Ch 13 : Giogio by Maraudeur
Que ce soit en économie ou en sport, une saine compétition amène chacun à se dépasser pour faire mieux que ces adversaires.
Mais dès lors qu’il s’agit de séduire Erika, la concurrence se fait rude, sale et sans pitié. Globalement, à part Luth et Red, tous les hommes en présence sont attirés par la magnifique championne. Ce qui inclut James, la pire crevure qui soit en ce bas monde.
Red ne parlant pas, j’en conclus qu’il n’a aucune opinion sur le sujet. Quant au Maître de Johto, il pense d’Erika – je cite – qu’il « lui faudrait au moins deux ballons de handball dans le soutif pour espérer me plaire ». Quel idiot !
Bref, l’ambiance est plutôt tendue dans la grotte des rebelles, car chacun rêve de tremper son biscuit et ne voit que des rivaux autour de lui. Et comme me l’a fait remarquer James, cela donnerait presque envie de trahir la cause pour se débarrasser de la concurrence…
Ca fait tellement mystérieux de finir une phrase par des points de suspension. Attention de ne pas en abuser, il parait que c’est cancérigène !
J’ai donc donné la bombe à Erika. J’aurais préféré agir autrement, mais le seul moyen de pénétrer dans les installations des Rockets réside dans une coopération avec les résistants.
Ceux-ci envisagent d’utiliser l’engin au nord d’Azuria, sur une partie du mur souvent en réparation. En effet, l’enceinte ayant été bâtie à la va-vite, certaines zones se fissurent régulièrement et nécessitent des travaux de restauration. De toute façon, si la Team Rocket parvient à conquérir le monde, ce genre de barrière deviendra inutile.
Erika compte déclencher l’explosion dans deux jours à dix heures du matin. Selon elle, le délai est suffisamment court pour que l’information n’arrive pas aux oreilles de Giovanni et assez long pour qu’une partie de la population puisse évacuer Kanto sans risque.
Je me trouve donc face à deux possibilités : soit je parviens à m’emparer de plusieurs Masterballs et à rejoindre Azuria avant l’explosion du mur, soit il me faut trouver un autre moyen pour quitter la région.
La deuxième option pourrait s’avérer plus facile que la première quand on prend en compte un élément important du plan de Giovanni : pour provoquer une crise économique, il faut bien que les Masterballs quittent Kanto. Logique !
Pour espionner les installations des Rockets, je fais équipe avec James et un résistant nommé Fabrizio. Nom de code : Maraudeur. C’est cool ? Non, à chier !
Luth, quant à lui, participe à la mission avec Red et un tout jeune rebelle nommé Sun. Si ce dernier n’a jamais mis les pieds à Alola pour en devenir le premier Maître de la Ligue, il a néanmoins conservé son ineffaçable sourire de demeuré.
Le hasard a voulu que trois jeunes Maîtres de ma réalité fassent équipe dans cette timeline. On pourrait y voir un signe du destin. Le Muet, le Rustre et le Débile ! Je trouve qu’ils ressemblent plutôt à des personnages de western spaghetti. Et leur nom de code ? Paladin. Je suis jaloux.
Tandis que Paladin ira fouiner du côté de Celadopole, nous autres Maraudeurs espionnerons les alentours de Safrania, capitale du nouvel empire de Giovanni. Une fois la région sous son contrôle, le mafioso s’est empressé de déménager du sous-sol de son casino vers l’immeuble rutilant de la Sylph SARL. On peut le comprendre.
Le départ est prévu pour le lendemain matin, en attendant j’entraîne un peu mes Pokémon à l’extérieur, près d’Argenta, sous la vigilance de deux rebelles. Cela fait plusieurs jours que je n’ai pas joué avec mes compagnons qui ne se privent pas pour me le faire savoir !
Chewy a pratiquement assimilé le tour que je lui apprends depuis Unys, je suis très fier de lui. Quant à Trollface, il voudrait parfaire sa maîtrise de la conduite, hélas toutes les voitures ont été réquisitionnées par la Team Rocket. Et je crois que Venceslas m’en veut un peu de l’avoir forcé à torturer le poseur de bombe.
Curieusement, je me sens reposé. Je sais que les prochains jours seront riches en action et que je risque de mourir avant d’avoir vu Dialga, mais je suis en paix. Qui pourrait gâcher cet état d’esprit ?
Erika. En effet, le lendemain je cherche un coin tranquille où me changer dans ces cavernes lugubres, mais la chef des rebelles ne cesse de me suivre. Elle se rend bien compte que cela m’irrite et m’apostrophe :
« Dites donc, Lividex, que faites-vous à errer en ces lieux ?
- Je vous en prie, ne me faites pas passer pour plus suspect que je ne le suis, je veux juste m’habiller seul dans mon coin.
- Vous êtes trop timide pour partager les vestiaires avec les autres ?
- Parfaitement.
- Désolée, mais je n’ai pas encore assez confiance en vous, ou en vos amis, pour vous laisser sans surveillance ! Veuillez gagner les vestiaires !
- Erika, j’ai… une sorte de maladie de peau… c’est vraiment moche à voir ! »
Mes mots ne semblent pas convaincre la belle dresseuse. Pourquoi les gens sont-ils aussi enclins à gober des mensonges et aussi sceptiques à accepter la vérité ?
Il me faut chaque jour de plus en plus de détermination pour oser regarder l’écoeurante nécrose qui se propage sur ma peau. J’ai d’autant plus peur que quelqu’un d’autre pose son regard sur mon corps.
Je puise dans mes dernières réserves de courage et me décide à ôter mon haut. Je fixe Erika droit dans les yeux, j’y lis la surprise, l’incompréhension, le dégoût, puis la culpabilité. Elle me laisse me vêtir seul dans mon coin et s’excuse pour s’être montrée insistante. Derrière elle, je remarque l’expression choquée de James.
Et oui, je suis laid ! Mis à part mon visage radieux, il n’y a rien de beau à voir chez moi.
Tout le contraire de Fabrizio ! En effet, le troisième membre des Maraudeurs transpire la classe ! Son physique viril lui attire le ressentiment de tous ceux qui veulent pécho Erika, car, évidemment, Fabrizio se trouve dans la compétition !
Du coup, je viens de déclarer forfait sans le vouloir en me montrant torse nu devant la belle.
Fabrizio est un grand blond athlétique au teint légèrement hâlé, affable et volontaire, pourvu en outre d’une voix mélodieuse et d’un regard saphir perçant.
Bref, lui et son menton carré représentent cette fade image de perfection masculine que nous rabâche la publicité et que la majorité des hommes déteste. Quand Luth lui en fait la remarque, Fabrizio lui confie que ressembler à un tel cliché n’est pas facile tous les jours. Pauvre chou !
Nous nous mettons en route pour Safrania après neuf heures.
Contrairement à Red, Fabrizio parle. Il parle beaucoup même. Dans chaque lieu que nous traversons, il nous détaille longuement les étapes de la conquête par les Rockets, les éventuels alliés ou faits de gloire rattachés à la Résistance, les changements majeurs du quotidien depuis l’Assaut.
Toutes les informations qu’il nous délivre s’avèrent des plus intéressantes, nous l’écoutons donc avec attention. Parfois, Fabrizio part plus en avant pour s’assurer que nous ne tomberons pas sur une mauvaise surprise. Sa connaissance du terrain me fascine, Kanto n’a aucun secret pour lui !
En une journée, nous réussissons à traverser la moitié de la région à pied en n’affrontant que deux patrouilles de sbires. Et encore, on pourrait attribuer ces rencontres à notre négligence à James et moi, mais on ne le fera pas, car ce serait avouer notre infériorité par rapport au pseudo beau gosse qui nous sert de guide.
D’accord, faisons preuve d’honnêteté intellectuelle…
La première patrouille a été attirée par James qui se soulageait dans un buisson en poussant un gémissement de satisfaction. Il se retenait depuis une heure. Je l’ai défendu seul avec Trollface, Fabrizio étant alors parti en éclaireur.
Je suivais les traces d’une colonie de Nidoran quand des sbires m’ont aperçu la seconde fois. Cette fois, j’ai eu l’appui du Smogogo de James et du Tétarte de Fabrizio, à peine revenu d’une escapade un peu plus loin.
Je sens bien que le résistant nous prend pour des boulets incapables de se tenir en son absence, mais je m’en moque, je n’ai rien à lui prouver. Tout ce que je veux, c’est mettre la main sur les Masterballs de la Team Rocket !
A la fin de la journée, Fabrizio nous mène jusqu’à une maisonnée abandonnée, mais en très bon état, à l’orée des bois. Nous nous trouvons à une heure de marche de Safrania. Nous passons la nuit ici, puisqu’il est impossible de rentrer dans la capitale après vingt heures.
En plus, il parait qu’à la tombée de la nuit, une meute de Pokémon Spectre parcourt les rues de Safrania en combottant Hypnose et Dévorêve sur tous les passants n’arborant pas l’uniforme de la Team Rocket.
Malgré mon état de fatigue après un jour de marche, je ne parviens pas à gagner immédiatement le sommeil. Et James trouve encore le moyen d’écourter ma nuit vers six heures du matin :
« Lividex, réveillez-vous, il faut qu’on parle !
- Inutile, je sais ce que vous allez dire, marmonné-je, la bouche dans l’oreiller.
- Vraiment ?!
- Oui. J’ai bien compris que vous étiez bisexuel. Vos sentiments me flattent, hélas ils ne sont pas réciproques. J’espère que vous comprenez.
- Hein ?! Vous délirez ou quoi ? Je voulais vous avertir que Fabrizio est probablement un traître ! s’exclame James dont le visage ne m’apparaît pas à cause de l’obscurité.
- Oh, ça.
- Vous l’aviez déduit ?
- Bien sûr. Tomber sur des patrouilles de sbires uniquement en son absence, c’est un peu gros ! Mais ne vous inquiétez pas, j’ai pris des mesures.
- J’en suis ravi. Toutefois, la présence de quatre sbires rôdant autour de cette chaumière ne me rassure pas trop. »
Tellement prévisible ! Fabrizio a mis les voiles durant la nuit et averti la Team Rocket de notre présence. Je me mets deux claques pour me réveiller et prends la Superball de Chewy. D’après James, les quatre sbires sont réunis face au mur ouest de la maison.
Le Chelours jaillit de sa Ball pour foncer contre le mur en question, l’emportant dans sa charge avec les quatre débiles qui se trouvent derrière. La température dans la pièce chute de dix degrés, mais au moins nos opposants sont au tapis.
James me lance alors un regard un quart réprobateur, un tiers complice, un cinquième amusé, un autre cinquième surpris et le reste de bisexuel amoureux refoulé.
A vrai dire, ces laquais de la Team Rocket viennent de nous offrir l’opportunité de nous introduire dans leur QG de Safrania. Avec l’aide de Chewy, nous sortons ces malheureux des décombres, pour mieux les assommer ensuite et leur prendre leurs uniformes.
Naturellement, aucun n’est à ma taille.
Puis nous partons en direction de Safrania, après avoir grignoté un petit-déjeuner frugal.
Sur le chemin, James me questionne au sujet de la marque noire sur ma peau qu’il a entraperçue la veille. Alors que je m’apprête à lui servir un magnifique mensonge, notre conversation est coupée par des gémissements venant d’un fourré sur notre droite.
A ces plaintes se succèdent des bruits de vomissements – le son le plus agréable qui soit à l’oreille – et de gargouillements. Nous tombons nez à nez avec un Fabrizio malade, plié en deux, suant, secoué de spasmes, se tenant le ventre, les larmes aux yeux, vomissant.
Je suivais les traces d’une colonie de Nidoran quand des sbires m’ont aperçu la seconde fois. Pourquoi ? Je cherchais à me procurer un peu de leur venin afin de punir le traître. J’étais déjà intimement persuadé de la félonie de Fabrizio. J’ai fréquenté suffisamment de salopards au cours de ma vie pour en reconnaître un quand j’en vois.
J’ai dilué le poison afin qu’il ne soit pas mortel, avant d’en déposer quelques gouttes dans la gourde du rebelle.
James propose de le laisser agoniser ici, tandis que nous poursuivons notre mission. Excellente idée, mon cher ami !
Nous atteignons Safrania en une heure, puis passons encore une heure à faire le tour de la ville. Il y règne une ambiance de méfiance et de crainte. Partout, des étendards marqués du R de la Team Rocket flottent au volant, sobre symbole de l’humiliation subie par les Kantoïtes.
Vêtus en sbires, nous n’avons aucun mal à engager la discussion avec d’autres Rockets et obtenir subtilement quelques informations intéressantes. Par exemple, personne n’est au courant pour la bombe ! Fabrizio n’en a pas parlé. James pense qu’il voulait donner ce renseignement directement à Giovanni afin d’obtenir les bonnes grâces du dictateur.
Continue de gerber, Fabrizio, ça t’évitera de cafter !
Lorsque nous jugeons le moment opportun, nous nous décidons enfin à passer les portes de la Sylph SARL, rebaptisée en Giovanni Palace. L’important dispositif de sécurité déployé à l’entrée du bâtiment se révèle méchamment torpillé par l’incompétence et la paresse des sbires. Tant mieux pour nous.
Il suffit de froncer un peu les sourcils et d’avancer d’un pas pressé pour aller où on veut sans être dérangé, dès lors que l’on porte la tenue adéquate. Cela me rappelle l’infiltration du Paradis Aether !
J’entraîne James vers les étages souterrains, espérant y trouver des Masterballs en pagaille. A la place, je découvre presque aussi bien : le bureau du professeur Wowbagger. Vous l’ignorez certainement, ce détestable savant dirigeait l’équipe chargée de cloner Mew dans ma réalité.
J’allume son ordinateur, mais un mot de passe est requis. Génial.
Observateur attentif, James m’indique d’un geste du bras les ouvrages soigneusement alignés sur le bureau de gauche à droite : « Cinq façons de s’enrichir rapidement », « Les sept clés de la réussite », « Deux tu l’auras valent mieux qu’un tiens », « Trois fois plus fort – autobiographie romancée de Ghetis » et « Zéro remord en toute circonstance ».
Pas de commentaire sur ses lectures douteuses. Je tente le mot de passe 57320. Bitche please, ouverture de la session !
Toutes les informations relatives à la création de Mewtwo se trouvent sur ce poste ! Dire que je rêve de mettre la main sur ces fichiers depuis des années !
Rassurez-vous, je ne veux pas fabriquer un autre clone raté du Pokémon Nouveau. Ce qui m’intéresse, c’est ce que l’ADN de Mew peut nous apprendre sur les Pokémon, notamment en ce qui concerne l’évolution.
Vous vous doutez bien que je ne suis pas une pointure en science. Toutes ces découvertes me serviront à amadouer Sorbier et à enterrer la hache de guerre avec lui. Rien de plus.
James procède à une copie des fichiers de l’ordinateur. En attendant que le transfert de données se termine, nous survolons les notes du professeur Wowbagger. Connaissant une partie du dossier Mewtwo, certes minime, je ne tarde pas à constater des différences avec ma réalité.
Difficile de passer à côté d’un truc aussi énorme, ici Mewtwo est une femelle ! Sur les quelques photos, j’ai l’impression que le clone raté possède une queue plus courte et des hanches plus larges. Mais je me trompe peut-être.
Je ne peux m’empêcher de m’interroger sur ce qui a pu provoquer la sexuation de Mewtwo. Une idée de Wowbagger, un défaut dans le processus de clonage, une mutation aléatoire ? Il faudrait que cela découle d’une manière ou d’une autre de mes déboires temporels.
Quoi qu’il en soit, la Mewtwo de cette timeline semble posséder des capacités limitées, elle a donc servi de matrice pour la conception de Mew3, le véritable monstre sous le contrôle de Giovanni.
La puissance de Mew3 dépasse probablement celle de plusieurs Pokémon légendaires, c’est du moins ce que laisse suggérer les notes du professeur.
L’armure que porte Mew3 régule ses pensées et ses émotions, le laissant sous l’influence totale du chef des Rockets. Cette progéniture de Mewtwo n’obéit donc qu’à Giovanni. Si ce dernier est inconscient, Mew3 est contraint d’assurer sa protection jusqu’à son réveil.
A présent, on entre véritablement dans la science-fiction avec le dernier projet en date de Wowbagger : A-Mew. Il y a huit mois, la Team Rocket a dérobé les plans du système Alpha à la Fondation Aether. Je comprends mieux pourquoi Saubohne faisait dans son froc.
Bref, Giovanni a ordonné la création d’un nouveau monstre de foire possédant l’ADN de Mew et capable de changer de type grâce au système Alpha. Pour faire court, le Pokémon ultime. Après avoir lu cela, l’idée de faire fusionner les trois dragons d’Unys parait tout de suite moins farfelue !
La copie des fichiers finie, James retire le périphérique de stockage et le cache dans sa botte, au cas où l’on se ferait prendre.
Trois secondes plus tard, on se fait prendre. Six Rockets furieux entrent dans le bureau, dégainant leurs Pokéballs et aboyant des questions quant à notre présence en ces lieux. Sans attendre de réponse de notre part, ils nous saisissent et nous traînent vers une destination inconnue.
Quand je dis inconnue, c’est une façon de parler. Dès lors qu’on nous jette dans l’immense ascenseur en direction du dernier étage, il y a de fortes chances pour que ce soit le grand manitou qui s’y trouve !
Nous arrivons dans une immense salle meublée de sbires parfaitement alignés. Au fond de la pièce, un homme d’une cinquantaine d’années attend patiemment, assis et silencieux.
Giovanni, ancien champion de Jadielle, chef de la Team Rocket, dictateur de Kanto, maître de Mew3, saloperie notoire, nous toise depuis son trône plaqué or.
Evitant de sombrer dans une ridicule magnificence façon Ghetis, Giovanni a préféré rester le même homme qu’il était. Cheveux courts, regard sombre et perçant, mâchoire crispée, il porte toujours son impeccable costume deux pièces de tueur à gages. Menaçant, mais élégant.
Toutefois, en analysant l’attitude servile de ses sbires, je me demande comment l’ego de l’ex-mafioso arrive à tenir dans un immeuble aussi modeste sans en faire exploser les vitres et écraser tout le personnel. Il faut croire que la conquête de Kanto lui a donné la grosse tête. Autant le provoquer un peu !
« C’est quoi ce bordel, Giogio ? l’interpellé-je avec un sourire ravi. Il n’y a que des mecs dans ton antre de tyran ! Je veux voir des cuisses et des nombrils, bon sang !
- Par pitié Lividex, bouclez-la, je ne veux pas crever ici ! souffle James à ma droite.
- Allez Giogio, pourquoi tu tires cette tronche ? T’es constipé ? Je t’ai quand même sauvé la peau, tu pourrais être content de me voir !
- Vous m’avez sauvé ? Vraiment ? crache sèchement Giovanni, agacé par mon attitude.
- Ouais ! Sans moi, Ghetis aurait déjà écrasé ton rêve de domination mondiale en même temps que ta petite armée de laquais !
- Je n’ai pas entendu un mot, réplique le dictateur en posant sa joue contre son poing.
- Forcément, tu vis dans un petit bled paumé, Giogio ! Sache qu’il y a deux semaines, Ghetis allait lancer un terrible assaut pour s’emparer du monde en une journée. Il possédait trois dragons légendaires entièrement sous son contrôle, ainsi qu’une armada de dresseurs d’élite en Combinaison Booster ! En outre, il venait de vaincre la Police Internationale !
- Et vous voulez me faire croire que vous l’avez arrêté tout seul ? raille Giovanni. C’est le bluff le plus minable que j’ai pu entendre de ma vie !
- Oh, tu ne me crois pas Giogio ? Dans ce cas, que dirais-tu d’un petit combat là, tout de suite, pour que je te montre à quel point je suis invincible ! Tu peux utiliser autant de Pokémon que tu veux et même ton monstre de foire !
- Je n’ai pas de temps à perdre.
- Allez, Giogio, fais pas ta fiotte ! Au pire, si je te bats, tu n’auras qu’à tuer tous les témoins, moi y compris ! »
J’arbore mon plus insolent sourire, cela l’irrite et l’intrigue. Il accepte mon duel. Je sens alors peser sur moi les regards peu rassurés des sbires. Ils accordent une confiance aveugle à leur patron mais… on ne sait jamais, même les meilleurs connaissent la défaite !
Giovanni se lève de son trône, avance de quelques pas et claque des doigts. Mew3 fait alors son entrée. Il apparait de nulle part, lévitant à dix centimètres du sol, figé dans une attitude faussement détendue.
La créature mesure un peu moins de deux mètres. Je ne vois pas son visage à cause du casque étincelant qui recouvre son crâne et garantit sa docilité. Je ne distingue qu’une petite bouche sans lèvres et un menton en pointe.
Il a la peau uniformément grise, légèrement bleutée. Une matière rigide, sombre et brillante recouvre certaines parties de son corps, comme les épaules, le sternum, les chevilles et l’extrémité de sa queue.
Ses bras et ses cuisses relativement musclés détonnent avec son torse maigrelet. Par ailleurs, il porte des morceaux d’armure aux avant-bras et aux tibias, reliés au casque par divers câbles. Je remarque que Mew3 possède quatre doigts à la main droite pour trois à la main gauche.
Le combat peut commencer. Je prépare la Superball de Chewy et tapote trois fois sur la coquille. Il s’agit du signal indiquant qu’il doit réaliser ce fameux tour que lui apprend depuis deux semaines.
Je jette un œil fugitif à ma montre. Neuf heures cinquante-neuf et trente-six secondes. Je dois gagner un peu de temps pour profiter d’un timing parfait :
« Au fait, Giogio, j’ai une devinette pour toi !
- Je n’ai pas envie de l’entendre !
- Allez, je te la dis quand même. A ton avis, où a bien pu passer la bombe qui devait sauter à Acajou ? »
Sur ces mots, je lance la Ball en prenant de l’élan. Les sourcils de Giovanni se froncent. La capsule touche le sol et rebondit sans que le Chelours n’en sorte. Le chef des Rockets me fixe avec une haine intense, il s’apprête à dire quelque chose. L’alarme de ma montre sonne dix heures. On entend l’écho d’une explosion au loin. La Superball rebondit une deuxième fois. Une diode de l’armure de Mew3 s’allume. Giovanni guette l’origine de la déflagration par la fenêtre. Troisième rebond, Chewy jaillit de sa capsule juste derrière Giovanni, à hauteur de son buste. Le chef des Rockets se retourne juste à temps pour se prendre le poing de Chewy dans la mâchoire.
Ouf !
Giovanni s’écroule au sol, inconscient, le visage en sang. D’instinct, Mew3 se téléporte à ses côtés, empêchant quiconque de s’en approcher. Tous les sbires en état de choc observent la scène sans bouger.
Ce serait sans doute le bon moment pour réaliser une danse de victoire des plus loufoques. A la place, je préfère frapper la gorge du sbire le plus proche du tranchant de la main. Puis, je lui dérobe une de ses Pokéballs et l’envoie au visage d’un autre sbire.
Les Rockets reprennent leurs esprits et se décident à combattre. Chewy se lance dans la bataille, bientôt assisté du Smogogo et du Ronflex de James. Un carnage bordélique vient de débuter au dernier étage du Giovanni Palace !
En sortirons-nous vainqueurs ?