Chapitre 5 : D Day
Jour J, premier jour de mission.
Nous nous retrouvâmes à cinq heures du matin dans une des nombreuses salles de briefing, accompagnés d’une douzaine d’autres agents, tous assis autour d’une imposante table en verre qui trônait au milieu de la pièce. Nous écoutions tous attentivement l’exposé de l’agent Carter sur le déroulement de l’opération.
Encelade, à ma droite, parvenait parfaitement à suivre. Quant à moi, je comatai, le coude posé sur la table, ma paume de main gauche voulant fusionner avec ma joue. Trop stressé, j’avais passé ma trop courte nuit aux toilettes, je vous épargne les détails. J’étais fatigué.
John nous apprit notre objectif : un laboratoire secret sur la route 17, à Unys. Apparemment, une organisation criminel chercherait à y créer une armée de pokémon cybernétique, sur base d’un prédateur préhistoire, sûrement ramené à la vie par la même machine qui m’avait donnée un Lilia il y a quelques années.
Mais cessons de parler de mon passé, de toutes manières, j’avais perdu ce Lilia, devenu entre temps un magnifique Vacilys, peu après mon passage à Éternara.
Après cette réunion fantastiquement intéressante, nous retournâmes dans notre chambre - Encelade ayant pris définitivement ses quartiers dans la mienne, à mon plus grand bonheur -, pour enfiler ces combinaisons que l’on nous avait donné juste avant. Selon l’homme qui nous les avaient distribuées, et je ne doute pas de sa parole, elles étaient pare-balles et réduisaient la pénétration des armes blanches.
A vrai dire, c’était assez étonnant qu’elles puissent disposer de telles propriétés protectrices, elles semblaient faites d’un tissu si fin.
Ces tenues, noires, ressemblaient en faite à s’y méprendre à celles des plongeurs, elle nous recouvraient le corps, du haut des chevilles jusqu’au milieu du cou. Mon équipement était complété par une paires de bottes, de type rangers ; une paire de gants ; et un ceinturon accueillant mon arme de service ainsi que trois chargeurs plein, à coté de mes Balls. Ah, j’allais oublier qu’il y avait une paire de menottes aussi.
Comme je vous l’ai dit précédemment, mon amie ne disposait pas d’un de ces derniers éléments. Déjà que je devais faire attention à ne pas me prendre un coup de griffes, si en plus, je devais éviter ses balles perdues, non merci !
Me regardant dans le miroir, dans notre salle de bains, - non, je vous rassure, je ne suis pas narcissique -, je remarquai au niveau de l’épaule, un écusson directement incrusté dans le tissu, le bouclier brisant l’épée. C’est ce symbole que j’avais vu ce soir là, sur la plaque de John, le première fois que je l’ai rencontré.
Une fois nos tenues revêtues, nous retrouvâmes nos collègues sur le tarmac, où nous attendait un avion. Bien plus petit que celui qui nous avait emmené ici, je ne lui comptais que deux rotors, qui pouvaient apparemment passer à la verticale.
Pour ma part, je pris place sur un des sièges disposés le long de la carlingue, avec mon amie juste à ma droite.
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Peu de temps après le décollage, je décidai d’emprunter le téléphone satellite de mon voisin de gauche. Je voulais appeler ma sœur, vous vous souvenez ?
Comme d’habitude, je composai le numéro d’une traite, je le connaissais par-cœur.
Malheureusement, je tombai sur le répondeur, elle devait encore dormir. Tant pis, je laissai un message rassurant, je lui raconterai tout une prochaine fois.
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Je ne saurais vous dire ce qu’il c’est passé durant le reste du vol. Trop fatigué, bien que toujours stressé, je sombrai dans les bras de Morphée, à peine le mobile rendu à son propriétaire.
A mon réveil, Encelade m’apprit, avec le plus grand sourire, que si elle ne m’aimait pas, elle m’aurait probablement étouffé, car mes ronflements bruyants l’avait empêchée de dormir tout le voyage.
En y réfléchissant, je pense que cette fille est dingue, sérieusement.
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Deux minutes plus tard, notre engin atterrit, tel un hélicoptère, non loin d’un bâtiment industriel, une sorte de hangar isolé sur une îlot perdu, au milieu de la route 17. Malgré son isolement, le complexe semblait comme neuf, ses murs en tôles brunes n’arborant aucune traces de rouille.
Cet endroit ne me disait rien qui vaille.
En temps que chef, John descendit le premier, arme à la main, pour s’assurer qu’aucun sbire ne se trouvait à l’extérieur.
« La voie est libre ! Annonça l’homme au chapeau, en remontant à bord. Blonsky, Yu, Casillas, sécurisez le périmètre ! Gomez, Villeneuve, Aglios, passez par la sortie de secours à l’arrière du bâtiment ! Quant aux autres, vous me suivez, nous passerons par l’entrée principale...
Tous s’exécutèrent sans broncher, enfilant leurs casques tout en sortant de l’aéronef les uns derrière les autres.
Il ne restait donc plus que nous deux dans l’appareil.
… Vous deux, vous me couvrirez ! »
Nous nous regardâmes, avec Encelade, un brun interloqués. Il voulait sérieusement qu’on le couvre ? Ce souvenait-t-il que nous étions que des débutants dans le domaine ?
Nous acquiesçâmes néanmoins, peut-être savait-il ce qu’il faisait, après tout ?
Le suivant, nous rejoignîmes donc les autres agents, qui s’affairaient déjà autour de la porte, plaçant ce qui semblait être un bélier automatique contre elle.
La machine émit quelques bips, avant de se mettre à tourner, et de percuter la porte, pourtant blindée, avec une force tel, qu’elle vola sous le choc.
Aussitôt, nos collègues s’engouffrèrent dans l’ouverture créée, suivi de près par leur chef, et nous, juste derrière.
J’avais peur d’utiliser mon arme sur quelqu’un d’autre, rien que l’idée de braquer cet objet sur un homme me terrifiais en faite. Mais bon, si nous étions menacés, je n’hésiterais tout de même pas à tirer.
A notre grand étonnement, l’intérieur du laboratoire était désert, absolument aucun scientifique présent. Pourtant, tout autour de nous, il y avait, des machines complexes, des tours de serveurs, allumées pour la plupart.
De plus, l’endroit était vraiment petit, loin d’être suffisamment grand pour fabriquer une énorme armée de pokémons.
Il devait forcement y avoir autre chose. Une porte dérobée, une trappe, un accès quelconque à une autre pièce, j’en étais certain.
« Je suis sûre qu’il y a un passage secret ! lançai-je à John, qui consultai l’ordinateur à coté de moi, alors que je parcourais le mur du fond du plat de la main.
En vérité, je ne cherchais pas à trouver quelque-chose en particulier, juste à tomber par hasard sur le mécanisme d’ouverture, comme les héros de fictions.
Malheureusement, rien ne sembla bouger.
- Alors, vous avez trouvé l’entrée, Mickaël ? me questionna l’agent, ironique. »
Je ris jaune, j’aurais voulu me faire bien voir pendant ma première mission.
Mais ce fut Encelade qui se démarqua. Inspectant comme tout le monde, un coin de la pièce, elle avait choisit la seule zone de mur non occupée par une machine, peut-être avec la même idée que moi. En y repensant, c’est vrai que c’était plus logique.
Activant je ne sais quel mécanisme, la paroi murale coulissa alors vers le bas, libérant ainsi le passage vers un escalier qui descendait au sous-sol.
N’empêche que j’avais raison, il y avait bien un passage secret.
Personne n’attendit plus longtemps, tous se dirigèrent vers cette nouvelle ouverture, avec en tête, l’homme au chapeau, et donc nous juste sur ses talons.
Nous descendîmes quelques marches, avant d’arriver à notre objectif.
Devant nous s’étendaient cinq chaînes de montage automatisés, installant sans cesse d’énormes canons sur le dos d’une même espèce de pokémon que je connaissais pas. La voila, l’armée que nous cherchions, des insectes ressuscités à la peau de métal indigo.
Il y en avait déjà des centaines, regroupés par groupe de quatre, autour d’un leader écarlate, prêts à déferler sur le monde impuissant. Heureusement pour nous, ils étaient tous plongés dans une sorte de léthargie, comme des appareils qui seraient débranchés, leurs bras filiformes pendant le long du corps, et leurs têtes tombantes, les yeux vides. Il y avait aussi cette étrange barre de chargement au niveau de ce qui semblait être leurs bouches.
Je n’en revenais pas, ils devaient être chargés pour être opérationnels ! Au final, ils ressemblaient plus à du petit électroménager qu’à des armes de destruction massive. S’en était presque risible !
« On se sépare en deux groupe de trois ! ordonna aussitôt l’agent Carter. Cherchez à stopper la charge de ces pokémons ! Mickaël, Encelade, vous venez avec moi, nous allons débusquer d’éventuels sbires !
Suivant notre supérieur, nous continuâmes notre avancée dans ce complexe vide de toute vie organique, empruntant le chemin entre deux lignes d’assemblage.
Plus nous avancions, plus la luminosité nous faisait défaut, l’éclat irrégulier des fers-à-souder ne nous éclairant pas assez pour y voir correctement. Bien sûr, je parlais pour John et moi, Encelade, c’était un cas à part, elle nous disait voir comme en plein jour, la veinarde.
En plus, nous marchions sur des grilles en acier pas très large, qui nous obligeaient à continuer en file indienne.
Mon amie aperçu alors deux individus arrivant à notre hauteur, de l’autre coté des chaînes de montage, un à droite, un à gauche.
C’était le bon moment pour m’illustrer aux yeux du chef, il fallait que j’intercepte celui de gauche. Je laissai l’autre à Encelade.
D’un bond, je sautai sur le tapis roulant, entre deux pokémons à moitié assemblés. Puis, prenant appui sur un de ces Kabutops d’acier, je lui tombai dessus, l’attrapant au niveau de la nuque. ’’Tomber’’ était le verbe idéal, puisque plus en hauteur que lui, je chutai réellement sur lui, sans vraiment chercher à effectuer une prise d’art martial.
Emportés par mon propre élan, nous nous écroulâmes sur les grilles du plancher. Sa tête heurtant le sol, je crois que je lui cassai ses lunettes.
« Au nom de la loi, je vous arrête !! hurlai-je, en plein cliché.
Mais ne m’écoutant pas, mon adversaire me flanqua un coup de coude dans le ventre. Je le frappai immédiatement d’un coup sec du plat de la main, au niveau des lombaires. Souffrant, il put néanmoins se relever et me fit face.
Retirant ses lunettes aux verres brisées, qu’il jeta au sol, il m’interpella avec un léger accent germanique.
- Écoutez ! Réglons cela d’une manière plus civilisé : un combat pokémon, comme des gentlemans !
Cet homme, que je n’avais au final pas spécialement regardé, était grand et élancé. Il portait cette longue blouse blanche que portent tout les éminents scientifiques dans ce pays, à croire que porter ce vêtement faisait automatiquement de vous, quelqu’un d’intelligent et respectable. A vrai dire, la seule chose qui le différenciait d’un vénérable professeur, c’était une coupe de cheveux excentrique. Si ces cheveux blonds étaient plaqués en arrière, comme ceux de notre collègue Kristensen, l’unique mèche qui dépassait partait dans son cas, tout autour de sa tête, formant ainsi une demi-auréole.
Mais disons-le clairement, ce type devait être loin d’être un saint !
- Si vous voulez ! Avec un pokémon chacun, je n’ai pas trois heures à vous consacrer !
L’allemand parut ravie.
- Parfait ! Grâce à vous, je vais pouvoir vérifier une conjecture : Est-ce le lien entre le pokémon et le dresseur, qui permet d’en tirer toute sa puissance ?... Je vous remercie de votre aide dans mes recherches...
Fouillant dans la poche de son habit, il sortit une SuperBall, de laquelle s’échappa un Cliticlic.
Si nous étions en extérieur, j’aurai probablement fait qu’une bouchée de son pokémon. Malheureusement, l’espace étant restreint, je dû me résoudre à invoquer Scalproie plutôt que Bétochef.
… Cliticlic, Changement Vitesse !
Monsieur ne perdait pas son temps, a ce que je vois.
Aussitôt, le pokémon engrenage se mit à tourner bien plus rapidement, projetant de petites étincelles tout autour de lui.
Je ne devais pas le laisser se booster sans rien faire.
- Provoc !
Freddy, mon pokémon, lui fit ce que j’assimilerai à un bras d’honneur. Bien sûr, son adversaire le prit mal. Il était tellement en rogne que cela l’empêchait d’utiliser des attaques de boost ou de soin. Bien que je sois pas sûr qu’il puisse apprendre au moins une de ces dernières, à part Repos peut-être, mais ça ne comptait pas.
S’affranchissant d’ordre de son dresseur, le type acier lança son plus petit écrou vers nous, comme un frisbee. J’eus juste le temps de me décaler de la trajectoire du bout de métal tourbillonnant qui, rebondissant sur l’avant bras de mon partenaire, passa juste au niveau de ma tête, pour finir en décapitant un cyborg derrière moi.
J’avais eu chaud.
Au même moment, l’oreillette dans mon casque se mit à sonner.
- Do Santos à équipe ! Nous avons stoppé la chargement de leur armée. Nous avons aussi arrêté trois scientifiques.
J’entendis répondre John puis je coupai la communication, j’avais un combat à mener moi.
- Je crois que votre plan de conquête mondiale tombe à l’eau ! narguai-je fièrement l’homme qui, vu son look sophistiqué, devait être le boss du laboratoire.
L’intéressé haussa les épaules.
- Vous savez, ce sont les plans de ce bon vieux Ghétis. Pour ma part, je n’aspire qu’à découvrir le moyen d’extraire le plein potentiel des pokémons…
il se frappa alors le front.
… Diantre ! Mon esprit scientifique à pris le pas sur la politesse. Je me rends compte que je ne t’ai pas demandé ton nom ? Je me nomme Nikolas Nikolaï, je suis d’origine autrichienne.
Voilà que monsieur me racontait sa vie maintenant.
- Mickaël Straus, de Hoenn. lui répondis-je uniquement par courtoisie.
- Je suis enchanté de te rencontrer, Mickaël ! Dommage que notre combat soit fini si tôt…
Sur ces mots, l’écrou précédemment lancé revint vers son propriétaire, décapitant un second robot au passage, avant de vouloir faire pareil avec moi, pour finir sa course sur l’arrière du crâne de mon pokémon. Bien que peu efficace, l’attaque Lancécrou poussa Scalproie entre les rouages de son adversaire.
… Bien ! Cliticlic, Enchaîne avec Tonnerre.
Bloqué entre l’engrenage rouge et le cercle de pointes, mon type ténèbres se fit irrémédiablement électrocuté, mais je ne me laissais pas abattre.
J’avais encore des atouts cachés,
- Freddy, Surpuissance !
Recouvrant ses avants-bras métalliques d’une énergie orangée, mon pokémon fit s’abattre ses poings, tel des marteaux, sur le noyau centrale de son adversaire qui préparait une nouvelle offensive. Le choc provoqua une décharge électrique qui nous propulsa légèrement en arrière et qui mit hors d’usage les chaînes de montage environnantes.
Scalproie chancela, mais tint bon.
Quand Cliticlic tomba à ses pieds, K.O, je sus immédiatement que j’avais réussi, j’avais triomphé.
- Ah ! Soupira le blond, déçu. Je ne suis finalement qu’un piètre adversaire pour toi, Mickaël. »
Nous rappelâmes tout deux nos compagnons puis Nikolas, bon joueur, me tendit ses mains pour que je le menotte. Dire que si j’avais encore mon Vacilys, j’aurai pu le saucissonner dès le début avec Étreinte.
J’informai aussitôt mes coéquipiers de mon arrestation.
Peu de temps après, John nous recontacta pour nous dire que, de leur coté, ils avaient stoppés leur fuyard, un certain Dudley.
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Nous fîmes ensuite le tour des infrastructures pour s’assurer de ne rien laisser. J’en profitai pour voler un carnet de notes, seul Arceus savait à quoi cela pourrait me servir mais il ne fallait pas que mon supérieur le sache.
Puis, embarquant suspects et pièces à conviction, nous repartîmes, direction notre île.
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Aussitôt arrivés, l’agent Carter plaça toutes les personnes interpellées dans des salles d’interrogatoire séparées. Nous commençâmes notre séance de questionnement par l’homme que j’avais affronté, qui, comme je l’avais pressenti, était le plus haut dans l’organisation, selon les informations du Bureau.
Nous observions tout, avec Encelade, cachés derrière la vitre sans-teint. D’ailleurs, c’était la première fois que je me retrouvais de ce coté du faux miroir, c’était perturbant.
L’homme qui avait retrouvé son chapeau s’installa en face du blond, posant un dossier marron sur la table.
« Selon nos rapports, vous vous appelez Nikolas Nikolaï, vous êtes le nouveau meneur de la Team Plasma depuis la tentative ratée de coup d’état d’il y a deux ans. N ayant définitivement quitté le milieu criminel et Ghétis étant toujours dans la nature, nous supposons vous avez pris la tête de la Team pour pouvoir réessayer ?
- Pas du tout ! avoua immédiatement le scientifique. Quand Ghétis m’a demandé de s’occuper de sa création, j’ai accepté uniquement pour m’acquitter d’une vieille dette que j’avais envers lui. Ses plans de conquête mondial ne m’intéresse pas le moins du monde.
Le brun fit glisser quelques clichés des pokémons du coté du suspect, qui se tenait toujours bien droit sur sa chaise, malgré les menottes.
- Que pouvez vous me dire sur ces choses ?
Nikolaï expira longuement.
- A vrai dire, pas grand-chose… Vous feriez mieux de poser vos questions à monsieur Dudley, c’est lui qui porte ce projet depuis le tout début. Pour ma part, je n’ai fait que superviser la production en série et le financement, comme Ghétis me l’avait demandé. Je pensais que la technologie était la solution pour tirer le maximum de la force des pokémons, mais je me suis peut-être trompé… et puis monsieur Dudley était vraiment furieux que N gèle le projet et ferme le laboratoire… Ce pauvre N … il pensait que ce pokémon avait perdu sa beauté en étant modifié par la science … Je ne peux qu’acquiescer maintenant, on ne peut faire mieux que la nature elle-même.
John hocha la tête, écrivant quelques lignes sur son carnet.
- Et où est Ghétis, en ce moment ?
- À bord de sa frégate, stationnée près de la grotte Cyclopéenne.
Apparemment, le blond ne voulait pas que ce Ghétis gagne la partie.
- Je vous remercie, monsieur Nikolaï !
- Il n’y a pas de quoi ! Je ne suis pas comme lui, je ne veux pas qu’une unique personne domine le monde ! »
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Nouvelle salle d’interrogatoire. Cette fois, l’individu est le fameux Dudley, ingénieur de son état.
L’informant de notre arrivée, l’agent qui était alors chargé de l’interroger nous fit un compte-rendu dans la pièce adjacente.
« Il ne dit pas un mot ! se plaignit notre collègue. Il ne répond à aucune question, il se contente de me dévisager sans ouvrir la bouche !
Invisible à ses yeux, je lançai un regard à cet homme bien bizarre. Il ne se distinguai pas des autres par sa taille ou sa musculature pourtant, il dégageai une étrange impression de force. Était-ce dû à ses cheveux bruns coiffés en un catogan ? Où à son regard bleu perçant, dissimulé derrière ses grosses lunettes rondes à la monture presque transparente ?
C’était probablement ça, ses petits yeux méchants, qui transperçaient quiconque les croisaient. Si l’adage disant que les yeux étaient les miroirs de l’âme était vrai, alors ce type serait le plus grand méchant de l’univers.
Alors que John tentai sa chance de faire parler notre suspect, je questionnai l’homme qui avait précédemment essayé, un petit gringalet blond. Il faut dire que quelque-chose me turlupinait, si on avait : les pokémons ; les données ; les créateurs et bientôt leur boss ; qu’est ce qu’il nous manquait pour qu’on s’acharne à faire parler ce type.
- Nous avons commencé à analyser les données de recherche que vous avez transmis. m’expliqua le blond. Mais il y a un problème… plusieurs problèmes, plutôt. Prédasect, le pokémon qu’ils ont utilisé comme base à leurs expériences, ne fait pas parti des espèces dont on connaît parfaitement le génome. Ce qui, en théorie, empêche que l’on puisse le faire renaître dans la machine. De plus, les Prédasects étaient extrêmement rapides et agiles… pas vraiment des modèles de force physique… alors leurs faire porter des armures et d’énormes canons sur le dos, aurait été normalement impossible…
Je commençai à comprendre, mon amie aussi. J’exposai mon idée.
- Donc le génome de base à été complété, et modifié, pour permettre cela, je suppose ? Ce genre de manipulation génétique n’est évidemment pas à la portée du premier venu, et je suppose aussi qu’aucun des types que nous avons arrêté n’est suffisamment qualifié pour le faire...
Mon interlocuteur hocha la tête.
… il nous manque donc l’homme le plus important.
L’homme le plus important, tout à fait, probablement même le génie à l’origine des prouesses d’Encelade, si on poussait la réflexion un peu plus loin.
- Mais ce n’est pas tout, nous avons fait l’inventaire des escadrons produits, et il en manque un, probablement les cinq premiers Genesects à être sortit des chaînes.
J’acquiesçai, ça c’était vraiment problématique, cinq Prédasects – euh, Genesects pardon –, des machines à tuer, des cyborgs destructeurs, dans la nature. Ça n’était pas bon signe !
L’agent Carter revenant de son interrogatoire, qui s’était révélé infructueux, vu sa mine dépitée, Encelade l’interpella. Apparemment, elle voulait essayée.
- Je peux essayer ? Après tout, ça me concerne un petit peu !
Les deux agents plus vieux s’étonnèrent.
- Tu es sûr ? demanda John. Tu saurait comment faire ?
Mon amie hocha la tête, le sourire aux lèvres, comme toujours, heureuse qu’il veuille bien la laisser faire.
- Oui !… Enfin, pas forcement… j’ai juste vu mon oncle questionner des types, quelques fois.
L’homme au chapeau haussa les épaules.
- Pourquoi pas, ça ne coûte rien d’essayer. »
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Encelade entra dans la pièce, sa mine joyeuse changée en un masque froid et absent d’émotions. L’homme parut étonné de voir une si jeune femme venir l’interroger.
S’approchant de lui, mon amie laissa glisser sa main gauche sur la table.
« Vous êtes ingénieur, n’est-ce pas ?
- Qu’est ce qu’elle nous fait ? Ne pus-je m’empêcher de commenter.
John, les bras croisés, réfléchit.
- Peut-être le good-cop… Quoi que... sans le bad-cop, ça ne sert à rien.
- Ou un Harry Brown ?
L’agent haussa les sourcils, perplexe.
- Non, il faut une tasse de café… Mais attends, comment pouvez-vous connaître ce genre de technique d’interrogatoire ?
Je souris, avait-il oublié mon passé ?
- Puis-je vous rappelez que j’ai un casier judiciaire plutôt bien rempli ? Et que ma première garde-à-vue remonte à mes douze ans ? Et puis, la prison aide pour connaître tout ces termes techniques.
- C’est vrai, un instant, j’avais oublié que vous étiez un petit délinquant.
Et il ajouta cela avec un petit sourire en coin, le salaud. Bon, au fond, il n’avait pas vraiment tort.
Pendant ce temps, entendant tout de même sa question, Dudley la dévisageait, mais aucun son ne sortait de sa bouche, ses lèvres restaient imperturbablement closes.
Tout à coup, Encelade saisit de sa main gauche l’homme, qu’elle plaqua violemment contre le mur, remontant sa tête au niveau de la sienne.
J’avoue que je ne m’y attendait pas à celle-là. Il faut dire qu’une fille si frêle qui soulève d’une seule main un individu d’environ quatre-vingt kilos, c’est vraiment improbable. Décidément, ma petite-amie cachai bien des secrets.
L’agent qui nous tenait compagnie voulut intervenir, mais John l’en dissuada. Tout comme moi, il avait vu que cela faisait son effet. L’ingénieur au regard autrefois si agressif, était désormais couvert d’une expression de terreur, son visage se déformant sous le coup de la peur, bien fait pour lui.
- Vous êtes ingénieur, pas généticien ! hurla t-elle. Qui avez-vous embauché pour modifier l’ADN de ces pokémons ?! Est-ce à cet homme que vous avez offert le premier escadron produit, en échange de son travail ?!
- Si vous croyez que c’est en me menaçant avec vos petits poings fragiles que je vais tout avouer, vous vous trompez mademoiselle !
Monsieur continuait de jouer au dur, personnellement je n’aurai pas tenté la condescendance avec mon amie. Mais bon, c’est lui qui voyait, c’était à ses risques et périls.
Comme je l’avais un peu prévu, Encelade encaissant difficilement la remarque, sortit aussitôt les griffes de sa main libre, pour les pointer sur l’épaule de l’homme. Au moins, elle savait s’en servir maintenant.
- Et avec ceci ?
- Argument fort plus persuasif, en effet ! fut-il forcé d’admettre. Si vous me lâchez, nous pourrons peut-être discuter.
Bien malgré elle, mon amie consentit à desserrer sa poigne de fer, Dudley retomba tout aussi violemment au sol.
Note pour plus tard : Ne jamais se disputer avec cette fille. C’est trop dangereux !
John s’empressa de les rejoindre alors que notre suspect s’apprêtait à passer aux aveux.
L’agent se réinstalla en face, ma coéquipière elle, prit place contre le mur, les griffes de sa main droite toujours à l’air libre.
- Dites-nous tout alors !
L’ingénieur, se remettant de son agression, se racla la gorge.
- Ça c’est passé peu de temps avant que cet abruti de N veuille arrêter nos travaux…
Une grimace de d’égout déforma à nouveau son visage. Apparemment, cet événement lui restai à travers de la gorge.
… Nous travaillions depuis six longues années déjà, mais Marco, notre généticien, n’arrivait toujours pas à ramener au moins un embryon viable, à la vie. Nous n’avions presque plus d’options, nos stocks d’ADN allaient bientôt être insuffisant pour continuer nos essais… C’est maître Ghétis qui souscrivit un contrat avec lui, voyant que nous ne pourrions pas réussir seul, et ce, malgré mes protestations…
Il haussa les épaules.
… En vérité, je ne l’ai pour ainsi dire, jamais vu. Quand il eut fini, en un an ce qui nous en aurait pris dix, c’est un de ses hommes de main qui m’amena un flacon rempli de milliers d’embryons prêts à être incubés… Au final, la seul chose que je peux vous dire sur lui, c’était ce qu’il y avait écrit sur la carte attachée à la bouteille : son surnom, ’’le moscovite’’. C’est tout ce que je sais malheureusement.
Nous nous regardâmes avec Encelade, bien que pour elle, je ne pouvais certifier qu’elle le fasse exprès.
’’le moscovite’’, ainsi était-ce le nom, ou plutôt le surnom, de celui que nous devions traquer sans relâche.
Une traque qui s’avérera assurément pleine de pièges mortels.
John nota tout dans son dossier, un peu déçu d’en savoir si peu. Nous l’étions tous !
- Et pour les cinq disparus ?
L’homme hocha la tête.
- Oui c’est bien lui qui les a pris, c’était une de ses conditions.
C’était encore pire que ce que j’imaginais. J’en étais sûre, un jour ou l’autre, ces cinq surpuissantes créatures se dresseraient face à nous.