Chapitre 5 : Smooth criminal
Si je devais définir simplement Guzma, je dirais :
60 % Arthur
25 % Ghetis
10 % Helio
5 % Giovanni
Il s’opposait à Max à bien des égards : aucune rigueur, aucune discipline et aucune retenue. C’était également un anti-Lysandre, mais si cela pouvait l’empêcher d’utiliser une arme de destruction massive pour éradiquer tous les pokémons, ce n’était pas forcément un mal…
Quoiqu’il en soit, ce type me mettait mal à l’aise. Je m’en rendis rapidement compte, environ douze secondes après l’avoir rencontré. Non, onze secondes. Et trois dixièmes, je crois. Approximativement.
Rendu amer par la défaite de la veille, j’avais demandé à Linus de me faire rentrer dans la Team Skull. Il me mena à sa supérieure, une grande perche nommé Apocyne. Je lui donnais dix ans de moins que moi. Sans doute s’imaginait-elle être une sorte de femme dangereuse et ambiguë avec ses cheveux teints, ses tatouages, son maquillage de gothique et ses sourcils constamment froncés. Mais j’avais vécu la colère noire de Malva au café Lysandre le jour elle quitta la Team Flare, Apocyne était donc loin de me faire peur.
Elle se présenta comme la « sista » de la Team Skull. N’osant lui demander ce que cela pouvait signifiait, j’en conclus qu’il s’agissait du nom local donné à l’admin, un mot de patois peut-être ? Apocyne passa un coup de fil à son boss, puis me guida vers une demeure abandonnée.
L’entretien d’embauche se déroulait à l’intérieur de la villa, dans ce qui aurait pu être un salon chic, s’il n’y avait pas eu tous ces tags et cet état de délabrement. Je me tenais aussi droit que possible, assis sur un fauteuil défoncé et recouvert d’une épaisse pellicule de poussière. A cause des planches clouées aux fenêtres, nous devions nous contenter de l’éclairage d’une ampoule jaunâtre qui grésillait et emplissait l’air d’une odeur rance. Nous étions trois dans la pièce : Guzma, Apocyne et moi.
Tandis que Guzma me dévisageait sans cligner des yeux, la bouche à moitié ouverte, je m’imaginais comment devait être les locaux de la Fondation Aether : immaculés, lumineux, modernes. Certes aseptisés, mais suintant le fric par toutes les briques.
J’évitai autant que possible de regarder Guzma dans les yeux. Il devait faire ma taille, mais il me parut plus large au niveau des épaules. Son teint halé typique d’Alola contrastait avec sa tignasse blanchie à l’eau oxygénée. Il tripotait en permanence la grosse chaîne en plaqué or qu’il portait autour du cou. Et il souriait, ce qui n’améliorait pas sa mine patibulaire. Il avait l’air parfaitement à l’aise dans son fauteuil tagué et probablement sale. Tout compte fait, je n’avais aucune envie de bosser pour un type comme lui, ni de le lui dire.
Guzma jeta un bref regard vers Apocyne qui s’occupait de divers papiers, assise sur une chaise en osier qui semblait propre. Puis il revint à moi.
« Si si ma gueule, on est là, #viedevoyou !!!!!
- Plait-il ? gémis-je au comble de l’incompréhension.
- Rien du tout. Oublie. Donc tu t’appelles Casper, c’est bien ça ? fit-il de sa voix rocailleuse qui tentait vainement de paraître mielleuse.
- Jasper.
- Du pareil au même ! Tu penses quoi de lui, Apocyne ?
- Trop ieuv’ !
- Pas faux, admit Guzma. Linus dit que tu as fait partie de pleins d’autres Teams avant. Raconte-moi le truc le plus bizarre qui te soit arrivé en tant que sbire !
- Le plus bizarre, hum… C’était à Sinnoh, un mois après mon arrivée dans la Team Galaxie, on m’avait envoyé récupérer un paquet avec deux collègues.
- Il y avait quoi dans le paquet ? s’enquit-il.
- Les sbires ne posent pas ce genre de question. Le colis était entre les mains d’un contact qui avait une chambre à l’hôtel situé entre Voilaroc et Verchamps.
- Tu sais, moi et la géographie, bof quoi…
- Bref, un de mes collègues suspectait son père et sa fiancée d’entretenir une relation…
- Beurk ! commentèrent les deux affreux en chœur.
- Et vous ne connaissez pas tous les détails ! Peu importe. Il n’était donc pas très concentré sur la mission. A cause de lui, nous nous sommes trompés de chambre. Ce n’était pas celle du contact, mais celle d’un autre type qui, à première vue, avait l’air normal.
- Sauf que c’était un ninja.
- Non, répliquai-je sèchement, las d'être constamment interrompu. Quand il nous a vu, il a arboré son plus beau sourire et nous accueilli en disant « Salut, c’est moi le créateur de ce jeu ! Reviens me voir quand tu auras complété le Pokédex, j’aurai une surprise pour toi ! ». Puis il nous a raccompagnés vers la sortie.
- On trouve de ces dingues de nos jours. Hein, Apocyne ?
- Grave, répondit la concernée.
- OK, mon coco si tu veux entrer dans la Team Skull, tu dois d’abord passer quelques tests pour s’assurer qu’on soit bien sur la même longueur d’onde.
- Quel genre de test ? m’inquiétai-je.
- Psychologique, tout d’abord. J’vais te poser quelques questions tirées au hasard dans un questionnaire très pointu mis au point par un scientifique de je-ne-sais-quoi. Ca a l’air chiant comme ça, mais c’est très amusant, expliqua le boss de la Team Skull en sortant des fiches cartonnées du dossier de son fauteuil. Tiens, on commence par ma question préférée : t’as déjà fait du surf sur un ptitard ?
- Hein ?!? Bien sûr que non !
- T’es plutôt Fredo ou Urup ?
- Fredo.
- En quel pokémon tu voudrais te réincarner ?
- Euh… en kicklee, je dois avouer que leurs jambes me fascinent depuis longtemps.
- T’as déjà entendu parler d’un golemastoc qui utilisait vol ?
- Avec quelles ailes ? Bien sûr que non !
- C’est qui ton fantasme parmi les dresseuses connues ?
- Marion de la ligue de Johto.
- Isshu ou Unova ?
- Unova, je crois.
- Tu penses quoi des pokémons légendaires d’Alola ?
- C’est de l’intox !
- Apocyne, quels sont les résultats ?
- Chaotique neutre, wesh !
- Désolé, Jasper, tu ne corresponds pas à nos attentes. On recherche un profil loyal mauvais. Mais c’est pas grave, je te garde quand même, m’annonça Guzma.
- Vraiment ?! m’étonnai-je.
- Jasper, si t’es là, c’est parce que j’aurais besoin des conseils d’un type aussi expérimenté que toi pour m’assurer que tout continue d’aller comme sur des roulettes.
- Vous craignez de ne pas réussir à pérenniser votre activité ?
- Pérenniquoi ?! s’exclama Guzma. Nan, je veux juste éviter de finir comme la Team Rocket et les autres nazes dans le même style.
- Qu’est-ce qui vous fait croire que la Team Rocket était naze ?
- Ben, pour commencer, la Team Rocket ça n’existe plus ! Et ses anciens sbires ont rejoint la Team Skull ! Donc, j’suis un boss et Giovanni un déchet. »
J’ai beaucoup d’affection pour Giovanni, je ne m’en cache pas. A côté de cela, je suis parfaitement conscient de ses défauts, en tant que boss et tant qu’être humain, même s’il m’a fallu du temps pour le reconnaître. Quoiqu’il en soit, j’eus beaucoup de mal à encaisser les propos de cet anonyme chef de gang perdu sur un archipel au bout du monde. Je me contentai de serrer les dents, d’encaisser l’insulte et passai à la suite.
« Que voulez-vous savoir, Guzma ?
- Et ben, t’as des détails sur la fin des autres Teams ?
- A vrai dire, elles ont toutes été mises hors d’état de nuire par des individus agissant seuls, ou en groupe très restreint, et présentant certaines caractéristiques.
- Du style ?
- Pour faire simple, chaque organisation a été démantelée par un adolescent portant un couvre-chef, possédant entre sept et huit badges d’arène et pourvu d’une Masterball.
- Ah, c’est… précis.
- Votre cas me semble mieux parti puisqu’il n’existe aucune ligue à Alola, donc pas de badges. Ce que je peux vous conseiller, c’est de chercher et détruire toutes les Masterballs présentes dans l’archipel.
- T’as entendu, Apocyne ? Prends des notes, masse-terre-bol à détruire. Moi, j’aime bien tout casser. Et quoi d’autre ? demanda Guzma en portant une cannette de soda à ses lèvres.
- Je ne sais pas, peut-être recruter tous les mômes de plus de dix ans dans la Team Skull ? »
Il s’écoula une seconde de silence, puis Guzma se sentit obligé de recracher son soda en gueulant « KÔA ?!? » comme un personnage de cartoon. Je m’éjectai hors du fauteuil pour éviter l’averse de soda. Apocyne se leva également d’un bond, puis, raide comme un cadavre, elle quitta la pièce sans un mot, ni un regard.
Guzma me jeta un coup d’œil, l’air de dire « C’est quoi son problème ? Elle s’est coincée un sourcil ou quoi ? », puis il me fit signe de le suivre à l’extérieur. J’accueillis l’air marin avec soulagement, n’en pouvant plus de l’atmosphère viciée de la villa.
Il me mena à l’arrière de la demeure où le jardin avait été laissé à l’abandon depuis plusieurs mois. L’herbe nous montait jusqu’à mi-hauteur du tibia. Quant aux haies, elles auraient rempli un bouldeneu d’effroi.
Au milieu de ce qui avait été un jardin se tenait un jeune homme blond qui apercevait certainement le soleil pour la première fois au vu de sa pâleur. Il portait un ensemble sombre et déchiré à plusieurs endroits. En outre, l’adolescent fixait sa main crispée devant son visage. La pose ne me semblait pas très naturelle et me rappela le mauvais goût de la Team Flare en matière de position corporelle.
« Voici Gladion, me présenta Guzma, il bosse en free-lance, mais il est très utile. Et très fort aussi !
- Que fait-il avec sa main ?
- Ben, j’suis pas sûr. Mes gars pensent qu’il a fait un pacte maudit, qu’il a vendu son âme à Giratina pour devenir un dresseur méga balèze et que Giratina essaie de prendre possession de son corps maintenant. Un machin du genre.
- C’est une théorie… euh… intéressante ?
- Perso, j’pense qu’il a juste des problèmes d’ados, si tu vois ce que je veux dire (clins d’œil flagrants), tu sais, dans son pantalon (clins d’œil flagrants) et qu’il lutte contre l’envie, ha ha ! »
Cela devenait une certitude, je ne pouvais pas travailler pour un personnage aussi lourd et dérangeant. Pour ne pas dire dérangé.
Comme je m’y attendais, Gladion devait tester mes aptitudes aux combats. Les règles étaient simples, chacun utilisait son meilleur pokémon pour combattre. Un vrai duel ! J’avais pris George pour la première fois ce matin-là, mais il valait mieux le garder pour une autre occasion.
Mon meilleur pokémon se nommait Hercule, il appartenait à ma défunte grand-mère. En fait, après le décès de mon grand-père, ma mamie se mit à dépenser des fortunes à la pension pour obtenir un pokémon compétitif. J’ignore qui lui avait mis cette idée en tête, en tout cas, cela l’occupait et l’empêchait de penser à la perte récente de son mari. Il paraît que lorsqu’Hercule sortit de son œuf, ma grand-mère sut au premier coup d’œil qu’il était parfait.
Elle passa ensuite deux ans à entraîner Hercule et à bâtir une merveilleuse amitié avec lui. Puis ils participèrent à plusieurs tournois locaux, des compétitions pour seniors surtout. Grâce à son incroyable forme physique, Hercule arrivait systématiquement en demi-finale. Et les prix remportés remboursèrent rapidement l’investissement à la pension.
Après l’enterrement de ma mamie, mes oncles me confièrent Hercule songeant que, malgré mes fréquentations discutables, j’étais le seul à être suffisamment talentueux pour exploiter correctement son potentiel. Hercule ne partage pas forcément leur avis. En combat, il accepte de lancer trois attaques, ensuite il se met à tourner autour de moi de façon narquoise jusqu’à ce qu’il retourne dans sa splendide luxe ball.
Le test débuta. Hercule jaillit de sa capsule tel un héros volant au secours des opprimés, le bec en avant, déployant majestueusement ses ailes rosées, agitant vaillamment son bâton. J’espérais voir mon adversaire trembler devant Hercule, le canarticho chromatique de ma grand-mère !!! Mais non, il envoya son pokémon en reluquant sa main gauche secouée de spasmes.
« Sapristi, je n’ai jamais vu une telle absence de cohérence anatomique chez un pokémon ! » pensai-je en des termes moins soutenus et ponctués d’un vocabulaire des plus grossiers lorsque la bestiole de Gladion apparut. Que dire ? Imaginez un luxray avec le bout de la queue d’un léviator et les pattes avant d’un armaldo, portant un casque surmonté d’une hache. Prenez le temps pour bien visualiser ce cadavre exquis, car de toute façon, vous êtes encore à des années-lumière du machin que j’avais devant les yeux. Et bien entendu, il fallait qu’une créature aussi moche porte un nom super null, Type:0 !
A cause de son appendice caudal, je me mis en tête qu’il pouvait avoir le type eau. Pour mon premier essai, je demandai bien gentiment à Hercule d’avoir l’amabilité d’utiliser lame-feuille. Il s’exécuta, brandissant son bâton de toutes ses forces et frappant le casque de Type:0. Celui-ci, violemment sonné par l’attaque, tituba, reculant de quelques pas en arrière. Je ne me privai pas d’exploiter ce moment de faiblesse, Hercule molesta son opposant du plat de l’aile, après l’avoir poliment exhorté d’user de sabotage.
Sans quitter du regard sa main exaltée, Gladion donna ses ordres à sa chimère. Type:0 souffla trois boules d’énergie, bleue, jaune et rouge, qui tournoyèrent vers mon pokémon en une puissante triplattaque. Hercule parvint à repousser les deux premières à l’aide de son bâton, mais se prit la dernière de plein fouet. Il ne me restait qu’une seule chance de vaincre mon adversaire. Je devais cesser de me voiler la face, la vérité sautait pourtant aux yeux : Type:0 appartenait au type insecte ! Il n’y avait qu’à se fier à ses pattes antérieures pour en être convaincu.
Hercule lança rapace quand il jugea mes supplications suffisantes, fonçant vers le coup d’boule de son opposant. Le choc fut terrible ! Mais pas suffisant pour que l’un des deux pokémons ne tombe KO. Ensuite, cet imbécile d’Hercule quitta le combat pour voleter autour de moi, piaillant une chanson que je déteste et me menaçant de son bâton si je ne le rappelai pas rapidement dans sa capsule.
Guzma me précisa que j’avais réussi la deuxième épreuve. Personne n’ayant encore réussi à battre Gladion, il s’était attendu à ce que le blondin me rétame sans ménagement. C’était le genre typique de commentaire que je détestais entendre après une défaite.
Le boss de la Team Skull bougea imperceptiblement son menton carré en direction de la sortie, m’indiquant la direction à suivre pour la troisième épreuve. Il me conduisit vers une destination inconnue, marchant devant moi, les mains dans les poches, suivis par deux sbires à la démarche simiesque. Il ne lâcha pas un mot du trajet, ponctuant ses pas de grognements et de ricanements. Nous finîmes par arriver non loin de l’hôtel où j’avais rencontré Linus la veille.
Je ne mis pas longtemps à deviner le but de la dernière épreuve : dérober un pokémon à un touriste. Guzma ne m’imposa aucune cible en particulier, ni aucune limite de temps. Je m’éloignai de lui et de son groupe de sbires en me posant cette question : avais-je réellement envie de servir à nouveau une organisation criminelle ? A cette pensée, un sentiment de lassitude m’envahit. Mais que savais-je faire d’autre ?
Un touriste rondouillard se dandinait dans ma direction, arborant une tenue flashy qui méprisait toute harmonie des couleurs. A sa ceinture, je vis six pokéballs étincelantes. Cible repérée ! Je ressortis le plan d’Alola de ma poche et simulai une absorption complète de mon attention par ledit fascicule. Le touriste ne me parut pas très conscient de son environnement non plus. Nous nous percutâmes ; mon bras gauche chercha le pokéball la plus éloignée de sa braguette, tandis que, de la main droite, j’exerçai une faible pression sur l’épaule de ma victime pour détourner son attention. Et accessoirement, reprendre mon équilibre.
Ce tour, qui ne cessait de m’être utile, m’avait été appris par un membre de la Team Magma, des années auparavant. Je déduisis que le touriste venait d’Illumis à la façon dont il s’emporta pour cet incident. Je me confondis en excuses, qu’il accepta de mauvaise grâce, puis retournai auprès de Guzma.
« Wesh, y te voulait wak, ce sablaireau ? s’enquit un de ses sbires.
- Rien d’important. Mais je lui ai piqué un de ses pokémons ! dis-je fièrement en agitant la capsule dans ma main.
- Vraiment ?! fit Guzma, suspicieux. Pourtant on n’a rien vu, pas vrai les gars ?
- Je lui ai volé quand je l’ai heurté.
- Tu as… KÔA ?! Mais cela veut dire qu’il ne saura jamais qu’il s’est fait détroussé par la Team Skull !
- Mais vous ne m’aviez pas dit que…
- Pire, il vivra le reste de son existence sans comprendre comment il a pu perdre un de ses précieux pokémon ! Alors qu’il aurait pu connaître la terreur infinie de se faire violenter et détrousser par la Team Skull, n°1 du racket à Alola ! déclama Guzma devant les regards émus de ses sbires.
- J’en conclus que j’ai raté la dernière épreuve.
- Tout à fait ! Donne-moi la pokéball et casse-toi ! »
Au moins il ne perdait pas le sens des affaires ! Je lui rendis la capsule volée et m’éloignai en dissimulant mon absence de peine. Sans déborder de joie, j’étais suffisamment satisfait de la manière dont les choses venaient de tourner, même si la réaction de Guzma me semblait ridicule. J’étais finalement débarrassé de cet individu instable. A présent, une multitude de possibilités s’ouvraient à moi.
En effet, je pouvais postuler à la Fondation Aether, qu’importent leurs intentions. Il m’était également possible de changer d’île ou de quitter carrément Alola, à condition de mettre un peu d’argent de côté. J’avais appris que le job de lanceurs-de-concombaffe-à-la-mer-à-temps-partiel bénéficiait d’un salaire plus que décent. Ce ne serait pas mon premier travail honnête, alors pourquoi pas ?
Perdu dans ces projets d’avenir, je ne réalisai pas immédiatement qu’un bonhomme se tenait à mes côtés depuis quelques dizaines de mètres déjà. Il devait certainement crever de chaud avec son imperméable et son chapeau de feutre, sans compter sa délirante pilosité faciale. Et zut, l’agent Bocage marchait à ma droite ! Je perçus une lueur revancharde au fond de ses yeux. Il me saisit par le poignet, pour éviter la même déconvenue que sur Mele Mele, et posa son autre main sur mon épaule, d’un geste paternaliste.
« Félicitations mon cher Jasper ! Grâce à toi, nous savons où se terre la Team Skull et ce qu’elle prépare ! s’exclama-t-il avec une affection forcée.
- Ordure, vous m’avez suivi !
- La Police Internationale t’est redevable sur ce coup-là ! poursuivit-il sans prêter attention à mes propos. Ta récompense d’attend au QG, tu l’as bien mérité !
- Vous vous payez ma tête ou quoi ?
- Pas du tout, me souffla-t-il à l’oreille dans un relent de café et de tabac. Tu m’as été très utile, crapule. Mais je me demande ce qu’en disent tes copains de la Team Skull, pas toi ? »
A cet instant, je pris conscience des trois sbires en jogging, adossés à un muret sur ma gauche, qui nous épiaient. J’entendis les pas de l’agent Bocage qui déguerpissait à toute allure dans mon dos. Le trio s’approcha de moi avec une dégaine de loubard qui ne me mit pas du tout en confiance. Me fixant d’un air menaçant, ils m’encerclèrent tout en sortant leurs pokéballs. Tout compte fait, j’étais loin d’être débarrassé de Guzma !