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Heathens [Concours SL 2016] de Edenwin



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Informations

» Auteur : Edenwin - Voir le profil
» Créé le 25/10/2016 à 16:41
» Dernière mise à jour le 31/10/2016 à 15:41

» Mots-clés :   Absence d'humains   Absence de poké balls   Drame

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« Each betrayal begins with Trust »
Midgard releva la tête, le front inondé par la peur. Son vif mouvement effraya quelques passants qui marchaient à côté de là où il dormait jusqu’à maintenant, et il s’excusa entre deux reprises de souffle. Il se passa une patte sur le visage, encore perturbé par le cauchemar qu’il venait de faire. Il expira longuement, comme pour faire disparaître les images de son passé qui lui revenaient en tête, mais rien n’y fut : les évènements d’il y a cinq ans étaient gravés dans sa mémoire à jamais, et quand il fermait les yeux, il revoyait la scène où son frère essuyait les coups de quatre Pokémon venus pour lui ôter la vie. Il s’ébroua, ne souhaitant pas ressasser le pire moment de sa vie, puis se leva lentement. Il n’avait pas spécialement de but aujourd’hui, si ce n’est d’essayer de profiter du calme dans lequel lui et un petit nombre de Pokémon vivaient. La guerre battait son plein, pourtant, mais eux s’étaient trouvé ce qu’ils appelaient, à défaut de « maison », leur havre de paix. Ici, ils étaient épargnés de batailles entre Déviants et les Légitimes, ceux qui n’étaient pas différents. Midgard était l’un d’entre eux : un Feunard classique, d’une couleur crème aux reflets jaune orangé. Il n’avait rien à craindre des Légitimes : ils ne chassaient que ce qui n’était pas naturel à leurs yeux. Quand cette pensée fleurit dans son esprit, il chercha Tempest des yeux. Lui était un Déviant, mais chacun ici avait sa place, sans qu’aucunes inégalités soient commises. Le groupe s’était caché sur Farwynd, l’île désertique de l’archipel, un endroit que la guerre avait épargné. Après tout, le terrain ne se prêtait pas vraiment aux conflits. Aflene, leur meneuse, avait alors trouvé en cet endroit la parfaite cachette de fortune, et alors qu’ils n’étaient que trois au début, nombre de créatures vinrent s’ajouter à la liste. A ce jour, la colonie rassemblait une petite vingtaine de personnes, et ils étaient passé au-dessus des raisons qui auraient dû faire de certains Pokémon des ennemis depuis cinq ans.

Le Feunard nouvellement sur pattes escalada un monticule de terre qui surplombait toute la surface plane dans laquelle le regroupement évoluait, et rejoignit à son sommet une fine Mentali, qui gardait l’œil en contre-bas depuis l’aube, déjà. Il s’asseyait à ses côtés, le regard à moitié fermé par le poids d’un sommeil qui ne lui avait pas suffi. Après l’avoir saluée, c’est elle qui reprit la parole.
« Il va bientôt falloir partir. Nous allons manquer de ressources, et cette île est loin d’être la plus riche. »
Mais c’était un endroit parfait pour échapper aux batailles. Une terre désolée sur laquelle quasi rien ne poussait, pas plus de deux kilos de baies par jour, qui sentait la solitude et sur laquelle ne tombait jamais une goutte de pluie. De plus, la topographie n’était pas à l’avantage de ceux qui voulaient combattre. En somme, elle était parfaite pour ceux qui se la jouaient solo. Pour un groupe de plus de cinq personnes ? C’était une opération de survie qui commençait dès qu’un estomac gargouillait. Le renard laissa échapper un long soupir suite à ses réflexions : la meneuse avait raison, il leur faudrait quitter cette île, au risque de connaître une famine importante.
« Je ne pense pas qu’ils vont tous accepter de partir. Et tu as pensé à eux ? » Une nouvelle fois, Midgard fit un signe de tête qui désignait Tempest, un Rattatac noir qui faisait partie des Déviants, au même titre qu’Asgard. Ce n’était pas le seul représentant des Pokémon qui avaient subi des mutations génétiques, loin de là. Mais pour passer d’une île à une autre, il fallait emprunter les voies maritimes, et celles-ci étaient surveillées de très près par les Légitimes. Beaucoup de Déviants avaient réussi à fuir sur Farwynd au commencement de la guerre, car les Pokémon marins qui faisaient les navettes dans l’archipel n’étaient pas aussi sélectifs – et surtout moins collaborateurs – qu’aujourd’hui.
« Tu ne peux pas les abandonner, Aflene, ils comptent tous sur toi ici. » A ces mots, elle tourna la tête, anxieuse. Avaient-ils d’autres choix ? Bien sûr que non, et s’ils restaient ici, ils mourraient à petit feu.
Alors qu’un silence qui devenait beaucoup plus gênant à chaque seconde qui passait, Wolfgrim entra alors dans la combe, à bout de souffle. Le Lougaroc peinait à reprendre ses forces, mais n’abandonnait pas pour autant. Il avançait vers les deux qui surveillaient le camp, le regard soucieux. En temps normal, Midgard aurait était heureux de voir son meilleur ami rentrer, après tout, il s’exilait la nuit pour éviter des massacres dû à sa forme nocturne, mais au moment où il le vit émerger des gorges qui menaient dans la partie reculée de l’île, il eut comme un mauvais pressentiment. Il fronça légèrement les sourcils à l’arrivée du lupin, espérant que ce dernier ne le voit pas.
« C’est Cyran ! lâcha-t-il entre deux bouffées d’air. « Il lui est arrivé quelque chose… Il baissa d’un ton, voyant que Tempest, le père de Cyran, était dans les parages. Il a été assassiné.. »
Les visages des deux autres Pokémon s’affaissèrent face à la nouvelle qui leur arracha un battement de cœur. Et Midgard eut beau lutter, devant la révélation, il revoyait sans cesse la mort d’Asgard tourner dans sa tête, et elle ne semblait pas vouloir s’arrêter de tourner. Le temps avait comme perdu son cours : les secondes lui semblaient être des heures devant ses souvenirs, et il ne put rester en place un instant de plus. S’excusant, il s’en alla, passant aux côtés de Wolgrim en l’ignorant, laissant Aflene seule pour gérer la situation. Maitresse de ses émotions, la Mentali se reprit rapidement, épiant quelques regards indiscrets dans la foule en contre-bas. Elle non plus, ne pouvait croire à un meurtre ici, mais c’était un Déviant qui en avait payé le prix. L’île n’était plus sûre pour eux alors ? Elle pensait réfléchir à un moyen de faire traverser la mer à ceux qui seraient refusés aux postes d’embarquement, mais il était peut-être déjà trop tard. Si les Légitimes étaient sur l’île, ils devaient fuir maintenant. Reprenant contenance, elle soutint le regard du lupin.
« Emmène-moi à lui. Elle se leva enfin alors que Wolgrim acquiesçait. Mais pas un mot à ce sujet ! »
Leur traversée du camp, accompagnée par la peur qui se lisait dans leurs yeux, ne passa pas inaperçue, et beaucoup vinrent leur demander s’il y avait un problème. La meneuse ne pouvait pas nier : elle ne quittait jamais la colonie sans bonnes raisons de le faire. Elle s’était alors contentée de dire qu’elle avait des soupçons, et qu’elle et Wolfgrim allaient vérifier si ces méfiances étaient confirmées. Ce qui n’était pas un mensonge, au final. Elle ne voulait surtout pas ébruiter la mort de l’un des leurs, du moins pas temps qu’elle n’en serait pas sûre. Non pas qu’elle n’avait aucune confiance en son acolyte, mais elle avait pour habitude de ne se fier qu’à elle-même, qualité qui lui servait autant qu’elle pouvait lui couter en temps de guerre comme celui-ci. De plus, elle devait en apprendre plus sur les conditions dans lesquelles la mort du jeune Rattata s’était produite. Certes, c’était horrible pour un enfant de partir si jeune, mais elle ne pouvait s’empêcher de se demander si ce n’était pas mieux ainsi. La guerre, les belligérances… elle ne souhaitait ça à personne, et encore moins aux enfants. Et malheureusement pour elle, les enfants allaient être touchés : la mort de Cyran allait affecter toutes les jeunes têtes du camp, Déviants ou non, et pas que les plus petits d’entre eux : tout le monde est refroidi par la perte d’une connaissance ou d’un ami.

Ils avançaient toujours, sans mots dire, au travers des murs étroits du dédale désertique de Farwynd. Le silence était certes pesant, mais Wolfrim le préférait à toutes autres choses : les questions qu’Aflene était susceptible de lui poser renforceraient sa culpabilité. Il n’était pas celui qui avait fait ça au jeunot, mais il portait le poids de la découverte du corps. Et il ne savait pas s’il pourrait supporter le regard inquisiteur de Tempest, une fois la nouvelle annoncée. Arrivant sur les lieux du crime, lui détourna le regard alors que la Mentali fit les gros yeux, car il était toujours plus difficile de voir la Mort en vrai que de l’imaginer. Se comprenant, les deux Pokémon firent alors une minute de silence pour le Rattata étendu au sol, éventré par un expert. La mauve commença alors à se déplacer dans la zone, examinant tout ce qui pouvait servir d’indice, mais rien ne trainait ici, si ce n’était que de la poussière et des branches d’arbres morts. Rouspétant intérieurement, elle entreprit alors d’utiliser son odorat, mais le Lougaroc la stoppa dans son élan, insistant sur le fait que l’odeur du sang recouvrait tout autre effluve.
« Il faudra bien trouver quelque chose à dire à son père… » dit-elle dans un murmure. Wolfrim hocha la tête, ne sachant pas quoi faire d’autre, alors qu’il fixait le sol.


Midgard marchait sans réel but, sur les hauteurs de l’île. Au loin, on apercevait le Monolithe. C’était un endroit imprégné de mystère et l’aura qui s’en dégageait quand le Soleil passait juste au-dessus était mystique. Beaucoup de légendes circulaient à son sujet, le plus souvent concernant Solgaleo, le Pokémon Fabuleux. Le Feunard laissa échapper un rire ironique : ces histoires concernant le Lion Légendaire et son alter-ego lunaire, Lunaala, faisaient parties de son enfance. C’étaient des contes que l’on racontait à tous les gosses d’Alola. Mais son enfance à lui avait été sauvagement piétinée quand certains fanatiques se sont proclamés les « Légitimes ». Midgard cracha alors, tapant le sol d’une patte, comme il avait l’habitude de le faire quand quelque chose lui secouait l’esprit. Il avait été sauvé par un Pokémon qui passait par là, échappant alors à la mort que son frère rencontrait au même moment. Il devait sa vie à Lynx, un Dimoret qui l’avait d’ailleurs invité dans le groupe d’Aflene, mais il ne pouvait s’empêcher de le haïr pour avoir laissé Asgard derrière. Au même titre que sa personne d’ailleurs. Il se savait sur le point de mourir de fatigue, mais il ne pouvait pas se pardonner l’abandon qu’il avait fait enduré à son frère. Il vivait avec cette peine depuis cinq ans, période pendant laquelle il regardait Lynx comme un héros, et comme un démon la seconde d’après. Le concerné avait pris l’habitude de ce comportement lunatique, même s’il n’en connaissait pas la cause. En vérité, Midgard n’avait pas évoqué son frère depuis la dernière fois où il l’avait appelé, lui, le Goupix blanc. Il en avait parlé à personne, même si les Déviants étaient acceptés à part entière chez Aflene. C’était son passé, et il voulait l’affronter seul. Même s’il se savait impuissant face à ses souvenirs. Voilà qui était Midgard : un être torturé condamné à vivre dans un présent qui rimait avec sang, fuyant un passé après lequel il courrait. Il était le premier à trouver ce manège ridicule, mais aurait donné n’importe quoi pour qu’il ne cesse de tourner.

A force d’errer au soleil, il finit par apercevoir des formes dans le lointain. Plissant les yeux, il vit alors deux Pokémon avec lesquels il vivait depuis une demi-décennie : Lynx – qu’il aurait préféré ne pas voir – et Kandyl, un Tauros particulièrement extrémiste, loin d’être un fervent copain des Déviants. Pour être honnête, c’était lui que Midgard pensait responsable du meurtre de Cyran, mais ses doutes n’étant pas fondés, il évitait de le crier sur tous les toits. Ils étaient relativement proches du bord, et le renard cru d’abord à une hallucination due à sa fatigue et à l’astre diurne qui lui tapait sur la tête, mais plus il s’approchait, plus il les entendait. Tout cela lui paraissait donc vrai. Profitant de son camouflage dans cet environnement particulièrement favorable à la cachette, du moins pour ceux qui ressemblait trait pour trait à un Feunard, le renard se glissait doucement entre les rochers qui dépassaient çà et là, espionnant alors les deux confrères qui ne se doutaient pas de sa présence.
« Et moi je te dis que c’est le moment rêvé : on agit, là tout de suite, et on a tout gagné. Ce sont tous des trouillards là-bas, qu’est-ce-que tu veux de plus ? » C’était Lynx qui parlait, et à en croire ses paroles, Kandyl n’avait pas l’impression de le suivre dans ses délires. Midgard leva les yeux au ciel : ce type attirait toujours quelqu’un dans ses plans foireux, mais celui-ci avait quand même quelque chose d’inquiétant.
« T’as oublié une chose, roublard. Tout ça va me retomber dessus. »
Le Tauros semblait quand même se prendre au jeu : il cherchait juste une faille dans le plan du furet, pour le plaisir de lui poser une colle.
« Et alors ? T’es bien dans le coup, non ? » La dernière réplique de Lynx accéléra le pouls du renard caché, car les morceaux du puzzle commençaient à s’assembler dans son cerveau. Et l’odeur du sang escaladant les parois des gorges pour recouvrir les hauteurs venait de lui donner raison.