006 : Il fut un temps...
Atlas était une curiosité. Maintenant, c'est un nom qui inspire l'espoir, un vent de renouveau sur la région et, à terme, sur le monde. Je ne sais qu'en penser, à la vérité ; une part de moi ressent quelque chose d'intense à l'idée de changer le monde. Peut-être... peut-être est-il temps pour moi de me questionner sur le but de ma vie.
— N. Sutton —
x x xDate et lieu inconnusLe sang pulsait au niveau des ses tempes, et de légères convulsions agitaient son mince corps, maintenu sur la table par les mains de plusieurs infirmiers qui s'évertuaient à le garder immobile, sans grand succès ; il avait beau avoir une silhouette gracile, l'homme allongé se défendait comme un beau diable. Sans doute le danger avait-il fait remonter un flot d'adrénaline dans ses veines, qui le conduisait à donner tout ce qu'il avait pour échapper à ce qui l'attendait. Malheureusement pour lui, deux nouveaux employés en blouses blanches accoururent pour prêter main forte à leurs collègues, qui en semblèrent grandement soulagés ; leurs expressions plus sereines en témoignaient, malgré les quelques gouttes de sueur luisantes qui cheminaient sur leur front.
Dans un coin de la pièce se tenait un médecin, le visage recouvert par un masque blanc réglementaire. Ses yeux gris comme l'acier brillaient d'un éclat d'intelligence, mais l'homme retenu sur la table d'opération percevait autre chose, comme un soupçon d'une folie latente qui n'attendait que d'être tirée du sommeil. Une fois qu'il eut consciencieusement lavé ses mains comme le requéraient les procédures sanitaires, il enfila une paire de gants de latex, qui claquèrent contre sa peau blanche, arrachant un frisson au patient, le long de sa colonne vertébrale. Les pas du docteur résonnaient dans la pièce, seul son audible si l'on excluait les plaintes sourdes émises par l'homme allongé.
« Avez-vous besoin de quoi que ce soit, docteur Vandergelt ? questionna une jeune femme qui passa sa tête dans l'entrebâillement de la porte ; elle avait un joli visage aux lèvres roses et aux joues sommairement poudrées.
— Non, merci. (Sa voix grave s'éteignit tandis qu'il observait les alentours d'un œil attentif, puis reprit.) Si, amenez-moi la patronne, je tiens à ce qu'elle voie si les tests aboutissent.
— Entendu, docteur. »
La jolie assistante s'éclipsa, laissant derrière elle un silence uniquement entrecoupé par les gémissements du patient, qui commençaient à se faire moins insistants à mesure qu'il se fatiguait ; l'adrénaline ne ferait bientôt plus effet sur lui. Les infirmiers attendaient, anxieux, tandis que le médecin faisait les cent pas dans la salle d'opération ; si cette expérience ratait, il pouvait dire adieu à son poste, alors il espérait vraiment que ça réussirait. Autrement, il ne donnait pas cher de son avenir...
« Eh bien, docteur Vandergelt, ne vous avais-je pas dit que j'étais occupée ces temps-ci ? soupira une voix de femme, dont la propriétaire entra dignement dans la pièce.
— Vous m'avez ordonné de pratiquer ces tests, vous êtes donc logiquement invitée à assister au bon déroulement de l'opération. Si bien sûr vous ne voulez pas, c'est votre droit, je comprendrais que les aiguilles et les perfusions ne vous plaisent pas... admit le médecin en rajustant son masque.
— Je vais rester, puisque je suis là. Allez-y, ne vous gênez pas, je vous regarde attentivement. »
Le docteur Vandergelt hocha calmement la tête et se saisit d'une seringue, dans un cliquetis dérangeant. Il la remplit d'un liquide jaunâtre, sous les yeux horrifiés du patient, qui ne parvenait même plus à se débattre ; à quoi bon, puisque six hommes et femmes le retenaient vigoureusement ? Il vit la seringue se rapprocher dangereusement de son bras, et finalement, lorsqu'elle entra en contact avec sa peau laiteuse et chaude, il ne sentit presque pas la piqûre, sombrant aussitôt dans un sommeil sans rêves.x x x
Boardwalk Empire OST (The National) - I'll See You In My DreamsLieu inconnu, 17 mai 1960Le corps allongé se releva d'un seul coup, brusquement ; une respiration rauque s'échappait de sa bouche, et sa silhouette gracile était secouée de soubresauts légers. Ses mains blanches comme celles d'un mort tremblaient doucement, pourtant il n'avait pas froid, ni peur. Que lui arrivait-il ? Il observa le mobilier autour de lui, et fut rassuré en un instant à la vue de cette pièce familière. Un bureau modeste à gauche, avec quelques feuilles de papier et un pot rempli de crayons et de stylos ; une porte en acajou menant à la salle de bains à droite, et en face de lui, une commode vieille du siècle dernier, surmontée d'une réplique d'un tableau célèbre accrochée au mur. Tout cela, c'était sa chambre, son chez lui. Pas besoin de s'inquiéter de quoi que ce soit, ce n'était qu'un mauvais rêve, songea-t-il.
Lentement, il se leva pour aller s'installer à son bureau, et tira un livre à la couverture entièrement noire de l'un des tiroirs ; il passa quelques pages couvertes de son écriture manuscrite, fine et droite, puis se mit à écrire sur l'une d'elles, qui n'était pas entièrement remplie. Il se livrait toujours à ce rituel, pour consigner tous les rêves étranges qu'il faisait. Pour ne pas devenir fou. Coucher cela sur le papier l'en libérait en quelque sorte, faisait voguer ces incertitudes sur un autre océan ; les lettres couvraient de plus en plus d'espace à mesure qu'il faisait tranquillement remuer le stylo noir sur le papier jauni.
Il ne savait pas encore que ces pages seraient un jour d'une importance capitale. Pour lui, il ne s'agissait encore que d'un journal regroupant des bribes de rêves. Rien d'autre.
x x xRivamar« Si vous saviez à quel point elle a été impudente, j'ai encore du mal à le réaliser moi-même ! Cette femme-là, il vaut mieux ne jamais la rencontrer. Je ne sais plus comment elle a dit s'appeler, parce qu'il y a tellement de noms à apprendre chaque soir, au club, c'est intenable. Une bien laide femme si vous voulez mon avis ; une couche de maquillage tout bonnement hallucinante recouvrait son visage, si bien qu'on l'aurait prise pour un clown du cirque qui est passé en ville le mois dernier... Je sais que ce n'est pas bien de se moquer des gens de la bonne société, mais elle m'a offensé, alors que puis-je faire sinon l'offenser en retour ? Derrière son dos certes, mais ce n'est que rétribution. J'en viens au fait. On m'avait demandé de chanter une chanson en particulier, ce que j'ai fait. Au bout d'un moment, j'entends la garce rire, alors je m'interromps et je lui demande ce qu'elle a de si drôle à raconter. Elle me répond, la larme à l'œil à force de rire : "Mais, mademoiselle, votre interprétation est tout bonnement ridicule, et vous avez une telle voix de crécelle !" Je ne sais pas si elle pensait vraiment ce qu'elle a dit ; comment peut-on savoir, avec ces gens-là ? Malgré tout j'étais si gênée, parce que monsieur le député Rothstein était dans la salle et me dévisageait, et avait assisté à toute la scène. Mon dieu, un homme du gouvernement m'a vue me faire répudier par cette femme ! »
Lorsqu'elle eut terminé sa tirade, Ivanna Richmond fit tourner son verre de vin, dans lequel le liquide s'agitait doucement au gré de ses mouvements, et but ce qu'il en restait d'un trait. Un soupir délicat s'échappa d'entre ses lèvres rouges. Ses deux compagnons de table avaient écouté avec intérêt sa petite mésaventure de la journée ; John Sullivan semblait éprouver un mélange d'amusement et d'indignation, quant à Roy Andreivic, il restait impassible comme il en avait l'habitude, désireux de n'offenser en aucun cas ses hôtes. Le russe ne connaissait pas très bien la compagne de son supérieur, et préférait se montrer respecteux — peut-être était-il même trop obséquieux —, par prudence.
A la vérité, le bras droit de l'entrepreneur aurait préféré décliner cette invitation à dîner dans la grande villa au bord de la mer, mais son épouse avait insisté pour qu'il y aille, arguant qu'elle irait de toute façon chez ses parents, à Verchamps, pendant quelques jours avec leurs deux enfants. Il se trouvait donc là, à partager la table de ce couple immensément riche, et à écouter les histoires d'Ivanna Richmond, qui avait eu une altercation avec une cliente du club où elle travaillait.
« J'ai l'impression que Warren Rothstein aime beaucoup venir au club, admit John. Je crois que ça fait plusieurs fois que tu le mentionnes.
— Oui, il me semble aussi qu'il apprécie d'y venir. Il est accompagné par sa charmante épouse Carolyn la plupart du temps, j'ai eu l'occasion de discuter avec elle.
— Et que penses-tu de son mari ?
— Je n'ai pas encore eu l'occasion de lui parler, sauf pour échanger deux, trois politesses, à vrai dire. Mais je crois savoir que tu es en affaires avec lui, non ? Tout du moins, tu m'as à plusieurs reprises évoqué des entretiens avec lui », sourit-elle.
John Sullivan acquiesça distraitement et se tourna vers son assistant, qui mangeait doucement le poisson disposé dans son assiette ; il avait toujours beaucoup aimé les filets d'Ecayon, mais ce soir, il n'avait pas vraiment faim. L'homme d'affaires avait remarqué son malaise, et lui posa une main chaleureuse sur l'épaule, geste qui le fit légèrement sursauter.
« Vous n'avez pas l'air bien, Roy. Voulez-vous que je vous raccompagne chez vous ?
— Non, non, ne vous dérangez pas pour moi. C'est juste que, vous savez... je suis nerveux, monsieur.
— Comment donc, vous êtes nerveux ? Mais il n'y a pas de raison de l'être. Nous dînons entre amis, faites comme chez vous, je vous en prie.
— John a raison, ajouta Ivanna avec un sourire affable. J'ai peut-être l'air effrayante, mais je ne le suis pas, je vous assure !
— Grands dieux non, mademoiselle, vous êtes loin de sembler effrayante ! Il est vrai que j'ai parfois du mal à me montrer sociable avec des personnes que je ne connais pas. Je tâcherai de me comporter de façon plus détendue. »
Les deux hôtes hochèrent la tête, satisfaits de cette réponse. Roy Andreivic ne s'attendait pas à une telle chaleur de la part de ces gens très riches, qui dilapidaient leur fortune sans compter, alors que lui préférait épargner son argent pour ses enfants. Peut-être que lorsqu'ils auraient une progéniture, ils feraient plus attention à leurs dépenses ? L'exilé européen n'en avait pas la moindre idée, et puis, de toute façon, ça ne le concernait pas.
Avant de sonner à leur porte, il avait imaginé un dîner froid et calme, sans conversation. Après tout, beaucoup de couples célèbres ne s'entendaient bien que pour le public, et vivaient dans l'indifférence le reste du temps. Ce n'était nullement le cas de John et d'Ivanna. Tous les deux semblaient beaucoup s'aimer, et même si les démonstrations d'affection en public se faisaient rares, on sentait bien qu'ils se préoccupaient l'un de l'autre.
Cela dit, lorsque John l'avait fait entrer chez lui, il lui avait rapidement fait comprendre que sa compagne ne savait rien de ses activités illicites, et qu'il ne fallait en aucun cas qu'elle fût mise au courant. Ils s'appréciaient certes énormément, mais ne rechignaient pas non plus aux cachotteries. Roy ne savait pas s'il en allait de même pour la chanteuse de jazz ; il la pensait moins prompte au mensonge qu'un négociateur émérite.
« Au fait, John, nous n'en avons pas encore discuté depuis la dernière fois... tu sais, d'Atlas. Tu m'avais dit qu'on n'entendrait plus jamais parler de cet énergumène, et pourtant, il a fait l'objet d'une interview télévisée. Indirectement, du moins, puisque personne n'a encore jamais vu cet homme. Existe-t-il seulement ? C'est une excellente question, mais toujours est-il que tu avais tort, pour une fois.
— Je n'ai pas de réserves à le reconnaître. On ne peut pas toujours avoir raison, Ivanna. Si ce type a décidé de placarder des affiches dans la capitale, ou que quelqu'un l'a fait en utilisant son nom, ça ne me regarde pas, et toi non plus. Qu'à-t-on à faire de ces potins d'Unionpolis ? Cette ville n'est pas assez raffinée pour nous, et Rivamar mérite davantage d'égards.
— Moi, je m'intéresse à Atlas. Je ne dis pas que j'adhère à ses idéaux mais, comment dire... n'est-il pas naturel de vouloir savoir qui se cache derrière cette image d'être qui veut purger l'âme humaine de ses tares ? »
L'entrepreneur se contenta de ricaner, sarcastique, tout en se servant un second verre de vin ; de toute évidence, il se moquait bien de savoir qui pouvait bien être ce type. Quant au russe, il semblait indécis, partagé entre sa crainte qu'Atlas ne veuille s'en prendre à l'empire criminel de son chef, et l'indifférence qu'il feignait de ressentir. La belle blonde ne sembla pas le remarquer.
« Et vous donc, Roy ? Quel avis avez-vous sur la question ?
— Eh bien... souffla-t-il, surpris par la familiarité avec laquelle la chanteuse s'adressait à lui. C'est-à-dire que, je n'ai pas véritablement d'opinion sur le sujet, mademoiselle Richmond. Il me semble évident qu'Atlas cherchera à refaire parler de lui, si toutefois l'article paru dans le journal n'était pas qu'une vaste blague. Quant à savoir ce qu'il est, je n'en ai pas la moindre idée.
— Un anarchiste ou un communiste, voilà ce qu'il est, grommela John. Il vient mettre à mal la prospérité de la région, sans doute parce que cet imbécile en a assez d'être le seul ici à souffrir encore de la Grande Guerre. S'il est si malheureux, qu'il aille rejoindre tous ces soldats traumatisés dans les hôpitaux pour névrosés ! Le peuple sain et ces ombres ne se mélangent pas, tout le monde le sait. Si Atlas est lui aussi une ombre, il n'a pas sa place parmi nous. »
Le discours somme toute intolérant de Sullivan fit pâlir Ivanna, qui n'avait visiblement pas la même opinion que lui sur le sujet ; pour avoir déjà vu la mort de près, elle pouvait certifier qu'il était difficile de s'en remettre. Et la guerre ne s'était terminée que depuis un mois et une dizaine de jours, ce qui semblait fort peu pour se sortir d'une dépression liée au conflit. La région s'était relevée triomphante, sans grande difficulté, car les forces Conservatrices avaient dominé la guerre tout du long ; cela avait été beaucoup plus compliqué pour les Progressistes, qui avaient dû se reconstruire suite à cette atroce hécatombe dans leurs rangs. Au final, on avait vite oublié le traumatisme d'après-guerre ; personne ne voulait plus parler de ce conflit, comme s'il n'avait jamais eu lieu. La chanteuse n'en blâmerait personne, puisque de toute façon, elle aussi s'en fichait, maintenant. Tout ce qui comptait étaient sa vie et son bonheur avec John.
« J'ai entendu monsieur Rothstein discuter avec un haut responsable de la police, il y a peu... est-il vrai qu'il y a des fédéraux en ville ? questionna-t-elle pour changer de sujet.
— Ah, tu as entendu parler de ça, soupira l'homme d'affaires. Oui, une équipe a été envoyée ici pour démanteler le réseau de contrebande du port, ou quelque chose dans ce goût-là, je crois. Mais à mon avis, ils vont se faire descendre avant d'avoir trouvé quoi que ce soit. Personne n'a encore été arrêté pour contrebande. Du moins, personne d'interne à la ville, que des étrangers qui voulaient entrer avec des cargaisons de drogue dans le coffre de leur voiture. Les contrôles aux différentes entrées de la ville ont fait le ménage.
— Je pense aussi qu'il n'y a pas trop à s'en faire au sujet de ces agents, ajouta Roy. Après tout, si la police locale n'a pas réussi à appréhender les criminels, je vois mal ce que les fédéraux pourront faire de plus ; il n'y a tout simplement pas d'indices à trouver. »
x x x« Tu n'en as pas assez, de fumer à longueur de journée ? demanda Nellie Sutton à son collègue, passablement irritée par la fumée odorante qui s'évanouissait dans l'air nocturne.
— Tu préférerais que je te fasse la conversation ? Tu m'as bien fait comprendre que je t'embêtais, ironisa-t-il en tirant une bouffée de sa cigarette presque entièrement consumée.
— Va te faire foutre, Nate. »
Il ne releva pas, et se contenta d'un sourire en coin. Tous deux patrouillaient de nuit près de la place Artémis, où l'on avait retrouvé un cadavre deux jours plus tôt. La jeune femme à la coupe garçonne ne pouvait s'empêcher de s'interroger au sujet de tout ce qui se passait ces derniers temps. Entre Atlas qui faisait de plus en plus parler de lui, ses soupçons sur John Sullivan que Nate défendait fermement, et le meurtre de la jeune femme... non, décidément, rien n'allait plus, dans cette ville pourtant prospère.
« Désolée. Je me suis laissée emporter », murmura-t-elle.
Le rouquin en costume-cravate bleu haussa un sourcil, surpris par les excuses qu'elle venait de lui présenter. Il s'attendait à tout sauf à cela. Il esquissa un sourire et secoua doucement la tête.
« Oublie ça, tu veux. Tu l'as dit, on est ici pour travailler.
— J'ai du mal à croire que tu viens de dire ça.
— Je ne suis pas si fainéant que ça. Enfin, si, mais... disons que j'ai mérité ma place au sein du bureau fédéral », admit-il, pas peu fier.
Nellie acquiesça tranquillement et reporta son attention sur le centre Pokémon dont le toit rouge brillait à quelques centaines de mètres. Bon nombre d'enseignes aux néons colorés scintillaient dans la nuit, mais aucune ne surpassait celle de l'hôpital destiné aux créatures. Un logo de Pokéball clignotait, s'allumant et s'éteignant par intermittence, à intervalles réguliers. Elle se perdit bientôt dans cette routine mécanique, son collègue ne venant pas la briser, désireux de rester dans ce calme, lui aussi. Seulement, quelqu'un ne l'entendait pas de cette oreille.
Une détonation assourdissante résonna dans leurs tympans, et ils purent voir avec horreur le bâtiment au toit rouge exploser ; des morceaux de mur vinrent se ficher dans le sol goudronné et dans les immeubles alentour, et un vint même égratigner la carrosserie rutilante de la voiture de Nate, qui jura bruyamment. Le feu commençait à se propager, des gens hurlaient, des Pokémon fuyaient à toute allure, et on ne tarda pas à entendre des sirènes retentir à mesure que les ambulances et véhicules de pompiers affluaient. Un Capumain rescapé, blessé à la patte, attira l'attention de la jeune policière, qui accourut pour le sauver.
« Nellie ! Fais gaffe, il pourrait y avoir une seconde explosion ! hurla Nate pour couvrir le chaos ambiant.
— Merde, on s'en fout ! »
Elle n'écouta nullement les conseils de son partenaire, et parvint à atteindre le petit primate violet, qui saignait abondamment. Elle le souleva doucement et le prit dans ses bras, le berçant comme une mère ferait avec son enfant. Bientôt, les caresses apaisantes de la jeune femme eurent raison du Pokémon, qui cessa de gémir. Nellie retourna auprès du rouquin, qui soupira de soulagement ; elle ne sut dire s'il était sincère ou non.
« Putain, tu devrais accorder plus de valeur à ta vie, la prochaine fois, tu y passeras.
— Je préfère mourir en essayant de sauver une vie, plutôt que de garder la mienne aux dépens d'un être que j'aurais pu sauver, répliqua-t-elle, cinglante.
— Nellie... »
Elle ne prêta plus attention à son camarade, et s'installa à l'arrière de la voiture, Capumain toujours blotti contre elle. Comprenant que son rôle serait de les conduire dans un autre centre de soins — la ville en comptait plusieurs, tant elle était grande —, il prit le volant et démarra en trombe, non sans avoir jeté un dernier regard aux ruines de ce qui fut un lieu de repos apprécié de tous.
Les choses sérieuses commençaient.