Pikachu
Pokébip Pokédex Espace Membre
Inscription

A travers le voile de la vérité de Saiszakh



Retour à la liste des chapitres

Informations

» Auteur : Saiszakh - Voir le profil
» Créé le 25/10/2016 à 23:22
» Dernière mise à jour le 25/10/2016 à 23:32

» Mots-clés :   Policier   Présence de Pokémon inventés   Suspense

Si vous trouvez un contenu choquant cliquez ici :


Largeur      
Aussi clair qu'une lueur dans la nuit
Sigfrid se frotta les tempes. La feuille dans sa main se froissait sous ses doigts tellement il l’avait regardé. Depuis la vingtaine de jours qu’il avait commencé à travailler sur cette enquête, il avait l’impression de ne pas avancer. Mais c’était comme s’il avait la solution devant les yeux depuis le début sans pouvoir mettre le doigt dessus, ce qui était aussi frustrant qu’ennuyeux…

Il reposa la photo avec les autres et se laissa basculer en arrière sur son fauteuil, s’appuyant de tout son long contre le dossier confortable, il ferma les yeux une seconde pour essayer de se concentrer sur cette petite information, à la limite de sa conscience qui clignotait sans arrêt sans qu’il puisse s’y accrocher.

Il se focalisa sur tout ce qu’il avait.

D’abord le lieu du crime, car c’était évident qu’il s’agissait d’un crime. La victime avait été trouvée dans une grotte dans laquelle une énorme colonie de mucuscules et de colimucus avaient élu domicile. Il semblait maintenant évident que des produits repoussants avaient été mis sur le corps et les lieux. À peine quelques heures après la découverte du corps, les pokémon avaient commencer à revenir sur les lieux et, à la fin de la journée, il avait fallu photographier toute la scène sous différentes lumières et la scanner en urgence pour partir aussi vite que possible, les petits dragons devenant agressifs. Quelques jours plus tard, Sigfrid avait voulu y retourner pour revoir les lieux et avait dû partir en vitesse, un muplodocus agressif attendant apparemment le retour des humains. Maintenant, Sigfrid avait plein de photographies devant ses yeux de tous les lieux. Un dossier complet sous plusieurs angles et lumières pour essayer d’y voir plus clair. Mais son regard se perdait très vite sur les détails et il n’arrivait pas à mettre le doigt sur ce qui importait.
Il semblait maintenant assez évident que la victime n’avait pas été tuée dans la grotte même. Mais cela avait dû avoir lieu à proximité étant donné qu’il y avait très peu de traces de déplacement. Il semblait pourtant impossible d’aller vérifier les environnements, entre les colimucus, le muplodocus mais aussi tout le reste ; que ce soit les lougarocs, les boumatas et les mimiquis sauvages qui rôdaient dans les environs, à la tombée de la nuit… Mais le fait que le corps ait été trouvé à cet endroit et dans cette position avait son importance. Il s’agissait clairement d’une mise en scène orchestré pour être observée. La question était qu’est-ce qui devait être vu ? Pourquoi et par qui ?

Venait ensuite le problème du mobile. Ils avaient interrogé plusieurs fois les différents suspects, ausculté avec attention chaque détail de sa vie, étudier ses faits et gestes avec application mais il n’existait pas de raison valable de le tuer. Il n’avait pas de soucis d’argents, pas d’addiction à part sa passion pour les pokémon dragon, pas de maîtresse malgré une légère distanciation avec sa femme,… Sigfrid n’y comprenait rien. Tous les gens qu’il avait questionnés avaient indubitablement dit la même chose : Marc Volchin était un homme bien. C’était un riche homme d’affaire de Devon Sarl, travailleur acharné, ami appliqué, sportif accompli. Il n’y avait aucun mobile à son meurtre…
Et puis, il y avait le problème des autres victimes. Ce meurtre ne lui avait pas été donné sans raisons. Il avait déjà croisé des morts inexpliquées de ce style.

La première était Madame Musashin, une jeune femme n’ayant pas encore atteint la trentaine, travaillant dans l’événementiel. Elle dressait des plumelines et des efflèches pour faire des spectacles de vol et de couleur selon les occasions. Elle n’avait pas de petit-ami(e) et très peu d’amis en général. Sa colocataire l’avait décrite comme renfermée mais souriante, solitaire mais amicale. Et, malgré de nombreuses recherches sur la question, ils n’avaient trouvé aucune raison viable pour se faire assassiner ; tout le monde l’admirait ou l’adorait. Pourtant, on avait retrouvé son corps dans un vieux bâtiment abandonné, au toit dévasté par le temps et au sol recouvert d’eau salie par les tuyaux rouillés. Elle avait apparemment avalé des baies toxiques et l’enquête avait supposé un suicide. Mais Sigfrid n’y croyait pas ; elle n’avait pas plus de raisons apparentes de se tuer que de l’être.

Le second corps était celui d’un surfeur en vacances dans la région. Il était venu seul. Aucune de ses connaissances proches ou lointaines ne semblaient être venue aussi en même temps dans toute la région. Pourtant, des baigneurs l’avaient trouvé empêtré dans un énorme filet de pêche, flottant à la dérive au milieu d’un lac connu dans la région pour ses eaux calmes et cristallines. Après une enquête approfondie, la police avait penché pour un accident. Mais l’Inspecteur savait que quelque chose n’allait pas ; pourquoi un surfeur serait allé dans un lac aux eaux lisses ?...

Puis avait suivi Marc Volchin. Et au poste de police, Sigfrid avait acquis une réputation de très bon flic et surtout, de briseur de mythes. Il aimait à travailler sur des enquêtes en apparences complexes et trouver le coupable. Il avait été un apprenti de Belladonis, le fameux policier grâce à qui la Team Rocket ne terrorisait plus le monde et il avait appris tant de choses sur le métier et la nature humaine qu’il adorait son métier. Cela semblait manichéiste d’arrêter les méchants et d’être gentil mais c’était ce qui le faisait dormir à poings fermés la nuit venue.

Et, cette nuit, ne pas trouver le coupable du meurtre de Volchin l’empêchait de dormir. Il tendit la main vers une tasse fumante dans laquelle une boisson obscure faite à base de baies amères refroidissait doucement. Sans y réfléchir, il en prit une large rasade et se replongea dans ses photos. Qui que soit celui qui avait fait cela, il devait payer. Et Sigfrid ferait tout pour le retrouver.

Il sursauta à peine malgré sa surprise lorsqu’une main chaude se posa sur son épaule. Presque automatiquement, il posa sa joue mal rasée sur la peau soyeuse.

- Tu ne devrais pas regarder ca après le coucher du soleil. Et encore moins boire cette cochonnerie !

L’inspecteur leva les yeux. Il croisa le regard profond et le sourire de Stéphanie. Vêtue en tout et pour tout d’une chemise blanche qui lui arrivait à mi-cuisse, elle portait Nidoran dans ses bras et celui-ci semblait ravi que quelqu’un fasse attention à lui. Bien que leur relation soit assez récente, Sigfrid se sentait en confiance et heureux avec l’avocate. Et tout le monde savait qu’un flic heureux était plus efficace qu’un policier dépressif. Alors pourquoi n’arrivait-il pas à avancer dans l’enquête !

Il se redressa un peu dans son siège et la jeune femme vint s’asseoir contre lui. Elle regarda un moment les photos dispersées sur le plan de travail, l’air réfléchi et concentré.

- Tu devrais peut-être essayer de prendre plus de recul ? Changer de point de vue, recommencer à zéro, peut-être ? Part du principe que c’est un accident et cherche à trouver ce qui cloche…
- J’ai déjà essayé mais je n’y arrive pas… Si je ne me trompe pas, il y a trois corps dû au même tueur. Il a camouflé ça en suicide et en accident et aujourd’hui il ne cherche même plus à camoufler ses actes. Je le sens dans mes tripes ; c’est la même personne qui est responsable ! Mais je n’arrive pas à le prouver, je ne sais pas comment le comprendre… Il n’y a rien de similaire ; pas le même mode opératoire, pas les mêmes types de victimes, pas les mêmes mondes… Il n’y a rien de similaire, rien qui les unit…

Ils restèrent un moment enlacés, perdus dans leurs pensées. Nidoran, lui, sauta au sol et trottina jusqu’à sa gamelle. Le petit objet scintillant que Karl Devon lui avait offert clignotait sous sa corne. Nidoran refusait de s’en séparer bien que personne ne sache vraiment ce que cela faisait. Dans la quasi-obscurité de la pièce, la lumière faible du petit bijou se reflétait dans l’eau de la gamelle, la couleur turquoise du petit pokémon miroitant doucement sur la surface, ridée par les coups de langues. Et là, Sigfrid eut une révélation.

Il tendit la main et regarda un moment la photo de sa scène de crime. Allumant son vokit, il se rendit dans l’application nécessaire, servant de base de données professionnelle. Il cliqua sur plusieurs boutons et, sur son bureau, une petite imprimante se mit à ronronner tandis que des photos des scènes de crime antérieures s’en extrayaient en séchant doucement sous la lumière tamisée de la pièce. L’inspecteur posa les trois images côte à côte et sourit. Il avait trouvé. Enfin. Après tout ce temps.

- Je le tiens…
- Tu as quelque chose ? - demanda Stéphanie, un peu ensommeillée
- Regarde ces trois images. Sous cet angle plongeant, c’est presque trop facile, maintenant que je l’ai vu. Tu ne remarques rien ?
- Si

Elle ouvrit grand les yeux et se redressa sur son siège. Nidoran en profitant pour sauter sur ses jambes et venir se lover sur les jambes des deux adultes, pattes tendues. Il poussa un petit soupir satisfait et ferma les yeux.

- C’est vrai que vu du dessus, ça crève les yeux. – l’avocate prit une des photos et la tourna un peu. Elle releva les yeux pensivement vers la nuit, dehors puis bougea un peu les images de nouveau – Attends… Si on les mets comme ça plutôt… Voilà !
- Je m’en veux de ne pas l’avoir vu avant…
- Ce n’est pas ta faute enfin… Mais ça réduit les recherches à moins de gens. Les fanas des étoiles ne sont pas si nombreux après tout…
- Exactem… Attends… Comment ça ‘fanas des étoiles’ ?
- Et bien… les constellations, autour des corps… La première est assez évidente en fait, avec les écrous... La seconde l’est moins, avec les bouées du filet, mais elle a sûrement était déformée par le mouvement de l’eau, je suppose. Et le troisième a quelques tâches autour de lui. Je ne vois pas ce que c’est mais peut être en isolant les points… Toi, de quoi tu parlais ?
- Je… - il semblait carrément surpris – Je ne voyais absolument pas les étoiles. Je voyais les surfaces réfléchissantes… Le sol humide de la première, l’eau de la seconde et le mucus pour la troisième victime… Mais tu as raison, il y a bien quelque chose…

Il alluma son ordinateur, y connecta son vokit et ouvrit la photo plongeante de la première scène de crime. Il mit ensuite une feuille blanche sur l’écran allumé et plaça une petite croix sur chaque petit clou et boulon de la pièce, autour du corps. Puis, il refit la même chose en localisant les bouées de la deuxième photo. Ensuite, il enclencha divers programme et tapa plusieurs commandes. Petit à petit, l’ordinateur enclencha plusieurs photos de la victime et ces alentours, prises en lumière ultraviolette. Les taches blanches luisantes dues au sang brillaient faiblement sur le sol. Petit à petits, les images s’arrangèrent autour du corps pour reformer un montage représentant la scène de crime sous lumière ultraviolette. Avec cette teinte violacée et les points blancs sur le sol, la similitude avec un ciel d’été était étrangement flagrante. Comment n’avait-il pas vu que les taches de sang ne ressemblaient absolument pas à des éclaboussures ? Pourquoi n’avait-il pas compris qu’elles avaient été placées là volontairement ? De même qu’avec les autres photos, il localisa les différents points lumineux.

Enfin, il eut fini et posa les feuilles sur la table.

- Je ne m’y connais pas tant que ça, mais mon père aimait beaucoup regarder les étoiles. Avec mon mimantis et le noctali de mon père, on allait dans le grand jardin et on s’allongeait pour regarder tous ces points magnifiques. Alors, d’une certaine façon, je me suis senti comme à cette époque… Désole…
- Ne t’excuse pas ! Je vais demander à l’équipe d’étudier ça mais tu as eu une excellente intuition !

Sigfrid réfléchit un moment. Se prenant la tête entre les mains, il se leva et alla à la fenêtre. Nidoran n’apprécia pas d’être ainsi déranger et poussa un petit chuintement plaintif. Son ami lui passa des doigts distraits entre les oreilles et cela sembla satisfaire le petit pokémon qui reposa sa tête sur les coussins. Le policier se rendit à la fenêtre et regarda un moment à la fenêtre.

- Ce qui m’étonne maintenant, c’est qu’on ait trouvé les corps aussi facilement… Je veux dire, ils ont toujours été trouvés dans les temps, peu après que les victimes soient mortes… C’est assez étonnant pour ne pas être une coïncidence. Je devrais aussi en parler avec le commissaire…
Stéphanie vint le rejoindre sans faire de bruit et se glissa sous son bras.

- Je ne dis pas que tu as tord mais ce n’est peut-être qu’une intuition. Reviens plutôt te coucher. Si tu es trop fatigué, tu auras encore plus de mal à travailler, non ? Attends demain matin pour y réfléchir à tête reposée.

Sigfrid grogna un peu mais finit par céder. Il éteignit la lumière du salon et se rendit dans la chambre, la tête encore embrumée par ces dernières découvertes.

Dans le salon, seul la lueur près de la corne de Nidoran scintillait encore. Et les étoiles semblaient lui répondre.