ACE IN THE HOLE !! (OS) de Star-Killer

Parfois, il faut savoir lire entre les lignes.

L'ambiance est tendue dans cette salle aux lumières tamisées. Les deux opposants ne se quittent pas du regard. Chacun jauge l'autre, guettant le moment opportun pour attaquer. Pas encore. Ils réfléchissent tous deux, à une vitesse telle que leur cerveau commence à surchauffer. Surtout lui. Elle, encore, elle a de la marge. C'est bien parti pour qu'elle remporte le match, en tout cas.

Il fait chaud. Très chaud. Mais ce n'est pas la température de la salle qui est trop élevée. Non, leur température corporelle est au-dessus de la moyenne, à cause de la pression incroyable qu'ils subissent. Ils transpirent à grosses gouttes, alors qu'ils sont immobiles. Seuls leurs yeux bougent, scrutant attentivement le corps et les faiblesses de l'autre. Ce serait au plus rapide et au plus intelligent de l'emporter. Ils adorent ce petit jeu, tous les deux. Ils le pratiquent régulièrement ensemble. Et souvent, c'est elle qui gagne. Même si elle le peut, elle ne triche jamais. Question d'honneur, qu'elle dit. Pourquoi pas, après tout ? C'est bien d'avoir des principes. Même si ça peut vous coûter la vie.


Elle, c'est Hyliana. Elle a un peu plus de trente ans. Elle est belle. Très belle. Pas humaine, mais tout de même d'une beauté, d'une grâce... presque surnaturelles. Elle a de grands yeux rouges aux reflets bienveillants, brillant d'intelligence. Sa peau du visage est blanche comme neige. Et douce. Par contre, la peau verte de ses bras est un peu plus rugueuse. Elle porte une très jolie robe blanche qui flotte quand il y a du vent, et sa chevelure verte est coiffée dans un style élégant et peu commun. Il y a comme une excroissance rouge sur sa poitrine relativement opulente. Elle est belle. Très belle.

Comme tous ses congénères, elle a dû passer par plusieurs formes pour atteindre ce stade de beauté exceptionnelle. Au départ, elle est toute petite. Une coupe au bol verte cache la partie supérieure de son visage, et sa robe trop grande traîne par terre. Elle a aussi des excroissances rouges, mais au niveau du crâne. Cette apparence-là ne lui plaît pas trop, mais elle doit s'en accomoder durant toute son enfance.

Puis vient l'adolescence. Elle ressemble beaucoup plus à une jeune fille sous sa seconde forme. Ses grands yeux rouges inquisiteurs peuvent vous fixer pendant de longues minutes. Sa chevelure verte est beaucoup plus longue et elle porte comme une robe de danseuse classique. Elle danse souvent, d'ailleurs. Et elle ne manque pas de grâce dans son domaine. Cette fois, les excroissances rouges sont de chaque côté de son crâne, comme des ornements dans ses cheveux.

Elle passe sa vie dans différents foyers. Le premier est celui de son enfance. Il est étrange. Beaucoup de verdure. Et beaucoup d'enfants qui lui ressemblent, et qui jouent avec elle. Leurs parents sont tous identiques aussi. Les femmes sont d'une grâce hypnotique, et les hommes font un peu peur, avec leurs lames au niveau du coude. Elle a une enfance tranquille et paisible, avec une tribu de ses congénères. Ils vivent tous bien cachés des Hommes, dans une forêt de la région de Hoenn.

Malheureusement, les Hommes réussissent à les trouver. C'est en cherchant quelque chose que par hasard, un groupe de criminels déniche cette petite tribu de Tarsal, de Kirlia, de Gardevoir et de Gallame. Ils voient là une occasion de gagner un peu d'argent. Bien que la vente de Pokémon ne soit pas très bien vue dans la région, ils n'hésitent pas une seconde pour les attaquer. Ce à quoi les Pokémon pacifiques ne peuvent pas répliquer. Mis à part quelques uns des pères de famille, aucun ne sait se battre. Les Hommes ont gagné ; les Pokémon ont perdu. Dans la nature, c'est la loi du plus fort qui prime. Cela a toujours été, et cela sera toujours.

Son deuxième foyer n'est pas très accueillant. En fait, elle est constamment toute seule dans un espace assez restreint. Des barreaux l'empêchent de pouvoir sortir de ce qui ressemble à une boîte de fer. Elle voit les autres, dans la même condition qu'elle. Parfois, un Homme pointe le bout de son nez et repart avec l'un de ses amis. Elle a certes peur pour ceux qui se font prendre, mais elle les envie aussi. Elle veut juste sortir d'ici pour retrouver sa liberté. Et un jour, c'est son tour ; un Homme vient la chercher. Il est grand, il doit avoisiner les quarante ans. Des cheveux blonds comme les blés et des yeux d'un vert étincelant. Il a l'air gentil. En tout cas, ce serait mieux que les junkies crasseux qui la détiennent. Aussi ne proteste-t-elle pas lorsqu'on la vend au riche monsieur.

Son troisième foyer est agréable. Très confortable. Il ne ressemble ni au premier, ni au deuxième. Les pièces sont immenses. On peut même ouvrir et fermer ce qui s'appelle des "portes", dans le langage humain. Au départ, étant donné qu'elle n'a que huit ans, elle ne comprend pas leur façon de parler. Elle ne va s'y mettre que bien plus tard. Au début, elle parvient à se perdre dans son foyer, tant il est grand. Mais le petit garçon l'aide toujours à se repérer. Il est gentil. Comme son père.

Son quatrième et dernier foyer est celui qu'elle préfère. C'est un grand appartement, en plein centre-ville. La baie vitrée offre une vue impressionnante. Mais ce qui compte vraiment à ses yeux, plus que l'immensité des lieux, c'est la compagnie du petit garçon, qui est devenu un homme adulte. Il est toujours gentil, mais un peu distant parfois ; c'est quand il a besoin de travailler. Mais elle l'aime. Et elle sait qu'il l'aime beaucoup aussi.


Lui, c'est James. Il a très exactement trente-trois ans. Il est charismatique et plutôt bel homme. Il a des yeux d'un bleu cristallin, doux et perçants à la fois. Sa peau est plutôt pâle, mais pas au point d'être totalement blanche. Il porte toujours le même genre de vêtements. Chemise blanche, cravate noire, veste noire, pantalon noir, et chaussures, bien entendu, noires. Il est élégant. Ses cheveux blonds sont très clairs, toujours soigneusement peignés. Il a des ornements aux mains. Plusieurs bagues simples mais jolies.

Comme tous ses congénères, il a du passer par plusieurs formes avant de devenir l'homme accompli qu'il est aujourd'hui. Au départ, il est petit. Il n'a pas beaucoup de cheveux et ses grands yeux vous fixent toujours intensément. Il ne peut pas se déplacer tout seul et est constamment avec une belle femme brune, dont les yeux sont identiques aux siens.

Ensuite, il grandit un peu. Il a l'âge de se rendre à l'école primaire. Ses cheveux sont un peu plus foncés qu'avant, et maintenant, il est capable de marcher. Comme sa famille est riche, il n'a pas beaucoup d'amis ; tout le monde le traite comme un snob. Alors il demande à son père de lui acheter un Pokémon rare. Il en obtient un pour ses dix ans. Un joli Tarsal qui ne le quittera plus jamais et qui grandira avec lui.

A son adolescence, il devient plus grand et gagne en maturité. Il n'emmène plus Hyliana au parc de jeux, mais au cinéma. Ils aiment beaucoup les films, tous les deux, et peuvent en discuter pendant des heures. Il sourit beaucoup depuis qu'il la connaît, et ses parents sont très heureux pour lui. Il connaît enfin le bonheur et ne veut pas le perdre.

Lui, il ne passe sa vie que dans deux foyers différents. Le premier, c'est la maison de ses parents. Elle est grande, très grande. Un portail en fer forgé impressionnant décourage les intrus à l'extérieur. Il y a des haies très hautes qui bordent l'allée pour se rendre à l'intérieur. Les pièces sont grandes, très grandes. Deux salons, une cuisine, une salle de repas, une dizaine de chambres... cette maison est trop grande pour trois personnes et un Pokémon, mais il y vit bien.

Son second foyer, il l'aime beaucoup. C'est un grand appartement, en plein centre-ville. La baie vitrée offre une vue impressionnante. Mais ce qui compte vraiment à ses yeux, plus que l'immensité des lieux, c'est la compagnie de sa Tarsal, qui est devenu une magnifique Gardevoir. Elle est toujours un peu timide, mais est très bavarde parfois ; ça l'embête un peu quand il doit travailler. Mais il l'aime. Et il sait qu'elle l'aime beaucoup aussi.


C'est le moment de vérité. Ils transpirent toujours autant. Ils ne se quittent pas des yeux une seule seconde. Ils cherchent une faille chez l'adversaire. C'est maintenant que tout se joue.

D'un mouvement synchronisé, ils abattent leurs cartes sur la table. Ah, elle a encore gagné. Lui n'a qu'une double paire, et elle a une quinte flush au dix. Ils se regardent, se sourient et ramassent les cartes. Tous deux quittent la table de poker dans la bonne humeur, toujours aussi exténués après ce petit rituel du samedi soir.