043. 3x17 - L'Auberge aux Spinda
Précédemment : Sofian veut devenir un champion d’arène et part en voyage dans Hoenn en compagnie de Flora, dont le rêve est de devenir une célèbre coordinatrice pokémon, et Timmy, un jeune garçon à la santé fragile qui doit rejoindre Vergazon. L’accès à Vermilava étant bloqué, les trois adolescents se dirigent vers Autéquia dans une ambiance électrique. En froid à cause de leurs avis divergents sur la coordination, Sofian et Flora finissent par discuter de leur relation que Sofian promet d’améliorer à l’avenir. La Team Rocket, quant à elle, a décidé de voler Galifeu afin de mener à bien leur mission et ont l’opportunité de contacter la Team Magma pour les aider. Mais à la suite d’une tempête de cendres provenant du Mont Chimné, Miaouss fait la rencontre d’une Miaouss femelle blessée de qui il s’éprend et annonce à ses acolytes qu’il désire quitter la Team Rocket pour vivre sa vie de Miaouss. Timmy, lui, se voit offrir une flûte bleue qui lui permettra de gérer momentanément ses crises d’asthmes.
Route 113
Un calme reposant régnait dans la chambre miteuse. Les deux amis dormaient paisiblement sous les derniers rayons du soleil qui traversaient la fenêtre crasseuse et qui laissaient apparaître un voile de poussière flottante. Rien n’aurait pu perturber le lourd sommeil dans lequel ils avaient rapidement plongé, épuisés par les longues heures de marches sur la route sinueuse parsemée d’une épaisse couche de cendres fraîchement tombée. Autéquia n’étant qu’à une dizaine de kilomètres, les deux acolytes avaient décidés de s’installer dans une auberge à proximité afin de profiter d’une nuit de sommeil avant leur arrivée dans le village reculé derrière les montagnes.
Tout était parfait : leurs pokémons somnolaient hors de leurs pokéballs, les uns confortablement lovés sur les draps, les autres repliés dans des coins où la fraîcheur du mois d’octobre n’aurait pas accès. Tout semblait parfait.
Quand soudain… « CLAC ! »
Sofian bondit hors de son lit, réveillé en toute hâte par le fracas de la porte d’entrée de la chambre, envoyant son Balignon toujours endormi valser contre le mur en ruine.
— Keskecè ?! balbutia Timmy en repliant ses draps sur lui à la recherche d’une quelconque protection, ce qui fit basculer Tarsal au sol.
— Vous dormez toujours ?! s’étonna Flora en entrant bruyamment dans leur chambre. Vous avez passé toute l’après-midi au pieu !
Elle se laissa tomber lourdement au bord du lit de Sofian et jeta son sac à dos sur les jambes de ce dernier. L’adolescent baya longuement tandis que Flora prenait ses aises dans la chambre en déployant son matériel de maquillage, sous le regard noir d’un Galifeu mal réveillé.
— Qu’est-ce que tu fous ?? lui lança Sofian qui avait du mal à reprendre ses esprits alors qu’Écrapince, Nirondelle et Arcko sortait de la salle de bain, attirés par le tohu-bohu que produisait Flora.
— Ben, je m’apprête pour aller souper ! répondit-elle naturellement. Et vous feriez mieux de faire pareil ; le restaurant de l’auberge ouvre dans une demi-heure.
— On n’est pas obligé de descendre manger, marmonna Timmy en se frottant les yeux, aidé par Arcko qui lui recoiffait sa tignasse blonde à l’aide de sa queue.
— Et passer à côté du souper qui est compris dans le prix ? s’insurgea Flora alors que Charmillon lui tenait un miroir au niveau de son visage pour l’aider à se maquiller. On n’a pas payé le prix plein pour rien ! Allez, à la douche !
— Bah, avec tout le pognon que ton père nous donne, on peut se permettre de… commença Sofian en se recouchant.
— On ne peut rien se permettre du tout ! interrompit Flora qui tendait sa joue à son Gobou afin qu’il lui lave la partie ratée de son maquillage. Allez, debout, et à la douche !
La jeune fille tira la couverture de Sofian vers elle et fit apparaître le torse nu svelte du jeune adolescent. Le garçon se leva péniblement de son lit, remonta son caleçon qui avait manqué de glisser — Flora avait tourné le regard au bon moment — et traîna des pieds vers la salle de bain en soupirant, prenant son Écrapince dans ses bras au passage.
— Si je dois passer à la douche, toi aussi, dit-il de mauvaise humeur à son pokémon qui luttait pour éviter de le suivre. Ça fait longtemps que tu n’as plus été lavé correctement !
Sofian clapa la porte derrière lui, ce qui fit sursauter Skitty qui avait passé son temps à chasser sa propre queue. Flora poussa un soupire de contentement en agrippant la télécommande de la vieille télévision cathodique qui tenait miraculeusement sur son socle accroché au mur. Timmy pouffa de rire tandis que la douche retentissait derrière le mur en carton.
— C’est parce que tu n’as pas la télé dans ta chambre que tu l’as fait dégager ? demanda-t-il, amusé, alors que Flora allumait l’écran.
— On a tous droit à notre petite revanche, après tout ce qu’il m’a fait endurer, répondit Flora en lui faisant un clin d’œil.
Mais le sourire taquin de la jeune fille disparut bien vite face à l’image brouillée qu’elle captait sur toutes les chaînes sur lesquelles elle zappait. Flora fronça les sourcils.
— Cette auberge est tellement miteuse qu’il est impossible de regarder la télé tout en prenant sa douche ! se plaignit-elle.
Elle se leva d’un bond et tambourina à la porte de la salle de bain.
— Éteins la lumière, on capte pas la télé !! cria-t-elle avant de retourner auprès de l’écran.
La porte s’ouvrit à la volée.
— Qu’est-ce qu’il se passe ?! s’affola Sofian.
Alarmé par les cris de Flora, Sofian avait à peine pris le temps de se couvrir les parties intimes de son essuie de bain. Écrapince en profita pour filer hors de la douche et se cacher sous le lit.
— Tu m’as appelé ? Y a un problème ? s’inquiéta Sofian.
— Non… c’est juste que… bégaya Flora en laissant traîner ses yeux sur le corps mouillé et presque nu de son ami. La télé… pas marcher… toi, te laver… voilà, voilà…
— Tu ferais mieux de retourner sous la douche avant que tes fesses ne prennent froid, fit remarquer Timmy en éclatant de rire.
Sofian se rendit enfin compte que son essuie de bain ne recouvrait pas tout son corps et s’empressa de filer à nouveau dans la salle de bain. Flora reprit ses esprits, frappa un bon coup sur le dessus de la télévision et l’image se clarifia enfin.
— Ah ! Je vais enfin pouvoir voir mon émission !
— De quelle émission tu parles ?
— « Les sentiers de Hoenn » ! Tu te souviens l’émission qu’on a filmé sur nous le jour où j’ai capturé Skitty ? Figure-toi que c’est aujourd’hui qu’elle est diffusée sur la chaîne nationale !
— C’est donc pour ça que tu tenais absolument à faire une halte dans cette auberge alors qu’on est juste à côté d’Autéquia ! Mais tu es au courant qu’elle ne commence qu’à vingt heures ?
— Je m’assure d’être à l’heure pour me voir. D’ailleurs, il va falloir qu’on descende manger ! ajouta-t-elle en élevant la voix pour Sofian.
Ce ne fut qu’une demi-heure plus tard, une fois avoir visionné la bande annonce de l’émission une bonne vingtaine de fois, avoir peigné Skitty, massé Gobou, nettoyé les ailes de Charmillon, fait le lit, flâné en regardant Timmy jouer à un duel de rapidité avec Arcko et Tarsal, et peigné Skitty une seconde fois, que Sofian sortit tranquillement de la salle de bain. Il laissa tomber son essuie de bain afin d’enfiler un caleçon propre et Flora poussa un cri d’effroi. Sofian sursauta et tomba nez-à-nez avec la jeune fille dont le visage avait pris une teinte rouge pivoine.
— T’es toujours là, toi ?! s’exclama-t-il en se jetant sous ses draps.
— Rendez-vous au resto ! lança Flora en s’enfuyant hors de la chambre à toute jambe.
Il fallut plus d’une autre demi-heure à Timmy pour faire passer son fou-rire.

— J’avais oublié que tu étais là ! répéta une millième fois Sofian, peut-être plus énervé que Flora.
— …un sauvage ! s’insurgeait Flora. Tous les gens normaux s’enroulent dans un essuie bain quand ils sortent de la douche ! Mais non, monsieur Sofian doit montrer ses fesses !
— Tu n’avais qu’à ne pas regarder ! Et puis d’abord, tu as une chambre pour toi que tu nous as fait payer en supplément !
— Tu ne vas quand même pas te plaindre, c’est mon père qui te finance !
— Raison de plus pour l’utiliser, ta chambre ! Au lieu de venir dans la mienne et de m’espionner quand je suis à poil !
— T’espionner ? C’est pas m’a faute si tu es un exhibitionniste !
— Les gars !
Timmy posa violemment sa carte des plats sur la table et les fusilla tous les deux du regard.
— C’est bon, c’est pas la mort ! s’emporta-t-il. Flora a vu tes fesses, y a pire dans la vie ! Et toi Flora, tu n’as jamais vu des fesses autres que les tiennes ? Passez à autre chose ! Au lieu de vous prendre la tête, vous devriez être en train de fêter pour l’occasion !
— Quelle occasion ?
— Bah, c’est que vous venez de franchir une nouvelle étape dans votre relation, s’amusa Timmy. Tu as vu le côté pile, reste plus que le paquet du côté face et le tour sera joué.
Flora haussa les sourcils, dubitative. Sofian n’avait pas l’air d’avoir saisi non plus. Timmy joignit ses deux indexes et fit des bruits de succions avec sa bouche.
— TIMMY ! s’exclama une Flora au teint rouge pivoine.
Sofian, quant à lui, faillit s’étouffer avec son verre d’eau tandis que Timmy éclatait de rire.
— Une carbonade flamande, s’il-vous-plait, commanda Timmy au pokémon qui venait de s’approcher de la table, une fois son fou-rire calmé.
En découvrant le serveur du restaurant de l’Auberge, Sofian brandit son Pokédex afin de s’informer sur le monstre qu’il rencontrait pour la première fois. Il s’agissait d’un petit panda gris aux taches rouges aléatoires dont les yeux semblaient être en permanence confus. En analysant les autres pokémons alentours qui servaient les autres clients, Sofian s’amusa de leur démarche titubante — l’un deux avait d’ailleurs fait tomber une assiette de boulettes de viande dans un fracas retentissant en s’entrechoquant avec un de ses collègues.
— C’est moi ou ces pokémons sont complètement bourrés ? s’inquiéta Sofian.
— Ce sont des Spinda, expliqua Flora. Leurs membres sont agencés de manière à pouvoir courir le plus rapidement possible à quatre pattes, mais une fois debout, ils en subissent les conséquences.
— Quelle idée de leur avoir donné la charge de diriger ce restaurant.
— En même temps, quand on voit la patronne, fit remarquer Timmy en pointant le bar du doigt.
À quelques pas du comptoir d’accueil, une femme très âgée semblait perdue devant un écran d’ordinateur vieux comme le monde. Son chignon emmêlé et ses rides pendantes semblaient tout aussi brouillons que l’organisation de son auberge, dont les trois adolescents avaient déjà fait les frais depuis leur arrivée.
Dans un coin de la salle de restaurant, Sofian observa quelques instants ses pokémons souper paisiblement au sol aménagé pour les monstres accompagnateurs des clients. Son regard se perdit sur le reste du restaurant, à peine rempli de moitié par des clients insatisfaits du service chancelant des Spinda.
— Il va faire tomber mon plat, marmonna Flora en analysant le trajet du plus petit des Spinda qui portait une charge apparemment plus lourde que lui.
— Mais non, ils ont surement été formés à ce métier, assura Sofian.
— Il va le faire tomber, je te dis ! s’affola Flora alors que le Spinda s’était emmêlé les pattes et tombait à la renverse devant leur table, aspergeant de sauce le jeans bleu ciel de Flora.
— Il l’a fait tomber… soupira-t-elle.
— Ah oui, tiens, constata Sofian sans plus d’intérêt.
Son attention fut à nouveau portée sur une table plus en retrait, au fond du restaurant, d’où des voix s’étaient levées, mais s’étaient ensuite rapidement calmées. C’était comme si le couple qui dînait était en désaccord et que le ton était sur le point de monter. La jeune femme rousse semblait vouloir retenir son partenaire. Ce qui intrigua le plus Sofian fut l’accoutrement ridiculement molletonné que portait le couple, ce qui les rendait impossible à reconnaître.
— Attendez un peu, réfléchit Sofian. On dirait… la Team Rocket !
Flora jeta un coup d’œil vers la table.
— Mais non, tu vois bien qu’ils sont plus jeunes, le calma-t-elle. Faut arrêter de les voir partout. Et puis, c’est impossible, ils ont promis de nous laisser tranquille en échange de notre aide.
— Ça ne veut pas dire que…
— Flora a raison, interrompit Timmy, comme s’il désirait conclure la conversation. Depuis que nous avons sauvé Miaouss, on ne les a plus revus.
— Les gars, c’était hier…
— Et c’est déjà un miracle qu’on ne les ait pas croisés en vingt-quatre heures. Allez, mangeons ! Et profitons de ce moment : ça fait longtemps qu’on est sur la route loin de toute civilisation, arrêtons de nous prendre la tête. Demain on sera à Autéquia et je vais enfin pouvoir réellement m’entraîner pour le concours.
— Tu auras une bonne dizaine de jours pour cela, calcula Timmy.
Les voix de Timmy et Flora se perdirent au loin, Sofian était trop occupé à examiner attentivement les deux personnages au fond du restaurant. Il en était convaincu, c’était le Team Rocket. Il fallait simplement s’assurer de sa théorie avant de prendre des initiatives.
Tout à coup, ledit James se leva d’un coup sec et quitta la salle d’un pas furieux. Il ne restait donc plus que la supposée Jessie qui leva les yeux au ciel, s’assura que sa doudoune lui cachait le visage, et quitta à son tour la table.
— Mange, ça va refroidir ! appela Flora.
Sofian sortit de sa rêverie.
— Et vite, parce qu’il va y avoir mon émission à la télé !
Vingt heures sonna à l’extérieur et Inès, la journaliste qu’ils avaient rencontrée à plusieurs reprises, apparut à l’écran.
—
Aujourd'hui, un jeune sur trois sillonne les routes de Hoenn en quête d'aventures et de médailles, assura-t-elle, face à la caméra.
— Taisez-vous, ça commence ! s’écria Flora, surexcitée, en se jetant sur le lit de Sofian.
—
Les pokémons sont en effet la passion première de nos adolescents. Quelles sont leurs occupations durant leur voyage, mais surtout, comment partagent-ils leur vie en compagnie de leurs amis les monstres ? Ce soir, nous vous proposons de passer une journée en compagnie de trois étoiles montantes dans votre rendez-vous d'investigation : Les sentiers de Hoenn.
— « Étoile montante », répéta Flora, les étoiles dans les yeux. Elle a tellement compris à qui elle avait à faire.
— Sauf qu’elle ne sait pas compter, se moqua Sofian.
Flora lui lança un regard meurtrier alors que le générique apparaissait à l’écran. Le titre « Une coordinatrice hyperactive » disparut dans un fondu, et Inès réapparut dans un champ.
—
La coordination est un des arts les plus réputés de Hoenn, qui nous offre les plus beaux spectacles chaque année. Mais derrière ces représentations quasi théâtrales se cachent des centaines d’heures de travail. Flora apparut alors dans la télévision, assise en position indienne avec son Gobou entre les jambes. Le pokémon se reconnut à l’écran et la réelle Flora faillit verser une larme de bonheur.
—
Je m’appelle Flora Seko, et je suis… L’image se brouilla.
— AAARGH !! hurla Flora. Qu’est-ce que tu as fait à la télévision ??!
— MAIS J’AI RIEN FAIT ! s’exclama Sofian sous les coups de télécommande que lui donnait son amie.
Flora se jeta sur le téléphone fixe et appela la réception de toute urgence. Le Spinda qu’on lui avait envoyé pour réparer la télévision mit plus de cinq minutes à arriver, faisant bouillir de rage et d’impatience l’adolescente. Le pokémon tituba jusqu’à l’écran, tapota dessus, et attendit.
— Si c’est pour taper dessus, on aurait pu le faire nous… marmonna Timmy.
Flora le fusilla du regard en se mordant les doigts.
— T’es sûr qu’il sait ce qu’il fait ? s’inquiéta Sofian. Il a l’air complètement à l’ouest.
— MAIS FAITES QUELQUE CHOSE, BORDEL ! explosa Flora.
Le Spinda prit peur, se prit les pieds dans le tapis, chuta au sol et entraîna la télévision dans sa chute. Le câble sauta hors de la prise de courant et Flora faillit s’évanouir. Ce fut sous les coups de pieds que les deux adolescents furent jetés hors de la chambre avec le Spinda pour aller chercher de l’aide à la réception.
La vieille dame de la réception sembla ne pas comprendre le problème et se perdit dans un tas de dossiers à la recherche d’une solution.
— Pas étonnant qu’elle soit entourée de pokémons complètement à l’ouest, la vieille, chuchota Sofian à l’oreille de Timmy qui préféra ne pas montrer son amusement par politesse.
— Vous tombez bien vous !
Sofian et Timmy jetèrent un coup d’œil à leur droite et tombèrent nez-à-nez avec…
— James !
— Je savais que c’était vous !
— Pas le temps pour les politesses habituelles, interrompit le membre de la Team Rocket. Venez avec moi.
Il prit Sofian par le bras et le força à le suivre.
— Qu’est-ce que… ?!
— Lâchez-le !
Timmy fit apparaître son Arcko qui frappa à l’aide de sa queue plate la main de James qui lâcha Sofian. La vieille dame, quant à elle, était toujours plongée dans ses dossiers, complètement perdue.
— À quoi vous jouez ?
— J’ai besoin de votre aide, avoua James en se massant la main.
— Notre…
— …aide ?
— Jessie est en train de perdre la tête, et j’ai bien peur que seul, je ne pourrai pas l’arrêter.
Les deux amis échangèrent un regard troublé.

— Ça va fonctionner, ça va fonctionner, ça va fonctionner, se répétait inlassablement Flora en rebranchant la télévision.
L’image réapparut sur l’écran mais se brouilla très vite.
— Mais tu vas fonctionner, saloperie de télé ?!
Elle frappa un grand coup de désespoir et Sofian apparut à l’écran face à son Balignon en plein entraînement.
—
…sans arrêt, Sofian s’entraîne tous les jours. C’est que le dresseur préféré des Hoennois vise la perfection, disait la voix off.
— Ben oui, fallait bien que ça tombe sur lui… soupira Flora, dégoûtée.
Elle se dirigea vers la porte de la chambre afin de la fermer pour regarder son émission en toute tranquillité au moment même où une personne qu’elle connaissait très bien passait dans le couloir.
— Jessie ! s’exclama-t-elle.
La voleuse de pokémon sursauta au bout du couloir et fit volte-face alors que Flora appelait ses trois pokémons en renfort.
— Laisse-moi tranquille ! répliqua Jessie qui avait l’air fatiguée.
— Qu’est-ce que vous… ?! Attendez, quoi ?
— J’ai pas la tête à jouer avec toi, princesse, soupira Jessie, les yeux rouges fuyant le regard de Flora.
Jamais Flora n’avait vu son ennemie dans un état aussi déplorable. Elle dut même lutter contre un relent de dégoût en voyant une coulée de morve s’étendre entre la narine de la criminelle et le mouchoir qu’elle venait d’utiliser.
— Euh… D’acc…
Mais Jessie interpréta le geste de recul de Flora comme une invitation et elle se jeta dans ses bras avant de fondre en larmes.
— Je suis au bout du rouleau, avoua-t-elle en s’invitant dans la chambre.
— Non mais… Je… balbutia Flora.
Elle la suivit dans la chambre alors que Jessie prenait ses aises sur le lit de Timmy, le visage caché dans ses mains ruisselantes de larmes. Flora jeta un coup d’œil à l’écran qui diffusait les images de sa violente dispute avec Sofian la veille de la capture de Skitty.
— Depuis que Miaouss nous a quittés hier soir, je n’ai pas arrêté de pleurer comme une madeleine, se lamenta Jessie en posant sa tête contre les jambes de Flora qui était restée debout.
La jeune fille se sentit obligée de s’asseoir à ses côtés et Jessie se coucha à moitié sur elle en déversant ses larmes.
— Je suis tellement lamentable que j’ai l’impression de te ressembler tellement je pleure comme une gamine, poursuivit Jessie sans peser ses mots.
Flora préféra rester muette en grinçant des dents alors que Sofian l’insultait ouvertement à l’écran.
— Comme si j’avais besoin de ça en ce moment, marmonna Flora pour elle-même.
— Oh bien sûr, Miaouss est beaucoup plus heureux sans nous que nous sans lui ! continua Jessie. C’est juste que… Sans lui… Jamais j’aurais cru que ça aurait été aussi difficile à vivre. C’était… Finalement, c’était le pilier du trio… qui n’est plus réduit qu’à un minable duo d’incapables.
Et Jessie pleura de plus belles. Dans une position inconfortable, Flora posa délicatement sa main sur son dos un centième de seconde afin de réaliser sa bonne action.
— Et James… qui me dit… que c’était… une bonne décision… à prendre de sa part, lança Jessie entre plusieurs hoquets.
Très peu intéressée par ce que Jessie lui racontait, Flora tenta du mieux qu’elle pouvait de regarder son émission entre la chevelure épaisse de Jessie qui lui cachait l’écran. Lorsqu’elle arriva à se contorsionner afin d’être face à l’écran, une page de publicités avait démarré.
— Mais il ne comprend même pas que tout est fini pour nous ! conclut Jessie.
C’est alors que l’intérêt de Flora fut piqué à vif.
— Mais non, tout n’est pas fini, rassura faussement Flora, une idée en tête. Pourquoi dites-vous ça ?
— Depuis le départ de Miaouss, rien ne va plus entre James et moi, avoua Jessie en se mouchant bruyamment. Moi, j’aimerais poursuivre notre mission et vous voler vos pokémons, par conscience professionnelle et fierté personnelle, tu comprends ?
— Que trop bien, grogna Flora.
— Mais lui, il veut imiter Miaouss et fuir pour vivre une vie paisible, ce lâche ! Sans parler du fait que le Boss n’est toujours pas au courant que Miaouss a abandonné la mission et qu’il s’attend toujours à nous voir revenir avec des résultats positifs… à trois !
— Quel secret dramatique, ironisa Flora.
— La situation est devenue tellement ingérable qu’on n’a même plus la force de manigancer des plans pour voler Galifeu !
— Vous m’en voyez désolée…
— Donc, que faire ?! s’écria Jessie en fondant à nouveau en larmes.
— Bah… Vous pourriez vous consacrer à autre chose, non ?
Jessie ne répondit pas.
— Je veux dire… Il y a bien un rêve dans la vie que vous n’avez jamais pu réaliser à cause de votre… « travail » ? Je ne sais pas moi, faire de la poterie, ouvrir une agence matrimoniale, confectionner des vêtements pour pokémons…
— Moi… Tout ce que je voulais être quand j’étais petite, c’était danseuse étoile.
— Et bien voilà ! C’est une excellente opportunité que Miaouss vous a offerte pour vous lancer là-dedans ! James pourrait être votre manager, et vous feriez des spectacles itinérants !
« Et vous nous ficheriez enfin la paix », pensa Flora, ravie par la tournure de la situation.
Soudain, Jessie se jeta à ses bras et l’enlaça férocement, comme pour la remercier de l’avoir consolée. Très perturbée par les évènements plutôt incongrus, Flora accepta difficilement l’absence d’hostilité et vit dans l’écran apparaître son Skitty, quelques minutes avant sa capture.

James referma la porte de sa chambre derrière lui et se tourna vers Sofian et Timmy, toujours sur leurs gardes.
— Il faut absolument retrouver Jessie et l’arrêter, prévint James qui affichait une mine troublée.
— Je ne comprends pas, qu’est-ce qu’il se passe réellement ? demanda Sofian, perdu.
— Depuis que Miaouss nous a annoncé son départ, expliqua James, rien ne va plus dans notre groupe.
— Miaouss vous a quittés ? s’étonna Timmy.
— Miaouss les a quittés, répéta Sofian en dessinant un sourire discret à son ami.
— Oui, mais là n’est pas le propos, reprit James en gardant son air sérieusement troublant. Jessie et moi nous disputons en permanence depuis hier. Elle, elle veut poursuivre la mission que notre Boss nous a confiée, tandis que moi, j’aimerais imiter mon ami Miaouss.
— Et quitter le groupe ?! s’exclama Sofian, excité.
— Et quitter le groupe, affirma James. C’est peut-être ma chance d’enfin faire du jardinage et de vivre de mes récoltes, comme je l’ai toujours rêvé.
Timmy s’empêcha de pouffer de rire.
— Mais oui, pourquoi pas ! incita Sofian en se retenant d’éclater de rire. Ça vous fera de bonnes occupations ça !
— Et vous pourrez vous épanouir personnellement ! ajouta Timmy.
— Vous prêchez un convaincu. Le problème vient de Jessie : elle est tellement acharnée sur notre mission — et je pense surtout qu’elle essaie de pallier la douleur que lui procure l’absence de Miaouss — qu’elle est prête à terminer la mission seule.
— Je suis sûr qu’on peut la faire changer d’avis, assura Sofian, confiant.
— Impossible. Cela fait une journée que j’essaie de la convaincre de tout arrêter, d’abandonner la Team Rocket et de vivre en tant que simples citoyens. Mais elle m’a traité de lâche et cela l’a convaincue à poursuivre seule. Tout à l’heure, lorsque nous étions au restaurant de cette auberge, elle m’a fait part de ses projets et m’a demandé une dernière fois de coopérer et d’abandonner mes idées d’évasions. Elle a déjà pris possession de notre montgolfière en me la cachant et elle veut même mon pokémon car il fait partie du groupe Team Rocket. Si on la laisse faire, elle peut être capable du pire ! Je peux vous assurer qu’en huit ans, je n’ai jamais entendu un plan aussi dangereux tant pour elle que pour ses victimes, et j’en ai de l’expérience. Il faut que vous sachiez que depuis toujours, Miaouss et moi avons modéré ses crimes car elle est véritablement capable d’organiser des choses bien moins acceptables sur le point de vue morale.
— C’est… c’est-à-dire ? questionna un Timmy peu rassuré.
— Ça peut aller du kidnapping à la prise d’otage. Je la suspecte même d’être capable de meurtre, si vous voulez tout savoir.
— Et… qu’est-ce qu’elle mijote en ce moment ? demanda Sofian, un peu paniqué.
— Jessie a mis au point un stratagème pour vous voler vos pokémons avant de retourner à Kanto seule, répondit James, mais il n’est moralement pas acceptable pour moi. Elle me l’a révélé ce matin, j’ai essayé de l’arrêter, mais elle m’a mis en colère, et le temps de me remettre de mes émotions, elle avait disparu en emportant mon Cacnéa.
— Quel est ce plan ?! répéta Sofian, affolé.
— Elle veut vous isoler un par un, révéla James, vous bloquer physiquement quitte à vous porter un coup fatale, et vous voler vos pokémons.
Sofian fronça les sourcils.
— Comment elle ferait ça, seule ?
— C’est carrément impossible !
— Vous ne devriez pas être sceptiques, conseilla l’ex-voleur. Son plan pourrait fonctionner. Il s’agirait de t’isoler toi en premier — dit-il en se tournant vers Sofian —, de te porter un coup fatal, te voler tes pokémons, attendre que vous retrouviez son corps, se montrer et s’enfuir afin que votre amie la poursuive seule vu que toi — il se tourna vers Timmy —, tu serais trop fragile pour courir après elle. Ensuite, elle t’attaquerait en traître car Flora serait en train de courir après Seviper et le tour serait joué.
Timmy déglutit difficilement.
— C’est pourquoi j’ai tenu à vous prévenir. Il faut absolument la retrouver avant qu’elle ne mette son plan à exécution !
— Attendez un peu ! s’exclama Timmy. Flora n’est pas avec nous !
— Comment ça ?
Sofian se rendit enfin compte que cela faisait plus de vingt minutes qu’ils avaient laissé Flora dans sa chambre, et son estomac fit un tour dans sa poitrine. James perdit le reste des faibles couleurs qui teintaient sa peau pâle.
— Vous croyez que…
— Jessie vous aurait parlé de son plan expressément pour que vous veniez nous parler et isoler ainsi Flora ? compléta Sofian sous l’effroi.
— Flora est en danger !
Les deux adolescents démarrèrent en trombe mais James leur bloqua le passage.
— Attendez !
— Laissez-nous passer !
— Vous devez vous sauver !
— Quoi ?!
— Il est probablement déjà trop tard pour votre amie ! annonça froidement James. Mais vous, vous pouvez vous sauver avec vos pokémons ! Son but est de vous attirer là-bas, ne l’oubliez pas !
— Jamais on ne laissera Flora tomber ! jura Sofian.
— Jessie ne nous fait pas peur !
— Très bien ! Mais n’oubliez pas que son but est de voler vos pokémons ! Ne plongez pas la tête baissée dans son piège tordu !
— Et qu’est-ce qu’on devrait faire d’après vous ?
— Laissez vos pokémons ici ! proposa James. Et allons l’arrêter !
— Qui nous dit que vous ne voulez pas justement nous les voler ? se méfia Timmy.
— Cela fait vingt minutes que nous discutons, vous ne pensez pas que j’en aurais déjà profité pour vous attaquer ?
Sofian et Timmy échangèrent un regard indécis. Ils finirent par accepter la proposition de James et remplirent le sac à dos de Timmy qu’ils cachèrent derrière une armoire. Cependant, Sofian préféra garder la pokéball de Galifeu en poche, juste au cas où.
— Allons l’arrêter !
James leur ouvrit la porte et les deux adolescents foncèrent dans le couloir vers les escaliers qui menaient à l’étage de leurs chambres. Arrivés à moitié de parcours, ils entendirent un cri aigu provenir de la chambre de Flora et coururent de plus belle.
— TOUT VA BIEN ?! s’écria Sofian en ouvrant la porte à la volée.
Les deux adolescents découvrirent une Flora en pleine forme, face à l’écran de télévision qui venait probablement d’à nouveau se brouiller à en voir son visage tordu par la haine.
— Non ! s’exclama une Flora révoltée. Cette foutue télévision ne marche pas ! Tout ce que j’ai vu, c’est ta présentation, notre dispute, la présentation de Timmy, et mes essais échoués de capture de Skitty ! Raah ! Ces Spinda vont m’entendre !
Épuisés, Sofian et Timmy jetèrent des coups d’œil dans tous les coins de la chambre.
— Qu’est-ce qui vous prend ? s’étonna Flora en tapant sur la télécommande. Ah oui, au fait ! J’ai une excellente nouvelle à vous annoncer : la Team Rocket s’est dissoute !
— La Team Rocket… ? répéta Sofian, perdu. Je ne comprends pas…
— Comment le sais-tu ? James vient de…
— J’ai réussi à convaincre Jessie d’abandonner de nous poursuivre ! annonça fièrement Flora. C’est une longue histoire, mais en gros, elle était triste et j’ai réussi à la dissuader de poursuivre leurs activités criminelles ! On dit merci qui ? Merci bibi !
— Alors là, je suis complètement perdu…
Timmy se laissa tomber sur son lit, les yeux dans le vague.
— Je pensais que Jessie devait l’attaquer ! dit-il en se retournant vers James.
Mais l’entrée de la chambre était vide.
— James ?
— Pourquoi vous appelez James ? Les garçons, vous me faites peur.
Sofian se retourna à la volée à son tour. James n’était plus là. En fait, à bien y réfléchir, James ne les avait jamais suivis.
— OH LES FUMIERS !! hurla-t-il.
Timmy resta bouche bée. Pour la première fois en deux mois, la Team Rocket venait de les entuber profondément, et ils ne les avaient même pas vus venir. Jessie et James, loin de s’être séparés dans de tristes conditions, venaient de mettre au point un plan beaucoup plus complexe que tous les autres réunis et possédaient à présent leurs pokémons. Tous, sauf un.

En entrant en trombe dans la chambre de James, Timmy se jeta sur l’armoire derrière laquelle il avait caché son sac à dos rempli de leurs pokéballs, mais la cachette était vide. Un courant d’air attira leur attention et ils se tournèrent vers la fenêtre. Dans l’encadrement du châssis se trouvait un petit chat tenant un sac à dos.
— MIAOUSS !! s’écria Timmy.
Le pokémon sauta dans le vide et disparut dans la nuit. Les trois adolescents se précipitèrent au rebord de la fenêtre et virent le félin sauter de branches d’arbres en branches d’arbres jusqu’à atterrir avec souplesse au sol.
— Même son départ, c’était du pipeau !
Miaouss leur lança un dernier regard avant de s’enfoncer dans les bois recouverts d’une petite couche de cendres.
— Galifeu, suis-le à la trace !
Le singe apparut dans les airs et poursuivit le chat à la trace en brûlant derrière lui les cendres à chaque pas, afin de pouvoir être suivi.
Cela faisait déjà plusieurs minutes qu’ils couraient dans la pénombre de la nuit sur les traces de Galifeu et de Miaouss. La lumière de la lune se reflétait sur les particules de cendre au sol, créant une atmosphère mystique. Une boule de feu explosa dans le ciel, et Sofian retrouva rapidement son pokémon.
Galifeu avait coincé Miaouss contre un arbre et le menaçait avec ses flammes alors que le chat se protégeait le visage à l’aide du sac à dos de Timmy.
— Miaouss !
— On pensait que tu avais quitté la Team Rocket !
— C’est vrai, je ne suis plus avec eux ! se défendit le pokémon.
— Menteur !
— Qu’est-ce que tu fais avec mon sac alors ?
— Rends-nous nos pokémons !
— Du calme ! cria Miaouss. Je m’en fiche de vos pokémons !
Les trois amis lui lancèrent un regard mauvais, mais le chat plongea sa patte-avant dans le sac à dos à la recherche d’un autre objet.
— Je suis bel et bien un Miaouss indépendant, à présent, confirma Miaouss. Cependant, pour vivre ma vie de pokémon sauvage, j’ai besoin de ceci.
Miaouss extirpa hors du sac la flûte bleue que l’artisan verrier avait offert à Timmy le jour précédent.
— Mon amie est toujours blessée à la patte, s’expliqua Miaouss. Si cette flûte a pu arrêter la crise d’asthme du mioche et réveiller un Airmure de sa paralysie, elle peut bien soigner les entorses.
— Miaouss… soupira Timmy en comprenant toute cette histoire. J’en ai besoin, moi aussi. Je t’ai fait part de mon histoire hier, de ma maladie et de mes problèmes de santé.
— Chacun pour soi, et le destin pour tous ! rétorqua Miaouss.
— Il y a un truc que je ne comprends pas, intervint Flora. Pourquoi avoir mis en place tout ce stratagème pour voler cette flûte ?
— D’ailleurs, où sont Jessie et James ? rappela Sofian.
— Ah oui, c’est vrai ! se souvint Miaouss. Cette partie-là du plan… Je ne pouvais pas quitter la Team Rocket sans un dernier coup de pouce à mes deux acolytes de toujours. Ils ont beau être stupides, ils n’en restent pas moins attachants. Je leur ai donc offert un dernier service et eux m’ont offert la possibilité de me procurer cette flûte. Un donné pour un rendu, un cadeau de chaque côté pour un nouveau départ.
— De quoi tu parles ?
— Il n’a jamais été question de voler vos pokémons ce soir, avoua Miaouss en leur jetant le sac à dos aux pieds, faisant rouler les pokéballs au sol. En tombant sur cette auberge pleine de Spinda, mes anciens acolytes ont fait des recherches et ont découvert les effroyables pouvoirs des attaques combinées des Spinda. Malheureusement, vous étiez comme toujours dans les parages. Et avec vous dans leurs pattes, impossible pour eux de voler les Spinda. Ça tombait bien, car j’avais besoin de votre flûte. Il suffisait ainsi de vous attirer simplement à l’écart le temps qu’ils puissent voler les Spinda, et l’affaire était réglée pour chacun d’entre nous.
Sofian, Flora et Timmy restèrent bouche bée, épatés par le plan tordu et bien ficelé qu’ils avaient élaboré.
Une explosion retentit au loin, à l’endroit exact où se trouvait l’Auberge aux Spinda.
— Échec et mat !
— Les Spinda ! s’écria Flora.
— Quant à moi, j’en ai fini avec vous, les salua Miaouss. Adios, les mioches !
Le chat fourra la flûte bleue dans sa gueule, se laissa tomber à quatre pattes et s’enfuit dans l’obscurité.
— Miaouss ! s’exclama Timmy.
— On s’occupe de la Team Rocket, occupe-toi de Miaouss ! commanda Sofian.
Timmy n’attendit pas que ses deux amis retournent à l’auberge : il attrapa ses affaires et courut vers les bois où s’était enfuit Miaouss. Il fallait qu’il récupère cette flûte, c’était son seul espoir de se soigner. Heureusement, il ne lui fallut pas chercher bien loin pour retrouver le pokémon sauvage.
Miaouss se trouvait au centre d’un buisson et avait rejoint une petite chatte de la même espèce arborant un joli nœud rouge autour du cou. Timmy reconnut très vite la Miaouss qui avait été blessée à la patte la veille lors de la tempête de cendres. Ainsi, Miaouss avait véritablement besoin de la flûte afin de soigner son amie avec qui il projetait de vivre une longue vie paisible. Miaouss essayait à présent de souffler dans la flûte, mais aucun son n’en sortait. Malheureusement, la flûte avait été conçue pour convenir à une bouche d’être humain, et le petit museau du chat n’était pas compatible avec l’instrument. La Miaouss miaula fébrilement et Miaouss la réconforta en frottant son crâne sur son cou.
Timmy sortit de sa cachette et arracha la flûte des mains de Miaouss sous les yeux terrifiés des deux pokémons sauvages. Il apporta l’instrument à sa bouche et sifflota dedans. Une douce mélodie s’empara des bois et la Miaouss poussa un petit gémissement. Soudain, elle se releva d’un bond et se palpa la patte-arrière qui avait été miraculeusement soignée. La Miaouss s’approcha de Timmy et se frotta à ses jambes, tandis que l’ex-membre de la Team Rocket le remerciait d’un regard étonné.
Timmy lui tendit la flûte.
— Ça pourra vous servir s’il vous arrive quoi que ce soit.
Miaouss brandit la flûte bleue et, sans un regard à Timmy, quitta le buisson avec sa Miaouss. Au loin, l’on distinguait les lumières des chaumières d’Autéquia briller dans la nuit.
— C’est une jolie nuit d’automne pour un nouveau départ.
— Vous avez essayé, mais vous avez raté !
— Votre animal de compagnie nous a tout raconté ! Rendez-vous !
— Avouez que notre plan était quand même badass ! se venta James.
— Et aussi badass qu’il soit, nous allons l’amener à terme ! promit Jessie.
Sous les ordres de Jessie et James, Seviper et Cacnéa détruisirent ce qui restait de la salle de restaurant détruite sous les attaques défensives de Galifeu et Gobou. James arriva à mettre la main sur le dernier Spinda qui chancelait dans un coin et le fourra dans le sac rempli des autres pokémons.
— Vous nous aviez promis de ne plus vous en prendre à nous ! rappela Flora.
— Mais c’est ce que nous avons fait ! répondit Jessie avec la plus grande mauvaise foi.
— Nous nous en sommes pris à ces pokémons, fit constater James. Et comme vous nous empêchez à nouveau de travailler, le contrat est rompu !
— Alors c’est ici que vous êtes, mes Spinda.
Le vieille aubergiste apparut dans l’entrebâillement de la porte en chemise de nuit, fraichement sortie du lit. Elle découvrit son restaurant saccagé et sembla perdre connaissance. Flora accourut pour l’aider à rester debout, mais la vieille dame l’empêcha de lui porter assistance.
— Je ne suis pas si faible que cela, jeune fille, assura-t-elle, j’ai toujours toute ma tête, même si j’ai l’air aussi confuse que mes Spinda. D’ailleurs, en vous attaquant à mes Spinda vous deux, vous avez fait une lourde erreur. Surtout en les regroupant tous au même endroit.
— Comment ?!
— Spinda, attaquez « danse folle » !
Le sol se mit à trembler, comme si tous les pokémons dans le sac que tenait James s’étaient mis à bouger au même rythme. Tout à coup, le sac explosa et Jessie et James poussèrent un cri de détresse alors qu’une épaisse fumée s’emparait des ruines de l’auberge. Lorsque la poussière retomba, la Team Rocket avait fui et Timmy se trouvait au pas de la porte.
— J’ai fait au plus vite… marmonna-t-il en découvrant les décombres.
Sofian lui indiqua d’un signe de tête qu’ils avaient réussi à faire échouer le plan de la Team Rocket mais qu’ils avaient à nouveau pris la fuite.
— Et Miaouss ?
Timmy lui rétorqua son signe de tête, signifiant qu’il avait lui aussi échoué.
— On va devoir se méfier, prévint Flora. Plus que d’habitude.
— Bah non, ils ne sont plus que deux, fit remarquer Sofian, optimiste.
— Ce n’est pas parce que Miaouss ne fait plus partie de la Team Rocket que ces deux-là en sont moins dangereux.
— Flora a raison. Justement, le fait que le membre le plus intelligent de la bande soit parti les rend d’autant plus dangereux : ils n’auront aucune organisation et c’est ça qui est le plus dangereux.
Sofian soupira avant de se jeter sur une chaise qui s’effondra sous son poids.

— On y était presque !
— À deux doigts !
La montgolfière trônait toujours aussi fièrement derrière le pan de montagne où ils l’avaient cachée.
— Et tout ça, c’est notre plan ! se réjouit Jessie.
— Comme quoi, on a bien appris auprès de Miaouss !
— D’ailleurs, Miaouss devrait être rentré à cette heure-ci normalement.
James se pencha dans la nacelle à la recherche de son ami mais le chat ne s’y trouvait pas.
— Miaouss ? appela Jessie.
Mais aucune réponse.
— On avait bien rendez-vous ici après notre attaque, quoi qu’il advienne, pas vrai ?
— Miaouss ??
Jessie appela le pokémon à plusieurs reprises, élevant de plus en plus la voix qui se répercutait en écho dans les bois. Le visage de James se tordit de douleur en comprenant l’absence du pokémon.
— Jessie…
— MIAOUSS ??
— Jessie !
Jessie cessa ses cris intempestifs et comprit à son tour, une larme coulant sur sa joue.
— Il ne peut pas être parti comme ça, dit-elle la voix tremblante. Il n’a pas pu nous faire ça.
Jessie se tourna vers son ami James, lui aussi ravagé par la tristesse.
— Il n’est quand même pas parti sans un au revoir ! s’exclama Jessie, la voix brisée.
Elle fondit en sanglot et se laissa tomber dans les bras de James qui pleurait à présent sans retenue. Il tendit sa main et Jessie découvrit au creux de sa paume une petite pièce d’or.
— L’attaque « jackpot », reconnut Jessie entre deux larmes.
— Je crois que c’est sa façon à lui de nous faire ses adieux.
Seuls devant leur montgolfière vide, un silence de plomb s’écrasa sur le bois immense qui les oppressait. Miaouss était parti. Ils étaient seuls.
Le vent se leva et un bout de carton s’envola de la nacelle de la montgolfière. Jessie le ramassa lentement et reconnut le morceau de papier.
— James…
— Jessie ?
— Je crois que c’est notre unique solution.
James lui prit la carte de visite des mains et ferma les yeux.
— Je le pense aussi.
Jessie extirpa un Pokénav volé de sa poche et composa le numéro inscrit sur la carte de visite qu’ils avaient reçue d’un mystérieux inconnu trois jours plus tôt. La tonalité retentit dans l’appareil. Puis une deuxième fois. Puis une troisième fois. Puis une quatrième fois.
Jessie écarquilla les yeux lorsqu’on lui répondit enfin. Elle attendit quelques instants, prit une grande inspiration, et dit :
— Nous acceptons votre aide, Team Magma.
À suivre dans : « L’offre de la Team Magma »