Le Démon Roi - Première partie de Edetalelric

Le flanc de la montagne qu’ils gravissaient les protégeait des rayons brûlants du soleil. Les claquements des sabots d’Yrio ou celui de sa canne heurtant le sol avaient engagé une conversation avec leur écho. Cette dernière ressemblait plus à un sceptre qu’à une canne proprement dite : une multitude de bras osseux s’agrippaient les uns aux autres jusqu’à atteindre un orbe de couleur sanglante orné du symbole des maléfices.
Cela faisait plusieurs semaines que le duo était parti du Nord-Est de l’Ancienne Europe afin de rejoindre la chaîne du Ruwenzori, en Ex-Afrique. La majeure partie du trajet s’était faite en voiture ; mais Yrio étant bien trop grand pour y rentrer, une remorque fourrée de foin avait été accrochée à l’arrière. Se ravitailler en carburant fût une préoccupation vite réglée : les voyageurs purent emplir quelques bidons à une vieille station-service intacte. Des Pokémons ou même des mutants les avaient évidemment attaqués, mais Yrio maniait bien la canne.
Et il était impressionnant.
Du haut de ses deux mètres soixante-dix, il se dressait sur ses deux pattes arrière en agitant son arme pour faire déguerpir les attaquants. Sa peau était constituée de petites écailles de métal semblable au titane, se superposant afin de créer une armure naturelle. Il portait également une longue tresse de couleur bleue dont il était particulièrement fier. Et puis, il avait utilisé la force des démons afin de contrôler les mutants.

Yrio appartenait à la tribu des centaures. Plus grand que la plupart de ses congénères, apprendre qu’il avait été choisi pour l’élection du prochain roi l’avait ravi. Sa famille se distinguait par sa maîtrise du combat avec une canne, et par l’utilisation de maléfices. Lorsque le propriétaire de son livre prononçait la formule « Elencho », Yrio disposait de quatorze secondes afin de frapper son adversaire du bout de sa canne. L’individu recevait alors la marque sur le front, une clé dirigée vers le bas rayée d’un X arrondi. La cible devenait alors la marionnette du démon ; et ce dernier pouvait l’invoquer par un portail, quelle que soit la distance séparant les deux protagonistes.
Il y avait bien évidemment des conditions.
L’esclave ne pouvait être ni un démon, ni le propriétaire d’un livre.
La proie du maléfice devait préférer combattre sous l’emprise d’Yrio plutôt que de mourir. Si la malheureuse était trop digne pour être contrôlée, son cœur s’arrêtait instantanément de battre.
Et, la pire de toutes, Yrio ne pouvait pas bouger lorsque sa victime était sous son contrôle.

Il leur fallut plusieurs heures pour atteindre le sommet de la montagne. Après avoir cherché pendant une éternité, ils trouvèrent la grotte tant convoitée.
Le Pokémon dormait d’un sommeil paisible. Il suffit à Yrio de claquer la langue afin de le réveiller, paré à l’attaque. L’oiseau de la légende cria, puis s’envola afin de se stabiliser dans les airs. Méfiant, il attendait la réaction du premier visiteur qu’il recevait de sa vie. Le propriétaire du livre prononça la formule, et Yrio n’eut pas de mal à frapper le Pokémon dans l’espace exigüe après avoir évité les attaques. L’oiseau reçut aussitôt le symbole sur le haut de sa tête, et son regard se fit vide de toute volonté.
Yrio n’avait pas ressenti la présence d’un autre démon dans les environs. Pourtant, un duo leur faisait face lorsqu’ils traversèrent une plaine aride, après être descendu de la montagne.
Le démon adverse était un garçon de forme humaine, caractéristique dégoûtante aux yeux d’Yrio. Des cheveux blonds et bouclés tombaient jusqu’à ses épaules, et des cicatrices noires descendaient de ses yeux afin de disparaître en haut du cou. Tous les démons mâles ressemblant aux hommes portaient ces marques sombres et droites. Le démon l’interpella :
« Eh ! C’est toi qui as lancé la rumeur, non ? »
Un sourire machiavélique envahit le visage d’Yrio.
« Quelle rumeur ? Hia ha ha…. »
L’autre se mit en position. D’immenses marteaux en acier apparurent dans ses mains lorsque l’humain prononça la formule. Il se lança vers Yrio, qui n’avait pas bougé d’un pouce. Le centaure de métal fit signe d’attendre à son coéquipier. A l’aide de sa canne, il frappa les mains de son agresseur après avoir évité les coups, ce qui fit lâcher ses armes au blondinet.
« Maintenant.
-Elencho ! »
Le Sulfura apparut, à travers un portail bordeaux. Il attrapa le démon entre ses serres en le brûlant immédiatement, puis fonça vers le propriétaire, suivi par une vague de flammes. Le livre s’embrasa rapidement dans la main de l’homme calciné. Le démon disparut presque aussitôt.
Yrio reprit la route, suivi par son acolyte. Son sourire carnassier toujours présent, il marmonna après un rire hystérique :
« Et d’un. »