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Apocalyptica de Drayker



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Informations

» Auteur : Drayker - Voir le profil
» Créé le 11/03/2018 à 22:36
» Dernière mise à jour le 12/03/2018 à 13:07

» Mots-clés :   Drame   Présence de poké-humains   Région inventée   Science fiction   Suspense

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Chapitre 68 : Une main tendue
« Bon sang, Fen’, reste en place, tu veux ? » grogna Will tandis qu’il nettoyait les plaies de son Pokémon.

Ce dernier, allongé sur le ventre, lui répondit d’un grondement irrité, auquel l’ex-Elitien ne prêta aucune attention. Riolu avait planté ses griffes dans les flancs de l’Arcanin bien plus profondément que prévu, et Will n’avait aucune envie de laisser les blessures s’infecter.

Sanae, présente elle aussi, fouillait dans les tiroirs de l’infirmerie à la recherche de bandages adaptés à la morphologie de Fenrir.

« Tu ne pourrais pas le guérir comme tu as guéri les autres ? demanda soudain Will, énervé.
- Ça ne marche pas comme ça, répondit calmement l’Apocalyptica.
- Ah ouais ? Et pourquoi ?
- Je risquerai de faire plus de mal que de bien. Eux, je pouvais les soigner, parce que leur anatomie est semblable à la mienne. J’avais juste à me servir de mon corps comme modèle pour réparer les dégâts.
- On parle de griffures, grommela Will. Pas besoin d’être vétérinaire pour savoir à quoi son flanc ressemblait avant que ce foutu Riolu ne le déchire.
- Ce n’est pas si superficiel que ça, Will, et vous le savez très bien. Des muscles ont été touchés. Mieux vaut que je n’y touche pas. »

A ces mots, Fenrir aboya en signe d’approbation, et le détective capitula.

« Ok, ok, grommela Will en jetant une nouvelle compresse pleine de sang. Bon, ça vient, ces bandages ? »

Sans prendre ombrage de son ton irrité, Sanae lui apporta des bandes de gaze et des ciseaux. Le survivant se tourna alors vers son partenaire de toujours :

« Tu connais la routine, vieux. Va falloir que je coupe ta fourrure. »

L’Arcanin, toujours avachi sur le ventre, grogna à nouveau d’un air résigné.

« Ce n’est pas la première fois que vous faites ça, nota Sanae.
- J’étais Elitien, rétorqua Will. Fenrir a pris autant de sales coups que moi, à l’époque, voire plus. Il n’y avait pas toujours de Centre Pokémon à portée, donc on a appris à se démerder. »

D’un geste expert, il coupa les poils de l’Arcanin aussi ras que possible, dégageant la zone des blessures avant d’y appliquer de nouvelles compresses, et de couvrir le tout de gaze. En voyant la vitesse à laquelle le bandage s’imbibait de sang, Will grimaça.

L’opération dura plusieurs minutes, et l’humain dut changer les compresses plusieurs fois avant que le saignement ne ralentisse enfin. Lorsqu’il releva la tête, il se rendit compte que Fenrir s’était assoupi – ou évanoui ? La quantité de sang qu’il avait perdue devait l’avoir épuisé.

Jadis, une telle plaie n’aurait pas empêché l’Arcanin de continuer à courir. Dans leurs jeunes années, c’était souvent à Will de tempérer l’impétuosité de son compagnon, trop fier et flamboyant pour savoir s’arrêter avant de se faire mal. Mais aujourd’hui, l’humain n’avait plus besoin d’ordonner à son Pokémon de se reposer – son corps fatigué s’en chargeait très bien lui-même.

Une fois de plus, la dure réalité s’imposa à Will.

Fenrir vieillissait.

« Je crois que les autres sont en train de chercher Riolu. Je vais les aider. » annonça soudain Sanae, qui était restée à ses côtés pendant toute la durée des soins.

Las, le détective se contenta d’opiner du chef. Il ne se sentait pas la force de participer aux recherches. L’endroit où avait fui le petit Pokémon était le cadet de ses soucis.

« Si tu croises Joshua, envoie-le moi. » trouva-t-il la force de dire malgré tout.

L’Apocalyptica, sur le point de sortir, s’arrêta sur le pas de la porte et se tourna vers lui.

« Alors ça y est ? Vous allez vraiment lui dire ce qu’il y a au dixième ? lança-t-elle de sa voix calme.
- Il va bien falloir. Plus le temps passe, et plus j’ai l’impression qu’on risque une guerre civile. Kate soupçonne déjà la vérité. On va avoir besoin de Joshua si on veut éviter que tout dégénère. »

L’hybride albinos le regarda de ses yeux gris, le visage taillé dans le marbre. Puis, un infime sourire apparut sur ses lèvres, si discret qu’il était facile de passer à côté pour quiconque ne connaissait pas Sanae. Mais Will avait appris à décrypter ces signes, et il savait la joie que lui procurait cette nouvelle.

« Bien. Je lui dirai de venir ici si je le vois.
- Merci. »

Elle hocha la tête et s’en fut. Will regarda le panneau coulissant se refermer, avant de reporter son attention sur son compagnon assoupi.

Assise de l’autre côté de la masse inconsciente qu’était Fenrir, l’apparition de Tia lui sourit.

~*~
« T’as essayé la salle des communications ? suggéra Lina.
- Non, pas encore.
- On ferait peut-être mieux de se séparer, proposa Joshua. Riolu n’a pas pu aller bien loin. »

Cela faisait une dizaine de minutes que lui et Lina, qui s’entraînaient dans la salle de sport du troisième, avaient cessé leurs exercices en entendant la voix de Jade crier le nom du petit Pokémon dans les couloirs. La paraplégique, qui avait au départ refusé leur assistance, avait fini par leur expliquer ce qu’il s’était passé après que Joshua ait lourdement insisté pour qu’ils l’aident.

« Ok. Je prends la salle des comm’ avec Jade, dans ce cas, décida Lina.
- Je vais vérifier la serre, lança alors Joshua. Vous y passiez pas mal de temps ensemble, non ? Peut-être qu’il est allé se réfugier là-bas. »

Jade opina du chef, et tous trois se séparèrent donc. Les deux jeunes femmes se dirigèrent vers l’ascenseur, tandis que Joshua remontait au second étage par les escaliers.

Lina écrasa le bouton de la cabine, et en quelques secondes, elle et Jade se retrouvèrent au cinquième étage.

« Riolu ! appela Jade lorsque les portes de l’ascenseur s’ouvrirent.
- Viens, on va fouiller les autres pièces d’abord. »

Elles pénétrèrent dans le couloir principal du cinquième et ouvrirent les portes une à une. Hormis la salle des communications, ce sous-sol ne contenait pas grand-chose d’autres : des salles d’archives qu’ils n’avaient jamais eu le courage de fouiller, des pièces pleines de matériel radiophonique et des débarras. Le petit Pokémon n’était dans aucune d’entre elles, et les deux jeunes femmes atteignirent rapidement le fond du couloir.

Prudemment, Lina poussa la porte, et entra dans la salle des communications, suivie de Jade. La pièce était circulaire et plongée dans la pénombre. Assez spacieuse, elle contenait une multitude de radios, d’ordinateurs et de décrypteurs de fréquence – autant d’appareils qu’ils avaient éteints depuis longtemps pour économiser l’électricité.

Lina savait que de temps en temps, Kate descendait pour essayer de communiquer avec l’extérieur et de contacter d’éventuels survivants ; mais elle n’avait jamais capté le moindre signal, et tous ces équipements de communication passaient la majorité de leur temps à l’arrêt.

La jeune femme tâtonna quelques secondes pour trouver l’interrupteur puis l’enclencha. Les néons bourdonnèrent et s’allumèrent péniblement, baignant la salle d’une lumière aseptisée.

« Riolu ! » s’exclama alors Jade.

Surprise, Lina suivit son regard et aperçut effectivement le petit Pokémon, blotti près d’une radio, dos au mur. La paraplégique fit aussitôt rouler son fauteuil vers lui, quand Lina remarqua soudain un détail qui l’emplit d’un malaise indéfinissable.

Riolu, assis par terre, genoux ramenés contre lui, se balançait d’avant en arrière, l’air ailleurs. Cette attitude ne disait probablement rien à Jade, mais Lina la reconnut immédiatement, et sentit monter en elle une peur qu’elle pensait refoulée depuis longtemps.

« Attends ! » s’écria-t-elle d’un ton plus paniqué qu’elle n’aurait aimé.

Jade, surprise, s’arrêta et la regarda sans comprendre. Mal à l’aise, Lina désigna Riolu du doigt, tandis que de sombres souvenirs ressurgissaient en elle.

« Il y a quelque chose qui cloche avec lui, se justifia-t-elle maladroitement.
- Raison de plus pour l’aider ! pesta Jade.
- Attends, je te dis ! »

Lina serra les poings, continuant de fixer Riolu, comme s’il risquait de se jeter sur elle d’un instant à l’autre. Elle n’aimait pas ça. Elle n’aimait vraiment pas ça du tout.

« Cette manière qu’il a de se balancer d’avant en arrière… balbutia Lina. C’est… c’est ce que faisait aussi Lyrian … »

~*~
Joshua posa la main sur le panneau digital et entra dans l’infirmerie, faisant sursauter Will, qui était visiblement en train de s’assoupir sur son siège.

« J’ai croisé Sanae dans les escaliers, lança le jeune homme en guise d’explications. Elle m’a dit que vous vouliez me voir.
- Rentre, assieds-toi. »

Joshua obéit et tira une chaise à lui, mal à l’aise. Avisant Fenrir qui dormait toujours, il eut une moue compatissante.

« Comment il va ?
- Il a connu pire. » assura Will.

Le survivant, visiblement d’humeur taciturne, ne rajouta rien, et un silence gêné s’installa. Joshua ne put s’empêcher de ressentir de la sympathie pour lui.

Il avait toujours vu Will comme quelqu’un de renfermé, méfiant, voire paranoïaque. Le barbu parlait rarement de lui, ne se joignait pas à eux pour les repas, et ne faisait de manière générale aucun effort pour s’intégrer à leur groupe.

Une autre réalisation le frappa alors. En temps normal, Will ne l’aurait jamais invité à le rejoindre dans l’infirmerie. Le simple fait qu’il accepte que Joshua le voit se faire du souci pour l’Arcanin, qu’il accepte sa présence dans ce moment de faiblesse, indiquait que quelque chose était différent de d’habitude.

« J’ai besoin de ton aide, Joshua, déclara soudain le survivant, faisant écho aux réflexions du jeune homme.
- C’est-à-dire ? » demanda l’intéressé, circonspect.

Will fixa le mur en face de lui pendant une fraction de seconde, comme s’il regardait quelque chose que lui seul pouvait voir. Puis, il soupira, et reporta son attention sur Joshua :

« Il y a quelque chose que j’aimerai te montrer, mais seulement si tu acceptes de garder le secret. »
- Tout dépend du quelque chose en question.
- Tu n’es pas idiot, lança le barbu d’un air fatigué. Tu sais de quoi je parle. »

Joshua croisa les bras. Cette manière qu’avait Will de tourner autour du pot ne lui disait rien qui vaille.

« Ça a un rapport avec ce que vous cachez au dixième, n’est-ce pas ?
- Oui.
- Mais vous ne me direz pas ce que c’est tant que je n’aurai pas fait la promesse de ne rien répéter, devina le jeune homme.
- Exact. »

Joshua soupira. Une multitude de questions surgirent en même temps dans son esprit, s’entrechoquant les unes contre les autres. Pourquoi lui ? Pourquoi maintenant ? Devait-il accepter et devenir le complice des cachotteries de Will ? Avait-il vraiment le choix ?

« C’est dangereux ? Ce qu’il y a au dixième ?
- Pas si tu gardes le silence, rétorqua Will.
- Ça veut dire quoi, ça ? »

Le barbu se contenta de le regarder fixement, et Joshua sut qu’il ne ferait pas flancher cet homme-là. Will avait posé ses conditions, et il ne reviendrait pas dessus.

« Pourquoi ne m’en parler qu’à moi, dans ce cas ? Si ce n’est pas dangereux, vous auriez pu dire ce que c’était à tout le monde, non ? Et pourquoi avoir attendu aussi longtemps ?
- Ta parole, Joshua. » se contenta de répondre le survivant, inflexible.

Le jeune homme grinça des dents. S’il voulait des réponses à ses questions, il allait devoir promettre. Will faisait-il exprès de ne pas lui laisser le temps de peser le pour et le contre ? Probablement pas. Il était peut-être méfiant à l’extrême, mais pas manipulateur. Malgré tout, Joshua se doutait qu’il était hors de question qu’il quitte la pièce sans avoir donné de réponse.

Il se demanda ce qui avait bien pu se passer pour qu’après neuf mois, le barbu se décide enfin à partager ses secrets. Il avait dit avoir besoin de son aide. Le connaissant, ce n’étaient sûrement pas des paroles prononcées à la légère. Et si c’était grave ? Si Will décidait de s’ouvrir parce qu’il était effectivement sur le point d’être dépassé, et qu’il avait besoin de Joshua ?

« Sanae est au courant ?
- De ce qu’il y a au dixième ? Oui.
- Et du fait que vous vouliez me le révéler ?
- Aussi. Je crois que ça fait même un petit moment qu’elle a envie de tout te dire elle aussi. »

Cette dernière réponse acheva d’ébrécher la résolution de Joshua. La curiosité, qui le disputait jusqu’ici à sa méfiance envers Will, l’emporta finalement, et il décroisa les bras.

« D’accord. Vous avez ma parole. »

~*~
Lina et Jade fixaient toujours Riolu, qui se balançait d’avant en arrière d’un air complètement absent.

« Je serai toi, je me méfierai, avertit Lina.
- Quoi, tu vas me faire croire que l’Autre a pris possession de lui ? pesta Jade, l’air irritée.
- J’en sais rien, mais c’est pas un comportement normal pour un Pokémon, et j’aime pas ça. Je… »

Le bruit de la porte qui s’ouvrait l’interrompit, et elle fit volte-face, sur les nerfs. Sanae entra dans la salle, suivie de Kate, qui leva les mains en voyant l’air tendu de Lina :

« Woah ! On se détend !
- Putain, vous m’avez fait peur, souffla Lina.
- Vous avez trouvé Riolu ? questionna Sanae, imperturbable.
- Ici. Dans le coin, près de la radio. Mais Lina prétend qu’il ne faut pas l’approcher.
- Il se balance comme Lyrian, rétorqua la rousse. Kate, regarde ça. »

En fronçant les sourcils, l’hybride aux cheveux bigarrés s’avança dans la salle et jeta un regard au Pokémon, toujours tapi dans son coin, oscillant d’avant en arrière. Elle n’eut pas le même mouvement de recul que Lina, mais grommela quand même.

« Merde, c’est vrai. Qu’est-ce qui lui arrive ?
- Tu ne vas pas t’y mettre toi aussi ! s’énerva Jade.
- C’est bien toi qui disait que tu ne le reconnaissais plus, non ? Qu’il devenait de plus en plus agressif ? rétorqua Kate.
- C’est peut-être pour ça qu’il s’en est pris à Fenrir, suggéra Lina.
- Jakar faisait ça aussi, à l’époque. Et Lyrian, quand il a tué son premier pillard.
- Et après le massacre d’Elise… »

Le regard de Jade oscilla de l’une à l’autre, bouche bée.

« Alors qu’est-ce que ça veut dire ? Que l’Autre a pris possession de mon Riolu ? fit-elle sans comprendre. »

Lina et Kate se tournèrent d’un bloc vers Sanae, qui restait silencieuse. Si quelqu’un avait les réponses à leurs questions, c’était bien elle.

« Sanae ? Qu’est-ce que t’en dis ? »

Mais Sanae ne regardait même pas le Pokémon. Lina suivit son regard et se rendit compte qu’elle fixait la radio à côté du Riolu. La jeune femme se rendit alors compte qu’elle était en marche.

« Vous entendez ? demanda l’Apocalyptica.
- On entend quoi ? s’étonna Kate.
- La radio. C’est Riolu qui l’a allumée ? » s’étonna Lina.

L’hybride aux longs cheveux blancs les contourna et s’approcha calmement de Riolu, qui ne sembla même pas la voir.

« Attends ! protesta Kate. On ne sait même pas s’il… »

S’accroupissant lentement, Sanae tourna la molette de volume, et le son de la radio devint suffisamment fort pour que toutes l’entendent. Kate s’interrompit alors, stupéfaite.

Une voix grésillante s’élevait des hauts-parleurs de la radio, répétant en boucle un message qui fit rater un battement au cœur de Lina.

« … à tous les survivants. Je répète : ce message s’adresse à tous les survivants. Nous avons de l’eau, de la nourriture, et des abris pour accueillir tous les réfugiés qui parviennent à nous rejoindre. 115 degrés nord, 64 degrés ouest. Je répète : 115 degrés nord, 64 degrés ouest. Tous sont les bienvenus, anciens comme nouveaux humains. »

Un silence de mort tomba dans la pièce, tandis que le quatuor échangeait des regards stupéfaits.

Puis, finalement, ce fut Kate qui rompit l’incrédulité du moment, résumant avec simplicité l’unique pensée que Lina était capable de formuler en cet instant :

« On n’est plus seuls. »