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Team Rocket X-Squad de Malak



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» Auteur : Malak - Voir le profil
» Créé le 01/07/2018 à 08:36
» Dernière mise à jour le 06/05/2020 à 19:08

» Mots-clés :   Action   Fantastique   Organisation criminelle   Présence d'armes   Présence de Pokémon inventés

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Chapitre 368 : Apocalypse
Il restait trois minutes avant l’activation de la bombe Arctimes. Vilius se fit battre en une seule. La surpuissance physique que lui conférait le Sombracier s’était écrasée face aux ténèbres infinies de Vrakdale. Vilius gisait au sol, transpercé de part en part par les rayons obscurs du Maître des Cauchemars, lequel avait à peine bouger.

- Monsieur Vilius ! S’écria Julian.

- Ne t’inquiète pas, petit. Tu le rejoindras assez tôt. Je m’en veux de devoir mettre un terme à ta vie si prometteuse, mais tu es l’incarnation de ce monde que je veux détruire. Tu ne peux t’en prendre qu’à ta mère. Je tâcherai de te l’envoyer bientôt si jamais elle n’est pas encore morte, pour que tu puisses l’accabler de reproche.

Avec un rire cynique, Vrakdale plongea dans les ténèbres et s’évapora, laissant seul dans la pièce un Vilius à l’agonie et un Julian en pleurs, avec la bombe Arctimes qui affichait une seule minute restante. Avec les dernières forces qui lui restaient, Vilius tâcha de ramper au sol jusqu’à la bombe, son bras levé, tâchant de l’atteindre. Il savait qu’il n’aurait absolument pas le temps de trouver comment l’arrêter en moins d’une minute. Il savait que tout était perdu. Mais son corps trouvait de lui-même la force de surmonter la douleur et les ténèbres éternelles qui s’abattaient peu à peu sur lui pour avancer quand même.

- M-monsieur Vilius… Est-ce qu’on va m-mourir ?

Si Vilius avait encore pu parler, il lui aurait dit que non, qu’il n’avait rien à craindre, qu’il allait le protéger. En gros, il aurait menti, comme il avait passé sa vie entière à le faire. Oui… une vie passée à tromper les gens, et à se faire tromper lui-même. Il n’avait rien fait, rien accompli de grand. Même le gamin à qui il avait juré allégeance, il ne pouvait pas le sauver.

Trente secondes.

Pourquoi n’avait-il pas fait disparaître cette bombe quand il le pouvait encore ? Pourquoi n’avait-il pas fui avec Julian avant que Venamia ne revienne ? Pourquoi avait-il tué son père, un homme bien plus grand que lui qu’il avait toujours admiré en réalité ? Pourquoi avait-il laissé passer le meurtre de sa jeune sœur Kyria, qu’il aimait bien ? Pourquoi n’avait-il pas arrêté Venamia avant qu’elle ne devienne ce qu’elle est devenue ? Pourquoi avait-il pris sous son aile cette jeune Siena Crust en espérant qu’elle lui servirait plus tard ? Pourquoi était-il si inutile, si incapable, si méprisable ?

Vingt secondes.

Sa faute, encore et toujours. Mais alors qu’il était à l’article de la mort, que pouvait-il faire de bien pour racheter tout ça ? Pour que quelqu’un se souvienne de son nom de la bonne façon, et pas à cause des erreurs qu’il avait commises. N’était-il pas un foutu Chen ? La très vieille famille dont on disait que tous ses membres ne mourraient pas avant d’avoir accomplis de grandes choses ? Alors que pour une fois, il ne songeait qu’au jeune enfant effrayé près de lui, et pas à sa propre personne, il ne s’était jamais aussi impuissant.

Dix secondes.

Vilius Chen s’élança vers la bombe, avec un cri de rage et de désespoir.


***


- Majesté, la concentration de particules temporelles atteint un seuil critique ! S’écria l’un des contrôleurs de bord du Justice d’Erubin.

- MOTEUR À PLEINE PUISSANCE ! Hurla Eryl. Prenez autant d’altitude que vous le pourrez ! Que toute la flotte s’éloigne !

Mercutio ne pouvait que se tenir à une rambarde, impuissant. Tous ses sens hurlaient au danger. Quelque chose de terrible allait se produire. Au même instant, ayant été prévenus par radio, le groupe de Bertsbrand explosa le mur de l’étage où ils se trouvaient pour s’enfuir à dos d’Excalord. En bas, au rez-de-chaussée, Tender se débattait contre Estelle et Angurs alors qui essayaient de le retenir alors qu’il voulait retourner chercher Julian.

- On n’a plus le temps, général ! Hurla Estelle.

- Lâchez-moi, nom de dieu ! JULIAN ! Pas lui non plus ! PAS LUI !

Estelle n’eut pas le choix. Elle transforma ses bras en mode Nukecrula pour l’assommer, puis fit apparaître ses ailes noires derrière son dos. Elle ne pouvait transporter que maximum deux personnes à elle seule. Et le colonel Angurs le savait.

- Prenez Hegan et Imperatus, madame, fit-il. Ils sont plus important que nous.

- Mais…

- Fuyez, maintenant !

Estelle serra les dents de dépit, puis décolla à toute vitesse, tenant Imperatus dans une main et Tender dans l’autre. Elle vit les divers vaisseaux de transport de civils ou de troupes décoller tout autour d’elle, mais le constat était sans appel : ils ne prendraient pas assez d’altitude à temps. Mais Estelle ne pouvait pas se soucier d’eux. La seule chose qu’elle pouvait faire, c’était mettre toutes ses forces à sauver sa propre vie et les deux autres qui dépendaient d’elle.


***


Venamia et Ian avaient atteint, tant bien que mal, le sommet des remparts de la capitale. Venamia avait fait des efforts pour marcher un peu en s’aidant de l’épaule de Ian et se servant de l’éclair d’Ecleus comme d’une canne, mais là, il fallait qu’elle s’assoie. Elle avait de plus en plus de mal à respirer, et avait commencé à tousser du sang. De plus, elle ne sentait plus sa jambe gauche, et n’arrivait pas à en faire bouger le moindre orteil. Ian la regarda avec inquiétude et impuissance. Il avait fait ce qu’il avait pu avec ce qu’il avait sur lui, mais il était clair que la Dirigeante Suprême avait besoin d’une prise en charge médicale rapide.

- Vous pouvez rester là madame, dit-il. Je vais chercher le chasseur et je vous récupèrerai.

Si Venamia avait eu avec elle n’importe qui d’autre, elle se serait dit qu’il cherchait seulement à l’abandonner. Mais pas Ian Gallad. Elle savait très bien qu’il sacrifierait sa vie pour elle à la moindre occasion. Elle hocha la tête, et regarda sa capitale qui s’étendait sous ses yeux. La bataille l’avait laissée assez mal en point, et le Septième Niveau de Trefens avait carrément découpé un quartier entier en morceaux. En plusieurs endroits, des incendies s’étaient déclarés. Quant aux combats, ils semblaient se poursuivre jusqu’en bas, aux portes des remparts. Venamia fut étonnée de voir plusieurs Réprouvés tenter de forcer le blocus installé par la FAL.

- C’est moi ou les Réprouvés veulent se faire la malle ? Demanda-t-elle à Ian. À peine venus qu’ils se tirent déjà ? Ils sont si incompétents que ça ?

Ian regarda en bas, sourcils froncés. Puis il prit ses jumelles et étudia les alentours.

- C’est bizarre… Il semblerait que tous les vaisseaux de la FAL ont décollé en même temps. Même leur croiseur principal remonte. Comme s’ils fuyaient tous quelque chose…

Le brassard multifonction de Ian bipa de façon continue, l’alertant de quelque chose.

- Mon radar s’affole. Il détecte une perturbation indéterminée qui vient du centre de la ville !

Le cerveau de Venamia travailla à toute allure. Le centre de la ville. Le Palais Suprême. Julian. Les Réprouvés qui fuyaient. La FAL qui fuyaient. Une perturbation. Le Palais Suprême. La caserne GSR. La bombe Arctimes qui avait été mise là-bas ! Au moment même où cette déduction lui vint au cerveau, Venamia écarquilla les yeux. Elle cria le nom de son fils, et une demi-seconde après, un flash de lumière éblouissant apparut au Palais Suprême. Il donna naissance à une sorte de dôme lumineux qui, comme une déflagration géante, ne cessa de grossir et de s’étendre à travers toute la ville.

L’onde de l’explosion ne provoqua aucun dégât matériel, mais elle était encore plus mortelle qu’une bombe nucléaire. Dès qu’elle toucha quelqu’un, cette personne vieillit de plus de cent ans en deux secondes. Les organes ne pouvant pas supporter cette nouvelle et fulgurante pression temporaire, ils cessèrent de fonctionner avant même que les corps ne rabougrissent, ne se dessèchent, et ne se transforment en squelette. Beaucoup de vaisseaux, qui avaient tenté de s’échapper, ne purent monter assez vite et furent prit dans la déflagration temporelle. Ils retombèrent alors bien vite, en se percutant entre eux ou en s’écrasant sur des immeubles.

En dix secondes, les trois millions de personnes qui peuplaient Veframia moururent, ainsi que la grosse majorité des Pokemon. Venamia, toujours sur les remparts, ne cligna même pas des yeux en regardant la lumière s’approcher d’elle. La lumière qui accélérait le temps, qui avait prise toutes les vies de cette ville, qui avait prise sans doute celle de son fils, et qui maintenant allait prendre la sienne. Ce fut finalement presque avec soulagement que Venamia attendit sa fin, mais Ian Gallad ne l’entendait pas de cette oreille.

- Dirigeante Suprême ! Hurla-t-il.

Il attrapa Venamia et lui accrocha de force son propre brassard d’Eucandia. Il activa le bouclier, puis poussa Venamia hors des remparts, au dehors.

- Vous devez vivre, madame ! Je vous en prie, vivez !

Tandis qu’elle tombait, Venamia put voir son fidèle commandant, resté sur les remparts, se prendre la déflagration de la bombe Arctimes et se transformer en squelette en à peine trois secondes. C’en était trop pour elle. Son corps était meurtri, et son esprit ne pouvait plus rien assimiler de plus. Elle perdit connaissance en tombant, et seul le bouclier d’Eucandia de Ian la sauva d’une mort certaine quand elle toucha le sol.


***


Tout l’équipage du Justice d’Erubin vit l’onde de choc de l’explosion temporelle s’approcher irrémédiablement d’eux. Ils n’arrivaient pas à s’éloigner assez vite. Une partie de l’onde toucha même le bas du croiseur, et Mercutio se dit que s’en était fini d’eux, quand Mewtwo usa de ses pouvoirs psychiques pour faire grimper le vaisseau. Ils parvinrent donc, à un cheveu, à échapper à l’onde, qui avait totalement recouvert Veframia, de long en large, en s’arrêtant pile poil aux remparts. La bombe Arctimes avait été visiblement conçue selon la taille de Veframia même, ce qui indiquait qu’il s’agissait bien d’une dernière carte à jouer pour le Grand Empire si jamais il perdait la ville. Mais là, ce n’était pas le Grand Empire le responsable, mais Tuno…

Une fois le dôme temporel dissipé, un calme de mort régna sur la passerelle. Alors Eryl le sentit d’un coup : la disparition de centaines de milliers d’âmes en quelques secondes. Elle possédait une certaine sensibilité via le Flux, et surtout, elle ressentait la vie elle-même, jugeant ainsi de son degré de corruption et d’innocence. Ce fut un choc immense pour elle, et toute reine ou déesse qu’elle fut, son corps humain ne le supporta pas, et elle se pencha de côté pour vomir. Mercutio avait lui-même peine à le croire. Tant de gens… Ce n’était pas possible. Il y avait forcément une erreur ! Puis alors, les rapports apocalyptiques commencèrent à arriver à la chaîne.

- Nous comptons d’énormes pertes dans les niveaux inférieurs du vaisseau ! Il n’y a plus personne en vie dans la salle des machines et de maintenance !

- Douze de nos transports qui avaient décollé sont en train de retomber en ville… non, treize !

- Plus aucune réponse des vaisseaux d’Unys et de Kalos !

- Personne ne répond en ville ! Mon dieu… ils seraient tous…

Mercutio, malgré son état, tâcha d’essayer de se reprendre un minimum. Il fallait qu’il sache si ses proches et ses amis avaient survécu.

- Jusqu’où l’onde nous a touché ? Demanda-t-il à un technicien. L’infirmerie a-t-elle été touchée ?

Il s’inquiétait bien sûr pour Galatea, Solaris, Djosan, Goldenger, les Shadow Hunters, et tous ceux qui étaient soignés plus bas dans le vaisseau. Si la déflagration temporelle était montée jusqu’à eux… Le technicien appela l’infirmerie, et le soulagement se lut sur son visage quand quelqu’un lui répondit.

- L’infirmerie et tous ses occupants sont saufs, monsieur.

Mercutio se permit un souffle de soulagement. Juste un.

- Qui a eu le temps de remonter ?

Ce fut cette fois le Général Van Der Noob qui, après plusieurs communications, fournit cette liste :

- Bertsbrand, Zeff Feurning et le lieutenant Anna Tender sont revenus peu avant l’explosion en chevauchant Excalord. Ils avaient Lady Adélie Dialine avec eux. Les deux autres Gardiens se trouvaient dans un autre vaisseau à ce moment, en dehors de la ville. Un transport médical a récupéré le G-Man Clément Psuhyox et son unité qui ont été attaqués par les Réprouvés. Ils ne sont pas blessés, seulement profondément endormis. La plupart de nos dresseurs alliés, dont les champions d’arènes dirigés par Régis Chen, ont reçu la communication à temps et ont pu s’enfuir à l’aide de Pokemon Vol. Ah, et on m’indique que la boss Estelle Chen est remontée seule avec ses ailes mutantes. Elle avait le général Tender et Imperatus avec elle.

Un froid glacial s’empara de Mercutio, malgré cette succession de bonnes nouvelles.

- Avec… Tender et Imperatus ? Répéta-t-il. Elle n’avait pas… Julian avec elle ?

Van Der Noob passa d’autres coup de coms, avant de secouer la tête.

- Je crains que non. Aucun signalement du prince, nulle part.

- Et Ithil ?

- Pas de nouvelle non plus. Normalement, il était avec la boss Estelle… dans le palais.

Mercutio ne put tenir debout plus longtemps. Il se laissa glisser sur la paroi de la passerelle, en proie au plus grand accablement et incompréhension. Ils avaient gagné. Malgré tous les sacrifices, ils avaient vaincu Venamia. Alors… pourquoi tout ça ? Pourquoi…


***


Plus tard dans la soirée, un nombre provisoire de victimes fut établie. Deux millions sept-cent mille, à quelques centaines près. Ce chiffre avait été calculé de la façon la plus simple : en prenant la population entière de Veframia et les forces armées de la FAL, et en lui soustrayant le nombre de survivants. Ça avait été bien plus facile que de compter les squelettes en ville, qui s’entassaient partout, dans les rues comme dans les maisons. Ils n’étaient pas nombreux, les analystes et les légistes de la FAL qui voulaient bien descendre dans cette ville désormais morte pour constater tout cela. Et ça se comprenait. Faire des analyses pour donner une identité à chaque squelette allait être un travail d’une vie.

Certains civils qui avaient pu être secourus à temps redescendirent en ville, pour chercher leur famille, hagards. Ce fut une chorale de lamentations et de cris. Les militaires, qu’ils soient de la FAL ou du Grand Empire, cherchaient eux aussi les ossements de leurs proches ou de leurs camarades. Là encore, c’était plus facile, en raison de l’uniforme des soldats et de leurs plaques. Quant aux Pokemon, la seule bonne nouvelle avait été que certains d’entre eux avaient survécu à la bombe ; les Pokemon Acier et Spectre, principalement, mais aussi certains autres qui pouvaient vivre très longtemps.

Les autorités de la FAL étaient en plein tourment, et ne contrôlaient plus rien. Elles avaient déjà à faire à la perte de près de 70% de leurs forces, et voilà que Kanto était sans dessus dessous suite à la défaite du Grand Empire et à la mort de quasiment tous les habitants de sa capitale. On ne pouvait plus compter sur la Reine Eryl pour diriger le tout ou remobiliser les hommes : le choc de la mort de toutes ces personnes l’avait laissée profondément marquée, et les émotions de douleur, de tristesse et de haine qui en avaient résulté avait grandement favorisé la corruption, pourtant déjà très forte à Kanto.

Lady Venamia était désormais une anonyme au milieu de tous ces gens accablés de chagrin. Quand elle s’était réveillée devant les remparts de la ville désormais silencieuse, elle était rentrée tant bien que mal pour se trouver une pharmacie et une capsule Zerecorps en état de marche. Ça avait plus ou moins guéri ses blessures intérieures les plus graves, mais elle avait toujours du mal à se déplacer, et sa respiration était toujours sifflante. Elle avait ensuite abandonné son armure et uniforme. Le peu de gens qu’il y avait dans les rues, en train de rechercher leurs proches, ne se soucièrent nullement d’elle. Ils ne devaient pas la reconnaître, ou s’en fichaient totalement. Venamia avait le même regard hagard et désespéré qu’eux : celui de quelqu’un qui recherchait un membre de sa famille tout en sachant très bien qu’il ne trouverait qu’un squelette.

Quelques soldats de la FAL gardaient l’accès au Palais Suprême… par principe. Mais il avait été tellement éventré ci et là durant la bataille que trouver un passage pour y pénétrer s’avérait assez facile, surtout que Venamia le connaissait comme sa poche. Elle erra longtemps dans les différents couloirs et étages, à travers les ossements encore habillés. Comme elle le suspectait, il n’y avait personne dans l’appartement où elle avait laissé Julian, si ce n’était des squelettes à l’entrée, sans doute ceux des gardes… qui n’était sûrement pas morts de la bombe Arctimes, à en juger par leurs membres parfois coupés. Venamia chercha ensuite dans la salle des transmissions, là où Vilius et Julian avaient fait leur fameuse intervention. Là encore, il y avait quelques squelettes, mais tous portaient soient les uniformes de la FAL, soit ceux du Grand Empire.

Après deux heures passées à fouiller le Palais Suprême de fond en large, à retourner tous les gravats qu’elle pouvait, Venamia reprit un peu espoir. Peut-être Julian n’avait pas été là lorsque la bombe s’est déclenchée ? Peut-être avait-il été amené par la FAL dans leur vaisseau. Venamia avait bien vu que le croiseur principal de la FAL était toujours dans les cieux de la ville morte. Mais cet espoir s’envola quand elle alla jeter un coup d’œil au dernier endroit qu’elle comptait vérifier : la caserne de la GSR, là où la bombe avait explosé.

L’engin était toujours là, inactif désormais. Ce n’était plus qu’un gros morceau d’acier, de composants électroniques et de fils, qui pourtant avait causé une des plus grandes catastrophes des temps modernes. Il y avait deux squelettes dans la pièce, presque au pied de la bombe. L’un d’eux était recouvert de l'uniforme blanc du vice-dirigeant du Grand Empire, et surtout, il avait deux bracelets à ses bras désormais sans une seule once de chair. Des morceaux d’un métal sombre étaient dispersés autour de lui. Venamia reconnut sans mal Vilius, qui avait visiblement tenté, dans ses derniers moments, d’utiliser son Sombracier pour se protéger de la bombe… de toute évidence, sans succès.

Le second squelette était recouvert d’habits bien trop petits pour lui. Des habits que Venamia connaissait bien, pour les avoir elle-même choisis. Pour qu’il n’y ait aucun doute sur son identité, il y avait à ses côtés une peluche jaune. Un oiseau. Une peluche d’Ecleus. Venamia se souvenait très bien que Julian la lui avait offerte quand elle était revenue à la capitale. Il avait affirmé, très fier, qu’il avait lui-même participé à sa création. Venamia avait été touchée, et avait dit au garçon de la garder, qu’elle le protègerait comme l’aurait fait le vrai Ecleus. Julian ne l’avait pas cru, arguant que ce n’était qu’une peluche, qui ne pouvait donc protéger personne. Et il avait eu raison…

Venamia tomba à genoux devant ce qui restait de son fils. Un fils plus vieux qu’elle, maintenant. Le squelette de quelqu’un qui aurait eu plus de cent ans. Peut-être Julian les aurait-il atteint naturellement ? Mais la bombe Arctimes n’avait pas fait que vieillir ses victimes ; elle les avait tuées sur le coup, car leur corps n’avait pas supporté cette dilatation temporelle soudaine. Julian était mort en une seconde, quand son corps avait atteint ses trente ou quarante ans. Puis, dans les deux secondes qui ont suivi, son cadavre s’était décomposé, sa chair était devenue poussière, jusqu’à ce qu’il ne reste plus que ce squelette… exactement ce que devenait un cadavre après des dizaines d’années.

Venamia pleurait, les mains serrés contre la peluche d’Ecleus, mais ce n’était pas des sanglots qui s’échappèrent de ses lèvres, mais un rire. Un rire frénétique, nerveux. Un véritable fou-rire qui ne reflétait ni le chagrin ni la joie, mais seulement la démence. Le rire de celle qui avait tout abandonné, tout rejeté pour créer quelque chose de grand, et qui au final avait échoué et tout perdu. Le rire de quelqu’un qui s’était fait manipuler au-delà de tout degré, et qui avait été jetée comme un déchet inutile. Lady Venamia rit longtemps de sa propre stupidité et de l’ironie de ce monde. Elle rit de son destin, et elle rit de l’apocalypse qui guettait ce monde à l’agonie.

Alors, elle entendit des bruits de pas derrière elle, et son rire se calma progressivement. Peut-être qu’un soldat de la FAL l’avait entendue et venait l’arrêter… ou la tuer. Les deux solutions lui allaient. Mais ce n’était pas un soldat. Ce n’était peut-être même pas un homme. C’était un humanoïde entièrement fait d’un acier noir et chromé, au casque effrayant. Flottant juste derrière lui, il y avait une sorte d’écran-miroir qui changeait constamment de forme.

Venamia mit un moment à reconnaître la fameuse Dark Armor que Crenden lui avait montrée. Elle n’était pas en état d’éprouver la moindre curiosité sur l’individu qui la portait. Elle se demanda seulement si cette personne allait lui faire le plaisir de mettre un terme à sa vie, ici et maintenant. Venamia dévisagea le masque noir aux yeux artificiels bleutés, et la personne derrière ce masque dévisagea Venamia. Ils restèrent un moment ainsi, devant le squelette de Julian, et cette rencontre fut le commencement de ce qu’on appellera plus tard le Requiem de l'Innocence.


***


Le Marquis des Ombres posa sur son visage le nouveau masque que Silas lui avait créé. Il avait toutefois refusé qu’il lui soigne ses blessures. Il tenait à les garder, pour rendre hommage au courage de la comtesse Divalina et de Jivalumi. Après quoi, accompagné de Maxwell Briantown, son Agent de la Corruption personnel, il se rendit au plus profond de la Grotte Perdue, là où il stockait son armée… là où il allait enfin la terminer, pour ensuite se lancer dans sa grande croisade des ombres. Lyre, Zelan et Fantastux étaient déjà là, ainsi qu’un autre Pokemon, un humanoïde aux membres disproportionnés qui portait un haut de forme complet extravaguant, et dont le visage n’était qu’une petite boule noire ornée de moustaches. Si ce Pokemon avait l’air à première vue assez ridicule, le Marquis savait qu’il ne fallait se fier aux apparences.

- Kish kish kish, fit Fantastux. Je vous ai amené le Baron, Marquis, comme vous me l’avez demandé.

- Je te remercie, répondit le Marquis.

Puis il se tourna vers le « Baron ». Plus qu’un titre de noblesse, pour ce Pokemon, c’était carrément une partie de son nom.

- Baron deShadow, Roi des Pokemon Spectres. C’est un honneur de vous rencontrer enfin…

Le Pokemon en haut de forme sourit d’un air narquois.

- J’en ai rencontré beaucoup moi, de Marquis, dit-il de sa voix nasillarde. Toujours que des humains tristounets ou totalement timbrés ; à croire que le p’tit Horrorscor aime ce genre là.

Si Baron deShadow pouvait parler si familièrement du Seigneur Horrorscor, c’était qu’il était bien plus vieux que lui, et techniquement plus haut placé dans la hiérarchie des Pokemon Spectre. Car Baron deShadow était un des Rois Pokemon, ces Pokemon Légendaires immortels qui régnaient chacun sur un type en particulier. Quand le Seigneur Horrorscor avait été créé par Asmoth, Baron deShadow avait pris sous son aile le jeune Pokemon de la Corruption, qui était resté quelques temps dans son royaume spectral. Aujourd’hui encore, le Seigneur Horrorscor respectait le Roi Spectre, et c’était pourquoi il avait tant œuvré pour l’avoir avec lui dans son armée des ombres.

- Fantastux m’a dit que vous prépariez un grand coup, dit le Roi. Vous auriez même convaincu le vieux Giratina de vous aider en ouvrant les Portes de la Mort !

- On a dû marchander en nombre d’âmes, répondit le Marquis. Mais oui, les Portes de la Mort resteront ouverte pour un mois, à partir d’aujourd’hui. Un mois qui nous permettra d’envahir la totalité de ce monde et de faire régner les ombres à jamais.

Baron deShadow fit mine de s’enrouler ses moustaches spectrales.

- Vous savez, moi, je me contrefiche de la corruption. Nous autres Pokemon Spectre, nous n’en avons pas besoin. En revanche, les ombres, ça nous intéresse. Elles sont notre habitat naturel, après tout. On ne crachera pas sur quelques villes dévastées et plongées dans la brume et la pénombre. Donc, si même le vieux Giratina vous soutient, je veux en être.

Baron deShadow régnait sur les Pokemon Spectre de ce monde, mais Giratina avait toujours une place à part dans leur hiérarchie. Si Baron deShadow en était le roi, on pouvait dire que le maître du Monde des Esprits en était le dieu. Quant à Fantastux, c’était un ancien fidèle sujet de Baron deShadow, qui avait fini par rejoindre la cause d’Horrorscor après le passage de ce dernier dans le royaume spectral.

- Nous vous accueillons parmi nous avec honneur et reconnaissance, lui assura le Marquis en hochant la tête.

- Que c’est bien dit, approuva Baron deShadow. Vous êtes un vrai noble vous, à l’inverse de beaucoup de vos prédécesseurs. On va pouvoir s’entendre. Et pour bien commencer nos rapports, je ne suis pas venu les mains vides. Deux-cent mille de mes sujets sont avec moi ; et ce n’est qu’un acompte. J’ai même certains spécimens tout à fait précieux. Mon bon ami Hoopa en fait partie.

Lyre et Silas sourirent de ce nombre, et Zelan pâli. Rien qu’une armée de deux-cent mille Pokemon Spectre suffirait à désorganiser un pays entier !

- Nous vous remercions, Baron. Je vais maintenant vous montrer des choses intéressantes, et vous n’aurez plus aucun doute sur notre victoire.

Le Marquis se tourna vers ses deux acolytes, Lyre et Silas, et dit :

- Commençons.

Silas tendit une main, Lyre une autre, et le Marquis se plaça au milieu, tenant les deux. Silas était la création, Horrorscor ( via le Marquis ) était la mémoire, et Lyre était la résurrection. Ce fut à cet instant précis que Giratina ouvrit les portes de son Monde des Esprits, pour renvoyer dans le monde des vivants les âmes qu’Horrorscor appellerait à lui : celles de ses anciens premiers serviteurs. Lié par les souvenirs d’Horrorscor de ces trente-quatre individus, Silas put leur recréer leurs corps et leur redonner leurs anciens pouvoirs. Quant à Lyre, elle ancra leurs âmes dans ces nouveaux corps et les ranima. Quelques minutes plus tard, trente-quatre silhouettes se levèrent, sous les exclamations de Baron deShadow.

- Ohhhh ! Mais ce sont… ce sont eux !

- Oui, confirma le Marquis, satisfait. Tous mes prédécesseurs. Les trente-quatre Marquis précédents, revenus d’entre les morts.

En réalité, il y avait trente-cinq Marquis avant l’actuel, mais le dernier d’entre eux n’avait pas été ramené pour des raisons évidentes. Parmi eux, Zelan reconnu bien sûr Balphetos, le 21ème Marquis, qui s’était sacrifié pour permettre à Zelan de fuir avec Lyre face aux Apôtres d’Erubin. Mais d’autres visages lui étaient familiers, pour avoir pas mal étudié l’histoire.

De grands et terribles noms comme celui de Deveran, le tout premier Marquis des Ombres. Afrukard le Terrible. Melekiork le Décimateur. Ou encore, des noms plus récents, mais tout aussi connus, comme Vaalzemon le Savant Noir et Funerol le Maître du Dépit. Des hommes et des femmes qui avaient hébergé un morceau d’Horrorscor en eux, et qui sous ses ordres avaient commis les pires atrocités. Tous revenus du Royaume des Morts pour la dernière croisade de leur maître…

- Alors ça y est, on commence ? Demanda une voix grave et terrifiante.

Les six Démons Majeurs, sous leur forme humaine, s’approchèrent. Wrathan était à leur tête, et ses yeux brillaient d’un feu terrible, promesse d’une destruction sans pareille.

- Nous sommes prêts, acquiesça le Marquis. Moi, Silas, Lyre, Fantastux, Maxwell, vous six, les trente-quatre anciens Marquis plus Zelan, ainsi que notre généreux ami le Baron et son armée spectrale. Et il faut bien sûr ajouter à cela notre propre armée de cadavres. Lyre, à combien s’élève-t-elle actuellement ?

Lyre leva sa main gauche, avec laquelle elle ranimait les cadavres et les contrôlait comme des marionnettes, et sourit d’un air sinistre.

- Près d’un million, Marquis.

Ce dernier hocha la tête.

- Après ce qui s’est passé à Veframia, le Grand Empire n’existe quasiment plus, et la toute jeune FAL est déjà affaiblie et débordée. Personne ne pourra nous arrêter.

En un geste théâtral, le Marquis leva les bras, appelant ses légions de cadavres qui déjà sortaient en masse des tunnels. Avec eux, il y avait les deux-cent mille Pokemon Spectres de Baron deShadow.

- Marche, Armée des Ombres ! Lance-toi à l’assaut de la lumière et de l’innocence. Ne laissons derrière nous que désolation et ressentiment, qu’elles soient le terreau de la grande corruption à venir, et que notre Seigneur revienne enfin en ce monde pour le diriger comme il se doit !

Alors, avec le Marquis à sa tête, l’Armée des Ombres se mit en route, entraînant avec elle une épaisse brume destinée à recouvrir le monde.





*************

Image de Baron deShadow :