Partie 3 : Flamme cruelle.
Cyarès
Ce cher petit Talos avait enfin craché le morceau. Alors comme ça, Belcol-Exion avait un lien avec l’une de nos prisonnières, une certaine Morflam. J’en avais entendu parlé d’elle, une Magical Pokégirl indisciplinée qui faisait grand bruit au temps où elle s’entraînant encore entre ces murs. Elle était également la protégée du Primonarque lui-même, chose suffisamment rare pour être citée.
Mais ce n’est plus le cas. Visiblement, elle avait bien déçu le grand manitou, puisque Talos lui-même venait de m’autoriser à l’utiliser comme je l’entendais.
Tout de même, pour une prisonnière, elle était plutôt bien lotis. Un appartement privé dans les étages supérieurs de l’Éternôme, rien que ça. J’en serais presque jaloux, avec mon petit studio dans les zones inférieures. Je m’arrêtais, réfléchissant une dernière fois à mon plan avant de toquer à la porte.
— C’est pas trop tôt ! Entrez ! retentit une voix provenant de la pièce.
Je plissai les yeux. Ce ton de voix arrogant n’était pas vraiment ce à quoi je m’attendais. Je m’exécutai tout de même. Ce que je vis me laissa sans voix.
Morflam était bien là. Une Roussil un peu trop à son aise, allongée sur un énorme coussin. Elle mangeait en continue des grappes de baies tel un quelconque empereur.
— Enfin ! s’exclama-t-elle sans même me regarder. J’en avais assez des Resins, vous avez apporté la viande comme je vous l’ai demandé, n’est-ce pas ? Cuit à point avec du gros sels !
Peut-être qu’elle était encore à la bonne du Primonarque finalement. Cette fille avait toujours été un mystère pour nous, elle ne correspond à aucun critère de la Guilde. Ordre ? Discipline ? Assiduité ? Des mots totalement inconnus pour elle.
— Je suis au regret de vous annoncer que je ne suis pas un domestique, répondis-je avec une pointe d’agacement.
— Ah ?
Enfin intéressée, Morflam se releva et me fixa, interloquée.
— … et ma viande cuite à point avec du gros sels ? couina-t-elle la larme à l’œil.
— Voyez ça avec quelqu’un d’autre.
D’ailleurs, je ne savais même pas qu’on avait des choses pareilles ici, moi-même je devais manger des rations insipides comme les recrues.
— Mais j’ai faim moi ! protesta la Roussil. Ça doit faire dix minutes que je n’ai pas mangé de viande ! Vous savez ce que ça représente, dix minutes ?! C’est le temps d’engloutir sept-cent quarante-deux baies ! Vous… eh au fait, vous êtes qui vous ?
J’avais déjà mal à la tête. J’avais peine à croire qu’elle avait été l’une des nôtres.
— Commandant Cyarès, me présentai-je. Je m’occupe actuellement de l’entraînement des nouvelles recrues.
— … aucun rapport avec la nourriture donc… grrr, je savais que ce traitement de faveur ne durerait pas longtemps… j’étais mieux chez Cassis… je me demande comment elle va d’ailleurs, elle, Belcol, Affienns, et tout le monde…
Je soupirai lourdement, incapable de supporter plus longtemps les propos incohérents de cette ‘‘prisonnière’’. Et puis, pourquoi est-ce que je discutais avec elle ? Cela ne m’apporterait rien de continuer cette mascarade.
— À toi de jouer, Sarin.
— Enfin un peu d’action ! ricana-t-il.
Je tendis ma main, pointant ma bague sertit d’une améthyste vers la Roussil. Aussitôt, un nuage violacé en sortit et enveloppa sa cible, qui ne comprenait pas ce qu’il se passait. Le poison infiltra impitoyablement sa peau ; quelques secondes plus tard, ces yeux s’illuminèrent d’une faible lueur violette.
— Je reprends depuis le début, dévoilai-je mes crocs. Je suis le Commandant Cyarès, quant à vous, vous-êtes Morflam… mon fidèle serviteur.
Elle me fixa, les yeux grands ouverts. Elle s’approcha, titubante. Et enfin, elle consentit à me répondre.
— Je suis à vos ordres, Maître.
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Belcol-Exion
Ma petite escapade dans les prisons de l’Éternôme n’avait rien donné, Morflam était introuvable. Pourtant j’en avais trouvé du monde dans ces prisons, il y avait même d’autres visiteurs que moi. D’après ce que j’avais compris, la Guilde encourageait ce genre de comportement car cela permettrait de montrer sa supériorité par rapport à ceux derrières les barreaux. Un truc assez pervers, si vous voulez mon avis.
Quoi qu’il en soit, si elle n’était pas dans les prisons, ça allait être coton de la retrouver ! L’Éternôme, montait jusqu’à l’espace…
— Dépêche-toi mon copain ! s’excita la voix de Jude. Faut pas être en retard !
— Mouais, mouais…
Cet agaçant personnage avait tout de même raison, notre bon Cyarès avait apparemment une grande nouvelle à nous annoncer ce matin. Je n’avais pas très envie de contrarier ce Lucario, la rouste qu’on avait subit la veille m’avait bien refroidi.
En pressant le pas, nous arrivâmes rapidement au point de rassemblement. Lawk était déjà là, munie de son éternel air placide. Il me salua d’un signe d’aile et comme d’habitude, ignora totalement les exubérances de Jude. Parfois, j’aimerais savoir comment il faisait…
Plusieurs minutes plus tard, une fois que toutes les recrues furent rassemblées, Cyarès fit enfin son apparition. Mes crocs en tombèrent par terre. Le Lucario n’était pas seul, un autre Pokémon l’accompagnait. Ce n’était pas Sarin, mais quelqu’un que je connaissais bien : Morflam. Qu’est-ce qu’elle fichait ici ?! Elle n’était pas sensée être prisonnière ?!
Je bouillonnais d’interrogations, mais je me contenais. Exploser au milieu de tout le monde serait contre-productif… même si l’envie de bondir et d’emmener Morflam avec moi me brûlait.
Cyarès balaya la foule du regard ; c’était peut-être mon imagination, mais je crus voir un petit sourire lorsque nos regards se croisèrent. Obtenant le silence, le Lucario commença son discours.
— Bonjour, fières recrues de la Guilde. Aujourd’hui, comme vous l’avez sans doute remarqué, nous recevons une invitée, et pas n’importe laquelle. Je vous présente Morflam, une puissante Magical Pokégirl que nous sommes heureux de compter parmi nos rangs.
Plus de doute – même si j’en avais déjà aucun – c’était bien notre Morflam. Mais à y regarder de plus près, quelque chose clochait. Elle semblait absente, vide. Elle qui était d’habitude si lumineuse et en quête permanente de nourriture ! Qu’est-ce que ce salaud lui avait fait ?!
— Sarin étant occupé par certaines affaires urgentes, c’est Morflam qui le remplacera quelques jours. Ne pensez cependant pas qu’elle sera plus douce que mon fidèle second, où vous ferez connaissance avec ses flammes.
Jude ne tenait plus en place, des étoiles dans les yeux.
— Belcol, Lawk ! sautilla-t-il. Une Magical Pokégirl, c’est incroyable ! C’est super rare ces gens-là !
— …vraiment ? soufflai-je à demi-voix.
Entre Morflam et Persyval, j’avais l’impression d’en croiser à tous les coins de rues maintenant. Il fallait dire que traîner avec Stalhblume forçait la rencontre avec beaucoup de phénomènes.
— Une combattante émérite, intéressant…, marmonna Lawk une lueur de défi dans les yeux.
— Je ne te conseille pas d’aller l’affronter, répliquai-je. Elle n’a pas l’air fine vu comme ça, mais elle peut faire des trucs assez hallucinants.
— Tu parles comme si tu la connaissais.
Je grinçai discrètement des dents. Zut, je n’étais pas vraiment censé parler de mon passé ici, ce n’était pas le moment de gaffer. Mais j’avais l’impression que j’étais déjà découvert. Si Morflam était là, ce n’était certainement pas un hasard, Cyarès devait savoir que j’avais un lien avec elle. Et s’il l’avait ramenée ici uniquement pour me jouer un tour ? J’avais un sacré mauvais présentement.
Pendant que je me triturais l’esprit, le Lucario reprit la parole.
— Pour fêter l’évènement, l’échauffement du jour sera un peu spécial. Pour la quasi-totalité d’entre vous, c’est la première fois que vous voyez Morflam. Et moi, je vous la présente comme étant un Pokémon exceptionnel, sans aucune preuve. Hé bien, l’échauffement servira de preuve. Vous tous, contre Morflam. Pour vous avantager, je vous offre un petit bonus : si dans dix minutes elle ne vous a pas tous vaincu, vous avez gagné. En revanche, pour vous motiver, si vous n’arrivez pas surmonter l’épreuve, vous resterez le reste de la journée le ventre vide.
Ce Lucario… c’était donc comme ça qu’il voulait jouer. Une lutte générale, nous tous contre Morflam. Je ne savais pas comment le prendre. J’espérais tout de même qu’elle ne sortirait pas blessée de l’affrontement. Nous étions tout de même à trente, Morflam était puissante mais pas tant que cela, du moins, dans mes souvenirs.
— Hé bien, qu’est-ce que vous attendez ? ria Cyarès. L’épreuve à déjà commencé, ah, et j’oubliais : si par miracle l’un d’entre vous parvient à la mettre K-O, il pourra me demander n’importe quoi, je le lui accorderais.
— … !
L’offre alléchante saisit chacun d’entre nous, et une seconde plus tard, plusieurs recrues foncèrent vers la Roussil, qui restait immobile. Je me tendis, inquiet. Je n’avais aucune raison de l’être. Brusquement, une tempête de Danseflamme repoussa tous les assaillants avec une facilité déconcertante. La tempête se resserra ensuite autour de son corps, formant une ardente protection tourbillonnante. Hé ? C’était moi où ses flammes semblaient un peu plus puissantes que d’habitude ? La chaleur était telle que j’étais déjà en sueur.
— Redoutable, lâcha Lawk. Attaquer de front est inutile.
— Une véritable Magical Pokégirl en action ! brilla Jude. C’est trop cool ! Hein que c’est trop cool, hein ?!
— Si tu trouves ça tellement cool, soupirai-je. Pourquoi tu ne tentes pas ta chance ?
— Ça c’est une super idée !
Et le Togetic fusa, tout joyeux, prendre sa dérouillée. Évidemment, il n’avait absolument aucune chance seul. En moins de deux, il revient s’écraser à nos côtés, propulsé par une boule de feu. Voir cet être horripilant tout hagard, aussi noir que le charbon, me procurait une intense satisfaction. Bien joué Morflam !
— Attaquer de front est inutile, répéta Lawk avec une pointe d’agacement. On ne peut pas la vaincre, il faut tenir dix minutes.
— Certaine personne sont trop stupides pour le comprendre, soupirai-je en fixant les recrues qui continuaient à foncer vers Morflam.
— Envie d’affronter un adversaire inédit, lança le Brutalibré. Je peux comprendre.
Haha, je pouvais voir ses ailes trembler d’excitation. Lui aussi devait brûler de cette fameuse envie, mais heureusement, il était suffisamment intelligent pour rester maître de ses émotions. Ce qui n’était pas du tout le cas de Jude qui repartit commander une raclée ardente dès qu’il reprit ses esprits. Mais je pensais plus que s’était la perspective de se faire exaucer un vœu qui motivait mes camarades plutôt que le désir d’affronter un ennemi puissant.
Finalement, les autres recrues comprirent qu’ils n’étaient pas de taille et stoppèrent leurs assauts inutiles. Morflam changea également de stratégie et nous prit en chasse. J’avais extrêmement envie d’aller à sa rencontre, mais elle n’était visiblement pas dans son état normal : depuis le début du combat, son expression restait stoïque, pire encore, elle n’avait fait aucune allusion à la nourriture ! Dingue ! J’avais hâte d’en discuter avec les autres ce soir avec le Transcom.
Toujours aussi indifférente, Morflam continuait son massacre. De simples recrues n’avaient strictement aucune chance contre elle, surtout qu’elle semblait avoir reçu un mystérieux power-up assez terrifiant. Le bon côté des choses était qu’elle ne prenait pas un plaisir sadique à nous affronter, contrairement à Sarin. Elle ressemblait plus à un robot qui exécutait mécaniquement des actions… mmh, à bien y réfléchir ce n’était pas vraiment un bon côté en fait.
— Bordel Morflam, qu’est-ce qu’il t’arrive ?!
Nous tombions comme des mouches. La Roussil se servait de ses flammes pour se propulser à une vitesse pharamineuse, cueillant ses cibles une à une. C’était assez impressionnant de voir autant de Pokémon se faire éjecter à la suite. Un peu dangereux aussi, avais-je pensé lorsqu’un malheureux Gravalanch manqua de m’écraser. Tenir dix minutes n’était qu’illusion.
Toujours accompagné de Lawk, nous avions tellement couru que nous venions d’atteindre la zone montagnarde de la dimension d’entraînement.
— Ici c’est parfait, statua le Brutalibré.
— Tu as un plan ?
— Cette montagne est continuellement enneigée, expliqua-t-il. Un Pokémon Feu est par défaut désavantagé.
Je n’étais pas certain de la pertinence de cette affirmation, mais je n’avais clairement pas le temps de m’interroger, Morflam arrivait déjà. Il ne restait plus grand monde du côté des recrues. Quelques-uns de nos camarades avaient suivi notre mouvement et se trouvait avec nous. Fort heureusement, Jude n’était pas là.
D’un geste de baguette, Morflam invoqua une immense gerbe enflammée. Nous bondîmes tous en catastrophe, priant très fort pour ne pas se faire transformer en merguez. Soudain, je compris ce que voulait dire Lawk. Le feu avait fait fondre une grande partie de la neige, provoquant un véritable torrent dévalant impitoyablement la montagne. Beaucoup de recrues furent emportées, certes, mais Morflam n’avait pas non plus prévue cet enchaînement de cause et effet.
Elle se défendit du mieux qu’elle le put avec un bouclier de flamme, mais ce n’était qu’une protection de fortune. Dès que la déferlante catastrophique se calma, un brusque coup de vent faillit me faire tomber : Lawk était passé à l’attaque, vif comme l’éclair. Il fut le premier à arriver à porter un coup direct à Morflam. Cette dernière recula vivement, prête à riposter, mais le Brutalibré s’était déjà replié, ayant exécuté un parfait Demi-Tour.
— Pas mal, lui soufflai-je alors qu’il atterrissait à mes côtés.
— Coriace. Je l’ai à peine égratignée. Et aucun dommage dû à l’avalanche n’est à signaler.
Il semblait déçu, mais je pouvais sentir son esprit combatif fulminer. Ah, grâce à son calme hors du commun, Lawk était certainement la recrue la plus puissante. J’imagine que je pouvais lui faire confiance de ce côté-là.
Du moins c’était ce que je pensais, avant que Morflam, vengeresse, ne fonce vers lui. Elle n’utilisait plus ses flammes, ayant appris la leçon, mais sa baguette renforcée par des fragments de Choc Psy.
Il n’y avait plus de risque de se faire carboniser, toutefois, le moindre mouvement de baguette était si fulgurant qu’il générait une bourrasque déconcertante. Cette fois, j’en étais plus que certain, Morflam était bien trop puissante comparé à d’habitude, surtout qu’elle ne s’était même pas transformer en Magical Pokégirl !
Lawk peinait à répondre aux agressions de Morflam. Son genre était plutôt de rester loin et lancer de brefs assauts tous azimuts avant de s’éloigner à nouveau. Là, Morflam empêchait toute fuite, et le forçant à rester au corps-à-corps. Lawk n’abandonnait pas, focalisant toutes ses compétences pour esquiver les coups meurtriers, cependant, à peine il en évitait un de justesse, un autre survenait immédiatement, tout aussi – sinon plus – puissant que le précédent.
Mon camarade Brutalibré tint bon longtemps, mais la fatalité, elle, était inesquivable. Un coup de baguette l’atteint en pleine poitrine, lui coupant tout souffle ; il alla instantanément s’encastrer dans la neige.
Sans Lawk, il n’y avait personne pour opposer une minimum de résistance à Morflam. Ceux qui fuyaient se faisait immédiatement rattraper, et les téméraires tentant le tout pour le tout perdirent quelques dents ou crocs dans la neige – pour ceux qui en avaient.
Tout d’un coup, je remarquais qu’il ne restait que moi. Il fallait dire que depuis le début, je n’avais rien fait, mis à part suivre Lawk. Comme si je n’étais qu’un observateur. Un rôle que je m’étais donné pour échapper à la réalité, certainement. J’avais dû mal à accepter ce qui se passait. Je devais me battre contre Morflam. Morflam qui n’était pas dans son état normal. Beaucoup trop de questions se bousculait dans ma tête. Beaucoup trop de questions m’empêchait d’agir.
Morflam dirigea son attention vers moi. J’espérais secrètement qu’elle me reconnaisse enfin, mais rien. Elle avançait mécaniquement. Ça me faisait mal au cœur. Je restais pétrifié, soumis aux flots d’informations inondant mon pauvre cerveau. Je ne voulais pas me battre. Pas contre Morflam. Je n’étais pas là pour ça. Étais-je stupide ? Certainement. Si je restais planté là, je finirais comme les autres, le crâne dans la neige.
J’avais tout intérêt à faire quelque chose. Fuir pour gagner du temps ou combattre pour avoir un vœu. Si Cyarès tenait parole, je pourrais demander de rentrer à Wearl avec Morflam… ah, c’était impossible. Premièrement, compter sur Cyarès était une mauvaise idée, et ce n’était pas comme si je pouvais vaincre Morflam. Fuir, alors ? Certainement la meilleure chose que je pourrais faire. Je n’ai pas compté, mais les dix minutes devaient être presque écoulé.
Sauf que… j’étais stupide. Brusquement, une vive douleur sembla m’arracher la peau et mon corps s’écroula. Je souris de ma bêtise. Voilà ce qui se passait lorsqu’on réfléchissait trop dans une situation urgente…
— Perdu, résonna la voix de Cyarès. 9 minutes et 57 secondes, vous savez tous ce que ça veut dire. Vous y étiez presque tout de même. Dommage que Belcol-Exion est resté planté comme un piquet… enfin, on n’y peut plus rien maintenant. Dépêchez-vous de revenir au camp, on a entraînement à reprendre !
***
S’il y avait une chose que j’avais apprise sur Cyarès, c’était qu’il tenait toujours parole lorsque ça l’arrangeait. C’était donc tout naturellement que chacun d’entre nous avait été privé de repas, durant toute la journée. Pour enfoncer le clou, le Lucario avait décidé de nous faire faire un éreintant et interminable parcours d’endurance. Sympa.
Et s’il n’y avait que ça. Tout le monde me tenait pour responsable de l’échec de ce matin. Des regards noirs me frappaient où que je sois. Ils n’avaient pas spécialement torts, j’avais complètement merdé pour le coup. Il suffisait de tenir trois petites secondes de plus pour échapper à la punition. Surtout que je n’avais strictement rien fait durant le combat. Arf, j’étais vraiment pathétique. Mais qu’est-ce que j’y pouvais ? Ces retrouvailles surprises avec Morflam m’avait complètement perturbé.
Je pouvais même ressentir une déception chez Lawk, il le cachait, mais son attitude ne pouvait mentir. J’avais intérêt à me rattraper si je ne voulais pas définitivement devenir un paria. Quoique, ce n’était pas ma préoccupation première. Morflam. Elle était là, dans ce camp d’entraînement. Je devais savoir pourquoi.
Le soir venu, je m’étais empressais d’activer le Transcom, afin de faire mon rapport journalier. Cela faisait une bonne minute que j’étais là, à fixer l’écran comme un idiot. Pourquoi ne répondaient-ils pas ? J’allais pousser un juron fleuri lorsque le visage d’une certaine Mysdibule apparut enfin. Je me calmai, soulagé.
— Ah Belcol-Exion, fit Stalhblume étrangement mal à l’aise. Euh… du nouveau ?
— Oui ! J’ai retrouvé Morflam ! Mais elle est étrange, comme si elle était possédée, elle ne parle même plus de nourriture…
— Je vois, c’était donc vrai…
Je fronçai les sourcils. Stalhblume n’avait pas du tout réagi comme je l’attendais. Je commençais à en avoir marre de ne rien comprendre, déjà que c’était chaud avec Morflam, si en plus Stalhblume s’y mettait…
— Bon, grinçai-je. Il y a un problème ? Qu’est-ce que tu veux dire par ‘‘c’était donc vrai’’ ?!
— … c’est compliqué, mais je dois te mettre au courant je suppose. Nous avions récemment reçu une petite visite.
— Une visite ? plissai-je des yeux. Et alors ?
— Hé bien, comment dire… celui qui a frappé à notre porte ce matin n’est ni plus ni moins que… le Primonarque.