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Cadavre Exquis de Corpus09



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» Auteur : Corpus09 - Voir le profil
» Créé le 29/05/2017 à 19:17
» Dernière mise à jour le 01/06/2017 à 11:26

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Chapitre 1 : Tupointes (par Mentalira)
-Debout là-dedans ! C’est le grand jour !

Je ne sais qui de l’exclamation enjouée de Jean-Eudes ou de la secousse qui ébranla ma maison de carton me réveilla en premier. J’étouffai un bâillement et tournai sur moi-même pour m’étirer, puis je fis une roulade pour sortir de ma cabane. C’était une maisonnette assez large que Jean-Eudes m’avait construit dès le premier jour de notre amitié, afin que je puisse dormir hors de ma Poké Ball. Il l’avait décorée avec tout le bon goût dont savait faire preuve un enfant de dix ans : des billes multicolores ornaient la façade avant, de part et d’autre de la porte. Les murs sur les côtés étaient constellés d’étoiles et de petites boules bicolores censées être des portraits de moi. Une fusée peinte en rouge se dressait sur le mur opposé à l’entrée, percée à mi-hauteur d’une ouverture irrégulière qui devait me servir de fenêtre mais dont je n’avais jamais compris l’utilité puisqu’elle s’ouvrait sur les barreaux métalliques du radiateur. Et enfin, le toit plat de ma demeure était décoré d’un immense Magicarpe aux yeux maladroitement globuleux. Depuis, mon dresseur avait bien grandi mais j’étais encore très fier de l’antre confectionnée par ses soins.

Il faisait encore nuit dehors et pourtant Jean-Eudes, qui n’avait rien de matinal habituellement, avait déjà revêtu son costume trois pièces préféré, celui qui était encore plus vert fluo qu’une substance radioactive. Sa canne à pêche et son épuisette étaient déjà posées près de la porte de sa chambre et Jean-Eudes était penché au-dessus de son lit pour finir de préparer son sac à dos. De toute évidence, il n’attendait plus que moi.

-Torbe ! lançai-je avec entrain en guise de bonjour.

-Tupointes, ne me dis pas que tu as oublié quel jour nous sommes ! s’écria mon dresseur en me jetant un regard faussement inquisiteur.

Comment pouvais-je l’oublier ? Il n’y avait qu’une seule chose qui pouvait nous faire lever, Jean-Eudes et moi, avant l’aurore :

-C’est le 13 mai ! Il faut qu’on se dépêche, je veux être le premier arrivé, pour pouvoir choisir le meilleur spot ! Cette année, nous allons battre tous les records !

-Voltorbe ! acquiesçai-je, enthousiaste.

Le 13 mai était la journée internationale de la pêche aux Magicarpes et, comme chaque année, la mairie de Rivamar organisait le plus grand concours de pêche de la région et, comme chaque année, Jean-Eudes et moi entendions bien remporter le gros lot. Dès le 14 mai, nous passions tout son temps libre à perfectionner notre technique et son matériel pour être fin prêts le jour J. Cela faisait déjà six années consécutives que nous gagnions en pêchant toujours un plus grand nombre de Magicarpes, et toujours de plus gros spécimens. Et malgré les six trophées bien alignés sur l’étagère surplombant le bureau, Jean-Eudes n’était pas encore satisfait, alors moi non plus.

-Allez, dépêche-toi, nous n’avons pas une minute à perdre !

Sans plus attendre, il prit son sac, ses affaires de pêche et sa ceinture de Poké Balls puis quitta la chambre sans penser à éteindre la lumière. J’aurais aimé pouvoir le faire à sa place, mais la dernière fois que j’avais essayé, j’avais fait griller l’installation électrique de tout le quartier. Aussi me contentai-je donc de rouler pour suivre mon dresseur dans les escaliers. Une sorte de petit toboggan avait été installé des années auparavant pour me faciliter la descente. Arrivé en bas, je me cognais tout le temps à la porte d’entrée. Mais mon Talent étant Statik et non Boom Final, je n’explosais heureusement pas au moindre choc.

-Jean-Eudes, viens prendre ton petit-déjeuner, fit la voix de sa mère depuis la salle à manger.

-Maman, ronchonna l’intéressé, tu sais bien que je n’ai jamais faim le matin.

-Taratata, si tu n’es pas content, tu n’as qu’à te prendre un appartement. Mais tant que tu es sous mon toit, tu fais ce que je te dis.

Jean-Eudes soupira et me demanda de ne pas bouger.

-Je me dépêche.

Il renfila les gros chaussons qu’il venait d’enlever et rejoignit sa mère. Celle-ci avait toujours eut l’habitude de se lever tôt, contrairement à Jean-Eudes et à son père, et cela ne s’arrangeait décidemment pas avec l’âge. Alors pour compenser, elle ne se couchait jamais très tard, contrairement, d’ailleurs, à son mari.

J’ignore combien de temps je suis resté là à attendre, mais ce fut bien plus long que ce que Jean-Eudes avait promis. Je bouillais tellement d’impatience que quand il revint, la moquette devant l’entrée ressemblait à un champ électrifié.

Jean-Eudes retira ses pantoufles et se chaussa car il n’aimait pas marcher sur du goudron. Sac à dos bien ajusté sur les épaules, canne à pêche sous un bras et épuisette sous l’autre, il sortit enfin de la maison, et je roulai à sa suite.

C’est au pas de course que nous nous dirigeâmes vers la porte sud-ouest de la ville car le concours avait lieu sur la plage de la route 222. Il faisait très beau ce jour-là, il y avait juste ce qu’il fallait de nuages pour décorer agréablement le ciel qui se teintait déjà de rose sous l’effet des premiers rayons du soleil. Le sol en goudron était quand à lui égal à lui-même, dur et nauséabond. Il faut dire qu’il n’avait pas plut depuis plusieurs jours, ce qui n’arrangeait pas son état. S’il continuait de faire très chaud, dans quelques heures, il ne me serait plus permis de passer par ici sans me retrouver couvert d’une substance noire et visqueuse. Heureusement pour moi, Jean-Eudes avait grand soin dans ces cas-là de me laisser dans ma Poké Ball pour m’éviter ces désagréments.

Lorsque nous arrivâmes enfin sur la terre meuble de la route 222, Jean-Eudes retira ses chaussures et noua les lacets ensembles afin de pouvoir les suspendre sur son épaule. L’herbe était sèche et un peu cassante mais c’était toujours plus agréable que le sol de Rivamar. Sans nous concerter, nous nous précipitâmes sur la plage, lui en sautant par-dessus les escaliers qui y descendaient, et moi en me cognant à chaque marche. Nous nous réceptionnâmes dans le sable, encore frais à cette heure. Un ou deux de nos concurrents étaient déjà arrivés. Cela me fit grimacer, j’avais espéré que nous soyons les premiers sur place, pour pouvoir nous installer où nous le souhaitions, mais hélas, notre coin favori était déjà occupé par l’un d’eux.

-Qu’à cela ne tienne, on va le lui récupérer ! déclara mon dresseur.

-Volt !

Nous nous approchâmes de l’importun. L’avantage que Jean-Eudes avait sur tous les autres passionnés de pêche tenait en trois lettres : moi. Il était à ma connaissance le seul pêcheur à utiliser un Pokémon électrique. L’avantage du type, combiné à mon entraînement et mon expérience des Pokémons Eau me permettait en général de vaincre sans avoir besoin d’être secondé par mes camarades.

Jean-Eudes provoqua l’homme en duel. Celui-ci disait s’appeler Dominique. Il n’eut d’autre choix que d’accepter le défi et envoya contre moi un Magicarpe. C’était un spécimen d’une taille assez conséquente, il fallait bien en convenir, mais rien que Jean-Eudes et moi n’avions pas déjà pêché. Il n’eut d’ailleurs pas besoin de me dire quoi que ce soit, je savais très bien ce qu’il attendait de moi. J’envoyai donc une attaque Boule Elek dont la puissance dosée à la perfection suffit à envoyer le poisson au tapis.

-Belle coordination, nous complimenta Dominique, mais il en faut plus pour m’impressionner ! Léviator, Draco-Rage !

-Tupointes, esquive !

A peine fut-il hors de sa Poké Ball que le dragon des mers lança son attaque, mais j’avais déjà roulé plus loin et je ne fus pas touché. Les Léviators étaient aussi des Pokémons que j’avais l’habitude de combattre. Je n’anticipai néanmoins pas l’ordre de Jean-Eudes car deux possibilités s’offraient à nous et je ne savais pas laquelle il allait choisir. La première était l’attaque frontale. Envoyer une Boule Elek, comme pour le Magicarpe. Mais il choisit la seconde.

-Roule dans l’eau ! exigea-t-il.

Je m’exécutais avec une pointe d’amusement, sachant fort bien quel serait l’ordre suivant. Le Léviator, plus à l’aise dans l’eau que sur la terre ferme, ne se fit pas prier pour me suivre. Je restai à un endroit où l’eau peu profonde m’arrivait à mi-hauteur. Mon adversaire n’eut guère le temps de s’éloigner davantage du bord car déjà Jean-Eudes criait :

-Onde de Choc !

Amplifiée par l’eau qui m’entourait, la décharge que je laissai s’échapper de mon corps se propagea rapidement et atteignit le Léviator. Il s’écroula dans l’eau de tout son long.

Le pêcheur le rappela et, déçu, se tourna vers mon humain.

-C’est bon, t’as gagné, je te cède la place.

-Ce n’est pas ma faute si vous êtes nul, répondit Jean-Eudes.

-Inutile de m’insulter ! s’écria l’autre.

-Désolé. J’aurais dû dire que c’est bien aimable à vous de me laisser la place qui me revient de droit. Enfin, je veux dire que vous avez perdu. Enfin, qui, bafouilla Jean-Eudes, c’est bien aimable à vous.

Dominique s’éloigna finalement, non sans avoir jeté un dernier regard à Jean-Eudes. Je ne sais pas très bien ce que cela était censé signifier. Jean-Eudes grimaça.

-La prochaine fois, je me tais, ça vaudra mieux.

Pour le réconforter, je vins me frotter à son pantalon au coloris radioactif. Il y eut des étincelles et mon humain grimaça encore mais cela le fit rire. Content de moi, je m’installais dans le sable pour me faire sécher tandis qu’il déballait ses affaires. La plage était encore quasi déserte, la compétition n’était donc pas sur le point de commencer mais mieux valait être bien prêt à ce moment-là.

Jean-Eudes lança en l’air ses deux autres Poké Balls. Skyluli et Chenipotte en sortirent simultanément.

-Bonjour Messieurs-dames ! les salua notre dresseur. J’espère que vous avez bien dormi, une longue journée nous attend, nous devons être à la hauteur !

-Draa ! répondit Skyluli.

-Ban ! renchérit Chenipotte.

-Parfait ! sourit Jean-Eudes. Je vous laisse tous seuls deux minutes, je vais aller inspecter le reste de la plage, pour être certain que nous avons la meilleure place.

Et il s’éloigna d’un pas enjoué.

-Si vous saviez comme j’ai la trouille ! s’exclama Chenipotte.

-Ne t’inquiète pas, la rassurai-je. Je sais que c’est la première fois que tu participes au concours de pêche, mais depuis que tu es dans l’équipe, Jean-Eudes a passé beaucoup de temps à t’entraîner. Crois-moi, tu es tout à fait prête ! Pêchez pendant la compétition n’est pas plus difficile que pêcher le reste du temps.

-Et c’est toi qui dis ça, soupira mon ami Draco. Ne l’écoute pas, Cheni, il se la joue coach sportif sûr de lui maintenant, mais tu verras que dans le feu de l’action, il sera plus stressé que toi, Jean-Eudes et moi réunis.

-S’il te plaît, ne m’appelle pas comme ça, demanda la jeune Banshitrouye, mon nom, c’est Chenipotte, pas Cheni.

-Tu tiens vraiment à porter le même nom qu’une larve ? s’étonna-t-il.

Je ne pus m’empêcher de rire. Il est certain que, dit comme ça, personne n’avait envie de s’appeler Chenipotte !

-C’est le nom que Jean-Eudes a choisi pour moi, je crois qu’il serait triste qu’on m’appelle autrement.

-N’en soit pas si certaine, petite, la contredis-je. Tu ne le sais peut-être pas encore, mais Skyluli est le diminutif du véritable nom de Draco. C’est celui que Jean-Eudes a choisi le jour où il a perdu un combat parce qu’il passait plus de temps à dire ce nom qu’à donner des ordres à Draco. Cela le ralentissait considérablement et a entraîné sa défaite.

Chenipotte voulut bien entendu savoir quel était le nom complet de notre camarade.

-Skylulikageflemsu, répondîmes-nous d’une seule voix.

La Banshitrouye écarquilla les yeux.

-Où a-t-il trouvé un nom pareil ?

-Va savoir ! s’exclama Skyluli. Je ne lui ai jamais posé la question.

Cette révélation laissa Chenipotte pensive un moment. Nous en profitâmes pour observer la mer en écoutant le bruit des vagues. Le soleil pointait à présent le bout de son nez au-dessus des immeubles de Rivamar et ses premiers rayons effleuraient la plage. D’ici peu de temps, le sable serait bouillant et la compétition pourrait alors commencer. De plus en plus d’humains armés de cannes à pêche s’installaient le long du rivage. Je tournai sur moi-même pour chercher Jean-Eudes du regard. Je l’aperçus un peu plus loin, à proximité d’une des cabanes de la plage. Il venait de commencer une partie de pétanque avec deux humains plus âgés que je ne connaissais pas.

-Comment peut-il avoir la tête à jouer ? s’interrogea Chenipotte qui était toujours aussi stressée.

-Laisse-le profiter, il faut bien qu’il se détende, la rassurai-je d’un ton paternel. Si nous n’avions pas son matériel à surveiller, je crois que j’aimerais bien aller jouer avec lui !

La Banshitrouye s’étonna de ma remarque ; je fus ravi de mon petit effet. Pour lui permettre de penser un peu à autre chose, j’entrepris de lui raconter la mémorable partie de pétanque à laquelle j’avais participé. Skyluli, qui connaissait l’histoire par cœur, tenta de protester mais je ne lui en laissais pas le temps.

-Jean-Eudes devait avoir douze ans à l’époque. Un ami de ses parents était professeur de pétanque. C’était Monsieur Téquanep, mais nous ne le connaissions pas encore, Jean-Eudes et moi. Il lui avait proposé de lui donner des cours mais Jean-Eudes déclara très vite qu’il n’en avait pas besoin et qu’il savait parfaitement jouer à la pétanque. Le professeur lui donna donc rendez-vous le lendemain pour tester ses capacités. Mais Jean-Eudes avait menti, il me l’avoua le soir même. Alors il décida de tricher afin de gagner la partie. Il me peignit en gris sombre, pour me faire passer pour une boule de pétanque. Une fois sur le terrain, je devais utiliser mes capacités électriques pour déplacer discrètement les boules adverses et les éloigner du cochonnet.

Je m’interrompis dans mon explication pour rire du bon mot que je m’apprêtais à faire. Cela fit soupirer Skyluli car je le faisais à chaque fois.

-Mais nous n’avions pas pris en compte un problème de taille.

-Lequel ? demanda Chenipotte qui, pour mon plus grand plaisir, n’avait pas compris.

-Ma taille, déclarai-je. Vois-tu, du haut de mes cinquante centimètres, je suis plus grand qu’un ballon de basket. Evidemment, le professeur ne fut pas dupe. Nous eûmes droit au plus virulent « bande de branquignols » de tous les temps. Il décida donc de donner des leçons à Jean-Eudes, trop content d’avoir une si jeune recrue dans son club. Quant à moi, il m’a fallu des semaines pour retrouver ma couleur d’origine.

Cela fit sourire Chenipotte. J’espérais l’avoir détendue un peu, la pauvre était vraiment angoissée par cette compétition. Nous fûmes interrompus dans notre conversation par l’approche d’Axel. C’était le cousin de Jean-Eudes. Fidèle à lui-même, il portait des tongs et un short. Il s’accroupit pour nous faire face.

-Hey, Tupointes, tu saurais pas où est Jean-Eudes par hasard ? J’ai un truc hyper important à lui dire.

-Torbe ! répondis-je en lançant de petits éclairs en direction du terrain de pétanque improvisé.

-Génial ! Merci ! s’exclama-t-il en se relevant. Et, bonne chance pour tout à l’heure !

Il s’éloigna d’un pas décidé. Il avait presque l’air sérieux.

-C’est bizarre de le voir comme ça, commenta Skyluli.

-Oui, confirmai-je, il a quelque chose de différent, Arceus seul sait quoi.

-De mon point de vue, ça ne change rien, parce que tous les humains sont bizarres, déclara Chenipotte, même Jean-Eudes.

-Ah non ! Jean-Eudes est atypique, c’est différent !

Skyluli et moi nous étions exclamés en même temps. Je lui lançais un coup d’œil complice qu’il ne remarqua pas. Faussement vexé, je décidai de me venger. Il détestait m’entendre raconter des anecdotes qu’il connaissait déjà.

-Tu as raison, Chenipotte, à propos des autres humains, ils sont tous bizarres. Je me souviens d’un poème composé par Flambé. C’est le Magmar du père de Jean-Eudes, tu le rencontreras peut-être un jour. Vois-tu, il avait pour coutume de dire : « Sur terre, en mer et dans les airs, les humains des deux hémisphères sont vraiment très bizarres, je suis donc fier d’être un Magmar » ! N’est-ce pas formidablement poétique ?

-Non, assura Skylulikageflemsu avec un sourire en coin.

Au fond, j’étais certain qu’il adorait écouter mes histoires, mais qu’il refusait de l’admettre.

-J’aime beaucoup, sourit Chenipotte. Vous pensez qu’il existe beaucoup d’autres Pokémons poètes ?

-Ma foi, c’est possible, répondis-je. Il y a bien longtemps, j’ai entendu parler d’un Nidoking qui était certain d’être le meilleur poète de tous les temps. Il était si sûr de lui qu’il combattait en déclamant ! Mais il avait un tic de langage, il répétait à tout va je ne sais plus quelle onomatopée.

-Qu’est-il devenu ?

-Le pauvre a fini tragiquement. Il est mort sur la route 207, c’était un règlement de compte, il me semble. Il a été piétiné par une horde de Cerfrousses.

Le silence suivit cette déclaration. Chenipotte avait l’air de compatir aux souffrances du Nidoking, mais pas Draco. Son attention s’était fixée sur un point précis de la plage et il plissait les yeux. Je lui demandai s’il y avait un problème.

-Regarde, me dit-il. Regarde ce qu’il n’y a pas, là-bas, à côté du rocher.

Je me retournais pour observer et fut immédiatement frappé par son absence.

-Zoé n’est pas encore arrivée, murmura Skyluli. Ce n’est pas normal.

-Zoé, c’est bien la petite blonde qui bégaie ? s’enquit Chenipotte.

-Dis comme ça, tu en fais presque une petite fille fragile, mais ce n’est pas le cas, souligna-t-il. D’habitude, elle est toujours l’une des premières à arriver sur la plage, le 13 mai. Et elle s’installe toujours là-bas.

Zoé était une jeune fille de l’âge de Jean-Eudes, elle avait été sa camarade de classe pendant des années. Elle était plus petite que lui et avait de grands yeux bleus. Tous les jeunes humains la trouvaient mignonne mais se désintéressaient d’elle dès qu’il comprenait qu’elle ne pouvait pas aligner deux mots sans bafouiller. Pour je ne sais quelle raison remontant à leurs années d’école primaire, Jean-Eudes et elle se détestaient cordialement.

-C’est sa plus grande rivale, expliquai-je à la Banshitrouye. Ces six dernières années, chaque fois que Jean-Eudes a gagné la compétition, elle finissait toujours deuxième, et de peu.

-Alors qu’importe si elle n’est pas là, déclara Chenipotte, ça fait toujours une concurrente de moins !

-Erreur, ma petite, répondis-je. Si elle est absente, la victoire de Jean-Eudes sera moins belle et il sera déçu. Il faut absolument qu’elle participe !

-Deux possibilités, réfléchit tout haut Skyluli. Soit elle prépare un mauvais coup, et dans ce cas elle arrivera, contente de son idée, avant le début de la compétition, soit il y a quelque chose qui ne va et elle ne sera pas ici à temps.

-Il faut aller voir de quoi il retourne, décidai-je. Vous deux, vous allez voir chez elle ce qu’il se passe, et vous la ramenez fissa à la plage. Moi je reste, Jean-Eudes aura besoin de moi quand la compétition commencera.

-Entendu, approuva le Draco. Allez viens, Chenipotte !

Et il s’éloigna s’en attendre, en direction de Rivamar. La petite fut prise au dépourvu mais le suivit finalement, trop heureuse de pouvoir se soustraire à l’angoisse de la compétition.

Je me retrouvai donc seul, avec la canne à pêche, l’épuisette, le sac à dos et les chaussures de Jean-Eudes. Je tournai sur moi-même pour le chercher du regard. Il venait de terminer sa partie de pétanque et écoutait Axel qui, l’ayant rejoint, lui racontait je ne sais quoi.