Entre infini et au-delà de Cyrlight

Line up the stars - Ivyrise et Dania Giò


Ce bonus fait suite à Celui de trop.


Latias poussa un hurlement de douleur lorsqu'elle s'écrasa sur le sol. Artémis bondit de son dos juste avant que son corps ne soulève un nuage de poussière. Elle atterrit avec une souplesse féline trois mètres plus loin et exécuta un salto dans la lignée afin d'échapper au Lumi-Eclat qui convergeait dans sa direction.

Elle se redressa pour dégainer son arc, qu'elle pointa vers le ciel, où flottait la silhouette de Latios. Apollon, nonchalamment assis sur son encolure, adressa à sa soeur l'un de ses sourires goguenards dont lui seul avait le secret. Il passa une main sensuelle dans ses cheveux noirs pour dégager les mèches qui tombaient devant ses superbes yeux étincelants.

Son arrogance s'atténua légèrement quand la flèche d'Artémis vint se ficher dans l'aile de son pokémon. Celui-ci s'affaissa un peu, mais parvint à se maintenir dans les airs grâce à ses pouvoirs psychiques. Latias, quant à elle, commençait déjà à se remettre de sa chute.

L'éon bleu ne tarda pas à se régénérer à son tout, aidé par le chant guérisseur de son maître qui permettait d'accroître la vitesse de ses capacités naturelles de soins. La Chasseuse choisit cet instant pour décocher un nouveau tir, à destination de son jumeau, cette-fois-ci, qui l'esquiva par une habile prouesse.

- Latias, Ball'Brume !

Un nuage épais et cotonneux émana de la créature de façon à aller encercler son rival. Il disparut derrière l'attaque moussue, qui l'aveugla temporairement. La pokémon en profita pour le charger d'un Psykoud'boul. Le choc fut si intense que Latios fut propulsé contre la cime d'un arbre, où il s'empêtra avec le feuillage.

Apollon saisit une branche au vol, à laquelle il se suspendit. Ses muscles se tendirent sous l'effort pendant qu'il se balançait d'avant en arrière pour prendre de l'élan. Quand il en eut suffisamment, il lâcha prise. Sa vitesse ne lui permit toutefois pas d'atteindre la terre ferme avant qu'Artémis ne l'intercepte d'un puissant coup de pied dans le ventre.

Il heurta un tronc qui le sonna une fraction de seconde. De son côté, son partenaire était également malmené par Latias, de la part de laquelle il venait d'encaisser un douloureux Dracochoc. Artémis, malgré l'embuscade dont elle avait été victime, reprenait progressivement le dessus.

Apollon le sentait, lui aussi. Il avait perdu toute son assurance, désormais. Il passa une main sur l'arrière de son crâne et observa ses doigts recouverts d'une fine pellicule de sang. Sa bouche sournoise se tordit en une grimace, au contraire de sa jumelle qui le toisait avec mépris.

- Tu ne m'auras jamais, petit frère, cracha-t-elle. Je suis bien trop forte pour toi seul.

Elle banda de nouveau son arc. Elle savait que, si elle tenait à tuer son frère, elle devait absolument viser le coeur. A cette distance, cela aurait été une sinécure si Latios n'était pas parvenu à échapper à la maltraitance de Latias au même moment afin de s'interposer. Il essuya le tir à la place de son maître, qui s'empressa de sauter sur lui en fredonnant avec énergie.

Puisant dans ses dernières ressources, l'éon s'envola, emportant Apollon avec lui loin de la haine farouche que lui vouait Artémis. La déesse brandit le poing vers le ciel, tremblante de rage, en proférant à leur encontre injures et menaces. La lâcheté de son frère était exemplaire. Dès qu'elle prenait l'ascendant sur lui, il choisissait toujours de s'enfuir plutôt que de l'affronter jusqu'au bout.

Les épaules calées contre un arbre, elle s'y laissa glisser pour s'accroupir. L'herbe humide chatouillait ses jambes presque nues. Latias vint frotter son visage contre le sien pour lui apporter son soutien. Elle savait à quel point elle rêvait de voir enfin son jumeau rendre l'âme.

Le bruit d'une course précipitée parvint aux fines oreilles d'Artémis. Alerte, elle bondit sur ses deux pieds chaussés de sandalettes, empoignant déjà l'extrémité d'une flèche. Des décennies gaspillées à être traquée constamment lui avaient appris à demeurer en permanence sur la défensive.

Elle abaissa son arc lorsque, de l'autre côté d'un fourré, elle distingua la silhouette de Satan. Grâce à ses dons, Apollon avait dû percevoir sa proximité bien avant elle, ce qui l'avait certainement incité à renoncer au combat plus vite encore que de coutume. La Chasseuse afficha une expression pincée quand il l'eut rejointe.

- Tu arrives trop tard, il est déjà parti.
- Mon but était avant tout de te sauver la vie, mais tu n'as visiblement pas besoin d'aide pour cela.
- Au contraire... La situation est devenue beaucoup trop dangereuse, même pour moi.

En effet, depuis quelque temps, la traque des Renégats orchestrée par Arceus avait gagné en intensité. Poséïdon, Kyogre et Manaphy patrouillaient les différentes mers, rendant ainsi leur survol impossible. Elle l'avait découvert à ses risques et périls en tentant de rejoindre Scathach à Sinnoh.

- As-tu la moindre idée de ce qui se passe ? s'enquit-elle, le visage tendu.
- Darkrai m'a rejoint. Arceus était sur le point de le percer à jour et il a préféré partir avant. Il s'est produit des évènements... assez inattendus, à la Cave. Lamia, la fille biologique d'Adam et Eve, a été bannie de la Confrérie pour avoir eu une liaison avec Zeus. Athéna a pris sa défense, mais...
- Athéna ? Laisse-moi rire. Cette mijorée n'a jamais été capable de faire entendre sa voix.
- Elle est partie, Artémis, avoua Satan d'un ton grave. Elle a quitté la Cave en emmenant ses partisans avec elle pour échapper au joug de sa tyrannie.

La déesse soupira d'un air méprisant. Elle ne pouvait pas supporter la fille de Zeus et ce ne serait pas cet élan de témérité, survenu presque un siècle et demi trop tard à ses yeux, qui changerait quoi que ce soit. Au contraire, cela ne faisait même qu'accentuer la colère qu'elle éprouvait à son encontre.

- Je comprends mieux... Arceus déteste perdre ses sous-fifres. Il est extrêmement vindicatif mais, comme il n'osera jamais s'en prendre à elle, il préfère s'acharner davantage sur nous.
- Ce n'est pas tout, murmura Satan. Il y a peut-être une chance pour que cette situation serve nos intérêts.
- Plaît-il ?
- D'après ce que Darkrai m'a rapporté, Aphrodite considérait en quelque sorte Lamia comme sa propre fille. De ce fait, elle a déserté également.

Artémis, qui avait commencé à faire les cent pas devant Latias, s'immobilisa aussitôt. Elle porta une main à son menton pour se plonger dans ses réflexions. Effectivement, cela pouvait jouer en leur faveur, surtout en la sienne et en celle de Scathach, dont la Beauté était la rivale attitrée.

- Où est-elle, en ce moment ? demanda-t-elle précipitamment.
- Je n'en ai pas la moindre idée. Je m'efforce de retrouver sa piste, justement, mais ce n'est pas une sinécure. Elle est terriblement maligne. Je suis toutefois convaincu qu'avec ce qui vient de se produire, je pourrais peut-être l'emmener à changer de camp.

"Changer de camp", se répéta mentalement la déesse. C'était absurde. Elle fomentait déjà dans son esprit des projets tout autres pour Aphrodite, qu'elle risquait cependant d'avoir du mal à accomplir sans l'aide précieuse de sa meilleure amie. Avec un sourire mauvais, elle susurra au Malin :

- Et si tu me rendais plutôt un petit service, tu veux bien ? Aide-moi à rejoindre Scathach à Sinnoh.

***
- C'est trop calme... marmonna Artémis.

Ils survolaient la mer depuis un long moment, à présent, et n'avaient été victimes d'aucune hostilité. Latias planait à quelques mètres de la surface seulement, pour permettre à Satan de sonder les profondeurs aquatiques avec ses pouvoirs. Il ne détectait la présence d'aucun ennemi à proximité.

- La diversion de Darkrai doit fonctionner, même si je suis un peu étonné qu'elle retienne leur attention à tous les trois.
- C'est parce que vous leur faites peur, vous deux. Giratina étant captif du Monde Inversé, vous êtes de loin les Renégats les plus puissants. Ta force doit au moins être équivalente à celle de Zeus.

Satan ne releva pas. La modestie était l'une de ses principales qualités, dont peu de légendaires disposaient. Ils étaient tous beaucoup trop imbus de leur personnalité et de leur supériorité sur leurs homologues mortels pour cela.

- Lat !

L'éon poussa un cri pour désigner la terre qui apparaissait progressivement à l'horizon. Ils avaient presque enfin atteint la côte de Sinnoh. Artémis ordonna à sa pokémon de presser l'allure, bien que celle-ci soit déjà pratiquement à son paroxysme. Alors qu'elle puisait dans ses ressources restantes, le Malin s'époumona :

- Latias, non ! C'est un piège !

L'intéressée, en dépit de ses réflexes exceptionnels, ne put pas réagir à temps. Elle fonça de plein fouet dans le raz-de-marée qui s'élevait à contresens du ressac pour fondre sur eux. Le choc les déstabilisa et la Chasseuse dut retenir Satan par le poignet afin qu'il ne tombe pas dans les flots déchaînés.

Les écailles de l'éon, mouillées, devenaient extrêmement glissantes. Même sa maîtresse peinait à se maintenir en équilibre sur son dos. Elle se pencha par-dessus son encolure pour l'entourer de ses bras, pendant que le Malin enserrait fermement sa taille. La vague démesurée qu'ils traversaient les ballottait de droite à gauche avec virulence.

Quand Latias réussit à en émerger, le premier réflexe d'Artémis fut de cracher un long jet d'eau salée. Elle s'ébroua violemment, avant de fusiller son acolyte du regard par-dessus son épaule. Furieuse, elle pesta :

- Pourquoi est-ce que tu ne nous as pas averties ?
- Je ne l'ai senti qu'au dernier moment. J'ignore comment cela se fait, il...

L'humain de Darkrai n'acheva pas sa phrase. Un grondement sourd émana des profondeurs, pendant qu'une forme gigantesque se rapprochait de la surface agitée. Artémis serra les dents. D'instinct, sa main se dirigea vers son carquois, même si elle savait que ce geste était inutile. Jamais ses flèches ne traverseraient la cuirasse bleutée de Kyogre.

Le Titan transperça les vagues dans une gerbe d'éclaboussures qui s'éleva jusqu'à eux. Satan se mit immédiatement debout, malgré l'équilibre précaire que lui offrait la lévitation de Latias. Son corps s'entoura d'un halo ténébreux alors qu'il mobilisait ses pouvoirs. Quelques secondes plus tard, un Vibrobscur convergeait déjà vers la créature aquatique.

Artémis visa l'oeil, la seule partie de son anatomie qu'elle était en mesure d'espérer blesser. Elle l'atteignit. La pointe acérée de son projectile s'enfonça dans le globe blanc et vitreux. Un liquide visqueux s'échappa de l'orifice pour se confondre avec la mer. Kyogre poussa un rugissement de douleur.

- Contourne-le ! ordonna-t-elle à Latias. Que je crève le second.

Cela n'aveuglerait pas le Titan très longtemps, car sa vue se régénèrerait sous peu, mais cela pourrait permettre à Satan de l'affaiblir. L'éon slaloma entre les vagues qui se dressaient en travers de son chemin pour rallier l'autre flanc du géant des mers. L'arc bandé, Artémis tira dès que sa cible fut en ligne de mire.

Plongée dans une cécité totale, Kyogre tenta tout de même un Hydrocanon. La pokémon dut effectuer une vrille pour l'esquiver. Son humaine bascula la tête en bas, seulement maintenir à la force des jambes, les genoux et les mollets calés autour de son encolure. Le Malin, lui, sauta dans le vide pour aller atterrir à pieds joints sur l'échine du partenaire de Poséïdon.

- Que fais-tu ? s'écria la Chasseuse, interloquée. Es-tu fou ?
- Non, j'ai une idée.

Kyogre s'agita violemment de manière à essayer de pousser Satan dans les flots, mais celui-ci résista fermement. Alors que les attaques Surf se multipliaient, il invoqua deux sphères ténébreuses qui se muèrent en un Coup Bas. Le Tita encaissa deux assauts latéraux simultanés et en fut déstabilisé.

- A quoi joues-tu ? questionna Artémis, l'arc à présent rangé.
- Il va falloir que Latias utilise ses pouvoirs psychiques pour le renverser. Lourd comme il est et handicapé par ton intervention, il lui faudra un moment pour se rétablir, assez pour nous laisser le temps de rejoindre la rive.
- Es-tu seulement sûr de toi ?

Satan haussa les épaules, ce qui arracha un soupir à la déesse. Il ne se montrait jamais débordant d'optimisme lorsqu'il était question d'affronter les sbires d'Arceus. En dépit de son scepticisme latent, Artémis décida de passer à l'action et de transmettre ses instructions à Latias.

Les prunelles de l'éon bleuirent aussitôt. L'énorme masse que représentait Kyogre s'entoura d'un halo à la couleur identique. Elle se mut légèrement sous la volonté de la pokémon, avant de s'immobiliser. Le poids du Titan était trop conséquent pour qu'elle réussisse à le retourner.

- Satan, elle n'y arrivera jamais !
- Qu'elle résiste encore un peu, je vais l'aider.

De la fumée noire émana de ses bras écartés pour encercler l'abdomen blanc de Kyogre, situé sous la surface. Le Malin rapprocha ensuite ses membres l'un de l'autre pour resserrer l'étreinte du sortilège, mais cela eut pour unique effet d'énerver davantage le partenaire de Poséïdon. La créature frappa la mer de sa queue afin de provoquer une Giclédo.

Artémis hurla. Latias, focalisée sur le contrôle mental qu'elle exerçait sur le Titan, n'avait pu l'esquiver et sa maîtresse se retrouva précipitée dans le vide, pour se faire engloutir par les flots. Quand elle s'en aperçut, elle voulut voler à son secours, néanmoins Satan l'en dissuada d'un cri.

- Elle va s'en sortir, reste concentrée !

L'éon poussa un petit gémissement, de souffrance et d'inquiétude. Cela nécessitait un effort intense qu'elle n'allait plus pouvoir fournir très longtemps. Par chance, la force de l'humain de Darkrai se combina rapidement avec la sienne et, enfin, Kyogre put commencer à chanceler, jusqu'à basculer complètement dans un fracas assourdissant.

Satan plongea dans l'eau juste avant que le légendaire ne se renverse sur le ventre. Il émergea quelques dizaines de mètres plus loin, son bras enroulé autour de la taille d'Artémis. Cette dernière toussota et crachota un instant, pendant que son ami sifflait Latias afin qu'elle vienne les repêcher.

Le Titan, quant à lui, tendait déjà de se remettre d'aplomb, mais sa cécité provisoire troublait trop son équilibre pour lui permettre d'y parvenir. Cela ne le handicaperait plus très longtemps, toutefois, raison pour laquelle les deux divinités se hâtèrent de cramponner les ailes solides de l'éon, qui les emporta vers la rive.

- J'espère... que tu as vraiment... une bonne raison... de vouloir retrouver... Scathach ! haleta Satan.

Latias venait de se poser sur la plage de Rivamar, abandonnant ses deux passagers dans le sable. Artémis fut la première à se mettre debout et à secouer les grains dorés suspendus à son pagne. D'un geste sec, elle effectua une torsade de ses cheveux dégoulinants pour les essorer.

- Ne t'inquiète pas... Cela en vaut la peine.

***
- Aphrodite n'est pas à Kanto, ni à Johto. J'ai cherché partout, du moins jusqu'à ce qu'Electhor ne prenne ma trace. Je crains qu'Arceus ne finisse par se douter de quelque chose.
- Plus nous perdrons du temps et plus elle sera en danger. Tu m'as rapporté qu'Athéna avait justifié son départ par la traque de Scathach, mais il comprendra tôt ou tard qu'elle ne chasse personne.

Les paupières de Satan se fermèrent une fraction de seconde sur ses iris ténébreux, avant de se rouvrir. Darkrai n'avait pas bougé, il le fixait toujours avec une insistance presque perturbante, comme s'il cherchait à le sonder. Il était d'ailleurs capable de le faire, autant grâce à ses dons qu'au lien indéfectible qui les rattachait l'un à l'autre.

- Pourquoi tiens-tu tant que cela à la localiser ?
- Hadès m'aurait tué lors de la bataille de la Salle Originelle. Elle m'a sauvé la vie, j'ai une dette envers elle.
- Est-ce là ta seule raison ?
- Devrais-je en avoir une autre ?

Le poitrail du pokémon noirtotal se gonfla lorsqu'il prit une profonde inspiration. Satan n'était pas menteur, ni dissimulateur, contrairement à ce que les partisans de l'Alpha prétendaient, néanmoins il faisait preuve d'une naïveté magistrale dans des situations comme celle-ci.

- Quels sont tes sentiments exacts à l'égard de Dame Aphrodite ?
- Je la tiens en très haute estime, malgré nos différents, avoua le Malin d'un ton triste. Je pense qu'elle n'est pas comme le reste de la Confrérie. Elle n'est ni aveugle, ni injuste.

Darkrai ne releva pas. Il appréciait également la déesse et aurait amplement préféré que l'amour vain éprouvé par son humain envers Lilith lui soit destiné. Il devait pourtant admettre que Satan ne ressentirait jamais d'autre pour elle qu'un profond respect et une noble amitié.

- Cela fait un long moment, désormais. Si elle avait dû revenir vers Arceus, elle l'aurait fait.
- Je ne t'ai jamais caché mon avis sur la question, Satan. Ce n'est pas pour autant qu'elle deviendra une Renégate.
- Peut-être, mais je m'en voudrai éternellement si je n'essaie pas au moins de lui parler.

***
Scathach leva les yeux en direction du ciel. Son instinct de guerrière lui soufflait qu'elle était suivie et elle craignait à tout instant de voir surgir le plumage incandescent de Sulfura au-dessus de sa tête. Aphrodite était la seule à posséder le courage nécessaire pour s'en prendre à elle. Les autres choisissaient plutôt de se tenir à l'écart de sa personne, ainsi que c'était également le cas pour Satan.

Elle perçut une présence dans son dos. Elle dégaina un bo au moment où une forme la heurtait de plein fouet. Elle roula dans l'herbe humide sur plusieurs mètres avant de sauter sur ses pieds, son arme brandie. Dès qu'elle distingua la silhouette humaine qui lui faisait à présent face, elle éclata de rire.

- Artémis ! Quelle surprise ! Moi qui te croyais à Kanto...
- J'y étaiś mais j'avais une bonne raison de faire le voyage jusqu'à toi, en dépit des risques que cela impliquait. Je suis à Sinnoh depuis de nombreuses semaines, tu n'as pas été aisée à débusquer.
- Je n'ai guère le choix. J'ai un mauvais pressentiment. Aphrodite ne m'a pas persécutée, récemment, et je redoute qu'elle ne prépare quelque chose de gros.
- Tu n'y es pas du tout.

Avec un sourire darkrainique, la Chasseuse entreprit de communiquer à sa meilleure amie les informations qu'elle-même tenait de la bouche de Satan. Au fur et à mesure qu'elle progressait dans son récit, le visage de Scathach commença à prendre une expression aussi mauvaise et sournoise que le sien.

- C'est prodigieux ! souffla-t-elle sitôt qu'Artémis eut terminé. Elle nous mâche le travail en agissant ainsi. Je suis sûre que, sous peu, Arceus insistera pour l'écraser lui-même de ses pattes.
- Oh que non, tu te méprends sur mes intentions. J'escompte faire d'une pierre deux coups et tu vas m'y aider, car c'est non seulement l'occasion de nous débarrasser une bonne fois pour toute de ta rivale, mais également du mien.

***
Aphrodite acheva de démêler sa longue chevelure dorée, qu'elle noua au niveau de sa nuque avec un ruban en soie. Il régnait une chaleur accablante dans cette caverne et elle ne supportait pas qu'ils se collent à sa peau moite. Elle avait l'impression que cela la gênait dans ses mouvements.

Elle ne craignait pas ces températures extrêmes, cependant, auxquelles Sulfura l'avait habituée dès son apparition. A l'instar de Njörd qui pouvait survivre sans mal au zéro absolu, son corps avait été conçu pour résister aux fournaises les plus intenses.

Son Oiseau, quant à lui, était littéralement au paradis. Elle n'aurait pu trouver de cachette plus à sa convenance. Là, dans les entrailles du Mont Abrupt, il jouissait d'un lac de magma en fusion dans lequel il pouvait se baigner à sa guise, en compagnie de Heatran.

- Tout va bien, Dame Aphrodite ?

Une silhouette masculine se découpait dans l'un des nombreux boyaux qui conduisaient à la salle où se tenait la déesse. Elle rajusta les fines bretelles de sa toge pendant que son interlocuteur. Il s'agissait d'un homme fortement charpenté, dont la musculature était majoritairement dissimulée sous une armure parfaitement forgée. Une barbe épaisse recouvrait le bas de son visage.

- Je n'en suis pas certaine. Ils vont bientôt me retrouver, je le sens. Vulcain, je vous en prie, expliquez-moi... Comment Arceus a-t-il pu vous laisser si longtemps en paix quand vous ne lui avez jamais officiellement promis votre assurance ?
- Je crois... Non, je suis sûr qu'Athéna a su l'en convaincre.
- Par pitié, ne prononcez pas son nom devant moi ! Je ne veux plus jamais entendre parler de cette... cette...
- Dame Aphrodite, reprenez-vous. Ne laissez pas vos humeurs hardies vous contrôler de la sorte. Je peux concevoir que vous soyez furieuse à cause du sort de Lamia, que vous m'avez rapporté, mais elle a essayé, comme elle essaye toujours.
- Pourquoi se contenter d'une simple tentative lorsque l'on a la capacité de réussir ? Comment ne pas lui en vouloir ? Et puis, si vous n'avez aucun grief contre elle, pourquoi vous terrer ici ? Pourquoi ne pas rejoindre son clan ?
- Je tiens à demeurer à l'écart. Je n'ai pas souhaité cette guette et je refuse d'y prendre part. Je ne me considère ni comme un traître, ni comme un bourreau, ni comme un rempart. Je ne suis fidèle qu'à moi-même. Je suis le seul que je sers.
- Je crains qu'Arceus ne se montre pas aussi conciliant avec moi qu'il ne l'est avec vous, confessa Aphrodite, les épaules affaissées. Il a besoin de moi pour capturer les guerrières, puisqu'Apollon échoue lamentablement à chaque fois contre sa soeur. Il ne me permettrait jamais une telle défection.

Vulcain garda le silence et un soupir s'échappa des lèvres pulpeuses de la Beauté, dont le son fut couvert par le clapotis régulier émis par la lave. En dehors de celui-ci, il n'y avait pas un bruit à l'intérieur du Mont Abrupt. Lorsque la déesse en perçut un autre, anormal, il était déjà trop tard.

- Artémis ! cracha-t-elle à l'écoute du sifflement caractéristique de ses flèches.
- En chair et en os. Désolée de t'annoncer cela de façon aussi brutale, poupée, mais ton prétendant s'est encore humilié devant moi avec l'art et la manière.
- Apollon n'est pas mon prétendant et je me moque de ses bévues. Le moment venu, je réussirai là où il échoue sans arrêt.
- Dans tes rêves !

Concentrée sur la Chasseuse, Aphrodite n'avait pas vu Scathach se faufiler dans son dos avec une discrétion féline. Cette dernière dégaina son bo qu'elle aurait abattu sur sa nuque si la Beauté ne l'avait pas esquivé de justesse. Elle était presque aussi souple et rapide qu'elle-même.

- Artémis ! Scathach ! gronda Vulcain. Elle n'est pas venue ici pour se battre et je vous demanderai d'en faire autant. Mon antre est un territoire neutre.
- Ne t'inquiète pas, répondit la guerrière rousse avec un sourire sadique, nous n'avons nullement l'intention de te déranger bien longtemps.

Elle venait d'entamer une danse aussi féroce qu'élégante avec sa rivale. Chaque assaut était destructeur, pourtant ils étaient tous parés avec aisance des deux côtés. Pendant qu'elles s'affrontaient en corps à corps, Artémis envoya Latias combattre Sulfura, qui venait d'émerger du lac souterrain, les ailes dégoulinantes de lave.

Scathach maniait désormais un glaive alors qu'Aphrodite ne disposait d'aucune arme sur elle pour se défendre. Elle les avait toutes abandonnées dans la forge de son hôte dès son arrivée au Mont Abrupt. Acculée contre la paroi rugueuse de la grotte, la lame de l'humaine de Créfadet l'aurait sans doute empalée si, au même instant, au solide bouclier en cuivre n'était pas apparu à son bras, à l'aide duquel elle put se protéger.

- Pour quelqu'un qui veut se tenir à l'écart, comme tu t'en targues souvent, tu t'y prends d'une curieuse façon, Vulcain.

Artémis abandonna sa place entre les ailes de Latias pour gagner le sol, pendant que sa pokémon projetait Sulfura contre un mur, dont une partie s'effrita sous son poids. Le dieu forgeron, désormais équipé d'une lance longiligne, répliqua :

- En effet. C'est la raison pour laquelle je ne tolère pas que vous transformiez ce lieu en un véritable champ de bataille, exactement comme vous l'avez fait avec le reste du monde. Partez, maintenant, ou je n'hésiterai pas à employer la force pour vous chasser !
- Désolée, Vulcain. Ce n'est pas contre toi.

Artémis rangea son arc, qui ne lui aurait été d'aucune utilité face à la cuirasse du dieu, sur laquelle elles se seraient brisées. Prenant son élan, elle le chargea. Il avait beau être fort, il n'en était pas moins lent. Cela conférait à la Chasseuse un avantage non négligeable.

Au moment où elle allait heurter le Forgeron, toutefois, un mur incandescent se dressa entre eux. Dans un hurlement assourdissant et une explosion de magma, Heatran fit irruption dans la caverne, déterminé à protéger son maître. Artémis parvint à interrompre sa course de justesse.

Elle avait envisagé la possibilité de les affronter tous les deux dès lors qu'elle avait compris qu'Aphrodite se cachait auprès de lui. Elle regrettait de devoir en arriver là, car elle n'avait aucun grief personnel contre Vulcain, mais rien ne saurait la détourner de son objectif, qu'elle n'avait jamais été aussi proche d'atteindre.

- Scathach, ton bo !

Tout en gardant Aphrodite en joue, elle jeta en direction de son amie son long bâton en bois. Celle-ci prit appui dessus pour se propulser par-delà la barrière enflammée. De ses deux pieds, elle frappa le buste du dieu, qui bascula vers l'arrière. Le pois de son armure, aidé par la pression qu'Artémis exerçait au niveau de son épaule, le cloua au sol.

Au même instant, la roche sous elle se mit à trembler violemment. De temps à autre, un geyser de lame en jaillissait, chaque fois dans des endroits aléatoires. Heatran répliquait déjà avec sa redoutable attaque Telluriforce. Si la dextérité de la déesse lui permit de conserver son équilibre, elle n'en fut pas moins secouée.

Il en fut de même pour Scathach et Aphrodite profita de l'occasion pour lui échapper. Une exclamation mécontente s'échappa de la bouche de la guerrière. Seul le combat aérien mené par Latios et Sulfura se poursuivait sans souci. Artémis allait cependant devoir se résoudre à y mettre un terme, car elle aurait besoin de son éon pour venir à bout d'Heatran.

- Dracochoc, maintenant ! ordonna-t-elle.

La pokémon se détourna aussitôt de son ennemi actuel pour cracher son attaque face au second. Ne demandant pas son reste, l'Oiseau de feu plongea dans le lac incandescent d'un battement d'ailes, où il pourrait en grande partie se régénérer. Lui comme Heatran, ils étaient particulièrement avantagés par leur environnement.

Vulcain avait laborieusement réussi à se redresser et affrontait à nouveau Artémis, qui ne mettrait qu'une fraction de seconde à le renvoyer au tapis. La rixe opposant Scathach à Aphrodite était à la fois complexe et équitable. Quant à Latias, elle luttait avec vaillance contre ses deux adversaires.

Heatran éleva une Lame de Roc dans sa direction, qui manqua sa cible et frappa le plafond. Des rochers se fissurèrent et vinrent s'abattre sur la caverne en contrebas. Si Aphrodite échappa de justesse à une stalactite, Scathach se retrouva ensevelie sous un tas de gravas.

- Heatran, non ! s'époumona Artémis. Vulcain, il...
- Je vous avais prévenues, toutes les deux. Vous n'auriez pas dû faire fi de mon avertissement.

Il adressa un signe de la main à son pokémon, qui déversa sur la prison rocailleuse de la guerrière une puissante Canicule. Les pierres se mirent à irradier sous la vague de chaleur dont elles étaient victimes. Latias tenta de déchiqueter les rochers à l'aide d'une Dracogriffe, mais leur température était trop élevée.

Artémis commençait à angoisser à cause de la mauvaise posture dans laquelle se trouvait sa meilleure amie lorsqu'un évènement inattendu se produisit. Heatran cessa de cracher son feu, pourtant le tas continuait à scintiller d'une lumière éclatante.

Le bruit d'une Explosion fut amplifié par les parois de la grotte. Des scories volèrent en éclats. Aphrodite leva son bouclier afin de protéger son beau visage pendant que la joue d'Artémis était méchamment entaillée. Quelques secondes plus tard, il ne lui restait déja plus qu'une fine cicatrice.

Scathach réapparut indemne, entourée par un champ de force protecteur. Une petite créature au crâne bleuté se tenait devant elle, tel un rempart. Une grimace de douleur tordait sa face d'ordinaire si paisible.

- Elle... a... osé... souffla Aphrodite, abasourdie.

Si Athéna avait appliqué des scellés aux Ruines Sinjoh, Héra s'était contenté de jeter un sortilège d'attachement aux Cré's pour les relier aux lacs dans lesquels Arceus les avait exilés, suite à la coopération qu'ils avaient fourni à Lilith lors de la bataille de la Salle Originelle. De ce fait, il ne leur était pas impossible de quitter leur résidence respective, mais chaque excursion à l'extérieur leur causait de vives souffrances, si bien qu'ils ne s'y risquaient jamais, ou presque.

Créfadet, lui, n'avait pas hésité à affronter cette épouvantable torture en se téléportant jusqu'ici dans l'unique but de défendre sa maîtresse. Il venait d'encaisser seul l'attaque d'Heatran. Il tremblait beaucoup, de fatigue et de douleur, pourtant il restait là, fidèle à son poste.

- Oh que oui, elle a osé... Latias, Coup d'main !
- Créfadet, Psyko !

Heatran, en dépit de sa masse, fut soulevé par les pouvoirs psychiques du Cré's. Il se concentra afin de le faire léviter à travers la grotte jusqu'au bassin de magma, dans lequel il le jeta. Latias enchaîna immédiatement en orientant un Laser-Glace vers la surface, de façon à la refroidir et à la solidifier.

Artémis balaya les jambes de Vulcain pour le déséquilibre et l'envoya s'écraser contre un rocher d'un simple coup de pied. Elle reprit ensuite son arc, une flèche, et le banda, pointé sur son crâne chevelu. Sa mâchoire se contracta tandis qu'il attendait l'impact. Son coeur était protégé par sa cuirasse, néanmoins il mourrait si elle atteignait son cerveau.

- Je te l'ai dit, souligna la Chasseuse d'une voix parfaitement mesurée. Ce n'est pas contre toi.

Sur ces mots, elle pivota sur elle-même et son projectile alla se ficher dans l'aile de Sulfura. Il n'eut pas le temps de crier qu'il était déjà blessé de la même manière de l'autre côté, le contraignant à s'écraser sur le sol dans un nuage de poussière.

- Maintenant ! s'écria Artémis alors qu'Heatran paraissait être sur le point de se libérer.

Scathach sacrifia son glaive pour arracher son bouclier à Aphrodite avant de lui enfoncer une épée dans le ventre, en veillant à toucher autant d'organes vitaux que possible. Plus la blessure était grave et plus elle mettait longtemps à se régénérer, y compris chez les légendaires.

La gueule de Latias se referma sur l'une des serres de Sulfura, pendant qu'Artémis s'accrochait à son aile. Scathach empoigna la chevelure de la Beauté meurtrie à peine main et ce fut ensemble que Créfadet les téléporta hors du Mont Abrupt.

***
- Satan...

Le Malin souleva la mèche de cheveux obscure qui lui tombait devant les yeux et la repoussa vers l'arrière. Il était rare de le voir énervé, pourtant ce jour-là, il était dans une colère noire. Ses prunelles paraissaient encore plus ténébreuses qu'à l'accoutumée. Darkrai lui-même n'osait pas l'approcher en un tel moment.

- Elle n'est nulle part ! J'ai fouillé toute la planète. Toute la planète ! Il n'y a aucune trace d'elle. Même mes pouvoirs sont incapables de déceler le plus infime indice. Se peut-il qu'Arceus l'ait trouvée avant moi ? Se peut-il qu'elle soit... morte ?
- Non. Elle ne l'est pas, mais elle le sera bientôt si tu n'interfères pas.

Satan sursauta à l'écoute de cette voix. Une fois encore, il s'était laissé dupé. Apparemment, masquer leur approche était devenu une nouvelle mode chez les légendaires. Lorsque le temps ne lui manquerait pas autant, il s'efforcerait de mettre au point un sortilège identique pour les Renégats.

- Que voulez-vous dire par "elle le sera bientôt" ?

D'ordinaire, il faisait toujours montre d'un grand respect à l'égard d'Athéna, mais là, il n'avait pas l'esprit à la courtoisie. Il se contenta de se redresser et de lui faire face pour la fixer d'un retard insistant.

- Artémis t'a trahie. Je connais ton entreprise et je sais que tu lui en as fait part. Tu as cependant fait naître en elle un projet fort différent du tien.
- Comment... Que veut-elle, exactement ?
- L'utiliser comme appât afin de tuer Apollon et lui infliger le même sort lorsqu'elles n'auront plus besoin d'elle.
- N'auront ? Bien sûr... Scathach. Chacune face à son ou sa rivale. Et c'est ma faute, évidemment. Je ne voulais pas la mettre en danger, je vous assure.
- Oui, naturellement, elle aurait été plus en sécurité en rejoignant les Renégats.
- Ce n'est pas à vous qui savez tout que je vais apprendre cela, rétorqua-t-il avec virulence. Oui, nous sommes persécutés par Arceus et ses partisans. Oui, il veut nos têtes à n'importe quel prix. Et pourtant, ce que j'ai à vous dire tient en trois mots. Trois noms. Isis, Némésis, Lamia. Elles n'ont jamais été avec nous, il me semble, or elles ne sont plus là. Nous nous en sortons tant bien que mal, mais au moins, nous sommes toujours au complet, pendant qu'Arceus décime ses propres troupes.

Athéna ne releva pas. Il était rare qu'elle ne trouve rien à répondre, cependant ce fut le cas. Les paroles de Satan étaient tellement empreintes de vérité qu'elle ne pouvait rien y redire. Elle garda un long silence, qu'il ne brisa pas.

- Sauve-la. Tu en as le pouvoir, finit-elle par murmurer.
- Pourquoi moi ? Confier cette tâche à un Renégat, n'est-ce pas un peu antithétique à la vue des propos que vous venez de tenir ? Laissez donc faire Apollon.
- Il échouera. Tu es le seul qui puisse lui venir en aide, aussi je t'en en prie, fais-le.
- Pourquoi pas vous, ou du moins l'un des vôtres, puisque Darkrai m'a rapporté que vous fuyez désormais les conflits autant que possible ?
- Parce que je sais que tu as une dette envers elle et je t'offre l'occasion de la rembourser.
- Il n'y a décidément rien que vous n'ignorez, ai-je tort ? Si j'interfère, toutefois, Artémis et Scathach ne me le pardonneront jamais.
- C'est à toi de voir. Rien ne t'y oblige si tu n'y tiens pas, mais il faudra dans ce cas que tu vives pour l'éternité avec le poids de tes actes sur tes épaules, comme nous sommes déjà trop nombreux à le faire. Quoi qu'il en soit, tu comprendras ce à quoi Aphrodite est actuellement confrontée et dont j'ai moi-même été longtemps victime : il est plus difficile que l'on croit de choisir son camp.

***
- Ces années de recherche pour localiser Circé n'auront pas été vaines. Notre très estimée maîtresse des poisons va nous être bien utile.
- Comment ? s'exclama Scathach. Tu sais donc où elle se trouve ? Depuis combien de temps ?
- Une petite décennie tout au plus. Si je ne t'en ai rien dit, c'est parce qu'elle ne veut pas que l'on sache où elle se terre. D'après elle, cela nous mettrait encore plus en danger que nous ne le sommes déjà.
- Comme si c'était possible...
- Toujours est-il qu'elle m'a interdit de retourner à sa cachette, au cas où un membre de la Confrérie me suivrait jusque là-bas. Elle est vraiment devenue obsédée par sa sécurité. Le jour où je l'ai revue, cependant, elle m'a confié un très grand nombre de potions, à utiliser avec parcimonie car elles ne sont destinés qu'aux cas d'urgence extrême.

Artémis agita un petit flacon sous le nez de son amie avec un sourire mauvais. Il était rempli d'un épais liquide pourpre à la composition complexe. Sournoisement, la Chasseuse informa :

- L'une de ses meilleures inventions, d'après elle. Il s'agit d'un poison qui se diffuse dans l'organisme et qui le consume de l'intérieur. Comme les légendaires se régénèrent, il se contente simplement de provoquer d'insoutenables douleurs. De quoi passer l'envie à "Dame" Aphrodite de tenter de s'enfuir à nouveau.
- Combien de temps les effets durent-ils ?
- Une semaine, environ. Sachant que nous sommes déjà ici depuis cinq jours et que nous n'aurions pu choisir de lieu plus évident, cela laisse à Apollon le délai nécessaire pour arriver à nous et délivrer sa belle.

Artémis s'accroupit pour plonger ses doigts dans la surface du lac Courage. Dans son dos, Scathach grimaça. Cet endroit avait beau être celui où son pokémon était reclus depuis un siècle et demi, elle n'en aimait pas l'eau pour autant.

- Et s'il était aussi lâche qu'Adam et Eve ? supposa la guerrière.
- Même mon frère vaut mieux que cela, pourtant tu connais la piètre estime que je lui porte.

Sur ces mots, la déesse se redressa. Ses doigts se resserrèrent sur la fiole de Circé tandis qu'elle se dirigeait vers l'entrée de la grotte qui trônait au coeur du lac. A l'instar de Créfadet, Aphrodite et Sulfura se trouvaient à l'intérieur, captifs.

L'oiseau était clouée contre l'une des parois rocheuses, les ailes perforées par une quantité de flèches. Son flanc était empalé sur une lance et, régulièrement, le Cré's faisait léviter de l'eau jusqu'à lui afin de l'en asperger. Le maintenir en état de faiblesse constante était le meilleur moyen de s'assurer qu'il n'aurait pas assez d'énergie pour s'échapper.

En ce qui concernait sa maîtresse, la tâche était plus ardue. Scathach avait été contrainte de lui trancher les tendons deux jours auparavant et cela n'avait pas suffi à la maintenir immobile. Quand elle ne pouvait pas marcher, elle essayait de se traîner en rampant jusqu'à la sortie. Bien qu'elle soit totalement à bout de force, elle continuait à résister.

- Ta détermination ne te sauvera pas la vie, Aphrodite.

Scathach lui asséna un puissant coup dans le vendre lorsqu'elle atteignit le recoin dans lequel la divinité était enchaînée. Elle lui empoigna ensuite les cheveux pour lui tirer le crâne vers l'arrière et la forcer à la regarder dans les yeux.

- Si cela peut te réconforter, dis-toi sui tu es à ce jour la légendaire qui est passée la plus près de me tuer, et surtout le plus grand nombre de fois. C'est terminé, cependant. Aujourd'hui, c'est moi qui gagne.

La guerrière lui glissa un doigt dans la bouche, qu'Aphrodite tenta de mordre méchamment, afin de lui entrouvrir les lèvres. Artémis s'avança à son tour, prête à lui déverser le contenu de sa fiole dans la gorge. Elle s'immobilisa néanmoins à l'écoute d'un bruissement infime. Avec une expression goguenarde, elle annonça ;

- Le voila.

***
Satan, tapi sur la berge, observait à distance la grotte de Créfadet. Latios venait juste de se poser sur le toit, mais il était persuadé que ses deux amies étaient déjà au courant de son arrivée. Il en eut la confirmation quand il vit Artémis sortir la première, l'arc à la main, Scathach sur ses talons.

- Allons-y ! ordonna-t-il à Darkrai.

Il n'avait aucune envie de se battre contre les deux Renégates, car il les adorait, cependant il ne pouvait pas non plus se permettre de les laisser assassiner Aphrodite, en particulier quand lui-même lui devait la vie.

Avec l'élégance naturelle qui le caractérisait, il plongea dans l'eau. Les éclaboussures autour de lui n'émirent presque aucun son, si bien qu'il serait aisé de le confondre avec l'un des nombreux pokémon des environs. Darkrai, lui, la traversa simplement, ombre noir fantomatique.

Comme le lac Courage n'était pas très vaste, ils en atteignirent rapidement le centre. Le combat entre les guerrières alliées et Apollon faisait déjà rage, ce qui couvrait leur approche. Scathach et Artémis ne le sentiraient pas, et le remarqueraient encore moins lorsqu'il se faufilerait à l'intérieur dans le but de secourir Aphrodite.

- Es-tu sûr de ce que tu fais ? interrogea la créature ténébreuse à ses côtés, au moment où il s'apprêtait à pénétrer dans la caverne.
- Je ne peux pas la laisser mourir ! Et tu ne souhaites pas non plus que cela se produise.
- Si elles découvrent la vérité, tu les perdras pour toujours... ainsi que Lilith, car elles finiront par lui apprendre ta trahison tôt ou tard.
- Je... commença Satan avant de se figer. Je vois très bien où tu veux en venir.
- Et toi ? Sais-tu seulement où tu vas ? Athéna a raison, comme à chaque fois. Choisir son camp est beaucoup plus difficile qu'on ne l'imagine.
- Je ne suis pas Arceus, c'est la seule chose dont je suis sûr. Aphrodite ne mérite pas ce sort qu'il nous réserve à tous.
- Et Scathach ? Et Artémis ? Le méritent-elles ? Aphrodite est certainement la plus vindicative des légendaires. Sitôt libre, elle mûrira sa vengeance à leur encontre et mon instinct me souffle que, de toute la Confrérie, elle est la plus apte à réussir.
- Je les protégerai, dans ce cas, ainsi que je le fais depuis le début.
- Te le permettront-elles toujours lorsqu'elles n'auront plus confiance en toi ?
- Je ne... Je n'en sais rien. Que dois-je faire, Darkrai ?
- Je l'ignore. Je crains qu'une fois encore, il n'y ait que des mauvais choix.

***
Aphrodite poussa un hurlement de douleur, étouffé par les bruits de l'affrontement. Elle contempla avec horreur son poignet brisé. Malgré la solidité de ses os, ils n'avaient pas résisté à la pression infligée par ses fers lorsqu'elle avait tenté de les arracher. Par chance, sa torture n'avait pas été vaine : elle avait réussi à les arracher du mur auquel ils étaient soudés.

Ils pendaient désormais le long de son corps meurtri par les nombreux coups qu'elle avait subis au cours des derniers jours, tandis qu'elle prenait appui sur le mur pour se redresser. Ses jambes, blessées en maints endroits, la portaient à peine. Elles tremblaient férocement sous elle.

Elle se mordit la lèvre afin de ne pas se remettre à crier. Le moindre de ses mouvements était un véritable supplice. En dépit de cela, elle claudiqua vers Sulfura afin de le libérer à son tour, mais il trouva la force de secouer la tête et de lui indiquer d'un regard qu'il lui fallait fuir plutôt que de le secourir.

- Ne sois pas idiot, tu sais très bien que je ne partirais jamais sans toi.

Puisant dans le peu d'énergie qu'elle parvint à rassembler elle ôta les flèches qui mutilaient son anatomie. Quand il n'y en eu plus aucune pour le maintenir contre la paroi, il s'effondra comme une masse. Aphrodite voulut l'aider à se redresser sur ses serres, mais elle en fut incapable. Il était bien trop lourd et elle bien trop faible.

- Laisse-moi faire.

Les sens de la déesse, troublés par la fatigue qui était la sienne, n'avaient pas perçu l'arrivée de Satan. Elle s'écarta, pantelante, pour lui permettre d'approcher Sulfura. Celui-ci claqua néanmoins du bec lorsqu'il le jugea un peu trop proche de lui. Le Malin répliqua, cynique :

- Si tu comptes sur Apollon pour vous tirer de là, tu peux d'ores et déjà signer ton arrêt de mort.

L'Oiseau échangea un rapide coup d'oeil avec sa maîtresse. Il semblait n'avoir aucune envie de se fier à un Renégat, contrairement à Aphrodite qui tendit aussitôt la main dans sa direction.

- Vas-y. Sors-nous d'ici.
- Sul...
- Je sais que je peux avoir confiance en lui. Il n'est pas malhonnête.

Satan s'apprêtait à saisir ses doigts quand un fracas assourdissant résonna dans la caverne. Une partie du toit s'effondra lorsque Latios passa au travers, propulsé par les attaques combinées de Latias et de Créfadet. Pour une raison inexpliquée, Artémis émergea des décombres, couverte de poussière, en même temps que lui.

- Quoi ? Petite garce, tu as trouvé le moyen de... Satan ? Toi ici ? Peu importe, attrape-la ! Vite !

L'intéressé se figea, sa paume immobilisé à quelques centimètres seulement de celle d'Aphrodite. Les dernières forces de cette dernière choisirent le même instant pour l'abandonner et elle s'écroula à ses pieds sans qu'il n'esquisse le moindre geste pour la rattraper.

Une autre chute survint, celle d'Apollon, qui tomba du plafond au sol de la grotte, un sai planté dans le ventre, l'autre dans l'épaule. Scathach se réceptionna gracieusement à ses côté et tira un katana hors de ses fourreaux. Elle empoigna ensuite la soyeuse chevelure noire du légendaire afin de plaquer sa lame contre sa gorge.

- Cadeau, ma belle ! lança-t-elle à Artémis. Il est à toi.

Elle fit tournoyer son sabre avec dextérité pour en pointer la garde face à la Chasseuse. Elle la caressa sensuellement, s'en saisit, puis effleura la peau de son jumeau à l'endroit exact où coulait la jugulaire. Elle lui infligea une légère entaille, pas assez profonde pour atteindre l'artère.

- J'ai une meilleure idée, susurra-t-elle en éloignant sa lame. Satan ! Emmène-la-moi !

Le katana désignait désormais Aphrodite, qui s'agitait mollement sur le sol en poussant ses petits gémissements. Artémis jubilait devant son allure pathétique. Scathach et elle allaient enfin pouvoir remporter une victoire méritée sur leurs rivaux, après toutes ces années de persécution.

Le Malin, toutefois, ne bougea pas. La Beauté lui lança un regard suppliant, au contraire de la Chasseuse qui le fixait avec une insistance machiavélique. Il hésita longuement, ses yeux noirs passant de l'une à l'autre. Il finit par enjamber le corps de la déesse à ses pieds pour s'interposer.

- Non.
- Je te demande pardon ? hoqueta-t-elle, interloquée.
- J'ai dit non. Garde Apollon, mais laisse-moi Aphrodite.
- Est-tu sérieux ? vociféra à son tour Scathach. Aurais-tu oublié ce qu'elle m'a fait ? Ce qu'elle nous a infligé à tous ?
- Je ne vous demande pas de comprendre, seulement de me laisser faire.
- Il n'en est pas question ! Écarte-toi, Satan. Ne te mets pas en travers de notre chemin ou je te jure que tu vas le regretter.
- Je le regrette déjà.

Ses paroles, empreintes de sincérité, n'atténuèrent pas la rage qui défigurait les traits de ses amies. Malgré la culpabilité qu'il éprouvait, il s'accroupit et glissa un bras sous les jambes d'Aphrodite, l'autre dans son dos, afin de la soulever de terre. Elle était aussi légère qu'un sac de plumes.

- Satan ! Je t'interdis de...
- Je suis désolé, Artémis. Vraiment.
- Tu ne...

La Chasseuse n'acheva pas sa phrase. Il ne lui en laissa pas le temps. Il fondit vers la sortie avant même qu'elle n'ait eu l'occasion de réagir. Lorsqu'elle tenta de l'arrêter, Darkrai se matérialisa afin de l'en empêcher. Ses doigts fantomatiques et crochus se refermèrent sur son épaule pour la retenir.

- Artémis, ne t'en mêle pas.
- Ne pas m'en mêler ? Il ruine mon plan !
- C'est faux. Il te reste Apollon.

Comme un seul homme, ils se retournèrent vers l'intéressé. Il n'était plus sous le joug de Scathach. La guerrière, abasourdie par l'intervention de Satan, avait relâché son emprise sur lui, assez longtemps pour lui permettre de se traîner jusqu'à Latios. Réunis, ils étaient déjà en train de se régénérer mutuellement à l'aide de leurs pouvoirs respectifs.

- Ils vont s'enfuir !

Artémis banda son arc, trop tard. Latios se protégea du tir et répliqua immédiatement par un Lumi-Eclat. Les deux déesses se jetèrent à couvert dans le dos de Darkrai, qui les abrita. Elles furent tout de même éblouies un bref instant, suffisant pour que l'éon et son maître puissent s'enfuir par le plafond.

- Il me reste Apollon, n'est-ce pas ? cracha Artémis.

Elle tira une nouvelle flèche hors de son carquois et s'élança à la poursuite de Satan, Aphrodite et Sulfura, qui venaient juste de se couler en dehors de la caverne. Latias la suivit de près, à l'instar de Scathach, qui freina toutefois au moment d'atteindre l'eau.

Un point noirâtre traversait la surface du lac, créé par le Malin pour permettre à Aphrodite et Sulfura de regagner la rive, car ils n'étaient pas en état de nager. Il les soutenait tous deux, alors qu'ils approchaient de leur destination. Artémis voulut s'engager à leur suite, cependant un Vent Mauvais la dissuada de continuer sa progression.

- Elle l'a envouté, murmura Scathach pendant que la bourrasque menaçante agitait ses cheveux roux. C'est la seule explication.
- Absurde ! Les charmes d'Aphrodite n'ont aucun effet sur lui. Nous l'aurions remarqué depuis longtemps, sinon.

La guerrière esquissa à son tour un pas sur la passerelle. Son équilibre était malmenée par la forte brise, néanmoins elle parvint à le conserver. Elle avança précautionneusement d'un mètre, puis d'un second. Satan, qui les avait ignorées jusqu'à présent, l'observa par-dessus son épaule.

- Scathach, s'il te plaît, ne m'oblige pas à faire cela.
- À faire quoi ?

Un Vibrobscur mesuré s'échappa de l'aura noirâtre qui émanait du Malin de façon à venir le frapper au ventre. En plus de lui couper le souffle, le choc la précipita dans l'eau, dont elle traversa la surface en poussant un hurlement. Oubliant totalement son objectif premier, Artémis se précipita à son secours. Contrairement à son amie qui haïssait farouchement l'élément liquide depuis que Poséïdon avait manqué de la noyer, la Chasseuse était une nageuse hors-pair.

- Pourquoi ? toussota Scathach en regagnant péniblement la plateforme rocheuse où Darkrai les attendait, pendant que Satan disparaissait avec les deux orages. Nous les tenions enfin ! Nous nous apprêtions à prendre un avantage certain dans notre lutte contre Arceus. Pourquoi a-t-il fait cela ?

***
- Pourquoi as-tu fait cela ?

Satan s'était réfugié à quelques kilomètres de là avec Sulfura et Aphrodite, à laquelle il transmettait une partie de son énergie afin de l'aider à se régénérer. En dépit de ses nombreuses blessures, elle faisait preuve du même courage qui l'avait toujours caractérisée.

- Je ne voulais pas que les évènements se déroulent ainsi. Je suis navré qu'ils aient pris cette tournure.
- À quoi d'autre te serais-tu attendu ? Nous sommes toutes et tous de mortels ennemis.
- Il en est ainsi uniquement parce que nous le voulons bien. Je pense qu'il pourrait en être autrement.
- Ce qui s'est passé aujourd'hui tend justement à me démontrer le contraire. Il est impossible que nous agissions jamais dans un but qui ne soit pas celui de nous entretuer. Artémis et Scathach sont déterminées à me détruire et le seul moyen que j'ai de me protéger est de leur couper l'herbe sous le pied.
- Dans ce cas, tu me trouveras toujours en travers de ton chemin.
- Vraiment ? répliqua Aphrodite, les lèvres pincées. S'il en est ainsi, pourquoi avoir pris la peine de me sauver ?
- J'avais une dette envers toi depuis la bataille de la Salle Originelle. Je tenais à m'en acquitter.

La Beauté poussa une exclamation offusquée avant de se remettre précipitamment debout. Grâce à la force vitale transmise par Satan, ses jambes la soutenaient désormais avec davantage d'assurance que précédemment.

- Oh ! Est-ce donc tout ce que je représente à tes yeux ? Une dette ? Et, par conséquent, plus rien ?
- Je t'estime infiniment, Aphrodite. Je...

Elle ne lui permit pas de terminer. Pivotant sur elle-même, elle empoigna les deux pans de longue cape noire qu'il portait pour l'attirer vers elle et lui donner le langoureux baiser qui lui brûlait les lèvres depuis la première fois où elle avait posé les yeux sur lui.

- Je veux bien renoncer à traquer tes amies, à la Confrérie, à tout... lui murmura-t-elle à l'oreille, mais à une condition. Reste avec moi. Abandonnons cette guerre derrière nous et fuyons ensemble quelque part où ils ne nous retrouverons jamais. Rien que toi et moi.

Ce fut le coeur alourdi par la peine que le Malin repoussa ses bras desquels elle avait entouré son cou. Il la fixa d'une expression attristée tandis que ses mains se refermaient sur ses poignets.

- Je ne peux pas. Ce qui s'est produit aujourd'hui ne se réitérera pas, car je suis et je resterai un Renégat. Je ne trahirai pas les miens deux fois.
- Que ne ferais-tu pas pour briller à ses yeux, elle qui ne te voit peut-être même pas depuis le Monde Inversé ! Tu pourrais ramper devant elle qu'elle ne s'en soucierait pas. Je suis là, moi, alors qu'elle va te conduire à ta perte.
- Peut-être. Peu importe. Je désire simplement lui demeurer loyal.
- Parfait ! s'époumona Aphrodite.

Elle arracha ses mains de l'étreinte de Satan et recula férocement d'un pas, les traits tendus par la colère. Sentant sa hargne, Sulfura s'agita également, en léger retrait. Son bec claqua, prêt à pincer.

- Continue à jouer le fidèle Caninos, si tu le souhaites ! Comme tu l'as si bien dit, nous sommes quittes, à présent, alors la prochaine fois que nos chemins auront le malheur de se croiser, n'aies pas pitié de moi, car pour ma part, je n'hésiterai pas. Je vous tuerai tous jusqu'au dernier.

Le temps que l'esprit du Malin s'apaise, suite à ces paroles plus tranchantes que les lames de Scathach, Aphrodite avait disparu, entraînant son Oiseau avec elle. Darkrai et Athéna avaient raison, comme toujours : il n'y avait que des mauvais choix, dans l'existence, et celui de son camp ne se faisait jamais sans remords.