III – Le Chapeau perdu
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____Un endroit inconnu, pourtant si familier ; des images nouvelles, pourtant coutumières ; une impression inédite qui, malgré tout, paraissait trouver parfaitement sa place dans le cœur d'Églantine. Le crépuscule colorait le ciel d'un orange trop vif pour qu'il fût réel, le bleu de la mer était bien trop profond, le sable sous ses chaussures trop chaud et l'atmosphère trop cotonneuse. Au fond d'elle, une voix lui murmurait subrepticement qu'elle rêvait. Mais Églantine ne voulait pas la croire, elle l'ignorait et profitait – un peu niaise – du paysage qui s'offrait tout entier à elle.
____Autour s'érigeaient fièrement d'immenses Noadkoko. Ils semblaient se railler d'elle avec leurs regards inexpressifs qui cachaient quelque narquoiserie. Elle aurait pu terminer sa vie ici, debout, figée, à contempler béatement la beauté de ce tableau onirique. C'était comme s'il emplissait sa vie aussi bien que son être.
____Elle s'appropriait le paysage et le paysage s'emparait d'elle ; il y avait entre eux une sorte d'union indicible, incompréhensible et incongrue.
____—__Eh bien, jeune fille, apprécies-tu la beauté de Nénucrique ?
____Une voix caverneuse, presque grondante. Aux oreilles d'Églantine, elle était lointaine mais, étrangement, lorsque la jeune fille la détaillait mentalement, elle était proche, presque soufflée sur sa nuque. C'était comme si elle l'avait déjà entendue dans une vie antérieure, comme si l'empreinte de ces mots avait été laissée sur sa mémoire inconsciente lors d'un passé incertain.
____Églantine dévisagea l'inconnu. C'était un énorme Gouroutan, au poil immaculé, parfaitement peigné par le vent, et au sourire énigmatique qui dévoilait des dents impeccables. Les petits yeux endormis du Pokémon transperçaient l'âme de la jeune fille. Il attendait sa réponse.
____—__Qui es-tu, Gouroutan ? demanda-t-elle.
____Ces quatre mots étaient tout naturellement sortis de sa bouche, comme arrachés par le destin. Singulièrement, ils n'avaient pourtant aucun sens pour l'esprit d'Églantine, ils sonnaient et résonnaient atrocement faux au fond de son crâne.
____—__Comme tu le dis si bien : je suis « Gouroutan ». Allons, m'as-tu vraiment oublié ?
____En temps normal, elle aurait rapidement réagi et, n'appréciant pas que l'on se moque d'elle, la colère l'aurait poussée à ensevelir son interlocuteur sous un flot d'injures particulièrement fleuries. Mais en cet instant, bercée par la douceur d'un air frais et éthéré, elle se sentait apaisée. Même ses mots, sa syntaxe, tout son parler étaient affectés par cette sérénité soudaine et idéale.
____—__Je suis désolée, j'oublie beaucoup de choses... Que me veux-tu ? fit-elle avec une délicatesse qui ne lui seyait absolument pas.
____—__Je ne veux rien. C'est toi qui veux retrouver ton passé. Et je suis là pour t'aider.
____Églantine marqua une lourde pause. Le temps d'un soupir, elle avait presque oublié son amnésie. Mais en cette heure étrange, sa priorité n'était pas à la quête de ses souvenirs. Elle souhaitait simplement apprécier ce monde idéal qui était pourtant si réel à ses yeux, faire plus ample connaissance avec lui, y vivre pleinement.
____Elle s'enquit :
____—__Qu'est-ce que « Nénucrique » ?
____Elle se sentait désagréablement étrangère à elle-même mais ne pouvait rien y faire. Pourquoi parlait-elle de la sorte ? Gouroutan leva un sourcil moqueur.
____—__Nous sommes à Hoenn, une contrée lointaine et charmante. Tes pieds sont en ce moment enfouis dans le sable chaud de la baie de Nénucrique, l'une des plus grandes villes portuaires de la région.
____La jeune fille ne put imaginer un instant qu'elle ne fût pas chez elle, sur l'île d'Ula-Ula. Elle jeta un œil aux cocotiers mouvants, hauts de plusieurs mètres, puis à la mer turquoise qui s'étendait par delà l'horizon, surplombée d'un ciel peint par le soleil couchant. L'image qui s'imprimait sur sa rétine était bien trop familière pour qu'elle ne fût pas offerte par Alola. Pourtant, Églantine savait que Gouroutan ne mentait pas : ils étaient ailleurs. Toutefois, c'était comme si elle avait toujours vécu ici, elle y sentait tout l'amour d'un chaleureux foyer. Un sentiment de déjà-vu bien saugrenu bousculait incessamment ses pensées confuses.
____—__Mais laisse-moi te présenter une très vieille amie, reprit Gouroutan.
____Une dame se tenait à ses côtés. Églantine ne parvint pas à détailler sa tenue. Portait-elle un long manteau blanc ? Ou bien une robe discrètement brodée ? La jeune Alolaise la voyait parfaitement nette, cependant, il y avait comme une aura floue, voire opaque, autour de sa silhouette – élancée ou trapue.
____Frustrée de ne pouvoir mémoriser l'allure de cette présence féminine, elle s'assit sur une chaise et s'accouda tout naturellement à la petite table sur laquelle était disposé un service à thé. Ces objets étaient apparus en même temps que les grains de sables de la baie s'en étaient allés, soufflés par une absurde bourrasque onirique. Églantine perdit son regard las sur les murs de la pièce dans laquelle ils se trouvaient à présent. Un salon des plus banals, meublé sans fantaisie, au parquet quelconque. Il y flottait une effluve fraîche caractéristique d'un ménage récent.
____—__Enchantée, je suis Meryam. Tu es chez moi, mais je t'en prie, fais comme chez toi.
____L'invitée ne se fit pas prier plus longtemps, elle se servit une tasse de thé et commença à siroter avec une aisance déconcertante.
____—__J'suis Églantine.
____Enfin, le confort de cette petite maison lui avait fait retrouver sa parole habituelle, plus spontanée, plus directe, plus naturelle. « Comme une évidence ».
____Gouroutan effectua quelques pas en avant, et fit résonner sa voix profonde. L'écho vibrait presque dans le corps de la jeune fille.
____—__J'ai parlé de tes problèmes de mémoire à Meryam.
____Il s'arrêta un instant, avant de reprendre, avec ce sourire énigmatique habituel pendu aux lèvres :
____—__Son mari est le fameux Effaceur de capacités, je pense que tu fais le rapprochement toute seule.
____Églantine écarquilla les yeux. Une lueur brillait au fond de ses iris bleutés, comme celle que l'on aperçoit dans le regard d'un enfant émerveillé.
____—__C'est exact. Il n'est pas là, aujourd'hui, mais je peux tout de même t'aider, déclara la femme. Dis-moi, Églantine, de quoi te souviens-tu ?
____De quoi se souvenait-elle ? De rien. Elle se figea durant une – longue – seconde, son âme semblait avoir quitté son corps, ne laissant derrière elle qu'une carcasse vide, sans émotion. Sans souvenir. Lorsqu'elle reprit ses esprits, la femme de l'Effaceur l'interrogea de nouveau :
____—__Allons, il doit bien te rester quelque chose. Une image, une odeur...
____Progressivement, la voix s'atténuait, jusqu'à devenir un long sifflement strident qui masquait tout autre bruit. Églantine fixa les lèvres de Meryam qui se mouvaient sans qu'aucun son ne parvînt à ses oreilles. Il n'y avait que ce long bruissement aigu mais discret qui traversait son crâne. En se concentrant, elle put déchiffrer ce message que lui communiquait la bouche dansante mais muette : « un mot, une phrase ? »
____Elle laissa son esprit tomber dans l'abîme de ses pensées, vagabonder au plus profond de son être. Il faisait sombre et elle se sentait flotter dans cette obscurité abyssale. Autour, des images n'étaient que subtilement évoquées, un mince rideau de soie noire voilait ses souvenirs. Elle avait beau agiter les bras, essayer d'attraper une image au vol ; tout filait entre ses doigts.
____Résignée, elle se laissa vaciller, s'abandonna au flot tumultueux de ses pensées. Parfois, parmi la pluie de photographies mal découpées qui défilaient sous ses yeux fatigués, elle distinguait une ombre vaguement humaine ; parfois elle croyait reconnaître un visage.
____Puis, lorsqu'elle se concentra de nouveau, une mélodie vint lui caresser les tympans. Quelques mots susurrés auxquels elle s'accrochait. « Chapeau », reconnaissait-elle, prononcé suavement par une voix délicate. Elle comprit ensuite « Tu as perdu ton chapeau ? », suivi de jérémiades enfantines rapidement tues par un réconfortant « Oh, mais c'est pas grave ma chérie ». L'estomac d'Églantine s'agitait curieusement à l'écoute de ces pleurs de gamine, comme s'ils sortaient de ses propres entrailles. Elle ne comprenait vraiment pas cette scène à laquelle assistaient ses oreilles, l'absurdité de cette fantaisie la confondait inextricablement.
____Elle revint à elle et dans le salon de Meryam, en compagnie de Gouroutan, toujours aussi souriant.
____—__Alors ? questionna l'hominidé.
____Églantine resta de marbre un instant, déboussolée au sortir des tréfonds de sa mémoire, avant de bégayer :
____—__Je... J'ai cette scène bizarre, où je pleure parce que j'ai perdu un chapeau. Vous avez une idée de ce que ça peut vouloir dire ? demanda-t-elle désespérément.
____Meryam s'avança jusqu'à elle et lui tapota amicalement la tête, pour la rassurer mais aussi pour la féliciter de ce premier pas, somme toute modeste.
____La jeune fille remarqua, pendu autour du cou de cette inconnue si attentionnée, un collier. C'était un petit coquillage à la surface brute, accroché à un mince fil en tissu noir. La simplicité de cet ornement lui évoquait les mains maladroites d'un enfant, comme s'il avait été confectionné par – ou pour – un chérubin espiègle.
____Églantine pencha la tête sur le côté en même temps qu'elle lorgnait lourdement le coquillage. Remarquant l'attention toute particulière que son hôte portait à son bijou, Meryam fit glisser ses doigts sur le pendentif blanchâtre et rugueux.
____—__C'est quoi ? lâcha la curieuse.
____—__Un vieux cadeau de ma mère.
____La jeune Alolaise était captivée par ce bibelot qui transpirait une authenticité fascinante. Les yeux scintillants, elle demanda :
____—__Je peux l'essayer, s'il vous plaît ?
____En même temps qu'elle répondit « bien sûr », Meryam retira son collier et le déposa au creux des paumes d'Églantine qui l'enfila immédiatement.
____Alors une bouffée d'air glacial pénétra ses poumons, un train d'images nettes et précises s'écrasa sur elle. Elle se sentit décoller, projetée dans une galaxie reculée, loin de Nénucrique, loin d'Alola, loin de la Terre. Pourtant, lorsqu'elle jeta un œil aux alentours, elle reconnut la même plage que celle qu'elle avait foulée plus tôt. Les Noadkoko railleurs avaient disparu mais le sable était identique, tout comme le reflux apaisant des vagues.
____Il n'y avait sur cette plage qu'une mère et sa fille qui perdaient toutes les deux leurs regards dans l'horizon. La gamine, bien qu'un peu maigrichonne, avait le visage joufflu de l'innocence. Elle était habillée d'une longue robe légère qui flottait au gré du vent estival ; ses cheveux rougeoyants étaient surmontés d'un chapeau de paille trop large pour sa petite tête de bambin.
____Tout semblait si réel.
____Églantine les aurait presque touchées. Mais elle n'était qu'observatrice. Lorsqu'elle tentait de s'approcher, la distance qui les séparait ne diminuait pas d'un centimètre. La mère et sa fille ignoraient complètement sa présence. Elle accepta alors son rôle de spectatrice et détailla attentivement la scène interprétée par ces actrices improvisées.
____Une bourrasque vint jouer avec ses cheveux, dérobant également le chapeau de l'enfant qui tenta vainement de le rattraper.
____Trop tard, il s'en était déjà allé loin, vers l'océan, porté par le vent, puis bercé par la mer.
____La gamine frotta ses yeux humides, ses sanglots vinrent directement marteler les tympans d'Églantine. La mère se tourna vers la petite fille lorsque ses reniflements disgracieux devinrent trop bruyants. Alors elle lui demanda, avec une douceur maternelle :
____—__Qu'est-ce qu'il y a ?
____Elle n'eut pour réponse qu'un braillement accompagné d'amères larmes. La souffrance de l'enfant résonnait dans le cœur d'Églantine. Celle-ci ressentait toute sa douleur, jusqu'à la torsion inconfortable de sa poitrine juvénile.
____—__Tu as perdu ton chapeau ?
____Les larmoiements gagnèrent en puissance lorsque la petite pleurnicharde lâcha un « oui » qui s'étendit longuement jusqu'à devenir le prolongement de ses gémissements insupportables.
____—__Oh, mais c'est pas grave ma chérie !
____La mère ramassa un coquillage qui dépassait discrètement du sable, sortit une ficelle de sa poche et fabriqua un collier qu'elle accrocha au cou de l'enfant chagrinée. Aussitôt séchèrent les larmes ; les pleurs cessèrent en même temps.
____—__Tu vois, Églantine, ça sert à rien de pleurer, tout s'arrange !
____La mère essuya les restes de sanglot qui avaient laissé sur le visage candide des traces humides et salées.
____—__Dis-moi, pourquoi tu pleurais ?
____—__J'étais triste d'avoir perdu mon chapeau.
____—__Mais pourquoi tu étais triste ?
____—__Moi, j'aimais bien mon chapeau.
____—__C'est normal d'être triste quand on perd quelque chose qu'on aime.
____Un sourire attendri se dessina sur les lèvres de la femme. Elle continua :
____—__Mais il faut que tu saches que ça ne sert à rien d'être triste trop longtemps. Les choses viennent et s'en vont. Et quand elles partent, tu dois simplement l'accepter. Comme ça, tu auras moins mal. Tu vois ?
____La petite fille ne semblait pas vraiment comprendre, même si sa moue maussade avait laissé place au visage ingénu d'une gamine comblée.
____Églantine sentit son cœur fondre. Une chaleur intense parcourait ses veines et son visage s'illuminait à la vue de ce spectacle attendrissant.
____La gamine ouvrit grand les yeux et demanda, avec toute l'innocence de la jeunesse :
____—__Comme pour Papa ?
____La mère marqua une pause amère. Les lèvres étirées par un sourire morose, elle répondit derrière un masque qui cachait bien sa peine :
____—__Oui, ma chérie.
____Pincement âpre au ventre. Les yeux d'Églantine s'assombrirent. Peut-être devait-elle, elle aussi, accepter la disparition de sa mère, de son enfance et de tous ses autres souvenirs, tourner la page, commencer un nouveau chapitre, pour avoir « moins mal ». Elle tendit la main en direction de l'orpheline mais ne put atteindre son épaule.
____—__Allez, fais un beau sourire à maman, maintenant !
____La petite fille révéla toutes ses dents de lait à sa mère et s'en alla galoper au bord de l'eau, comme si rien de tout cela ne s'était passé. Comme si elle avait tout oublié, si facilement. Ses pleurs, son chapeau, son père, surtout son chagrin. La jeune Alolaise se surprit à envier son heureuse insouciance.
____Elle voulut la remercier. Dans un effort surhumain, elle réussit à s'approcher de l'enfant qui pataugeait dans l'écume des vagues.
____—__Merci... Églantine... lui lança-t-elle.
____Prononcer son prénom de la sorte provoquait un sentiment étrange, un mélange bâtard entre nausée et inconfort.
____—__De rien !
____L'ingénue, trop occupée à chasser la mousse et les petits galets de la plage, lui avait répondu sans même se retourner, comme si elle s'adressait à une amie imaginaire. Ses deux mots énoncés malicieusement s'égarèrent dans l'immensité de l'océan, emportés par d'incessants remous.
____Églantine avait perdu un chapeau ; elle avait retrouvé un souvenir.
____Le décor s'effondra sans transition, pour être remplacé par les murs de la maison de l'Effaceur, à Nénucrique. Gouroutan, qui l'avait épiée tout ce temps avec son habituel sourire accroché à la face, réveilla la jeune rêveuse de sa voix puissante.
____—__Eh bien, jeune fille, je pense qu'il est temps de se quitter.
____Elle s'affola, se leva en sursaut et jeta des regards paniqués autour d'elle. Un éclair de lucidité traversa son esprit, elle comprit à l'instant qu'elle rêvait et que l'instabilité du monde des songes menaçait la mémoire de ce qu'elle venait de vivre.
____—__Non ! Si je m'en vais, je vais tout oublier, s'exclama-t-elle. Je veux me souvenir de toi, de Meryam, du collier... De tout.
____Gouroutan posa une main protectrice sur son dos, pour la consoler. Il rit, ses minuscules yeux noirs se plissèrent.
____—__Si tu oublies tout ça, c'est que ce n'est pas important pour ta vie.
____—__Attends !
____Églantine attrapa une feuille et un stylo qui traînaient dans le salon et y inscrivit désespérément tout ce dont elle avait été témoin dans ces contrées lointaines. Elle donna la note à celui qui se présentait comme le guide de ses rêves. Pour une raison inconnue, elle était persuadée du bon fonctionnement de ce plan absurde.
____Les murs de la maison se mirent à vibrer. L'ampleur des tremblements firent chuter le service à thé qui se brisa au sol. Tout semblait dorénavant extrêmement lointain aux yeux d'Églantine – à demi-endormie dans le rêve ; à demi-éveillée dans la réalité. Elle adressa un au revoir de la main aux deux silhouettes qui s'éloignaient inévitablement. Sa bouche s'ouvrit, elle tenta de hurler « À la prochaine, merci pour tout ! » mais aucun son ne sortit.
____Le séisme était si puissant que la maison s'écroula, dans un silence déconcertant.
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____Le téléphone portable vibrait sur la table de chevet. Les oscillations rapides engendraient un boucan cataclysmique, comparable à celui des ondes sismiques d'un tremblement de terre aux oreilles d'Églantine qui n'était pas encore complètement ancrée dans le monde réel.
____Les yeux trop endormis pour être ouverts, elle balança mollement la main sur la table pour attraper son téléphone, en faisant tomber au passage des crayons et la paperasse qui demeuraient là. D'un œil, elle put lire « Artis », illuminé par un rétroéclairage mal réglé qui lui brûlait la rétine. Un mince et visqueux filet de bave reliait sa bouche et son oreiller. Elle décrocha à contrecœur et marmonna un « Allô » qui ressemblait plus au râle sous-marin d'un Wailord.
____—__Bordel, qu'est-ce que tu fous ? hurla-t-on de l'autre côté de la ligne.
____Les paupières d'Églantine se fermèrent de nouveau. Elle n'avait ni la force de soutenir leur poids, ni celle de répondre.
____—__J'suis devant chez toi, bouge-toi ou on va encore être en retard, continua Artis.
____—__Laisse-moi... articula-t-elle dans un effort surhumain. J'arrive, attends.
____Elle raccrocha et laissa son bras pendre de son lit. Son corps était devenu un fardeau impossible à soulever. Elle essaya de traîner toute sa masse hors des draps mais tomba pitoyablement pendant la tentative.
____Lamentablement étalée au sol, la joue écrasée contre la poussière, habillée de son vieux short et de son t-shirt trop petit, elle ne trouva pas l'énergie nécessaire pour se relever.
____Ses paupières chutèrent, comme un rideau final.