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Elementary Corp. ~ Les aventures de la famille Milvard de Takie du désert



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Informations

» Auteur : Takie du désert - Voir le profil
» Créé le 10/03/2018 à 12:34
» Dernière mise à jour le 10/03/2018 à 12:44

» Mots-clés :   Action   Fantastique   Présence d'armes   Région inventée

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Les coïncidences n'existent pas
Il fallait qu’il pense à autre chose. Sa faiblesse était trop visible ici. Il ne pouvait rien faire et pourtant son instinct et sa conscience lui hurlaient d’agir. Mais il n’en avait pas le droit. Il devait supporter tout ça pour garder son poste. Il ne pouvait pas se permettre de faillir à sa tâche. Pourtant, à chaque cri de Pokémon étouffé par les baies vitrées qui les séparaient, Siron sentait son cœur se meurtrir. Cela faisait quasiment deux heures qu’il attendait dans la petite salle, non loin du bureau du Directeur. La main crispée sur les plumes d’Eclipse, l’Ornithologue avait l’impression d’étouffer. Il détestait les laboratoires blancs et stériles qu’il voyait à perte de vue. Il détestait les Scientifiques en blouse et leurs Pokémons qui, au nom de la science et de la recherche torturaient leurs congénères. Et il souffrait. Il souffrait autant que ce pauvre Brindibou qui se tordait de douleur depuis près d’une heure à mesure qu’un Dimoret s’acharnait d’attaques Poing-Glace et que son dresseur Scientifique injectait à l’oiseau un produit étrange par seringue. Il fallait que ça s’arrête. Le pire c’est que le Directeur connaissait très bien le point de vue de Siron sur tout ceci. Il le faisait certainement exprès. C’était ainsi que le dresseur payait ses quarante-cinq minutes de retard. Mais c’en était trop.

« - Je crois que je vais vomir… »

Le grand mince à la longue chevelure blanche se hissa hors de son siège en s’appuyant sur l’encolure de son Roucarnage compatissant. La porte du bureau adjacent s’ouvrit alors violemment.

« - Milvard ! Dans mon bureau !

- Voici votre rapport monsieur. »

Il ne voulait plus rester ici dans cette ambiance macabre : il tendit le dossier à son chef. Les yeux orangés de l’aîné des Milvard soutinrent le regard violet de l’homme massif qui lui faisait face. Cet homme le dégoûtait profondément, sa façon d’agir avec les Pokémons et les hommes dressaient un portrait que Siron haïssait au plus haut point, lui qui se vantait d’aimer tout le monde.

Peu habitué à ce qu’on lui tienne tête, les narines de l’imposant directeur Khasaros frémirent. Il était plus petit que l’Ornithologue en termes de taille mais il avait une carrure impressionnante, écrasante même et le Trioxhydre à ses côtés terrorisaient tous les employés. Siron l’avait déjà vu déchiqueter les Pokémons d’expérience devenus trop faibles et il ne souhaitait ça à personne, quel que soit son crime. Pourtant aujourd’hui dans un regain de courage ou d’inconscience, il tint bon, les poings serrés… mais il n’était pas préparé à ce qui allait suivre. L’odieux dresseur supérieur arracha le précieux dossier des mains de l'aîné Milvard et le déchira sous les yeux ahuris du chercheur, puis il s’écarta de la porte pour indiquer un siège en face de son bureau : il avait l’air hors de lui. Son Pokémon bien plus puissant que la belle Eclipse dardait ses têtes en frôlant les plumes du Roucarnage. Siron n’avait jamais vu Khasaros dans un tel état : le Directeur de l’Institut de Recherche de la Capitale fulminait.

« - Assis. Tout de suite. »

Il n’avait même pas besoin de menacer, Siron ressentait douloureusement la peur de son Roucarnage et lui-même était loin d’être serein. Il déglutit avec difficulté, la mâchoire serrée et les poings contractés. Il finit néanmoins par se poser sur le siège en s’efforçant de ne rien laisser paraître. Il refusait de montrer sa peur à un homme comme Khasaros. Le dit Khasaros claqua la porte avec brutalité, se plaça derrière son bureau, les paumes appuyées dessus pour être au plus proche de sa proie. Les yeux dans les yeux avec un air de bourreau il posa l’ultime question :

« - Siron Ekos Achar Milvard, au nom du Gouverneur et du Conseil je vous ordonne de répondre sans mentir au risque de nous contraindre à utiliser des méthodes peu agréables pour vous faire parler : votre géniteur Cadrick Milvard fait-il partie d’Elementary Corporation ? »

Les deux derniers mots se figèrent dans le crâne de Siron et dans ses pupilles orangées, un voile noir s’abattit.


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Il y avait quelque chose de fascinant, d’envoûtant dans le feu. Ce n’était pas un élément dont il était proche, pas un de ceux qu’il appréciait, contrairement à Vake. Il n’avait aucun Pokémon de type Feu et n’avait jamais souhaité en avoir. Les flammes lui faisaient peur. Et pourtant… et pourtant… c’était un spectacle horriblement beau. Au début il n’avait pas réfléchi, accompagné par ses camarades et dans le feu de l’action, il s’était démené, acharné pour protéger les bébés Pokémons et les enfants. Il transpirait sous sa combinaison et sa peau mate souffrait de la chaleur étouffante. Mais son regard dont le bleu rappelait les étendues marines avait été happé par ces langues orange et rouges qui léchaient les bâtiments en s’élevant dans le ciel noir. Et Arkas s’était senti petit, infime. Un grain de sable dans un désert. Il était trop proche du feu désormais. Martel, son fidèle Rhinoféros le tira de sa torpeur d’un cri grave. Mais le Pompier avait abandonné sa contemplation des flammes car au même moment, il lui semblait avoir vu quelque chose bouger derrière un angle du bâtiment. Restait-il un Pokémon à sauver ?

« - Eh ! J’ai besoin d’aide ! Vous m’recevez ? »

Mais la montre-talkie à son poignet était fendue. Elle avait dû prendre un choc sans qu’il ne s’en rende compte.

« - Merde ! »

Leçon numéro une dans le code des pompiers : ne jamais s’engager seul dans un bâtiment potentiellement sur le point de s’effondrer. Surtout lorsqu’on n’était pas sûr d’avoir quelqu’un à y sauver. Nul doute que si le jeune Milvard avait vu un enfant ou un Pokémon coincé, il se serait jeté corps et âmes dans la bâtisse grignotée par le feu. Mais il n’avait eu qu’une impression fugace, comme une sensation…peu fiable. Tiraillé entre la nécessité morale de vérifier s’il restait quelqu’un à l’intérieur et la peur de se blesser par inconscience, le jeune homme était face à un dilemme.

« - Fais chier ! »

Les Pokémons eau et les canons du camion s’approchaient lentement, prenant bien soin d’éteindre toute flamme avant d’avancer dans leur direction : si quelqu’un était bien dans cette partie de la Pension, la fumée l’aurait bientôt achevé… ils n’avaient à déplorer aucune perte pour le moment, Arkas refusait d’avoir sur la conscience une telle erreur. Il trancha en une fraction de seconde, pesta contre tous les légendaires qui lui passaient par la tête et s’élança avec Martel dans le coin du bâtiment : une poutre enflammée s’effondra en lui barrant la route et ses yeux rencontrèrent ceux d’un homme sans uniforme au travers des flammes. Obnubilé par cette étrange vision, le dresseur habituellement attentif ne vit pas le Grayhena qui se tenait aux côtés de l’homme vêtu étrangement. Le Pokémon jeta ses crocs puissants en direction de la tête du Pompier.

L’espace d’un instant, Arkas crut qu’il allait se faire arracher le crâne mais il fut formidablement tiré en arrière alors que la mâchoire du canidé claquait dans le vide. Son Rhinoféros l’avait sauvé et l’inconnu disparut alors dans une ombre fuyante entre les arbres… Le choc fut douloureux même si Martel avait fait de son mieux pour ne pas réduire en poussière les os de son dresseur avec sa force colossale. Ceci dit, les douleurs et fatigues physiques n’intéressaient pas Arkas pour le moment. Tout ce qui venait de se passer lui laissait un goût amer en bouche, comme un mauvais pressentiment, comme une impression de déjà-vu. Il était sûr d’avoir déjà croisé ce regard… Et si l’inconnu était accompagné d’un Grayhena ce ne pouvait être une coïncidence… Les employés de la Pension avait dit avoir vu plusieurs de ces Pokémons attaquer un troupeau de Galopas en les rabattant vers la ville. Ce n’était pas un comportement normal pour des Pokémons sauvages. Et pour Arkas, il y avait trop d’incohérences : l’incendie était forcément d’origine criminelle… mais qui avait aussi peu de scrupules pour s’attaquer à des Pokémons à peine sortis de l’œuf et à leurs camarades humains ? *


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« - Alors c’est clair pour tout le monde ? La version officielle est celle que je viens de vous dire. Une enquête est en cours, des hommes ont attaqué votre frère hier, point barre. Pas un seul mot vous m’entendez, pas un seul mot sur cette carte. »

Cadrick Milvard tenait dans sa main la petite carte métallique de la Corporation. Il avait un air grave mais surtout autoritaire. Son ton n’acceptait aucune répartie, aucun manquement à l’ordre. Aujourd’hui il avait le rôle et d’un père et d’un Commandant, car aujourd’hui, il se devait avant toute chose de protéger sa famille. Et aujourd’hui, pour la première fois dans sa carrière de militaire dont il était si fier, il allait mentir, falsifier un rapport, omettre des détails. Et il n’aimait pas ça, le mensonge n’était pas du tout dans sa nature…

«- Il risque de se passer deux choses d’accord : soit cette histoire va être étouffée pour ne pas inquiéter, auquel cas il faudra taire l’événement, ne pas en parler que ce soit à vos amis ou à vos supérieurs, professeurs ou autres. Soit au contraire, le Maître de Megrador dévoilera ce qu’il souhaite à la presse et vos amis, vos collègues, vos camarades de classe seront au courant, cherchant à en savoir plus. Et je sais que ça risque d’être difficile mais il faut tenir bon d’accord. Faites-le pour Vake.»

Les yeux bleus du marin passèrent de Zarod à Shadan puis de Shadan à Soros. Soros n’était pas bien. Si Cadrick avait confiance en son fils Eleveur à la crinière rouge et en sa fille Nageuse qui avait hérité de son regard d’azur, il s’inquiétait tout particulièrement pour Soros. Il était trop petit, trop faible pour porter un tel fardeau et pourtant il n’avait pas le choix. D’un geste de la main, le chef de famille laissa filer les deux castés pour s’approcher de son dernier fils qui était encore à l’Académie-Medium.

« - Soros, regarde-moi mon grand. »

Le regard orange du garçon d’une douzaine d’années brillait mais il ne pleurait pas, il se força à froncer les sourcils pour garder consistance et soutint les yeux de son père.

« - Si je te demande de mentir c’est pour aider Vake d’accord. Il faut que tu sois fort pour lui, c’est ton grand frère mais on est une famille. On se protège tous mutuellement et toi Soros, tu te dois de protéger Vake, tu comprends ? »

L’enfant hocha vigoureusement la tête. Mais dans sa main crispée derrière son dos, le petit rouquin tenait son téléphone portable et regrettait déjà ce qu’il avait fait. Il était trop tard pour changer ça… personne ne s’était occupé de lui hier soir après l’incident et personne n’avait vu que le gamin avait besoin d’être rassuré, avait besoin d’attention pour comprendre et appréhender tout ça. Alors Soros s’était tourné vers ses Pokémons… et vers Allie. Une de ses amies. Il lui avait tout dit, tout raconté. Il avait vidé son sac, lui avait expliqué à quel point il avait peur et se demandait ce qu’était l’Elementary Corporation dont ses parents avaient parlé. Et ce matin, il était trop honteux pour confesser cet acte qui hier lui avait paru si anodin et qui aujourd’hui s’annonçait immensément stupide et dangereux. La gorge serrée et portant avec difficulté le poids de sa culpabilité, Soros prit Coffee, son Teddiursa dans les bras et descendit dans sa chambre pour préparer ses affaires d’académie…