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» Auteur : DoctorVD - Voir le profil
» Créé le 10/06/2016 à 12:48
» Dernière mise à jour le 20/06/2016 à 09:44

» Mots-clés :   Action   Drame   Fantastique   Science fiction   Suspense

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1885-4 : Où souffle un vent de conspiration...
"Le meilleur moyen de réussir, c'est toujours d'essayer encore une fois."
- Thomas Edison (1847 - 1931) -

Mai 1885, comté de Lavandia, Hoenn.

Elle sentait des doigts fins courir sur sa nuque tandis qu'elle observait son propre reflet dans le miroir. Un reflet qui, dans un sens, l'inquiétait toujours plus à mesure que les jours passaient. Elle n'était plus aussi fraîche qu'à ses vingt ans, elle le savait, mais son époux, trop gentil, ne cessait de lui répéter qu'il la trouvait aussi jolie qu'au premier jour. Elle laissa ses yeux verts inquisiteurs observer son propre visage sous toutes les coutures, comme pour tenter d'y déceler une minuscule nouvelle ride étant passée à travers les mailles du filet. Lydian Dover avait beau boire des tas de tisanes aux extraits de plantes aux vertus incroyables, elle se plaisait à croire que tout cela ne servait à rien et qu'elle ne retrouverait jamais la beauté de ses vingt ans.

"Si tu te plains encore d'avoir un âge supérieur à vingt-cinq ans, je t'arrête tout de suite. Quand tu avais cet âge-là, tu étais encore une enfant, avec des caprices agaçants et des sautes d'humeur irritantes pour ton entourage. Bien sûr, tu m'as épousé, parce que ton père en a décidé ainsi, tout comme le mien. On ne s'aimait pas, on ne se supportait même pas, et si on voulait communiquer, on faisait passer les messages par les femmes de chambre ou les autres employés de maison", soupira l'homme qui s'affairait à la coiffer.

La quadragénaire blonde esquissa un sourire. En effet, il avait raison sur toute la ligne. Elle avait beau se persuader qu'elle s'enlaidissait chaque jour un peu plus, Finn Dover pensait tout le contraire et son amour pour elle devenait plus fort à chaque instant. Parfois, Lydian se disait qu'elle avait eu de la chance de tomber sur un homme aussi facilement manipulable, qu'elle pouvait mener à la baguette comme bon lui semblait et qui peinait à lui refuser quoi que ce soit. Evidemment, en temps que fils du gouverneur du comté de Poivressel, il avait hérité, en même temps, de la fortune familiale et du pouvoir de son père lorsque celui-ci avait trépassé cinq ou six ans plus tôt. Naturellement, la charmante trentenaire qu'elle était à l'époque avait su comprendre à quel point ce poste haut-placé lui octroyait, à elle aussi, des privilèges. Dès lors, elle avait consenti à se rapprocher de lui et à le rendre amoureux d'elle pour qu'elle puisse le manipuler, ce qui avait fonctionné sans accroc jusque là. Ceci à un détail près, et non des moindres ; Lydian Dover était tombée sous le charme de cet homme doux et sympathique, et éprouvait à présent de la peine à l'idée de le faire souffrir.

Elle secoua vivement la tête, ce qui sembla agacer son époux, si elle en croyait le soupir qu'il venait de laisser échapper de ses lèvres. Il prit sur lui et ne dit rien, puis continua à s'occuper de réaliser sa coiffure. Le regard de Lydian se durcit, ce que son mari ne manqua pas de remarquer dans son reflet. Elle avait bien trop de considération pour cet homme. Elle savait pertinemment que ça la ralentirait dans ses projets personnels - dont elle n'avait que partiellement fait part à Finn -, et qu'elle perdrait beaucoup si elle restait trop attachée à lui. C'était une femme ambitieuse, peut-être même trop, et elle comptait se servir de l'influence de son époux pour assouvir ses désirs les plus inaccessibles. Il n'en savait rien, ou alors peut-être bien qu'il avait un coup d'avance sur elle en permanence, elle ne saurait dire. Et justement, c'était cela qui rendait les choses si intéressantes. Excitantes, même. Lorsque c'est trop prévisible, on finit par s'ennuyer et ne plus prendre goût à ce que l'on fait.

"Tu préfères que l'on parte immédiatement ou bien que l'on s'arrête au restaurant d'abord ? questionna l'homme aux cheveux noirs en terminant de coiffer son épouse.
— Laisse-moi y réfléchir une minute... combien de temps nous sépare du manoir St John exactement ?
— Tout dépend du moyen de transport utilisé. A pied, je l'ignore. A dos de Galopa, je dirais une heure, une heure et demie. Et en calèche, ça se rapproche plus des trois heures.
— Nous prendrons la calèche, c'est plus confortable, et puis pourquoi ne pas emporter quelques sandwiches avec nous... décida Lydian, catégorique.
— A ta guise."

Elle haussa un sourcil, toujours aussi surprise de voir son mari se satisfaire de son avis. Il ne la remettait pas en question, ou peut-être très rarement, alors que beaucoup d'hommes n'auraient pas même pris la peine de consulter leur épouse. La quadragénaire blonde sourit et se leva de sa chaise, après s'être une dernière fois observée dans le miroir. Si elle admirait son époux pour une qualité en particulier, c'était bel et bien sa patience. Il savait pertinemment qu'elle accordait une importance presque douteuse à sa coiffure, et pourtant, il ne rechignait pas à l'aider lorsqu'il le pouvait. Quelqu'un d'exemplaire qu'elle aurait préféré ne pas avoir à rouler dans la farine pour satisfaire ses objectifs personnels. Mais que voulez-vous, la nature humaine reprend toujours le dessus sur les sentiments...

"J'ai mal fait quelque chose, peut-être ? questionna Finn en voyant l'air contrit de sa femme.
— Oh non, non. Je réfléchissais, c'est tout. Désolée, répondit-elle, hagarde.
— ...bien. Allons donc chercher ces sandwiches, dans ce cas. Je me sens trop oppressé dans cette résidence secondaire, aussi luxueuse soit-elle.
— Je suis de ton avis... comment dire... nous ne sommes pas chez nous, c'est tout à fait naturel de ressentir cela. Comme si on était des étrangers dans notre propre maison, dans un sens.
— Tu as bien résumé", admit-il.

Lydian sourit. Plus sincèrement, cette fois. Il se pencha sur elle pour l'embrasser sur la joue, et s'étonna de sentir ses bras se resserrer autour de lui, enserrant sa chemise blanche dans une étreinte douce. Il fallait l'admettre, elle rechignait de plus en plus à ces gestes d'affection pourtant censés être anodins au sein d'un couple qui s'aime. Il la laissa poser sa tête contre lui, caressant ses cheveux blonds d'une main, lui enserrant la taille de l'autre. Ils restèrent ainsi un bon moment, jusqu'à ce que, sans crier gare, d'une voix étouffée, Lydian suggère qu'ils y aillent au plus vite, avant de filer avertir l'un de leurs employés de maison. Il sentit un étrange trouble dans sa voix, et ne sut comment réagir en constatant qu'une partie du tissu blanc de son vêtement était humide. Elle n'avait pas pleuré devant lui depuis bien longtemps. Inquiet, il saisit sa veste de costume et son canotier de paille orné d'un ruban noir, puis quitta la pièce à sa suite.


***

"Merci, Marvin. Vous pouvez prendre votre pause, et si le cœur vous en dit, allez dans les jardins. Le temps est propice à ce genre de moment de détente.
— Je vous remercie, monsieur."

L'intrigant majordome aux cheveux noirs parsemés d'une mèche blanche et à l'oreille décorée d'un bijou étrange quitta le salon du troisième étage pour vaquer à ses occupations. Robert et Rebecca le regardèrent partir, puis une fois la porte fermée, se tournèrent vers Raymond, encore tout chamboulé par ce voyage temporel dont il venait juste de rentrer. Il avait mis les pieds au Moyen-Âge et était revenu sain et sauf. D'aussi loin qu'il se souvienne, il avait toujours considéré le voyage dans le temps comme une fantaisie qui jamais ne serait accessible à l'Homme. Et pourtant... cet étrange scientifique de 1964, prétendant être mort, disposait d'une capacité incroyable, permettant de traverser le temps et l'espace à sa guise.

"J'ai beaucoup de mal à saisir quelque chose... intervint Robert, le tirant de ses pensées.
— Qu'est-ce donc ? s'étonna le maître de maison.
— Eh bien... il semblerait que vous et le baron Dover, du comté de Poivressel, soyez en conflit depuis quelque temps, et je peine à savoir lequel de vous deux en souffre plus que l'autre."

Raymond soupira et retira de sa bouche la cigarette que le rouquin lui avait donnée. Il adorait déjà cette invention fort intéressante. Il observa un instant Rebecca, qui regardait le sol, encore peu à l'aise en présence d'un aristocrate lavandien de 1885. C'était compréhensible, elle qui venait de cent-vingt-six ans dans le futur, elle ne savait rien des codes de conduite de l'époque, et se contentait donc de rester discrète et de n'attirer l'attention sur elle sous aucun prétexte.

"Je sais que vous ne pouvez pas vous fier à ma parole, étant donné que je suis directement impliqué dans ce conflit entre le gouverneur du comté de Poivressel et moi-même... mais sachez-le, je ne souhaite aucunement mettre en péril la sécurité du comté de Lavandia. Le baron Dover est quelqu'un de dangereux, et encore, je ne sais pas grand chose de lui.
— Vous ne l'avez jamais rencontré ? s'étonna l'infirmière, lasse de rester spectatrice de la conversation.
— A vrai dire, souffla le lavandien, si, une seule fois. Et cela ne m'a pas fait bonne impression. Je le reçois bientôt, il devrait arriver dans la soirée, ou bien demain, vous aurez l'occasion de le rencontrer si vous voulez rester ici pour la nuit."

Le voyageur temporel et sa camarade n'hésitèrent pas à accepter. Même si elle se trouvait encore un peu réticente à l'idée de rester durant une période indéterminée en 1885, Rebecca se rassura bien vite ; après tout, si elle le lui demandait, Robert pourrait la ramener le jour même de leur rencontre, ou bien la veille, et sa vie reprendrait son cours normalement. A ceci près qu'elle aurait juste un peu vieilli, mais cette affaire de querelle politique ne durerait pas des années non plus. Un, deux mois tout au plus. Et puis elle devait se l'avouer, sa vie d'infirmière en chef dans un hôpital parmi les moins accueillants de Kanto ne lui manquait pas tellement. Voyager à travers le temps et l'espace pour modifier des événements et ainsi sauver des vies ou aider des gens avait quelque chose de bien plus intrigant.

"Pourriez-vous nous en dire plus au sujet de ce Dover ? Tout ce que vous savez nous sera utile, assura Robert, curieux.
— Eh bien... comme je vous l'ai dit, nous ne nous sommes parlés qu'une seule fois, et je doute que ce soit vraiment révélateur, mais je suis au courant de certaines choses. Vous devez savoir qu'à notre époque, la religion arcésienne a une place très importante. J'ignore ce qu'il en est chez vous.
— La religion ne m'intéresse pas.
— De même", ajouta Rebecca.

L'aristocrate hocha la tête.

"En sachant cela, vous comprendrez qu'une personne qui déclare faire allégeance à une autre divinité est classée parmi les excentriques.
— Je crois comprendre où vous voulez en venir... soupira Robert.
— Peu le savent, car Finn Dover reste très secret, mais il a consenti à m'en parler, pensant que je serais intéressé... il fait partie de l'Ordre de Mew, une minorité de personnes qui sont persuadées que leur divinité, Mew, est le Créateur, et non pas Arceus.
— Bizarre, je n'ai jamais entendu parler de quoi que ce soit du genre... s'étonna Rebecca.
— L'Ordre de Mew, hein ? Ont-ils beaucoup de fidèles dans les environs ?"

Raymond jeta un coup d'œil à la pendule fixée au mur, rajusta sa cravate, et se tourna de nouveau vers ses interlocuteurs, impressionné par leur soif de connaissances. Malheureusement, avec le peu d'informations dont il disposait, il craignait de ne pas leur être vraiment utile.

"Pas vraiment, à mon avis. Ils n'ont même pas de lieu de culte officiel, ni ici ni à Poivressel. Sans doute se réunissent-ils en petit comité régulièrement et dans un lieu tenu secret.
— Et qu'ils font des trucs bizarres comme les satanistes ? Des rituels ou des choses comme ça ?
— ...aucune idée", soupira le lavandien.

Au moment où il allait ajouter quelque chose, Marvin, le majordome, entra en trombe dans la pièce, essouflé et les cheveux en bataille. Quelque chose venait sans doute d'arriver, et au vu de l'allure de l'employé de maison, rien de bon.

"Que se passe-t-il ? s'inquiéta Raymond, bondissant presque du canapé.
- Dans les jardins... Peter, le cuisinier, vient de frapper Maria, l'une des femmes de chambre."

L'aristocrate n'attendit pas d'avoir plus de détails pour se ruer hors de la pièce, Marvin sur ses talons. Robert et Rebecca échangèrent un regard éloquent, puis s'élancèrent à leur suite, traversant des couloirs outrageusement larges et des escaliers beaucoup trop longs à leur goût. Lorsqu'ils furent enfin à la porte d'entrée, ils durent faire le tour pour accéder aux jardins de derrière, où, effectivement, il y avait du grabuge. Un homme d'une trentaine d'années, semblant plus âgé que Raymond, était maintenu tranquille par deux gardes, tandis que le baron, agenouillé, demandait des précisions à une jeune femme assise par terre, le visage amoché.

"Il va se passer quoi, exactement ? s'enquit Rebecca, paniquée, auprès de Marvin.
— Monsieur Raymond va affronter le cuisinier Peter dans un duel Pokémon. S'il sort vainqueur, Peter peut garder sa place, et inversement s'il subit une défaite. La maison St John a toujours fonctionné ainsi en cas de litige. Peu importe la raison pour laquelle Peter a levé la main sur Maria, cela ne regarde qu'eux et n'intéresse aucunement monsieur Raymond, répondit le majordome, très professionnel.
— Intéressante manière de faire..." admit Robert, intrigué à l'idée de voir un combat se dérouler sous ses yeux.

Les deux hommes qui retenaient Peter le lâchèrent, sans toutefois trop s'éloigner en cas de nouveau problème, et le laissèrent sortir sa Pokéball. Rebecca plissa les yeux, ignorant que ces dispositifs de capture de Pokémon avaient déjà été inventés en 1885. Robert, voyant sa réaction, s'empressa de la renseigner.

"La première Pokéball date de 1879. Les habitants de Sinnoh ont une technologie bien plus avancée que ceux d'Hoenn et ont ainsi pu la mettre au point il y a six ans. J'en reste encore fasciné."

L'infirmière hocha la tête, intéressée. Décidément, ces histoires de voyage temporel l'intriguaient au plus haut point, et jamais elle n'aurait imaginé qu'il y aurait tant de simitudes entre 1885 et 2011. En y regardant de plus près, les Pokéball que Peter et Raymond tenaient semblaient un peu différentes de celles qu'elle connaissait. Intégralement faites de cuivre, elles avaient la couleur caractéristique de ce métal orangé, et ne disposaient pas du bouton central. Elle ne savait pas comment cela fonctionnait, mais ce qui l'intéressait à l'heure actuelle était le combat. Dès lors que les deux hommes eurent envoyé leurs Pokémon, elle se montra enjouée. Le Persian de Raymond allait affronter le Galifeu du cuisinier.

Les deux créatures se livrèrent à un affrontement sans merci, à un échange de coups effréné qui ne s'arrêtait jamais. Tandis que Persian bondissait, toutes griffes dehors, Galifeu esquivait habilement d'une pirouette et ripostait à l'aide d'un stratopercut bien placé. Mais le félin ne se laissait pas faire et revenait à la charge, cette lueur de détermination teintée de fierté clairement visible dans ses yeux. Le poulet de feu ne disait pas son dernier mot non plus, et on repartait de plus belle dans une danse de coups et de flammes qui réchauffait les cœurs allègres des spectateurs, concentrés comme jamais face à ce qui se déroulait sous leurs yeux. Robert en particulier semblait touché par cette scène, comme si une douleur profondément ancrée en lui refaisait surface. Les flammes vives générées par Galifeu n'étaient pas sans lui rappeler celles de son propre Pokémon, à présent sans dresseur, qui errait probablement en 1964, sans but...

"Monsieur Raymond ! Monsieur Raymond !" intervint une voix féminine.

On arrêta le combat lorsqu'une jeune femme d'une vingtaine d'années, habillée d'un uniforme noir brodé de rouge et d'or, identique à ceux des gardes du manoir, courut vers eux, pas essouflée le moins du monde. Ses longs cheveux rouges attachés en un chignon serré laissaient entrevoir un visage doux et pâle, dont les yeux d'un bleu océan étaient magnifiques. Marion Dwight, car tel était son nom, était chef de la garde du manoir St John. Particulièrement compétente, elle avait su s'imposer malgré le fait qu'elle soit une femme et qu'elle doive commander à une quinzaine d'hommes.

"Qu'y a-t-il, Marion ? s'enquit le noble lavandien, étonné de se voir interrompre dans son combat.
— Je suis navrée de devoir interrompre cet affrontement, mais le baron Dover vient d'arriver, monsieur. Sa femme et lui patientent dans l'allée principale."

L'homme brun jeta un regard à Peter, le cuisinier de la maison, et rappela son Pokémon. Il se tourna vers Robert et Rebecca, l'air presque grave.

"Quand je disais que vous le rencontreriez bientôt... je ne m'attendais pas à ce qu'ils fassent si vite. Suivez-moi."

Ce qu'ils firent, alors que le Soleil semblait sur le point de décliner au loin, derrière les épais nuages entourant le ciel bleu.