« Donc attends, t'es en train de me dire que là, on est à Kanto, soit à je ne sais combien de centaines de bornes d'Alola, et qu'on a plus un rond pour prendre un ferry en retour ?
Je n'osais même pas répondre, peinant moi-même à le croire. Tout d'un coup je me souvins d'un truc : quand j'avais demandé à Vince où il allait, il m'avait répondu qu'il rendait visite à sa grand-mère avant de participer au Grand Festa. Putain, pourquoi j'ai pas fait le lien...
— T'as bien regardé les tickets ? continua Flamiaou.
— Ben nan c'est toi qui les as pris !
— Et merde. J'ai pas regardé.
— Tu sais stupide chat, dis-je calmement, si nous avions pris le temps de réserver les billets sur internet, ce genre de choses ne serait pas arrivé. Tu le sais, ça ? Où tout du moins, tu m'as l'air suffisamment intelligent pour comprendre, NON ?!
Autour de nous, les gens sortaient du bateau, rejoignant des proches les attendant, ou entraient dans des taxis. Or, dans notre cas, nous étions plantés au beau milieu du quai, comme trois pingouins, à attendre que le temps passe, n'ayant rien d'autre à faire. Est-ce que vous vous rendez compte de notre situation ? Sans déconner il pouvait pas nous arriver pire.
— Au moins, on a trois semaines devant nous pour retrouver de l'argent... suggéra le camionneur.
Bah oui j'allais te le dire, c'est simple comme bonjour ! Après tout on a qu'à se prostituer ou monter un trafic de drogue ?! Stupide chat. J'arrête pas de me répéter. Quoi qu'il en soit, nous nous retrouvons maintenant devant les maisons au toit orange, sans but ni destination.
— Allons au Centre Pokémon, conseillai-je. Là-bas, ils pourront peut-être nous indiquer sur quoi faire. Parce que franchement, je doute qu'ils nous filent de la thune comme ça.
— Ouais... Bon on va aller y faire un tour, je ne vois pas ce qu'on pourrait faire d'autre, dans cette situation.
Et c'est ainsi que nous nous retrouvâmes au Centre, assis à l'une des nombreuses tables, en voyant défiler les clients. J'insiste bien sur ce dernier point, parce que nous n'avions alors rien d'autre à faire. Enfin on aurait pu parler, mais quitte à faire la causette à un chat vénère et un castor débile, je préfère discuter avec moi-même.
— Et maintenant ? fit Flamiaou.
Vous savez, ce genre de situations où vous vous faites désespérément suer, où votre vie est au plus bas, et où vous traînez avec des imbéciles finis ? Vous l'imaginez clairement ? Super, parce que c'est exactement la situation dans laquelle nous nous trouvons.
— On a des tupperware, dis-je, mais je pense pas que ça tienne trois semaines. On pourrait se rationner et aller récolter des baies, mais le problème reste toujours le billet retour. Hm... On pourrait pas te vendre, Flamiaou ? Après tout, on n’a pas besoin de toi dans l'équipe, maintenant que l'autre est devenu super saiyajin...
— Me virer ?! s'étrangla le Pokémon. Je vois que tu n'as pas encore compris quelle est notre situation. Tu manques vraiment de jugeote, tout de même. Alors pour te faire simple, Keunotor a un QI tellement bas que le fait qu'il ne cherche pas à comprendre ce qui l'entoure lui permet d'apprendre n'importe quelle capacité. Cependant, ses statistiques sont également très basses. Mais genre quand je dis bas, c'est vraiment le fond du fond. Limite une attaque Rugissement suffirait à le blesser. Moi, en revanche, c'est tout l'inverse : en terme de capacités je suis un Pokémon normal, mais je possède des stats plutôt très élevées ainsi qu'une grande intelligence. De ce fait, je dirais que nous sommes tous les deux complémentaires l'un de l'autre.
Waouh. Sérieusement.
— Putain tu m'apprends quelque chose là, lui répondis-je totalement éberlué. Mais si t'as des stats si élevées que ça, comment ça se fait que t'aies été mis KO après deux attaques du Galegon, hier ?
— Ouais alors ça, c'est tout simplement parce qu'il était beaucoup trop fort. Pour te donner une idée, si j'étais niveau cinq, lui était au moins cinquante.
— Mais Keunotor... Il a bien subi une attaque avant d'être mis KO !
— Non. En fait après avoir subi l'attaque Griffe Acier, il a vraiment été mis hors combat. Mais vu qu'il est con comme ses pattes, il ne s'en est pas rendu compte et est revenu à la vie quand je l'ai appelé. Ah et au passage, le Vortente aurait été aussi niveau cinquante.
Sans déconner, mon équipe se composait, au jour d'aujourd'hui, d'un chat tellement fort qu'il pouvait tenir face à un Pokémon de niveau cinquante sans grand soucis, ainsi que d'un castor tellement stupide qu'il pouvait exécuter n'importe quelle capacité et ressusciter. J'avais vraiment beaucoup de mal à y croire. C'est quoi le prochain ? Un qui est né d'un virus, qui peut respirer dans l'espace, et qui possède quatre formes différentes ? J'invente sûrement mais ça ne m'étonnerait pas, croyez-moi. Dans tous les cas je restais sans voix face à de telles révélations, le regard perdu dans le vide.
— Red ? fit Flamiaou. Red ? Hé ho ? Tu m'entends saloperie d'humain ? Putain l’idiot il nous a lâché. Un défibrillateur, vite !
Je me réveillai.
— Oui, euh... Il se passe quoi ?
— Beh on était en train de parler, abruti. T'as un sérieux problème avec le fait de discuter avec moi. Si c'est pas pour m'ignorer, c'est pour me cracher ta bouffe au visage.
Y repensant, je me mis à rire.
— ENFOIRE !! continua le chat.
Pendant ce temps-là...
— Hé les gars, vous voyez ce que je vois ? fit une voix féminine.
Elle portait des jumelles, et observait à travers la vitre les trois compagnons, cachée dans un fourré. L'un de ses camarades sortit du buisson, jumelles en main, et contempla à son tour.
— Oh c'est pas un Pokémon de la région, ça ! fit-il. Sors ton Pokédex, James !
Le troisième et dernier personnage sortit sa tête, et consulta son Pokédex :
« Flamiaou, le Pokémon Chat Feu. Les poils qu'il avale pendant sa toilette brûlent et forment une flamme dans son ventre. Celle-ci change selon sa façon dont il la recrache. Il est originaire de la région d'Alola. »
— Alola ? répéta la femme. C'est les îles tropicales, ça ! On pourrait en tirer une belle somme d'argent !
La deuxième voix n'était autre que celle d'un Pokémon. Un Pokémon qui aime les objets brillants, si vous voyez de qui je parle...
— Et ensuite, à nous la reconnaissance du boss et la gloire ! s'exclama-t-il.
— Dans tous les cas, on doit s'approcher d'eux ! dit le dénommé James.
Au même moment... (oui je n’ai que ça pour faire des transitions, désolé)
Les trois compagnons étaient toujours assis au centre, mais avaient entre-temps été gentiment servis par l'infirmière Joëlle, qui leur avait offert à chacun un jus d'orange.
— Elle est gentille, cette infirmière, fit remarquer Flamiaou. Certains nous auraient dégagé.
— C'est vrai que c'est gentil de pas nous laisser crever de soif, approuvai-je. Surtout dans son établissement.
Soudain, un individu s'approcha des trois pauvres. Il portait un chapeau et des lunettes sombres, et tentait vainement de dissimuler ses cheveux bleus ainsi que sa coupe immonde.
— Ouais, vous voulez quoi ? fis-je. Désolé on a pas de thune, allez mendier ailleurs.
Bim, dans sa gueule. On est p’tet pauvres, mais force pas. En réponse, il partit dans un faux rire, clairement forcé. J'avais déjà envie de le tarter.
— Vous m'avez l'air de venir loin, dit-il. Je ne vous ai jamais vu ici, d'où êtes-vous originaire ?
On m'a toujours dit de me méfier des mecs chelous. Du coup, j'applique la théorie.
— Moi non plus, je ne vous ai jamais vu par ic...
— Alola ! me coupa soudainement Keunotor.
Ahh, stupidité, quand tu nous tiens. En tout cas ce Pokémon n'a pas volé son surnom de bestiole la plus bête du monde. Thanks, Arceus.
— Oui, je me disais bien ! C'est loin, ça !
— A une nuit de bateau, répondis-je. En avion c'est à même pas deux heures.
Il commençait à me casser les pieds, pour pas dire autre chose. Fallait que je reste calme putain, mais à ce moment-là de la journée, mes nerfs étaient à vifs. Vous savez, la tension, la fatigue, le stress...
— Je vois... Et que faites-vous ici ? poursuivit l'individu étrange.
— On s'est trompés de bateau, continuai-je. On devait aller au Grand Festa.
— Ah, mais vous allez pouvoir visiter la région, voire même les autres, du coup ?
Round one, Red vs Strange Man, START !
— Beh oui ducon, j'ai le tournoi de ma vie dans trois semaines, mais je vais faire un tour du monde ! J'allais te le dire.
First point : Red.
— Mais je pourrais tout de même vous présenter la ville !
…
Bordel il est con ou quoi celui-là ? Enfin, bien sûr qu'il est con, mais je pensais qu'il le cacherait un minimum, tout de même. Question de respect, quoi. Et par contre je savais pas quoi lui répondre. En fait, ce type m'exaspérait tellement que j'en avais des frissons. Véridique. Oui j'aime pas dire ça, mais je voulais caler ce mot quelque part. C'est une forme de masochisme, cherchez pas. Bref :
— Ouais, nan, aller bisous.
Il prit un air faussement triste. Actors Studio, ma gueule.
— C'est bien dommage... Il y a pourtant de bonnes manières de gagner de l'argent, dans cette région, dit-il. Peut-être en auriez vous besoin, étant voyageurs ?!
Ola, il a fait un strike l'enfoiré. Nous nous regardâmes, Flamiaou et moi, puis je demandai, avec un grand sourire :
— Hum... Que voulez-vous dire par là, cher ami ?
Oui je ne suis pas crédible, oui je suis faux-cul, et oui je vous emmerde.
— Par exemple, vous pourriez vendre votre Flamiaou, il doit valoir une petite fortune, ici.
Dans la tête de James : « Mince, je n'aurais pas dû dire ça. C'est un stupide dresseur, il est forcément attaché à son Pokémon ! »
Dans ma tête : « UNE FORTUNE ?! Grosses bises le camionneur, tu dégages. »
— Euh... Flamiaou serait TRES content de changer de maître, fis-je avec un sourire jusqu'aux oreilles.
L'intéressé se retourna vivement vers moi, et crachota quelques flammes, l'air de dire « Va te faire voir. » Alala, qu'il est vulgaire ce chat.
— Très bien alors, que diriez-vous de vingt Pokédollars ? proposa l'homme.
— Tu... me prends pour qui, Captain Bouffon ? sifflai-je.
Son attitude changea brutalement, et son sourire faussement amical disparut. Merde, j'avais fait une connerie.
— Enfin... me rattrapai-je. Je voulais dire que pour une telle somme, Flamiaou serait triste de me quitter... Ce que je peux comprendre – forcément – et c'est pour ça que je propose d'augmenter le prix à deux mille Pokédollars ? Comme vous l'aviez indiqué vous-même, il vaut une petite fortune, ici.
Ah c'est bien bête, tu me l'aurais acheté à Alola, il t’aurait coûté le prix d'une boîte de haricots verts.
— Abuse pas, ta bestiole c'est pas un lingot d'or non plus, hein. C'est juste un chat qui crache du feu, oublie pas.
Je changeai à mon tour d'attitude. « Merde », se dit James. « J'aurais pas dû ».
— Dites-moi, avez-vous des Pokémon ? demandai-je, masquant mon air intéressé.
— Oui, bien entendu, me répondit l'autre boulet.
— Alors que diriez vous d'un petit combat, pour régler ça ? Si vous gagnez, je vous offre Flamiaou, et sinon vous me donnez trois mille Pokédollars.
« Merde », se dit James. « J'aurais pas dû ». Une voix sortit toutefois de son oreillette : « Fais le James, c'est qu'un gamin avec deux Pokémon, dont un Keunotor. Tu vas gagner tranquillou. » C'était celle du Chadégout qui les accompagnait. (sérieusement si avec tous ces indices vous voyez pas qui c'est...)
— Très bien ! sourit-il.
« Je vais t'exploser », songea-t-il. Quand à moi, c'était simple : je savais que contre un tel abruti, mes monstres ne pouvaient pas perdre. Nous sortîmes donc tous les quatre du bâtiment, et nous plaçâmes derrière, sur un terrain vague censé accueillir un futur immeuble. Durant quelques instants, l'étrange personnage était parti rejoindre ses confrères derrière un arbre, et ils discutaient. Comment je le savais ? Certainement en raison de leur manque de discrétion. Une minute plus tard, il revint, deux Pokéball en main.
— Un combat en deux contre deux, donc ? Ça me va.
Heureusement que ça te va, ce n’était pas une proposition. Qu'importe. Nous nous plaçâmes donc, et il fit apparaître ses deux Pokémon.
— Sepiatop, Gaulet, à vous de jouer ! s'écria-t-il.Une créature semblable à... et à... Fuck ! apparurent sur le sable.
— Allons-y ! Sepiatop, utilise Hypnose sur Flamiaou, et Gaulet, prépare Lance-soleil.
— Hé, calmos ?!
Par malchance pour moi, les rayons du soleil étaient au plus fort aujourd'hui, et le champignon n'eut pas la peine de charger son attaque.
— Keunotor, Abri ! Et mets-y la patate.
S'il se faisait toucher, c'était fini. Alors pas le droit à l'erreur.
— Keunotor, poursuis avec Éclat Magique sur Sepiatop, et Flamiaou, viens le couvrir avec Lance-flamme sur Gaulet !
Quoi ? Pourquoi vous me regardez comme ça ? Ben oui, j'ai appris une liste complète de toutes les attaques Pokémon répertoriées. Oui bah j'y peux rien, c'est le jeu. Sinon... Un flash lumineux apparut devant le castor, qui blessa le Pokémon Rotation (le nom est pourri, on est d'accord). De l'autre côté, le chat sauta, et projeta ses flammes vers son adversaire.
— Esquive, Gaulet ! Et riposte avec Poudre-dodo !
La créature fit un bond en arrière, évitant ainsi l'attaque, et projeta une fine poudre verte sur Flamiaou, qui ne sut quoi faire contre elle, la voyant arriver sur lui.
— Et merde... râlai-je. Keunotor, utilise Ouragan sur la poudre ! Renvoie-la sur l'ennemi.
Il s'exécuta, et bien que libérant son allié du danger, ne put atteindre le cèpe.
— Tu te débrouilles bien pour un débutant, dit James. Mais je n'ai pas dit mon dernier mot !
— Chut, répondis-je simplement. Je suis concentré. Flamiaou, prépare-toi à attaquer Gaulet, et Keunotor, fais face à Sepiatop.
— Ta stratégie est nulle... Navré pour toi ! Sepiatop, Psyko ! Gaulet, Giga-Sangsue !
Ouais ouais, on verra. Les deux adversaires attaquèrent alors. Et maintenant...
— L'abruti, esquive rapido et Déflagration sur Sepiatop ! L'enfoiré, renforce l'attaque avec Lance-flamme.
Et là, WTF total dans les yeux du dresseur adverse. Tout ça grâce à l'utilisation de surnoms pour mes Pokémon ainsi que de capacités du même type. Oui, c'est une stratégie qui repose sur un principe tout pourri, mais il n'empêche que j'ai pu croiser mes attaques sans qu'il ne capte quoi que ce soit. C'est peut-être mon deuxième combat, mais il n'empêche que je sais comment m'y prendre.
— Keunotor, Rayon Signal sur la saloperie de calamar ! Flamiaou, accompagne-le avec Morsure !
Les deux créatures s'exécutèrent ; le castor tira un rayon coloré vers Sepiatop qui se le prit de plein fouet, et le chat fondit sur lui, plantant ses crocs dans son corps étrange. Oui je dis étrange car je ne sais pas vraiment de quoi il est constitué. J'ai jamais disséqué de calamar ni de méduse, désolé.
J'allais sauter de joie en imaginant Sepiatop KO, mais à mon grand étonnement, et bien que blessé, celui-ci volait toujours.
— Mais... Quoi ?! Une attaque insecte sur un type Psy et Ténèbres, c'est des dégâts multipliés par quatre !
— Sauf s'il tient une baie Panga ! rétorqua l'autre. Dans ce cas, les dégâts sont divisés par deux.
— Bordel, le coup des objets... J'ai juste une question : COMMENT CETTE CHOSE PEUT TENIR UNE BAIE ?!
— Ah ! Comme si j'allais te le dire !
… Il me prend pour un idiot ? Je veux dire, en quoi ça me serait utilise de savoir ça ? C'est pas comme s'il allait me révéler un secret inavouable. Je demandais juste pour renforcer ma culture. Bref, dans tous les cas il m'avait bien eu, le salopiaud (non ce n'est pas une insulte, c'est mignon!).
— Ben en fait, ça m'intéresse pas trop. Du coup, Keunotor, réutilise Rayon Sig...
— ATTENDS ! me coupa-t-il. (le dresseur, pas le castor)
— Quoi ?
— Comment ton Pokémon peut-il maîtriser de telles attaques ?
Euh... C'est très long à expliquer, Captain Bouffon. Du coup je vais raccourcir.
— Et bien regarde, fis-je simplement. Keunotor, tout compte fait utilise Blizzard sur les deux !
Je vis dans le regard de l'homme aux cheveux bleus l'étonnement, et j'aimais ça. Vous savez quoi ? J'adore surprendre les gens. Surtout quand ceux-ci me sous-estiment. Mon allié se concentra donc, et une fraction de seconde plus tard, une tempête de neige, descendant du ciel, vint frapper les créatures adverses. C'était une attaque puissante, et ils avaient mal. Surtout Gaulet, craignant le type Glace. Pourtant, ils tenaient toujours « debout ». Ce combat commençait sérieusement à me courir sur le haricot.
— Hé Flamiaou, ils sont niveau combien eux, d'après toi ?
— Euh, franchement je leur donne pas plus que le niveau vingt. Ils ont pas encore réussi à nous toucher une seule fois, et leur dresseur gère pas des masses.
Entendant une remarque le concernant, ce dernier s'offusqua. Rien à faire.
— Bah alors t'attends quoi pour les défoncer ?! m'exclamai-je.
— Que tu me donnes un ordre, peut-être ? Oublie pas que Keunotor a ses capacités, mais moi, j'ai des stats de l'espace. Et il est peut-être temps que je les utilise à fond, tu ne crois pas ?
A fond ?! Ça veut dire... que jusque là... Il s'est pas donné à fond, même hier ?
— Non bon hier c'était différent, corrigea-t-il. Je manque encore un tout petit peu d'entraînement. Mais eux, c'est de la tarte !
Je souris.
Il m'étonnera toujours, ce Pokémon.— Dans ce cas-là, Keunotor, disperse Brume sur tout le terrain, et une fois fait, Flamiaou... Démonte-leur la gueule !!
Il sourit à son tour.
— Compris, bonhomme. Cette fillette va regretter d'avoir voulu m'acheter !
Comme demandé, le Pokémon Souridodue cracha un imposant nuage de brouillard, qui se posa sur toute la zone, masquant le chat. Mais heureusement, ce dernier, pouvant voir même dans la nuit, sut où il mettait les pieds. Il effectua un petit bond, et atteignit Gaulet à une vitesse fulgurante, dispersant l'écran de fumée autour de lui. Waouh. Sans déconner, si ça c'est sa vitesse au niveau cinq, je demande de voir le niveau cent, saloperie de dieu. Je me mis à rire. Avec toi, Arceus n'a qu'à bien se tenir ! Il agissait bien tout seul, mais étant le dresseur, je me devais de savoir réagir.
— Flamiaou, attaque Roue de Feu ! Défonce-le !!
Toujours dans sa propulsion, le Pokémon se mit à tournoyer sur lui-même, s'entourant de feu, et percuta avec une attaque spéciale inimaginable (oui ça fait bizarre dit comme ça, mais vous savez quoi ? j'aime être précis) le champignon, qui s'envola une trentaine de mètres plus loin, s'écrasant dans les arbres. Et maintenant, je suis sûr d'une chose : je peux inscrire Roue de Feu dans la liste des attaques OHKO. Bon certes, il était déjà blessé, mais je doute qu'il ait pu survivre, avec tous ses points de vie, face à une météorite lancée à une centaine de kilomètres heure, ainsi qu'a une chute à la même vitesse, pour finir avec une collision dans un arbre. Ah, au fait, ce dernier a volé en éclat au contact de la créature. En face de moi, mon adversaire était bouche-bée. Flamiaou retomba au sol, et se retourna vers moi.
— J'aurais pu le réduire en bouillie, mais bon...
— Tu as bien fait, souris-je. On mangera de la soupe de champignon une autre fois.
— Reviens, Gaulet. Tu t'es bien débrouillé…
Je fixais le mec aux cheveux bleus. Il y avait dans sa voix un ton presque triste. L'espace d'un instant, j'eus presque de la peine pour lui, mais son Pokémon n'était pas mort, juste inconscient. Qu'importe, il fallait finir cet interminable combat.
— Flamiaou, tu m'exploses l'autre ?
— Avec plaisir, Read. Je fais quoi ?
— Tu penses pouvoir réaliser l'attaque Crocs Feu ? demandai-je.
Il ria presque.
— Crocs Feu ? Ce que tu me demandes, c'est simplement de mettre du feu dans ma gueule et de le mordre en même temps. N'oublie pas que je suis intelligent.
— Ouais ouais... je souriais toujours. Alors fonce, et Crocs Feu !
« Pourquoi il annonce ses attaques à l'avance comme ça ? songea James. Il a tellement confiance en la force de ses Pokémon ? Ce gamin... Quelle puissance écrasante... »
— Sepiatop !! hurla-t-il. Prépare-toi à esquiver !!
— C'est peine perdue, fit Flamiaou.
Ce dernier se propulsa une seconde fois, à la seule différence qu'il rasait le sol. Lorsqu'il arriva au niveau du Pokémon Rotation, et tandis que celui-ci s'éloignait rapidement, il reprit appui et fila vers son adversaire, avant de le mordre violemment. Je ne saurais dire avec quelle force il avait exécuté son attaque, mais compte tenu du fait que Sepiatop tomba dans l'inconscience au bout de quelques secondes de prise, il me semble logique que ce soit inimaginable. Le corps inerte de la petite méduse tomba dans le sable, sous le regard horrifié de son dresseur. Il s'en approcha et finit par tomber à genoux devant. Putain, j'avais jamais vu quelqu'un dans son état après une défaite. Tandis que mes Pokémon revenaient à mes côtés sans un mot, je m'adressai à Flamiaou.
[MUSIQUE FIN]
— On y a peut-être été un peu fort, dis-je.
Il conserva le silence une dizaine de secondes, avant de me répondre :
— Soit c'est sa première défaite et pour une première, c'est en effet brutal, soit il a un lien très fort avec ses Pokémon. (il me regarda) Si ta famille ou tes amis se retrouvaient dans cet état, comment tu le vivrais ?
Cette question me fit un choc. Je ne connais le chat que depuis hier, et Keunotor... je ne l'ai jusqu'alors jamais considéré comme un Pokémon de combat. Ni même véritablement comme un compagnon, en fait, c'était juste un animal de compagnie. Pourtant, en à peine deux jours, de vrais lien s'étaient créés entre nous. Ça avait commencé suite à notre défaite : je les ai vus se donner à fond, pour finalement être écrasés. J'ai à ce moment ressenti un petit pincement au cœur. Pourtant c'était notre premier combat, et quatre heures plus tôt, je ne connaissais pas Flamiaou. Alors en effet, si des liens importants avaient été tissés entre ce dresseur et ses Pokémon, il avait de quoi être triste.
— C'est bien ce que je dis. On y est allés trop fort.
Je m'approchai de lui, et comme il était à genoux je me baissai à son niveau.
— Tu m'as l'air très proche de tes Pokémon, dis-je. Comment t'appelles-tu ?
Il releva la tête, et tenta vainement de me rendre mon sourire.
— James. Et toi, c'est Read ?
J’acquiesçai. J'éprouvai de la compassion pour cet homme. Je ne sais pour quelle raison, il semblait avoir une vie emplie de malheurs.
— Tu es un excellent dresseur. Tu sembles très doué.
Je me relevai, toujours souriant.
— Non. Je n'en suis qu'à mon deuxième combat, et je n'ai rien de particulier, en tant que dresseur. Ce sont mes Pokémon, qui sont incroyables.
Soudain, j'entendis un bruit étrange derrière-moi. Je me retournai, et vis Keunotor et Flamiaou pris au piège dans une cage.
— C'EST QUOI CETTE MERDE ?! s'exclama le camionneur. QUI QUE TU SOIS, TU VAS LE REGRETTER, TOI !
Je levai la tête et apercevait une montgolfière en forme de... Miaouss. Mauvais goût bonjour. A son bord, une femme aux cheveux violets, avec une coupe... franchement crade, et un Miaouss. D'où la montgolfière. Le dresseur sauta alors à son tour (ne me demandez pas comment il a fait, franchement je veux même pas savoir) dans la nacelle, et arracha son « costume », révélant un uniforme gris, marqué d'un R rouge, le même que celui de la femme. A quelques exceptions près, bien sûr, puisque l'un est pour homme, l'autre pour femme. Celle-ci commence à parler :
— Bonjour les ennuis, nous sommes de retour.— Et impatients de vous jouer un mauvais tour, continua l'homme.
— Afin de préserver le monde de la dévastation.
— Afin de rallier tous les peuples à notre nation.
Ils enchaînaient ainsi à tour de rôle. C'était franchement nul, comme entrée en scène. Mais bon, c'est pas moi qui la fait, alors je dis rien.
— Afin d'écraser à jamais l'Amour et la Vérité.
— Afin d'étendre notre pouvoir jusqu'à la Voie Lactée.
— Voici Jessie, fit la femme.
— Et James, dit James.
— Et Miaouss, c'est un trio, fit le Pokémon.
— La Team Rocket arrive, plus rapide que la lumière, poursuivit miss cheveux roses.
— Rendez-vous tous immédiatement, ou ce sera la guerre, continua James.
— Miaouss, oui la guerre ! (vous vous doutez qui a dit ça)
Je restai pantois face à ce... spectacle ? En fait c'est pas que ça m'impressionnait, mais je savais plutôt pas trop quoi dire. Ah si !
— La Team Rocket ? C'est quoi encore ?
Les trois gugusses se regardèrent, me prenant pour un demeuré. L'homme moins que les deux autres cependant. Oui, il n'affichait pas la même joie machiavélique que ses compères.
— Ben... commença Jessie. Nous sommes une terrible organisation qui traque et vole les Pokémon des dresseurs, afin de réaliser nos terribles plans, et bien sûr de gagner de l'argent.
— Ahh, c'est pour ça que vous vouliez mon Flamiaou ? fis-je, nullement impressionné. Bon arrêtez vos conneries, là. Personne ne va croire à votre histoire.
Ils s'étranglèrent à moitié.
— Quelle histoire ?! s'écria le Miaouss.
— Ben que vous faites partie soi-disant de la Team Rocket. Vous êtes plus des enfants hein, faut arrêter de jouer à des jeux pareils. Puis si vous avez besoin d'argent, allez pas claquer vos économies dans cette montgolfière. Sérieux elle est horrible. Je dis pas ça parce que j'aime pas les Miaouss hein, au contraire ! C'est juste que bon... Un truc tout simple, avec juste votre R là, ça aurait été, je pense.
Visiblement, ce que je leur disais les choquait.
— Euh... bredouilla Jessie. Qu'importe, tes Pokémon sont à nous !
— Keunotor, Fatal-Foudre.
Un nuage se forma au-dessus d'eux, et des étincelles en sortirent.
— Oh putain non pas encore... commença Miaouss.
Un éclair descendit du ciel et vint frapper leur montgolfière, qui je ne sais par quelle magie explosa. Le dénommé James m'adressa un dernier regard signifiant « Je suis désolé », puis ils s'envolèrent en criant :
— Une fois de plus la Team Rocket s'envole vers d'autres cieeeeeeeeeuuuuuuuuux...
Ils partirent dans les aigus, en même temps qu'ils traversèrent le ciel en suivant un mouvement rectiligne.
— Oula ! dis-je. A cette vitesse ils vont sortir de l'atmosphère ! C'était qu'une petite explosion, pourtant... Y'a un sérieux manque de logique, dans cette histoire...
Entre temps, la cage de mes deux Pokémon s'était ouverte, et ils se posaient à côté de moi. Enfin, pas totalement. Pour être exact, Flamiaou retombait tranquillement sur ses pattes, tandis que Keunotor se ramassait, tel un Wailord échoué sur la plage.
— J'en ai déjà entendu parler, de la Team Rocket, fit le camionneur de sa douce voix.
— Et tu en sais quoi ? dis-je tout en fixant l'horizon.
— Il s'agit bel et bien d'une organisation criminelle, traquant les Pokémon rares, les capturant, et les volant. Ils ont déjà été dissous une fois...
Il s'arrêta, comme s'il tenait à me cacher quelque chose. Je le compris et me tournai vers lui.
— Et ben quoi ?
— Ils ont déjà été dissous une fois, reprit-il, par Red. »