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Stalhblume de Clafoutis



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» Auteur : Clafoutis - Voir le profil
» Créé le 14/08/2016 à 18:06
» Dernière mise à jour le 15/08/2016 à 10:27

» Mots-clés :   Absence d'humains   Action   Aventure   Humour   Région inventée

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Partie 9 : Entre deux gorgées.
Cassis

 Patch était un bon docteur, assurément. Cependant, lorsqu'il se laissait aller dans son sadisme latent, il pouvait faire des choses légèrement dangereuse ; comme faire absorber à ses patients des substances potentiellement mortelles par exemple. Heureusement, mon corps avait instinctivement enclenché le processus d'une Régénération aux premiers signes de toxine dans mon organisme ; je ne m'étais quand même réveillée que le lendemain matin.

Plus j'y réfléchissais, et plus je trouvais qu'il avait un problème ce Pachirisu. Au delà de sa personnalité classique, il pouvait se relever étonnamment cruel ou carrément se transformer en cookie selon les situations. Il devrait sérieusement aller consulter un médecin.

Si je pensais à cela, c'était certes d'une part parce que ça me faisait quelque peu bouillonner d'avoir failli mourir alors que j'étais ici pour être soignée, mais d'autre part, c'était pour éviter d'affronter une réalité bien plus ahurissante.

— T-Tu ne réponds pas, Cassis ? m'interpella Patch.
— Oui, geignis-je, un instant....

Artichtote, Patch et Dunkel avaient attendu mon réveil pour me faire part d'une révélation qui me laissa sans voix de longues minutes.

Le Kaiser. Ce Pokémon fantastique ayant réunifié le continent il y a plus de deux mille ans, ayant gagné le respect absolu de tous les Pokémon de son temps jusqu'à aujourd'hui ! Meloet ? Ce zombie sans cervelle dont le corps ne pouvait même pas tenir sans bandelette ?! Et je voulais devenir comme elle ? Comme... Meloet ?!

— Je crois que votre petite fée est trop choquée pour parler ! ricana Dunkel.
— Ce qui est compréhensible..., marmonna Patch.
— Mais tu es absolument certain que Meloet est le Kaiser ? réfléchit Artichtote. Ce n'est pas logique, j'ai bien inspecté son tombeau et mon diagnostique est sans appel, il date de 500 ans, de l'ère des Rois. Or, Le Kaiser a vécu il y a deux millénaires ! Regardez, j'ai même fait une frise chronologique !

[ Note de l'auteur : Comme d'habitude, voici la frise d'Artichtote : Cliquez ici ! ]

— Vous avez vraiment fait une frise chronologique avec les époques et tout le bordel ?! m'étonnai-je.
— Ouais, on avait vraiment rien à faire, grommela Patch, et je ne te raconte même pas la galère à fouiller le château à la rechercher de crayons de couleurs... ; tout ça parce que madame Artichtote voulait une frise « présentable » !
— Bref ! toussota la Canarticho. Ce que je veux dire, c'est que c'est chronologiquement incohérent ! Pourquoi Meloet serait enterrée dans un tombeau de l'ère des Rois si elle est le Kaiser ?

Notre historienne marquait un point. Je me tournai vers Dunkel, attendant sa réponse, qui ne fut pas vraiment celle que j'espérais.

— Qu'est-ce que j'en sais moi ? souffla le Précieux. J'ai été scellé je vous le rappelle ! Quoi qu'il en soit, je ne peux pas me tromper, votre Meloet est bien le Kaiser. De plus, malgré sa perte de mémoire, elle semble se souvenir de moi, si ça ne n'est pas une preuve !

Une preuve, c'était vite dit. En revanche, je me souvenais clairement de l'état second dans lequel fut plongée Meloet lorsqu'elle fut rentrée en contact avec Dunkel.

— Je ne suis pas encore persuadée, me mordis-je les lèvres, toutefois je dois admettre que certains éléments convergent...
— Je te comprends, fit Dunkel. Pour être tout à fait honnête, elle n'était pas aussi simplette dans le passé, son aura actuel est bien plus faible aussi. J'ai comme l'impression que notre Kaiser n'a pas perdu que la mémoire...
— Effectivement, soupira Patch, elle a perdu la vie ; c'est un zombie...
— Si on réfléchit, plissai-je des yeux, le fait qu'elle soit un zombie est déjà un mystère en soit. A moins que le Kaiser soit si fort que même la mort ne l'atteint pas ?
— Je ne pense pas, pencha Artichtote de la tête, sinon on en aurait entendu parlé. La disparition du Kaiser a failli provoquer la destruction totale de son œuvre à l'époque ; s'il était encore en vie, je crois qu'il l'aurait fait savoir. C'est d'ailleurs pour cela que certain fixe l'an 352 comme étant celui de la mort du Kaiser, bien que l'on n'en possède aucune preuve substantielle...

Nous plongeâmes dans un silence lourd. Plus l'on cogitait et plus j'avais l'impression que le mystère s'épaississait. Cette Meloet n'avait pas fini de jouer avec nos neurones !

— Juste comme ça, s’immisça Dunkel, j'ai peut-être une solution pour vous.
— Je t'en prie, l'invitai-je à parler.
— Meloet ne vous a jamais parler de moi ou des Précieux avant que vous me trouviez, n'est-ce pas ?
— Je n'en ai pas le souvenir, non...
— En revanche, une fois qu'elle m'a vu, une partie de sa mémoire s'est débloquée, c'est cela ?

Ah, là, il commençait à m'intéresser.

— Ce n'est qu'une hypothèse, continua Dunkel, mais peut-être que plus elle retrouve des éléments de son ancienne vie, plus vite elle retrouvera la mémoire.
— C'est une hypothèse intéressante, hochai-je de la tête.
— Encore faut-il connaître ses fameux éléments, pointa Patch.
— Moi j'en connais pas mal, répliqua le Précieux. J'étais son partenaire le plus proche après tout.

Dunkel était le partenaire du Kaiser ? C'était qu'il nous cachait des choses ce bracelet. D'un autre côté, personne ne le lui avait demandé.

— Déjà, le Kaiser possédait tous les Précieux. A partir de là, on peut décemment penser que si vous vous en trouvez d'autres, Meloet récupérera d'autres fragments de sa mémoire.
— Mais nous ne savons pas où se trouve les autres Précieux, grinça Patch.
— Meloet devrait le savoir..., souffla Dunkel.
— Si je résume, plissa Artichtote des yeux. Pour que Meloet retrouve la mémoire, il faut retrouver les autres Précieux ; et pour retrouver les autres Précieux, il faut que Meloet retrouve la mémoire ?
— Tu parles d'un cercle vicieux..., soupirai-je.

Une chose était sûre, nous n'étions pas sortie de l'auberge. Mais d'un autre coté, voulais-je vraiment que Meloet redevînt comme avant ? Je voulais détruire la Loi d'Or, la loi suprême qu'avait justement instaurer le Kaiser. Si Meloet était vraiment le Kaiser, quelqu'un qui avait imposé au monde une chose aussi cruelle, elle était par défaut mon ennemi.

A bien y réfléchir, il valait peut-être mieux qu'elle restât dans son état actuel, simplette et complètement inoffensive.


____________________

Affienns

— …

Le camp d'entraînement avait été remplacé par un énorme gouffre ; il restait cependant suffisamment de place sur les côtés.

J'étais curieux. Au début, je ne voulais pas user de ses pouvoirs, mais plus le temps passait et plus cette irrépressible curiosité m'envahissait ; il fallait croire que j'étais vraiment un guerrier dans l'âme.

D'un geste, j'enlevais le bandeau qui recouvrait mon œil gauche, dévoilant ainsi son terrible et ténébreux éclat écarlate. Oui, les Ténèbres d'Azorn. Nous étions encore liés, certes moins puissamment depuis la défaite de Dunkel, mais toujours liés.

Je pouvais encore sentir la Glace de Snowleis, la Plante de Gloria, l'aura Combat de Virchen et surtout, les Ténèbres d'Azorn. Grâce à ce lien qui nous unissait, notre ancien leader était toujours vivant, dans nos cœurs et dans notre immense réserve d'énergie commune. Son pouvoir était son ultime héritage, un héritage dans lequel il avait placé tous ses espoirs en nous.

— … vivre...

Il voulait qu'on vît. Vivre selon ses principes, sans laisser personne nous détourner de notre route. C'était son seul et unique souhait.

Je fermais mon œil droit, pour me concentrer uniquement sur le gauche. A travers ce dernier, le monde était entièrement fait de rouge et de noire. Dans cet univers bichrome, je semblais pouvoir percevoir bien plus que les choses matérielles. Le flux de l'air, les particules de poussières, les variations de températures... ; tous s'affichaient clairement devant moi. Je pouvais presque les toucher.

Ce n'était pas que ça, j'avais aussi l'impression que le temps s'était ralenti ; les feuilles des arbres ne bougeaient presque pas malgré la bourrasque.
Un pouvoir effrayant, et étrangement grisant. J'en prendrais grand soin, en mémoire d'Azorn.

J'étendis ensuite mes frêles bras, faisait appel au pouvoir de Gloria ; brusquement, d'épaisses lianes naquirent de l'extrémité de mes membres. Je m'en servi pour arracher une dizaines de blocs de roche du gouffre et de les jeter puissamment en l'air.

Grâce à mon œil écarlate et au temps ralentit, le premier bloc s'élevait encore lentement lorsque je fini de projeter le dixième. Je fléchis les genoux, et je bondis. Je pris appui sur le rocher le plus bas, pour aller m'élever encore plus haut en me servant du rocher suivant, comme si j'escaladais un escalier flottant.

Une fois arrivé au sommet, je m'emplis de l'aura combative de Virchen, et je me catapultais d'un coup jusqu'au nuage.

Pour finir, la froid mordant de Snowleis recouvra mes deux queues, les transformants en deux énormes poings glacials. Je les rejoignis au sommet de mon crâne, et je plongeai brusquement, tête vers le bas, en vrille.

L'impact explosa le sol, soulevant des millions de petits fragments de roches. Je me redressai vivement, je fis revenir mes mains caudales à la normale, et, poussant l’œil d'Azorn au maximum de ses capacités, j'attrapais chacun des cailloux volants avant qu'aucun d'entre eux ne put toucher le sol.

Chose impossible en temps normal. Toutefois, le temps lui même avait peur devant mon œil. Il se figeait d'effroi, me laissant largement plus de temps nécessaire afin de recueillir tous les fragments du sol avec mes deux queues.

— … il sera difficile de prétendre d'être faible après ça, soupirai-je.

Ma nouvelle puissance était indéniable. J'étais encore bien loin de Cassis ou Persyval, mais je devais sans doute être capable de vaincre Wildnis avec aisance. Cependant, je ne savais pas exactement si j'étais heureux de cette force, ou pas.

Mon esprit guerrier jubilait, mais en même temps, l'acquisition de tant de pouvoir me faisait peur. De même, le lien qui nous permettait à la Confrérie d'user de l'énergie des autres provenait de Dunkel, un être ayant été suffisamment fourbe pour voler notre jeunesse, nos idéaux, notre vie, sans aucune hésitation et remord. Je ne pouvais décemment pas lui faire confiance.


***

 Quoi de mieux qu'une petite balade en ville après une séance d'entraînement ? Sans doute plein de choses, mais je n'avais pas énormément de choix à Wearl. Il n'y avait que des marchands en plein air, certains vendeurs possédait une boutique en bonne et due forme, à l'abri du soleil, mais ils étaient rares ; et surtout, leurs marchandises étaient hors de prix, à se demander si quelqu'un achetait vraiment leur produit.

Cependant, ce n'était pas ce qui m'attirait l’œil. Depuis hier, un établissement avait rouvert ses portes : une taverne. Apparemment, il s'agissait d'un débit de boisson était assez connu dans le coin, et tous les habitants de Wearl attendait avec impatiente de pouvoir y transformer leur gosier en océan d'alcool à nouveau.

— « L'Absinthe du Désert », décryptai-je sur l'enseigne. Hé bien, ça annonce la couleur...

Il était encore assez tôt et pourtant, je pouvais déjà entendre des brouhahas venant de l'intérieur. Haha, ça me rappelait des souvenirs tout ça. Après avoir fuit la Confrérie il y a 40 ans, j'avais pas mal vagabondé avant de revenir à Herz. J'avais appris une chose durant toutes mes vadrouilles, les tavernes étaient les meilleurs amis des voyageurs ! Ceci dit, avec mon âge, j'étais certain d'avoir perdu ma décente légendaire.

— Oh ? Tu es intéressé toi aussi ?

Alors que j'hésitais encore à pousser les épaisses portes battantes en bois, Brazoro m'interpella.

— Un peu, oui. J'ai envie de revivre ma jeunesse, haha !
— Ta jeunesse ? plissa le Chimpenfeu des yeux.
— … tu n'es pas en train de te dire quelque chose comme « Quoi ? Ce vieux croulant a été jeune un jour ?! », n'est-ce pas ? grommelai-je.
— T-Tu peux lire dans mes pensées ?! bondit Brazoro.
— …
— C-Ce n'est pas ce que je voulais dire ! tenta t-il te se rattraper. Je veux dire, je l'ai pensé, oui, mais je ne l'ai pas dit, alors ça ne compte pas, hein ?
— …

Toujours aussi malin celui-là. Il faudrait que je lui expliquasse une ou deux choses sur le respect des aînées, un jour.

— Dooonc, sourit nerveusement Brazoro, et si on entrait à l'intérieur ?!
— C'est cela oui, grinçai-je, entrons...


***

 Aaah, l'odeur omniprésente d'alcool, les tintements des choppes dégoulinantes de mousse, les serveurs s'affairant en transportant divers plats avec une agilité étonnante, les Pokémon vomissant à flot sous les tables !

— Une véritable taverne, assurément ! hochai-je de la tête.
— Ce serait plus le mot « dépotoir » qui me viendrait à l'esprit mais admettons...
— L'ambiance est pourtant tout à fait normal ! Ah moins que... tu n'as jamais été dans un débit de boisson avant, c'est ça ?
— … oui, se mordit des lèvres le Chimpenfeu. J'ai toujours eu peur de ce genre d'endroit. A vrai dire, si je ne t'avais pas trouvé, j'aurais fait demi-tour !

Je secouai la tête.

— Voyons Brazoro ! Tu veux dire que tu n'as jamais ressenti la cascade de fraîcheur dévalant ta gorge avant de l'enflammer délicieusement ? L'euphorie qui t'anime et te donne l'impression d'être le plus puissant du monde ? Les terribles lendemains de gueule de bois où le moindre crissement provoque la plus abominable des tortures, pendant que tu ressasses avec honte tes idioties de la soirée ? Tes promesses de ne plus jamais remettre ça, alors que le soir même, tu te retrouves à vider les caves de toutes les bars de la ville, et ainsi recommencer ce cercle merveilleux à l'infini ?!
— Je crois que ta « cure de jeunesse » ne te fait pas que du bien...
— Que tu dis ! Allez, allons nous installer à une table camarade ! Et que la boisson coule à flot, je veux que d'ici ce soir, notre sang soit totalement remplacé par de la bière !
— C-Ce soir ? trembla Brazoro. M-Mais on est même pas encore midi !
— Tu verras camarade, le temps passe extrêmement vite lorsqu'on s'amuse !


____________________

Brazoro

 Dans quelle galère je m'étais encore fourré ! Moi qui voulais me changer les idées après ma mésaventure avec Persyval, je me retrouve à assister Affienns dans sa folie ; ce dernier enfilait les choppes de bières dans un rythme effrayant.

Les serveurs – des Cacnea – semblait défiler exclusivement vers notre table, j'avais l'impression que tout le monde nous regardait. La honte totale. Pour me changer les idées, j'avais commandé une petite entrecôte – cela faisait longtemps que je n'avais pas mangé de viande. Dieu merci, l’Absinthe ne proposait pas que de l'alcool au menu.

Les assiettes étaient assez astucieuses ; en bois – pour éviter de se briser en cas de chute certainement –, elle possédait un petit creux au milieu, du même diamètre que les épines des serveurs. Petit creux qui s’emboîtait donc parfaitement dans l'épine des Cacnéa. De cette manière, les petit cactus pouvaient courir à pleine vitesse sans craindre de renverser leur chargement. Et oui, je pourrais observer méticuleusement chaque parcelle de la taverne pendant des heures si ça me permettait d'ignorer Affienns.

— Tu m'écOUte ?! prononçait-il bizarrement. POUr qui ELle se prend CaSSis ? PrENdre Dunkel avEC elle, coMMe ça ! Il a DétrUIT nos vies ! A moi et... GLOria, SnowLEIS, VirchEN et AZoOoRN ! AZORN EST MoOoRT ! Et c'est ENTièreMENT de la faute de ce coNNard !! Mais CAssis elle s'en FICHE ! Elle ce qu'ELLE veut, c'est QUE le pouVOIR ! RIen d'autre ! Hééé ! TU m'Ecoutes ouiiiii ?!

Je grinçai des dents. Je n'arrivais même plus à comprendre ce qu'il baragouinait. Heureusement, le monde était bien fait ; il y avait une loi immuable dans l'univers qui disposait que plus la situation était désespérée, et plus l'on réfléchissait vite.

Ce fut justement ce qui arriva. Je remarquai subitement un Flobio totalement saoul derrière moi, le pauvre ressemblait plus à un légume bleu qu'autre chose. Mais même un légume pouvait être utile. Avec audace et agilité, j'empoignais l'amphibien par la peau de coup et je le forçai à prendre ma place. Affienns – tout aussi sonné – n'y vu que du feu et continua à lui parler comme s'il s'agissait de moi. Le Flobio lui, s'écroula sur la table avec un sourire béat – était-il encore vivant au juste ? Bref, Mission Complete.

… voilà que je me mettais à parler comme Persyval ! Je n'aurais vraiment jamais dû mettre les pieds ici. La nourriture était bonne pourtant, cependant, l'ambiance déjantée était en peu trop pour mon cœur.

— Quelque chose vous tracasse mon jeune ami ?

Une voix incroyablement suave et calme arriva à mes oreilles. Cela tranchait mais alors terriblement avec l'atmosphère de débauche du lieu. Je me retournai vers l'origine de cette anomalie ; le tenancier – un Cacturne – qui essuyait simplement son bar avec une serviette.

— Serait-ce mon établissement qui vous déplaît ?
— ...ehm, hésitai-je, disons que je n'ai pas l'habitude.
— Un néophyte, n'est-ce pas ? Qu'importe, il faut bien un début à tout ; le tout est de faire le premier pas.

Le Cacturne leva élégamment le bras ; d'un coup, l'une de ses épines fusa et vint s'écraser sur une sorte d'interrupteur. Aussitôt, un étrange mécanisme d'engrenages et de poulies situé en hauteur s'actionna fluidement. Dix secondes une tard, une choppe – plus petite que les autres – remplie d'un liquide légèrement azuré tomba mystérieusement du plafond et s'arrêta finement sur une épine du bras du tenancier. Il me tendit somptueusement le breuvage.

— Voici justement la boisson idéale pour faire le premier pas. Ne vous inquiétez pas, je vous l'offre ; voyez cela comme un gage d'amitié.
— … merci, soufflai-je en prenant timidement la choppe.
— C'est une création originale, très faible en alcool, précisa le tenancier. Je l'ai nommé... « Boisson ».
— « Boisson » ? haussai-je un sourcil. C'est étonnamment décevant.
— Je n'ai jamais été très doué avec les noms ; mais à quoi bon l'extravagance lorsque la qualité est présente ? Goûtez, vous comprendrez.

Ce Cacturne avait un je-ne-sais-quoi qui inspirait la confiance ; une agréable odeur émanait de la « Boisson ». Deux éléments qui m'encourageaient, en dépit de mon appréhension, à siroter le cocktail.

— … c'est pas mauvais, lâchai-je.

Et encore, c'était plus qu'un euphémisme. Ce cactus n'avait pas usurper sa place !

— N'est-ce pas ? sourit t-il. Évidement, ce n'est rien comparé à d'autres de mes œuvres un peu plus... chargés. Mais il ne serait pas raisonnable pour vous d'en boire pour le moment. Il n'y a pas de honte à commencer petit, vous savez. C'est même l'inverse, plus vous partez bas, et plus le chemin que vous allez parcourir jusqu'à votre but sera beau.

Il s'improvisait philosophe de comptoir en plus ? Ce type avait décidément foule de talents insoupçonnés. Mais étrangement, je me sentais touché par ces élucubrations. Dans l'armée de Cassis, j'étais certainement celui qui était le plus en bas de l'échelle, niveau puissance, même si je faisais de mon mieux, c’était assez déprimant.

Et ce que venait de dire ce Cacturne me rassurait, en quelque sorte ; c'était assez étrange. Était-il au courant de ma situation ? J'étais pourtant certain de ne jamais l'avoir vu auparavant. Alors pourquoi m'avait-il sorti ce discours ? Simple hasard ?

— Oh, ça va bientôt commencer, fit le tenancier en coupant le fil de mes pensées.
— Mmh ? l’interrogeai-je d'un signe de tête.
— Vous voyez cette scène à l'arrière ?

Je me retournai. Ah oui, il y avait bien une espèce d'estrade, je me demandais pourquoi je ne l'avais pas vu avant. Ah oui, les effluves affolantes d'alcool, les hurlements des ivrognes omniprésents, tout ça tout ça...

— Je ne vous blâmerais pas pour l'avoir ignorée. Pour dire vrai, je ne l'avais jamais vraiment utilisé. Toutefois, j'ai engagé une artiste récemment, elle avait l'air très enjoué à l'idée de se produire sur une scène.
— Sans vouloir critiquer vos choix, je ne suis pas certain que vos clients soient... disposés à apprécier à un spectacle !
— Haha, ria doucement le Cacturne, peut-être, peut-être pas. On ne peut pas le savoir sans l'avoir essayé, n'est-ce pas ?

Il avait vraiment réponse à tout celui-là. Et le pire, c'était que ses réponses étaient loin d'être idiotes. Comment quelqu'un comme lui pouvait être gérant d'une taverne aussi nauséabonde ?

Avec un sourire, le Cacturne projeta une autre de ses épines sur un interrupteur et brusquement, toutes les fenêtres se fermèrent d'un seul coup. Des cris de surprises – édition ivrogne – s'élevèrent alors, et de puissants projecteurs se mirent à éclairer l'estrade.

— C'est drôlement sophistiqué ici, haussai-je un sourcil.
— Pourquoi avions nous pris autant de temps avant de rouvrir d'après vous ? s'amusa le tenancier.

Alors que les picoleurs s'indignaient encore du manque de lumières, deux silhouettes s’avancèrent sous les projecteurs. Je faillis lâcher ma choppe. La première appartenait sans aucun doute à un Mélokrik, quand à la seconde...

— Meloet ?! m'écriai-je.
— Vous la connaissez ? Une bien étrange créature !

C'était peu dire. Mais qu'est-ce qu'elle fichait ici ? … ce serait elle l'artiste dont me parlait le Cacturne ? Il avait perdu la tête ?

Le Mélokrik fit grincer ses bras, comme pour réclamer le silence – fol espoir, cela ne changea rien. Ou peut-être était-ce simplement pour s'échauffer, je ne savais pas vraiment. Il fit un signe de tête à Meloet qui tournoya joyeusement sur elle-même.

Dans son geste inconscient, l'un de ses bras fut projeté au fond de la taverne, mais pas de panique, le membre perdu sautilla rapidement vers sa propriétaire et reprit sa place.

Une fois reconstituée, Meloet avança de quelques pas ; le Mélokrik croisa ses bras, faisant raisonner une douce mélodie. Meloet ferma alors les yeux, se calma, et ouvrit délicatement sa bouche.

Soudain, toute l'atmosphère putride de la taverne s'évapora comme si elle n'avait jamais existé ; les ivrognes en oublièrent leur mousse. Moi-même je fus littéralement transporter par cet air angélique. Incroyable, c'était tout simplement incroyable.

Son chant était extrêmement simple, simplement magnifique. Chacune des syllabes qu'elle prononçait faisait frissonner le moindre de mes poils. Et j'étais loin d'être un cas isolé, chacun des clients de l'Absinthe était dans le même état, sinon pire. J'en voyais qui, envahis par l'émotion, pleuraient carrément.

— J-Je ne savais pas..., balbutiai-je.

Ma voix ne put poursuivre la phrase. J'avais déjà entendu Meloet pousser quelques « Alalah », mais là, c'était d'un tout autre niveau. Ici, sur cette scène, elle était sérieuse. C'était sans doute la première fois que je voyais ce zombie faire preuve de sérieux. Et vu le résultat, je regrettais qu'elle ne le fût pas plus souvent.

— J'ai tout de suite vu qu'elle avait du talent, déclara le Cacturne. Elle peut sembler simplette, voire idiote, de l'extérieur, mais il ne faut pas se laisser leurrer par les apparences. Son cœur est à la fois honnête, sincère et pur. Je ne sais pas d'où elle vient, mais nulle doute qu'il s'agit d'un Pokémon exceptionnel.

Meloet, un Pokémon exceptionnel ? On me l'aurait dit plus tôt, j'aurais éclaté de rire. Je l'avais certes vue cracher des rayons dévastateurs, l'image du zombie stupide n'était pas parvenu pas à s’effacer de ma tête. Toutefois, maintenant que je l'entendais chanter, un chant si doux et cristallin, toutes les idées que je me faisais d'elle se brisaient une à une.

— Meloet, lâchai-je faiblement, qui es-tu réellement ?