Arc 2 chapitre 4: Une mésentente spectrale
Ico s’était bel et bien fait avoir. Il avait retrouvé ses esprits une heure après l’inscription et il était trop tard pour annuler cette condition. Il l’avait mauvaise mais décida de ne rien dire. De toute façon, ça n’aurait rien changé à la situation.
Il avait bien trouvé ce qu’il cherchait mais rien ne l’avait préparé à les retrouver sous la forme de gosses ignares et désespérément humains. Le groupe avait pris une suite au grand hôtel d’Unionpolis pour les jours à venir. L’humain s’était érigé comme coach personnel de l’équipe mais Ico n’en avait cure du tournoi. Il s’était éloigné des autres et aurait voulu rester tranquille mais apparemment, ce mortel avait de la suite dans les idées.
- Hé mon gars, ce cours te concerne toi aussi alors tu viens ici avec les autres !
- Et puis quoi encore ? Railla Ico, de mauvaise humeur. Démerdez-vous ! Moi je n’en ai rien à battre de votre tournoi.
- Si t’en a rien à faire, pourquoi as-tu foncé sur Neil à toute vitesse ? Demanda-t-elle, curieuse.
Ico fut soufflé. L’innocence qui se dégageait d’elle effaçait littéralement toute sa fureur. Il n’arrivait pas à décrire ce qu’il ressentait mais c’était quelque chose qu’il n’avait jamais ressenti auparavant et dieu sait à quel point il avait vécu. Il reprit d’une voix plus calme.
- Je suis navré de m’être emporté ainsi mais je ne suis pas là pour m’amuser. Je suis en mission.
- Une mission ? Continua la jeune femme. Tu fais partie de la police ?
Ico secoua la tête et prit soin de faire une révérence gracieuse à l’encontre de la jeune femme, qui rougit fortement. Cette timidité fit sourire le prêtre venu du passé. Un trait de caractère qui lui était resté.
- Laissez-moi me présenter en bonne et due forme. Je suis l’Iconoclaste de l’humanité, grand prêtre de Giratina venu du futur pour vous ramener dans votre époque.
L’air estomaqué que Ico vit sur les visages de l’assistance le fit rire intérieurement. Neil fut le premier à se remettre.
- Tu viens réellement de notre époque ?
- Oui et j’ai eu pour mission de vous ramener.
- Et pourquoi ça ? Répliqua-t-il. Qu’est-ce qu’on peut bien nous vouloir ? Qu’est-ce qui nous dit que tu ne bosses pas pour Mecheva ?
Un éclair de souffrance transperça le cœur d’Ico mais il y fit abstraction.
- Je ne travaille pas pour l’empereur, répondit-il. Nos intérêts sont supérieurs à ceux de cet illuminé de Mecheva.
Neil n’était de tout évidence pas convaincu mais elle, elle choisit de le croire et lui prit la main.
- Neil c’est bon, je pense qu’on peut lui faire confiance.
- Euh, t’es sûre de toi Louise ?
- Non c’est plus mon instinct qui parle mais personnellement j’ai envie de lui faire confiance. Et jusqu’ici, mon instinct a été plutôt fiable.
Elle s’approcha ensuite d’Ico et elle le regarda les yeux dans les yeux.
- Si vous êtes venu nous chercher, ça veut dire que vous connaissez le moyen de rentrer chez nous non ?
Le prêtre acquiesça.
- Et est-ce que c’est un genre de portail qui ne s’ouvre que tous les 5000 ans ou un truc du genre ?
- Euh non, quelle idée, répliqua-t-il plus par réflexe qu’autre chose. Nous ne sommes pas dans un dessin animé.
- Donc il n’y a aucune urgence n’est-ce pas ?
- Pas dans le sens où vous l’entendez mademoiselle.
- Donc ça ne pose pas de problèmes qu’on participe au tournoi et qu’après on rentre à la maison ?
Ico voyait où elle voulait en venir. Il voulut lui répliquer que c’était une mauvaise idée, qu’il valait mieux rentrer au plus vite mais le regard implorant qu’elle lui envoya le désarma complètement. Il rectifia son avis sur elle. Ce n’était pas de l’innocence. Au contraire, elle jouait là-dessus pour le manipuler. Le pire, c’est que ça fonctionnait.
- Je suppose que non, soupira-t-il, vaincu par les yeux vairons de la jeune femme.
- A la bonne heure, se réjouit-elle. Bon, que tu le veuilles ou non on va devoir participer à trois pour remporter ce tournoi, cher Iconoclaste. Donc tu vas gentiment t’assoir avec nous et écouter ce que Red a à nous dire.
Ico expira, résigné. Tout avait été trop vite pour lui et il se retrouvait piégé, à écouter les conseils débiles de cet humain à peine pubère. Non, décidément, il avait bel et bien touché le fond. Il lâcha quand même avant de s’assoir.
- Appelez-moi Ico, que ça fasse plus passe partout.
Pendant la semaine qui suivit, l’équipe se fit entraîner par Red sans le moindre repos. Il fit travailler leur esprit d’équipe ainsi que leurs performances en combat duo et triple. Il avait pris l’habitude de dire aux trois dresseurs :
- Bon, on sait que la plupart ne sont pas des dresseurs de très haut level mais ce n’est pas une raison de se laisser aller. En mode solo vous êtes plutôt bons donc je ne m’affole pas pour les combats individuels mais vos adversaires auront beau ne pas être des dresseurs d’élite, s’ils ont constitué une équipe ce n’est pas avec des inconnus. Ils doivent se connaître et leur esprit d’équipe doit se faire sentir. Vous avez beau être bon en solo, si vous ne vous entendez pas, en combat duo vous vous ferez déboiter en moins de deux et ce serait encore pire en combat trio. Vous devez donc faire un maximum connaissance et combattre ensemble pour vous préparer.
Une des premières épreuves de Red fut de diviser le groupe en deux et de se faire des affrontements. Les résultats furent pour le moins étranges. Si Sir Ico faisait une bonne équipe avec Red, plutôt correct avec Louise, les résultats étaient désastreux avec Neil. Ils ne se contentaient pas de s’ignorer, ils se battaient entre eux, à un tel point que Louise et Red n’avaient même pas à combattre pour les mettre K.O. Dans de telles situations, envisager ne serait-ce l’idée de faire un combat trio, c’était incompatible.
Le pire, c’était que l’inimitié des deux garçons perdurait même en dehors de l’entraînement. Ils ne se parlaient pas du tout et s’envoyaient des regards noirs. De la part d’Ico c’était compréhensible mais de Neil, c’était plus obscur. Lui-même ne parvenait pas à expliquer son rejet. C’était une sorte de rancœur enfouie et dont le jeune homme ne soupçonnait même pas l’existence. Mais ce sentiment ruinait totalement l’esprit de l’équipe. Même Louise qui tentait de faire connaissance s’isolait du nouveau venu comme la peste.
Au bout du troisième jour, la situation devint intenable pour les membres de l’équipe et Red décida de faire une pause dans l’entraînement et donna quartier libre aux trois jeunes. Neil reparti s’entraîner et Red dit qu’il avait des affaires à régler. Ico se mit dans un coin et commença à lire un livre. Louise quant à elle, après avoir tenté à plusieurs reprises de nouer une conversation avec le dresseur du futur, décida de sortir prendre l’air.
Elle prit un sac, un peu d’argent et ses Pokéballs et commença à sortir.
- Où vas-tu ? Demanda distraitement Ico.
Louise se figea. C’était la première fois que l’homme venu du futur lui adressait la parole en dehors des duels. La jeune femme avait suivi son instinct et ce dernier lui répétait que cet homme était digne de confiance mais, elle ne savait pas pourquoi mais il avait quelque chose qui la terrifiait. Son attitude froide, sa façon de parler… Elle sauvait les apparences en publics mais au fond d’elle-même Louise était incapable d’être elle-même en présence de ce type.
- Je sors faire les magasins, dit-elle en tremblant.
- Tu es malade ?
- Quoi ?
- Tu trembles, dit-il d’une voix courtoise mais dénuée de sentiments. Donc je te demande si tu es malade. Et si tu l’es tu ne devrais pas sortir.
- J’ai besoin de sortir…
- Pourquoi ça ?
Elle senti alors un souffle chaud sur sa nuque. Elle se retourna vivement et vit qu’il s’était approché d’elle. Il était si proche qu’elle eut l’impression qu’il voulait l’embrasser. Elle le repoussa avec violence en hurlant.
- J’ai besoin d’être loin de toi !
Et elle s’élança rapidement hors de la chambre sans savoir s’il allait la suivre ou non. Elle sortit de l’hôtel en courant, dépassa le terrain de combat sur lequel Neil s’entraînait et alla se réfugier dans la foule de la ville. Elle ne fut totalement tranquille qu’après avoir traversé la totalité d’Unionpolis.
C’est alors qu’elle remarqua un bâtiment étrange. L’enseigne indiquait « Le square paisible ». Curieuse, la jeune femme s’y engouffra. Une réceptionniste accueilli la jeune femme avec gentillesse.
- Bonjour mademoiselle bienvenue au Square paisible. Vous désirez y faire un tour ?
- Euh, bégaya Louise. Désolée mais je ne suis pas du coin, puis-je savoir en quoi consiste cet endroit ?
- Je vois. Possédez-vous un Pokémon de ces espèces ?
La réceptionniste tendit un classeur qui était une sorte de catalogue avec des photos de différents Pokémons. Ils avaient tous une caractéristique commune : ils étaient tous adorables. Pichu, Marill, Rondoudou, Flabébé…
Louise fut contente de voir que la famille de Togepi en faisait partie. Elle indiqua alors à la femme qu’elle possédait un des Pokémon présent dans le catalogue.
- Bien une bonne chose de réglée. Donc, le principe de cet endroit est de se promener dans le square en compagnie de son Pokémon et de faire des rencontres. Les duels Pokémons sont interdits. Dans le cas contraire, vous serez exclue du square. Vous avez compris ?
Louise acquiesça et libéra son plus ancien et fidèle partenaire avant de pénétrer dans le parc. Il y avait à l’intérieur de nombreux dresseurs, la plupart féminins, qui se baladaient en compagnie de toutes sortes de Pokémons. La jeune femme se promena un peu avant de se laisser porter par le paysage enchanteur de ce lieu. Elle s’assit dans l’herbe verte et grasse à souhait et son esprit vagabonda tranquillement tandis que Toge s’amusait à explorer le coin.
- Dire que cet endroit sera réduit en cendre d’ici quarante ans, murmura la jeune dresseuse. Quel horrible gâchis.
- Pardon ?
Louise sortit de sa rêverie et croisa une jeune femme qui devait avoir deux ou trois ans de moins qu’elle et qui se baladait en compagnie d’un Rosélia.
- Qu’est-ce que tu baragouines dans ton coin l’étrangère ?
- Ça n’est pas tes affaires je crois, répliqua calmement la jeune femme.
- Tu parlais de destruction, rétorqua la dresseuse au Rosélia. Je n’aime pas qu’une alien dans ton genre vienne dans notre région et ne s’amuse à proférer des menaces. Toi et ton Togetic crado dégagez.
Toge exprima sa mauvaise humeur et sa façon d’adhérer aux paroles de cette gamine en faisant un bras d’honneur. Mais louise ne désirait pas déclencher de conflits. Elle préféra partir avec son Pokémon mais elle ne s’empêcha pas de penser que cette journée était de loin la plus moisie qu’elle avait vécue dans toute sa vie.
Elle passa le reste de la journée à regarder les boutiques de la ville et oublia les désagréments de la matinée. Jusqu’à ce qu’elle ne se perde. Mais Louise savait utiliser ses capacités hors du commun. Elle utilisa donc son super GPS interne pour retracer son parcours. Elle marcha quelques minutes avant que son instinct ne lui hurle de courir vite. Devant elle se tenaient deux personnes toutes habillées de noir. Un grand G doré était brodé sur leur uniforme.
Une terreur sourde rongea le cœur de la jeune femme et elle commença à courir. Mais elle n’alla pas loin. Une autre personne se trouvait derrière elle et empêchait toute chance de retraite. L’homme la dévisagea avec convoitise.
- Eh bien, si je m’attendais à te trouver ici j’aurais également joué au loto.
- Qui êtes-vous ? Murmura la jeune femme.
L’homme prit un air peiné.
- Tu ne te rappelle pas de moi ? Après tout ce que l’on a vécu ensemble il y a neuf ans ? Tu me brise le cœur ma belle.
- Quoi ? Non, vous devez faire erreur, je ne suis pas celle que vous croyez…
- N’essaie pas de me mentir, salope ! Nous avons capté ton énergie. Nous avons échoué à te capturer il y a neuf ans mais cette fois tu ne nous échapperas pas, ma belle Palkia...
- Hein ?
Louise nageait en plein délire. Ces cinglés la confondaient avec la déesse de l’espace ? Ce n’était pas possible, le tout puissant avait tout amassé pour qu’elle puisse payer de ses mauvaises actions il n’y avait pas d’autre explication. Mais elle sentait qu’elle ne pouvait pas raisonner ces personnes. Une image lui vint à l’esprit. Elle se trouvait au milieu de ruines de pierre jaune. Plusieurs personnes se trouvaient devant elle dont un homme aux cheveux bleus et aux cernes immenses. Il tenait dans la main une sorte de cristal rouge et il souriait. Elle senti une grande douleur lui traverser le corps et elle tomba à genoux. Elle poussa un gémissement de douleur qui résonna comme un grognement bestial surpuissant.
L’homme s’approcha et leva le cristal rouge au-dessus de sa tête. La souffrance se fit plus forte.
- Belle et puissante Palkia, je réquisitionne ton pouvoir ainsi que celui de tes frères… Vous allez m’aider à reconstruire un univers dans lequel je serais le seul vrai dieu.
La vision prit fin brutalement et elle regarda l’homme avec un œil nouveau. La lueur de folie était la même que celle de l’homme de sa vision.
- Mais qui êtes vous à la fin…
L’homme la prit à la gorge et la souleva au-dessus du sol.
- Ça ne change rien pour toi. Tu es à nous. Et je te prierais de m’appeler « maître Saturne », misérable déesse.
- Ça, je crains que vous ne rêviez.
L’homme lâcha Louise qui, comme premier réflexe, s’écarta de ce cinglé. Elle se releva vite et vit que son « sauveur » n’était autre qu’Ico. Et la colère qui se dégageait de lui était immense. Elle eut l’impression de regarder un trou noir prêt à recracher tout ce qu’il avait pu avaler. Son visage se déforma en un rictus sauvage et se mit dans une position étrange.
- Ça, je vous garantis que vous allez le payer…