Au-delà du combat. de Mister Mat

Tout le monde dans les gradins retient son souffle, un silence règne, plus rien ne bouge en dehors du clapotis de l'eau contre le rebord. Le temps s'affiche sur l'écran géant couvrant à lui seul tout un mur, à la seconde d'après la folie s'empare du public, applaudissement et éclat de joie à tout va. Un record sur le 50m dans la catégorie dame : 22 secondes 15, qui était jusqu'à présent de 23 secondes 03. Les applaudissement ne cessent pas, les caméras n'en perdent pas une miette.

La silhouette de la nageuse se dévoile enfin hors de l'eau, elle sort gracieusement de la piscine, sa taille fine traduisait sa souplesse, son coach se jette sur elle pour la féliciter et lui donne au passage une serviette. Un large sourire couvre le visage de la nageuse, tout en se couvrant elle enlève l'excès d'eau de ses longs cheveux roux en les tordant et s'élance vers les vestiaire. Enfin dehors, un magnifique temps règne sur Azuria mais une marée de caméras et de micros submerge soudain la jeune briseuse de record, sans se laisser intimider elle fixe la foule de micros, prête à répondre à toutes les questions.

-Ondine, depuis que vous ne vous occupez plus de votre arène, le monde a découvert la nageuse incroyable que vous êtes, en plus de cela vous avez pu commencer une carrière de mannequin. Comment faites-vous pour porter autant de casquettes aussi riches et variées ? La pression se fait-elle ressentir par moment ?

-C'est vrai que mes épaules sont chargées mais j'ai su trouver un équilibre parfait entre ces deux passions, je suis humaine, je me laisse le temps de tout faire. Je n'ai pas une si grosse pression que ça par rapport à d'autres vous savez !

-Est-ce que votre ancien statut de championne certifiée vous manque ? Est-ce que le dressage reste toujours une passion dans votre vie ?

-Je dois bien vous avouer que mon arène me manque, surtout l'adrénaline des combats, c'était vraiment mon stimulant au quotidien. Maintenant pour me stimuler j'ai l'endorphine, haha ! Mais évidemment que les pokémons gardent une place très importante dans ma vie.

-Nous avons récemment eu vent que vous feriez partie prochainement de la compétition visant à reformer les nouveaux champions d'arènes, pouvez-vous nous confirmer l'information ?

-En exclusivité mondiale, je peux vous annoncer que oui, je serai dans ce jury, comme tous les autres anciens champions d'arènes. Je vous remercie.

Ces dernières paroles laissent place à une nuée d'appareils photos et donc de flashs, cette nouvelle va être en une de tous les journaux. Une figure publique d'une telle importance, touchant aussi bien la presse sportive et people qui annonce une telle nouvelle, ça a le coup d’être vendeur. Plusieurs gardes du corps viennent ouvrir la voie de cette masse journalistique et la championne s'engouffre dans sa limousine d'un blanc immaculé, son agent l'attendant déjà à l'intérieur.

-Cette journée m'a épuisée.

-Félicitations pour votre record du jour !

-Tu sais, je pensais m'habituer à l'exercice médiatique, mais ça me gonfle toujours autant.

-Et c'est pas terminé, il vous reste une dernière séance de signatures à réaliser dans la librairie de Céladopole.

-Vivement la compétition, être examinatrice me prendra tout mon temps, je pourrai enfin me détendre un peu. Franchement, écrire un livre sur mes expériences professionnelles puait les biftons avant même de le sortir.

-Si vous le dites, mademoiselle. Dit-elle sans émotion, du ton le plus neutre possible avant de baisser la tête sur son agenda électronique.

Entre deux messages sur son téléphone, la championne en reçoit un qui ressort du lot, celui de Pierre. Une photo d’un immense bateau s’affiche avec comme texte associé :

“La reconstruction du Saint-Anne, ça fait remonter des (mauvais) souvenirs hein ? ;)”

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Je suis éreintée de tous ces jeunes qui viennent s’inscrire et qui se prennent pour des dresseurs officiels. Ils ne sont rien, je ne peux vraiment plus les supporter, même devoir me forcer à sourire devient un supplice, surtout que la plupart d’entre eux sont impolis et irrespectueux, ils oublient complètement que derrière l’hôtesse souriante il se cache un véritable être humain.

Mais j’ai surtout été éprouvée par ces deux derniers dresseurs. L’un assez grand, posé, m’ayant presque charmée avec ses deux grands yeux d’un bleu étincelant et l’autre plus petit, plus fougueux, assez têtu qui s’est finalement inscrit à la dernière minute pour pouvoir rester avec son ami. Il n’a pas l’air très doué mais sa détermination n’est pas à prouver. Leurs dossiers finalement remplis, je les dispose dans une machine qui enregistre instantanément leurs informations, deux cartes ressortent, celle-ci certifient qu’ils sont inscrits au tournoi. Après un dernière sourire forcé et une formule de politesse adéquate je les vois enfin déguerpir.
Il reste un dossier vierge, pas le temps de le jeter je le fourre dans une pochette avant de ranger cette dernière dans mon sac à main. Un léger coup d’oeil sur l’écran de mon portable, déjà 18h, il ne reste qu’une heure et demie avant la répartition des dresseurs dans les différents pôles. Sans trop l’expliquer j’ai une boule au ventre alors que je participe même pas. Je me change très vite puis je me dirige vers la salle de repos, ma seule amie du boulot m’attend, on aime se voir avant de partir, pour papoter entre filles. Sans elle je ne n’aurai jamais supporté ce boulot.
Elle est déjà assise face à une fenêtre, deux cafés devant elle. En saisissant la chaise je commence en même temps la conversation :

-Salut Catherine, tu vas bien ? T’as vraiment une petite mine…

-Je dois t’avouer quelque chose…

Des larmes commencent à perler aux coins de ses yeux, ses petites mains desséchées se mettent à trembler. Elle prend une bouffée d’air et reprend :

-Je quitte ce job, je ne peux plus supporter ce travail, les conditions sont horribles, la pression aussi, je me suis encore fait reprendre par trois supérieurs aujourd’hui. N’essaye pas de m’en empêcher j’ai déjà déposé ma démission.

-Mais tu as toujours été celle qui me redonnait courage, et maintenant tu laisse tout tomber ? Et puis les grosses périodes sont passées non ? On aura un allégement de travail, tu verras.

-Que tu dis, on a pas encore vu le pire ! Après les gens du monde entier vont s’inscrire pour les gradins ! Ce n’était qu’un petit avant-goût… Mais j’ai une faveur à te demander… Chouine-t-elle en regardant la petite Rozbouton qui est sortie de sa ball.

Elle tend une pokéball toute sale et poussiéreuse de sa poche et la dépose sur ma paume fine et rosée.

-Prends mon pokémon, je ne l’élève plus, je n’ai plus d’argent pour subvenir à ses besoins. Tu es compétente, sans le savoir tu es une super dresseuse. Regarde ton pokémon, il est heureux. Tu mérite mieux que cette merde de boulot, tu dois t'inscrire à ce foutu tournoi, fais en sorte que je sois fière de toi, Anne. Tu peux aller loin, réalise ton rêve, j-je...

Elle n'a même pas le temps de terminer sa phrase que ses larmes se déversent, je la prends instantanément dans mes bras. Sans réticence de ma part je lui promets que je vais le faire, je m'extirpe de l'étreinte et en quelques minutes je remplis le formulaire et cours vers le boîtier d’enregistrement. Je ne réalise pas vraiment encore ce que j’ai fait, mais plus moyen de revenir en arrière. Affolée j'enregistre le dossier. Le mal est fait, je suis... Je suis... :

-...Je suis inscrite.

Ma carte sort quelques secondes plus tard de la machine. Me passant les mains plusieurs fois sur le visages, mon corps ressent le besoin de prendre l’air frais. Dehors, je sors mon Rozbouton, beaucoup plus vigoureux depuis que je prends le temps de lui consacrer au minimum une petite heure par jour pour son entraînement. J’ai à peine eu le temps de me prendre soin à mon premier pokémon, que quelques jours après j’en ai capturé un autre et maintenant un troisième ? Ai-je vraiment les épaules pour assumer tout ça ?

D’ailleurs, je ne l’ai même pas encore vu, la pokéball est usée, plusieurs rayures la couvre. Soit le pokémon est enfermé depuis longtemps soit la pokéball était conservée dans de mauvaises conditions, voire même les deux. Dans un grand élan incertain je jette la ball en l’air. Un Embrylex à l’air farouche en sort, il ne me regarde même pas, plutôt perdu de se retrouver là, ça devait faire un moment qu’il n’avait pas été sorti de sa ball.

Par chance j’ai toujours un peu de nourriture pour pokémon sur moi, comme première approche j’essaye de le toucher mais il me repousse complètement, par contre il se jette sur la nourriture que je lui laisse au sol, je prends le temps de le regarder sous toutes les coutures. Je n’ai jamais eu l’occasionde croiser ce genre de pokémon auparavant. Le temps qu’il finisse, je le rappelle ensuite dans sa ball et fonce vers le hall principal, les répartitions vont être dévoilées dans quelques instants.

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Nous voilà désormais entassés dans ce grand hall, plus qu’une minute avant que les résultats ne soient annoncés. L’écran affiche désormais le compte à rebours de la dernière minute. J’ai la boule à ventre, David porte toujours son regard assuré. En dessous du grand écran se situe 8 autres écrans, symbolisant les 8 pôles, qui vont énumérer pour chacun, la liste où sera rangé chaque dresseur. Les qualifications vont s'effectuer en 4 combats, faisant ainsi passer le nombre de participants de 1200 à 75. Jusqu'à la fin pour obtenir les 8 meilleurs de chaque aile. Les 8 nouveaux champions. J’espère vraiment ne pas tomber dans la même aile que David. Vraiment pas.

La tension devient intenable, un brouhaha général s’installe, on ne s’entend presque plus. Quelques secondes… Une... Puis plus rien et enfin un tintement aiguë.

Le compte à rebours est enfin fini, et bizarrement une foule d’applaudissement s’élève dans l’édifice. Allez savoir pourquoi les gens acclament la fin d’un compte à rebours. Une vidéo s’affiche sur le grand écran. C’est Auguste, l’organisateur de ce tournoi, étant aussi l’un des examinateurs, il prend la parole, entouré des autres champions :

Bienvenue à vous chers dresseurs du monde entier ! Vous devez le savoir mais je suis Auguste, organisateur de cette grande aventure dans laquelle vous vous livrez ! Ayez la chance d’être les édifices de la nouvelle histoire de Kanto ! Aujourd’hui vous êtes 1200 mais à la fin il ne restera que les 8 meilleurs d’entre vous. Moi et les autres ex-champions voulons voir votre talent au plus haut niveau, ne nous décevez pas ! Avant toute chose, regardez sur votre carte, une lettre s’est désormais affichée, représentant votre pôle. 8 pôles, caractérisés par les lettres allant de A à H, simple !

Dans l’instant qui suit tous les dresseurs, et moi-même, regardons notre carte, je suis dans le pôle B, David me tend naturellement sa carte. Gros soulagement il est dans le A. Après un certains laps de temps Auguste reprend son discours :

-Désormais votre destin est dans cette petite lettre ! Mais ce n’est pas tout ! Tous vos combats seront jugés et notés soit pas nous soit par des professionnels du combat, évidemment vos quatre premiers duels vont servir à vous qualifier mais vous êtes trop nombreux pour qu’on puisse tous vous gérer seulement à 8. Le gagnant de chaque combat recevra une note sur 80, chaque membre de chaque jury rendra donc une note allant de 0 à 10. Plus votre note total est élevée plus vous aurez fait sensation auprès des examinateurs. Ce soir les premières qualifications commencent, tous les combattants sont priés de découvrir sur les écrans inférieurs en contre-bas leur numéro de salle où ils vont délivrer LEUR PREMIER COMBAT POUR LES QUALIFICATIONS ! BONNE CHANCE LES LOULOUS ! JE DÉCLARE OFFICIELLEMENT OUVERT LE CHAMPIONNAT !

Je pense que tout le monde a été surpris de le voir crier de manière aussi enjouée à la fin, même derrière lui sur l’écran on voyait Ondine effarée et le Major Bob en perdre sa mâchoire. Malgré tout j’ai pas confiance au moustachu, qui porte des lunettes de soleil en intérieur ? Personne. Imaginez si en plus il avait dit "Et que le sort vous soit favorable !"...

L’écran redevient vite noir et laisse place à un autre compte à rebours avant le début des combats. Ma salle est la B22, celle de David la A14. Les choses sérieuses commencent désormais. Je suis vraiment devenu un dresseur et un compétiteur malgré moi. J'en regretterai presque ma petite vie tranquille.