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J.K. JAMESON (and all these others) de BioShocker



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Informations

» Auteur : BioShocker - Voir le profil
» Créé le 30/12/2015 à 19:14
» Dernière mise à jour le 30/12/2015 à 19:15

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001 : I ain't no senator's son, so what ?
"Yeah!
Some folks are born silver spoon in hand
Lord, don't they help themselves, oh
But when the taxman comes to the door
Lord, the house looks like a rummage sale, yes "
- Fortunate Son, Creedence Clearwater Revival



John K. Jameson.


A table, l'ambiance est plus pourrie que jamais. Les seules conneries qui passent à la télé n'aident pas beaucoup non plus... De toute façon, à quoi je m'attendais ? Je passe une journée affreuse depuis ce matin, alors je suis plus à ça près. Rachel a déjà terminé ses légumes. Je sais pas pourquoi, mais j'ai l'impression que les végétariens, en plus de manger toujours la même chose, prennent des quantités vachement réduites. Je me fais sûrement des idées, mais cet espèce de préjugé me quitte plus. Oh, et puis qu'est-ce que j'en ai à foutre, de toute façon...

J'arrête de regarder ma femme et je fixe mon regard sur l'assiette en porcelaine en face de moi. C'est débile de dire que le poisson qui s'y trouve semble me regarder de haut, surtout qu'il n'a plus un seul œil, mais je me sens tellement misérable que c'est l'impression qu'il me donne. Saloperies de problèmes... et puis Rachel n'a pas dit un mot depuis le début du repas. Pour être rassurante, elle est douée... peut-être que mon fils aura l'air plus compatissant aujourd'hui. Je me tourne vers lui. Raté. Lui aussi a le nez dans son assiette, et il regarde son poisson exactement comme je le regardais il y a une minute. Toby n'a jamais été un ado bavard, mais là, c'est certain, il a un souci. Pour changer. On est jamais satisfaits dans cette famille. Rachel finit par briser le silence - cet horrible, affreux et oppressant silence.

- Chéri, comment s'est passée ta journée ?

Son ton est calme, doux, presque hésitant. Elle a bien dû sentir que j'étais remonté contre le monde entier. Pour changer. Je scrute encore ce foutu poisson dans mon assiette. Ou je reste comme ça, ou je lui raconte ma journée de merde. La seconde option semble moins... ridicule.

- Je nage dans les problèmes. Cette idiote de secrétaire... elle m'a prévenu qu'aujourd'hui pour ce tournoi à Sinnoh. On n'a personne pour couvrir l'événement. Tu parles d'une nouvelle...

Je lui ai parlé plus violemment que je le souhaitais. J'ai envie de m'excuser, mais je suis pas d'humeur, alors je laisse couler, tout en sentant son regard vert réprobateur sur moi. Merde, je me comporte vraiment comme un con quand j'ai des problèmes. Des foutus problèmes qui me dépassent. J'entends Toby quitter la table et monter dans sa chambre. Et voilà que je comprends même plus mon propre gamin. Il a peut-être dix-neuf ans, mais j'ai l'impression d'être un père merdique. Sans doute que je le suis. Après tout, j'ai même pas le courage de lui demander ce qui va pas.

- Et pour ce tournoi, qu'est-ce que tu vas faire ? Y aller toi-même ?

Elle me demande ça le plus tranquillement du monde. J'admire vraiment sa capacité à rester calme en toute circonstance.

- Est-ce que j'ai le choix... je réponds, pas convaincu.

Elle hausse les épaules. Je ne la regarde pas, mais je sais qu'elle le fait. Je la connais par cœur. Elle doit sourire légèrement et avoir les sourcils froncés en ce moment.

- On a tous le choix, John. Ce tournoi Pokémon, c'est l'événement de l'année. Pense au succès que ton journal gagnera si tu publies des articles à ce sujet ! Tous ceux qui n'ont pas eu l'occasion d'y aller vont se ruer dessus pour tout savoir.

Je hoche la tête. Elle a peut-être bien raison. Aller à Sinnoh... j'admets que ça me branche pas particulièrement, mais je suis l'un des seuls du journal à avoir les moyens de me payer le voyage. Les prix sont devenus exorbitants depuis l'annonce de ce tournoi débile, et y'a plus grand monde qui peut y aller en ce moment. Je me demande pourquoi les combats Pokémon dans une arène excitent tellement les foules... enfin. Je décide d'arrêter de regarder ce fichu poisson et de faire face à Rachel. Question de dignité. Elle passe sa main dans ses longs cheveux bruns sans cesser de sourire. Elle cherche quelque chose à dire ?

- Je pourrai pas y aller tout seul, à ce tournoi. On doit être au moins trois ou quatre pour être certains d'avoir assez d'infos... et puis ça me gave vraiment. Je déteste les tournois Pokémon.

Elle hausse les épaules et vide son verre de vin rouge.

- Je doute que tout ce qui apparaisse dans ton journal t'intéresse, de toute façon. Tout ce qui touche à la mode, par exemple...

J'admets qu'elle a raison. Tous ces événements relatifs à la mode, comme les défilés... ça m'ennuie, mais des articles à propos de ces conneries apparaissent plus ou moins fréquemment dans les pages du Daily Filler. J'ai pas à me voiler la face ; je vais devoir y aller, à ce tournoi, ou sinon les ventes vont baisser. Et je peux pas me le permettre. J'ai une famille à nourrir. Certes, on a beaucoup d'argent, mais on ne sait jamais ce que nous réserve le cours de la bourse. Ces enfoirés de courtiers qui jouent avec les chiffres ont tôt fait de nous causer une crise économique, et ce même si on est la première puissance de l'archipel Pokémon...

- Okay, je vais y aller. Je sais que tu préfères largement que je m'investisse dans mon boulot... mais, et toi ? Et Toby ? Je vais pas vous laisser tout seuls...

Voyant qu'elle fronce les sourcils, je me reprends.

- Je sais que tu travailles et que tu peux parfaitement t'occuper de la maison, bien mieux que moi, c'est sûr. Mais je connais bien ta tendance à t'inquiéter à l'excès, et...

J'ose pas trop lui dire que moi aussi, je m'inquiéterais à l'excès si elle reste là. Elle le sait probablement. Elle se ressert un verre, le vide d'un coup, et sourit franchement.

- Eh bien on t'accompagnera. J'adore voyager, tu le sais bien, j'ai toujours voulu voir Rivamar. Et puis ça fera du bien à Toby, il est sur les nerfs en ce moment.

Convaincu, j'acquiesce. Pourquoi pas, après tout ? J'ai juste à convaincre mes employés les plus fortunés de m'accompagner, et tout pourra enfin rentrer dans l'ordre.


*
* *


Beck - Go It Alone (lien YouTube)

Ce matin, je quitte la maison, serein. Beaucoup plus que la veille, en tout cas, même si je reste un peu nerveux. Les rues polluées de Volucité me semblent plus accueillantes que jamais. Sûrement parce que je vais bientôt les quitter pour Sinnoh. Une région qui ne m'a jamais attiré. On raconte tout un tas de conneries là-bas, comme quoi un Dieu Pokémon aurait façonné le monde. D'accord, j'aime bien les Pokémon. Mais de là à les vénérer, y'a tout un monde. Et puis les légendes, ça n'a jamais été mon truc.

Je marche rapidement dans la ville animée. Le vent est plus puissant que d'habitude, et ça me perturbe sérieusement, mais je garde mon calme. J'en ai marre de m'énerver tout le temps, et je sais que ça plaît pas à Rachel. J'ai tendance à être... incontrôlable, parfois. Je passe devant tout un tas de commerces. Une boutique de légumes, un coiffeur, un hôtel de luxe... je fais même plus attention à ce qui m'entoure, et c'est une vraie bouffée d'air chaud qui m'envahit quand je passe la porte de l'immeuble du journal. Je salue vite fait les quelques employés que je croise et m'installe dans mon bureau, sortant ma Léopardus, Hilda, de sa Pokéball. Elle adore se coucher là, alors pourquoi l'en priver...

Je tarde pas à convoquer ma secrétaire personnelle. Cette brune désordonnée ne m'inspire pas tellement confiance. Son regard est constamment fuyant. J'ai l'impression de lui faire peur, parfois. Elle arrive dans mon bureau et bredouille à moitié :

- Que puis-je pour vous ?

Je prends mon temps. J'aime pas trop précipiter les choses. Je sors le paquet de cigarettes qui est rangé dans mon bureau. Merde, il est presque vide. Pendant que j'allume une clope, je la regarde du coin de l'œil. Elle a pas l'air d'avoir bien dormi. J'y suis peut-être allé un peu fort, hier soir, avant de quitter le bureau. Elle n'avait qu'à faire son boulot, après tout.

- Bon. Ramenez-moi votre mari aussi vite que possible, j'ai à lui parler. A vous aussi. Et puis amenez Gesfeld tant que vous y êtes. Ne traînez pas, c'est important.

J'insiste bien sur ces deux derniers mots. Elle hoche nerveusement la tête et s'en va remplir sa tâche. Le silence regagne sa place. C'est moins oppressant qu'à la maison, mais pas plus agréable. J'aurais peut-être dû apporter une bouteille de scotch ou de vodka. J'en ai bien besoin, là, maintenant. La secrétaire - j'ai toujours du mal à me souvenir de son prénom, c'est fou - revient avec les deux hommes que je lui ai demandé d'amener.

Le premier, c'est son mari. Dimitri Leonid. Le rédacteur en chef pour la section politique. Autant dire que ce qu'il écrit, c'est généralement un ramassis de conneries. Il en a lui même pleinement conscience, mais ça fait vendre. Le peuple aime qu'on critique les dirigeants. Je sais pas pourquoi. J'ai jamais vraiment compris quelle en est la raison, mais je peux pas encadrer ce type. Il fait trop sérieux et bien élevé, avec son costume trois-pièces impeccable. C'est juste un rouquin avec des tâches de rousseur comme un autre, l'argent en plus. C'est peut-être ce qui a attiré sa femme, après tout.

L'autre est un employé à mi-temps. Oswald Gesfeld, je crois savoir qu'il est médecin, mais il doit à peine être plus âgé que mon fils. Vingt-et-un ou vingt-deux ans, sûrement. Une sorte de surdoué. Il m'est déjà plus sympathique que Dimitri - ce qui n'est pas difficile. Un brun aux yeux bleus en costume noir, qui passe inaperçu parmi tous les employés. A l'exception du fait que c'est un petit génie des échecs et qu'il reste invaincu ici. Mis à part ça, le journalisme ne semble pas vraiment l'intéresser.

Elsa - j'ai enfin retrouvé son nom, à celle-là - me regarde bizarrement, attendant sans doute que je dise quelque chose. Elle a l'air de flipper constamment. Je devrais songer à la changer de poste, peut-être qu'elle se détendra un peu...

- John, dites-nous donc ce que vous voulez. J'ai un article à corriger pour tout à l'heure et ce boulot ne se fera pas tout seul, souffle Dimitri.

Je me retiens d'engueuler ce rouquin qui me tape sur les nerfs. J'ai pas besoin de ça. Pas aujourd'hui.

- C'est à propos du tournoi qui a lieu à Sinnoh et qui commence dans une semaine. Vous savez bien que je n'ai trouvé personne pour y aller à cause des prix exorbitants des trajets en avion...

Tous les trois hochent la tête. Bon. La partie la plus délicate, maintenant.

- Et donc, j'ai décidé d'y aller moi-même, mais j'ai besoin d'au minimum trois personnes pour m'accompagner, histoire de récolter un maximum d'infos. Et comme vous êtes parmi les seuls à être suffisamment riches pour vous payer le voyage...

- On va venir avec vous, suppose Oswald.

Dimitri et Elsa se regardent, étonnés, puis acquiescent. Ils ont l'air d'être d'accord, c'est déjà ça de pris.

- D'accord. On vous accompagne, annonce finalement le rouquin.

Je souris et les renvoie à leur poste. Pour une fois que ce crétin de rédacteur en chef ne m'énerve pas assez pour me faire crier...


*
* *


A la vue de tous les paquets de cigarettes que j'ai entassés dans ma valise, Rachel secoue la tête. Elle a jamais aimé cette mauvaise habitude, mais s'en accomode. C'est pas comme si je pouvais arrêter, de toute façon. Une fois que Toby et elle sont prêts, on prend la voiture en direction de l'aéroport international de la ville.

Le voyage en avion est des plus éprouvants. On a beau être en classe économique - les prix de la première classe sont vraiment exorbitants -, je m'attendais à un service correct. Mais les hôtesses sont à moitié endormies et nous apportent du café trop chaud ou bien trop froid. Je sens que ce séjour va être vraiment génial...

On arrive à l'aéroport d'Unionpolis vers vingt-deux heures. Je suis épuisé et je tiens à peine debout. Le trajet en taxi est atroce. Les sièges sont inconfortables, mais je n'ai pas la force de râler. A peine arrivé dans la chambre d'hôtel que je vais partager avec Rachel, je m'écroule sur le lit. J'espère que mes rêves ne seront pas remplis d'avions et de taxis, j'ai eu mon compte pour la journée.