retranscrire mes enregistrements…
- Eh bah tant pis, je perturbe ton emploi du temps !
Roland inspira et regarda Vincent.
- Vous approuvez ?
- … quoi, bah oui, bien sûr, j’approuve, pourquoi vous…
- Je sais pas, j’ai l’impression que chaque mouvement fait l’objet d’un conseil disciplinaire, je dois avouer que j’étais à deux doigts de demander à changer d’équipe pédagogique voire à démissionner.
Et hop, comment jeter un froid monumental sur une salle. Roland inspira et regarda Charlie, tout aussi estomaqué que les autres.
- Mais bon, si ça vous va, pas de souci Charlie, je serais content de t’accompagner !
Charlie hocha doucement la tête tandis que Matt et Claire se regardaient, éberlués.
***
- Tu sais comment te faire remarquer décidément…
Roland inspira en regardant Rachel.
- C’était comme ça les années précédentes ?
- Oui mais on se tenait plus à carreaux. La meuf qui était là avant toi était… spéciale.
- Meredith, c’est ça…
- Ouais. Une grande gueule. L’ex de Vincent, à ce que j’ai compris. Elle faisait des pieds et des mains pour être mutée à Alola, et c’est arrivé l’année dernière, du coup on…
Charlie arriva en trombe et prit Roland par les épaules, horrifié.
- Tu comptais pas sérieusement me faire ça ?!
Roland regarda Rachel qui haussa les sourcils.
- J’ai rien contre mais demandez l’avis de Matt avant, ça se fait pas !
Roland leva les yeux au ciel et regarda Charlie.
- J’étais à moitié sérieux, Charlie…
- Après tous les efforts qu’on a fait avec Rachel pour que tu intègres…
- Je sais, je suis désolé, je voulais juste… C’est insupportable, cette ambiance à chaque interclasse, j’ai l’impression d’être dans un métro bondé en permanence, c’est oppressant. Il faut cesser ces réunions permanentes.
- Certes, mais s’il te plait, ne démissionne pas, ne change pas d’équipe, on a tellement bataillé pour tous bosser ensemble, pour tous être bien…
- Je sais Charlie, je sais…
- Je veux plus me retrouver seul !
Roland hocha la tête. Rachel fit de gros yeux. Roland se « désincarcéra » de Charlie.
- Tout va bien, je n’étais pas sérieux, Charlie, je viens à peine d’arriver, tout ça me semble un peu… trop foufou pour une première expérience… mais je suppose qu’avec le recul, ce sera formateur.
- Je sais, mais on a besoin de toi, j’ai besoin de toi !
Roland grimaça. Matt arriva derrière Roland en levant la main.
- Moment gênant bonjour, que se passe-t-il ?
- Charlie vient de déclarer son amour à Roland.
- Ah, donc j’avais raison, on se dirige vers une partie à trois. Je préviens mon esthéticienne !
Charlie et Rachel regardèrent Matt, désabusés. Matt soupira.
- Ok, j’arrête.
- Tu peux m’expliquer en quoi ça consiste ton truc de cet après-midi ?
- … Oh ! Oui, c’est un cours en extérieur avec les quatrième année. On est début septembre, et il y a une espèce de Pokémon qui effectue sa migration début septembre sur la route 4, la Route Fleurie…
Roland haussa les sourcils et regarda Rachel qui regarda Charlie qui regarda Roland, Matt et Rachel. Roland grimaça et répondit en agitant la tête.
- Charlie, jeee suis dans la région depuis à peine une semaine…
- Ah oui…
- Et je ne suis pas mon père, l’observation des Pokémon sauvages est quelque chose qui a tendance à me lasser…
- Oui bah oui…
- … et je ne connais pas les cycles migratoires des Pokémon sauvages non plus, d’autant plus du coin, donc…
- Evidemment ! Flabébé ! C’est Flabébé qui migre. En fait, il existe cinq espèces de Flabébé, enfin, cinq variétés dont trois qui vivent sur cette route comme tu dois le sav…
Roland cligna bruyamment des paupières. Matt et Rachel étaient morts de rire. Charlie baissa la tête, contrit.
- Pardon, pardon ! Les variétés bleue, orange, rouge et jaune se partagent les jardins des routes sud et ouest autour d’Illumis. La variété blanche se trouve sur toutes les routes, elle est plus rare. Pendant la migration, on assiste à plusieurs phénomènes, notamment des échanges de fleurs ou des cérémonies pour les fleurs sauvages, ainsi que des rites funéraires pour les fleurs fanées, et avec une classe, chaque année, je prends un tour de garde avec les jardiniers de la route qui sont des dresseurs professionnels.
Roland hocha la tête.
- Ça peut être intéressant, oui…
- Mais oui, et puis ça te permettra de voir un autre aspect du métier de prof ! sourit Charlie, désarmé.
- Je vais bien, Charlie, je reste avec vous, ne t’en fais pas.
- Hm. A tout à l’heure, on se rejoint dans le hall à l’heure initiale du cours.
- Ok…
Roland s’éloigna en compagnie de Rachel. Matt regarda Charlie qui soupira.
- Désolé, j’ai… un peu paniqué.
- Oui… écoute, je sais qu’habituellement, je pose pas de questions, je la joue sous-marin, je fais celui qui s’en fout de tout…
- On a vu ça tout à l’heure… geignit Charlie.
- Ouais, mais euh… y’a eu quelque chose entre toi et Roland ?
Charlie haussa les sourcils.
- Non ! Matt, quand même !
- Une part de moi suppose que tu me le dirais si c’était le cas et qu’on en rigolerait ensemble, mais une autre part de moi se dit aussi que si ça a été le cas, tu peux me le cacher parce que ça revêt une sorte d’importance spéciale…
Matt regarda Charlie qui semblait tétanisé.
« Ne montre aucune émotion, il lit en toi comme dans un livre, ne tique. Surtout pas. »- … ou alors j’suis parano…
- Ouais, c’est quoi cette question ?! J’le connais depuis tout petit !
- Hm… pis en fait ça m’intéresse pas.
Charlie agita la tête, stoïque.
« OUUUUUUUUUUUUF…… »- Bon, du coup, mon prochain cours porte sur les règles de français avec les noms de Pokémon, c’est la fenêtre ouverte à tous les débordements, non ?
- Hadley et Heine abusent clairement… soupira Charlie. En même temps, tu pourrais faire mieux que professeur de fondamentaux…
Matt inspira.
- On ne va pas avoir une énième conversation « Mathieu Clancy est en deçà de ses capacités… »
- Tu aimes déborder de tes cours, c’est bien que tu as envie de faire plus, inconsciemment…
- Je suis bien là où je suis, juste enseigner des rudiments de petites classes, ça me convient…
- Je sais…
- Tu vois ton histoire de trois petits mots ? Bah devant le gros rouquemoute et le petit nerveux, c’est « Foutre la merde », mais ici, au boulot, ce serait plutôt : « Ça me convient ». Cette situation, ce couple, bosser avec toi ici, alors que…
Matt soupira.
- … clairement je préfèrerais être juriste ou avocat…
Charlie ferma les yeux et se mordilla les lèvres. Matt inspira.
- Mais ça me convient. Cette situation, d’être en deçà de ce que je peux faire réellement, ça me convient, je suis heureux comme ça. Pourquoi vouloir d’un hypothétique « plus » qui ne m’apporterait rien de meilleur ? Je sais que tu me dis ça parce que tu es carriériste, et moi non, mais… respecte mon choix de vouloir juste ce qui me convient. Pas plus. Pas moins. Juste ce qu’il me faut.
Charlie hocha la tête, un peu en déprime. Matt inspira.
- Toilettes des profs ?
Charlie releva la tête.
- … Matt ?!
- J’en ai marre de te voir faire cette tête. Une petite pipe vite fait avant la reprise ?
- Putain, moins fort !!
- Y’a du monde, personne nous écoute. Toilettes des profs ?
Charlie regarda autour, capta le regard plein de vice de son compagnon, puis regarda la porte. Il inspira.
- Adjugé…
- Bah voilà, tu vois, c’est facile !
Charlie leva les yeux au ciel en suivant Matt.
« Oui, c’est sûr que pour toi tout est facile, avec ton insouciance permanente. Parfois c’est frustrant parce que j’ai l’impression que tout repose sur moi, et puis ensuite je me rappelle à quel point j’aime cette sensation de contrôle… »Les deux hommes entrèrent dans un box en veillant bien à ne pas être vus.
« Et puis ça me fait du bien. Cette façon dont tu me complètes, comme si tu sentais que j’avais quelque chose à combler, et c’est sûr qu’entre mes parents distants, mes sœurs distantes, mon meilleur ami sans cesse équivoque… et mon rapport peut-être un peu ambigu à Roland et Rachel… »Matt et Charlie s’embrassèrent avec tendresse.
« Mais toi, toi, tout est simple avec toi, toute ma vie compliqué, mes rapports aux gens compliqués, mes petits états d’âme… tout ça, tu le balaies et ça me sidère à chaque fois, comme tu mets un brin d’aisance dans tout ce qui t’entoure… »Matt s’éloigna de Charlie avec un sourire vicieux, puis se mit à genoux.
« En ce qui me concerne, ‘tout va bien’ et toi, ‘ça te convient’, mais pourquoi alors, pourquoi ai-je l’impression que quelque chose cloche, pourquoi cette inquiétude au fond de moi… »- Matt…
- Petit cochon, tu as remis le même boxer qu’hier ! sourit Matt.
- Je sais que t’aimes bien !
Matt sourit et plongea son visage entre les jambes de Charlie.
« Et hop, plus d’états d’âmes ! »***
Roland allait vers sa salle. Il fut rejoint par quelqu’un qui lui tapota dans le dos ce qui le fit sursauter.
- UARPS ! Justin !
- Coucou ! Pardon de vous avoir fait peur…
- Vous m’avez juste un peu surpris !
- J’ai appris que vous étiez l’accompagnateur de monsieur Winchester pour son petit stage aux quatrième années…
- Oui je… viens de l’apprendre aussi !
- D’accord. Vous devrez signer une décharge ainsi qu’un formulaire, ce cours supplémentaire dans votre emploi du temps va vous conférer une prime !
- Oh !
- Rien de faramineux, on vous paie juste deux heures supplémentaires !
- Oh.
- Voilà, c’était juste pour vous avertir.
Roland regarda le Okéoké dans les bras de l’homme au manteau long beige. Il tapota la bosse sur la tête du Pokémon qui sautilla et agita ses oreilles, ravi. Justin sourit.
- Je vois que vous savez y faire !
- Oh sans plus. J’ai des rudiments d’élevage par ma mère et ma tante, elles m’ont appris à m’occuper des bébés Pokémon !
Justin sourit.
- C’est que vous seriez presque bon à marier !
- Oh ça non… enfin, ça n’est pas… dans mes projets…
Justin hocha la tête en fermant les yeux pour marquer son approbation.
- Vous avez raison, à nos âges, autant profiter de la vie !
- Hm. Monsieur Truce…
- Appelez-moi Justin, enfin !
- Je dois vous poser une question professionnelle, du coup je change de ton ! sourit Roland.
- Allez-y.
- Est-ce que… l’administration a quelque chose contre les professeurs ? Non, j’ai mal formulé, est-ce que l’administration fait une chasse aux mauvais profs… Je sais pas comment formuler ça !
- Prenez votre temps.
Roland inspira et regarda Justin.
- Mon équipe pédagogique… est en permanence dans le foutoir parce que monsieur Hadley et monsieur Heine ont en permanence des choses à redire sur… tout, et ils ont l’air d’avoir peur de l’administration, du proviseur adjoint…
Justin serra les dents en levant les yeux au ciel.
- C’est un cas, je le confesse…
- De là à ce que ça psychote à chaque interclasse…
Justin inspira.
- Ecoutez. Je fais partie de cette administration, d’accord ?
- Et justement, vous m’êtes tellement sympathique, je ne comprends pas leur réaction…
Justin hocha la tête en levant une main.
- Certes. Et c’est pourquoi je vais tout simplement vous dire d’attendre de rencontrer le proviseur adjoint en question pour vous faire une idée, de, disons…
Justin inspira fortement.
- … l’étendue de la gravité de votre situation.
Roland resta bouche bée. Justin inspira.
- Juste un conseil, Roland : Restez dans les clous. N’en sortez pas. Vos collègues savent de quoi ils se protègent. Vous, pas encore.
Justin repartit, énigmatique. Roland le regarda, presque fasciné.
« Il a quelque chose d’assez magnétique, je dois admettre… »- Hey…
- AH mais qu’est-ce que vous avez tous à me surp… Claire ?
- Vous n’étiez pas sérieux, hein ? Pour ce qui était de partir ?
Roland regarda la petite rousse et secoua la tête en inspirant.
- A moitié. Disons que je ne comprends pas de quoi ils ont peur, alors ok, il y a eu des équipes pédagogiques dissoutes, mais de là à dramatiser comme ça, systématiquement…
- C’est le début de l’année, le climat va s’améliorer, c’est déjà moins oppressant que l’an passé…
- « Moins oppressant » ?!
- Votre prédécesseur, madame Tucson, Meredith Tucson, c’était… une femme très excitée. Elle et Rachel ont failli en venir aux mains. Elle dégageait une certaine… fureur. C’était agaçant voire pesant pour moi, Megan et Rachel, elle terrorisait Léopold également, seul Charlie osait lui tenir tête, et Matt l’évitait carrément.
- Je vois…
- Elle sortait avec monsieur Hadley, mais… j’ai cru comprendre… ne le répétez pas…
Roland secoua la tête.
- … qu’elle et monsieur Heine avaient eu une aventure.
- … d’accord.
- Et que ça aurait conditionné son départ, entre autres. Ainsi que la séparation avec Vincent. Qui n’est évidemment pas au courant.
- C’est pour ça que vous êtes aussi véhémente avec Malcolm ?
- N… non, je n’ai pas à juger… même si du coup ça rend leur complicité avec Vincent un peu bizarre…
- En effet…
- Mais je vous assure que les choses ne peuvent aller qu’en s’améliorant.
- Si vous le dites. Mais ne vous inquiétez pas, je ne vais pas partir. Pour le moment. Pourquoi ça vous intéresse de savoir si je reste ou si je pars ?
Claire haussa les épaules.
- Charlie est trop sérieux, Matt ne l’est pas du tout, Léopold est mon meilleur ami, il est gentil mais entre sa femme et Robbie il est souvent accaparé, monsieur Hadley est un brave homme mais notre relation est, disons, compliquée, et monsieur Heine… brrrr…
- Je vous assure que Malcolm n’a pas toujours été comme ça, il a bon fond…
- Vous dites ça parce que vous connaissez bien Rachel…
- Probablement…
- Disons que ça me fait plaisir d’avoir quelqu’un de… normal dans l’équipe.
Roland hocha la tête.
- Je… vais entrer dans ma salle, si vous permettez.
- Oui, oui, les cours, c’est vrai ! A tout à l’heure !
- Hm !
Roland se précipita à l’intérieur de sa salle vide, s’y enferma et inspira lourdement.
« Elle est oppressante ! Comment je peux lui dire que ça m’embête, sa promiscuité ?! Et c’est pareil pour le doyen, c’est quoi cette manière de venir me parler, Charlie aurait tout à fait pu me le dire avant qu’on sorte… Pourquoi ce besoin d’être sur mon dos ?! »Il sortit son inhalateur.
« Je devrais peut-être sérieusement réfléchir à changer d’équipe pédagogique… pour mon bien ! »Il respira lourdement en s’asseyant au sol dos à sa porte.
« Je suppose que ça a été aussi compliqué pour papa et maman… et à une époque plus ancienne… J’ai peut-être pas ce qu’il faut finalement… Cette ambiance étouffante, cette impression de devoir rendre des comptes permanente… »Nouvelle bouffée d’inhalateur. Puis une autre…
***
Rachel avait mis les troisième années sur un test d’évaluation, Roland lui envoyait des textos.
[Le doyen et Claire qui m’ont tenu la jambe à l’interclasse, désolé…]
Rachel agita la tête.
[Tu fais ce que tu veux, on n’est pas mariés ;)]
Elle attendit la réponse en souriant.
[… je commence à ne plus trouver ça très drôle… -_-‘’]
Rachel se mordilla les lèvres.
« Ok, grosse tambouille émotionnelle, plan B, Rachel. »Elle fit signe à Sucreine. Le Pokémon se leva le plus discrètement possible et vint prendre le téléphone de sa maîtresse qui la remercia d’un signe de tête. Le Pokémon Fruit retourna ensuite s’asseoir. Rachel inspira.
« Ca va peut-être être plus compliqué que prévu, de bosser ensemble à l’académie… »***
- Bon j’vous préviens on m’a passé un savon ce matin, le cours va être aride comme les fesses d’un Volcaropod…
Matt s’assit à sa place et s’essuya la bouche d’un revers de la main.
- On aborde les fonctions grammaticales, les enfants !
Les premières années frissonnèrent.
***
- Les grandes guerres de Kalos, tout comme le problème des Ultra-Chimères à Alola, sont des facteurs qui ont contribué à ce que longtemps, Poképolis leur… fasse un peu la tronche, comme on dit, et ne leur interdise l’intégration à la fédération. Et paradoxalement, alors qu’Unys a un bien plus gros et plus lourd problème à ce niveau-là, l’intégration s’est faite sans problème. Pourquoi, c’est ce que nous allons voir aujourd’hui…
Vincent fit signe à son Carapagos. Le Pokémon appuya sur le bouton du rétroprojecteur avec sa nageoire. Une carte de Poképolis s’afficha.
- Tout d’abord, les tractations entre Unys et Poképolis datent d’il y a bien longtemps. Les Sept Sages qui gouvernaient la région à l’époque, avaient engagé des négociations poussées avec les gouvernements de Hoenn et Johto, bien plus conservateurs que Sinnoh, un poil plus progressiste, et Kanto, relativement libérale. Le Maître de Conseil de l’époque, Ghetis, avait très clairement avancé ses pions un à un, donné des garanties, monétaires, militaires, foncières, bref il avait vendu sa région, hein, on va pas se leurrer. Le plus… incriminant dans cette histoire c’est l’usage de son enfant, N, si si, c’est son vrai prénom, la lettre N, comme ambassadeur. Toujours accompagné de ses trois gardes du corps, même aux réunions du congrès IPP. C’était pas très chaleureux, mais ça a marché, et voir un enfant parler au nom des intérêts de sa région a comme qui dirait fait son petit effet.
***
- On recense une centaine de milliers de cas stratégiques, et vous ne pourrez pas les apprendre tous par cœur, évidemment. Le professeur Etienne Smirnoff a tenté, en compagnie de ses anciens élèves Jules Chamfort et Adam Merridew, de les classer par catégories, et même si leur classement n’a pas été reconnu comme officiel par la communauté des stratèges Pokémon, il reste une référence pour nombre d’entre nous.
Megan inspira et regarda son Aéromite, posé derrière elle sur sa chaise qui battait doucement des ailes.
- Même si je retiens leur catégorisation, je serais plus pragmatique : Généralement on répertorie les cas stratégiques par Pokémon concerné. C’est le plus simple. Par exemple il existe 33 cas stratégiques concernant Aéromite, dont le cas d’un Aéromite aux ailes huilées qui était incapable d’utiliser des poudres et qui avait, en lieu et place, développé des équivalents psychiques. Ou encore ce cas d’un Aéromite qui aurait vaincu un Dracolosse en utilisant seulement Poudre Toxik lors du test de l’intelligence artificielle « HélixTwitch ».
Megan caressa le Pokémon insecte qui sembla apprécier.
- La connaissance des cas stratégiques permet de voir son Pokémon sous un autre œil, et je vous recommande évidemment de vous renseigner abondamment par le biais du référentiel officiel trouvable sur la partie « Outils Elèves » du site Pokébip, à propos des cas concernant vos propres Pokémon.
Son téléphone vibra. Message d’une certaine Laura.
[Tu rentres à quelle heure ?]
Megan haussa un sourcil et répondit rapidement.
- Je vous mets en garde, à part si vous avez fermement décidé de vous y atteler, n’utilisez pas ces cas pour votre entrainement personnel. Leur connaissance permet simplement d’être conscient des exceptions.
[La même heure que d’habitude.], renvoya la prof avant de retourner le téléphone sur son bureau.
***
Repas de midi. Roland s’était mis face à Charlie qui lui détaillait par le menu ce qu’ils allaient faire.
- Le but c’est de se tenir aux principaux points floraux de la route. Les jardiniers ont strictement réduit ces points pour faciliter les choses, ce qui est un peu moins bien fait sur la route 7 mais passons, toi et moi, nous allons nous placer aux abords de la route, près de Neuvartault. Le but est d’empêcher les captures de Flabébé par des dresseurs ou par des braconniers. Surtout par des braconniers. Comme tu vas t’en rendre compte, ça va grouiller. Les élèves vont également se placer sur l’ensemble de la route sous la houlette des jardiniers et de nous deux, par groupes de quatre. Ça te semble gérable ?
- Oui, tout à fait ! assura Roland.
- Bon ! Ensuite, en tant que professionnel honoraire, tu as toute autorité, donc n’hésite pas à jouer les gros bras, la capture de Pokémon en pleine migration est techniquement interdite, et cette migration est indispensable à la bonne vie environnementale de la route.
- Hmmm…
- Quoi ?
Rachel serra les dents. Claire, qui avait écouté, sembla intriguée.
- Bah, je suis pas très pour cette règle idiote de pas pouvoir capturer des Pokémon en période migratoire…
- … allons bon ?!
- M’enfin, Charlie, ils se contentent de migrer, si un dresseur tombe dessus et veut les capturer…
- Et les braconniers ?!
- C’est un problème rarissime et pas pour une espèce telle que Flabébé…
- Je t’ai expliqué pour l’espèce qui cultive des fleurs blanches, elle est recherchée…
- Et tu crois que des braconniers vont venir exprès pour ça ?! Tu penses que ça va être la chasse à courre comme en Europe ?! Charlie, voyons, c’est extrémiste comme manœuvre, je ne suis pas d’accord.
Charlie cligna bruyamment des paupières.
- … Je te parle de protection environnementale et tu me balances des opinions politiques !! Roland, ces Pokémon ne migrent pas pour se faire capturer !
- Qu’est-ce que tu en sais ? On ne peut pas communiquer avec les Pokémon mais on sait que chaque Pokémon a sa personnalité propre et même que certains veulent se faire capturer et entrainer par un dresseur qui leur plait, ça a été prouvé scientifiquement. En considérant cet essaim de Flabébé comme un tas informe qui penserait pareil, tu les insultes.
Rachel inspira, amusée. Claire s’étonna d’une telle approche. Matt ricana en regardant Charlie.
- Content de ton choix ?
- … Ça veut dire que tu es en désaccord avec ce type d’action ?
- Je pensais que c’était une simple surveillance, pas une dérive totalitaire visant à déclarer une espèce incapturable ! Même pour les vraies surveillances de flux migratoires, comme par exemple en mer, quand il y a risque de pollution ou de pèche abusive ou de capture d’une espèce en voie d’extinction comme les Lokhlass, je pense fermement qu’il ne faut pas aller à l’encontre de captures naturelles et saines, qui ne perturbent pas l’écosystème, en rien, puisque les Pokémon régulent tout sans notre intervention, ils l’ont toujours fait et le feront toujours.
Charlie resta blême. Léopold inspira.
- Je suis toujours disponible, tu sais.
- … les formulaires sont déjà signés… Vincent !
- Pas de boulot le midi, Winchester !
- Mais non mais vous l’avez entendu !
Malcolm agita la tête.
- Tu as fait ton choix, tu assumes. Maintenant, Roland, à titre de syndicaliste, je me dois de t’informer que tu peux invoquer une clause de conscience pour ne pas accompagner Charlie.
Roland inspira et regarda son collègue.
- Nan, ça y’a pas de problème. Mais hors de question que je joue les Suzuki !
- Point Godwin… marmonna Léopold en mâchonnant ses pâtes.
***
- Monsieur Winchester, monsieur Smirnoff !
Les deux hommes se retrouvaient chez le doyen.
- Ah, monsieur Winchester, toujours en couple ?
- Toujours, monsieur Truce… souffla Charlie, visiblement habitué.
- Ah c’est mignon tout ça. Monsieur Smirnoff, vous signez là et là.
- Je peux lire ?
- En théorie, oui, en pratique je pense que vous êtes un peu pressés par le temps…
Roland inspira et signa sans lire.
- Rassurez-vous, je ne vous ferais rien signer qui vous mette à mal !
Charlie leva les yeux au ciel. Roland rendit les papiers au doyen.
- Merci, tout est en règle, vous pouvez y aller !
- Hm !
- Merci, Justin… souffla Charlie.
Les deux professeurs sortirent du bureau.
- Il est marrant.
- Il est tordu, oui… souffla Charlie.
- A ce point ?
- Je te raconterais plus tard, pas ici, les murs ont des oreilles…
Roland se retourna et vit au bout du couloir un jeune homme aux cheveux roux avec un grand sourire figé. Il grimaça, interloqué.
- Bon, et sinon Roland, pas de… prêchi-prêcha politique devant les élèves, hein, on évite de se contredire, respect de l’autorité, tout ça…
- C’est pas du « prêchi-prêcha politique », c’est mes opinions !
- Oui bah tes opinions, tu te les gardes, ça s’appelle le devoir de réserve ! souffla Charlie.
- N’importe quoi !
Et donc, la quatrième année cinq vit arriver Roland et Charlie, en plein débat.
- Quand tu es professionnel, tu ne peux pas laisser tes opinions politiques guider ton action, tu agis « Par et Pour les Pokémon », c’est la devise !
- La tienne, mais pas la mienne !
- En devenant prof, tu ne peux pas te soustraire, tu passes obligatoirement professionnel ! La priorité, ce sont les Pokémon !
- Correction, je suis professeur de dressage Pokémon, ma priorité, c’est de former de bons dresseurs !
- Tu m’énerves !
- Je sais.
- Dire que je pensais te faire plaisir, te faire voir du paysage !
- J’ai rien dit à ce sujet, ça me fait plaisir de t’accompagner à part ça !
- Toi et ta rigidité… BONJOUR LES ENFANTS !
Jérôme et ses amis se regardèrent, intrigués par cette scène étrange.
- Aujourd’hui, donc, on part avec votre professeur de technique, monsieur Smirnoff…
Roland inclina la tête.
- … pour superviser la migration des Pokémon sur la route 4 ! Cette supervision inclut le respect total de l’interdiction de capturer un Flabébé, que ce soit par des dresseurs, professionnels ou non, des chasseurs, des braconniers, des voleurs à la revente…
- Le tout dans le respect du libre-arbitre du Pokémon, évidemment.
- … tu me laisses parler, s’il te plait !
- Oui bien sûr.
- Bon.
Regards étonnés entre les élèves.
- Vous allez être répartis par groupes de quatre, vous pouvez décider par vous-même comment vous répartir, mais je décide de qui va avec qui. On va avancer, nous sommes attendus par messieurs Lucas, Bruno et Léon qui s’occupent des jardins géométriques de la route.
Les élèves cheminèrent en rang. Charlie regarda Roland qui inspira.
- J’ai pas dit ça pour discuter ton autorité devant les élèves.
- Je sais.
- On va pas se disputer pour quelque chose d’aussi trivial ! Tu le sais que j’ai des opinions politiques marquées !
- Je pensais pas que ça irait aussi loin ! Je pensais que ça se résumait à faire chier ton monde sur Twitter !
- Eh bah non. Je fais aussi chier dans la réalité.
Charlie ricana, gêné.
- Je voulais pas dire ça…
- Je sais. Je t’en veux pas.
Les élèves prirent la rue semi-piétonne d’Illumis pour se rendre vers la porte 4.
- Tout comme j’espère que tu ne m’en veux pas.
- Tant que tu ne contreviens pas à la mission, tout va bien. C’est du sérieux, Roland, c’est une action importante, la surveillance migratoire !
- Hhhh… je ne suis pas totalement d’accord mais on va dire que je vais rester… « professionnel ».
Charlie sourit.
- Si tu es en train d’espérer une attaque de braconniers au bazooka pour me donner tort, je t’étrangle !
- Hahahaha ! Non, Roland, quand même ! Voyons !!
Roland sourit, la tête basse.
- Et sinon, ça va avec Matt ?
- Oui, très bien. C’est vrai que je ne te l’avais jamais vraiment présenté avant tout ça…
- On parlait surtout par Skype en même temps et quand on se voyait, tu l’amenais pas…
- Bah vu qu’avec mes parents le courant passe moyen…
- Tes parents, en même temps… soupira Roland.
- Ouais, tu m’étonnes… et…
Les élèves arrivèrent à la porte.
- Et toi avec Rachel, tout va bien ?
Roland acquiesça.
- Oui, on a un peu de mal à s’adapter mais on va trouver notre rythme !
- Matt vous soupçonne déjà, mais c’est son côté roublard…
- Ouais, je me doutais que le fait qu’elle reste avec moi après la soirée d’emménagement n’est pas passé pour un simple acte de gentillesse…
- Pas trop, non… Mais même au niveau pro, arrêtez ce jeu infantile à savoir qui est le plus provoc des deux, je déteste quand vous faites ça !
- On s’amuse… Pis t’es pas notre père, non mais dis donc !
- Je suis votre chaperon officiel !
- Non ! ricana Roland.
- Vous êtes presque comme mon frère et ma soeur, je reconnais que des fois j’en fais trop…
- … et tu t’arrêtes tout de suite avec ce truc de on est ton frère et ta sœur parce que du coup, notre relation devient super bizarre ! sourit Roland.
- Déjà que ça va gueuler si tes parents ou ses parents le savent…
- On parle de son frère qui a déjà de gros soupçons mais qui n’a rien capté ?
Charlie éclata de rire.
- Le pauvre !
- Ah non mais son numéro de ce matin…
- Mais oui ! J’étais affligé, ce qu’il peut être con !
- Ouais, un peu, ouais…
Les deux restèrent là à ricaner pendant que les élèves s’étaient arrêtés à la porte 4, toujours soigneusement en rang.
- Bonjour. Voici ma carte dresseur, j’ai les autorisations…
Roland tendit la sienne également. La réceptionniste acquiesça.
- C’est bon…
- Merci !
Les élèves passèrent la porte avec les deux professeurs.
- Tu sais… le répète pas à Rachel, mais…
- Hm ?
- Pendant un temps, j’ai songé très sérieusement à essayer de sortir avec toi.
Roland sourit, amusé.
- Je m’en doutais un peu…
- Non pas qu’on aurait formé un beau couple ou quoi, juste… toute cette période où tu m’as soutenu après la rupture avec Léopold, j’étais... enfin…
- J’le prends pas mal, mais bon, j’étais en couple… et je le suis toujours !
- Justement, de vous voir aussi bien avec Rachel, je me disais que je pourrais jamais avoir la même chose…
- Et finalement, tu l’as, mais sans moi ! sourit Roland.
- Ah oui, je ne regrette pas d’avoir donné sa chance à Matt, mais bon, tu ne me laissais pas indifférent surtout depuis…
Roland leva la tête en souriant.
- Je rêve ! Ça a duré cinq minutes, tu ne peux pas y repenser encore maintenant !
- Bah, si, un peu !
- Ça ne fait qu’empirer ta métaphore du « vous êtes comme mon frère et ma sœur », tu te rends compte ? sourit Roland.
Charlie ricana.
- Quand je t’entends parler comme ça, j’ai l’impression que c’est toi qui a vingt-six ans et moi vingt !
- Eh bah super, j’te fais rajeunir !
Les deux professeurs ricanèrent.
- Oh, une dernière chose, Charlie…
- Oui ?
- … j’peux fumer ?!
Charlie éclata de rire de plus belle.
- Evidemment ! J’t’en emprunterais une, même. C’est super stressant, tout ça !
- Me doute.
- Surtout avec toi qui la joue gauchiste du dimanche, là !
- Quelle intolérance, monsieur Winchester ! sourit Roland.
- On arrive. Bonjour !
Les jardiniers virent approcher Charlie, Roland et la petite classe. Ils saluèrent. Un des trois, un peu plus âgé mais encore bien conservé, approcha.
- Jardinier Lucas au rapport !
- Haha ! Pas de ça entre nous ! Comment ça se passe ?
- Bah…
Le ciel de la route était couvert par une nuée de Flabébé qui semblaient échanger des fleurs ou en trouver une nouvelle après avoir replanté la leur.
- Ah oui…
- Comme d’hab, veiller à ce que rien ne perturbe l’écotone.
- La zone de transition écologique entre deux écosystèmes, en l’occurrence, là, l’échange de Flabébé entre les deux routes…
- Je connais le sens des mots, explique plutôt ça aux élèves ! sourit Roland.
Charlie leva les yeux au ciel et regarda les élèves.
- Venez en groupe autour de monsieur Lucas, les enfants, ça vous en apprendra plus sur la vie de dresseur professionnel !
Les élèves se réunirent autour de Charlie, Roland et les jardiniers.
- En gros, nous on se charge juste de délimiter des zones sécurisées pour les Pokémon et pour les dresseurs, de sorte que les deux puissent circuler sans se gêner mutuellement. Le jardin est symétrique sur la route, afin de faciliter les éventuels développements. Notre but en ce moment c’est de faciliter l’écotone que devient la route en ce début de saison. Les Flabébé renouvellent et rafraichissent le jardin mieux que nous encore, du coup on se cantonne aux haies avec nos Pokémon.
Les jardiniers étaient accompagnés de Krabby, Ecrapince et autre Cizayox. Roland leva la main.
- Oui ?
- Rolaaand… grommela Charlie.
- Et sans votre intervention, qu’est-ce qui se passerait, concrètement, est-ce que la vie des Flabébé serait la même, ou mieux, ou moins bien… En gros, est-ce que vous n’avez pas l’impression de vous substituer à un ordre naturel ?
Charlie plissa les yeux.
« Ce gamin va me tuer ! »- On a souvent cette réflexion, ouais. Comme quoi qu’on ne fait qu’aménager une situation qui au naturel se déroulerait parfaitement. Donc en quelque sorte que ce qu’on ferait est inutile, pas nécessaire, de trop. Ouais, sauf qu’il ne faut pas oublier qu’on est deux espèces à utiliser cette route. Les humains et les Pokémon. Il faut que les deux puissent circuler librement, sans peine, sans se gêner mutuellement. Ce qu’on fait les gêne peut-être ou contrevient à leur mode de vie, mais c’est indispensable pour que cet « ordre naturel » dont vous parlez perdure. Un espace pour les hommes et pour les Pokémon, c’est ce qu’on recherche ici. Sans notre intervention, tout se passerait bien, ouais, probablement. Mais ce serait le bordel. Ce serait dangereux pour tous ceux qui traversent cette route, humains comme Pokémon. Alors, si les Flabébé prennent leur part de travail, on peut bien prendre la nôtre. Vous croyez pas ?
Roland sembla un peu remis à sa place. Charlie le regarda, amusé.
- Euh… oui, en effet, ça se tient… dit comme ça…
- On est des professionnels. On gère un équilibre. On ne supplante pas. « Par et Pour les Pokémon ». Sans oublier ni notre condition d’homme ni qu’on travaille un peu pour eux aussi.
Les élèves semblaient conquis. Charlie hocha la tête.
- Voyez, les enfants, l’existence des Pokémon en grand nombre à Poképolis a jadis été un impondérable, il est aujourd’hui indispensable. Nous pensons et nous vivons, par et pour les Pokémon. Ce qui pourrait se résumer à un simple travail d’horticulture est en réalité l’indispensable rétablissement d’un équilibre entre vie humaine et vie sauvage. On va se mettre en place et passer les deux prochaines heures à encadrer les Flabébé pendant leur cycle migratoire. Vous en profiterez pour observer les différentes manœuvres des professionnels – ainsi que les miennes et celles de monsieur Smirnoff – pour les reproduire et vous comportez également en professionnels ! Vous vous répartissez, Jérôme, tu viens avec moi.
- … quoi, pourquoi ?
- Tu sais pourquoi.
Le jeune homme leva les yeux au ciel et suivit le professeur avec ses trois camarades.
***
Roland et Charlie se retrouvèrent à fumer leurs mentholées, chacun près de leur parterre de fleurs à surveiller leurs huit élèves.
- Pour répondre à ta question, franchement, vu comme il s’est empâté et vu comme il parle parfois de sa vie avec Annette et Robbie, je ne regrette absolument pas qu’on se soit séparés. Je dirais pas que j’ai plus de sentiments, mais quand je le regarde, je suis partagé entre « Je t’ai aimé et je t’aime probablement encore un peu », et « mais d’un autre côté, après tout ce que tu m’as fait et vu la façon dont tu as rebondi, je n’ai aucun regret ».
- C’est un peu vache.
- Si je pense « Lui d’abord », ouais, mais en l’occurrence la vie m’a appris à penser à « Moi d’abord ».
- J’aime pas cette attaque ! sourit Roland.
- Haha, blague de technicien, je vois… Non mais j’ai tourné la page « Léopold », et la page « Matt » est beaucoup plus agréable à écrire et à vivre.
- Ça se voit, tu as l’air radieux… un peu émotionnel mais radieux.
- Désolé pour tout à l’heure, mais je tiens vraiment à ce que tu restes avec nous. Tu es un ami précieux pour moi.
- Je sais. Tu es un ami précieux pour moi aussi, Charlie.
Les deux hommes se sourirent. Le Crabagarre de Roland surveillait les élèves en compagnie de Lianaja tandis que le Tengalice de Charlie veillait au grain sur le groupe de Jérôme.
- Juste que ça doit cesser, cette ambiance lourdingue. Comment ça se passe dans les autres équipes ?
- On est un peu « L’équipe de jeunes » donc c’est vrai que Hadley ressent le besoin de nous encadrer plus que d’autres. Mais c’est le début, ils cherchent à nous cadrer comme l’an passé, ou c’était beaucoup plus restrictif encore avec Meredith. Là, on a une chance de changer les choses. Notamment grâce à toi.
Roland haussa les sourcils. Des Dardargnan approchaient le parterre des élèves de Roland.
- Faut pas qu’ils approchent, ils sont là pour intoxiquer les Flabébé et favoriser l’invasion des Aspicot et la prolifération de mauvaises herbes… marmonna Charlie.
- Loretta, Samir, Tiphaine, Rodrigue !
Les élèves interposèrent leurs Pokémon. Le Plumeline rose de Loretta barra clairement le chemin par une danse chaloupée. Le Laporeille de Samir bondit en agitant les oreilles. Tiphaine avait un simple Crikzik mais la créature avait agité ses antennes pour créer un son relaxant. Rodrigue s’était mis en retrait, son Trompignon assurant, par ses effluves, la bonne tenue des échanges entre Flabébé.
- C’est génial de se servir différemment de ses Pokémon ! admit Loretta.
- Non pis même de voir qu’on peut régler les choses autrement que par du combat frontal… marmonna Samir.
- Et on oublie ces bêtises de fort, de faible… souffla Tiphaine.
- Ouais, moi aussi je m’amuse beaucoup ! admit Rodrigue.
Charlie sourit.
- Voilà pourquoi j’aime ce travail. Montrer aux gosses qu’il y a des aspects autres que le dressage classique, et que plus tard ils pourront faire un métier agréable sans forcément avoir à se battre tous les jours…
Charlie jeta un œil vers Jérôme qui utilisait son fameux Mackogneur pour barrer le chemin à plusieurs Pokémon.
- Jérôme, tu fais quoi, là ?
- Euh… ils veulent approcher du parterre de fleurs, du coup…
- Ok, regarde le groupe que tu bloques. Y’a quoi ?
- Bah les Chétiflor et les Mystherbe…
- Ouais, mais y’a aussi des Skitty et des Tarsal. Tu écartes les Pokémon Plante et/ou Poison, tu laisses les Skitty et les Tarsal gambader, c’est une espèce courante qui n’interfère pas.
- Ouais pardon…
- Mais effectivement, les Chétiflor et les Mystherbe, tu les dégages, ils veulent juste se faire butiner gratos, c’est des daleux, on n’en veut pas ici !
- Ouais, vous avez raison ! ricana Jérôme.
Charlie sourit. Roland regarda son ami, sans équivoque. Charlie plissa les yeux.
- Quoi ?
- Rien, j’allais absolument pas dire que tu étais doué avec les gamins !
- Je suis prof, Roland, évidemment que je suis doué avec les gamins !
- Mouais…
Charlie secoua la tête, amusé.
- Je veux pas d’enfants.
- Tu ferais un super papa, Charlie…
- Roland, vraiment, je veux pas avoir cette discussion…
- Je sais, mais tu te souviens, penser à toi…
- Je pense que je suis juste jaloux de Léo parce que pour lui c’est facile, tu vois…
Roland agita la tête.
- J’te le fais pas dire.
- Et je sais que ça doit être pire pour toi…
- Bah j’me suis fait la même réflexion… « mince, c’est si facile que ça ! »
- Oh tu y arriveras aussi, Roland… c’est pas comme si t’avais la peste !
- Non, juste que… j’aimerais avoir cette même capacité à me fixer, à ne plus me poser de questions…
- Je comprends, mais un jour vous arriverez à ça avec Rachel.
- Ouais. Après, on est tellement bien quand on est tous les deux, est-ce que ça vaut la peine de se prendre la tête…
- Exactement ce que je me dis avec Matt tous les matins ! sourit Charlie.
Roland sourit.
- Il est cool, Matt. Faut qu’on se refasse une soirée !
- Ouais, carrément. Il t’aime bien aussi.
- J’ai cru comprendre. Mais c’est non de chez non !
Charlie ricana de nouveau et inspira.
- On est en cours extérieur avec des élèves et on fait que parler de cul.
- Bah, on a la vingtaine quoi…
- C’est pas juste, et vous devriez nous soutenir !
- Ouais c’est dégueulasse !
Charlie et Roland cherchèrent des yeux, mais ce n’était pas un élève qu’on entendait. Ils se tournèrent vers la porte de Neuvartault. Des scouts. Et la championne de l’arène, Violette.
- Vous savez très bien comment ça se passe, enfin ! Allons ! geignit la championne.
- On est des dresseurs pro, nous aussi, et les Pokémon Insecte ont autant le droit devenir butiner que les Flabébé de faire leur affaire !
- Vous n’avez pas le droit d’intervenir, vous savez très bien…
- C’est NOTRE route aussi ! Vous !
Les scouts pointèrent du doigt Roland et Charlie.
- Vous aidez ces filous de jardiniers à embêter les Coxy et les Apitrini de la route !
- Ils se tiennent à l’écart d’eux-mêmes, ils savent que le nectar sera meilleur après cet écotone, vous charriez parce que ça vous empêche de faire vos concours de capture à la noix !! grommela le jardinier Lucas en s’avançant.
- On REGULE le nombre d’insectes présents sur la route !! Trop de mâles Apitrini pour trop peu de femelles, si on les laissait tous en circulation, ça finirait mal !
- Tu vois des Apitrini dans le coin, toi ?
- Vous commencez pas, Lucas, vous vous êtes accaparé cette route, mais elle est à tout le monde !!
- Je travaille, vous avez juste un hobby.
Le chef des scouts s’avança et sortit un Sarmuraï.
- Venez me redire ça en face !
- Hey, vous avez pas le droit… souffla Roland.
Charlie tendit un bras pour barrer la route à son collègue.
- Tu permets. Hey, je suis Charlie Winchester, professeur à l’académie d’Illumis.
- Un prof ?! Mais qu’est-ce qu’un prof vient faire ici ? De quoi je me mêle !
- D… désolée, Charlie, j’ai essayé de les convaincre de ne pas faire de scandale, en tant que présidente de l’association des dresseurs d’insectes de la zone, j’ai échoué…
Charlie leva une main vers la championne.
- Tout va bien, Violette, vous n’avez aucun compte à me rendre.
- Vous connaissez ce type ?
- Elle me connait, oui…
Charlie regarda le scout.
- On s’est déjà battus, elle et moi. Il y a longtemps. Et j’ai récupéré un petit écusson…
Charlie sortit son porte-monnaie, l’ouvrit et dévoila les huit badges de la région Kalos alignés sur le revers de l’objet.
- … en plus de sept autres.
- Vous croyez m’impressionner ? Si ça se trouve vous avez juste copiné avec les champions pour avoir vos badges !
Charlie regarda Roland qui haussa les épaules.
- Mon père n’en a eu qu’un seul dans sa vie et c’était en s’entrainant avec un champion. Je suppose donc que ça se fait !
- HAH ! Votre collègue vous défend même pas !
- J’ai pas à être défendu.
- Il a pas à être défendu ! admit Roland.
- Et c’est pas un collègue, c’est un ami donc il peut dire ce qu’il veut. ECTOPLASMA !
Le Pokémon sortit de sa Pokéball et fonça vers Sarmuraï.
- Escarmouche !!!
L’attaque vrombit. Le coup de griffe démentiel. Violette et les autres scouts reculèrent. Roland haussa les sourcils.
- Les Flabébé !
- Coup Bas !!
Ectoplasma contra l’attaque adverse du pied et frappa Sarmuraï des mains, mais le Pokémon ne sembla pas subir grand-chose.
- Double Baffe !!!
L’attaque frappa Ectoplasma et le repoussa. Ectoplasma recula auprès de son maître et le regarda. Charlie inspira.
- Reviens.
- On abandonne ?
- Non, juste que j’ai fait ce que j’avais à faire.
Charlie siffla. Le Tengalice qui surveillait les gosses sauta sur Sarmuraï.
- Feinte !!
Tengalice sautait et frappait Sarmuraï de vifs coups de pieds, bondissant à répétition. Le scout grommela.
- Vous ne savez faire que des coups de semonce ? Piqûre !
Le coup, droit, partie en ligne et manqua de frapper Tengalice qui recula et retomba au sol.
- HAH ! Votre truc ne tiendrait pas une seule de mes attaques Insecte !!
- Oui, en effet, bravo, belle réflexion, je pense que mes élèves auraient fait la même.
Le scout s’énerva.
- DARD NUEE !!!
Sarmuraï croisa et décroisa vivement les bras, libérant des dards. Charlie serra les dents.
- Les Flabébé !!
- Bertha, Garde Large !!
Le Crabagarre de Roland sauta en travers de l’attaque. Le Pokémon écarta les bras et encaissa à lui tout seul la totalité des dards destinés aux Flabébé. Le scout s’étonna. Charlie souffla.
- Vous allez bien mériter ce qui va vous arriver. Tengalice, retourne auprès des élèves.
Le Pokémon hocha la tête en poussant un cri. Il fit un grand saut en arrière et retourna exactement à sa place. Le scout secoua la tête.
- Vous ne faites que fuir.
- C’est un peu le principe de votre Pokémon aussi…
- Haha ! Non, parce que…
Un Fermite se dévoila sur le dos de Sarmuraï.
- Il lui a conféré le Talent Essaim avec sa Ten-Danse !
- Ah bah oui, comme on n’est pas en compétition officielle, vous pouvez vous permettre de tricher un peu.
- Votre pote vous aide et vous avez utilisé plusieurs Pokémon successivement, je serais vous, je ferais pas le malin !
- C’est réciproque.
Charlie envoya une troisième Pokéball. Rapasdepic. Les autres scouts eurent un moment de recul.
- Un oiseau, hein…
- Bec Vrillé !
Rapasdepic chargea brutalement vers l’adversaire. Le scout sourit.
- Lame de Roc !
- CHARLIE !
L’attaque sortit du sol et fut contrée par un Phytomixeur bien placé de Lianaja. Charlie regarda vers Roland qui grommela.
- Va pour la Ten-Danse, mais là, c’était déloyal. Sarmuraï ne peut pas apprendre Lame de Roc, sous aucune condition.
- Tu connais pas les cycles migratoires, mais tu connais les attaques ! remarqua Charlie, amusé.
- Chacun ses travers, hein ! grommela Roland, amusé.
Les Flabébé, jardiniers et élèves observaient la joute. Rapasdepic frappa Sarmuraï qui contrecarra comme il put. Charlie inspira.
- Peu importe parce qu’Ectoplasma a utilisé Toxik…
Les mouvements de Sarmuraï devinrent erratiques. Le scout haussa les sourcils.
- … que Tengalice n’a pas utilisé Feinte mais Balayette…
Mouvements erratiques et lents…
- … et que Rapasdepic tient…
Le Pokémon releva la serre qui tenait le Bandeau Choix.
- … un objet qui ne vous laissera aucune chance.
Deux coups furent vaguement contrés, le troisième frappa le Pokémon en plein ventre. Rapasdepic emporta le Pokémon sur quelques mètres. Fermite tenta une Tête de Fer mais…
- Bertha, Pince-Masse !!!
Crabagarre fusa pour faucher la fourmi et l’encastrer dans le sol comme il se devait. Sarmuraï s’effondra, terrassé. Le scout s’étonna alors que Crabagarre observait Fermite, attendant de voir s’il se relèverait.
- … cette petite chose malhabile !!
- Malhabile, malhabile… marmonna Roland en agitant la main pour mimer une gastro-entérite.
Vaincu, le scout recula. Violette inspira.
- Retirez-vous et laissez-les faire, vous reprendrez vos activités quand ils auront fini la leur !
- … Hmph… merci pour le soutien !!
- Je n’ai pas à vous soutenir ! Mon travail de championne empiète sur mon travail de présidente de l’association des dresseurs de Pokémon Insectes, je ne cautionne pas ce que vous venez de faire, d’autant que vous avez triché. On en rediscutera mais en attendant, du balai !
Le scout grommela et se retira avec ses compères. Charlie souffla alors que les jardiniers et élèves applaudirent le professeur. Roland sourit.
- Eh bah en voilà un qui a compris sa douleur !
- Je voulais des braconniers, je les ai eus !
- Mouais, petits joueurs tes braconniers quand même hein…
- On fait ce qu’on peut, hein !
La jeune Mara applaudissait avec les autres. Elle regarda Jérôme qui était dans son équipe.
- Balaise, le prof, hein Jérôme ?
Le jeune homme hocha la tête, un peu amer.
***
Le soir venu, retour en salle des profs. Charlie était tout à ses rapports.
« Bon, malgré les remontrances de Roland, tout s’est bien passé… »Il inspira alors que Bébécaille était encore sur ses genoux.
« Tu es différent de mes autres Pokémon, c’est pas grave si je te traite différemment, non ? Tant que toi, ça te va, hein ? Au fond, le reste, c’est pas important. T’es comme Matt en fait… »Charlie plissa les yeux.
« Je viens d’assimiler un bébé Pokémon à mon mec… ok, j’ai besoin de vacances… et ça fait même pas une semaine qu’on est rentrés, eh beh… »- ‘lut Charlie… marmonna Rachel en arrivant, Goupix entre ses bras.
- Salut…
- Roland m’a raconté, bravo pour ton coup d’éclat !
- Tu parles… un scout de bas étage avec aucun sens de l’honneur… heureusement que Roland était là en fait…
- Mouais.
- Rachel…
- Hm ?
Charlie fixa Goupix.
- En… tant que combattante, ça t’embête pas d’avoir un Pokémon que tu n’entraines pas ?
- … bah non, Goupix est un cadeau de Roland, évidemment que je le traite différemment. C’est pareil pour toi avec Bébécaille…
- Hm… sauf que Bébécaille est un cadeau que je me suis offert. Il n’a rien de spécial, j’en voulais juste un, je l’ai pris à une pension…
Rachel haussa les épaules.
- Tu fais comme tu veux, Charlie, qu’il compte ou pas, tu t’en occupes comme tu veux.
- … ouais, t’as raison…
Rachel alla se chercher un café au fond de la salle. Charlie caressa le Pokémon qui ajusta sa pose pour être encore plus caressé. Charlie sourit. Léopold vint s’asseoir en face de lui avec ses dossiers.
- Pfouuu… Ça a été, ton aprèm, Charlie ?
- Hm-mm, merci de t’en inquiéter.
- C’est que j’ai tellement l’habitude de t’accompagner…
Charlie hocha la tête.
- Ton approche facile avec les élèves aurait été un plus, oui… mais j’avais envie de tester quelque chose de différent.
- Oh. Bah… tant mieux.
Léopold déploya ses dossiers et commença à annoter les fiches de ses élèves. Charlie inspira.
- Léo…
- Hm ?
Charlie regarda son vieil ami et ex-petit-ami qui le fixait.
- … Pas de problème, hein ? Entre nous, je veux dire...
Léopold plissa les yeux.
- Quoi ?
- Y’a pas de souci entre nous, hein, tu restes mon meilleur ami, je sais que des fois je… suis un peu sec avec toi…
- … euh…
- Et parfois je dois te donner l’impression d’être un sale connard, mais je t’assure que je n’ai aucune… rancœur à ton égard. Et malgré tout ce qui s’est passé, la rupture, le bébé, ton mariage, je…
Le blond grimaça et leva les mains, désabusé.
- Charlie, Charlie !
- Oui… ?
- … On est amis. Evidemment qu’il n’y a pas de problème. On-est-amis !
Charlie resta blême.
- Quoi que je te fasse, quoi que tu me fasses, on reste amis ! Si tu as besoin de moi, tu sais que tu peux compter sur moi. Si j’ai besoin de toi, je sais que je peux compter sur toi. Et si tu veux prendre Roland pour un truc qu’habituellement on fait ensemble… Vas-y !
Léo inspira et retourna à ses dossiers.
- Toujours à te prendre autant la tête pour un rien, hein ? Ça me manque pas, ça…
Charlie allait rétorquer, mais Claire arriva et discuta avec le blond. Le brun se ravisa, perturbé.
***
- Tout va bien ?
Charlie regarda Matt alors qu’ils étaient posés devant la télé, plus tard ce soir-là.
- Hm. Tout va bien, Matt.
- Ta voix est très convaincante.
- Hm. J’suis pas convaincu moi-même.
- Alors tout ne va pas bien ?
Charlie inspira et se serra contre Matt. Le brun aux cheveux frisés étreignit son petit ami.
- Ça va aller, Charlie, hm ? Quoi qu’il y ait, ça-va-aller.
Charlie ferma les yeux, sourit, et s’abandonna dans les bras de Matt.
Générique de fin :
Alizée, Lui ou Toi« Il dit :
Qu’il est amoureux
Comme l’eau aime la vague,
Moi, sans les deux
J’ai le vague à l’âme…
J’ai, dans le cœur comme un poids
Dans la gorge une épine
De n’avoir fait le choix
Lui ou Toi »