La chaleur ? Du fait de mon type, ce n’est pas ce que j’apprécie le plus.
Néanmoins, cela n’empêche pas mon esprit de s’enflammer à chaque nouvelle bataille.
~*~Centre météorologique de la région de Hoenn, près de CimetronelleUn paisible matin ensoleillé. Voilà ce par quoi le directeur du Centre Météo de la région de Hoenn, un honorable vieil homme aux tempes grisonnantes, fut accueilli en ouvrant les fenêtres de son bureau. Pour un premier jour d’automne, c’était tout à fait exceptionnel. Habituellement, à cette période de l’année, les environs de Cimetronelle connaissaient essentiellement des épisodes pluvieux, souvent assez soutenus. Mais aujourd’hui, le soleil brillait de toute la force de ses rayons, pour le plus grand bonheur du météorologiste, et de son Pokémon. Morphéo flottait dans les airs d’un air guilleret, heureux de pouvoir prendre sa forme Soleil. Non pas qu'il détestât celle de la Pluie, mais changer lui faisait le plus grand bien.
- Monsieur le directeur !
L’intéressé s’arracha à contrecœur à son moment de relaxation, et considéra le jeune homme qui venait d’entrer en trombe dans son bureau.
- Eh bien, que se passe-t-il ? s’enquit-il. Pourquoi tant d’agitation ?
- C’est incroyable, monsieur... Il faut que vous veniez voir ça !
Interloqué par l’air effrayé de son jeune subordonné, le directeur délaissa sa fenêtre, et s’en alla rejoindre ses employés, suivi par un Morphéo curieux.
Comme toujours, les météorologistes du centre étaient vissés aux écrans de leurs ordinateurs, lesquels affichaient en temps réel l’évolution de la pression atmosphérique, relevée par des algorithmes complexes.
Aujourd’hui, cependant, l’un des écrans avait l’attention de tous. Le directeur n’eut qu’à s’annoncer pour que tous s’écartent afin de le laisser approcher.
- Alors ? demanda-t-il. Quel est le problème ?
- Regardez ça. (Une jeune femme lui indiqua une zone rouge vif sur le relevé informatique.) Cette perturbation est apparue soudainement sur nos radars, et semble se déplacer à grande vitesse. Une vitesse improbable, précisa-t-elle.
De plus en plus intrigué, le directeur se pencha pour consulter les relevés en question. De fait, la zone en rouge se déplaçait bien plus vite que les autres sur l’écran. Les compteurs affichant sa vitesse ne manquèrent pas d’étonner le scientifique.
- En effet, vous avez raison… Sait-on ce que c’est ?
- D’après les données, il s’agirait d’une sorte de dépression, répondit l’un des employés. Seulement, les rapports provenant des villes touchées par la perturbation - je pense à Nénucrique et Atalanopolis - n’indiquent aucun vent violent, ni aucune pluie torrentielle. Juste… un énorme nuage d’orage, parti aussi vite qu’il était venu.
- Un orage… ? murmura le directeur. Étrange…
- Ce n’est pas tout, reprit la femme assise au poste de l’ordinateur. Non seulement ce nuage se déplace rapidement, mais selon une direction parfaitement calculée. Comme s’il était animé d’une volonté propre.
Des murmures inquiets emplirent la salle. Morphéo, troublé par l’agitation soudaine, tenta d’attirer l’attention par de petits babillements, sans succès. Ce fut le directeur qui réussit à ramener le calme, simplement en levant la main.
- C’est assez inquiétant. Cet orage – si on peut l’appeler ainsi – n’a peut-être pas encore fait de dégâts, mais son comportement est effectivement tout sauf naturel… Sait-on vers où il se dirige en ce moment ?
Une brève vérification plus tard, et l’employée fut en mesure de lui répondre :
- Oui monsieur. Vers la région de Kalos.
~*~Au milieu de l’activité bourdonnante des machines de l’usine, des bras mécaniques, des embryons de Pokéball naviguant de secteur en secteur afin de prendre peu à peu forme, se dressait l’incinérateur. Ce mastodonte, cube géant dont la gueule affamée avalait les déchets et autres pièces défectueuses, occupait le centre de la pièce, qu’il réchauffait naturellement, jusqu’à faire monter la température à un niveau peu supportable pour quelqu’un sans équipement approprié. Les flammes avides dévoraient chaque pièce de métal que leur offrait un tapis roulant, et crépitaient furieusement à chaque nouvelle bouchée.
Seulement, un détail précis dans ce décor qui pouvait pourtant paraître ordinaire, donnait à l’atmosphère un soupçon d’absurde, pour ne pas dire d’effrayant. Le sommet du cube qu’était l’incinérateur avait été découpé proprement sur toute la longueur, créant un immense trou béant au fond duquel rugissaient les mêmes flammes destinées à brûler les déchets inutiles. Juste au-dessus, une plateforme rectiligne se dressait de toute sa longueur, une énorme cage de métal posée à son extrémité, tel un œuf posé sur une poêle.
« Une poêle géante… Et nous sommes les ingrédients, prêts à être cuits. »
Malgré le brasier géant situé à moins de dix mètres au-dessous d’eux, l’air autour de Lem et de son groupe semblait s’être soudainement glacé, tandis que le Sépiatroce, flottant nonchalamment au-dessus d’eux, les toisait de toute sa hauteur. Son bec s’étirait en un air narquois, quoique légèrement crispé. Il ne devait pas s’attendre à voir ses précieux prisonniers hors de leur cage…
- Je crois bien que le combat est inévitable…, murmura Serena.
Si elle tentait de paraître sûre d’elle, Lem perçut le trouble dans la voix de son amie. L’inventeur se mordit les lèvres, regrettant de ne pas avoir ses Pokémon sur lui.
Tout à coup, le Sépiatroce croassa, et brandit l’un de ses tentacules acérés en arrière.
- Il arrive ! Pandespiègle, tiens-toi prêt !
Le panda acquiesça et banda les muscles Il fut rejoint par Sonistrelle, qui paraissait prêt à en découdre, lui aussi. Mais contrairement à ce à quoi tous s’attendaient, le Sépiatroce n’utilisa pas son membre aiguisé pour attaquer. Il prit à la place une grande inspiration.
Lorsqu’il vit l’éclat de folie qui passa dans les petits yeux mesquins de la pieuvre, Lem comprit ce qu’il avait en tête.
- Non, ne restez pas là !! s’égosilla-t-il. FUYEZ !!
Trop tard. L’Ultralaser de Sépiatroce fusa vers la plateforme ou tous se trouvaient, et la percuta en une formidable explosion. Le choc fut violent. Toute la structure fut prise de tremblements, avant de pencher dangereusement vers le bas avec un grincement métallique sinistre.
Déséquilibrés, Lem et les autres tombèrent à quatre pattes, et commencèrent à glisser sur la surface lisse de la plateforme, qui ne tenait désormais plus que par trois plaques de métal fondu. Ces dernières ne tarderaient pas à rompre, les faisant alors tous tomber dans les flammes.
- Comment ose-t-il nous faire ça ?! s’égosilla Jessie.
- VITE ! TOUS VERS LA SORTIE !! ordonna James.
Les autres étaient déjà en mouvement. Rampant tels des Venipatte, tous luttèrent de leur mieux contre la gravité qui les appelait à rejoindre l’incinérateur, qui grondait telle une bête affamée au-dessous d’eux. Située au bord de la plateforme, la cage géante fut la première à tomber, emportée par son poids. Un bruit sourd accueillit sa chute ; puis, dans un sifflement, les flammes attaquèrent le métal, le grignotant méticuleusement.
Galvanisé par la peur, Lem aida sa sœur cadette à grimper en direction de la grille de fer qui délimitait le chemin sûr. Il toussa ; la chaleur le faisait d’autant plus suffoquer que son cœur affolé demandait plus d’oxygène à son corps.
Posté au-dessus de cette scène, qu’il trouvait pour le moins extrêmement divertissante, le Sépiatroce décida de donner le coup de grâce. Une petite attaque Coupe Psycho, et l’affaire serait réglée.
Seulement, avant qu’il n’ait eu le temps de lancer son attaque, une ombre fondit sur lui, et le mordit férocement. Furieux, le Pokémon Psy repéra son agresseur : un Sonistrelle ! Le petit Pokémon Dragon du groupe avait immédiatement saisi le plan de son homologue à tentacules ; mais il ne comptait pas le laisser s’en prendre à ses amis ! Lui pouvait voler, autrement dit c’était à lui d’affronter ce Pokémon de malheur, le temps que Serena et les autres soient sains et saufs !
Avec de petits cris féroces, Sonistrelle mordit son adversaire à plusieurs reprises, n’hésitant pas à aller jusqu’au sang. Crachant de douleur, le Sépiatroce tenta de le déloger, sans succès. A force de léviter au hasard, il finit par se cogner la tête contre un mur.
Les ex-prisonniers profitèrent de cette occasion pour rejoindre un sol plus ferme, avant de dévaler les escaliers, se réfugiant dans une autre salle. Derrière eux, la plateforme grinça de nouveau, avant de céder et de se fracasser à son tour sur l’appareil cracheur de flammes.
La salle juxtaposée à celle qu’ils venaient de quitter n’était pas tellement différente, hormis l’absence de l’incinérateur. Et comme dans la pièce précédente, les Pokéballs Obscur étaient façonnées automatiquement par les machines, qui continuaient leur œuvre, imperturbables.
- Pfiou… On a eu chaud…
- Miaouss, on se passera de tes blagues stupides, grinça Jessie, que la terreur rendait plus aigrie de d'habitude.
- Et Sonistrelle ? s’inquiéta Serena. Où en est-il ?
Le fracas d’un mur explosé lui répondit. Des débris et de la poussière volèrent en tous sens, avant que Sonistrelle n’en émerge. Le Pokémon Dragon était toujours aux prises avec le Sépiatroce, bien que cette fois, les rôles fussent inversés. La pieuvre porta un coup sec à son assaillant, l’envoyant s’écraser au sol, non loin de Serena et de son groupe.
- Sonistrelle !
Bien que blessé, le Pokémon Dragon se releva courageusement. Mais il était sonné ; et Sépiatroce comptait déjà profiter de cet instant d’inattention.
C’était sans compter sur Pandespiègle, qui bloqua la route du Pokémon pieuvre d’une Lame de Roc bien calculée. Des bras mécaniques furent également touchés, et s’écrasèrent sur les tapis noirs, lesquels crachèrent des étincelles. Mais personne ne parut s’en soucier. De son côté, le Sépiatroce commençait à sérieusement enrager.
- Cette fois, c’est tout ou rien, dit la jeune dresseuse en appelant son Roussil. Il faut vaincre ces Pokémon à tout prix.
Tous aussi déterminés qu’elle, les Pokémon firent face à leur homologue, prêts à en découdre. Face à sa bravoure, Lem décida qu’il était temps d’agir, pour lui aussi.
- Serena ! On te laisse te charger d’eux. dès qu’on aura récupéré nos Pokémon, on reviendra t’aider, c’est promis !
D’abord surprise, la jeune fille acquiesça. Pas le temps de se poser des questions. Quoi que Lem ait en tête, c’était forcément un plan pour les aider. Là-dessus, Serena avait entièrement confiance en son ami. Sans plus d’hésitation, elle passa à l’offensive :
- Roussil, Déflagration ! Pandespiègle, Vibroscur !
Les deux attaques combinées manquèrent de peu leur cible. Sonistrelle se joignit lui aussi au combat, houspillant le Sépiatroce à coups de crocs et d’ailes.
Pendant ce temps, Lem prit la Team Rocket à part. La peur mêlée à l’excitation d’enfin passer à l’action le rendait fébrile.
- Ecoutez-moi, j’ai besoin de votre aide. Il faut absolument stopper ce qui se trame dans cette usine.
- Quel est ton plan, exactement ? s’enquit James, qui lançait des regards nerveux en direction du combat.
- Le temps presse, et on ne peut pas se permettre le luxe de la finesse. Il faut dénicher l’ordinateur central, et forcer l’arrêt complet de l’usine. C’est notre seule chance !
Devant les airs dubitatifs des bandits, Lem s’emporta :
- Il n’y a pas à hésiter ! J’ignore pourquoi les Sépiatroces ont entamé une production de Pokéballs Obscur, mais ce n’est certainement pas dans de bonnes intentions. Vous savez mieux que moi à quel point elles sont dangereuses, pas vrai ?
Jessie et James échangèrent un regard éloquent. Pour avoir vu de leurs propres yeux la puissance phénoménale des Pokémon du Fantôme au Masque d’Acier, il y avait quelques années de cela, oui, ils pouvaient témoigner de la dangerosité de ces balles noires.
- Le morveux marque un point, dit James à sa coéquipière. Quoi que ces Sépiatroces aient en tête, il faut les arrêter.
- Là-dessus, nous sommes d’accord. Miaouss, est-ce que tu pourrais… Hein ? Mais où est passé Miaouss ?
Surpris, les trois rescapés fouillèrent les environs du regard. Mais le félin n’était plus avec eux. De même que Clem.
« C’est pas vrai ! » Lem pesta intérieurement contre sa sœur. Qu’avait-elle encore eu comme idée saugrenue ? S’il ne la connaissait pas aussi bien, Lem aurait juré qu’elle était partie devant pour chercher de l’aide par ses propres moyens. L’inventeur se pinça au-dessus du nez pour conserver son sang-froid. Pas le temps de paniquer ; il fallait agir vite.
- Bon, je vais aller les chercher, décida-t-il. Vous deux, occupez-vous de ce que j’ai dit. N’hésitez pas à tout faire disjoncter s’il le faut. La priorité, c’est de stopper les plans des Sépiatroces !
Sans plus de directives, il s’en fut dans la direction opposée au combat. Abasourdis, les deux bandits avaient du mal à croire ce qu’ils avaient entendu.
- Pour qui se prend-il, ce morveux, à nous donner des ordres ?! fulmina Jessie en tapant du pied.
- Cela dit, il n’a pas tort, fit valoir James. Le temps presse, et il faut absolument arrêter cette folie. Tu te souviens de ce qu’on a découvert au sujet des Pokéballs Obscur ?
La voleuse se calma immédiatement, ressassant les mots qui avaient défilé sous leurs yeux, lorsqu’ils avaient piraté la banque de données de leur propre organisation, et ce pour le compte des morveux. Outre les informations sur l’identité de l’Homme Masqué, l’ex-disciple de Fantôme, ils avaient fait ressurgir des informations classées confidentielles. Des informations qui n’auraient jamais dû revoir le jour.
Les Pokéballs Obscur étaient autrefois le fruit d’un projet nourri par les scientifiques de la Team Rocket, dans le but de créer des Pokémon surpuissants. Du moins, c’était ce qu’ils en avaient déduit d’après les notes laissées par le scientifique à l’origine du projet, un certain Professeur Sebastian.
Le seul homme connu à avoir jamais réussi à maîtriser les Pokéballs Obscur n’était autre que Fantôme. Mais suite à son arrestation, les balles noires avaient été saisies par la justice. Depuis lors, l’on n’avait plus jamais entendu parler de ces Pokéballs. L’enquête visant à les expertiser n’avait plus jamais donné de nouvelles, et l’affaire avait disparu dans les méandres de l’oubli. Quant à la Team Rocket, ils avaient tout bonnement effacé tous les fichiers concernant ces capsules. Tous, sauf ces fameuses notes.
- Oui, murmura Jessie. Et si ces informations refont surface, c’est l’honneur de la Team Rocket qui sera souillé.
Leur regard se porta sur la machinerie, bête féroce aux multiples bras, dont le travail répétitif augmentait le danger un peu plus chaque seconde.
- Les Pokéballs Obscur sont le reflet d’un échec passé de la Team Rocket, dit James d’un ton presque théâtral. Elles ne doivent en aucun cas revenir au jour. Rien que pour ça, aider les morveux est une opération qui en vaut la chandelle.
- Alors qu’est-ce qu’on attend ? Stoppons cette usine de malheur, et détruisons toutes ces affreuses balles obscures !
- Pour la gloire de notre Boss ! La Team Rocket passe à l’action ! s’écrièrent en chœur les deux bandits, avant de s’éclipser à leur tour dans les profondeurs de l’usine
~*~Les poumons de Miaouss le brûlaient. Ils ne s’étaient pas encore remis de l’écrasante chaleur qui les avait comprimés quelques minutes plus tôt. N’étant pas très sportif de base, le félin eut d’autant plus de mal à ne pas se laisser distancer par Clem, qui naviguait de porte en porte, de couloir en couloir, courant à perdre haleine dans les locaux interminables de l’usine.
- H-hé ! Morveuse ! haleta Miaouss. T’es sûre de savoir ce que tu fais… ?
- Serena est forte, mais elle va avoir besoin d’aide pour vaincre le Sépiatroce ! répliqua la fillette sans même ralentir. C’est pour ça que… haa… qu’il faut qu’on retrouve les Pokémon de Lem et des autres !
- Tu marques un point, mais as-tu seulement la moindre idée d’où ils sont cachés ?
- À force de chercher partout, on finira bien par trouver !
- Tu te fiches de moi ?! s’étrangla le félin. Dois-je t’informer de la taille exacte de ce complexe ? C’est pire que de chercher une aiguille dans une botte de foin !
Clem préféra conserver son souffle plutôt que de lancer une réplique que, de toute manière, elle n’avait pas. Miaouss avait raison : cet endroit était tellement immense, comment espérer retrouver Dedenne et les autres Pokémon ? Mais la petite fille ne voulait pas se laisser abattre. Tant qu’ils seraient privés de leurs Pokémon, Lem et la Team Rocket seraient vulnérables. Or, user de la faiblesse des autres était la stratégie préférée des Sépiatroces… Alors Clem reprit une nouvelle goulée d’air, et accéléra la cadence.
Les couloirs, blancs comme l’albâtre, étaient déserts. Le silence qui y régnait était quasi irréel, surtout après le vacarme des machines et des flammes. La plupart des pièces – dont aucune, étrangement, n’était verrouillée – avaient été mises sens dessus dessous. De nombreux objets, des dossiers de toutes sortes aux stylos en passant par la tasse de café renversée, en jonchaient le sol. Mais aucune trace des employés. Désormais ne régnait plus dans les bureaux qu’un silence de mort, troublé par les bruits de pas effrénés de Clem et Miaouss.
Soudain, la fillette pila net. Miaouss, trop concentré sur le rythme de ses pas, manqua de lui rentrer dedans.
- P-pourquoi tu t’arrêtes… ?
- J’ai cru voir de la lumière, derrière cette porte…
Le félin considéra la porte en question, perplexe. Les doubles battants étaient surmontés de deux petites vitres, permettant de regarder ce qu’il y avait à l’intérieur. Malheureusement, les deux compères étaient bien trop petits pour voir quoi que ce soit.
Sans vergogne, Miaouss grimpa sur les épaules de la fillette, qui protesta vigoureusement. À présent à bonne hauteur, le chat put voir – malgré la pénombre qui régnait dans la pièce – une espèce de boule d’électricité lancer des étincelles par intermittences. Il ne l’aurait pas juré, mais il était persuadé qu’il s’agissait du Dedenne de la petite morveuse.
- T’as raison, y’a quelque chose là-dedans !
- Hé ! DESCENDS DE LÀ !!
Déstabilisé par les mouvements brusques de son perchoir, Miaouss tomba lourdement au sol. Furibonde, Clem le délaissa pour essayer d’ouvrir la porte. Mais celle-ci était fermée.
- Pas de doute, ils cachent quelque chose ici ! Mais comment on va faire pour ouvrir cette porte… ?
- Laisse faire l’expert ! C’est le moment pour Miaouss d’entrer en scène !
Ravi de se sentir enfin utile, le félin colla son œil à la serrure. Après un examen rapide, il dégaina l’une de ses longues griffes, et entreprit de crocheter le verrou. En deux temps, trois mouvements, celui-ci céda, et la porte s’ouvrit.
- Aucune serrure ne résiste à la patte experte de Miaouss, se vanta le félin.
- Bah dis-donc, si on m’avait dit qu’un jour, tes compétences de voleur nous seraient utiles…, souffla Clem, impressionnée malgré elle.
La pièce, étroite et sombre, n’abritait que peu de mobilier. Seulement quelques placards ici et là – sans doute une espèce de réserve, songea la fillette.
Le sourire revint sur son visage lorsqu’elle reconnut le petit être enfermé dans une cage à son échelle, droit devant elle. Dedenne ! Reconnaissant les nouveaux arrivants, le rongeur poussa de petits cris de joie. Enfin il allait être sauvé !
Pendant que Miaouss s’occupait de crocheter le verrou de sa cage, Clem chercha les Pokéballs des autres Pokémon. Elle les trouva rapidement, soigneusement rangées dans une mallette grise, spécialement conçue pour transporter des Pokéballs.
- Je les ai trouvés ! s’écria-t-elle, ravie.
- Et… ça y est, te voilà libre, petit gars !
Sitôt la porte de sa cage ouverte, Dedenne se jeta dans les bras de Clem, qui le câlina tout son soûl. Pendant ce temps, Miaouss récupéra la mallette.
- Allez, sortons d’ici, et allons aider nos copains !
La blondinette opina du chef, laissant le Pokémon électrique grimper sur son épaule. Tous deux suivirent le félin, qui repartait déjà d’où ils étaient venus.
Enfin du moins, le pensaient-ils. Car en plus d’être immense, le complexe était un véritable labyrinthe : tous les murs se ressemblaient, impossible de s’y retrouver.
- Haa… Miaouss, t’as une idée d’où on va, là ? demanda Clem au bout d’un moment.
- Euh… Pas vraiment… Est-ce qu’on est déjà passés devant cette pièce ? Je ne sais plus…
Clem serra les dents. Mince… Comment allaient-ils aider Lem et les autres, s’ils se perdaient dans les couloirs ? Voilà qui n’était pas bien malin…
Tout à coup, Dedenne poussa des babillements excités.
- Qu’est-ce qu’il y a ? questionna la fillette.
- Hum… ? Il dit que quelqu’un approche…
Clem se figea. Quelqu’un ? Mais qui ? Les lieux étaient pourtant déserts !
A peine cette pensée effleura-t-elle l’esprit de la fillette qu’un bruit sourd résonna au fond du couloir. Comme si quelqu’un avait fait tomber quelque chose. Les trois compères sursautèrent d’un seul et même mouvement. Soudain tendus à l’extrême, ils tendirent l’oreille, osant à peine respirer.
Petit à petit, l’écho de bruits de pas se fit entendre. Un claquement sec, régulier, presque monotone. Impossible d’en déterminer l’origine. Venait-il de la droite ? De la gauche ? Tous les sons se répercutaient à l’infini sur les murs blancs, sans âme, des locaux sinistres.
Le cœur de Clem battait à rompre ; elle était sûre que Miaouss et Dedenne pouvaient l’entendre. De même que celui ou celle qui se rapprochait inexorablement d’eux.
Enfin, un point situé à plusieurs mètres dans leur champ de vision bougea. Clem se retint de pousser un cri ; il était si irréaliste de voir une personne venir dans leur direction, alors qu’ils se croyaient seuls jusqu’alors. D’autant plus que la personne se déplaçait lentement. Elle devait pourtant les avoir aperçus, elle aussi.
- Hé… ? Il est pas seul…, chuchota Miaouss à côté d’elle.
Clem plissa les yeux, et vit en effet que ce n’était pas une personne, mais deux – non, trois…, quatre ! – qui s’avançaient dans leur direction. A mesure qu’ils se rapprochaient, la fillette put les identifier : vêtus de blouses grises ou bleu électrique, deux d’entre eux portaient des lunettes à montures épaisses, tandis que les autres arboraient un casque jaune criard sur le crâne.
« Des ouvriers ? » Incroyable ; pouvait-ce être les employés de l’usine ? N’avaient-ils pas déserté les lieux ? D’un côté, Clem était soulagée : au moins les employés ne semblaient pas blessés. Mais de l’autre, elle ne pouvait se défaire de cette impression que quelque chose ne tournait pas rond. Sans qu’elle puisse expliquer pourquoi, la petite fille sentait une nervosité croissante s’emparer d’elle, qui lui paralysait les jambes. Finalement, les employés arrivèrent à leur hauteur.
- Eh bien, jeune enfant ? dit l’un des hommes à lunettes. Que fais-tu ici ? Tu t’es perdue ?
- J-je…
- Ne t’en fais pas, poursuivit l’un des deux casqués. Nous allons t’aider à retrouver ton chemin. Suis-nous.
Clem voulut se sentir soulagée : ces personnes étaient de leur côté, et elles allaient l’aider à retrouver Lem ! Néanmoins, les mots restèrent bloqués dans sa gorge. Quelque chose dans l’attitude des adultes la mettait fortement mal à l’aise. Lorsque l’un d’entre eux fit un pas en avant, elle ne put s’empêcher de reculer.
- Morveuse ! (Le cri de Miaouss tira la fillette de sa torpeur.) Ne reste pas là ! Allons-nous-en !
- Mais…
Sans lui laisser le temps de protester, Miaouss prit la blondinette par le poignet, et l’entraîna dans un autre couloir, à l’opposé de celui par lequel étaient venus les hommes en blouse.
- Miaouss, qu’est-ce qui se passe ? questionna la fillette, désemparée. Pourquoi est-ce qu’on court ?
- Tu n’as pas vu leurs yeux ? Ces gens sont sous hypnose ! Je parie qu’il y a un Sépiatroce caché pas loin ! Il ne faut pas qu’on reste ici, sinon ils vont nous mettre le grappin dessus !
Encore sous le choc, Clem ne put qu’échanger un regard éperdu avec Dedenne, toujours perché sur son épaule, tout en continuant de courir. Voilà donc pourquoi elle avait eu ce sentiment de malaise oppressant… Plus le temps passait, et plus elle détestait les Sépiatroces. Ils avaient beau être des Pokémon, ils agissaient comme les pires créatures qui puissent exister ! Avant de croiser la route de ces immondes pieuvres, Clem n’aurait jamais pu imaginer que des Pokémon puissent être aussi méchants…
Si les employés étaient tombés sous le joug des Pokémon Psy, cela voulait dire que Clem et Miaouss n’étaient en sécurité nulle part. Il fallait rejoindre Lem et les autres au plus vite ! L’adrénaline de la peur donna des ailes à la petite fille, qui eut tôt fait de dépasser Miaouss, déjà plus ralenti par le poids conséquent de la mallette qu’il devait porter. Clem zigzagua de couloir en couloir, se dirigeant complètement au hasard. Son cœur cognait si fort dans sa poitrine qu’il menaçait à tout instant de s’en échapper.
« Bon sang, mais où est la sortie ? »
Tout à coup, la fillette dut s’arrêter brusquement. Elle était tombée dans un cul-de-sac.
- Oh non ! gémit Miaouss en arrivant derrière elle. Pourquoi est-ce que ce genre de trucs ne peut pas se produire que dans les films ?
Dedenne glapit. Clem fit volteface, et crut bien défaillir. Les adultes de tout à l’heure les avaient déjà rattrapés ; et pour couronner le tout, ils avaient ramené du renfort.
Les bras tendus devant eux à la manière des zombies, les ouvriers – hommes et femmes – s’avancèrent vers les fugitifs d’un pas excessivement lent, comme s’ils faisaient exprès de se déplacer au ralenti. La fillette recula jusqu’à sentir le contact dur et froid du mur contre son dos. Elle regarda autour d’elle paniquée. Miaouss avait parlé de films ? Mais en général, dans les films, les héros acculés trouvaient toujours une bouche d’aération, ou une porte dérobée pour pourvoir échapper à leurs poursuivants.
Mais ici, il n’y avait aucune ventilation, aucune porte de substitution. Juste deux murs et un plafond, tous du même blanc uniforme, et qui paraissaient rapetisser à mesure que les « zombies » se rapprochaient. Aucune échappatoire ; ils étaient pour ainsi dire coincés.
Tremblant comme une feuille, Miaouss serra la mallette de Pokéballs tout contre lui, et se colla aux jambes de Clem. Devant leur détresse, Dedenne sauta de l’épaule de sa gardienne, et fit bravement face à leurs poursuivants, les bajoues fourmillantes d’étincelles. Clem, paralysée, voulut le rappeler à l’ordre, sans succès. Une idée lui vint alors à l’esprit : et si elle appelait un des Pokémon contenus dans la mallette ? Non, ce serait bien trop risqué ; ces gens n’étaient que des victimes innocentes, manipulées par des Pokémon psychopathes. Elle ne pouvait pas les attaquer sans réfléchir !
De toute manière, il était déjà trop tard. Les employés zombies étaient déjà sur eux. Dedenne grogna aussi fort qu’il put, avant de libérer une petite décharge sur le sol. Mais cela freina à peine la progression des ouvriers hypnotisés. L’un d’eux tendit la main vers le petit rongeur, qui tremblait de peur.
- Dedenne ! Va-t’en !!
Soudain, un jet de flammes surgi de nulle part s’interposa entre le Pokémon et son agresseur, manquant de peu de brûler la main de ce dernier. Hébétés, Clem et Miaouss sursautèrent à peine lorsqu’un Démolosse sauta au-dessus du groupe, et atterrit devant eux. Fermement campé sur ses quatre pattes, il se dressa de toute sa hauteur face aux ouvriers, faisant barrage de son corps. Une voix inconnue s’éleva alors :
- Utilise Hurlement.
Le chien cornu prit une grande inspiration, et hurla à la mort, laissant son cri se répercuter sur les murs d’albâtre. Clem Miaouss et Dedenne se bouchèrent aussitôt les oreilles. Le cri semblait déchirer l’air autour, le rendant irrespirable. Puis enfin, lorsque le Pokémon Feu cessa son attaque, la fillette put ouvrir les yeux.
Stupéfaite, elle constata que tous les employés gisaient à terre, inconscients.
- Le Hurlement de Démolosse est suffisamment puissant pour faire tomber dans les vapes quiconque ayant une très faible force mentale. Ces personnes étant sous hypnose, c’est comme s’ils n’avaient plus aucune volonté. Un jeu d’enfant de les neutraliser, donc.
Clem et Miaouss sursautèrent, sur leurs gardes. La voix qu’ils venaient d’entendre leur était la même que celle qui avait commandé l’attaque Hurlement. S’ils ne savaient à qui elle appartenait, une chose était sûre : le ton n’était pas monocorde comme celui des hommes en blouse de tout à l’heure. La personne, qui qu’elle fût, n’était donc probablement pas un sbire des Sépiatroces…
A l’embranchement, la silhouette d’une jeune femme apparut finalement. Grande et élancée, elle portait une tenue rouge et noire, qui s’accordait à merveille avec ses cheveux d’un étrange rose pâle, ainsi qu’à ses lunettes de la même couleur, qui masquaient à peine ses yeux grenadine.
- Qui…qui êtes-vous… ? osa timidement demander Clem.
- Ne crains rien, petite, lui sourit l’inconnue. Je suis de votre côté.
Sans prêter attention aux airs étonnés de Clem et Miaouss, la femme aux cheveux roses s’approcha de son Démolosse, qu’elle caressa dans le creux du cou.
- Je suis déjà au courant de tout ce qui se passe ici. Et je souhaiterais vous aider à arrêter le Chasseur.
- Le Chasseur… ? répéta Clem, qui peinait à réfléchir correctement. Ah, vous voulez dire…l’Homme Masqué ?
Méfiant, Miaouss fronça le museau.
- Comment ça, vous êtes au courant de tout ? se braqua-t-il. Vous êtes qui, au juste ?
- Mon nom est Malva. (Un sourire énigmatique s’étira sur les lèvres fines de la susnommée.) Et je suis…votre alliée.
~*~Quelques minutes plus tôt.Le ciel chargé de nuages noirs comme l’encre s’illuminait partiellement sous le feu des éclairs ; l’orage était plus proche que jamais.
Néanmoins, au beau milieu de toute cette électricité qui faisait crépiter l’air lui-même, deux oiseaux continuaient de fendre les voûtes nébuleuses, arrachant quelques morceaux filigranes de nuages dans leur sillage.
Les ailes de Flambusard le faisaient atrocement souffrir. Il avait beau faire, son adversaire ne cédait pas d’un pouce. Les attaques de Roucarnage était aussi brutales et puissantes que dans ses souvenirs ; peut-être même encore plus, maintenant qu’il avait méga-évolué. Jusqu’ici, l’oiseau de feu avait tenu bon, mais ses forces s’amenuisaient de minute en minute. Il s’en faudrait bientôt de peu avant que la fatigue n’altère ses sens. Son adversaire en profiterait alors pour donner le coup de grâce…
Le rapace aux plumes rousses secoua la tête. Non ! Il ne devait pas renoncer maintenant ! Sacha comptait sur lui, il le savait. Et il était déterminé à faire honneur à son dresseur, et à le protéger coûte que coûte.
Un cri strident interrompit ses réflexions. Derrière les épais nuages, une forme, invisible à l’œil nu, le guettait. S’il avait eu des dents, Flambusard les aurait volontiers serrées. Bon sang… Où ce gros tas de plumes se cachait-il encore ? S’amusait-il avec lui, ou cherchait-il juste à lui faire baisser sa garde pour mieux le surprendre ? Tendu à l’extrême, l’oiseau de feu tourna lentement sur lui-même, ses yeux perçants guettant le moindre mouvement au milieu de ce décor où tout n’était que ténèbres et électricité.
Puis tout à coup, il perçut une ombre furtive, à la limite de son champ de vision. Réactif, il embrasa ses plumes, prêt à accueillir son adversaire.
Mais celui-ci ne vint pas. Le corps enveloppé dans les flammes, Flambusard tourna dans le vide. Impossible ; où Roucarnage était-il passé ?
Puis ce fut le choc. Un poids écrasant percuta l’oiseau de feu en plein dos. Deux hurlements de douleur, l’un d’une bête brûlée, l’autre d’un être sentant tous ses os de briser, se mêlèrent aux grondements du tonnerre, tandis que les deux oiseaux tombaient en chute libre vers le sol.
~*~- Ha ! Tu ne me laisseras jamais gagner, dis-tu ? Tu es pathétique : ne vois-tu donc pas que tu n’as
aucune chance de gagner ?
J’avais énormément de mal à respirer. Ma poitrine me faisait affreusement mal, comme si de la lave la consumait de l’intérieur. Ironique, comme sensation, sachant que j’avais la moitié du corps prise dans la glace.
Mais le pire était cette poigne de fer qui étreignait ma nuque. Je crois bien que je n’avais jamais eu aussi peur de toute ma vie. J’allais mourir, c’était presque inévitable. Tout mon être avait beau se refuser à cette idée, c’était désormais une certitude, qui tentait de se frayer un chemin dans mon esprit torturé. L’Homme Masqué allait me tuer, cette fois. Il lui suffisait d’appuyer un peu plus, et…
Mon cerveau, comprenant l'urgence de la situation, fonctionnait à plein régime. Tout en moi, chaque fibre de mon corps, même la partie gelée qui ne me répondait plus, hurlait mon désir ardent de vivre. Il n’était même plus question de victoire ou de défaite : je voulais vivre, c’était aussi simple que cela. Alors je me débattais, corps et âme, je frappais, même si c’était dans le vide. Je voulais continuer à pouvoir bouger, parler, respirer, vivre !
Cependant, une part un tant soit peu raisonnée de mon esprit gardait en mémoire une chose, qui m'empêchait de sombrer dans la panique complète. Une promesse que j’avais faite il y avait peu de temps.
« On restera ensemble, jusqu’au bout. »Je levai les yeux du plus haut que je pus, et aperçus le corps inanimé de Brutalibré. Une vague d’effroi me saisit ; respirait-il encore ? Je me débattis davantage, cherchant désespérément à me défaire de cette poigne d’acier qui bloquait ma respiration. Mais que fabriquait l’Homme Masqué ? Pourquoi ne disait-il plus rien ?
- Qu’est-ce que… ? murmura-t-il soudain.
Le front presque collé au sol, je ne pus voir venir ce qui arriva ensuite. Tout ce que je perçus fut un fracas terrible, suivi du bruit d’un corps percutant le métal. Puis une intense chaleur – réelle, celle-là – enveloppa mes membres frigorifiés. Elle s’insinua sous ma peau, et se distilla dans mes veines. Arceus, que c’était bon ! Je sentais mes forces me revenir petit à petit. Bientôt je pus bouger les jambes, et… Tiens, l’Homme Masqué n’était plus là ?
Le cou enfin libéré de l’étau qui le comprimait, je pus lever la tête, et voir ce qu’il se passait. L’Homme Masqué était tombé à genoux, un peu plus loin que moi. Le givre qui recouvrait le toit où nous nous trouvions était en train de se sublimer sous l’effet de la chaleur, créant une épaisse brume blanche. Je ne voyais plus Brutalibré, ni Akwakwak.
En revanche, je vis un autre Pokémon. Le Pokémon responsable de mon salut inattendu. Je tendis la main vers lui, et manquai de me brûler les doigts. Ses plumes étaient chaudes comme la braise. Cependant, c’était une chaleur revigorante, encore plus vigoureuse que la simple chaleur de la vie qui venait de renaître en moi. Les muscles tressaillant tandis qu’ils luttaient contre l’engourdissement, j’inspirai à fond l’air entre feu et glace.
- Merci, mon vieux. Maintenant, on peut continuer à se battre…
~*~D’un geste rageur, l’Homme Masqué se débarrassa de sa longue cape, qui obstruait ses mouvements. Il jeta des coups d’œil autour de lui. Le toit de l’usine grinçait étrangement sous ses pas, et certains pans de tôle paraissaient instables. Un brouillard rasant s’était subitement levé, ses volutes agrippant les bottes du chasseur de Pokémon. Celui-ci chercha les siens du regard.
Il détestait cette sensation qui commençait à s’emparer de lui : ce sentiment désagréable que la roue tournait en sa défaveur. Tout se passait si bien, jusqu’à présent ! Pourquoi avait-il fallu qu’il hésite ? A cause de cet instant de faiblesse, il avait laissé le contrôle de la situation lui échapper. Il y avait bien longtemps qu’il n’avait plus éprouvé ce sentiment. Celui d’être perdu. Désemparé.
Un mugissement interrompit ses réflexions. Stupéfait, l’Homme Masqué vit son Roucarnage s’ébrouer à quelques pas de lui, sa longue mèche colorée devenant une tâche très voyante au milieu du gris sombre du ciel du blanc laiteux de la brume. Le Chasseur était si concentré sur son objectif d’éliminer Sacha Ketchum qu’il en avait oublié le Pokémon oiseau.
« Mais alors, cette brume… » L’Homme Masqué comprit soudain quelle était son origine, mais trop tard. Devant lui, le gamin, soutenu à grand-peine par un Pokémon au corps littéralement en flammes, s’était libéré de la glace. La Pokéball – encore à moitié gelée – de son Croâporal à la main, il se releva avec précautions, tout en aidant son Flambusard à en faire autant.
Undertale OST - But The Earth Refused To Die (Anniversary ReMix)- Maintenant…, souffla-t-il, ça suffit. Tout ça est allé beaucoup trop loin. Il faut en finir…
- En finir ? répéta le chasseur, espérant que le chevrotement involontaire de sa voix fût occulté par son masque. Tu persistes donc à vouloir continuer cette lutte ridicule ? Ne te fais pas d’illusions, gamin. Tu as peut-être réussi à t’en sortir cette fois, mais ce n’est qu’un retard d’échéance ! Quoique tu fasses, le résultat restera toujours le même, tu es bien trop prévisible pour cela. Tes Pokémon ont beau avoir progressé, ils ne seront jamais capables de rivaliser avec les miens. Deux choix s’offriront alors à toi : les regarder, impuissant, se faire massacrer sous tes yeux, ou bien mourir en tentant de les protéger. Dans les deux cas, tu es condam-
- LA FERME !! J’en ai ma claque de vous entendre vous moquer de nous sans arrêt ! De quel droit vous vous permettez de juger notre manière de combattre ? Je ne suis peut-être pas assez fort pour survivre dans ce monde, surtout face à des adversaires aussi barbares et impitoyables que vous, et alors ?! C’est bien pour ça que je voyage aux côtés de mes Pokémon, et de mes amis. Ensemble, nos faiblesses deviennent moindres. Les points faibles de chacun sont compensés par les points forts des autres. Notre force, nous la tirons de notre travail d’équipe, et de la confiance qui règne entre nous. Mais vous qui êtes si seul, pouvez-vous seulement comprendre ça ?!
Bien loin de l’émouvoir, cette tirade attisa davantage la haine de l’Homme Masqué envers ce gamin horripilant.
- Encore, encore et toujours des belles paroles… Mais je vais m’assurer de vous faire taire à jamais, toi et ta stupide naïveté. Et cette fois, pas question d’échouer… Akwakwak !
Le palmipède s’arc-bouta, prêt à bondir, quand soudain un bruit de fêlure retentit près de lui. Grognant sous l’effort, Brutalibré lui décocha un uppercut en plein bec. Akwakwak s’écroula dans le givre fondu, sonné.
Ahuri, l’Homme Masqué regarda, poings serrés, l’oiseau de combat rejoindre son dresseur en claudiquant.
- Vous avez raison sur un seul point : mes Pokémon et moi sommes faibles. Mais à chaque combat que nous livrons… à chaque défaite que nous essuyons… à chaque victoire que nous remportons… Nous gagnons chaque jour en force, et notre lien devient encore plus étroit. Je me bats aux côtés de mes Pokémon, j’apprends à les connaître de jour en jour, et je progresse avec eux.
- Et tu penses vraiment que votre amitié est la solution à tout ? rétorqua le masqué. Tu te reposes bien trop sur tes amis, gamin. Et c’est cela qui causera ta perte. Je te l’ai déjà dit : ce monde est impitoyable. L’amitié n’y est qu’une chimère, et tu perdras bien plus à te reposer sur de prétendus amis qui te trahiront un jour. La seule chose qui compte vraiment, c’est de survivre. Dans ce monde, c’est vaincre ou être vaincu. Dominer ou être dominé. (Il leva le bras.) Et j’ai choisi mon camp depuis bien longtemps déjà !
Roucarnage prit son envol, mais Flambusard le prit aussitôt de court. Rapide telle une étoile filante, il assomma son adversaire d’une Aile d’Acier portée en plein ventre. L’Homme Masqué retint un hoquet de stupeur.
- Vous parlez de survie, poursuivit Sacha, mais vous croyez vraiment que vous avez survécu à ce monde impitoyable que vous décrivez ?
- Te moques-tu de moi ? Je suis toujours en vie, à ce que je sache !
- Ce n’est pas la question. On sait tous que la vie n’est pas toute rose. Même moi, je le sais – c’est pas faute d’en avoir eu l’expérience récemment…, ajouta-t-il avec un sourire sans joie. Mais pourtant je m’accroche. Je continue de me battre malgré les coups durs. Parce que j’ai quelque part dans ce monde des personnes qui me sont chères. J’ai des idéaux pour lesquels me battre. Et quand la difficulté, l’échec se sont dressés sur ma route, et m’ont mis un genou à terre… À chaque fois, les Pokémon étaient là pour me soutenir.
Sacha s’interrompit, pris d’un soubresaut. Estomaqué, l’Homme Masqué comprit qu’il riait.
- Et y’a pas qu’eux, d’ailleurs… Tous mes amis, ceux avec lesquels j’ai voyagé tout comme ceux que j’ai croisé sur ma route… tous m’ont un jour ou l’autre apporté quelque chose. Quelque chose qui m’a donné la force de continuer à vivre. Et c’est bien pour ça que je ne peux pas me permettre de renoncer maintenant. Pas après tout ce qu’ils ont fait pour moi.
Au-dessus d’eux, le ciel rugit, zébré de part en parts par des éclairs de plus en plus nombreux. Toujours aucune goutte de pluie, cependant.
- Encore en ce moment, mes amis se battent, je le sais. Ils se battent de toutes leurs forces pour moi ; et je me bats aujourd’hui pour eux. Ce combat n’est pas seulement le mien : c’est celui de tous ceux qui m’ont aidé à grandir, et à faire de moi ce que je suis aujourd’hui !
- Humph ! Vas-tu te taire ?! éructa le Chasseur. Utilise Vent Violent !
Roucarnage hurla, comme en écho au cri de rage de son dresseur, et déclencha une tornade géante, qui emprisonna non seulement Flambusard, mais également Brutalibré et Akwakwak, toujours au sol. Le canard et l’oiseau de combat furent presque soulevés de terre, tant le courant était puissant.
- Vous voyez ?! s’écria Sacha, luttant de son mieux contre les bourrasques qui le fouettaient. Vous vous fichez de blesser vos propres Pokémon ! Vous ne vous battez pour rien d’autre que pour asseoir votre supériorité ! La vie a fait de vous un monstre, et vous osez dire que vous lui avez survécu ?
Vous n’êtes même plus humain !!Balloté par les vents puissants, Flambusard sentait qu’il perdait le contrôle de son propre corps. Toutefois, sans trop savoir comment, il réussit à entendre la voix de son dresseur. Son bec se crispa. Se souvenant de son dernier combat contre Roucarnage, il déploya ses ailes, écarta ses plumes de manière à ce que le vent s’y engouffre au lieu de les frapper. Immédiatement, il se sentit plus léger. Son corps se laissait porter par le vent, qui tournoyait sans cesse.
- BRÛLE ! (Flambusard entendit de nouveau la voix de Sacha, par-dessus les rugissements du vent.) BRÛLE FLAMBUSARD ! NE LES LAISSE PAS AVOIR RAISON DE TA VOLONTÉ !! BATS-TOI !!
Même s’il savait qu’il ne pouvait le voir, Flambusard hocha la tête. Oui. Il allait se battre. Pour sa survie, mais également pour celle de ses amis.
Abandonnant toute résistance face aux vents violents, il puisa dans toute la réserve d’énergie qui lui restait, et embrasa ses ailes. Le souffle de la tornade, comme animé d’une volonté propre, tenta d’étouffer ces flammes. Mais l’oiseau de feu ne renonça pas, et fit appel à toute la chaleur de son corps, afin de laisser les flammèches qui dormaient dans ses plumes enfler, brûler cet air qui tournait tout autour de lui, comme s’il cherchait à échapper à ce funeste destin.
Pendant ce temps, au sol, l’Homme Masqué ne voyait rien de ce qu’il se passait à l’intérieur de la tornade. Ravalant un rire moqueur, il s’apprêta à donner le coup de grâce.
- Cette fois, ce coup sera le dernier. Utilise Piqué !
Au-dessus de la tornade, Roucarnage se mit à briller, d’une lumière trop intense pour que l’on puisse la regarder directement.
Mais alors qu’il comptait fendre la tornade qu’il avait lui-même créée, une puissante bourrasque le frappa par en-dessous. L’Homme Masqué ne put contenir un cri de rage. Que s’était-il encore passé ?!
Tout à coup, l’ouragan sembla se dilater. Les vents tournaient dans une direction totalement aléatoire en son centre, l’obligeant à se désagréger.
Le Chasseur comprit soudain. Au milieu de ce tourbillon aquilin, il aperçut un point rouge brillant. Ce n’était pas une flamme, mais c’était tout comme.
« La chaleur produite par ce Flambusard réchauffe l’air et le fait remonter… Or les tornades sont également créées par des vents descendants ! Il est en train de dissiper le Vent Violent ! »
Pris dans un courant ascendant, Roucarnage, n’arriva pas à se redresser. La lueur de l’attaque Piqué se résorba. En revanche, celle de Flambusard gagna en intensité. Finalement, une flamme à l’apparence d’un oiseau géant se matérialisa, tandis que le tourbillon mourait en une multitude de petits courants d’air.
- LANCE RAPACE !!
Un cri perçant répondit à celui de Sacha. La flamme rouge devint bleue, puis mauve, avant de filer droit sur Roucarnage telle une lance. Le Méga-Pokémon ne put l’éviter. L’attaque l’atteignit par le haut, et le précipita à une vitesse ahurissante en direction du sol.
Sauf que le sol en question était un toit. Et cette fois, ce toit ne put résister à la force de l’impact auquel il fut soumis.
Une détonation déchira l’air en même temps qu’un éclair déchira le ciel. Puis la structure s’effondra, emportant avec elle ceux qui se trouvaient dessus.
~*~Clem était partagée entre un sentiment d’excitation et de terreur. Elle et Miaouss se trouvaient désormais sur le dos du Démolosse qui leur avait sauvé la vie, et qui à présent les portait sans aucune gêne sur son dos. Les couloirs auparavant immenses de l’usine défilaient désormais à une allure folle. La dresseuse du Pokémon Feu, cette dénommée Malva, courait à leurs côtés avec un rythme incroyablement soutenu pour une femme aussi frêle en apparences. Comme quoi, ces dernières pouvaient se montrer trompeuses…
Monter sur un Pokémon était une expérience réellement grisante ; néanmoins, Clem savait que ce n’était pas le moment de se laisser aller. Lem et Serena allaient avoir besoin de renfort, et c’était elle qui détenait la clé de leur sauvegarde. Serrée contre elle, la mallette contenant les Pokéballs de son frère et ceux de la Team Rocket paraissait résonner de l’envie de sortir des êtres enfermés à l’intérieur.
- Attendez. Stop !
A la voix de sa dresseuse, Démolosse s’arrêta immédiatement, secouant par-là même ses passagers.
- Hé ! protesta Miaouss. Qu’est-ce qui vous prend ? On n’a pas le temps de s’arrêter faire une pause !
L’index posé sur les lèvres, Malva lui intima de se taire. Pressentant que quelque chose n’allait pas, Clem tendit l’oreille. Au loin, un son ténu semblable à un grondement se faisait entendre.
« C’est peut-être l’orage… ? » La petite fille s’apprêtait à demander à leur bienfaitrice de se remettre en route, quand le grondement s’amplifia soudain. Les murs autour d’eux se mirent à vibrer.
- Qu’est-ce qui se passe ? s’écria Clem.
- C’est mauvais…, marmonna Malva avant d’ajouter, plus haut : Changement de plan ! On fonce vers l’extérieur !
Clem et Miaouss n’eurent pas le temps de poser de questions. Démolosse se remit brutalement en route, suivant à la trace sa dresseuse. Celle-ci paraissait savoir où elle allait ; pourtant la crainte se lisait sur son visage.
- Là ! Par ici, Démolosse !
Le couloir qu’ils empruntaient menait à une unique porte. Le chien cornu aboya, et enfonça celle-ci tel un bélier. Une fois le choc passé, Clem, Miaous et Dedenne purent ouvrir les yeux. Ils étaient arrivés à l’extérieur de l’usine. Dehors, le ciel était chargé de nuages d’orage. L’air était si lourd qu’il semblait peser une tonne.
Une nouvelle détonation retentit, très proche. Humains et Pokémon se couvrirent instinctivement les oreilles.
- C’était quoi ? fit Clem une fois que l'écho fut dissipé. Le tonnerre ?
- Non, répondit Malva. C’était bien trop proche. Ça semblait venir de l’usine…
- Clem !
La fillette sursauta en entendant son nom. N’y croyant plus, elle descendit du dos de Démolosse, et alla à la rencontre de celui qui l’avait appelée.
- Grand-frère !
- Enfin je te retrouve ! s’exclama l’inventeur, partagé entre soulagement et colère. Qu’est-ce qui t’a pris de partir comme ça, sans prévenir ? J’étais inquiet…
- Je sais, mais… (Clem se saisit de la mallette et la présenta à son frère.) Regarde, j’ai retrouvé nos Pokémon ! On va pouvoir aider Serena !
Lem soupira, vaincu. Il ne pouvait pas totalement en vouloir à sa sœur ; elle avait seulement eu l’intention de les aider, rien de plus. Le garçon préféra chasser la peur mêlée de colère qui lui brûlait la poitrine, et caressa gentiment la tignasse blonde de sa cadette.
- Ne fais plus jamais ça, d’accord ? Je comprends que tu aies voulu nous aider, mais tu ne dois pas partir toute seule sans m’en parler.
- Désolée…
- Euh… Elle était pas complètement seule, puisque j’étais là…, fit valoir Miaouss, frustré d’être laissé pour compte.
Malva s’approcha de la fratrie, le visage soucieux.
- Tu es Lem, le champion de l’arène d’Illumis, si je ne m’abuse ?
Le concerné leva les yeux, et faillit s’étrangler en reconnaissant son interlocutrice.
- Mais vous… Vous êtes Malva, du Conseil Quatre ?! Que faites-vous ici ?
- C’est une longue histoire, éluda la dresseuse en soupirant. Mais sache que je suis de votre côté. Je tiens à stopper les actions du Chasseur, et de ses Sépiatroces.
Éberluée, Clem fixait Malva avec un nouveau regard. Alors cette mystérieuse femme était, si l’on exceptait le maître Dianthéa, l’un des quatre dresseurs les plus puissants de la région de Kalos ? Son admiration pour elle s’en trouva grandie.
Tandis que Lem récupérait, non sans soulagement, ses précieuses Pokéballs, Malva lui demanda des informations sur ce qu’il s’était passé dernièrement, notamment cette explosion.
- Je n’en sais rien…, avoua le jeune champion. J’étais déjà dehors quand c’est arrivé. Mais il m’a semblé voir de l’agitation sur le toit. Je crois que c’est de là que…
- Trooooss !
Ce croassement sinistre fit se tourner toutes les têtes. Clem crut à un cauchemar : un Sépiatroce se tenait juste au-dessus d’eux ! L’espace d’un bref instant, elle craignit que Serena n’ait échoué à le vaincre, avant de remarquer l’absence de balafre sur l’œil du Pokémon. Il ne s’agissait donc pas du même.
- Restez en arrière ! leur intima Malva.
- Clem, va te mettre à l’abri, renchérit Lem.
Le champion appela Marisson et Sapereau en renfort. Les deux arrivants se placèrent aux côtés de Démolosse, qui grognait férocement à l’intention de la pieuvre. Étrangement, cette dernière était dans un piteux état. Des blessures encore non cicatrisées parsemaient son corps gélatineux, et il haletait bruyamment comme un coureur en fin de marathon.
« Il est déjà blessé, ça sera peut-être plus aisé de le vaincre… » Se dit Lem.
- Ne baisse pas ta garde, lui souffla Malva comme si elle avait lu dans ses pensées. S’il parvient à hypnotiser l’un de nos Pokémon, il pourra toujours nous mettre en difficulté.
Lem acquiesça, concentré comme jamais. Imité par Malva, il tendit le bras, prêt à donner un ordre à ses Pokémon.
Puis, contre toute attente, un fulgurant éclair tomba droit sur le Pokémon Psy, l’électrocutant vif. Sous les yeux horrifiés de Lem et des autres, le Sépiatroce hurla de douleur, avant de s’effondrer, inerte sur le sol. Pas un mouvement ne vint animer son corps carbonisé.
Il était raide mort.
- Im...impossible…, bredouilla Malva. D’où sortait cet éclair ?
Soudain, sur la tête de Clem, Dedenne commença à s’agiter. Des étincelles parcoururent ses bajoues, avec tant d’intensité que le petit rongeur dut se les pincer en gémissant.
- Dedenne ! s’alarma Clem. Qu’est-ce qui t’arrive ?
Le Pokémon Electrik descendit de son perchoir, en proie à un mal que personne ne comprenait. Personne, sauf Miaouss.
- Non… Il dit qu’il l’entend ! Il approche !
- « Il » ? répéta Lem. Qui ça, « il » ?
Puis il comprit. Ces étincelles sur les joues de Dedenne ne pouvaient être provoquées que par une seule chose.
Au même instant, un nouvel éclair illumina le ciel, accompagné d’un coup de tonnerre retentissant. Lorsque la lumière s’atténua, tous purent voir le responsable de la mort subite du Sépiatroce. Mais au lieu de les réjouir, son retour ne fit qu’augmenter leur peur déjà croissante.
- Pikachu… ? murmura Clem.
Le corps bardé d’arcs électriques, Pikachu toisa ceux qui se trouvaient sur son chemin. Une lueur maladive brillait au fond de ses prunelles. Une lueur avide de vengeance.