6- Terres sauvages, rêves aériens
« Battez-vous jusqu'à la dernière goutte de sang et la dernière goutte d'essence, jusqu'au dernier battement du cœur. »
— Manfred von Richthofen, dit « Le Baron Rouge » (1892 - 1918) —
* * *
Dans un fracas assourdissant, les vagues s'abattent avec violence sur les tranchantes côtes noires du récif de Poni. S'il y avait âme qui vive dans les parages, on entendrait le son à des dizaines de mètres alentour, tant la puissance des eaux déchaînées est flagrante.
L'écume blanchâtre scintille presque sous les rayons ardents du soleil, renvoyant des mers le reflet luisant comme un million de miroirs remuants.
Hormis les pokémons ayant l'habitude d'errer aux alentours, il n'y a guère que les imposants navires de guerre unysiens qui montrent le moindre signe de vie.
Sur le pont de ces mastodontes artificiels, des silhouettes s'efforcent de faire tourner la machinerie à plein régime, pour lutter contre les flots mouvants.
Il y en a parfois qui tombent à l'eau, quand le vent entraîne des remous trop capricieux, mais ils parviennent toujours à remonter avant de se faire attraper par les sharpedos du coin. Les plongeurs téméraires, eux, ont moins de chance.
Seulement aujourd'hui, ce n'est pas un jour comme tous les autres.
Il y a toujours les violentes trombes d'eau et les silhouettes des bateaux au loin, les concombaffes échoués sur la côte de roche noire, les pokémons aquatiques et les geysers bondissant du sol sans crier gare. Mais il y a aussi des humains, cette fois, fait rare dans les environs.
Dans un cliquetis métallique, l'arme de poing est rangée dans son étui, calmement replacée à la ceinture dans un geste rapide et précis. Les deux silhouettes couleur sable se tiennent debout, quelque peu mouillées par les éclaboussures qui leur parviennent.
« C'est pas ce qu'il y a de plus joli à regarder, faut se l'avouer... », soupire une voix masculine aux accents traînants, intonation trahissant un manque évident d'enthousiasme.
Au sol, étalées les unes à côté des autres, des formes brunâtres drapées dans des étoffes de couleurs vives, et souillées d'un rouge sombre par endroits. Parmi ces corps anonymes, il y a des visages aux yeux encore grands ouverts, des doigts crispés agrippant la pierre noire. Des lèvres entrouvertes comme dans une supplique silencieuse.
Le jeune homme, trente et un, trente-deux ans à vue de nez, fléchit les jambes, se met dans une position accroupie pour observer de plus près chacune des tristes faces désertées par la vie. En toile de fond, les geysers brûlants qui continuent à murmurer et à cracher des éclaboussures comme des insultes marmonnées.
En y regardant de près, le sien, de visage, n'a pas l'air plus joyeux que tous ceux-là. Le nez, légèrement aquilin, se plisse de dégoût à cause de l'odeur du sang, les lèvres fines ne sont plus qu'une ligne inexpressive, et les prunelles d'un bleu-gris clair s'assombrissent, traduction silencieuse d'une désapprobation arrivée trop tard.
Une main gantée vient se ficher dans les cheveux courts, d'un brun clair avoisinant le blond, et l'autre s'attelle à fermer les paupières mortes restées ouvertes. Par respect, peut-être, ou par peur de regarder sa responsabilité dans les yeux.
« Sûrement un mélange des deux », se retient-il de cracher à haute voix.
C'en est déjà assez, il se relève sans dire un mot, retire sa paire de gants qui collent à la peau, les jette sur les pauvres hères au destin tragique. Un instant il songe à y mettre le feu, parce que laisser ces gens en décomposition dans la nature...
Non, pas le temps de toute façon, le rendez-vous au village est à dix heures, et en plus ça attirerait peut-être d'autres natifs...
« Hé, Clyde, tu rêves ou quoi ? Clyde Jonson ! »
La silhouette perdue dans un océan de pensées lointain sursaute, et se tourne dans la direction d'où vient le son, vers sa partenaire assise sur un rocher sombre.
Une jeune femme, quelques années de moins que lui, au visage joueur, constellé de taches de rousseur et encadré par une tignasse brunâtre, dans laquelle brillent au soleil des reflets rougeoyants.
La voilà qui esquisse son fameux sourire ironique, et qui plisse les yeux malicieusement ; son expression favorite, dont elle a souvent du mal à se départir. Dans sa main couverte par un gant brun, une sphère rouge et blanche qu'elle agite fièrement.
« C'était vraiment trop facile, tu ne trouves pas ? Je veux dire, pour un pokémon qu'on dit « légendaire »... Non, décidément, je m'attendais à plus de challenge, soupire-t-elle en rangeant la pokéball dans sa sacoche, pendue en bandoulière sur son épaule gauche. Bah, ils l'avaient affaibli, ces natifs... »
Clyde suit le mouvement des yeux, puis laisse échapper un soupir contrit, mêlé à un genre de ricanement nerveux. Tout ce sang versé, et seulement pour récupérer un pokémon légendaire, ça lui ferait presque tourner la tête, à lui.
Les intrigues politiques, tous les deux, ils n'y connaissent rien du tout. Et les voilà pourtant envoyés en mission de récupération pour rapporter une créature qui servira à... Ils ne savent même pas quoi. Le général Jackson s'est montré plutôt évasif, dans son télégramme.
« Tu crois qu'on peut faire quelque chose pour eux ? questionne-t-il soudainement, bras croisés sur sa poitrine, posture rigide. J'en sais rien, les recouvrir ou quelque chose comme ça. C'est dégueulasse, ils vont se faire dévorer par les vaututrice...
— Bon sang, ne parle pas de ça, on vient de manger ! grommelle la brune en caressant, d'une main distraite, son blizzi particulièrement craintif dissimulé derrière elle.
— Stella... »
La susnommée lui lance un regard verdâtre acéré, comme si elle allait le découper en morceaux puis le déguster calmement juste après. Voyant l'expression déconfite de son collègue, elle se radoucit bien vite.
« Bien sûr que c'est dégoûtant, mais au moins comme ça, si d'autres indépendantistes passent dans le coin, ils pourront pas rater ça. Disons que ça servira... d'exemple, pour qu'ils comprennent à qui ils ont affaire. C'est sûrement ce que Jackson attendrait de nous, nan ? »
Pesant rapidement le pour et le contre dans sa tête, l'autre doit admettre qu'elle marque un point. Elle ne manque pas d'intelligence, il l'a toujours su, mais habituellement elle a plutôt tendance à se montrer impulsive, et un peu trop... Il aurait tendance à dire « irresponsable ».
« Ouais... Ouais, d'accord, compris. On les laisse pourrir là comme des vieux morceaux de viande avariée, pas le choix.
— Hé, détends-toi un peu. C'est d'être sur la terre ferme qui te met dans cet état ? »
Elle se déloge de son rocher, et rappelle son blizzi dans sa pokéball, prête à repartir, main sur sa sacoche comme pour protéger son contenu. Clyde suit le mouvement, désireux de perdre le moins de temps possible par rapport au rendez-vous dans le semblant de port du seul village sur cette île.
Autour d'eux, les terres sauvages, jaunâtres voire brunes, témoignent simplement d'un état de sécheresse permanent sur Poni. Les rares végétaux présents sur la vieille route près du récif sont ternes, rendus ainsi par le manque de pluie et par les populations qui ne s'en occupent pas.
C'est qu'il y a plus urgent, en l'état actuel des choses. La guerre, c'est la priorité maintenant, d'un côté comme de l'autre.
« T'as pas répondu à la question, Clyde Jonson, le taquine Stella, une étincelle joueuse au fond de l'œil. Alors, dis, c'est d'être sur terre qui te fait cet effet ?
— Quel effet ? » réplique le châtain sur la défensive.
La jeune femme plisse légèrement les yeux, voyant rarement son partenaire et ami dans cet état, puis produit un haussement d'épaules guère éloquent.
« Je sais pas, t'as l'air d'un cadavre ambulant. Tu te sens pas bien, on dirait. C'est vrai que d'habitude, tu ne tues pas, tu fais que piloter, et moi je balance l'artillerie... Hé, ça va aller, t'auras plus à refaire ça. Au pire, tu te fais porter pâle si Jackson nous redemande ce genre de service. »
L'absence de réponse finit par la décourager ; elle remarque bien le manque de vitalité de son camarade, et elle comprend bien qu'insister ne fera pas changer les choses. Mains fourrées dans les poches de son pantalon brunâtre, elle se contente de siffloter un air du pays, avec toute sa bonne humeur habituelle.
Malgré tout ce qu'elle laisse entrevoir, elle non plus n'aime pas marcher, fouler la terre avec ses bottes. Ce n'est pas amusant, et c'est même plutôt fatigant. Elle ne manque pas d'exercice, puisque n'importe quel corps militaire l'exige, mais ce n'est pas aussi exaltant que le sont les raids aériens.
Les deux silhouettes en uniforme continuent leur progression le long du large sentier sans vie, arme à la ceinture et rêves pleins l'esprit. Un pas devant l'autre, les yeux rivés sur le ciel infini, qui s'étend à perte de vue au-dessus de leurs têtes.
Avec l'espoir non dissimulé de pouvoir bientôt retourner dans les airs, là où ils se sentent vraiment chez eux. Quitte à faire la guerre, autant la faire comme il se doit.
* * *
Sur les eaux calmes, la grande silhouette cuirassée tangue légèrement au gré du mouvement vacillant des vagues. Frappée par le soleil, la coque est luisante, paraît comme neuve sous l'œil flamboyant de l'astre.
Sur le pont, les plus jeunes recrues s'activent à astiquer les moindres recoins à l'aide de balais et de chiffons, autant en guise d'exercice physique que pour tout faire briller. On dit que le capitaine Eaton est particulièrement à cheval sur la propreté, et jusque là l'homme en question n'a jamais démenti.
Assis sur une solide caisse de bois contenant sans doute des rations ou des pokéballs vides, la tête dans les mains, l'officier de marine n'est pas serein. Là sur terre, il se sent vulnérable ; il est bien mieux sur son navire, son Wailord à lui, avec des hommes de confiance dans leurs uniformes noirs.
Tous ces types couleur sable, fusil à l'épaule et cigarette au bec, ne lui inspirent pas confiance, et l'inverse est aussi vrai. Depuis tout à l'heure ils jettent des regards en biais au quinquagénaire désabusé, comme s'ils le jaugeaient en silence.
« C'est ça, continuez à me regarder comme le dernier des rebuts. 'Feriez mieux de vous préparer à l'embuscade prochaine, plutôt... »
Par politesse ou par lâcheté, il se retient de dire le fond de sa pensée à voix haute ; attirer l'antipathie de ces hommes ne lui apporterait rien de bon, il n'y gagnerait peut-être que des insultes ou des hématomes.
Peut-être bien qu'il est capitaine, mais dans un endroit aussi reculé, personne ne va se soucier du grade d'un type récalcitrant. Surtout que sa juridiction s'arrête à son navire, il ne peut pas se permettre n'importe quoi sur terre.
Lâchant un soupir aussi ennuyé que fatigué, il jette un regard à son poignet gauche. Y est attachée une montre au cadran quelque peu éraflé, et au bracelet de cuir qui semble être passé par beaucoup d'épreuves. Il s'y accroche comme à un précieux souvenir.
En dessous, il n'y a rien que les épaisses planches de bois, maintenues les unes les autres par des savants cordages et des clous bien placés. Et sous ce sol de fortune, le bord de mer, l'eau mêlée à une boue brunâtre et à des algues collantes.
Avec ça sous les pieds, il a presque peur de se lever, de tomber et de rompre l'équilibre précaire installé là tant bien que mal. Poni, c'est l'enfant terrible de la famille, l'île indomptable où on n'ose pas trop s'aventurer à moins d'être armé jusqu'aux dents.
Instinctivement, la main blême aux doigts rendus ankylosés par une forte crispation se porte à la ceinture, agrippe la crosse de l'arme de poing, garde un instant le contact avec le métal froid, puis reste là, à pendre dans le vide. Lamentable comme son propriétaire.
Il n'y a guère que les békipans qui sont conciliants aujourd'hui. D'habitude, ils viennent titiller les gars du port et finissent chassés à coups de crosse de fusil dans le bec, mais là ils se contentent de rester tranquilles, les yeux rivés sur l'imposant croiseur comme si c'était un énorme poisson appétissant.
Les poissons d'ailleurs, ils se sont tous enfuis plus loin à l'arrivée de la baleine de ferraille, tas de grisaille ambulant. Y a que l'odeur qui reste, qui pend au nez et prend aux tripes. C'est de ça dont ils se plaignent depuis tout à l'heure, les hommes sable au sale regard.
Depuis le temps, le capitaine a l'habitude, lui, des odeurs nauséabondes de poiscaille. C'est ça la mer, c'est pas seulement les belles vagues et le soleil, c'est aussi les tempêtes et les puanteurs, le danger omniprésent et les conditions de vie précaires. La mer c'est comme la guerre.
« Hé, cap'taine Eaton. »
Le grisonnant lève la tête vers un officier subalterne — du moins le suppose-t-il, vu l'unique bande rouge de chaque côté de son col —, qui lui désigne des silhouettes à quelques dizaines de mètres, à l'abri sous un grand arbre.
« Ceux-là demandent à vous voir, cap'taine. »
Melvin Eaton leur lance un coup d'œil, mais à cette distance impossible de saisir les traits de leur visage. Une femme et un homme, on dirait, mais avec sa vue qui commence à baisser, c'est un peu plus difficile à dire. Tous deux couleur sable, en tout cas, c'est peut-être bien ceux qu'il attend.
« Bien, merci mon vieux. Ils ont donné des noms ? »
L'autre produit un haussement d'épaules.
« Ils ont juste dit qu'ils avaient à vous parler, c'est tout. Des aviateurs, vu leur uniforme.
— Ouais, c'est bon, je m'occupe de ça. »
Le plus jeune acquiesce et s'en va rejoindre les collègues, tandis que l'officier de marine se dirige, d'un pas qu'il veut sûr, vers ses contacts. Il s'arrête à un bon mètre, peu désireux de prendre la fumée de leurs cigarettes en plein visage.
Des aviateurs, exactement comme indiqué, avec leur foulard gris autour du cou malgré la chaleur, et le brassard noir au bras gauche. L'air plutôt calmes, jeunes, et assurément compétents, puisqu'ils ont apparemment mené à bien la mission confiée par Jackson. Non pas qu'il en sache grand chose, d'ailleurs, de cette fameuse mission...
En regardant plus attentivement, il se rend compte qu'il n'y a pas la moindre trace du « colis » qu'il est venu réceptionner dans ce village.
« Va falloir tirer ça au clair, qu'il marmonne, agacé. Hé, les jeunes, vous êtes Jonson et Waller ? »
La brunette aux taches de rousseur esquisse un large sourire, et se met immédiatement au garde à vous, le visage traduisant un certain enthousiasme. L'autre dévisage, un brin suspicieux, le marin à l'air revêche.
« Stella Waller, au rapport, mon capitaine !
— 'rrête un peu de faire le clown, Stella. Clyde Jonson, m'sieur. »
Intrigué, le capitaine les observe à tour de rôle, mais ne dit rien ; à quoi bon tenter de dresser des jeunes fougueux, à son âge ? S'ils trouvent ça drôle la guerre, autant ne pas leur faire voir la réalité tout de suite, ils s'en rendront compte eux mêmes quand ça sera trop tard.
D'un geste vif, la dénommée Stella farfouille dans sa sacoche et en tire une pokéball flambant neuve, brillant sous les rayons lumineux venus du ciel. La surface lisse et rouge semble scintiller d'un éclat surnaturel.
« Eh ben quoi ? Prenez-la, c'est pour ça qu'on est là, non ? »
Les paupières papillonnent un instant, le temps que l'information soit traitée, puis le cinquantenaire prend la sphère dans sa main, pour la fourrer dans la poche de son long manteau noir strié de deux bandes dorées aux poignets.
La jeune femme penche la tête de côté, le regard brillant d'une sorte de curiosité maladive.
« On dirait que vous ne savez pas grand chose de toute cette situation, vous non plus. On vous a embarqué là-dedans malgré vous, pas vrai ?
— C'est un peu ça, marmonne le marin. Tout ce que Jackson a dit, c'était de venir chercher quelque chose ici. »
Il s'interrompt pour jeter un coup d'œil vers son navire, et revient aux deux jeunes gens.
« Et puis d'ailleurs, c'est quoi ce pokémon que vous êtes allés chercher ? »
Clyde tire une bouffée de sa cigarette, et la jette sans ménagement dans l'eau remuante.
« Une créature légendaire, il paraît. Ce qu'ils sont prêts à faire pour en avoir une, les gens, ça ferait presque peur. »
* * *
Le campement installé près du vieux puits se défait progressivement ; les tentes sont enroulées tant bien que mal, les vêtements secoués pour en retirer le sable, le nécessaire de survie empaqueté sur le dos des bourrinos qui attendent sagement, couchés sur ce sol particulier.
Penché sur une grande carte posée sur la surface irrégulière d'une dune, Weigall tâche de définir le trajet le plus rapide pour atteindre le prochain repère ; une petite oasis entourée de quelques palmiers et où les pokémons aiment flâner.
L'ayant déjà visitée dans le cadre de ses précédents travaux dans le désert, il sait pertinemment que c'est un point stratégique, et qu'il y a une probabilité non négligeable que des indépendantistes s'y rendent. Aussi l'observation du terrain sera-t-elle primordiale avant de s'en approcher de trop près.
« Voyons voir, si l'on passe entre ces dunes-là... »
D'un mouvement vif, il plaque sa casquette contre son crâne ; une légère bourrasque ayant manqué de la faire s'envoler. Quelques grains de sable tournoient dans sa direction, et il a la présence d'esprit de se lever, puis d'enrouler la carte, se rendant compte du danger.
Le blondinet grimpe un peu plus haut sur la dune, semant le mascaïman qui rôde à proximité, et observe le résidu de campement en contrebas. Les supérieurs sont à portée de voix, parfait.
« Hé, en bas ! Attention, y a des pokémons belliqueux dans le coin ! »
En effet, dans les secondes qui suivent, une horde de mascaïmans et d'escrocos sauvages surgissent des sables pour attaquer. Vive comme l'éclair, le colonel Snow envoie ses trois pokémons au combat pour un maximum d'efficacité, et le cizayox du général se joint à la fête.
« Des sauvages, on dirait, constate-t-elle en analysant leurs mouvements et attaques, inefficaces face à la résistance de ses propres créatures dressées. Ça devrait pas poser problème. »
Les dresseurs ne prennent pas la peine de se confondre en ordres divers et variés, laissant les pokémons se débrouiller par eux-mêmes ; les bêtes savent ce qu'elles ont à faire, et s'exécutent à la perfection.
Tandis que le maraiste de la blonde bombarde les ennemis de jets d'eau boueuse, son minotaupe et son rapasdepic fondent sur les crocodiles du désert afin de les décimer plus rapidement. De son côté, cizayox les termine en les frappant de ses pinces d'acier, et les voilà dans les vapes, posés dans le sable chaud.
Tout le monde autour a observé la confrontation, avec un mélange d'excitation et d'appréhension au fond de l'œil. Admirer les talents de Winnie Snow en terme de dressage a toujours été l'une des activités favorites des soldats postés à Alola.
Le médecin du groupe, devenu célèbre malgré lui à cause de ses pokémons belliqueux qui sont comme mangriff et séviper, ose lâcher un sifflement admiratif et un applaudissement, qui ne font qu'attiser un regard noir de la femme, derrière ses lunettes de soleil.
« J'ignorais que les pokémons du désert étaient si organisés que ça. Ils le sont presque plus que nous, ça en ferait peur, ricane Macarthur avec une pointe d'amertume au fond de la voix. Bon sang, reviens cizayox... »
Le général fait signe à Weigall de les rejoindre, Snow et lui, tandis que les autres membres de l'unité s'occupent de terminer les préparatifs du départ. Tapant durement contre les têtes et les peaux écailleuses des reptiles assommés, le soleil semble se moquer ouvertement de la situation, là-haut.
« Vous m'avez demandé, monsieur ?
— Oui, euh, il semblerait qu'on vienne d'essuyer une attaque ennemie, lieutenant. J'imagine que vous allez pas me contredire là-dessus, vous qui connaissez si bien ces chers natifs alolais ? »
Le plus jeune hausse un sourcil blond, ne sachant pas si le commentaire est simplement là pour faire état d'un fait avéré, ou bien pour le railler. S'attirer des ennuis n'étant pas sa priorité pour le moment, il préfère laisser couler. De toute façon, les supérieurs font ce qui leur chante, dans le désert ou au QG, c'est pareil.
« Je ne peux pas certifier qu'il s'agissait d'une attaque ennemie, soupire-t-il desserrant sa cravate. Comprenez, certains pokémons agissent en bandes afin de détrousser les voyageurs dans le désert, et leur voler leur nourriture. Les objets brillants, parfois, aussi, ils aiment ça. Je ferais attention à ma montre si j'étais vous. »
Les deux supérieurs, presque en même temps, portent la main à leurs poignets pour vérifier la présence de l'objet susnommé ; Weigall retient un ricanement amusé.
« Cependant, si c'est bien un assaut alolais comme vous semblez tous les deux le penser, reprend le blondinet avec assurance, je crois que notre séjour dans le désert sera un peu plus long que prévu... Si on tombe sur eux et qu'on doit les affronter, il n'est pas exclu qu'on essuie des pertes, d'ailleurs. Le désert est un endroit cruel. »
Il ne vient à l'esprit d'aucun des deux officiers supérieurs de nier cet état de fait. Le désert est cruel, et c'est à celui qui le maîtrise le mieux de gagner.