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Apocalyptica de Drayker



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Informations

» Auteur : Drayker - Voir le profil
» Créé le 20/01/2016 à 23:27
» Dernière mise à jour le 07/11/2017 à 19:09

» Mots-clés :   Drame   Présence de poké-humains   Région inventée   Science fiction   Suspense

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Chapitre 44 : L'odyssée
Joshua resta fixer le cadavre de Saed, immobile, le regard vide. Son regard oscillait entre son canon encore fumant et le trou sanglant que la balle avait laissé dans le front du chef des pillards.

C'était la première fois qu'il abattait un homme désarmé de sang froid.

Qu'était-il en train de devenir ? Saed était une ordure de la pire espèce, il le savait ; et il ne regrettait pas sa mort.

Il avait déjà tué, oui. Des hommes armés, qui l'attaquaient lui, et le canyon ; mais maintenant qu'il avait exécuté impunément un homme désarmé, qu'était-il ? Venait-il de rendre la justice ? Ou alors était-il juste un simple meurtrier ?

Hagard, le jeune homme leva la tête vers Lyrian. Il s'attendait à voir l'hybride afficher son éternel air impassible - mais à la place, il vit le borgne sourire d'un air satisfait.

« C'est bien, approuva son compagnon.
- Bien ? Je viens d'exécuter un homme sans défense.
- Ne t'encombre pas de sentiments inutiles. C'était un danger, tu l'as éliminé. C'est tout.
- C'est peut-être ce que tu te dis, mais je ne suis pas comme toi.
- Ça viendra.
- Non, ça ne viendra pas. » coupa Joshua d'un ton irrité.

Il inspira profondément et ferma les yeux. Une fois de plus, toute la rage et la frustration accumulées pendant les récents événements lui donnaient envie de s'en prendre au monde entier.

Exactement comme quand Jakar a tué Mara.

Le dernier souvenir de sa sœur lui revint en mémoire. Il la revoyait, hurlant de terreur, suspendue dans les airs par la puissance mentale de Jakar.

Joshua secoua aussitôt la tête et chassa l'image de son esprit. Il n'en avait jamais parlé à personne, et ce n'était pas le moment de ressasser d'obscures pensées.

« On va au canyon, décréta-t-il soudain. On prend tout ce qu'on peut, et on se lance à la poursuite de Kate et des autres. On a presque deux jours de retard sur eux. Il faut qu'on bouge. »

~*~
Joshua descendit du fourgon en claquant la porte.

Une immense lassitude s'abattit sur ses épaules lorsqu'il aperçut l'état dans lequel se trouvait le canyon.

Les pillards avaient commencé à réparer la barricade de l'entrée, que les hybrides avaient traversé en camionnette pendant leur fuite de la colonie.

Lyrian, lui, l'avait faite voler en éclats. Des morceaux de palettes et de caisses brisées jonchaient le sable dans un large périmètre, comme s'ils avaient été projetés avec une force inouïe.

Joshua franchit ce qu'il restait du mur qui gardait jadis le canyon, et pénétra dans la colonie, priant pour ne pas revoir d'autres corps mutilés, comme celui d'Élise. Lyrian lui emboîta le pas, silencieux.

Il vit immédiatement les cadavres, et ne put s'empêcher de ressentir un soulagement relatif. Lyrian semblait avoir dit vrai : il avait gardé son self-contrôle.

Les pillards étaient tous adossés aux parois rocheuses du canyon. Leur nuque était parfois tordue ; parfois encore, leurs membres formaient des angles étranges. Tous semblaient avoir percuté la roche de plein fouet, comme repoussés par le souffle d'une explosion.

Thrak et Kate avaient mentionné les corps des autres membres de la colonie, en parlant des profondes entailles que leur avaient faites les Nettoyeurs. Joshua n'aperçut aucun de ces cadavres ; ils avaient probablement été déplacés par les pillards. Visiblement, le groupe de Saed s'était déjà bien installé.

« C'est vraiment toi qui a fait... tout ça ?
- A ton avis ?
- Comment est-ce que tu t'y es pris pour... Non, non, tu sais quoi, je ne veux même pas savoir. »

Joshua secoua la tête et pressa le pas, le visage fermé. Il ne voulait pas s'attarder ici. Ces gens étaient peut-être ses ennemis, mais les voir ainsi joncher le sable de leur sang lui rappelait à quel point son compagnon était dangereux.

Personne ne devrait posséder ce genre de pouvoir, décréta-t-il intérieurement.

La puissance de Lyrian était terrifiante. Joshua ne l'avait toujours pas vu à l'œuvre, mais il le sentait, il la palpait ; c'était presque comme si elle émanait de son compagnon. Pendant ses semaines passées à la colonie, Lyrian avait rapidement fait parler de lui, de par la rapidité à laquelle il avait développé des capacités après son réveil, et de par la diversité de celles-ci.

Mais le Lyrian d'aujourd'hui n'avait plus rien en commun avec l'adolescent perdu et tourmenté que Joshua avait jadis refusé de sauver dans le désert.

Non, le Lyrian d'aujourd'hui était un tueur, froid, implacable. Il avait survécu à la mort, et la mort l'avait changé. Elle en avait fait un monstre.

Un monstre qui était de son côté. Pour l'instant.

~*~
Kate s'assit devant le volant et claqua la porte en soupirant. Elle jeta un regard à Lina, qui regardait par la fenêtre côté passager. L'hybride Métamorph soupira.

Elle avait tenu à voyager avec Lina, ce matin - elle espérait pouvoir la tirer de la torpeur dans laquelle la jeune fille s'était plongée. L'ex-suicidée, déjà dangereusement maigre, ne mangeait que peu, et parlait encore moins. Elle se contentait de marmonner des bonjours et des mercis lorsqu'on l'aidait à marcher, mais impossible de lui tirer un mot de plus. Comme si elle était morte à l'intérieur.

Kate mourrait d'envie de l'aider, d'entamer la conversation, d'aider Lina à surmonter cette épreuve. Elle mourrait d'envie de comprendre ce qui avait bien pu conduire celle qu'elle considérait comme sa petite sœur au suicide ; et par-dessus, elle mourrait d'envie de l'empêcher de recommencer. Mais elle n'avait aucune idée de ce qui traversait l'esprit de Lina. Elle ignorait comment rompre la glace, comment forcer l'enceinte de sa forteresse de silence, comment la tirer -enfin- de son mutisme.

La jeune femme blonde jeta un coup d'œil à la camionnette de Jade et Thrak, devant elles. Elle attendait que leur véhicule démarre avant de partir à son tour.

Voilà deux jours qu'ils suivaient tant bien que mal la route ralliant Salmyre à Omnia - une tâche ardue, compte tenu du fait que le Changement avait considérablement changé la topographie du désert. La voie menant à la capitale était censée être une gigantesque autoroute ; hélas, le vent avait déplacé des dunes entières, le terrain s'était métamorphosé, et l'asphalte avait largement disparu sous le sable balayé par le vent. Il leur arrivait parfois de devoir faire des détours de plusieurs dizaines de kilomètres pour contourner des dunes si pentues que leurs fourgons risquaient de s'y enliser.

Heureusement pour eux, quelques panneaux routiers, qui avaient résisté à l'apocalypse, se dressaient toujours au milieu du désert, tordus et fatigués. Leurs inscriptions, presque effacées par l'abrasion du sable, indiquaient toujours « Omnia », suivi d'un nombre à trois chiffres qui était bien trop gros au goût de Kate. Ces panneaux jonchaient l'ancienne route, et étaient désormais le seul moyen de la suivre sans s'égarer dans l'étendue aride du désert.

En apercevant l'emplacement du bunker, Amara avait décrété qu'il leur faudrait presque une semaine pour l'atteindre. Lorsque Kate l'avait répété à Jade, la jeune fille ne l'avait pas crue ; le bunker, à mi-chemin entre Omnia et Salmyre, n'était qu'à quelques centaines de kilomètres du laboratoire - l'histoire de deux jours de voyage, tout au plus.

Hélas, ils avaient dû reconnaître dès le premier jour que la Dresseuse avait raison. Les problèmes s'étaient multipliés, ralentissant énormément leur rythme.

Le premier était le sable. Plusieurs fois, ils s'étaient enlisés, et n'avaient pu redémarrer que grâce à la force prodigieuse de Thrak, qui était capable, malgré ses blessures, de suffisamment pousser les fourgons pour qu'ils puissent repartir. Afin d'éviter ce genre de malencontreux incident, ils avaient décidé de rouler à vitesse réduite, ne dépassant guère les vingt kilomètres à l'heure. C'était lent, certes, mais c'était le seul moyen de rouler dans ce genre de terrain. Et puis, une allure réduite diminuait leur consommation d'essence, ce qui ne pouvait qu'être bénéfique au vu de leurs réserves.

Mais le sable n'était pas leur seul problème. Il y avait également la chaleur - elle devenait insoutenable dès le milieu de matinée. Au zénith, il suffisait de s'exposer une dizaine de minutes pour écoper d'un douloureux coup de soleil ; et plus ils s'enfonçaient dans le désert, plus la température montait. A en croire la vieille carte dont ils disposaient, ils devraient pourtant approcher de l'extrémité nord du désert. Et malgré tout, la chaleur ne faisait qu'augmenter.

Dès le premier jour, ils avaient eu la désagréable surprise de constater que le soleil cuisant faisait surchauffer les moteurs de leurs véhicules, à tel point qu'il était impossible de rouler aux alentours de midi. Aucun d'entre eux ne s'y connaissait en mécanique, mais il était évident, au vu des voyants rouges qui s'allumaient sur le tableau de bord, qu'il était trop dangereux de rouler sous une température pareille.

Alors, le groupe s'était résolu à s'arrêter, chaque jour, jusqu'à ce que la chaleur daigne baisser suffisamment pour qu'ils puissent repartir. Ils roulaient souvent de nuit, profitant de la fraîcheur relative pour gagner quelques kilomètres. Hélas, ni Thrak ni Lina n'étaient en assez bonne forme pour encaisser autant de nuits blanches, et Jade et Kate ne pouvaient compter sur personne pour les relayer au volant, aussi étaient-elles limitées dans leur avancée.

Ces multiples contretemps les ralentissaient énormément, et Kate, bien qu'elle n'en fasse part à personne, commençait à craindre que leurs vivres s'épuisent avant qu'ils n'arrivent à destination. D'après ce qu'elle se rappelait du plan affiché par I.H.M., et au vu de ce qu'indiquait leur carte, il leur restait peut-être quatre ou cinq cent kilomètres à parcourir, ce qui leur prendrait au moins deux jours supplémentaires. Sans compter qu'il leur faudrait probablement tourner en rond un bon moment avant de trouver le fameux bunker - s'il existait.

Kate ne pouvait s'empêcher de se demander s'ils n'auraient pas mieux fait de fuir ailleurs, vers le sud, ou vers les montagnes. Fuir les Nettoyeurs, fuir cette chaleur intolérable, qui les trempait de sueur et leur brûlait la peau.

Et si elle les avait tous condamnés en les emmenant à travers le désert, vers un prétendu bunker dont ils ne connaissaient rien ? Et si I.H.M. leur avait joué un dernier tour, en leur faisant miroiter un maigre espoir de rédemption, pour qu'ils se laissent happer par la gueule vorace de la mort plus aisément ?

« Kate ? » fit soudain Lina.

La voix de la jeune fille était rauque, desséchée, probablement à cause des longues heures de silence auxquelles elle s'astreignait. Tirée de ses pensées, Kate jeta un coup d'œil en coin à sa passagère. Lina lui tournait le dos et, par la vitre, se déhanchait pour fixer un point derrière eux.

« Kate, il y a un problème, la pressa-t-elle.
- Qu'est-ce qu'il y a ?
- Regarde dans le rétro. »

L'hybride jeta un regard à son rétroviseur et fronça les sourcils, perplexe.

Loin derrière eux, à plusieurs centaines de mètres, une sorte de nuage de poussière semblait les suivre.

« Merde, jura Kate. Pas ça. Pas maintenant.
- C'est pas une tempête de sable, avertit Lina.
- Je sais. Il faut avertir les autres. »