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Errare humanum est, Tome 1 : L'ire du Vasilias. de Clafoutis



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» Auteur : Clafoutis - Voir le profil
» Créé le 20/05/2018 à 06:44
» Dernière mise à jour le 20/05/2018 à 11:46

» Mots-clés :   Action   Drame   Humour   Médiéval   Slice of life

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Ch. 44 : Tomber de haut.

 Sanidoma n’en pouvait déjà plus. Danqa courait vite, beaucoup trop vite ! Bien sûr que la situation était urgente, mais ce n’était pas une raison pour rivaliser avec la vitesse du son ! Malheureusement, Sanidoma n’était pas en position de demander une pause. Il devait faire avec, quitte à suer sang et eau. Toutefois, grâce à ses immenses efforts, Sanidoma arriva rapidement à destination : une grande bâtisse de pierre.

— Yvain est là-haut, lâcha Danqa.
— … là-haut ?
— Sur le toit.
— … le toit ? blêmit Sanidoma.

Le noble grassouillet leva la tête. Le toit de ce bâtiment était haut, très haut, à au moins une vingtaine de mètres. Pour l’atteindre il faudrait assurément emprunter un long et pénible escalier.

— Dépêchez-vous, ordonna Danqa.
— … je veux rentrer chez moi…

Mais Sanidoma avait beau pleurnicher, aucun miracle ne daigner se présenter. Il dut réellement puiser dans toute sa volonté pour suivre le rythme de Danqa dans cette ascension infernale. Lorsqu’enfin, son pied se posa sur le toit, Sanidoma s’effondra, à bout de souffle.
Le Boss des Agrios ne lui prêta aucune attention. Son objectif était devant lui, comme il l’avait prédit : Yvain de Mercœur. Le leader des nobles s’était déjà retourné, ayant entendu les lourds bruits de pas dans l’escalier.

— Tiens donc, Danqa aux Griffes, déclara nonchalamment Yvain. Que me vaut le plaisir ? La rébellion se passe-t-elle bien en bas ?
— Assez de futilités, tonna Danqa. Yvain, ce n’est pas ce qui était prévu.
— Comment ça ?
— Ne joue pas les idiots. Le bombardement du Palais de l’Ambre, il est de ton fait.

Yvain de Mercœur sourit doucement.

— Je vois que tu n’es pas qu’une montagne de muscles. Tu as raison, mon arme secrète, le Goliath, est cachée dans une forêt non-loin. C’est un concentré de technologies de l’Ancien Monde, grâce à elle, je peux lancer des bombes dévastatrices presque en continu sur le palais. Ce n’est plus qu’une question de temps avant notre victoire.
— Imbécile !

Le hurlement de Danqa fit trembler l’air ; ses yeux se gonflèrent de nervures sanguines. Il s’approcha férocement d’Yvain qui, pourtant, restait étonnamment serein.

— Un problème ? s’enquit le noble. Notre objectif est toujours de vaincre le Vasilias, n’est-ce pas ?
— Nous avions également convenu de ne pas saccager la capitale !
— Allons, allons, soyons sérieux un instant. Une guerre aussi décisive ne se gagne pas sur de tels compromis. Parfois, il faut savoir faire des sacrifices. La fin justifie les moyens.
— Donc tu n’arrêteras pas.
— C’est une menace ? Tu comptes m’éliminer ?
— …

Derrière Danqa, Sanidoma venait de se relever. Il n’avait pas encore totalement repris son souffle, mais il pouvait tenir sur ses deux jambes. Yvain de Mercœur cligna des yeux, surpris de voir son souffre-douleur favori en ces lieux.

— Ça alors, mais c’est la boule de graisse ! s’exclama-t-il. Que fais-tu ici ?
— J-Je… p-pour…v-v…, tenta difficilement de prononcer Sanidoma.

Yvain soupira longuement :

— Malheureusement, je ne comprends pas le baragouinage des bêtes, mon ami. Je sais que c’est difficile pour toi, mais pourrais-tu essayer de te comporter en humain en ma présence ?
— … t-tu… n-n’as pas changé…, cracha Sanidoma.
— Wouah, tu as vraiment l’air épuisé. Dis, tu as couru pour venir jusqu’ici ? Haha, c’est incroyable, tes pauvres petites jambes doivent bien souffrir après avoir transporté autant de gras. Et tu transpires tellement ! Décidément, à chaque fois que je te vois, tu t’arranges pour être de plus en plus répugnant.

Danqa plissa les yeux. Il n’avait pas besoin d’en entendre plus. Sanidoma lui avait dit qu’il était ami avec Yvain, mais leur ‘‘échange’’ n’avait absolument rien d’amical. En résumé, Sanidoma lui avait menti. Mais pourquoi ? Danqa n’avait pas le temps de répondre à cette question, ni même de s’énerver contre Sanidoma. Il devait arrêter la folie d’Yvain, coûte que coûte.

« Omilio a besoin d’Yvain pour son plan mais… mais c’est un cas de force majeur. », se résolut mentalement Danqa.

Yvain de Mercœur, loin d’être stupide, remarqua le changement dans la détermination de Danqa. Il secoua la tête.

— Oh ? Tu veux m’affronter ? Moi, Yvain de Mercœur ? Intéressant. Tu vas vite comprendre où est ta place, singe des montagnes.

Danqa fut un moment intrigué. Comment ce type pouvait-il avoir autant confiance ? Aucun humain ne pouvait prétendre l’affronter sans crainte. Même Tranchodon, pourtant un Ensar taillé pour le combat, n’avait jamais réussi à vaincre Danqa. Son imposante carrure n’était pas que pour l’intimidation, sa force était bien réelle.
Décidant que la farce avait assez duré, Danqa dirigea son poing sur le haut du crâne de son adversaire. Le coup n’était pas mortel ; il serait juste assez puissant assommer le noble impudent. Toutefois…

— … hé.

Yvain leva sa main droite et agrippa fermement le bras de Danqa, le stoppant en pleine course. Yvain repoussa brusquement son adversaire et, dans le même mouvement, exécuta un parfait et agile coup de pied retourné ; Danqa fut propulsé dans les airs et retomba lourdement.

— Q-Quoi ?! s’abasourdit Sanidoma.
— Vous m’avez sous-estimé, s’amusa Yvain. Par pitié, ne pensez pas que je suis un simple manant. Je suis Yvain de Mercœur, la personnification même du génie.
— Humpf, se releva Danqa. Et de la modestie aussi, à ce que je vois.
— Après ce coup, tu penses encore que je fanfaronne ? Sache que je ne me vante jamais, je ne fais qu’énoncer des faits.

Sur ces mots, Yvain de Mercœur défit le haut de sa riche tenue, révélant ainsi son ultime secret. Une épaisse et étrange armure métallique recouvrait son torse, s’étendait vers ses bras et certainement aussi vers ses jambes.

— Vous n’êtes sans doute pas familier à ceci, alors permettez-moi de vous expliquer. Ce que vous voyez est un exosquelette développé à partir des technologies de l’Ancien Monde. Pour faire simple, il s’agit d’une armure spécialement conçue pour augmenter les performances du corps humain. Ceci dit, cet exosquelette est spécial. Connaissez-vous ce que l’on appelle le ‘‘Mana’’ ? C’est en quelque sorte la force de la nature, que l’on trouve en toute chose. Cet exosquelette à la particularité s’accumuler le Mana ambiant dans l’atmosphère et le transfère continuellement dans mon corps. Je ne me suis jamais senti aussi fort, j’ai l’impression de pouvoir soulever des montagnes !

Sanidoma se gratta la tête. Il ne comprenait rien à rien à ce que racontait Yvain, c’était comme s’il parlait une langue étrangère. Danqa, par contre, saisissait très bien la situation. Yvain de Mercœur était bien plus dangereux qu’il ne l’avait prévu.

— Où as-tu mis la main sur ceci ? tonna Danqa.
— La curiosité est un vilain défaut, mais je suis de bonne humeur. Vous me croyez si je vous dis que je n ai aucune idée ?
— … tu te moques encore de moi ? grogna le Boss des Agrios.
— Non, je suis sincère. C’est arrivé il y a un an. J’ai reçu de nombreux et mystérieux arrivages, des caisses métalliques remplies de technologies de l’Ancien Monde, accompagnées d’une notice explicative. J’étais méfiant au début, la situation était trop belle. Cependant, un génie doit également prendre des risques. Je me suis donné corps et âme pour comprendre ses technologies et pouvoir les maîtriser. C’était difficile, mais rien d’impossible pour moi.

Yvain de Mercœur reprit un instant son souffle et reprit :

— Mon mystérieux et généreux donateur ne voulait qu’une chose. Dans chacune des notices, la même phrase était inscrite en lettre capitale : ‘‘TRIOMPHEZ DU VASILIAS AMETHISTE’’.
— Le Vasilias améthyste ? répéta Danqa.
— Intriguant, n’est-ce pas ? J’avais dû mal à comprendre cette phrase, mais tout est clair à présent. Vous voyez cette étrange gamine qui protège le palais ? Elle semble avoir un goût particulier pour la couleur améthyste, il suffit de regarder ses ailes majestueuses. Dites, Danqa, ce n’est qu’une hypothèse, mais penses-tu que cette fille soit le véritable visage du Vasilias ? Cela aurait du sens, ça expliquerait pourquoi elle est capable de tenir tête au Goliath.
— …

Yvain de Mercœur ricana :

— Enfin, je pense que tout est dis. Je remercie Omilio d’avoir permis à ce coup d’État d’exister, je n’ai plus besoin de lui désormais. J’ai suffisamment de puissance pour conquérir la capitale à moi seule. Le Vasilias tombera de ma main, et avec lui, tous ses symboles. Le Palais de l’Ambre, les Foréa, et même la capitale ; je vais tout détruire. Ma domination sera totale.

Danqa ferma les yeux, récapitulant les informations dans sa tête. Lorsqu’il ouvrit les yeux, son regard perçant toisa Yvain de Mercœur.

— Que l’on soit bien clair. Tu choisis donc de nous trahir et de faire cavalier seul.
— C’est cela, oui.
— J’espère que tu es prêt à assumer les conséquences de tes actes.
— Un génie assume toujours tout, sourit Yvain.
— Très bien.

Sans crier gare, Danqa dégaina ses quatre ‘‘griffes’’ et s’élança implacablement vers le noble. Contrairement à la première fois, Danqa ne se retenait plus. Yvain était une menace réelle à ne pas sous-estimer. Au fond, le Boss des Agrios était soulagé. Yvain de Mercœur n’était pas quelqu’un de confiance, cela coulait de source. C’était évident qu’il allait les trahir à un moment ; alors, que le noble lui-même annonce publiquement sa trahison facilitait grandement les choses.

Yvain de Mercœur arrêta les quatre cimeterres de Danqa avec ses deux mains ; ses gants de cuir furent tranchés, révélant l’acier de son exosquelette. C’était désormais officiel, Yvain était entièrement recouvert par son armure, si l’on exceptait son crâne.
Yvain sourit, confiant. Cependant, sa confiance fut rapidement mise à mal. Danqa exécuta un vive croche-pied au noble, le déstabilisant dangereusement ; le Boss des Agrios profita immédiatement de la situation et lui flanqua un quadruple coup de cimeterre. Surpris, Yvain eut juste le temps de se protéger le visage. La puissance de l’impact l’envoya valser hors des limites du toit ; la chute mortelle était inévitable.

— Tu as peut-être la puissance, mais au combat, tu n’es qu’un novice, cracha Danqa.
— … hé… héhé…

Mais Yvain de Mercœur n’était pas tombé. Lentement, il refit surface, flottant dans le vide. Deux cercles azur fulminaient à l’extrémité de ses pieds. Danqa n’était pas un expert en technologie, mais il supposait que c’était grâce à cela qu’Yvain parvenait à ‘‘marcher dans le vide’’.

— Tu me prends de haut ? Moi ? Yvain de Mercœur ? Tu as du courage, Danqa aux Griffes.
— …
— Je l’admets, tu es un adversaire redoutable. Je ne suis pas suffisamment fort pour te vaincre au corps à corps. Un génie doit savoir reconnaître ses faiblesses. Cependant, en plus de les reconnaître, un génie doit également les compenser.

Soudain, l’exosquelette d’Yvain se mit à briller intensément. Petit à petit, des particules d’énergie pures se rassemblèrent au niveau de son bras droit et prirent la forme d’une longue lance azurée crépitante.

— La fin justifie les moyens, sourit Yvain.

Et il jeta la lance en plein milieu du bâtiment. Une terrible explosion détonna. La bâtisse déjà fragilisée ne pouvait tenir le coup ; elle s’effondra brusquement, tel un château de carte. Quiconque se trouvait encore sur le toit était condamné à une chute fatale.

— Et voilà le travail, s’amusa Yvain de Mercœur. Maintenant, place au plat principal…


 ***

 Devant le Palais de l’Ambre, Miu affichait un sourire crispé. Elle ne s’était pas attendu ça. La demoiselle améthyste avait arrêté le premier obus du Goliath avec une facilité enfantine, cependant, les suivants étaient étrangement de plus en plus puissants. C’était à un tel point que pour le dixième obus, Miu dut réellement y mettre de sa puissance. Les alentours du Palais était définitivement détruit. Même les débris et cadavres de soldats avaient disparu, tout avait été annihilé par les bombardements à répétitions. Seul le Palais de l’Ambre trônait, intact, autour d’un effroyable cratère fumant.

— J’ai sous-estimé ces imbéciles, siffla-t-elle.

Heureusement pour Miu, le bombardement semblait s’être arrêté, lui laissant le temps de reprendre son souffle.

« … c’est étrange », pensa Miu. « Ces obus, j’ai l’impression que… mais c’est impossible, de simples humains primitifs ne devraient pas…mmh ? »

Un petit bip strident la tira de ses pensées ; à son poignet, la diode de son bracelet s’était allumée. Miu sourit. C’était le signal. Le Professeur Losyn devait en avoir fini avec Eily, ce qui signifiait que le test final du projet Vasilias avait commencé. Eily devait vaincre une Asda folle furieuse, tandis qu’elle, elle devait mettre un terme à la rébellion des nobles. Miu pouvait enfin quitter son rôle de protectrice et passer à l’action. La demoiselle améthyste devait avouer être un peu déçue cependant, la tâche qui lui revenait était d’une facilité outrancière. Elle, Miu, l’une des entités les plus puissantes du monde, contre de simples humains primitifs ? C’était risible. Cette histoire serait finie en moins de deux.

Soudainement, une lance azurée fila vers elle. Miu l’évita sans encombre. Elle leva les yeux, intriguée. Elle croisa le regard d’un homme se tenant debout dans les airs.

— Une simple question, lança l’homme. Es-tu le Vasilias améthyste ?

Miu pencha la tête, surprise. Elle ne s’attendait pas à ce que quelqu’un d’autre que le Professeur Losyn ne l’appelle comme ça un jour. C’était en effet l’un de ses surnoms. Là où Eily était la Vasilias cyan, Miu était la Vasilias améthyste. Mais comment un simple humain pouvait avoir connaissance de ces noms de codes ? Et puis, pourquoi cet homme portait-il un exosquelette ? Où l’avait-il obtenu ?

— Et si c’est le cas ? répondit espièglement Miu.
— Si c’est le cas, je me dois de t’éliminer.

La demoiselle améthyste analysa son adversaire. Elle ne prit pas longtemps pour le reconnaître :

— Yvain de Mercœur, leader de la rébellion des nobles.
— Ma réputation me précède, sourit ce dernier. Je suis heureux que même le Vasilias ait entendu parler de moi. Malheureusement, je dois te tuer. Tu es le dernier obstacle qui me sépare du pouvoir absolu.
— … ?

Miu pencha la tête, de l’autre côté cette fois. Quelque chose n’allait pas. Visiblement, ce Yvain de Mercœur n’était pas au courant de tout. Il pensait que Miu était l’unique Vasilias, alors que concrètement, il n’existait pas encore de véritable Vasilias, juste deux candidates au titre. De plus, il ignorait également l’existence du Professeur Losyn et des autres survivants de l’Ancien Monde, puisque dans les faits, c’était eux qui possédaient véritablement le ‘‘pouvoir absolu’’.
Toutefois, Miu décida de jouer le jeu. Après tout, c’était assuré qu’elle allait devenir la Vasilias ; la faible Eily n’avait aucune chance de la vaincre.

— Tu as raison, Yvain de Mercœur. Je me nomme Miu. Je suis le véritable visage du Vasilias.
— Je le savais, se vanta le noble. Rien n’échappe à mon génie.

« …je suis tombé sur un bon ! » se moqua intérieurement Miu.

— Donc, reprit la demoiselle améthyste, tu veux me tuer, c’est cela ?
— Tu m’as bien compris.
— Intéressant. J’aime les hommes qui ont du cran ! Cependant…

Miu tendit la main, et, aussitôt, un tonitruant coup de foudre s’abattit juste là où se situait Yvain. L’assaut fut si fulgurant et puissant qu’il souleva un épais nuage mêlant poussière et fumée.

— … si tu veux conquérir mon cœur, il va falloir me le prouver par des actes !
— Volontiers.
— … !

D’un coup, Yvain de Mercœur fusa vers elle, une lance azurée crépitante à la main. Sa vitesse dépassait largement celle d’un être humain standard. Un exosquelette était certes censé améliorer les capacités du corps, mais à ce point ? Encore une fois, Miu était surprise. Toutefois, ses réflexes prirent le dessus. Une seconde avant l’impact, Miu transmuta ses bras dans une matière bien plus solide que l’acier. Si Yvain de Mercœur voulait la jouer au corps à corps, il allait être servi !

— Hé, ricana le leader des nobles.
— … ?

La lance d’énergie pure d’Yvain balaya naturellement les bras d’acier de Miu. Miu écarquilla les yeux, comment cela était-il possible ? Il y a peu, elle tenait tête à Omilio rien qu’avec ça ! Yvain profita allégrement de l’étonnement de son adversaire. Il projeta sa lance d’énergie à bout portant dans la poitrine de Miu. La pointe de l’arme azur se planta dans le ventre de la demoiselle et l’entraîna avec elle dans sa course démentielle ; encore sous le choc, Miu s’écrasa sur le Palais de l’Ambre. Mais cela ne s’arrêta pas là. La lance azur, instable, explosa soudainement. Miu, au plein centre de la détonation, ne put que la subir de plein fouet.

— Q-Quoi… ? Cette puissance… c’est du… Mana ?

Yvain de Mercœur vola lentement en face de la demoiselle améthyste. Son air supérieur ne le quittait plus.

— Tiens, tu as perdu ton arrogance ? se moqua-t-il. Je suis désolé de te l’apprendre, mais tu ne peux pas me vaincre. Mais magnanime que je suis, je vais tout de même t’expliquer pourquoi, tu me remercieras plus tard.

L’air apaisé, Yvain apposa sa main sur son torse :

— Cet exosquelette est spécial. Il possède une priorité d’absorption au Mana à toute épreuve. Et plus il en absorbe, et plus il me renforce. Et toi, Vasilias, je sais beaucoup de chose sur toi. Tu es un être possédant une grande sensibilité au Mana, c’est même ce qui te caractérise. Tu peux utiliser le plein potentiel du Mana pour invoquer la force ultime de chaque matière, chaque élément et être invulnérable. Cependant, tu as besoin de Mana pour cela, n’est-ce pas ? Qu’est-ce qui se passait si, pour une raison ou une autre, tu n’arrivais plus à absorber autant de Mana que nécessaire ?
— … !

Soudain, Miu comprit. En analysant la situation, tout était clair. L’exosquelette d’Yvain de Mercœur absorbait presque tout le Mana ambiant, ne laissant que des miettes pour la demoiselle améthyste. En résumé, elle était grandement affaiblit. Sa confiance aveugle lui avait fait perdre de vue ces choses les plus élémentaires.

— De plus, tu es mon adversaire idéal, ricana Yvain. Toi, Vasilias, tu possèdes en plus la capacité d’attirer naturellement le Mana à des kilomètres à la ronde, ce qui te permet normalement de toujours être au maximum de tes capacités. Dommage que maintenant, tout ce bon Mana que tu attires me revient directement ! D’ailleurs c’est incroyable, je ne me suis jamais senti aussi puissant de toute ma vie ! J’ai l’impression de pouvoir écraser le monde dans la paume de ma main !
— … comment sais-tu tout cela ?
— Haha, curieuse ? Je peux le comprendre. Tu viens de chuter de ton piédestal, tu cherches naturellement des réponses. Très bien.

Yvain de Mercœur afficha un large sourire :

— On me l’a dit. Je ne sais pas qui, si tu demandes. C’est la même personne m’ayant offert cet exosquelette. Ce mystérieux donateur m’avait en plus fourni une foule de documents sur le Mana et le Vasilias améthyste. Bien sûr, j’ai au début pris ces informations avec des pincettes, mais les documents étaient si détaillés que ma curiosité avait pris le pas. Finalement, au vu des résultats, j’ai eu raison d’écouter mon instinct.
— … quelqu’un t’as donné des documents… ?

L’esprit de Miu était plus qu’embrumé. Qui aurait bien pu faire fuiter des informations aussi sensibles ? Omilio ? Ce ne serait pas logique, il ne donnerait jamais des armes de destructions massives aux nobles. Et puis, Omilio était-il seulement au courant de tous ces secrets ? Les seuls ayant connaissance de toutes les subtilités du projet Vasilias et du Mana étaient les cinq survivants de l’Ancien Monde.

— Tu réfléchis trop, sonna Yvain. La pause est finie. Maintenant, fais-moi plaisir et meurs.

Yvain de Mercœur s’élança à nouveau, une nouvelle lance en main ; il semblait deux fois plus rapide que précédemment. Miu prit vivement appui sur le mur du palais et prit immédiatement la fuite. Cela ne lui plaisait pas, mais elle devait réfléchir à un plan.
Grâce à son exosquelette, Yvain lui volait du Mana en continu. Ce qui signifie que tant que plus il serait proche de lui, et plus elle serait faible. L’idéal serait de le semer et de le garder dans un périmètre où son armure ne ferait plus effet, mais c’était bien plus facile à dire qu’à faire.
Miu et Yvain fusaient à travers la capitale, une folle course-poursuite destructrice. Pour se protéger, la demoiselle améthyste volait bas, presque au ras du sol, se mêlant ainsi aux infrastructures de la ville. Cependant, Yvain, lui, ne prenait même pas la peine d’emprunter rues et ruelles ; si un mur lui barrait la route, il le détruisait simplement avec son armure.

« … il est tenace… », pesta Miu.

Toutefois, la demoiselle améthyste avait remarqué un petit détail. L’exosquelette d’Yvain n’était pas parfait. Il recouvrait tout son corps, sauf sa tête. C’était certainement là son point faible. La question restait de savoir comment l’atteindre.
Miu arrêta de fuir et se retourna. Il était temps d’entamer la contre-offensive.

— Tu affrontes enfin ton fatal destin, lâcha Yvain. Es-tu préparée à plier le genou ?
— Tu sais, malheureusement, je n’aime pas les hommes trop sûrs d’eux !
— … !

Brusquement, les mains de Miu se mirent à crépiter et, lorsqu’elle les leva, des épaisses ronces surgirent brutalement du sol et s’enroulèrent fermement autour d’Yvain.

— Et maintenant, tu vas comprendre ce qui nous sépare ! s’écria-t-elle.

Miu matérialisa son énergie psychique en une lance améthyste. Elle trouvait ça irrésistiblement ironique d’infliger le coup de grâce avec une lance, soit le type d’arme favori d’Yvain. La demoiselle améthyste visait la tête. Yvain de Mercœur restait un être humain, si, pour une raison ou une autre, son crâne se désolidarisait du reste de son corps, il ne survivrait pas bien longtemps.

— Adieu, sourit Miu avec un clin d’œil.

Et la lance améthyste fut projetée. Sa trajectoire était parfaite. Elle filait si vite qu’elle ne devient que fin trait de lumière. Une véritable arme mortel, prête à dévorer sa proie.

— … hé.

L’impact eut lieu. Ou plutôt, l’impact aurait dû avoir lieu. Une fois qu’elle fut à quelques centimètres du visage d’Yvain, la lance commença à se désagréger, à perdre de sa substance. D’un coup, elle explosa en une multitude de particules lumineuses, qui furent immédiatement absorbées par l’exosquelette.

— Tu m’écoutes quand je parle ? ricana Yvain. Je peux absorber le Mana et toutes tes attaques en sont constituées. Tu auras beau faire tous les petits tours de passe-passe que tu veux, leur inutilité égalera ta fantastique bêtise.

Ce fut au tour des ronces d’exploser, toujours en particules lumineuses. Miu recula d’un pas. Pour la première fois depuis longtemps, elle se sentait totalement impuissante. Quelque chose n’allait pas. Elle se faisait battre ? Par un humain primitif ? C’était absurde ! Non, techniquement, ce n’était pas Yvain le problème mais son exosquelette. S’il ne l’avait pas, il ne serait que du menu fretin !

— Alors, ricana ironiquement Yvain. Tu as compris ce qui nous sépare ?
— … tss.

Une lance azur caractéristique se forma dans la main du noble.

— Cependant, je dois avouer être déçu. C’est donc ça, le fameux Vasilias qui à dominer Prasin’da depuis des siècles ? Une simple gamine incapable de se débrouiller sans ses pouvoirs ?

Malgré tout, Miu n’abandonna pas. Dans la rage du désespoir, elle multipliait les assauts. Foudres fulgurantes, torrents de flammes, forêts de glaces, vagues psychiques ; tout y passait. Et tout se faisait absorber.

— Pathétique, vraiment. Tu n’as donc réellement que tes pouvoirs. Tu es du genre à te penser supérieur juste parce que tu as un petit quelque chose en plus que les autres, n’est-ce pas ? Malheureusement pour toi, ça ne veut rien dire. Un véritable génie n’a pas juste quelque chose en plus, il doit être exceptionnel partout…

Yvain de Mercœur lui offrit son plus beau sourire avant de conclure :

— … comme moi, en somme.

Et sans attendre, il jeta sa lance, droit sur Miu. La demoiselle améthyste était beaucoup trop perturbée pour ne serait-ce que penser à l’éviter. La lance d’énergie pure se planta dans son abdomen et le traversa à moitié. L’arme de Mana pur était comme un puissant acide, capable de rompre les défenses les plus solides. Choquée, Miu baissa la tête, regardant avec effroi et incompréhension la lance perforant proprement son ventre. Le sang coulait.

« P-Pourquoi… ? J-Je suis censée être parfaite, la future Vasilias de Prasin’da… Mère m’a créé dans ce but… j’ai tous les pouvoirs possibles et imaginables… et je les contrôle à la perfection… alors pourquoi… est-ce qu’un humain primitif me bat ? C-Ce n’est pas normal… j-je suis… le futur de l’humanité » !

— Pour être honnête, je ne pensais pas que cela serait aussi facile, soupira Yvain. Enfin, je ne suis pas dupe. Tu n’as pas mon véritable ennemi. Mon généreux donateur doit être au-dessus de toi, sûrement est-il celui qui tire les ficelles depuis le début. Je vais donc être magnanime. Tu me dis qui est ce mystérieux personnage et j’envisagerais peut-être te garder une place de subordonnée.
— … tu peux toujours courir.

Yvain hocha la tête.

— ‘‘Tu peux toujours courir’’, c’est donc là ta réponse. Intéressant. Tu ne dénies pas ma théorie, tu refuses juste de m’en dire plus. Ce qui signifie que je suis dans le vrai, il y a bien quelqu’un au-dessus de toi. Merci, c’est tout ce que je voulais confirmer. Je n’ai plus aucun intérêt pour toi à présent. Tu n’es finalement qu’un sous-fifre. Meurs.

Subitement, la lance d’azur se mit a crépité. Elle allait exploser, en plein dans le torse de Miu. Cette dernière avait déjà bien trop gaspiller inutilement de ses réserves de Mana ; un coup de cette puissance serait probablement fatal.

« …un sous-fifre… c’est vraiment ce que je suis… ?… non… »

La lance crépita de plus belle ; de larges arcs électriques s’y agitaient.

« J-Je le refuse… j-je ne peux pas finir ainsi ! »

Puisant dans sa volonté, Miu saisit fermement la lance qui lui transperçait la poitrine. Elle serait rageusement les dents. Jamais ces yeux n’avaient brillé avec autant de détermination. Elle refusait la mort, de toute son âme. Elle avait encore bien trop de choses à accomplir pour être défaite aussi aisément !

— … m-moi… mourir… ! N-ne te fiche pas de moi !

Et, avec toute sa force, Miu arracha la lance de son ventre et l’expulsa furieusement au ciel ; l’arme explosa dans une magnifique nébuleuse azur, sans blesser la moindre personne. Miu s’était relevé, fébrile, mais déterminée. Du sang coulait abondamment de son abdomen perforé, cependant, petit à petit, la blessure se refermait d’elle-même.
Yvain soupira :

— Pourquoi la vermine doit-elle être aussi tenace ? Ne comprends-tu pas que tu ne fais que retarder l’inévitable ? Je n’apprécie pas ceux qui osent me prendre mon temps ; pour un génie, la moindre seconde vaut de l’or.

Yvain secoua la tête.

— Mais soit, admettons. Tu as évité la mort une fois, et ensuite ? Tu penses pouvoir réitérer l’exploit ?

Une nouvelle lance azur apparut. Miu se mit en position ; ses jambes tremblaient. Ça lui faisait du mal de l’admettre, mais elle était à ses limites. D’ordinaire, sa capacité à attirer des quantités phénoménales de Mana lui permettait d’être toujours au mieux de sa forme. Ainsi, de toute sa vie, Miu n’avait jamais au grand jamais connu la fatigue. Une sensation inconnue qui la frappait aujourd’hui de plein fouet. La sueur qui coulait de son front, son cœur qui battait à des vitesses folles, son corps lourd, des muscles douloureux. Des écrasantes expériences que Miu ne comprenaient pas.

— Maintenant, souffla Yvain. C’est réellement… …qu.. ?!

Subitement une ombre rugit au-dessus du noble. Trop concentré sur Miu, il ne l’avait remarqué que trop tard. Quatre cimeterres fendirent le ciel, telles des griffes, et le lacérèrent. Yvain se protégea le visage du mieux qu’il put, mais une lame parvint tout de même à sérieusement trancher sa joue droite. Yvain de Mercœur perdit brièvement le contrôle de son exosquelette et s’écrasa lourdement au sol. Danqa aux Griffes atterrit à son tour, sans la moindre difficulté.

— V-Vous avez fait un bond de plus de dix mètres ! s’écria Sanidoma. C-Comment ?! V-Vous êtes sûr d’être humain ?!
— … Danqa… et… Sanidoma… ?

Furieux, Yvain de Mercœur se releva et se propulsa à nouveau en hauteur.

— Vous avez survécu ! grinça le leader des nobles.
— Une simple chute ne me terrassera jamais, tonna Danqa.
— … j’aurais dû m’en douter. Toutefois, je ne pensais pas revoir Sanidoma.

Danqa croisa puissamment les bras :

— En acceptant sa présence, j’ai accepté de le protéger. Il ne mourra pas tant que je vivrais.

Derrière lui, Sanidoma se mordit les lèvres, ému. C’était vrai. Lorsqu’Yvain avait détruit le bâtiment, Danqa aurait très bien pu s’enfuir lui-même. Pourtant, le Boss des Agrios avait accouru à son secours ; il n’avait pas hésité à porter la lourde carcasse de Sanidoma sur son dos, et dieu seul savait à quel point elle était encombrante !

— Quoi qu’il en soit, ton escapade s’arrête ici, Yvain de Mercœur. Omilio m’a précisément chargé de protéger la capitale et d’éliminer toutes les menaces. Chose que tu es.
— … une menace ? … une simple… menace ? Moi ? Ha… Hahaha !

Yvain éclata d’un rire tonitruant :

— Tu me sous-estimes encore, le singe des montagnes ?! Moi, Yvain de Mercœur ?! Le génie de Prasin’da ?! J’ai déjà vaincu le Vasilias ! Crois-tu réellement pouvoir faire quelque chose contre moi ?!
— Yvain, ne me le fait pas répéter. Tu as le pouvoir, mais tu n’es qu’un novice.
— Insolent ! Tu vas regretter ces paroles !

Yvain s’élança, une lance Azur à la main. Sa rage amplifiait encore sa vitesse à un tel point qu’il devint invisible. Danqa resta impassible. Puis, instinctivement, le Boss des Agrios fit un vif pas sur le côté et donna un coup de coude à l’arrière. Il fit mouche. Yvain de Mercœur l’encaissa durement. Sans lui laisser le temps de se reprendre, Danqa se retourna et lui infligea un énorme coup de point qui l’envoya s’encastrer dans le mur d’une maison.

— … q-quoi ? cracha Yvain. C’est impossible ! T-Tu n’aurais pas dû me voir !
— Tu vas vite. Très vite. Si vite que je suis incapable de voir tes mouvements, c’est vrai. Mais alors ? Tu restes un novice. Tu peux aller à la vitesse de la lumière, tant que ton corps continuera à hurler tes intentions, cela ne servira à rien.
— Q-Qu’est-ce que tu racontes ?! M-Mon corps ? Hurler mes intentions ? Cela ne veut rien dire !
— Tu vois. C’est pour cela que tu es, et resteras toujours, un novice.
— Mais tu vas te taire, oui ?!

Rouge de colère, Yvain de Mercœur s’éleva à nouveau. Une lance azur se forma dans sa main gauche. Une autre dans sa main droite. Un sourire carnassier ancré sur le visage, le leader des nobles les pointa vers Danqa.

— Tu as dépassé les bornes, singes des montagnes ! Essaie donc d’esquiver ça !

Et les deux lances furent projetées avec une force titanesque. En chemin, les armes azur se croisèrent et fusionnèrent, multipliant encore plus leur puissance dévastatrice. Puis, subitement, un tintement cacophonique. Un bruit étrange, qui n’était cependant pas celui d’une explosion. La fusion des deux lances azur fut proprement renvoyé vers Yvain, qui l’esquiva de justesse.

— J’arrive à temps.

Devant Danqa, Inam la Guerrière tenait fermement sa gigantesque hache. Cette dernière crépitait encore d’une énergie azur, c’était la preuve de son exploit : arrivant au dernier moment, elle avait repoussé la lance destructrice vers les nuages.

— I-Inam ? bafouilla Yvain. Mais… où est Sfyri ?!
— Je lui ai accordé une petite sieste, lança la Foréa Impériale.
— Et ne m’oubliez pas, grogna une voix revêche.

Un imposant dragon bondit alors des décombres et se posa aux côtés d’Inam.

— Tranchodon…, grinça Yvain.
— Je voulais le garder frais pour le combat final, mais tant pis. Tu es une bien trop grande menace pour la capitale pour qu’on te laisse sans rien faire. Les bombardements étaient bien de ton fait, n’est-ce pas ?

Danqa hocha la tête :

— Yvain de Mercœur est un traître. Nous n’avons aucun raison de nous retenir.
— À la bonne heure, sourit Inam. Je n’ai jamais pu supporter ce type !
— Et moi donc, sourit à son tour Danqa.

La Foréa Impériale et le Boss des Agrios se regardèrent, complices. Cela faisait bien longtemps qu’ils n’avaient pas combattu ensemble. Et ils comptaient bien fêter l’occasion en se débarrassant de l’une des pires crapules de Prasin’da !

— Attention cependant, lâcha Danqa. Il porte ce qu’il appelle un exosquelette. C’est le secret de sa puissance. Cette armure lui permet d’absorber tous les pouvoirs élémentaires.
— … vraiment ? s’étonna Inam. Où est-ce qu’il a bien pu… non, ce n’est pas important. Je verrais ça plus tard, pour l’instant, nous devons l’éliminer.
— Exactement.

Inam plaça sa hache devant elle. Elle ne pouvait pas utiliser ses pouvoirs élémentaires ? Ce n’était pas si grave. Elle pouvait encore se battre avec sa hache, et de même, Tranchodon possédait des griffes particulièrement aiguisées.

— … tss… des gêneurs, des gêneurs partout…, s’énerva Yvain. Pourquoi ne voulez-vous pas comprendre votre place ? Vous n’êtes que de la vermine ! Vous n’êtes destinés qu’à être gouvernés par un génie !

Son exosquelette fulmina brusquement. La colère lui défigurait le visage. Il n’avait plus aucune limite. Sa rage grandissante avait largement dépassé le point de la raison. Yvain de Mercœur puisait inlassablement dans tout le Mana que pouvait lui fournir son exosquelette, quitte à malmener son propre corps. Son niveau de puissance franchit brutalement de nombreux cap. Inam, Danqa et Tranchodon furent forcés d’effacer leur air confiant. Ils allaient affronter un fou furieux instable. Quoiqu’ils puissent arriver, les conséquences ne seront que terribles.

— …

Et Miu, derrière tout cela, regardait la scène d’un air absent. Si ces gens n’étaient pas arrivés, elle serait morte à l’heure qu’il était. La réalisation de ce fait l’avait violemment percuté.

— … mademoiselle ?
— … ?

La demoiselle améthyste détourna le regard. Ses yeux rencontrèrent le personnage le plus grotesque qu’elle n’avait jamais vu de sa vie, la définition même du ‘‘gros plein de soupe’’. Normalement, Miu lui aurait ri au nez. Mais actuellement, elle n’avait pas envie de rire.

— … ça va devenir dangereux ici…, geignit Sanidoma.

Dangereux. Oui, le mot était de circonstance. Si Yvain de Mercœur utilisait le Mana sans aucun filtre, oui, ça allait être dangereux. Il était même possible que la capitale n’y survive pas. Mais que pouvait-elle faire ? Sans le Mana, elle n’était qu’une fille normale.

« … une fille… normale… »

Miu se mordit les lèvres. C’était donc ça ? Elle n’était qu’un réservoir de Mana et rien d’autre ? C’était comme le disait Yvain ? Si on lui enlevait son seul avantage, elle n’était qu’une impuissante ?

— J-Je le refuse…, cracha-t-elle.
— M-Mademoiselle ?
— Je le refuse ! Jamais je n’accepterais cette humiliation ! Ce Yvain de Mercœur… Mana ou pas, je vais l’anéantir !

Miu se releva, droite. Ses yeux flamboyaient. Jamais elle n’abandonnerait. Jamais. Le Professeur Losyn l’avait élevée pour être parfaite. La défaite était censée toujours être inconnue à son dictionnaire. Alors, elle allait se battre. Elle ne savait pas comment, mais elle allait retourner la situation !

— Tu ne perds rien pour atteindre, Yvain de Mercœur. Tu penses que je ne peux rien faire sans Mana ? Hé bien regarde, je vais te montrer de quoi une fille déterminée est réellement capable !