« Rien ne nous trompe autant que notre jugement »
(Léonard de Vinci)
« J’ai jamais été une bonne chef ! »
(Une des premières répliques de Naomi dans le premier chapitre du Projet Wallace)
« Derrière les carreaux, tombent en lambeaux, des êtres…
Derrière les pâleurs, on sait qu’un cœur va naître ou disparaître… »
(Mylène Farmer, Derrière les Fenêtres)Nights in White Satin – Moody BluesTous les matins, Naomi se réveillait. Se préparait. Déjeunait. Allait à l’école.
Elle espérait, quelque part, en tirer un bon avenir.
A côté de sa vie sociale bien remplie grâce à ses amis, elle tentait d’avoir une vie amoureuse à peu près correcte avec son petit ami à peu près valide et comme tous ses camarades, elle se préparait pour la guerre à venir. Physiquement et psychologiquement.
Mais parfois, Naomi se disait qu’elle voulait plus. Plus de quoi, elle l’ignorait. Que tout cela s’achève et passer à autre chose. Devenir enfin une grande.
La routine des jours devenait de plus en plus rude avec la nouvelle donne instaurée par Etienne Smirnoff dans son entrainement.
- Moi aussi, je me lève le matin. Alors pas de fatigue, la tête haute et on fait du surplace ! Oui, même vous, la fille enceinte !
Fey grommelait. Naomi se contentait d’obéir, soutenue du regard par son Walter.
Cela faisait bien deux semaines qu’il les supervisait. Chaque matin, lorsqu’ils faisaient la queue, Etienne leur faisait faire des exercices d’échauffement avec l’aide du prof de sport, le valeureux Lucario. Les autres élèves les regardaient bizarrement. Même Walter était tenu à faire ces exercices d’assouplissement. Généralement, ils étaient tous épuisés, et Francis ramenait son déodorant tellement il transpirait après ça.
Ce lundi matin, ils avaient médiathèque, ce qui était l’occasion pour les élèves de souffler un peu, sauf pour les masos qui voulaient s’entrainer avec le patriarche Smirnoff au fond de la salle.
- Non, non et NON, Bertelin ! Vous n’arriverez à rien si vous persistez à vous inquiéter pour vos Pokémon et pour les miens ! Soit vous portez un coup soit vous n’en portez pas ! A votre place !
Orson retourna à sa place, dépité.
- Je comprends même pas pourquoi tu persistes ! soupira Benjamin.
Orson souffla, fourbu, et reprit son travail de bibliographie, ayant fini sa propre part.
Le groupe de Perrine, Walter, Naomi et Wallace avait fini son devoir, donc ils prenaient une part du travail de recherche des autres groupes. Et/ou lisait des magazines.
- Tu savais, toi, que Kafka c’était chiant ? marmonna Wallace.
- Oui oui… marmonna Perrine en réponse, feuilletant son magazine.
Naomi avait pris une part du travail du groupe de Tristan, vu que le sujet l’intéressait. Walter faisait des recherches pour le groupe de Francis sur son PC.
- Tout va bien ?
- Comme tous les jours. Tant que rien ne change, ça va, je suppose.
Walter haussa les sourcils.
- C’est la fin de l’année, le moment crucial se rapproche.
- Tu parles des exams ou de la remise de diplômes ou de la fac ou de « hey au fait, Justin Truce va nous botter les fesses », ou…
- T’es de super bonne humeur…
- Tu peux pas t’imaginer.
- Denton, un peu de détermination, ce n’est pas parce que vous SAVEZ que vous allez perdre que vous DEVEZ partir perdant ! Suivant !!
Mike repartit à sa place, dépité.
- Il devient de plus en plus méchant à mesure que l’heure avance !
- J’te remercie pas ! soupira Holly qui prit sa suite.
Naomi inspira.
- Je devrais y aller un petit coup.
- Mouais. Je pensais pas que ça t’atteindrait autant, tout ce qui se passe…
- C’est juste que… quand mon père s’est retiré de Direction Dresseurs, je me suis dit que ça allègerait le poids que j’avais, et en fait… bah pas vraiment. Je suis toujours sous pression.
- Bah comme nous tous quoi.
- Mouais, vous avez l’air de plutôt bien le gérer…
Wallace leva les yeux au ciel en regardant Perrine.
- Mais n’importe quoi, ma pauvre fille ! Les jockstraps c’est pas pour le sport à la base !
- Bah mon père m’a dit que si !
- Lequel, le malin ou le sexy ?
- … je vais oublier ce que je viens d’entendre… et ne pas le répéter à Tristan… grommela Perrine.
Naomi regarda Walter qui plissa les yeux.
- Ok. Maintenant c’est moi qui ai la pression…
- J’vois pas en quoi !
- Bah tu me dis que t’as du mal à gérer ce qui se passe et je m’en aperçois que maintenant… ça calme ! Je suis ton petit copain, j’ai un rôle important à tes côtés, je suis… ton… véhicule de transport !
Naomi grimaça et agita les mains.
- Euh…
- J’aurais essayé.
- De ?
- Te faire rire. Mais visiblement je suis nul.
Naomi haussa un sourcil.
- Ah non, mais c’était drôle !
- PITOYABLE !
Tout le monde se tourna vers le fond de la médiathèque. Holly venait d’être séchée.
- Williams, je ne vous ferais même pas confiance pour garder mon verre de Schnapps en soirée ! Vous abandonnez plus vite que votre ombre ! Du balai !
Holly repartit, grognarde.
- Il est marrant, lui, j’peux faire quoi face à un Pachirisu enragé…
- Super, à mon tour… marmonna sinistrement Ana en la croisant.
Naomi soupira.
- J’appréhende même le repas.
- Même le repas… bon, ça, c’est compréhensible…
- Ouais. Bon, je vais amener mes premiers résultats à Tristan.
- Ok…
Naomi s’éloigna. Walter soupira. Wallace et Perrine le regardèrent.
- Qu’est-ce qui va pas ? s’étonna Perrine.
- Elle est un peu déprimée et apparemment je suis nul pour la rassurer.
- Oh. Sa tante va tapiner ou un truc dans le genre, du coup Tristan fait un truc, ce soir, vous venez ? demanda Wallace.
Walter haussa les épaules.
Naomi amena les papiers à Tristan.
- Voilà, les fiches de lectures corrigées des livres que j’ai lu.
- Merci ! Tu viens à mon petit apéro ce soir ?
- Un apéro le lundi ? Tu vis dangereusement… sourit faiblement Naomi.
- On sera en petit comité, j’ai juste invité les gens cool.
Naomi plissa les yeux.
- Toi, Wallace, vos potes, mes potes.
Naomi haussa les épaules.
- Ca peut être marrant ! J’en serais !
- Cool !
Naomi s’éloigna. On entendit Ana perdre.
- Mais quelle classe de bras cassés !! Vous avez du potentiel mais vous vous y prenez comme pour tuer votre père ! Du balai !
Naomi leva les yeux au ciel et alla vers le terrain.
- Monsieur Smirnoff, soyez moins dur, on n’est pas des souillons !!
Etienne se détourna d’Ana et dirigea son regard vers Naomi.
- Vous êtes quoi, son avocate ?
***
Violette inspira et gifla Roland qui la regarda.
- Ouvrez les yeux, grogna-t-elle. Regardez ce que vous avez fait !!
Roland se mordilla les lèvres.
- Alors ne venez pas vous étonner qu'on vous frappe après !
Wallace sembla remarquer quelque chose ou quelqu’un. Il regarda Naomi, lui prit une épaule et lui chuchota à l’oreille :
- Naomi, je compte sur toi pour la suite ! Fais ce qu’il faut.
Naomi plissa les yeux, ne voyant pas ce qu’il voulait dire.
Roland hocha la tête.
- Ok. Mais vous allez vous en mordre les doigts quand tout ça sera fini ! Dimitri !! J'ai besoin d'un costume neuf, et d'une PUTAIN de REDBULL !!!
Violette regarda Roland s'éloigner. La police encercla les élèves. Naomi fut tirée par l’arrière par un homme bizarre qui l’avait prise par le bras et l’entrainait hors de l’interpellation générale.
- Vous ?!
- Suis-moi, je dois t’emmener quelque part !
Naomi vit Francis monter dans une voiture, suivant un couple, et elle vit également que l’homme la menait vers sa propre voiture.
- Mais… mais…
- Fais-moi confiance ! J’ai reçu des ordres !
Naomi regarda Pablo Montes, entendit les cris de ses amis emmenés par la police, et entra dans la voiture.
- Je dois prévenir mes parents !
- Pas le temps. Tu as une mission de première importance.
- Mais ça va pas ?! Je ressors à peine d’une bataille hallucinante !
- Oui, eh bah c’était de la gnognotte à côté de ce qui va t’arriver.
Naomi grimaça et se retourna.
- Walter ! J’ai laissé Walter ! Et Perrine ! Oh non… Mais qu’est-ce qui va leur arriver ?!
- Plein de trucs, cette matinée était folle mais cette après-midi va l’être tout autant !
- … c’est vous qui avez sauvé les autres, c’est ça ?
Pablo se tut. Naomi hocha la tête.
- Merci pour ça.
- Je ne l’ai pas fait pour vous ou pour eux, je l’ai fait pour Seth. Pour honorer sa volonté.
Naomi inspira.
- Merci quand même.
- Mouais… je suis pas habitué. Ni aux remerciements, ni à parler à des adolescents.
- Ça se voit, vous êtes tout timide ! Un grand déluré comme vous !
- Gnnnn…
Ils arrivèrent devant le tribunal.
- Tadaaa !
- … c’est… une blague ?!
- Où est-il… AH !
Naomi s’étonna alors qu’un homme qu’elle ne connaissait pas arrivait.
- Je prends le relais !
- Super ! Les instructions de Roland sont claires : Elle doit faire couler Truce !
- Je sais bien, je prends la suite, rassurez-vous !
Naomi grimaça.
- Euuuuh… pardon ?
- Je dois y aller, à plus !
Pablo reprit le volant et partit. Naomi regarda l’homme.
- Je suis Malcolm Heine. Enchanté !
Naomi plissa les yeux et serra la main de l’homme. Qui avait l’air rassurant malgré sa barbe de trois jours.
- Désolé de te mettre dans cette situation, mais d’après notre informateur, tu es la seule à pouvoir remplir cette mission.
- Je… ne veux pas faire couler Justin Truce enfin, je n’en ai pas le pouvoir !
- Il ne s’agit pas de le faire couler. Mon informateur, c’est Tristan Edison, par le biais de Wallace Gribble.
Naomi haussa un sourcil. « D’accord. C’est ce qu’il a voulu me dire. C’est son idée. »
Elle inspira. « MAIS QUEL CONNARD ! »
- Il veut que tu sauves Justin Truce.
- … vous travaillez pour Roland ?!
- Non.
Naomi s’étonna de la clarté de cette réponse. Elle inspira.
- Je dois faire quoi ?
- Tu sais comment fonctionne le système judiciaire. N’importe qui peut assurer la défense de n’importe qui du moment qu’il se prévaut de connaissances juridiques.
- Je n’en ai aucune !
- Tu vas dans une fac de droit l’an prochain.
- … ça ne compte même pas ! Ce n’est même pas une connaissance juridique !
- Aux yeux du droit Poképolite, ça compte !
Naomi agita la tête.
- Je vais faire des réserves de prozac pour la fac !
- Je te le conseille aussi !
Naomi entra par une porte dérobée du tribunal avec Malcolm. Ils rejoignirent Claire et les enfants du couple.
- C’est elle ?!
- Oui.
- … Sans vouloir vous offenser, jeune fille… Malcolm, c’est une enfant ! A quoi pense Rachel ?
- D’après nos informations, c’est la plus qualifiée.
Naomi plissa les yeux. « Je ne sais même pas si j’ai envie de sauver Justin Truce… mais si Wallace me fait confiance là-dessus… »
- Et pour l’autre, on fait quoi ?
Malcolm inspira.
- Je crains qu’on ne puisse rien faire pour lui, les charges sont trop lourdes.
Claire hocha la tête et regarda Naomi.
- Bon, si Rachel compte sur ces enfants…
- C’était Tristan Edison à la base mais Wallace a recommandé la demoiselle, je te dis.
- Euh… et vous ?!
- Je ne peux pas me présenter devant un tribunal… geignit Malcolm.
- Et moi j’ai le trac ! ajouta immédiatement Claire.
Naomi ne chercha pas à comprendre. Naomi, Malcolm et Claire arrivèrent dans la cour, presque vide. Le juge semblait attendre la venue de l’avocat général.
- Dis-moi que ce n’est pas le même juge, Claire…
- Ce n’est pas lui. Je l’ai regardé droit dans les yeux, Malcolm, je sais que ce n’est pas lui.
Malcolm hocha la tête en soupirant. Naomi ne comprenait RIEN à RIEN.
- Bon. On est derrière toi au cas où. Tu vas à la barre et tu te déclares comme défense de Justin Truce.
Naomi agita une main, complètement interloquée. « Genre, je vais à la caisse d’un supermarché et je dis ‘Le magasin est à moi !’ »
Elle regarda le juge qui la regardait. Elle allait baisser la tête, mais elle se souvint qu’elle était une femme forte, qu’elle avait vu mille fois pire y’a pas une heure et qu’en fait elle n’avait aucune putain de raison de baisser la tête, bordel de merde.
Elle avança à la barre et ne prêta aucune attention à ce qui se passait derrière et certainement pas aux gens qui allaient entrer et sortir de la salle, sinon putain, ce chapitre n’en finirait pas.
Les accusés entrèrent. Justin était amené par deux hommes aussi grands que lui. Il avait l’air bien dépité, complètement défait. Il vit Naomi mais ne comprit pas bien pourquoi elle était là. Justin fut assis dans sa cage translucide. L’ensemble prenait un certain temps. Naomi se demanda si elle pouvait approcher. Le juge semblait occupé alors elle tenta le coup.
- M… monsieur Truce ?
- … je te reconnais, tu es l’une des quatre…
Sa voix était pâteuse. Il avait quelques cheveux blancs que Naomi ne remarquait que maintenant. Et il avait l’air d’avoir un peu maigri comparé à la dernière fois où elle l’avait vu.
- Euh… Wallace…
Justin releva légèrement la tête.
- Wallace m’a demandé d’assurer votre défense…
Justin eut un faible sourire.
- Le brave garçon… comment va-t-il ?
- Plutôt bien, je crois, il avait l’air… confiant.
Justin sembla rassuré. Mais vraiment. Ses yeux, son sourire, tout son visage traduisait dans sa crispation émue un grand soulagement.
- Tant mieux.
- Je ne sais pas si je vais pouvoir le faire, je ne vous garantis rien.
- Si Wallace l’a voulu ainsi, il en sera ainsi. Rappelle-moi ton nom, petite…
- Naomi. Naomi Kingsley. Mon père travaillait pour vous.
Justin hocha la tête.
- Duncan… mon Dieu… je n’aurais jamais dû le laisser partir…
- Oh, rassurez-vous, il a retrouvé du travail. Du bon travail !
Justin souffla par les narines.
- J’aurais vraiment tout gâché pour tout le monde…
- Si vous commencez comme ça…
- Tu ne pourras pas me sauver, petite. Tu vas essayer, mais… tu ne pourras pas.
- Je sais.
Justin regarda Naomi qui hocha la tête.
- Mais je vais essayer. Si Wallace veut qu’on vous aide, c’est qu’il a une bonne raison.
Justin détourna le visage, apparemment gêné, se mordillant les lèvres. Naomi plissa les yeux. « Si c’est une histoire de fesses, j’éTRANGLE Wallace à la sortie ! »
- Bon courage.
- Merci… enfin c’est vous qui êtes dans la position la moins enviable !
- Si Wallace te fait confiance, je te fais confiance.
Naomi hocha la tête et recula en inspirant. « Je sais pas ce qui s’est passé, mais ce n’est absolument plus le même homme… »
Elle retourna à la barre, faisant dos à Justin. « De toute manière, avec ce qu’on sait, je ne peux pas vraiment accabler Truce… Malgré ce qu’il a pu faire à mon père… »
On fit entrer Seth. Menotté et bâillonné. Justin eut un quart de regard pour lui avant de se reporter sur Naomi. « Ses yeux de chien battu… ça me met un peu la pression… »
Elle regarda Seth. « Ses charges sont trop lourdes, hein… je me demande ce qui s’est passé… »
L’avocat général arriva. Il remarqua Naomi mais la regarda à peine. « Oh, toi, je sens qu’on va pas s’aimer… »
Naomi baissa la tête. « Non mais tu te prends pour qui à penser ça, toi ? Espèce de petite sotte prétentieuse… J’espère que mes parents vont bien… et les autres… mon Dieu j’espère que la police ne va pas faire de mal à Mike, James, Fey, Santana, Lucy, Gina et Tino… les autres sont blancs, je m’en fous, mais pas eux… »
D’autres gens arrivèrent, dont la sténo qui s’attela à sa machine à écrire. Naomi souffla. « Si Roland Smirnoff encadre bien les choses, il ne devrait rien leur arriver, mais je connais la police et les gens de couleur, ça ne va jamais bien ensemble… Connaissant le caractère de Mike… »
- Bien. La cour !
Naomi se redressa. L’avocat général la toisa.
- Nous allons procéder à l’énonciation des chefs d’accusation. Les deux prévenus sont jugés en urgence suite à la gravité de leurs crimes, retransmis qui plus est à la télévision.
Naomi serra les dents. « Et voilà qui explique la rapidité de l’action judiciaire… »
- Monsieur Truce est accusé des crimes suivants : Crimes de guerre. Terrorisme. Atteinte aux biens publics. Organisation de malfaiteurs. Corruption. Violation de l’objet social de son entreprise. Kidnapping. Détention de mineurs. Abus de biens sociaux. Abus de ses fonctions Présidentielles. Abus du statut de Politicien. Conflit d’intérêts majeur. Atteinte à des pupilles majeurs de l’ordre public. Transgression du tabou des multivers.
Naomi haussa un sourcil. « Kezako ?! »
- La liste n’est probablement pas complète.
- Eh bien… marmonna le juge. Et pour monsieur… Corrigan ?
L’avocat général compulsa sa liasse.
- Possession d’une arme sans permis valable, tentative de meurtre, violences aggravées, transgression du tabou des multivers.
Naomi pencha la tête. « Ok, j’aurais besoin d’un Tristan, là, c’est QUOI un Multivers ?! »
- Que plaide monsieur Truce ?
- Je tiens d’abord à signaler que monsieur Truce n’a pas droit à un avocat officiel du fait de la gravité de ses crimes.
- Cela semble honnête.
« Euuuh non, trop pas ! » songea Naomi.
- Il n’aura droit à un défenseur que si celui-ci n’a aucune connaissance juridique, donc, résuma le juge en regardant Naomi.
- Tout à fait.
Naomi se sentait horriblement petite, mais elle faisait bonne figure. « Si je comprends bien, c’était ça ou la femme du bûcheron venait à ma place et se chiait dessus ? Eh bah on n’est pas sortis de l’auberge. »
- Que plaide donc monsieur Truce ?
Justin approcha sa bouche du micro au-dessus de lui. Enfin, à bonne hauteur, mais il était tellement prostré qu’on aurait dit que le micro était à un mètre au-dessus de lui.
- Coupable.
- Parfait.
Naomi plissa les yeux. « En même temps, s’il plaide non-coupable, il est incarcéré d’office et l’enquête sera à charge. Personne ne plaide jamais non-coupable ! »
Malcolm inspira. « C’est juste une manière de s’humilier sous le système judiciaire, cette question idiote… »
- Et monsieur Corrigan est coupable d’office puisqu’en vertu du droit Poképolite, tout crime ou délit commis sur un politicien retire tout droit de défense à celui qui le commet.
Naomi regarda Seth puis regarda Justin, puis écarquilla les yeux.
- Ooooooh merde merde merde merde merde… murmura-t-elle, comprenant un peu trop de choses.
- Bien. Si l’avocat général a une déclaration à faire…
- Eh bien, à moins que quelqu’un ne se prononce sur sa défense, il me semble que Justin Truce devrait très probablement subir une peine maximale vu la gravité de ses crimes. Il s’est moqué du monde, et en tant que Président de l’Association, a totalement perverti sa profession comme son nom comme son statut de politicien. Il faut qu’il soit placé en isolement immédiat et à perpétuité.
Naomi secoua la tête. « C’est un procès à charge… ils ne sont pas objectifs, je les sens un peu achetés, mais je vais garder ce « jugement personnel » pour moi… »
- Monsieur le Juge…
- Eh bien dans ce cadre du procès opposant la région d’Unys à Justin Truce, je vais demander aux défenseurs éventuels de bien vouloir s’avancer…
- Je défendrais pour ma part la Région d’Unys ! sourit l’avocat général en regardant Naomi.
Naomi déglutit. Le juge la regarda. Elle souffla. « C’est écrasant… et stimulant à la fois ! »
- Votre honneur… monsieur l’avocat général… la cour…
Malcolm s’étonna. « Elle parle bien ! »
- Je me tiens devant vous afin de vous faire part de la terrible erreur qui se déroule aujourd’hui. C’est le mauvais homme que vous avez arrêté.
- Je vous demande pardon ?
- Ses exactions ainsi que celles de ses hommes ont été constatées par des milliers de téléspectateurs, nous nous devions de réagir !!
- Ouiiii… certes… et c’est très bien d’avoir… réagi… comme vous l’avez fait, je suppose…
- Je sens de la moquerie dans votre ton, mademoiselle !! grommela l’avocat général.
- Je sens que je ne vous ai pas interrompu lors de votre déclaration, monsieur l’avocat général.
L’homme d’âge mur toisa la jeune fille noire qui n’allait pas se laisser faire. Elle regarda le juge. La salle s’était remplie peu à peu.
- Votre honneur. Ce qui se déroule ici est un procès. Nous jugeons un homme qui a pu commettre quelques crimes, je le reconnais volontiers. Cependant la raison pour laquelle il est ici ne relève, en tout et pour tout, que d’une vulgaire tromperie, destinée à cacher les agissements bien plus condamnables d’un autre homme. Un homme qui, comme par hasard, a échappé aux mailles du filet. Un homme qu’on a laissé libre de fuir alors qu’il est tout aussi, sinon plus, impliqué dans cette histoire. C’est pour cela qu’aujourd’hui, je me dresse face à vous…
- Mademoiselle…
- Laissez-moi finir. Je sais que cet homme a un lourd passé criminel derrière lui, mais vous devez comprendre que cette fois-ci, c’est LUI, la victime.
- Et donc vous tenez à le défendre ?
- Et donc je tiens à insister pour que vous lui fassiez justice. C’est important pour un ami à moi. Il m’a fait jurer de tout faire, eh bien soit. Donc, MOI…
Naomi inspira.
- Naomi Kingsley, je me prononce en tant que défense pour monsieur Justin Truce !!
Le principal intéressé lui-même était stupéfait. Le brouhaha se fit dans la salle. Walter inspira, stupéfait. Si Justin comparaissait pour le moins libre, Seth, lui, était carrément attaché et bâillonné sur le banc des accusés, plus loin.
- Silence, SILENCE dans la salle !! Monsieur Truce, acceptez-vous cette défense ?
Justin regarda Naomi qui se mordilla les lèvres. Justin soupira, se leva et fixa de nouveau Naomi qui hocha doucement la tête.
- Oui, je l’accepte.
Brouhaha de plus belle dans la salle. Walter hocha la tête en souriant comme un dément. « Je passe d’une bataille épique à une autre, décidément… quelle journée ! »
Seth pleurait, semblant se maudire d’avoir passé un certain accord avec une certaine personne en échange d’un certain coup de feu sur un certain rouquin.
L’avocat général poussa un soupir suffisant. Le juge sembla intrigué par la suite des évènements.
- Bien, bien, bien… Le tribunal va donc commencer par écouter la plaidoirie de Naomi Kingsley…
Rachel, assise avec Noémie dans le tribunal, en toute discrétion et surtout en toute sécurité, regarda sa fille de huit ans. Ses cheveux blonds étaient attachés et sertis d’une jolie Pokéball. Jim arriva avec Ethan.
- Ca y est ? Vous avez donné les lettres de Roland ? soupira Rachel, mécontente.
- C’était ça ou Roland y allait lui-même avec le petit, tu sais bien…
- Ouais…
Rachel inspira.
- La situation est sous contrôle, je vais sortir pour garder un œil sur les déplacements de Roland.
- Pour une fois qu’on est dehors, on s’éclate pas beaucoup ! sourit Jim.
- On s’éclatera ce soir, chez mon frère, à quatre dans la chambre d’amis.
- Hahaha… marmonna Jim avec un rire jaune.
Rachel quitta la pièce aussi discrètement que possible alors que Naomi se préparait à défendre Justin Truce, comme ça, à l’arrache.***
Seth Corrigan passa les divers contrôles de sécurité ainsi que les bureaux de secrétaires. Il arriva dans le grand bureau.
- Justin.
Le Président de l’Association leva la tête en même temps que son Bulbizarre vers son ancien bras droit.
- Hey. Ça faisait une paie.
- Hm… comment va ?
- Ecoute, si on excepte les manifs et le fait que mon indice de confiance frôle le zéro, tout va bien. Oh, et je suis invité à aller castagner du gosse à une remise de diplôme.
Seth inspira.
- Tu veux un bon conseil ? Laisse Teresa s’occuper de ça. Démissionne de ton poste de Président et va t’isoler en Argentine.
Justin Truce plissa les yeux.
- … tu veux que je fuie comme un nazi ?!
- Basiquement, oui.
- … c’est dégradant. Tu voulais me dire quelque chose ?
- J’imagine que tu es au courant qu’Etienne Smirnoff est dans l’école de ta classe préférée et qu’il les entraine en vue du conflit à venir.
Justin afficha un fier sourire.
- Raison de plus pour ne pas fuir. Mais… c’est une initiative de Roland ?!
- D’après mon informateur, non. Ce serait une initiative personnelle de Smirnoff père.
Justin haussa un sourcil.
- Intéressant… Ta théorie depuis le début c’est que les élèves allaient prendre un troisième parti, hein ?
Seth hocha la tête. Justin inspira.
- Je crois bien que tu avais raison. Je t’invite à déjeuner ?
Seth haussa un sourcil.
- … je… euh…
- On se reparle, non ? On peut déjeuner ensemble, donc !
Seth hocha la tête.
- D’accord. Mais en tout bien tout honneur.
- Est-ce que ça avait l’air d’être une invitation équivoque ?!
- Non, non, en effet…
- Eh bien voilà !
***
Naomi faisait face à Etienne Smirnoff au fin fond de la médiathèque d’Ogoesse.
- Vous en faites, une tête ?
- Oh, c’est rien, une déprime passagère. Je suis un peu blasée, je crois.
Etienne pencha la tête.
- C’est bientôt les examens et votre classe va être l’objet d’une guerre idiote entre deux ploutocrates aussi bêtes l’un que l’autre. Qu’est-ce qui peut bien vous blaser ?
Naomi haussa les épaules en soufflant.
- Je sais pas, juste… je crois que c’est ma manière à moi de gérer la pression.
Etienne hocha la tête.
- La pression c’est comme la douleur, c’est un signal. Si vous vous sentez sous pression, c’est que vous êtes inquiète et c’est une réaction saine et humaine. Vous avez le droit.
Naomi agita la tête.
- Vous voyez que vous pouvez être aimable !
- Comment vous croyez que je me suis marié !
Naomi secoua la tête.
- Bon, on se bat ?
- Oui, oui, oui. Comme pour tous les autres, un contre un.
Naomi hocha la tête.
- C’est parti !
Naomi envoya Shaofouine, et Etienne envoya Roucarnage.
- Bien…
Naomi plissa les yeux.
- On commence doucement… Judith, Tornade !
- Kimona, Bluff !!
Shaofouine fouetta l’air avec ses pattes, empêchant Roucarnage d’attaquer. Mais une fois l’attaque passée, le Pokémon agita les ailes de plus belle pour envoyer des ondes de choc vers Shaofouine.
- Acrobatie !
Shaofouine esquiva les attaques avec brio. Etienne hocha la tête.
- Pour une fille sous pression, vous vous défendez bien. Essayez d’attaquer pour voir ?
- D’accord… Aurasphère !!
Shaofouine agita ses manches et créa une sphère d’énergie devant lui.
- Meh. J’ai un Lucario, je vous rappelle.
- Torgnoles !
Etienne pencha la tête. Shaofouine frappa sa sphère pour la faire tournoyer. Etienne agita la tête à nouveau, pas très convaincu.
- Mouais. Vive Attaque !
Roucarnage fonça vers l’adversaire, sans grande crainte. Naomi plissa les yeux. L’Aurasphère partit vers l’adversaire.
- Cru’Aile, ma Judith.
Roucarnage allait donner un coup pour percer l’Aurasphère lorsque Shaofouine lui tomba dessus. Etienne s’étonna.
- Ce truc est vieux comme le monde, vous êtes sérieux ?!
Etienne cligna des paupières.
- Euh…
- Kimona, Forte-Paume !!
Le Pokémon Art Martial enchaîna les frappes du plat de la patte sur l’oiseau qui se retrouva pilonné au sol. Etienne haussa un sourcil.
- Jolie technique. Si Roucarnage avait été d’un autre niveau… Vent Violent, d’ailleurs…
Une tornade se forma autour de Roucarnage et projeta Shaofouine ad patres. Naomi leva les yeux au ciel. « A quoi je m’attendais… »
Lola Prutt était arrivée calmement, sans rien dire, juste à regarder le combat.
- Bon, je dois vous faire votre petit laïus à vous aussi : Mademoiselle Kingsley, vous avez la technique, il ne vous manque que la confiance en vous. Vous êtes un bon élément, améliorez vos tours de passe-passe et vous ferez des merveilles.
Naomi hocha la tête.
- Hm… c’est plutôt positif…
- Et je persiste : Pour une fille sous pression, vous avez du répondant !
- Merci, monsieur Smirnoff.
- C’est Etienne pour vous.
- … monsieur Smirnoff ! sourit Naomi.
Etienne secoua la tête en regardant Lola.
- Eh bien, que vois-je, une groupie !
- Oh, je vous en prie. C’était un beau combat face à cet adorable petit Tylton.
Etienne haussa un sourcil.
- … c’est raciste ? Vous êtes raciste ? J’avais oublié la tendance des gens de ma génération à être racistes.
- Mais non, voyons. On donne aux Pokémon des noms humains…
Etienne plissa les yeux.
- … moi je donne aux humains des noms de Pokémon.
- … oook je vois le genre… Dites ! Je fais une pause !
Tino recula. Etienne grommela en levant les yeux au ciel.
- Et vous avez déjà eu votre tour ce matin en arrivant !
- Je peux passer une deuxième fois ?! trépigna Tino.
- Non. Appelez Gates.
- Rhoooon… geignit Tino.
Etienne regarda Lola.
- On se connait ?
- Oh, non ! Nous avons fréquenté des milieux bien différents.
- Je sais pas, vous avez quoi, cinq ans, dix ans de plus que moi…
- J’étais juste venue chercher un livre et j’ai entendu le roucoulement d’un Roucarnage. J’adore ce Pokémon.
Etienne hocha la tête.
- Eh bah la voilà.
- Elle est superbe. Vous entraînez ces enfants dans un but précis ?
- Les exams !
Lola hocha la tête.
- Bien, bien. C’est important.
- Ouaip.
- Un peu comme la vérité.
Etienne regarda Lola en plissant les yeux.
- Vous devriez pas être à la retraite, vous ?
- Et vous ?
- Vous êtes autant professeur que moi curé, je me trompe ?
Lola haussa les épaules.
- Je devrais être désolée, mais… je ne le suis pas ! Je vous laisse, j’ai à faire.
- Je n’en doute pas.
Lola partit avec un petit sourire satisfait. Etienne semblait suspicieux.
- Suivant…
Tino s’avança, excité.
- … Mademoiselle Gates, s’il vous plait !
- Pousse-toi, nerd ! grommela Rebecca.
***
Lola Prutt était assise en bonne place au tribunal. Sur un châle posé sur ses genoux, un Bulbizarre observait, apeuré, son maître dans le box des accusés.
- Je ne dis pas que monsieur Truce est blanc comme neige…
Regard gêné des juges blancs devant la fille noire, qui ne relève pas.
- … mais je considère qu’il doit être jugé sur des faits qu’il a commis. En l’occurrence, le juger parce qu’il a été manipulé et tourmenté par Roland Smirnoff, c’est le juger pour un crime qu’il n’a pas commis.
- Objection.
Naomi regarda l’avocat général qui inspira.
- La cour aimerait faire remarquer qu’il est également jugé pour des faits commis autour de son élection et de ses actions pendant le mandat de Roland Smirnoff. Il y a eu des gens tués afin d’intimider et de déstabiliser le Président Smirnoff !
Naomi hocha la tête.
- Pourquoi donc monsieur Truce n’a pas été jugé à cette occasion ?
L’avocat général haussa les sourcils.
- … personne n’a porté plainte !
- Donc quelqu’un a attendu que monsieur Truce commette une ribambelle de crimes – que vous avez très joyeusement exposés tout à l’heure – afin de porter plainte d’un coup pour tous les crimes de monsieur, l’apothéose représentant une guéguerre d’une matinée contre une école régionale.
L’avocat général inspira.
- De plus, excusez-moi, je poursuis…
L’avocat général regarda froidement Naomi.
- De plus, de toute évidence, ces crimes ont tellement intéressé la justice qu’aucune enquête n’a été menée, si bien que vous avez attendu que monsieur Truce soit présenté devant une cour pour nous dire « Ah mais oui au fait, les meurtres ! »
Rires dans la salle. Le juge semblait amusé. Seth avait baissé la tête depuis l’évocation des meurtres. Justin observait Naomi avec une expression interloquée.
L’avocat général n’avait pas ri.
- La cour aimerait faire remarquer que mademoiselle Kingsley insulte le système judiciaire.
- Evidemment, il est nul ! rétorqua Naomi.
- La cour aimerait faire remarquer…
- Qu’elle le fasse remarquer alors, au lieu d’aimer pouvoir le faire ! Je suis sûre que la cour aimerait faire remarquer qu’effectivement, c’est un peu idiot de ressortir ces meurtres comme ça, d’un chapeau, sans avoir enquêté dessus.
- Il y a eu une enquête ! grommela l’avocat général.
- Qui a mené à quelle conclusion, monsieur l’avocat général ? souffla Naomi.
- Classée sans suite, sous la pression de monsieur Truce.
Naomi hocha la tête.
- Vous avez une preuve de ça ?
- Un communiqué de sa part, datant de l’époque où il travaillait pour le cabinet Smirnoff.
Naomi regarda Justin qui baissa la tête. Le juge tapota avec son marteau pour faire cesser le brouhaha.
- Silence. Je souhaite appliquer la procédure Malcolm Heine.
Naomi s’étonna et se tourna vers ledit Malcolm Heine qui détourna les yeux, tout comme sa femme.
- L’accusé est temporairement autorisé à s’expliquer sur ce point et sur ce point seulement.
Naomi agita la tête. « D’accord. Monsieur Heine ne pouvait pas défendre monsieur Truce parce que lui-même a été impliqué dans une affaire judiciaire tellement retentissante qu’une procédure judiciaire porte son nom. »
Naomi leva les yeux au ciel. « Je maudis le jour où ma famille a croisé la route de ces fous de Smirnoff, de Heine, de Truce et que sais-je encore. »
Naomi secoua la tête. « Et puis merde, pourquoi chaque fois qu’il se passe un truc dingue dans la vie des noirs, c’est à cause d’une bande de blancs ! »
Naomi serra les dents. « Ce serait un peu raciste de dire l’inverse, Naomi… non en fait ce que tu viens de te dire était raciste ! »
Justin Truce approcha de son micro qui était allumé. Il regarda Seth qui était prostré, la tête basse.
- Je… euh…
Naomi secoua la tête. « Ne le dénoncez pas… »
- Je n’ai jamais commandité aucun meurtre.
- Quoi ?! s’étonna l’avocat général.
- Pardon ? s’étonna le juge.
Naomi pencha la tête. « Whaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaa- »
Brouhaha dans la salle. Justin continua à parler.
- Je n’ai tué que trois personnes de mes mains dans ma vie… George Stocks, c’était pendant la guerre…
Naomi agita la tête. « Bon, ça va si c’était pendant la guerre ! »
- Ainsi que… très probablement Ulrich Trafalgar et sa fille, crimes dont je veux bien répondre…
Naomi haussa un sourcil. Cela s’activait derrière elle, elle ne se retourna pas, trop fascinée par Justin Truce.
En fait, elle était fascinée par l’étonnante transformation qui s’était opérée chez lui. A son souvenir, c’était un homme froid, hautain et rude. En face d’elle se trouvait un homme fragile, blessé, couvert de fêlures, tremblotant. Elle ne ressentait pas de la pitié, elle était submergée par un questionnement entêtant : « Que s’est-il passé entre lui et Wallace ce matin pour le transformer comme ça ?! En excluant toutes les idées dégueulasses qui me viennent, évidemment. Il m’a contaminé, ce petit con, j’ai l’esprit aussi mal tourné que lui maintenant !! »
- Cependant…
Silence de la cour.
- … Seth…
Justin déglutit.
- Seth a…- Il faut savoir ce que vous voulez dans la vie.
Seth hocha la tête, tout de noir vêtu.
- Quand on veut se venger, il faut être ferme, vous voyez. On ne peut pas dire « hey, je veux me venger » et reculer ensuite.
L’homme laçait avec attention Cyrus Rhodes, puis ajusta de nouveau l’arbalète qui le tuerait quand quelqu’un mettrait le pied dans le fil qui traversait la pièce.
- Ces gens vous ont traité comme un pion, vous ont pris pour leur tueur à gages personnel, vous devez être ferme !
Seth acquiesça. L’homme bâillonné se réveilla, attaché.
- Hmmm ! Hmmmmm !
- Ils sont mignons quand ils réalisent que c’est foutu ! Tellement mignons !
Seth détournait les yeux du corps dénudé de l’homme.
- Et puis dites-vous que c’est un violeur. Donc c’est pas grave ! Hein ?
Le grand sourire sur le visage de l’assassin envoyé par Gallhager & Cie ne rassura absolument pas Seth.
- Vous êtes tout blanc, c’est à cause du type que j’ai saigné dans la baignoire ? Vous faites pas de bile, il était endormi ! J’adore ça, endormir les gens ! Comme ça ils sentent rien, ils partent touuuut doucement. Bon, les honoraires…
Seth hocha la tête et sortit un chéquier.
- Il est pas à votre nom, ce chéquier, dites !
Seth secoua la tête, tremblotant. L’assassin sourit.
- Vous êtes un malin, vous ! Un vrai malin ! Héhé ! Voilà votre reçu !
L’homme tendit une feuille de papier invisible. Seth le regarda, assez intrigué par l’attitude ouvertement joviale de l’assassin qu’il avait payé.
- Je plaisante ! Vous avez remarqué que j’étais un petit plaisantin ? Bon, on sort et on attend que madame rentre et ne shoote son cher frangin d’un beau carreau d’arbalète ! Le plus regrettable dans ce boulot, c’est de ne pas voir les réactions des gens. Allez, hop hop hop, attention au fil, on ne rembourse pas si le meurtre est foiré, hein !Seth pleurait. Se maudissait. Justin se mordilla les lèvres.
- C’était… un peu… disproportionné.
- Vous confirmez cependant avoir intimidé les équipes de Smirnoff…
- En envoyant des photos de leurs proches, oui, pour les effrayer, mais… de… là à…
- Vous avez kidnappé Jackson Wound afin de subtiliser Giratina, vous avez attaqué Ulrich Trafalgar dans l’intention de le tuer, et suite à cette attaque, il a disparu de la surface, lui et sa fille !
Justin baissa la tête.
- Est-ce exact, monsieur Truce ?
Justin hocha la tête. L’avocat général regarda Naomi qui serra les dents. Quelqu’un amena un dossier et le remit à l’avocat général. Naomi ne reconnut pas Jim Patterson.
- … la Cour aimerait apporter une nouvelle pièce…
- Donnez-là aux juristes.
Naomi n’avait pas remarqué un homme et deux femmes à une table à côté de la sténo. Ils prirent le dossier et l’examinèrent. Une des deux femmes, aux cheveux rouges, d’âge mur, se leva.
- La Cour. En ma qualité de Grande-Juriste d’Unys, l’autorité judiciaire la plus haute en dessous de l’Agent, j’apporte un nouvel élément au dossier. Des preuves de vie d’Ulrich Trafalgar et de Gloria Trafalgar. Une profession de foi signée de la main d’une certaine madame Helen Clover…
Naomi haussa les sourcils.
- … confirmant que monsieur Trafalgar s’est retiré de la civilisation pour vivre une vie de méditation et de paix à l’écart du monde avec les Pokémon.
- Le chef d’accusation de Meurtre est requalifié en agression pour monsieur Truce, et monsieur Corrigan est chargé de double homicide ! annonça le juge.
Naomi agita la tête. « Le système fonctionne. »
- Non.
La cour s’étonna.
- Monsieur Truce, vous n’avez plus le droit à la parole.
- J’ai voulu le tuer. J’ai frappé avec l’intention de tuer. Même quand la fille s’est interposée. C’est une tentative de meurtre.
Le juge regarda Naomi qui hocha la tête.
- Techniquement, il a… raison… mais si le coup n’a pas été porté et n’a pas tué…
- Si je leur avais tiré dessus…
Seth redoubla de sanglots, mais Justin continua :
- … si je leur avais tiré dessus, et si la balle les avait ratés, ce serait une tentative de meurtre.
- Exact. Requalifié en tentative de meurtre.
Naomi regarda Justin qui hocha la tête. « Si vous voulez y aller comme ça… »
Justin regarda Seth qui le regarda également. Naomi ne comprit pas ce que signifiait ce regard, mais Justin et Seth, eux, comprenaient parfaitement.***
- J’me suis faite ECLATER !!
Rebecca revint à sa place, secouée.
- Il m’a dit une connerie du genre que j’étais trop lâche pour oser l’affronter en face, non mais…
- T’as fait quoi ? s’étonna Santana.
- Les trucs habituels, essayer de déstabiliser l’adversaire en papotant, mais il m’a ratatiné avec son fichu Erwan.
- Capidextre… on n’appelle pas un Pokémon par le surnom que lui donne son maître, ça fait trop bizarre… geignit Violette.
Amélia faisait ses devoirs, n’ayant plus de travail et étant largement désintéressée de ses camarades.
- Alors, madame Clover elle a dit quoi ?
Santana et Violette regardèrent la prof qui alla se frotter à Roland Smirnoff.
- Et c’est parti pour ma défonce de la semaine… soupira la prof.
Rebecca, Santana et Violette se regardèrent. Rebecca inspira.
- Oui, moi aussi je me maudis chaque jour d’avoir renoncé à faire un caprice pour aller en école privée. Qu’est-ce qu’elle a dit ?
- Que la région d’Alola n’ayant pas été acceptée comme faisant partie de la fédération Poképolite… nous n’avions pas à traiter des attaques exclusives des légendaires de cette région.
- AR-FUCKING-CEUS, YES !!!
Santana et Violette regardèrent Rebecca qui souffla.
- Excusez-moi, les filles, mais je n’avais VRAIMENT PAS envie de parler de ces attaques de merde dans le devoir !
- … qui êtes-vous et qu’avez-vous fait de Rebecca ?! s’étonna Santana.
- J’ai le droit d’être fainéante, c’est la fin du cycle !
- … c’est pas ce dont je parlais… marmonna Santana, encore déboussolée.
Gina, Holly, Lilian et Léon étaient également dans la dernière phase de leur devoir, mais… traînaient des pieds.
- J’veux pas me retrouver à aider les autres… soupira Gina.
- Moi non plus, j’veux pas être punie parce que je suis à jour ! grommela Holly.
Léon regarda Lilian qui inspira.
- Je sais pas si j’approuve ce genre de comportement…
- Comment ça ?! Le mien ou le sien ?! s’étonna Gina.
- Celui de Holly est plus excusable à la rigueur mais le tien…
- Je suis pas solidaire, c’est tout ! Chacun se démerde !
Lilian secoua la tête.
- Ce n’est pas ce que monsieur Smirnoff attend de nous.
- Oh bah voyons. Ce mec est pas notre prof ou notre gourou, c’est juste notre entraineur…
- Mais la guerre qui arrive à nos portes est bien une guerre, elle, au cours de laquelle tu vas devoir porter secours aux autres.
Gina leva les yeux au ciel.
- Je t’en prie, si ça se trouve il ne va rien se passer du tout et la remise des diplômes va se dérouler sans encombres !
- … et tu bases ça sur…
- L’intuition féminine !
Lilian inspira.
- Quand on sera mariés…
Léon sursauta. Holly haussa un sourcil, stupéfaite.
- … parce que vu que tu m’as présenté à ta famille comme étant ton petit ami, je suppose qu’on est bien partis pour ça…
- … euuuh baaah…
- … Quand on sera mariés, je refuse que tu te laisses entretenir ! Je tiens à ce que tu aies un travail et que tu participes à subvenir aux besoins de la famille !
Gina sembla sonnée, et trouva une réponse :
- … et qui fera le ménage, la cuisine ?!
- J’engagerai quelqu’un pour ça.
- Tu « engageras » ?! Parce que tu penses que tu auras un boulot suffisamment bien payé pour…
- Je veux devenir entrepreneur, donc oui, j’aurais un boulot suffisamment bien payé !
Holly plissa les yeux.
- Attends, tu as planifié tout ça ?!
- Evidemment !
Holly regarda Gina, encore plus stupéfaite.
- … putain de veinarde…
- Je sais pas trop… marmonna Gina. Et les enfants ?!
- Nous nous occuperons conjointement des enfants, c’est une tâche bien trop importante !
Holly secoua la tête et regarda Lilian.
- Je suis à deux doigts de rompre avec Gabe et de te sauter dessus !
- Je t’apprécie mais tu n’es pas mon genre, rétorqua froidement Lilian.
- Ah non, tu arrêtes de me piquer mes mecs ! grommela Gina.
- Vous allez pas recommencer… soupira Léon.
Robbie haussa les sourcils et regarda Tristan. Tristan plissa les yeux.
- Quoi ?
- Arrête !
- … mais je fais rien !
- Bah alors c’est qui qui me fait du…
Robbie et Christina se regardèrent, éberlués.
- NON MAIS…
- OH PARDON !
Tino s’étonna.
- Gné ?
- Ta copine me fait du pied !
- J’ai pas fait exprès !! geignit Christina.
- Fais attention quand même, on est tous en couple autour de cette table, ça pourrait devenir gênant !
Robbie se repencha sur son travail. Tino haussa les épaules et se repencha sur le sien. Tristan agita la tête. Christina le regarda.
- Toi, ça t’aurait pas embêté !
- … comment ça ?!
- Bah, si une fille te fait du pied, ça t’embête pas !
- … la question ne se pose pas puisque c’est à Robbie que tu as fait du pied par inadvertance. Et tu sais bien que Tino ne laisse jamais ses jambes devant lui, il pose ses pieds sur la barre entre les pieds de la chaise !
Tino siffla par les narines. Christina leva les yeux au ciel.
- Oui mais imagine que je te fais du pied, ça te gênerai pas !
- Pourquoi ?!
- Tu es homo !
- Qu’est-ce que tu en sais, je suis peut-être bi !
Christina haussa les sourcils. Tino les regarda.
- Je commence à en avoir plus qu’assez de vos disputes idiotes…
- On ne se dispute pas, on parle ! argua Christina.
- Tu parles, je réponds ! grommela Tristan.
Robbie regarda les trois autres autour de la table, sidéré.
- Suivant !! Votre prof ne vaut pas un pet !
Helen leva les yeux au ciel.
- Bah voyons…
Wallace la croisa.
- L’écoutez pas, vous botterez des culs !
- Mouais. Il est pas très encourageant quand même !
Wallace arriva au terrain. Etienne sourit.
- C’est parti…
Etienne sortit un livre de stratégie.
- … pour ton cours particulier !
Wallace grommela alors que Tino, tapi dans l’ombre, observait, la bave aux lèvres, Wallace recevoir son Précieux.
***
Roland était perplexe.
« Je m’en doutais, je l’avais envisagé, mais du coup je ne sais plus quoi en penser… »
Il était devant les écrans à manger des chips, très intrigué. Sacha arriva.
- Encore à faire une fixette pas du tout œdipienne sur ton père ?
- J’avais anticipé que la mioche de David fasse appel à lui pour les coacher, mais mon père prend vraiment à cœur son nouveau rôle…
Sacha Ketchum s’assit à côté de son « locataire ».
- Et qu’est-ce qui te gêne ?
Roland inspira.
- Je lui ai dit qu’il était libre d’intervenir ou non dans le conflit, et… il a l’air d’avoir choisi son camp… je me demande si je me suis fait un nouvel ennemi ou un allié solide…
Sacha inspira.
- T’as trente-huit ans, tu rêvais pas de faire autre chose que mater ton père sur des caméras de surveillance quand t’étais gamin ?
Roland regarda Sacha, étonné.
- … bah qu’est-ce qui te prend ?!
- J’sais pas, j’trouve que tu utilises bizarrement ton temps… à ton âge, je voyageais, je me farcissais toutes les compètes, j’avais une filmographie d’une vingtaine de films, toi… t’es un politicien à la retraite et tu joues à la télé-réalité avec une classe où y’a tes neveux et nièces !
Roland haussa les épaules.
- Tout cela me paraît complètement normal, je ne comprends pas tes réflexions…
Sacha inspira et regarda avec son locataire.
- Ils font quoi, là ?
- Ils lisent un bouquin de stratégie.
- … ok…
***
Justin et Seth déjeunaient ensemble à la cantine de l’association, observés par Bulbizarre.
- Tu as une opinion sur ce qui se passe ?
Seth haussa les épaules.
- Pas vraiment.
- Tu me dirais d’y aller ?
Seth inspira et regarda Justin.
- Si j’étais encore ton bras droit, je te dirais que tu ne peux que sortir grandi d’un tel évènement. Mais je ne suis pas ton bras droit
- … grandi ?
- Oui. Tu laisses cette grosse connasse de Teresa faire tous les trucs de merde, tu fais comme si tu avais sauvé la situation, et tu en ressors grandi.
Justin s’étonna. Seth agita les mains.
- C’est ta meilleure solution.
- Je n’ai jamais compris ce que tu avais contre elle !
- Je n’ai jamais compris ce que tu avais POUR elle ! grommela Seth.
- C’est une employée très ancienne et très importante, qui était liée à mon père et qui a des connexions qui remontent à très loin et très haut !
- Et qui en a bien profité, visiblement.
- Je lui ai laissé un peu trop de place, bon, et après ?
Seth soupira.
- Tu ne comprendras donc JAMAIS ?
- Passons… Et en tant que non-bras droit ? En tant qu’ami… qu’amant ? Qu’en penses-tu ?
Seth souffla en regardant son assiette.
- N’y va pas, c’est un piège. Partons loin d’ici, allons vivre sur une île déserte, passons nos journées à boire, manger et faire l’amour, éloignons-nous de ce trou à merde.
Justin haussa un sourcil.
- Voilà ce que je te dirais si on était toujours ensemble. On n’est plus ensemble, alors… fais ce que tu veux, je ne gère plus rien. Demande à Teresa.
Justin grimaça.
- Je te trouve… étrangement sibyllin, tu envoies des signaux plus que contradictoires, je… je suis confus !
Seth secoua la tête.
- Moi aussi, je crois.
- Qu’est-ce qui ne va pas ?
- Je n’ai plus aucune nouvelle directe de Roland depuis… des lustres. Je suis toujours en contact avec Montes, mais pas avec Roland.
Justin haussa un sourcil.
- … eeet ?
- Et je crois que ça me perturbe.
- Si tu étais mon bras droit, je te dirais… de t’en moquer et d’attendre, d’agir comme tu le fais toujours, avec mesure et réflexion.
Seth sourit.
- Ok…
- Mais tu n’es plus mon bras droit, alors… fais comme tu veux.
Les deux hommes se mirent à rire.
***
Naomi passa la pause à boire beaucoup d’eau, à aller faire pipi dans les banales toilettes du tribunal, et à parler.
- Tu te débrouilles à merveille ! sourit Malcolm.
- Je sais pas trop, j’ai l’impression de servir à rien et qu’ils font tout le boulot…
- C’est le but, vous êtes une sorte de plaque tournante…
Malcolm regarda sa femme, stupéfait. Claire rectifia.
- … de la justice ! Une plaque tournante de la justice !
- … votre reformulation ne change pas ma réaction… geignit Naomi. Bref, je vais continuer, mais vous auriez pu mouiller la chemise, monsieur « J’ai une procédure qui porte mon nom » !
Malcolm serra les dents.
- Une élève très très chiante que j’ai giflé très très fort.
- … c’est toujours mieux que de l’avoir tripotée !
- … beuh…
- C’est un point de vue qui se tient ! admit Claire.
Le juge annonça la reprise. Justin semblait s’être calmé. C’était à l’avocat général de plaider. Naomi lui lança un regard déterminé.
- L’accusé, ou plutôt devrais-je dire le condamné…
- Objection !
L’avocat général regarda Naomi qui avait levé la main en criant son objection.
- Quoi donc ?
- Primo, vous avez oublié de dire « La cour fait remarquer que ».
Le juge – et une bonne partie de la salle – ricana pendant un bon moment. L’avocat général devint tout rouge. Les juristes eux-mêmes riaient de bon cœur.
- Secundo, vous ne pouvez pas le qualifier de condamné !
- Je l’ai suggéré !
- Et vous êtes devant une cour, pas sur Twitter, donc… des faits réels, s’il vous plait !
Le juge toussota.
- Elle a raison, j’allais vous rappeler à l’ordre moi-même, Maître Marble.
L’horripilant avocat général grommela.
- Je reprends. L’accusé ici présent a joué avec les règles. Il a transformé son entreprise en internat afin de former des soldats avec des méthodes plus que discutables. L’une d’elles était dans votre classe, mademoiselle Kingsley !
- Le confirmez-vous, mademoiselle Kingsley ?
- Oui, je le confirme.
- La jeune Amélia Levy, si je ne me trompe ?
- Vous ne vous trompez pas.
- Bien. Continuez, Maître Marble.
- L’accusé a usé de son influence de patron d’entreprise pour influencer un candidat puis un Président d’Association. Il a usé de la menace ainsi que de la force. Enfin, il a perpétré une attaque sur…
- Objection !
Ahanement de la salle. L’Avocat Général inspira.
- QUOI, ENCORE ?
- Monsieur Truce n’a perpétré aucune attaque ! signala Naomi.
- ALLONS BON ! s’étouffa presque l’avocat général.
- Une fois la bataille achevée, nous avons eu la certitude que les ficelles de toute cette histoire avaient été tirées par un seul et même homme : Roland Smirnoff.
- Comment ça, la certitude ?
- Il nous l’a dit lui-même.
Brouhaha dans la salle. Justin baissa la tête.
- D’accord, mais ça ne change rien aux crimes précédents !
- Qui sont antérieurs à celui pour lequel il est jugé ici.
- Mademoiselle, vous savez comment fonctionne le système judiciaire Poképolite ?
- Mal.
Grand « OH ! » de la salle. Malcolm se pencha vers Claire.
- Elle nous fait quoi, là ?!
- Elle est parfaite, je trouve ! sourit Claire.
L’avocat général s’étrangla presque et regarda le juge en pointant Naomi du doigt.
- C’est un outrage !! C’est. Un. OUTRAGE !
- Mademoiselle Kingsley, tenez-vous en au cas.
- Pendant qu’il me demande si je sais comment ça fonctionne ? Quoi, la fille noire n’est pas assez bien éduquée pour parler devant une cour ?
- Ce n’est pas ce que…
- Vous voulez regarder mes dents, aussi ?
- Tenez-vous en au cas !! grommela le juge, gêné.
- Vous me demandez de m’en tenir au cas, DEMANDEZ A VOTRE AVOCAT GENERAL de s’en tenir au cas et de ne pas DIGRESSER sur le passé judiciaire de monsieur, qui n’a pas été jugé en grande partie parce que notre système judiciaire favorise les riches et les puissants.
- Mademoiselle Kingsley !
- Monsieur le Juge ! répondit Naomi.
La cour semblait impressionnée. Naomi reprit.
- Vous le jugez pour l’affaire pour laquelle Roland Smirnoff devrait être jugé. Si vous voulez le juger pour d’autres affaires, convoquez-le à un jugement ultérieur.
- Mademoiselle Kingsley, le système judiciaire Poképolite implique que tout individu convoqué pour un fait est jugé pour l’ensemble des faits qui n’ont fait l’objet d’aucun jugement préalable !
- D’accord. Pourquoi n’a-t-il pas été convoqué pour les meurtres ou les supposés meurtres ?
Silence de la cour et de l’avocat général. Naomi, enflammée, ne lâchait rien. Justin la regardait avec fascination.
- Il me semble, la dernière fois que j’ai vérifié, que le meurtre, c’est mal. Pourquoi n’a-t-il pas été convoqué devant la cour quand il a supposément tué des gens ?!
Le juge regarda les juristes qui serrèrent les dents en secouant la tête. L’avocat général inspira.
- Ce n’est pas l’objet de…
- AAAAAAAAAAAAH. Vous voyez ! Ce n’est pas l’objet. DONC, tenez-vous en au cas ci-présent.
- Non, le bien-fondé du système judiciaire n’est pas l’objet…
- Je défends mon client – qui ne me paie pas, mais passons – je défends mon client qui est jugé parce qu’il a attaqué une école le jour de la remise des diplômes, ce alors que nous étions préparés. Vous additionnez deux plus deux, vous comprenez tout de suite que quelqu’un a commandité l’attaque.
- … c’est censé être ma plaidoirie !! grommela l’avocat général.
- Vous êtes nul.
Ahanement de la cour. Claire se pencha vers Malcolm.
- C’est quoi cette classe ?!
- C’est la classe à Roland, tu t’attendais à QUOI ? marmonna vertement Malcolm.
Naomi inspira.
- Quelqu’un a commandité l’attaque et si Justin Truce était là, et si…
- Qu’a fait monsieur Truce pendant ladite attaque ?
Naomi regarda l’avocat général qui venait ENFIN de poser une question pertinente.
- Hein ?!
Du coup, elle était sonnée.
- Je… n’en sais rien.
- Mais vous y étiez, enfin !
- Nous étions dispersés, j’ai moi-même affronté diverses personnes…
- Faut-il encore que nous demandions à l’accusé ?
- Bah écoutez, moi je ne l’ai vu qu’à la fin ! souffla Naomi.
Le juge leva les mains.
- Qu’à la fin ?
- Il est resté dans les jardins tout du long, avec un de mes camarades, je crois. Je suppose.
Seth regarda Justin, ses sourcils semblant intrigués. Le juge regarda Justin.
- Vous êtes autorisé à vous exprimer.
Justin regarda Naomi qui plissa les yeux. « Pas une histoire de fesses, pitié… comment je regarde Tristan dans les yeux en sachant ça, moi, après ? Et même Wallace !... dire que je ne le reverrais peut-être pas l’année prochaine… avec toute cette merde, j’ai eu à peine le temps d’y penser, tiens ! »
- Je… euh… nous avons… parlé…
- Seulement parlé ?
Les gens dans la salle – dont Walter – se demandaient pourquoi Naomi croisait les doigts et trépignait comme si elle allait faire pipi.
- On s’est battus… et… euh… on a encore parlé…
- Vous êtes devant une cour, vous n’avez pas le droit de mentir, monsieur Truce.
- C’est la stricte vérité. Ensuite…
- Ensuite ?
- …
Naomi secoua la tête. « Ne me dis pas que vous avez baisé sinon je brise cette vitre et je te pète la gueule ! »
Justin inspira.
- Cinq personnes sont venues pendant cet entretien avec monsieur Gribble. Le premier, c’était un enfant.
Naomi pencha encore plus la tête. « Tais-toi, esprit mal placé de Naomi… »
- Ensuite c’étaient les parents de Wallace, qui se sont tenus à distance en voyant que moi et leur fils ne faisions que parler.
- Oh Seigneur MERCI !
Tout le monde regarda Naomi qui semblait au comble du soulagement.
- … excusez-moi, votre honneur.
- Euh, certes… D’accord, et les deux autres ? demanda le juge à Truce.
Justin inspira.
- Roland d’abord, Seth ensuite.
Seth baissa la tête.
- Avec Roland, ça a été un affrontement pur et simple que j’ai…
Justin inspira.
- … mené. Et Seth…
Justin soupira.
- Seth n’aura qu’à s’expliquer sur ce qu’il a fait à son propre procès.
- Je… euh, la cour a cru comprendre que vous et monsieur Corrigan étiez dans une sorte de relation avant ces évènements…
- Objection, non pertinent ! releva Naomi.
L’avocat général agita la tête.
- Cela a pu jouer un rôle…
- Dans vos fantasmes, peut-être, admit Naomi.
Rires dans la salle. L’avocat général lâcha le sujet. Justin souffla. Naomi avait fait ça pour éviter qu’un lien puisse être fait entre les crimes plus graves de Seth et son « client ». Justin voulait juste que son honneur familial ne soit pas entaché.
- Bref… Il n’empêche que vous êtes le PDG de Direction Dresseurs et que vous avez utilisé votre entreprise au mépris de sa raison sociale et à des fins criminelles ou potentiellement criminelles. Une objection, mademoiselle ?
- Vous n’avez rien dit de bête, donc non.
- Bien. Euh… je suppose…
Naomi haussa les épaules. Le soleil se faisait bas dehors. « Les autres doivent être rentrés après avoir été interrogés… j’espère… Mais oui, sois optimiste, Naomi ! »***
Le cours d’Histoire avait été réquisitionné également.
- En temps de guerre, le rôle de chaque soldat est d’assurer à sa manière la victoire. Vous n’êtes pas des guerriers invincibles. Vous ne pouvez pas vaincre seuls. Vous devez être unis. Toutes les stratégies militaires de l’histoire se basent sur l’unité, l’union qui fait la force. Je ne vous parle pas de la maxime, je vous parle d’une vérité. Tous les peuples guerriers ont compris qu’ils ne gagneraient qu’en étant unis. La stratégie d’attaque et de défense romaine ? La tortue ! Resserrés les uns contre les autres, boucliers bien disposés, lances en avant, les romains étaient invincibles.
Naomi prenait vaguement des notes. Walter la regarda.
- C’est juste le discours motivateur de début de cours…
- J’aime bien ses discours. Même si je sais que c’est de la propagande.
- J’écoute d’une oreille, ça me fout la gerbe, ce langage guerrier.
- C’est notre prochaine échéance. La dernière, faut espérer.
Naomi hocha la tête.
- Mouais.
Etienne continuait son « cours » alors que Naomi ne pouvait s’empêcher de soupirer.
***
Le midi, les élèves avaient trouvé un compromis et formé de multiples ensembles de gens qui parlaient ensemble.
- C’est sympa de proposer mais on comptait faire un resto ! sourit Quinn.
- Ca fait un peu trop longtemps que j’ai pas dorloté ma Quinn, alors pour fêter nos cinq mois, je me suis dit que j’allais sortir le grand jeu ! sourit Francis.
Wallace regarda Tristan qui haussa les sourcils.
- Quoi ?
- Rien… rien, rien, rien…
- Mouais.
Tino mâchonnait son plat.
- C’est vraiment dommage que tu aies cette réunion de famille, ça aurait été sympa que tu sois là pour la soirée de Tristan…
- Ah bah j’ai des obligations, hein ! souffla Christina. « Et surtout je ne peux pas le blairer… »
Benjamin soupira.
- Ca m’aurait fait plaisir que tu viennes !
- Je les aime bien, c’est pas le souci, c’est juste que je vais me sentir de trop. Ca, et le fait que c’est la grande soirée Mahjong de la famille. Et je tiens à rafler une partie de l’héritage de mamie !
- … tu es pire que mes cousins… geignit le jeune juif.
Fey semblait anxieuse.
- Et si j’accouche pendant un entrainement ?!
- … bah y’aura tout le monde, on appellera les secours, voilà quoi… marmonna Mike.
- Je veux pas être ce genre de fille noire qui accouche n’importe où !!
James et Steven se regardèrent.
- C’est un vrai cliché ça ?! s’étonna Steven.
- Elle se croit dans le ghetto… Tu es martiniquaise, Fey ! souffla James.
- Et pis ?! Ici je suis juste une immigrante comme les autres, donc une renoi du ghetto !
- Je ne sais plus quoi dire, moi… geignit Ana.
Santana et Rebecca étaient parties dans un débat sur la politique.
- Regarde ce qui se passe dans les autres pays, tu verras que ce qui se passe à Poképolis n’est pas normal.
- Mais ça se normalise, tu ne peux pas le nier !
- On n’y est pas encore. Si Holland Tenorman passe un jour, là, le pays changera vraiment ! admit Santana.
- C’est pas demain la veille, ma pauvre. La noblesse Poképolite aura la mainmise sur tout encore longtemps. Et j’en suis, je sais de quoi je parle !
Chaque midi et au grand désarroi d’Orson, Amélia mangeait à toute vitesse et partait. Elle avait essayé parfois de manger à l’écart, mais le nouveau professeur la rappelait alors vivement à l’ordre. Benjamin s’était penché vers Orson.
- Il serait jaune, ferait trois mètres et aurait une foule de tentacules, ça serait pas étonnant !
Orson avait agité la tête. Benjamin avait poursuivi.
- … en plus ça se tient, monsieur Smirnoff est plus proche du cercueil qu’autre chose !
Orson n’arrivait même pas à en sourire. Il semblait prendre la demande de Wallace comme un fardeau. M’enfin, il s'y tenait parce que c’était un gentil garçon.
Naomi regarda ses camarades qui mangeaient ensemble de force mais qui continuaient à fonctionner par bandes. Elle inspira. « Rien ne change vraiment… tout reste pareil… est-ce que moi aussi, je vais rester la même personne… »
Perrine inspira lourdement.
- Tu peux arrêter ?!
Naomi la regarda.
- Quoi ?
- Tu peux arrêter de cogiter comme une idiote, là ?!
Naomi regarda Walter et Robbie en pleine conversation sur l’immobilier et se concentra sur Perrine.
- Je fais ce que je veux !
- Ouais, mais pas te bourrer le mou toute seule. J’te connais comme si je t’avais fait et je vois bien depuis le début de la journée que tu te prends la tête. La pression, on l’a tous. Relax, ma sœur.
- Tu ne VIENS PAS de dire ça !
- Oh que si, putain.
Naomi regarda Perrine, étonnée. Perrine haussa les épaules.
- Rien à foutre. C’est la fin de l’année. Hausse les épaules, toi aussi. Respire.
Naomi hocha la tête.
- Merci, connasse.
- De rien, connasse. Arrête de psychoter.
Naomi agita la tête. Plus facile à dire qu’à faire.
***
- Ils ne communiquent pas assez… ils y sont presque, mais ça ne suffit pas…
Helen regarda Etienne Smirnoff avec qui elle avait pris l’habitude de manger, à l’étonnement de Blandine, Sandrine et Ambrose.
- Vous croyez qu’elle est devenue gérontophile ?! s’étonna Sandrine.
- C’est le fric. Elle est devenue croqueuse de diamants, c’est évident… marmonna Sandrine.
- J’veux bien qu’il ait de bons restes mais quand même…
Les deux femmes regardèrent le professeur de littérature qui inspira.
- Excusez-moi, on traverse une période un peu compliquée avec Stella…
- Vous avez viré votre cuti ?! s’étonna Blandine.
- C’est la fille qu’ils ont adopté avec Harlan, Blandine, voyons !
- Je… suis ravi de voir que vous m’écoutez quand je parle… grommela Ambrose.
Denis arriva avec son plateau, vit la situation et soupira.
- Je vois que monsieur Smirnoff aime passer du temps ici…
- Moi ça me choque qu’un professeur à la retraite travaille encore. Je cotise et je tiens à avoir ma retraite, voir des mecs comme ça qui se disent « ah bah non moi je travaille encore après et je vous emmerde », ça me fout un peu les boules ! grommela Blandine.
- C’est comme la nouvelle prof de fondamentaux, madame Prutt ! Soixante-dix-sept ans ! souffla Sandrine.
- Y’en a qui n’ont aucune gêne. Et pendant ce temps-là, des jeunes cherchent du travail !
- J’te jure !
Ambrose agita la tête.
- J’ai aucun problème avec ça, moi… chacun fait ce qu’il veut…
- Réponse de gay ! grommela Sandrine.
- Hah ! ricana Blandine.
Denis secoua la tête. Odile et Vivienne arrivèrent et constatèrent la situation Helen/Etienne. Odile regarda Vivienne qui haussa les épaules.
- Elle les prend au cercueil diront les uns, il les prend au berceau diront les autres !
La tablée éclata de rire.
Etienne se tourna vers Helen.
- La blonde mange et part à chaque fois…
- Elle travaille pour l’autre camp, c’est Orson qui la surveille.
- Le petit gros ?... oui, je suppose que c’est le moins suspect… Dites voir, la nouvelle prof de fondamentaux, là… enfin, nouvelle, nouvelle…
- Dit-il avec ses soixante-dix piges au compteur.
- Elle vient d’où ?
- Elle remplace Ulrich Paxton, Jerry Callum et le trèèès oubliable Eugène Michelot, et les élèves ont l’air de l’apprécier, elle, donc honnêtement…
- A l’inverse du petit gros, elle est ultra suspecte.
Helen haussa les épaules.
- Madame Prutt ? Suspecte ?
- Je la soupçonne d’être une reptilienne.
- … monsieur Smirnoff…
- Je suis sérieux. Vérifiez sa peau.
- Elle est de votre génération, vous devriez vous entendre…
- Je suis pas aussi ratatiné !
- Vous voulez que je demande aux enfants d’enquêter ? Holland a des réseaux, il peut tirer sur certains fils…
- Nan, nan, vous ne me suivez pas, je parle par métaphores, idiote !
- Connard !
- Elle est dans le camp ennemi !
Helen haussa les sourcils.
- … encore ?!
- Eh bien oui, encore. Votre école est un gruyère à infiltration d’ennemis, faut vous y faire.
- … mais elle est super méga vieille !
- Mais ça ne change rien à l’affaire ! Je suis super méga vieux, je suis un dresseur émérite et un esprit très vif. Par ailleurs, je me suis infiltré dans cette école avec une facilité déconcertante. Elle et moi on est pareils. Sauf pour le ratatinage. Regardez-là.
Helen regarda vers la petite dame qui tenait systématiquement à manger seule.
- Toute seule à mastiquer sa nourriture, le regard perdu dans le vide, on dirait une psychopathe qui prépare son plan pour assassiner les élèves en distribuant des pastilles de menthe empoisonnée.
Helen regarda Etienne qui hocha la tête très sérieusement. Helen inspira.
- Etienne. Vous permettez que je vous appelle Etienne ?
- Demandez à ma femme.
- Je vous connais, je sais comment vous êtes. Je ne suis pas une de vos élèves. Vous n’avez pas à jouer avec moi ou à parler par métaphores. Je sais qui vous êtes. Un grand entraineur mais un être humain absolument pas doué socialement. Vous avez des soupçons ? Enquêtez. Vous voulez que les élèves se rapprochent ? Observez. Vous voulez que je vous ressemble ?
Helen se leva avec son plateau.
- Oubliez !
Elle partit de la cantine. Etienne sourit en faisant face au mur. Il sortit Capidextre.
- Mon petit Erwan, c’est trop facile, beaucoup, beaucoup trop facile.
Le singe ricana en agitant ses queues.
Ambrose regarda Vivienne, Odile, Blandine et Sandrine.
- Ah bah vous voyez, il est tout simplement poképhile !
Tirages de langues dégoûtées à table. Denis secoua la tête. « Heureusement que je ne dois surtout pas leur dire que c’est mon beau-père parce que nom d’un Caninos… »
***
Quelqu’un vint parler au juge qui grimaça.
- Euh… je… crois devoir signaler un rebondissement inattendu au dehors…
« Allons bon… » songea Naomi.
- Allons bon. Quoi donc ? demanda l’avocat général.
- Eh bien il semble que le commissaire à l’origine de cette enquête soit en fuite avec un criminel évadé, deux otages, et qu’il serait parti en chasse de Roland Smirnoff.
Naomi regarda Justin qui plissa les yeux. Le juge regarda Justin.
- Un de vos alliés ?
- Non…
- Le commissaire en question est Sacha Nolan… marmonna une juriste.
- Et le criminel évadé est Tobias Morris.
Le juge regarda Justin Truce qui secoua la tête.
- Inconnus au bataillon !
- Je demande aux juristes une fouille de l’organigramme de Direction Dresseurs.
Un jeune homme en chemise aux épais cheveux noirs haussa ses épais sourcils.
- Pas de trace, en effet. D’aucun des deux.
Le juge haussa les épaules.
- Alors ça n’a rien à voir avec ce qui nous occupe.
- Euuuh…
- Quoi, mademoiselle Kingsley ?
- … rieeen à part qu’un grand intervenant du conflit de ce matin est genre, en fuite.
- Monsieur Nolan ?
- Vous le faites exprès ?! grommela Naomi.
- Quoi qu’il en soit, ça ne change rien au déroulement de ce procès.
- Mais bien sûr que si, enfin ! Cela concerne de plein pied l’affaire qui nous intéresse ! Pourquoi Roland Smirnoff n’est pas ici ?
Le juge leva les yeux au ciel.
- Mademoiselle, si je devais convoquer toutes les personnes impliquées dans cette affaire…
- … ce serait éminemment logique vu que… c’est un procès qui se tient, hein !
La salle éclata de rire. Le personnel du tribunal, lui-même, ne put réprimer un sourire. Le juge haussa les sourcils, courroucé. L’avocat général regarda le juge, éberlué. Justin Truce grimaça.
- SILENCE ! SI-LENCE !!! COMMENT OSEZ-VOUS !
- C’est à moi que vous parlez ?!
- Modérez votre ton, jeune fille !
- Non.
Le juge inspira. Naomi souffla.
- La police est venue, mais Roland Smirnoff et ses collaborateurs sont partis libres, et vous avez arrêté mes camarades – qui, jusqu’à preuve du contraire, sont des victimes puisqu’ils étaient dans leur établissement…
- Attendant la venue du Président pour lui tendre un piège !
- Le jour de leur remise de diplômes, bah oui, ils n’ont que ça à faire. Et lui aussi d’ailleurs, le Président n’a que ça à faire de venir avec ses hommes un lundi matin dans une école vide pour… faire une visite surprise, je suppose ?
Rires de la salle.
- Mais vous l’avez arrêté… enfin, non, il a disparu avec monsieur Corrigan après la fin de l’attaque…
- Evidemment, puisqu’il nous ont été remis…
Naomi regarda l’avocat général. Le juge sembla gêné. Justin ne comprenait pas trop ce qui se jouait.
- … de leur plein gré ! Il nous ont été remis de leur plein gré !
- … ça ne veut rien dire ! gronda Naomi, un peu sur les nerfs.
Malcolm hocha la tête. « C’est gagné. »
- J’ai peur de mal comprendre… marmonna Naomi en regardant l’avocat général et le juge.
Malcolm regarda vers Jim Patterson qui leva un pouce.
- Je… euh… la Sténo ne rendra pas compte de ce passage.
- La Sténo n’a aucun ordre à recevoir d’un type qui a de toute évidence eu son diplôme par correspondance ! grommela Naomi.
- Vous vous êtes regardée ?! Vous avez un diplôme au moins ?!
Ahanement de la salle. La juriste en chef se leva, affolée.
- On ajourne la séance, ça vire au pugilat !
- Non, non, non ! Madame Kingsley, vous souhaitez que nous en restons à l’affaire, nous en restons à l’affaire. Je donne la parole à l’avocat général.
L’avocat général inspira et lut ses notes.
- Euh… Nous… euh…
Naomi regarda le juge, en sueur, et l’avocat général qui balbutiait.
- Oh bordel de merde ! souffla Naomi.
Le juge, l’avocat général, les juristes, la sténo… Tout le monde regarda Naomi et se tut. Elle hocha la tête.
- J’y crois pas. Waouh ! Alors celle-là, si je m’y attendais…
- Plait-il ?
- Roland Smirnoff vous a remis Truce et Corrigan en échange de sa propre liberté ! Il vous a, en quelque sorte, achetés !
Brouhaha terrible dans la salle. Malcolm souffla. Claire lui tapota le dos.
- C’est bientôt fini…
- Je sais, je sais, mais ça fait un choc quand même.
- Elle a été bien choisie, elle était assez intelligente pour deviner. Wallace Gribble n’aurait pas fait mieux ! sourit Claire.
L’avocat général ne savait plus où donner de la tête. Le juge était furieux.
- C’est inadmissible, mademoiselle !
- Vous êtes dans un tribunal, monsieur le juge, vous ne pouvez pas vous parjurer.
- JE NE SUIS PAS SUR LE BANC DES ACCUSES !
- Roland Smirnoff non plus.
- C’est JUSTIN TRUCE qui vous attaqués !
- C’est Roland Smirnoff qui nous a montés les uns contre les autres. Mes camarades ont répété la même chose aux policiers, je suppose. Roland Smirnoff nous a dit trois choses avant l’arrivée de la police.- Okay… avant toute chose, la police va arriver et vous arrêter.
Ana se faisait soigner sur le lit d’une ambulance qui lui mettait le bras en écharpe. Steven était porté par Mike, encore en état de choc. Les élèves étaient hagards ou trempés, ou couverts de gravier rose, tout comme Helen. Autour d’eux tout n’était que ruines et champ de bataille. Les familles et les professeurs étaient tenus à l’écart par les forces de sécurité de la ville.
- Je sais, je sais. Mais vous allez vous en sortir.
- Ne leur mens pas.
Roland se retourna vers Rachel et lui tira la langue en faisant un bruit de pet.
- … tellement adulte… tellement toi… soupira la femme.
- Ok. Je veux que vous fassiez trois choses avec les enquêteurs. D’abord, vous allez m’accuser.
- Ah bah putain on va pas se gêner ! grommela Tristan.
- Je veux mon neveu… souffla Mike.
- Ah bah ça ! souffla Fey.
- Inutile de nous le dire… souffla Rebecca.
- Comme si on allait faire autre chose… grommela Francis.
- SILENCE ! La deuxième chose, c’est que vous allez mentir à la police.
Regards intrigués.
- … et enfin, vous allez me désobéir.
- J’y crois pas, c’est quoi cette journée de merde ! soupira Quinn.
- J’ai mal à la tête… geignit Orson.
- Et moi donc… soupira Amélia.
- … tu essaies juste de nous embrouiller !! grogna Perrine.
- Non, pas du tout. Je tiens à ce que vous me fassiez accuser. Je tiens également à ce que vous mentiez à la police, parce qu’elle est en tort dans cette histoire. Et je veux aussi que vous me désobéissiez parce que je ne suis pas votre ami.
Rachel leva les yeux au ciel.
- Tu ne t’en tireras pas comme ça…
- Hey, je m’en tire comme je veux ! Bref. Je vous souhaite bon courage dans cette épreuve, je serais avec vous pour vous soutenir…
- Et aller en taule à notre place ? demanda James.
- C’est le but, oui ! sourit Roland. En attendant, j’ai d’autres choses à vous dire, ça concerne mon intervention dans vos vies durant ces trois ans…
Les élèves regardèrent Roland, intrigués.
- … je suis obligé de le faire sinon la dame derrière me frappe…
- Non, absolument pas, mais ça t’arrange bien de leur faire croire ça … grommela Rachel.
- Alors, vous allez pas aimer et peut-être même vouloir me frapper, mais voilà… - Il voulait qu’on le fasse accuser pour brouiller les pistes, qu’on mente à la police parce que la police n’était pas digne de confiance et il voulait qu’on lui désobéisse. Donc Wallace Gribble m’a envoyé ici en suivant non pas les directives de Roland, mais celles de son ex-femme, Rachel. Si j’avais suivi les directives de Roland, j’étais censé couler Truce et sauver Seth.
Seth haussa un sourcil étonné. Justin le regarda.
- Montes… à tous les coups…
- Mais je pense que monsieur Corrigan a été trop loin et doit être jugé par une cour plus compétente, une juridiction pénale. Je ne peux rien pour lui.
- Très clairement… marmonna l’avocat général.
- Je modère mon accusation, je ne pense pas que vous ayez été achetés, je pense que vous avez été influencés par la personne qui vous a remis les deux accusés.
Le juge gronda de plus belle.
- Mademoiselle, vous allez vous prendre un de ces procès pour outrage à magistrat !!
- Euh, votre honneur…
Le juge et l’avocat général se tournèrent vers les juristes.
- On vient de voir que Maître Andrew Marble avait étudié avec le professeur Smirnoff…
Brouhaha dans la salle. Malcolm plissa les yeux. Claire haussa les siens.
- Il a été jusque là ?!
- C’est louche, cet homme est trop âgé…
L’avocat général agita les mains.
- Etienne Smirnoff ! J’ai étudié avec Etienne Smirnoff ! Qui est un homme absolument détestable !
- … on n’a pas fréquenté le même… monsieur Smirnoff est un excellent professeur !
- J’ai travaillé avec lui dans le cadre de recherche pour des cas stratégiques ! C’était même avant la venue de Roland Smirnoff au monde, il n’était même pas marié !
Les juristes vérifièrent.
- … exact. Et ça n’a duré qu’un an à peine.
- Je dirais bien que c’était une année de merde, mais j’y ai rencontré ma femme, alors…
Naomi s’étonna.
- Vous êtes marié ?
- Oui.
- Vous ?!
- … oui !!
- … elle était consentante ?!
- DITES !
- J’demande, j’demande…
- Peut-on reprendre le cours de ce procès ! grommela le juge. Passons sur vos accusations farfelues que vous retirez bien évidemment…
- Pas le moins du monde, monsieur le juge. L’avocat général est disculpé, mais vous…
- Je n’ai PAS été influencé, bon sang !! On m’a demandé de faire mon travail, voilà tout.
- Qui vous l’a demandé ?!
- Mademoiselle, on nous a livré ces deux criminels…
- Par Roland Smirnoff ?
- NON ! Absolument pas !
- QUI ? Qui vous a livré Truce et Corrigan ? Monsieur Truce !
- Truce n’a pas le droit de s’exprimer ! grogna le juge.
- Alors demandez-lui ! Questionnez-le ! Cela se fait dans les autres pays de questionner l’accusé.
- Nous ne sommes pas dans un autre pays, MADEMOISELLE !
- Eh bien c’est DOMMAGE, VOTRE HONNEUR !
Naomi tenait tête au juge et l’avocat général n’osait plus en placer une.
- Rhumann Stockwell.
La cour se tourna vers Justin Truce.
- Personne ne vous a autorisé à parler !! grommela le juge.
- C’est Rhumann Stockwell qui nous a livrés au tribunal. Suite à l’accord que mon cher… acolyte…
Seth baissa la tête.
- … a passé avec… cette pourriture esclavagiste.
Naomi regarda Seth avec beaucoup de jugement. Seth plissa les yeux.
- Tu voulais sauver ta peau… et après tu viens me faire la morale… grommela Justin à voix basse.
Andrew Marble regarda le juge qui serra les dents.
- Je suppose que vous et Rhumann Stockwell avez discuté…
- Maître Marble, je n’ai aucun compte à vous rendre !
- Non, certes, mais moi j’ai un droit spécifique à ma fonction dans le cas où la défense du cas est mise en danger. Messieurs les juristes, qu’on enlève le bâillon de ce jeune homme !
Le juge se tourna vers l’avocat général qui inspira.
- Et qu’on désigne sur le champ un autre juge !
Tumulte dans la salle. Les juristes, la sténo, le public, tout le monde était halluciné. Naomi s’accrochait à la barre, sentant qu’elle allait s’effondrer.***
- C’était… complètement indécent…
Seth rajusta son pantalon.
- Ecoute, de toute évidence, on en avait envie tous les deux…
- Mais pas comme ça…
Justin se lava les mains.
- Pas dans les toilettes d’un restaurant !
- Ca ne vaut pas réconciliation, évidemment.
- Evidemment que non… mais c’est embarrassant.
Seth agita la tête.
- Cela ne m’avait pas manqué, tes réactions de noble effarouché.
Justin inspira.
- Je règle l’addition puisque je suppose que tu n’as pas d’argent.
- Tu supposes bien. Disons que ça paye peu…
Seth agita la main. Justin grimaça.
- … de faire ton boulot. Ah, tu pensais que je parlais de…
Justin secoua la tête et sortit, éhonté. Seth secoua la tête.
- Si encore je pouvais faire comme si je ne t’aimais pas tout en te trahissant… tchhh…
***
- Lola ! Euh… Madame Prutt !
La vieille Lola se tourna vers Helen qui la rejoignait en courant comme une grue.
- Mademoiselle Clover, que me vaut ?
- Eh bien, euh… je voulais juste discuter !
- Discuter, hein.
- Oui… euh… c’est toujours sympa de parler avec le reste de l’équipe pédagogique !
- C’est vrai, c’est vrai, nous formons une équipe pédagogique autour de cette joyeuse petite classe. Et autour des autres classes aussi. Il ne faut pas oublier les autres classes.
Helen hocha la tête. « Ca y est, je me rappelle pourquoi je ne lui parle pas beaucoup. Elle est trop bizarre !!! »
- Euh, dites-voir, vous êtes au courant que nous avons eu beaucoup de gens qui se sont succédés à votre poste…
- Ah oui…
- Dont des gens peu recommandables…
- C’est vrai.
- Et je voulais juste m’assurer que vous n’étiez pas… une sorte d’ennemi infiltré, vous voyez ?
Lola regarda Helen et éclata de rire, ce petit rire sifflant de vieille dame. Helen grimaça.
- Euh…
- Thihihihihihihi !
- … c’est… pas… drôle !
- Vous feriez une grande espionne, madame Clover !
- N’est-ce pas ! Haha !
- Ecoutez, je veux bien vous révéler un pan de mon sombre passé.
- Ah oui vraiment ?
- Oui, vraiment.
Helen était toute ouïe. Lola inspira.
- Mon premier travail fut d’être gouvernante.
Helen s’étonna.
- … genre… nounou ?!
- On peut dire cela, oui.
- La nounou de qui ?
- Eh bien d’abord d’une certaine madame Edelson. Et puis je me suis occupée de son enfant.
Helen plissa les yeux.
- Edelson ?
- La petite Anya, quelle adorable enfant… quel dommage qu’elle ait si mal tourné…
Helen agita la tête.
- Ah…
Son Strassie se déclara derrière elle. Lola regarda le petit roc lévitant.
- Quelle adorable chose !
- … oui, euh… je… il… aime bien s’agiter quand quelqu’un ment…
- Ah. Vous êtes une bien meilleure espionne que je le pensais, madame Clover…
Lola s’éloigna.
- Dommage que vous ne soyez pas très futée…
Helen fit la moue.
- Mais-heu… je suis futée ! Hein, DeRosette ?
Strassie émit de petits bips en tournoyant.
- J’ai plus qu’à chercher c’est qui Anya Edelson… Pfffffffff…
Helen inspira.
- Ou pas, vu que j’ai juste fait le sale boulot d’Etienne Smirnoff, qu’il se débrouille… pourquoi je me laisse aussi facilement manipuler par les Smirnoff !! grommela la prof d’histoire.
***
- Et nous commençons donc le cours de fondamentaux…
Lola restait sur sa sempiternelle chaise. Naomi et les autres élèves suivaient comme à leur habitude.
- … mais avant cela je voudrais clarifier un point important.
Wallace inspira.
- Voilà, c’est la fin de l’année, tout part en cacahuète…
Rebecca regarda Violette et Santana.
- Cent Pokédollars sur un cancer en phase terminale !
- Rebecca !! grommela Violette.
- Tu peux monter jusqu’à cinq cent, je pense…
- Santana !!!
Lilian et Léon se regardèrent. Tino leva les yeux au ciel. Mike, Steven et James se regardèrent.
- Voilà. On a porté à mon attention le fait que vos précédents professeurs étaient pour la plupart des ennemis infiltrés. Je tiens à vous informer que je n’en suis pas une.
Walter plissa les yeux.
- On ne vous a… jamais vraiment soupçonnée, en même temps…
- Vraiment, petit Ponyta ? Je suis vexée…
- Vous êtes juste une petite vieille folle pour nous… marmonna Steven.
- Ah… ah bon… alors je suppose que votre professeur d’histoire s’était fait du mouron pour rien !
Wallace plissa les yeux. Naomi haussa les sourcils. Lola commença son cours sans plus de procès.
***
- Elle est carrément suspecte, nan ? demanda Perrine.
Les élèves rangeaient leurs affaires dans les casiers. Wallace regarda Perrine.
- Je vois ce que tu veux dire. Déjà le fait qu’elle parle aussi légèrement de la situation. « Ah oui au fait, on m’a dit que. » Et le fait qu’elle tienne clairement à nous dire qu’elle n’est pas une ennemie…
Walter inspira.
- Je pense vraiment qu’elle est juste zinzin et qu’on n’a pas à s’occuper d’elle.
- Je pense au contraire qu’on doit la surveiller. Elle semble consciente de la situation et même un peu trop à l’aise avec. C’est comme si elle savait ce qui allait se passer et comment ça allait se finir, ou alors comme si elle avait la clé d’un secret…
Naomi agita les mains.
- Je sais pas comment le formuler !
- J’ai noté les surnoms qu’elle a donné aux gens depuis le début de ses cours… marmonna Perrine.
- Ah ouais ?
Perrine montra une page de son carnet.
- Certains qu’elle a dit en classe, d’autres qu’elle a noté sur des copies.
Wallace : Grainipiot
Moi : Sancoki (è_é)
Walter : Ponyta
Naomi : Tylton
Tristan : Pichu
Santana : Machoc
Mike : Parecool
Rebecca : Chuchmur
Violette : Rhinocorne
Amélia : Arakdo
Robbie : Ponchiot
Léon : Flabébé
Lilian : Monorpale
Steven : Fantominus
James : Kranidos
Tino : Nucléos
Ana : Polarhume
Fey : Tournegrin
Christina : Coquiperl
Clive : Crikzik
Andréa : Funécire
Lucy : Manzai
Quinn : Skitty
Orson : Etourmi
Benjamin : Chenipan
Francis : Zigzaton
Holly : Ningale
Gina : Dynavolt
Wallace inspira.
- Ils adorent nous donner des petits noms. Je vais commencer à croire que le but de ces trois années était de dresser des portraits chinois…
- Pourquoi ça ne m’étonnerait même pas… soupira Perrine. Bref, y’a rien de suspect. D’après mon père, ce n’est pas de la Pokémonologie, elle nous donne juste des surnoms, c’est comme si on était des Pokémon pour elle.
Naomi agita la tête.
- Pourquoi on ressent le besoin de s’intéresser à elle, tout d’un coup ? Si elle avait eu un plan ou je ne sais quoi, elle l’aurait mis à exécution il y a un bail. Elle la joue mystérieuse pour se donner un genre.
- Elle a 77 ans, c’est pas vieux pour se donner un genre ? demanda Walter.
Naomi inspira.
- Moi je dis qu’il est trop tard pour se créer de nouvelles énigmes superflues.
Wallace agita la tête.
- Je la suis. Et pis y’a pas le temps, j’ai la soirée à préparer.
- Ouais. Qu’on s’amuse un peu, merde… marmonna Perrine.
- T’es d’une violence en ce moment, toi ! souffla Naomi.
- C’est l’approche de la remise des diplômes, ça la bouffe, je crois… marmonna Walter.
Lola observait le quatuor à distance. Elle inspira.
Le cri du nourrisson résonna. Ménard Truce observait avec appréhension. Les dames en soubrette observaient, interdites. La Gouvernante en Chef avait le bébé dans ses bras. C’était une petite dame d’une trentaine d’années.
- Eh bien, eh bien…
- Lola…
Répondant à son nom, gémi par la mère du bébé, la Gouvernante en chef approcha.
- … Mon bébé…
- Il va très bien, madame, tenez !
Elle prit l’enfant. La Gouvernante en Chef regarda ses subordonnées autour.
- Inconscientes que vous étiez de vouloir l’emmener à l’hôpital. Ne savez-vous donc pas que les enfants nobles naissent dans les maisons nobles ?
- Pardon, madame Prutt…
- Nous avons agi un peu vite…
Lola regarda sa maîtresse qui la regarda.
- Justinien… il s’appellera Justinien Truce !
Le regard de la mère se porta à nouveau sur le bébé, couvée par sa servante.- Je ne suis pas une ennemie, mais je ne suis pas une amie non plus, mes petits…
Lola tourna les talons.
- Madame ?!
Anya leva la tête vers Lola. Elle était en train de préparer un sac. La vieille servante était surprise.
- Vous partez ?
- Ménard est mort et la guerre approche. J’ai à faire. Astor peut m’infiltrer dans les rangs de Suzuki en tant qu’infirmière. Je vais faire ce que j’ai à faire et prendre mes responsabilités.
Lola hocha la tête.
- Vous et monsieur Benz…
Anya inspira.
- Je n’ai jamais rien pu vous cacher, Lola, hein ?
Lola secoua la tête. La mère de Justin Truce prit son sac sur son épaule.
- N’en dites rien à Justin. Il est trop fragile.
- Bien, madame.
- Essayez de survivre à cette guerre. Peut-être nous reverrons nous, mais en attendant… je vous congédie, Lola. Vous êtes libre.
- Bien, madame.
Lola regarda sa maîtresse partir.***
Naomi retrouva ses parents et ses frères.
- Papa !!
- Ma chérie…
Naomi s’effondra en larmes. Malcolm resta derrière elle. L’ajournement du procès donna lieu à un étrange bain de foule.
- Monsieur Kingsley… Madame…
- Vous ! De quel droit vous demandez à ma fille de faire votre travail ?!
Malcolm regarda LaBarbara, étonné.
- … on se connait ? Vous me rappelez quelque chose…
- Un blanc barbu avec du ventre ? Je m’en rappellerai !
Malcolm plissa les yeux.
- … La guerre !! On était ensemble pendant la guerre !
LaBarbara se souvint et gifla Malcolm. Claire haussa les sourcils.
- Maman ! s’étonna Shawn.
- Excusez-moi, mais ça me démangeait depuis tout ce temps ! Vous étiez insupportable avec votre stupide ami !
- … Vous n’avez fait que geindre et trainer des pieds !
- Pourquoi vous avez jeté ma fille à ces chiens ?!
- Aaaaaalors là c’est pas moi, c’est ma sœur ! Vous savez, l’héroïne qui a sauvé des milliers de vies en arrêtant la bombe M ?!
LaBarbara regarda Malcolm, étonnée.
- C’est votre sœur ?!
- Oui ! sourit fièrement Malcolm.
- … et elle n’a pas honte d’avoir un frère aussi insignifiant ?!
- Maman, arrête ! geignit Naomi entre deux sanglots.
LaBarbara se tourna vers sa fille alors que Malcolm se tourna vers Claire.
- Je suis insignifiant, Claire ?!
- Baaaah comparé à Rachel, c’est sûr queuuuh… balbutia Claire.
Naomi vit quelques élèves, et se détacha de son père. Elle fendit la foule. Les gens lui tapotaient l’épaule ou lui disaient bravo alors qu’elle estimait n’avoir rien fait.
Elle ignorait que les médias s’étaient emparés de l’affaire et que l’aplomb de la jeune fille face à un jugement fallacieux n’avait laissé personne indifférent.
Naomi trouva enfin Walter qui la regarda en souriant.
- Tu as été fabuleuse !
Naomi se jeta sur lui et l’embrassa. Les gens autour semblaient surpris de voir la jeune avocate junior embrasser un homme en fauteuil roulant. Elle s’éloigna.
- Tu étais derrière moi !
- Tout le temps !
- Je le savais. Je ne t’ai pas vu dans la foule mais je le savais !
Elle l’embrassa de nouveau, ignorant là encore complètement que cette jolie photo serait dans les journaux le lendemain.
- Des nouvelles des autres ?
- Tout le monde est sauf, à l’exception de deux personnes…
Naomi plissa les yeux. Elle vit Perrine et la serra dans ses bras.
- Ma vieille !
- Mon avocate du pauvre !
Naomi leva la tête vers David et Denis. Elle regarda David.
- Monsieur Truman, je suis dés…
- Tout va bien, je… Tu peux m’appeler monsieur Smirnoff, maintenant. Je n’ai plus à avoir honte de mon nom. Ce n’est pas à moi d’avoir honte, du moins.
Denis sourit. Naomi hocha la tête et se tourna vers Perrine et Walter.
- Des nouvelles de Wallace ?
- Il revient vers le centre-ville avec les autres, il y a eu des heurts avec le commissaire de police.
Naomi haussa un sourcil, intriguée.
- Quoi ?!
- Loooongue histoire… marmonna Perrine.
- J’ai raté plein de truuuuucs !!! geignit Naomi.
- Mademoiselle !
- Mademoiselle Kinsgley, une question !
- Mademoiselle !
Duncan s’interposa entre les journalistes et sa fille.
- Pas question qu’elle réponde à quelque question, ma fille n’est pas là pour ça !
- Elle doit rentrer à la maison, elle est épuisée la pauvre ! grommela LaBarbara.
Naomi essaya de s’éloigner mais elle vit Justin emmené par les policiers. Elle se glissa rapidement vers lui.
- Monsieur Truce, désolée, je n’ai pas pu…
- Tout va bien. Je te remercie pour tout ce que tu as fait pour moi. Si tu vois Wallace, dis-lui…
Justin inspira.
- Dis-lui qu’il avait raison et que ça me fera plaisir de le revoir. Il ne le voudra peut-être pas, mais… ça me ferait plaisir.
Naomi hocha la tête.
- Vous avez l’air d’être un homme bien, c’est… dommage qu’on en soit arrivés là…
Justin inspira en souriant.
- J’ai découvert ce matin qu’il existait une infinité d’univers parallèles… il y en a probablement un où je suis votre professeur… Qui sait.
Naomi grimaça.
- Menez votre vie comme ce jour, Naomi Kingsley. Ne reculez devant rien et ne laissez personne vous dicter votre conduite. Cela vous sauvera.
Justin fut emmené. Naomi le regarda, encore déboussolée. « Une infinité d’univers parallèles ?! QUOI ?! »
Naomi prit Walter et sortit, accompagnée par Perrine.
- Mais pourquoi je suis une star, là ?!
- Tu as été tellement excellente !
- Bof, elle a juste dit ce qu’elle pensait, c’est tellement inhabituel dans ce pays… admit Perrine.
Dans le hall, Wallace apparut. Naomi, Perrine et Walter le regardèrent.
- Hey… je crois qu’on a plein de choses à se dire…***
Adventures of Mana – Village ThemeTristan avait mis de la musique douce. Wallace l’aidait à préparer l’appartement de sa tante pour la soirée…
- Tu peux bouger du canapé et venir m’aider à préparer les toasts ?!
- C’est bon, t’en as fait assez, arrête.
Tristan soupira et regarda Wallace.
- Si plus tard on vit ensemble et que tu te comportes comme ça…
Wallace haussa un sourcil.
- Vivre ensemble ?! Putain, ce serait juste le meilleur moyen de rompre toutes les cinq minutes.
- Comment ça ?
- Bah, regarde, là, tu m’engueules pour rien !
- Je veux que tout soit parfait, nuance !
- Tout est déjà parfait ! Tu veux faire des toasts en plus parce que tu veux toujours en faire trop !
- Je ne t’engueulais pas, je te faisais simplement remarquer que tu pourrais m’aider.
Wallace se leva et passa derrière Tristan pour l’enlacer.
- Mais je t’aide, tu vois bien.
- Wallace, je fais des toasts.
- J’essaie juste de te détendre…
- Mais pas comme ça !
- Mais qui te dit que je veux du sexe, là ?
- Parce que c’est toujours comme ça avec toi !
- Regarde, là, je suis derrière toi, je t’entoure de mes bras et j’ai l’impression de te violer !
- Je FAIS DES TOASTS !
- Ah oui, tout à fait détendu, le garçon.
Wallace s’éloigna en soupirant. Tristan secoua la tête.
- Incroyable. Les invités arrivent dans une demi-heure et on trouve le moyen de se disputer !
- D’où le « vivre ensemble » n’est peut-être pas une bonne idée.
- Tu ne veux pas si je comprends bien ?
Au tour de Wallace de secouer la tête.
- Euh, allô ? Ça fait même pas cinq mois qu’on sort ensemble ! Tu parles déjà de vivre ensemble ! Tu veux pas envisager le plan obsèques, non plus ?
Tristan souffla.
- Tu la vois comment, la suite ?
Wallace haussa les sourcils.
- Bah… la fac.
- La suite avec moi !
- Bah on continuera à sortir ensemble, nan ? On verra où ça va nous mener. Déjà faut voir si on sort indemnes de la remise des diplômes, et…
On frappa à la porte. Tristan soupira.
- Sauvé par le gong…
- Ah bah oui parce que je suppose qu’on joue le petit couple parfait, stable et sans aspérités !
Tristan tenait la poignée de porte et poussa un dernier soupir.
- Tu peux au moins m’aider pour le service ?
- Oui, votre majesté. Je serais même habillé sous le tablier !
Tristan leva les yeux au ciel et ouvrit à Tino, Orson et Benjamin.
- Hey !
- On s’est rejoints avant pour venir ensemble !
Wallace leva les yeux au ciel. « Et c’est ses potes qui viennent les premiers du coup je vais faire chandelle… génial… »
***
Santa Hates You – ScumLa soirée battait son plein. Naomi, Walter, Perrine, Robbie, Tristan, Orson, Tino et Benjamin passaient une agréable soirée, pendant que Wallace s’était imposé comme étant de corvée de cocktails.
- Ce qui a fait peur avec Alola, c’est ce délire d’Ultra-Chimères. Les six gouvernements en ont assez soupé avec leurs propres problèmes interfédéraux, ils n’allaient pas rajouter en plus ceux d’Alola… marmonna Tino.
- J’ai pas trop suivi toute cette affaire de tractations diplomatiques… marmonna Naomi.
- C’était très ennuyeux… admit Tristan.
- Surtout, on s’en foutait un peu... leurs principaux arguments étaient touristiques de surcroit… sourit Robbie.
- Et il paraît que leur climat est tellement radicalement différent du nôtre que des Pokémon prennent des formes aux types différents ! sourit Walter.
Benjamin hocha la tête.
- Lucy en avait vu une pendant l’attaque de Direction Dresseurs la dernière fois. Un Feunard de glace !
- Wow ! admit Perrine.
- Et des petits Goupix blancs, rien que quand elle en parlait, ça avait l’air trop mignon ! sourit Orson.
- Oh oui j’avoue ! sourit Naomi.
Wallace servit du shaker directement dans les verres vides.
- Almendra Colada : Lait de coco, liqueur d’amande, rhum.
Les attablés goûtèrent et hochèrent la tête.
- Pas mal… admit Naomi.
- Pourquoi de l’amande ? s’étonna Orson.
- Ca dénote avec l’Ananas, c’est plus fort, plus relevé, ça complète agréablement le rhum et du coup le lait de coco dénote au lieu d’être porté par l’ananas habituellement.
Walter hocha la tête.
- Si un jour tu deviens barman, fais nommer la place handicapé du comptoir à mon nom !
- Walter ! Il est hors de question que tu fréquentes des bars une fois adulte ! grommela Naomi.
- Ne commence pas à me contrôler, femme ! sourit Walter.
Tristan inspira et regarda Wallace.
- Tu pourrais peut-être te joindre à la soirée…
- Je fais le service, tu te rappelles ?
Wallace alla à l’évier pour nettoyer le shaker. La petite soirée continua. Wallace sortit la tarte tomate-chèvre-mozza du four.
- Parfait…
- Ça t’amuse ?
Perrine se lavait les mains à l’évier. Wallace la regarda.
- De ?
- Ce que tu fais, là, t’exclure volontairement.
- C’est la soirée de Tristan, je veux pas interférer.
- Tu fais tout le temps ça. Détends-toi, un peu.
- Je peux pas vraiment me détendre, là… avec tout ce qui va venir…
Perrine souffla.
- C’est ton dernier cocktail. Promis ?
Wallace hocha la tête.
- Promis.
- Et après tu nous rejoins.
- Hm.
Wallace regarda Perrine partir. Il inspira et secoua son gobelet argenté.
- Faire bien ou Faire Wallace… Hmmmmm…
Naomi inspira, un peu pompette.
- Parlons des sujets qui fâchent : Pourquoi Christina n’est pas là ?
Tristan agita la tête, pas gêné. Tino souffla.
- Je crois qu’elle ne supporte pas Tristan…
- Tu crois bien…
- Et… je pense qu’on va rompre sous peu.
Tristan plissa les yeux.
- Oups… boulette ! souffla Naomi.
- Non, non, juste que… je pense que ça n’ira pas bien loin…
Wallace arrivait avec la tarte qu’il posa sur la table, entre les verres. Il prit une roulette à pizza et la trancha en parts égales.
- Tino, on a déjà eu cette conversation… marmonna Tristan.
- Je sais, je sais, on ne peut pas prévoir le futur…
Wallace regarda Tristan, légèrement énervé, mais Tristan était concentré sur Tino.
- … mais je sens juste que ça ne va pas le faire. On est trop différents. Elle veut un mariage, des enfants, une maison, moi… je veux juste une carrière.
- Tu peux tout avoir si tu le veux vraiment…
- Bah c’est ça, le problème, je ne le veux pas vraiment. Le mariage… bof… les enfants… un fardeau…
- C’qu’il faut pas entendre ! soupira Naomi.
- Je suis un peu d’accord…
Robbie regarda Perrine qui haussa les épaules.
- C’est déjà flippant d’avoir un être humain qui te sort du bide, alors l’élever ensuite…
- Dit comme ça, on dirait Alien ! ricana Benjamin.
Wallace servit son dernier cocktail de la soirée : Une simple téquila sunrise.
- C’est faible, Gribble ! admit Walter.
- J’avais plus d’inspiration…
Il prit un pouf et se joignit au cercle. Léger blanc. Tristan semblait tendu. Perrine reprit la conversation.
- Et Lucy, c’est qui qu’elle ne peut pas blairer ?!
- Personne, elle avait une soirée en famille.
Walter hocha la tête.
- Et… ça se passe bien entre vous deux ?
Tout le monde se tourna vers Wallace. Benjamin agita la tête.
- Euh bah… oui, oui…
- Ok. Cool.
Benjamin plissa les yeux et sirota son cocktail.
- … c’est très sucré…
- Bah oui.
Robbie toussota.
- Du coup, Orson, personne en vue ?
Le jeune homme plissa les yeux.
- Bah, non…
- Et Amélia, ça avance ou toujours rien ?
Naomi regarda Wallace qui haussa un sourcil.
- … niveau surveillance !
- Wallace, je veux pas qu’on parle de ça ce soir ! souffla Tristan.
- Euh non, non, rien… depuis que vous m’avez demandé de la surveiller, il… ne s’est rien passé.
- C’est étonnant quand même. Pendant l’attaque des quatre soldats, elle n’a rien fait de particulier d’après Rebecca…
Orson semblait gêné. Perrine plissa les yeux et vint à sa rescousse.
- Tristan a raison, on se détend ce soir, pas la peine de partir là-dedans. Et si Orson n’a pas de petite amie, ou même de petit copain, ça le regarde.
Wallace hocha la tête.
- Ok, ok, j’essayais juste de faire la conversation…
- Tu peux la faire sur autre chose, il n’y a pas que deux sujets de conversations…
Wallace regarda Tristan et hocha la tête, décidant de se taire pour le reste de la soirée et de siroter ce qu’il avait modestement préparé. Tiens, les bouteilles sont à côté, refaisons des cocktails. Personne ne dit rien ? Ok, cool.
- Tiens, les exams ! sourit Tino.
- HAN NON ! ricana Naomi.
- Je ne veux même pas y penser ! grommela Robbie.
- Ca va juste être le bordel, vaut mieux pas y penser… sourit Tristan.
- Ah bah ça, les écrits ça va être moins marrant que les épreuves sur le terrain ! admit Benjamin.
- Qui n’étaient pas marrantes ! ricana Orson.
Wallace agita la tête en buvant son gin.
***
Ed Sheeran – Shape of YouLa soirée faisant, la conversation dévia.
- Le problème, avec la « Friendzone », c’est que ça insinue que les femmes sont juste bonnes pour coucher avec, pas pour être des amies. Quand tu valorises les femmes en tant qu’amies, tu n’es pas dans la friendzone !
Tout le monde acquiesça. Robbie poursuivit les propos de Walter.
- D’autant qu’une femme peut aussi se retrouver dans la friendzone.
- Exactement ! souffla Naomi.
- Merci les gars, putain ! soupira Perrine.
- Mouais. C’est un concept de tombeur. Je n’ai jamais été dans cette situation, personnellement… admit Tino.
- Moi non p… enfin, si, avec Perrine.
- Euh, tu m’as friendzonée, Orson !
- Merde, ça date ! sourit Naomi.
- C’était Wallace qui m’avait obligée à le faire ! sourit Perrine.
- Wallace qu’on n’entend plus depuis une demi-heure… marmonna Walter.
Wallace agita les mains.
- Je m’occupe de mettre la table en ordre, vous occupez pas de moi. Tout le monde a assez mangé ?
Benjamin regarda les autres, gêné. Robbie plissa les yeux. Tristan observa la table.
- Oui je crois que c’est bon… euh…
- Euh… pardon de soulever un lièvre, mais… je veux bien que vous soyez en couple, je trouve ça cool et tout, mais… de là à obliger Wallace à jouer les servantes…
Tristan regarda Naomi, étonné.
- Pard… Moi, l’obliger ?! Tu te rappelles de la dynamique entre nous ?!
- Alors pardon Tristan, je crois le connaître un peu mieux que toi, et je vois clairement qu’il se contient pour ne pas t’embarrasser pendant ta soirée.
Tout le monde regarda Naomi, stupéfaits par sa franchise. Wallace était éminemment gêné.
- … qu’est-ce que tu racontes, Kingsley, je veux juste pas…
- Mais il a le droit de s’exprimer enfin, c’est lui qui s’impose cette règle tout seul !!
- Je préfère être au service, c’est mon côté barman. C’est une déformation professionnelle !
Perrine plissa les yeux.
- Tu as juste été serveur !
- J’aspire à être barman !
- On a déjà eu cette conversation, tu veux te croire indispensable en faisant le service et en te retranchant derrière ton rôle.
- Euuuuuh, bitch, c’est toi qui m’a demandé de t’aider au service.
Tout le monde regarda Tristan qui serra les dents.
- Mais Tristan n’a pas bougé… marmonna Orson.
- On a vu, Orson, on a vu… marmonna Walter.
- Je… J… Tu ne m’as pas aidé à préparer la soirée !
- Tu faisais des toasts, qu’est-ce que tu voulais que je fasse !
- Oui et tout ce que tu as trouvé à faire c’est de venir m’enlacer par derrière pour me faire un câlin !
- Tu étais tendu !
- Bah valait encore mieux que tu ne fasses rien !
Nouveau silence éberlué. Perrine inspira et regarda Tino.
- Ne romps pas avec Christina, elle est très, très, très normale…
- Je… vois ça, merci du conseil… marmonna Tino.
- C’est pour qu’on vive des moments comme ceux-là que tu m’as reniflé le derrière pendant trois ans ? soupira Wallace.
- Ah bah putain si j’avais su !
- Vous… dites, si on gêne… geignit Robbie.
- Ouais je crois qu’on va rentrer, il se fait tard… souffla Naomi.
- Non, non, non ! Wallace, je suis désolé de t’avoir laissé seul faire le service !
Wallace inspira.
- Et je suis désolé d’avoir été chiant comme d’hab. Voilà. La soirée peut continuer.
Elle continua mais… heh, moins bien.
***
Tristan ferma la porte en laissant partir Perrine, Naomi, Robbie et Walter.
- … c’était nul… j’ai tout fait foirer…
- C’est un peu beaucoup ma faute aussi…
Tristan le regarda.
- J’suis désolé, j’ai été vraiment, vraiment, vraiment très con.
Wallace haussa les épaules.
- Tu veux que tout soit parfait… ce soir ou entre nous, c’est normal…
***
- Ils vont s’entretuer, je suis sûr !
- Grave !
Robbie descendait Walter en le portant sur son dos tandis que Naomi et Perrine descendaient le fauteuil replié.
- Moi je pense que c’est foutu, ils vont rompre… marmonna Perrine.
Naomi agita la tête.
- Mmmm je sais pas, je vais écouter les conseils qu’on m’a donné aujourd’hui, et prendre plutôt la troisième option.
Robbie, Walter et Perrine regardèrent Naomi alors qu’ils arrivaient enfin au rez-de-chaussée.
***
- … Mais rien ne peut être parfait, termina Wallace.
Tristan plissa les yeux.
- Tu crois qu’on doit rompre ?
- … pourquoi on romprait ?
- … ça n’ira nulle part. Je voudrais pas qu’on perde notre temps…
Wallace inspira et s’assit sur le canapé, face à la table en bordel. Tristan vint le rejoindre.
- Tu vois, l’avantage avec ma manière de penser, c’est que comme je ne vois les choses qu’à court terme, pour moi… tout va très bien. Toi, comme tu vois les choses à long terme, tu as déjà joué notre relation d’avance avant même qu’elle ne se soit faite.
Tristan hocha la tête.
- Exactement ce que je te reprochais au début.
- Exactement ce que tu me reprochais au début.
Ils avaient dit ça en même temps, ce qui les fit rire. Tristan inspira.
- J’ai envie de vivre avec toi, plus tard.
- On n’y est pas encore.
- Mais tu peux essayer d’y penser ?
Wallace inspira.
- On a le temps.
Tristan leva les yeux au ciel.
- Pourquoi tu ne penses pas au futur ?
- Pourquoi tu ne penses pas au présent ? C’est suffisamment anxiogène comme ça !
- Tu ne comprends pas que j’ai peur de finir seul ?
- Tu n’es pas seul, je suis là, tu as tes amis, ta fam…
Wallace se ravisa.
- Pardon !... et…. Oups, ok, je comprends mieux.
Tristan serra les dents. Wallace hocha la tête.
- D’accord, d’accord, euh… mais moi je peux pas réfléchir comme ça parce que… je suis pas dans la même situation, d’une part, et d’autre part…
Wallace inspira.
- Avec la remise des diplômes… toutes ces responsabilités que j’ai choisi de prendre, l’échéance imminente, j’ai… j’arrive pas à penser à l’après. Même avec toi. Et l’idée qu’on soit séparés à la fac…
Tristan haussa les sourcils.
- … merde, j’avais pas pensé à ça…
- Tu vois, tu sautes les étapes !
Tristan regarda Wallace.
- C’est idiot de se disputer, on devrait plutôt penser à nous maintenant… mais c’est pas sain non plus de pas penser à son avenir !
- Je suppose aussi, ouais…
Tristan acquiesça.
- Bah voilà, on peut parler.
- Ouais, j’ai l’impression que c’est notre première vraie discussion de couple !
Sourire respectif. Tristan inspira.
- Bon. Enlève ton pantalon.
Wallace fit de gros yeux. Tristan souffla.
- Ca m’a saoulé de me disputer, j’ai besoin de me détendre !
- … ah bah putain, tu vas prendre cher !
***
Perrine plissa les yeux.
- Nan, je les vois mal baiser, ça avait l’air tendu !
- Ah moi je les vois très, très bien au contraire !
Walter, Robbie et Perrine regardèrent Naomi qui serra les dents.
- C’est… mal sorti de ma bouche ! Toujours été nulle pour parler en public !